Zitierhinweis Amalvi, Christian: Rezension über: Matthias Steinbach / Uwe Dathe (Hg.), Alexander Cartellieri. Tagebücher eines deutschen Historikers. Vom Kaiserreich bis in die Zweistaatlichkeit (1899–1953), Berlin: De Gruyter, 2014, in: Francia-Recensio, 2016-1, 19.-21. Jahrhundert - Époque contemporaine, heruntergeladen über recensio.net First published: http://www.perspectivia.net/publikationen/francia/francia... copyright Dieser Beitrag kann vom Nutzer zu eigenen nicht-kommerziellen Zwecken heruntergeladen und/oder ausgedruckt werden. Darüber hinaus gehende Nutzungen sind ohne weitere Genehmigung der Rechteinhaber nur im Rahmen der gesetzlichen Schrankenbestimmungen (§§ 44a-63a UrhG) zulässig. Francia-Recensio 2016/1 19.‒‒ 21. Jahrhundert Époque contemporaine Matthias Steinbach, Uwe Dathe (Hg.), Alexander Cartellieri. Tagebücher eines deutschen Historikers. Vom Kaiserreich bis in die Zweistaatlichkeit (1899± 1953), Berlin, New York (De Gruyter) 2014, 980 S., 7 Abb. (Deutsche Geschichtsquellen des 19. und 20. Jahrhunderts, 69), ISBN 978-3-486-71888-1, EUR 148,00. rezensiert von/compte rendu rédigé par Christian Amalvi, Montpellier C'est un document exceptionnel que publient les éditions Oldenburg de Munich. Exceptionnel, il l'est à plusieurs titres. En premier lieu, en raison de sa longueur: démarrant en janvier 1899, un an après la mort de Bismarck, le journal s'arrête en décembre 1953, quelques mois après la disparition de Staline. Il couvre ainsi plus d'un demi-siècle d'une histoire particulièrement dense et tragique pour le monde, l'Europe en général et l'Allemagne en particulier, dont la chronique est tenue par un observateur très compétent en raison de son immense culture historique. Il l'est ensuite à cause de son foisonnement narratif. Alexander Cartellieri, dont les centres d'intérêt sont multiples, ne se contente pas de raconter dans une langue classique et élégante, de manière linéaire, sa vie de professeur d'université et d'exprimer de manière personnelle son opinion sur les événements cruciaux qu'il est en train de vivre, notamment les deux conflits mondiaux, dans lesquels ses fils sont impliqués, mais dont il est le spectateur très attentif. À la suite des considérations intellectuelles, professionnelles et politiques de haute volée, il peut, dans le paragraphe suivant, évoquer avec beaucoup de sensibilité sa vie de famille, son amour pour sa femme, ses enfants, ses animaux familiers, puis, avec lyrisme, les émotions ressenties lors d'une excursion dans les Alpes bavaroises ou pendant la visite de la Pinacothèque de Munich ou tout simplement ce qu'il éprouve en contemplant son jardin au printemps. C'est ce mélange volontaire de remarques concrètes, voire triviales, d'épanchements personnels, de développements érudits et d'opinions politiques tranchées qui fait le prix d'un tel ouvrage: il constitue réellement le reflet passionnant d'une longue vie saisie dans son mouvement subjectif, au jour le jour. Cependant son intérêt majeur me semble résider dans deux autres points essentiels: il rend compte de manière très complète des étapes scientifiques de l'existence d'un universitaire allemand pendant plus d'un demi-siècle, depuis sa formation académique à Heidelberg en 1898 jusqu'à sa retraite en 1935 et présente, tout au long de sa carrière universitaire à Iéna, l'horizon intellectuel et culturel d'un érudit très cultivé à l'apogée de l'Empire de Guillaume II, dont il soutient les objectifs politiques; il permet enfin et surtout de disposer d'un témoignage saisissant sur l'évolution idéologique d'un savant, aux idées libérales, conservatrices et nationalistes, qui, au début des années trente, bascule délibérément dans l'adhésion sinon à l'idéologie nationale-socialiste, du moins dans le culte sincère et exclusif du Führer. Pourquoi et comment en est-il arrivé là, c'est ce que ce journal unique permet de Lizenzhinweis: Dieser Beitrag unterliegt der Creative-Commons-Lizenz Namensnennung-Keine kommerzielle Nutzung-Keine Bearbeitung (CC-BY-NC-ND), darf also unter diesen Bedingungen elektronisch benutzt, übermittelt, ausgedruckt und zum Download bereitgestellt werden. Den Text der Lizenz erreichen Sie hier: https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/ mieux comprendre¼ Si le journal n'évoque pas les années de formation universitaire à Tübingen, Leipzig et Berlin, où il fut initié par Paul Scheffer-Boichhorst à la rigoureuse maîtrise des sources d'histoire médiévale, il permet en revanche de suivre sa carrière de professeur à Iéna de 1902 à 1935. Influencé par les travaux des maîtres de la recherche allemande Mommsen, Ranke, Droysen, Dilthey, entre autres, Cartellieri, dont le sujet d'habilitation à Heidelberg a porté sur le règne du monarque français Philippe-Auguste, dont il devient un spécialiste reconnu et auquel il consacre ensuite une biographie érudite, inscrit ses recherches dans une perspective d'histoire universelle au Moyen Âge de la fin de l'Empire romain à l'affirmation de la Réforme, en privilégiant les relations conflictuelles entre l'Empire et la papauté et les Croisades, ce qui révèle un projet scientifique très