FREDERIC RZEWSKI OPÉRA NATIONAL DE PARIS / BASTILLE – AMPHITHÉÂTRE +, SEPTEMBRE +**- FREDERIC RZEWSKI Portrait de Frederic Rzewski harmoniques hétérogènes. Elève de Martin Kaltenecker , le champion d’un séria - Main Drag lisme nivellateur, mais attiré par une pour neuf instruments L’œuvre légendaire de Frederic musique politiquement engagée, au choix (1999) Rzewski, le gigantesque cycle de varia - enrôlé par l’avant-garde américaine, 26 /09 /2009 : clarinette, cor anglais, tions The People United Will Never Rzewski a participé aux créations de flûte, violon, alto, violoncelle, harpe, Be Defeated sur une chanson politique Drumming de mais a aussi clavier, percussion engagée de Sergio Ortega, rassemblait joué souvent la Deuxième Sonate de Durée : 10’ en 1975 un grand nombre de traits Pierre Boulez. Et dès que Christian caractéristiques de son œuvre. Pré - Wolff lui fait entendre Les Choéphores The Lost Melody sence du piano d’abord, qui consti - de Darius Milhaud, il le tient pour « l’un pour clarinette, piano, 2 percussions tue le nerf de son catalogue, ici à travers des géants du XX e siècle, dont beau - (1989) une récapitulation sidérante de l’his - coup de partitions sont encore à décou - Durée : 18’ toire de la virtuosité, depuis Liszt et vrir ». Dans un premier temps, Rzewski Brahms jusqu’à Boulez. Choix de la en a conçu pour son compte une sorte Rencontre avec le compositeur forme ensuite, celle à variations, où d’éclectisme militant qui repose sur le Archives sonores (People United, le thème, inlassablement sollicité, « choc produit par le retour de ce qui Zoological Garden ) et documents du groupe défait et retourné, attire comme un est déjà connu, avant qu’il ne devienne Présentation, Martin Kaltenecker aimant d’autres mélodies symboliques à son tour un fétiche. » Dans le jour - (Bandiera rossa ou le Solidaritätslied nal accompagnant la composition Pause d’Eisler), et fait surgir des univers sty - de l’opéra Les Perses (1984), il note : listiques qui composent une sorte d’en - « Continue de mélanger absolument Mary’s Dream cyclopédie – Chopin, le blues, tout. Pas de style. Pas de système. Sois pour mezzo-soprano, clarinette Beethoven, Schoenberg, Art Tatum, “éclectique”. Sois pragmatique. Ecris contrebasse, violoncelle, percussion, une musique avant-gardiste « par de la musique pour ceux qui en ont piano (1984) points », Keith Jarrett, le minimalisme… besoin, dans la forme où elle est utili - (texte de Mary Shelley, extraits – la forme à variations étant « la plus sée. Fais en sorte qu’elle ne devienne de la préface à Frankenstein ) apte à rendre l’idée d’unification ». pas une marchandise. Dès qu’elle Durée : 15’ pourra être vendue, elle perdra sa force La durée ensuite : le cycle prend une pour modifier la réalité […]. Qu’est-ce Pocket Symphony heure entière, préfigurant The Road que la qualité la plus marquée d’une pour flûte, clarinette, violon, pour piano seul dont la version finale musique devenue marchandise ? Elle violoncelle, piano, percussion (1999) durera huit heures, et où la perfor - communique de manière agressive Durée : 30’ mance elle-même détermine la per - le message d’une soumission, elle mar - ception. Un caractère obsessionnel tèle sans cesse cette leçon hypno - De profundis également, ou de recherche obstinée : tique. » pour pianiste – récitant (1992) le thème, 36 fois interrogé, et toujours (texte d’Oscar Wilde , extraits de reconnaissable, devient progressive - Récemment encore, Frederic Rzewski De profundis ) ment une haunting melody . Avec cela a exprimé une réticence face à ce qui Durée : 30’ une extrême mobilité, une nervosité, rassemble les courants musicaux dis - une profusion de gestes et une proli - parates au XX e siècle, dodécaphonie, Frederic Rzewski , fération des textures : ainsi, chacune procédés aléatoires, minimalisme : « Ce piano, récitant des six variations du dernier groupe qu’il y a de commun à ces mouvements, Marianne Pousseur , récapitule les variations correspon - c’est qu’ils se fondent sur un système mezzo-soprano dantes dans les groupes précédents […]. La seule chose que les composi - Ensemble L’Instant Donné en une sorte de compression : la forme, teurs du XX e siècle ne font pas, c’est de plus en plus complexe, se développe simplement de noter les airs qui leur Coréalisation donc en même temps vers l’avant et passent par la tête. Je pense que pour Opéra national de Paris ; Festival d’Automne à Paris se charge d’un passé de plus en plus des raisons plutôt intéressantes, les dense . compositeurs, à la différence des Concert enregistré peintres, poètes, et autres n’ont jamais par France Musique Langage indécidable, enfin, qui se sérieusement été concernés par une

Photo couverture : © M. Nicolaou / Lebrecht reconnaît à son énergie, mais qui exploration de l’inconscient. Il n’y a Music & Arts brasse sur sa lancée des langages pas de compositeurs surréalistes. Et c’est ce domaine là qui m’intéresse. Cependant la musique de Rzewski incessante verse à nouveau dans un Je note juste ce qui est dans ma tête ». n’évoque pas les grands collages pa - statisme supérieur : les variations de triotiques de Charles Ives ; elle exhibe Lost Melody , toujours brèves, s’enchaî - En 1968, Frederic Rzewski avait ainsi très souvent une construction très nent sans trêve, comme une fuite en enregistré immédiatement sur cas - maîtrisée, dans des formes strictes. À avant. sette une mélodie (de 65 notes, quand tous les points de vue, le compositeur Cette tendance fondamentale, cette même…) qu’il venait de siffloter lors tient le langage, et il tient en échec pulsion vers l’uniformité proliférante d’une promenade à Paris (et qui four - ce que le recours au langage tonal est alors contrée par différentes stra - nira le module de base d’une compo - pourrait avoir de facile : en cela, il est tégies. C’est par exemple une drama - sition interactive, Les Moutons de le symétrique d’Eisler, qui « tonali - turgie des atmosphères et des couleurs, Panurge ). Mais les airs qui traversent sait » la dodécaphonie, alors que comme on la trouve dans Pocket Sym - la musique de Rzewski sont aussi le Rzewski instille dans la tonalité une phony – un mouvement hésitant, moyen d’une ouverture – à la fois décloi - mobilité et des extensions passagères découpé (2 emouvement), une musique sonnement de l’inconscient, stratégie qui sont la trace d’une traversée suave, comme l’effluve éphémère d’un anti-systématique et fenêtre ouverte d’autres langages, celui du free jazz Tchaikovsky recyclé par une musique sur la réalité. La mélodie, le tune que ou celui du sérialisme. Ainsi, une sé - de film des années trente (3 e), une danse tout le monde reconnaît et pourrait rie dodécaphonique, mais construite rythmée, peut-être comme hommage siffler, assure ce lien social, elle est sur des tierces et sixtes, apparaît dans à Chostakovitch (4 e), un solo déchi - un pont, une main tendue. Une Les Perses , Coming Together utilise queté (5 e), un finale aux sonorités feu - musique politique est ainsi « pos - une gamme pentatonique, la Fantai - trées, avec roulements, souffles, bâtons sible sans paroles » ; en revanche, « elle sie mélange atonalité et diatonisme. de pluie, effets percussifs sur la flûte a besoin d’une forme de conscience Le second round des variations The (6 e) – le monde, ici, apparaît sous forme quelconque quant à une relation active People United parcourt le cycle des d’une lanterne ma gique. entre la musique et le reste du monde. quintes, mais mécaniquement, et si le Et l’utilisation du texte est une manière langage tonal est omniprésent, il est La seconde stratégie consiste à ména - d’accomplir cela, sans aucunement en somme catapulté contre des formes ger ces moments de surprise que sont être la seule. » ou des gestes qui forment dissonan - les cadences : c’est l’élément de liberté ce avec lui. que Rzewski retient du jazz. Pour North American Ballads , Rzewski « En vérité, j’ai eu une formation tout sélectionne en 1979 des