Succès De La Reproduction Et Taux De Survie Du Gobemouche Noir Ficedula Hypoleuca Dans L’Ouest De La Suisse, En Marge De Son Aire De Répartition

Succès De La Reproduction Et Taux De Survie Du Gobemouche Noir Ficedula Hypoleuca Dans L’Ouest De La Suisse, En Marge De Son Aire De Répartition

SUCCÈS DE LA REPRODUCTION ET TAUX DE SURVIE DU GOBEMOUCHE NOIR FICEDULA HYPOLEUCA DANS L’OUEST DE LA SUISSE, EN MARGE DE SON AIRE DE RÉPARTITION PIERRE-ALAIN RAVUSSIN,DANIEL ARRIGO,MICHAEL SCHAUB &ALEXANDRE ROULIN .-A. Ravussin P Gobemouche noir Ficedula hypoleuca mâle. Baulmes VD, 5 juin 2006. En Suisse romande, le Gobemouche noir atteint la limite ouest de son aire de répartition centre européenne et, dans le nord du canton de Vaud, il n’est présent, en tant que nicheur, que depuis la deuxième moitié du XXe s. Les populations installées à Baulmes et sur la rive nord du lac de Neuchâtel font l’objet de suivis à long terme, dont les résultats mettent en évidence l’importance relative du succès de reproduction, du taux de survie et du taux d’immigration dans leur maintien. Le Gobemouche noir a connu une phase secteurs a incontestablement favorisé l’établis- d’expansion remarquable dans le nord du sement durable de populations. Toutefois, canton de Vaud entre les années 1965 et cette condition sans doute nécessaire pour son 1985. Avant 1965, il était absent de cette installation n’est pas suffisante, comme en région en tant qu’espèce nicheuse. Poursui- témoigne l’absence d’établissement dans d’au- vant une expansion vers l’ouest, il s’est d’abord tres réseaux de nichoirs posés de longue date installé près de Grandson VD en 1967 (SERMET dans des endroits distants d’à peine quelques 1968), puis dans la région de Baulmes VD à dizaines de kilomètres, comme par exemple partir de 1974 (RAVUSSIN &NEET 1995). La mise dans les régions de Cossonay VD ou de en place de réseaux de nichoirs dans ces Lausanne VD. Ces secteurs sont pourtant régu- NOS OISEAUX 54 : 29-40 – 2007 systématique de tous les jeunes, ainsi que de la plupart des adultes qui nourrissent. Un travail identique est effectué depuis 1988 pour la population suivie sur la rive nord du lac de Neuchâtel. Ces suivis à long terme, uniques en Suisse pour cette espèce en marge de son aire de répartition (GLUTZ VON BLOTZHEIM &BAUER 1993), se poursuivent encore à l’heure actuelle. L’analyse détaillée des paramètres de la nidifica- tion de ces deux populations devrait permettre de mettre en évidence quelques facteurs clés permettant d’en appréhender l’évolution. wisstopo D’un précédent travail (RAVUSSIN &NEET © s 1995), il ressortait que la population de Gobe- Fig. 1 – Localisation des deux populations mouche noir de la région de Baulmes, à 650 m étudiées. d’altitude au pied du Jura, avait une période de ponte relativement tardive par rapport à ce qui lièrement visités par des oiseaux migrateurs, prévaut dans d’autres populations du centre nombreux entre mi-avril et mi-mai. Des chan- de l’Europe. Cette date de ponte est étroite- teurs s’y manifestent chaque année, mais la ment corrélée à la grandeur de ponte, avec nidification reste l’exception. une diminution d’environ un œuf en deux Cette situation a changé depuis le début de semaines. Cela affecte négativement la la dernière décennie du XXe s. L’expansion qui productivité de cette population. Cette donnée avait caractérisé l’espèce depuis plus d’une est même fondamentale pour le Gobemouche vingtaine d’années semble s’être alors inter- noir qui, contrairement à la plupart des autres rompue et le suivi de certaines populations espèces de Passereaux, n’a qu’une seule ponte montre que les effectifs de nicheurs sont au annuelle dont la grandeur est plutôt faible. mieux restés stables, mais, plus souvent, ont Dans la région de Corcelles-près-Concise, la chuté de manière parfois importante (RAVUSSIN date de ponte pourrait être plus précoce étant &NEET 1995; SCHMID et al. 1998; J. Trüb, donné que cette population est située à une comm. pers.). altitude plus basse (430 m), ce qui pourrait Ce travail a pour but d’analyser les paramèt- contribuer à légèrement augmenter la gran- res locaux de la nidification et de la survie de deur de ponte. La population est moins isolée, deux populations suivies de manière détaillée proche d’autres populations établies plus à depuis de nombreuses années. Il s’agit de la l’est. Des nidifications sporadiques ont population de Baulmes VD, en déclin marqué d’ailleurs été constatées sur l’ensemble de la depuis la fin des années quatre-vingt et de celle rive nord-est du lac de Neuchâtel. établie dans les réseaux de nichoirs de la rive nord du lac de Neuchâtel, sur les