ambitieux. Pour l'accomplir, il dispose cependant de solides atouts: outre sa formation académique reçue dans les prestigieux séminaires d'outre-Rhin, probablement les meilleurs centres de recherche philologique en Europe, où viennent s'instruire des étudiants français (normaliens et chartistes), il maîtrise les principales langues culturelles de l'Europe: le français (il a séjourné douze ans à Paris où son père travaillait pour la banque Ephrussi), l'italien (il lit couramment »La Divine Comédie« de Dante dans sa langue d'origine), l'anglais (il est familier des tragédies de Shakespeare), l'espagnol (il lit Cervantès à livre ouvert). Lecteur boulimique ± »Bücher, Bücher, Bücher rasch und jederzeit zur Hand« (p. 427), ± il constitue au cours de son existence une bibliothèque de travail d'une ampleur inattendue pour un particulier, qui atteint 18 000 volumes. Enfin, s'il n'a pas d'affinité pour les théories générales ± les livres de Bergson le touchent, mais il trouve ses idées trop abstraites ±, il plaide de manière très originale pour une alliance entre l'histoire et la littérature, idéal qui se traduit par d'immenses lectures érudites et romanesques, dont le journal porte la trace stimulante. Non seulement il connaît parfaitement les travaux des plus brillants maîtres des sciences sociales en Allemagne ± Werner Sombart, Max Weber, qu'il a croisé à Heidelberg ± et les chefs-d'úuvre de la littérature germanique contemporaine, ceux de Carl Spitteler, Thomas Mann, Rudolf Eucken, qui est un de ses collègues à Iéna, mais il n'ignore rien non plus des publications savantes des érudits français et des productions littéraires parisiennes: il a ainsi lu les travaux de Joseph Bédier sur »Tristan et Isolde« et tous ceux des enseignants de la Nouvelle Sorbonne et de l'École des chartes. Sa connaissance des dernières nouveautés romanesques est telle qu'il évoque même, en 1912, les »Filles de la pluie. Scènes de la vie ouessantine« d'André Savignon, lauréat du prix Goncourt cette année-là qu'on ne lit plus guère aujourd'hui. Ces savants français et belges, dont il possède les éditions de textes, il les rencontre aussi lors d'un congrès international des sciences historiques qui se tient à Paris dans le cadre de l'Exposition universelle de 1900. C'est notamment le cas de Gabriel Monod, une des principales figures de proue de la recherche historique française. Il dialogue aussi avec Charles Bémont et Henri Hauser à un autre congrès historique qui se tient à Oxford en 1913. D'autre part, en le suivant à Rome, en 1912, où il travaille à l'Institut historique prussien, on peut Lizenzhinweis: Dieser Beitrag unterliegt der Creative-Commons-Lizenz Namensnennung-Keine kommerzielle Nutzung-Keine Bearbeitung (CC-BY-NC-ND), darf also unter diesen Bedingungen elektronisch benutzt, übermittelt, ausgedruckt und zum Download bereitgestellt werden. Den Text der Lizenz erreichen Sie hier: https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/ mesurer la puissance et le rayonnement de la recherche scientifique allemande à l'étranger. Son bibliothécaire dispose en effet d'un budget 15 000 marks par an pour enrichir la bibliothèque et mettre à la disposition des lecteurs 180 périodiques à jour. La lecture des publications étrangères, en histoire comme en littérature, est une telle nécessité pour lui que, juste après la Grande Guerre, il souffre énormément de l'effondrement de la monnaie ± »aber Geld, Geld, Geld« (p. 549) ±, qui l'empêche de pouvoir passer commande de livres récents en Allemagne et en France: »Wenn ich nur französische Bücher bekommen könnte!« (1er octobre 1922, p. 465). Dès que la situation économique s'améliore, on le voit reprendre ses lectures françaises récentes: »Les Faux-Monnayeurs« d'André Gide, »La Prisonnière« de Marcel Proust, qui lui semble par son flou littéraire l'antithèse absolue de la clarté classique française, »Le Grand Troupeau« de Jean Giono, dont le sombre réalisme ne le séduit pas. Cependant, à cette date, c'est surtout la situation dramatique de l'Allemagne qui le préoccupe le plus. On pourrait, sur le plan chronologique, découper la longue durée de son »Journal« en trois séquences successives: de 1899 à 1919; de 1920 à 1933; de 1933 à 1953. Dans la première, on relève la bonne conscience d'un nationaliste convaincu du bon droit de l'Allemagne dans le déclenchement de la Grande Guerre et pendant sa conduite. Le sort tragique de la Belgique, dont la neutralité inscrite dans les traités diplomatiques a été cyniquement violée par l'Allemagne impériale, ne l'émeut guère. Devant la rapidité de l'avancée des troupes allemandes sur le front français, il imagine déjà de substantielles annexions au Reich ± Belfort, les crêtes des Vosges, une partie de l'empire colonial (Congo, Maroc, etc.) ± et rêve de la reconstitution de ce qui est probablement, chez lui, le Saint-Empire romain germanique: »Wir müssen überall zurück zum alten Reich« (p. ▄, mars 1915). Chaque annonce de victoire ± la prise d'Anvers en octobre 1914 et celle de Vilnius en septembre 1915 par exemple ± est célébrée par lui dans son »Journal«.
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