chansons poli - Frederic Rzewski évite en particulier à fait classique et je n’ai jamais appris tiques ou d’ouvriers (souvenir d’une la mise en scène du développement le jazz. J’y suis entré seulement dans grève de mineurs en 1932, un negro et la narration emphatique de la les années soixante, dans le contexte spiritual ou ce qu’il appelle un indus - tradition dix-neuviémiste, dont il de l’improvisation libre et du free jazz, trial blues des années 1930) : le cycle semble avoir été guéri par les trames j’ai joué avec et sur - est destiné à des concerts où le public de l’avant-garde new-yorkaise, que tout Steve Lacy. Mais j’estime que l’im - était censé pouvoir entonner les nommait des flat forms provisation est aussi une partie de la thèmes, comme un choral luthérien (« formes plates »). Chez Rzewski, les tradition classique, peut-être perdue chez Bach. De même, la mélodie yid - formes sont lancées, elles avancent en grande partie mais qu’il faut redé - dish dans The Lost Melody réfracte le sur une route qui sera longue, elles couvrir. Quand je fais de l’improvisa - destin d’une culture juive dont elle n’aiment pas les temps morts, elles tion moi-même, c’est plutôt dans les restaure la visibilité : « La notion de se nourrissent d’une énergie sans sonates de Beethoven par exemple, mélodie est importante pour moi : ce déperdition, qui rebondit sans cesse, où j’insère de petites cadences libres n’est pas simplement une suite de qui accumule. Wails est une pièce à quand il y a un point d’orgue, comme signaux acoustiques, mais quelque l’énergie « motorique », comme on on le faisait à l’époque ». Ces improvi - chose comme une abstraction de la disait dans les années 1920, et dans sations sont toujours possibles mais voix humaine, et celle d’une personne Fougues , dit Rzewski, « il y a peu ou jamais obligatoires pour l’interprète, réelle, traduite dans un système de aucun développement d’idées ; elles elles peuvent surgir en tous points fréquences fixées et de rythmes apparaissent au contraire et disparais - de la partition (pas seulement juste conventionnels, si bien qu’elle peut sent, selon des lois incohérentes. avant la péroraison) et il ne faut sur - être transmise d’une personne à une Parfois, des spectres de choses appa - tout pas les préparer (par exemple autre, qu’on peut se la remémorer et raissent pendant un moment, mais dans War Songs : « a sudden, unrela - la conserver. Derrière chaque mélodie sont très vite repoussées vers le bord ted interruption : a flash. Do NOT pre - il y a une voix, et derrière chaque voix, du chemin ». Ou encore quand le déve - pare »). Ce sont encore une fois des un visage. » loppement est permanent, la mobilité fenêtres, des moments d’ouverture,

3 où le réel surgit – une mise en scène indécidables et tendus s’établissent de recherche intéressants. Peut-être de la performance, de l’hésitation, entre les textes (la plupart du temps qu’une nouvelle musique peut naître d’une tension sous-jacente, sous forme récités et non chantés) et les figures de ce chaos, ne serait-ce que parce que de coups, de cris, de grattements sur musicales qui semblent les prolonger, son invention est sans doute néces - les touches, du couvercle brusque - oscillant entre un accompagnement saire à notre survie ». Or la musique ment refermé. comme soutien et, par moments, le de Rzewski ne jouit pas du chaos, elle commentaire et le reflet. travaille avec ses tensions. Du point Enfin, c’est l’utilisation du texte qui de vue esthétique, son lieu imaginaire imprime à la musique une dramatur - Frederic Rzewski a souvent parlé du est peut-être l’époque des années 1930, gie autre et la contraint à des formes postmodernisme. « Depuis les années où le conflit s’amplifie entre la voie plus accidentées ou plus étranges. 