communes Zone d’étude d’Onnens VD, Corcelles-près-Concise VD et Bonvillars VD qui, elle, maintient plus ou moins Les deux populations sont localisées à l’ouest ses effectifs. Le but de ce travail est d’analyser de la Suisse, dans le nord du canton de Vaud la dynamique et la survie de ces deux popula- (fig. 1). Celle de Baulmes (46°47’N / 6°32’E) tions afin de mettre en évidence d’éventuelles occupe une surface d’environ 100 ha autour du différences. A Baulmes, la population nicheuse village, à une altitude comprise entre 600 et est isolée 15 km environ à l’WSW des popula- 700 m environ. Le nombre de nichoirs installés tions les plus proches et les jeunes ont été sur cette surface a varié de 20 jusqu’en 1979 à bagués en nichoirs dès 1978. A partir de 1980, plus d’une centaine dès 1986 (tabl. 1). Ils sont un programme d’étude et de baguage a été placés pour la plupart en lisière de forêt, le long initié. Les nichoirs ont été visités de manière de haies, dans des bosquets ou sur des arbres beaucoup plus systématique dans le but de isolés bordant des prairies permanentes, ou déterminer les principaux paramètres de la nidi- encore dans des vergers à haute tige. Une ving- fication (date et grandeur de ponte, taux taine de nichoirs supplémentaires ont été instal- d’éclosion, succès d’élevage) avec le baguage lés et contrôlés entre 1984 et 1998 aux alen- 30 Ravussin, P.-A. et al.: Succès de reproduction et taux de survie du Gobemouche noir tours du village de Vuitebœuf VD, situé à 3 km La date de ponte du premier œuf est déter- au nord-est de Baulmes. minée à partir du nombre d’œufs des pontes Sur la rive nord du lac de Neuchâtel, le encore incomplètes, en tenant compte de la réseau de nichoirs est installé dans des ripisyl- ponte d’un œuf chaque jour (LUNDBERG & ves et des parcs. Il occupe une surface d’envi- ALATALO 1992). S’il n’a pas été possible de le ron 20 ha répartis sur 2,7 km de rive, sur les faire lors de la ponte, la date du début de communes d’Onnens VD, de Bonvillars VD et ponte est déduite à partir de l’âge des jeunes de Corcelles-près-Concise VD (46°50’N / en tenant compte d’une durée d’incubation 6°42’E), à une altitude de 430 m. Son suivi a moyenne de 14 jours (RAVUSSIN &NEET 1995). débuté en 1986, pour quelques nichoirs d’On- La grandeur de ponte est définie lors de la nens, puis s’est étendu à Corcelles-près- tentative de capture de la femelle après au Concise l’année suivante et est devenu exhaus- moins 10 jours d’incubation. Le nombre de tif dès 1988. La différence d’altitude entre les jeunes éclos est déterminé lors de l’installation deux sites d’étude implique une différence de du piège pour la capture du mâle, puis vérifié température moyenne, mais aussi de précipita- en présence des œufs non éclos lors du tions. Ainsi, la température moyenne d’avril à baguage des jeunes, qui est réalisé lorsqu’ils octobre est de 3°C plus basse à Baulmes qu’à sont âgés d’une dizaine de jours. Le succès ou Corcelles, alors que les précipitations y sont l’échec de la nidification est déduit de l’obser- supérieures de l’ordre de 20% (PRIMAULT 1972). vation du nid après l’envol des jeunes. La Les nichoirs sont présents à des densités bien mesure du poids, au demi-gramme près, et plus élevées qu’à Baulmes, ce qui pourrait aussi celle de la longueur de la troisième rémige expliquer en partie les différences de résultats. primaire, au millimètre près, a été réalisée chaque jour, de l'éclosion à l'envol, lors de la Méthode de travail saison de nidification 1981 ; 35 jeunes issus de 6 nichées du secteur de Baulmes ont ainsi été La population de Baulmes est étudiée par P.- utilisés comme indicateurs de l’âge de l’oi- A. Ravussin, celle de Corcelles-près-Concise sillon. Les données graphiques ont paru dans par D. Arrigo. Dès la fin du mois d’avril, chaque un précédent article (RAVUSSIN &NEET 1995). nichoir est inspecté au minimum une fois tous Durant les 7 premiers jours, le gain de poids est les 15 jours et ce jusqu’à la fin juin. Le contenu de l'ordre de 1,8 g par jour.A cinq jours, les du nichoir est noté de manière systématique : plumes du dos du néoptyle apparaissent. Les espèce (les principales autres espèces occupant yeux s'ouvrent vers le 6e jour. La croissance de ces nichoirs sont les Mésanges charbonnière la plume (3e rémige primaire) devient percepti- Parus major, bleue P. caeruleus et noire P. ater, ble dès le 4e jour et se prolonge jusqu'à l'envol. la Sittelle torchepot Sitta europaea et le Aux rémiges primaires et secondaires, les éten- Moineau friquet Passer montanus), stade de dards apparaissent au 9e jour.

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