1987, nous sommes entrés dans le de Schoenberg et celle de Stravinsky, Rzewski est le maître des découpages, chaos postmoderne. La pop, le jazz, elle-même travaillée par la question des décontextualisations et des mises les traditions classiques des différentes politique, que résument le nom d’Eis - en musique décalées : Sophocle côtoie cultures et une avant-garde expéri - ler et déjà celui de Chostakovitch. La l’extrait d’un chapitre des mémoires mentale se battent pour se faire musique de Rzewski n’apporte pas d’Arthur Rubinstein, Brecht la préface entendre des nouvelles générations. de réponse forte ou radicale à ces apo - du Frankenstein de Mary Shelley, et Dans ce mélange de normes, il est ries – ni l’expérimentation fermée, ni souvent des chansons d’enfants. Ainsi difficile de se cramponner à une esthé - les délices de la citation ou de la mar - détourés, redistribués, des rapports tique, chacune propose des domaines chandise, ni l’art utilitaire. Elle tente de parler un dialecte qui enregistre - rait les tensions du siècle, en s’ouvrant à une multiplicité perturbante, en trou - vant un ton dans la confusion des lan - gages, peut-être au sens de cette « littérature mineure » que Deleuze et Guattari décelaient chez Kafka. Elle parle ce dialecte avec brio, sans aucune emphase, répondant à ce que le com - positeur a nommé une fois avec iro - nie un « pessimisme constructif ». s i d n u f o r p

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4 Les œuvres

Main Drag composition de Mayn Yingele en structuré en trois parties et il m’a inté - pour percussionniste et huit novembre 1988, au moment du cin - ressé aussi bien en tant que narration instruments au choix (1999) quantième anniversaire de l’infâme qu’en tant que structure musicale éven - Ecrit en 1999, Main Drag (« route prin - “Nuit de cristal” de 1938, début officiel tuelle. C’est d’abord l’expérience pas - cipale ») est une histoire de routes, de la persécution des juifs par les nazis. sive du cauchemar lui-même, la où le percussionniste figure le conduc - Ma pièce est une réflexion sur cette perception du monde en tant qu’hor - teur, flanqué de deux quatuors d’ins - partie disparue de la culture juive reur ; ensuite, le processus ambivalent truments au choix. Tout est noté en qui colore si fortement, par son de l’éveil, la lutte pour comprendre la clef de sol, mais les hauteurs peu - absence, la culture de notre temps ». réalité incroyable et pourtant bien vent être transposées à toutes les Après la 22 e Variation, les musiciens vivante autour d’elle ; enfin, la déci - octaves. La route ne mène nulle part, peuvent improviser une cadence qui sion active de transformer le monde, et l’histoire est toujours la même. dure de 5 à 10 minutes ; après une varia - de le rendre vivable, dans ce cas-ci en Des motifs qui tournent sur eux-mêmes tion qui rappelle un récitatif, tissé de créant une œuvre d’art. de manière entièrement prévisible sonorités ténues (harmonica, cordes (F. R.) grimpent et redescendent une échelle pincées du piano, sifflements, fre - de huit degrés, changeant de tona - dons…), l’épilogue consistera unique - Pocket Symphony lité à l’occasion. Les hauteurs et les ment en trilles et trémolos, de plus pour flûte, clarinette, violon, violon - rythmes sont précisément notés, mais en plus forts : moment frissonnant et celle, piano et percussion (1999-2000) l’instrumentation est libre, si bien que spectral, dont la teneur menaçante Pocket Symphony pour six instruments des sonorités très différentes sont pos - est spécifiée dans la version instru - a été écrite pour l’ensemble Eighth sibles avec la même musique. mentale par de brefs roulements de Blackbird, alors basé à Cincinnatti. Je Le main drag est normalement la rue caisse claire qui résument toute la vio - l’ai esquissée en quelques semaines, principale d’une petite ville au milieu lence de l’histoire. à la fin de l’été 1999, sans avoir une de nulle part et où rien ne se passe (M. K.) idée précise de l’instrumentation, et jamais, hormis le temps qui se traîne. je ne l’ai reprise que sept mois plus L’activité principale consiste à Mary’s Dream tard, après avoir mené à bien d’autres conduire, lentement et avec le moteur pour soprano, clarinette contrebasse, projets. C’est alors seulement que au ralenti, ou bien vite et avec le moteur violoncelle, percussion et piano (1984) j’ai réalisé qu’il s’agissait au fond d’une qui chauffe (comme dans une course Tout le monde à peu près connaît l’his - musique symphonique, même si, au de vitesse). Tout ce qui importe est de toire de Frankenstein. C’est l’un des contraire d’autres pièces pour fixer la route et d’espérer qu’on revien - grands mythes qui ont émergé de la orchestre que j’avais composées, celle- dra sain et sauf dans ce nulle part. révolution industrielle ; grâce à son ci était plus légère et pouvait circuler (F. R.) aspect prophétique (Frankenstein et qu’elle avait donc une réelle chance comme « Prométhée moderne ») il d’être rejouée. The Lost Melody convient encore mieux au vingtième Il y a six mouvements. Pratiquement pour clarinette, piano siècle qu’au dix-neuvième. Mythe à la dans chacun, l’ensemble joue plus ou et deux percussions (1989) fois sublime et trivial, et ce caractère moins le rôle principal (le cinquième La mélodie « perdue » dont il s’agit ici double marque sa modernité : une est écrit pour piano solo). La plupart est une chanson yiddish intitulée Mayn noble tragédie qui peut, et qui l’est du temps, les musiciens utilisent leurs Yingele (« mon petit garçon »). C’est la de fait, être appropriée par les masses. instruments de manière traditionnelle plainte d’un père qui doit travailler Dans la préface à la seconde édition (ils m’avaient demandé d’inclure leurs toute la journée et ne peut voir son de son livre, Mary Shelley décrit un voix, mais je pensais que c’était trop enfant que le soir, quand il dort déjà. rêve ou plutôt une vision reçue dans risqué). À l’occasion, le percussionniste Frederic Rzewski a d’abord composé un état de demi-sommeil, pendant doit cependant faire des choses sur ce chant une série de vingt-quatre lequel elle eut l’inspiration de son sujet. étranges, comme de jouer sur un cou - variations pour piano (qui gardent le Après une longue soirée passée en dis - vercle de poubelle, avec un bâton de titre de la mélodie), qu’il a ensuite cussions avec Lord Byron et Shelley pluie, une guimbarde ou un rhombe. instrumentées en donnant à cette par - au sujet des romans gothiques, Mary Comme beaucoup d’autres de mes tition un nouveau titre. La chanson, se retire, mais est incapable de trou - pièces, celle-ci semble contenir un cer - dit-il, était connue au début du XX e ver le sommeil. C’est à ce moment tain nombre de références classiques, siècle dans les ateliers d’ouvriers immi - qu’elle est visité par son monstre. même s’il serait difficile de dire les - grés à New York. « J’ai commencé la Le récit que Mary fait de ce rêve est quelles exactement ; il n’y a pas non

5 plus de citations exactes. Si je devais terprétations qu’on en a proposées nel, qui se traduit notamment par l’in - mentionner une seule source, ou plu - ont été originales, intéressantes et corporation dans son écriture musi - tôt l’ange gardien de cette musique, très différentes les unes des autres. cale de formes et de thèmes populaires j’indiquerais Chostakovitch, qui a tou - La musique exige la combinaison qu’il revisite. Ainsi, son œuvre la plus jours été l’un de mes compositeurs d’une technique virtuose avec une célèbre, The People United Will Never favoris. absence totale d’inhibition sur scène, Be Defeated ! (1979) est constituée, sur (F. R.) ce qui garantit qu’aucun interprète le modèle des Variations Diabelli de médiocre ou conventionnel n’osera Beethoven, de trente-six variations sur De profundis s’en approcher. une chanson révolutionnaire latino- pour pianiste-récitant (1990) (F. R.) américaine, El pueblo unido jamàs serà De profundis est une composition de vencido . trente minutes pour piano solo, où le La plupart de ses créations des années pianiste récite un texte constitué d’ex - Biographies quatre-vingt explore des voies nou - traits de la lettre d’Oscar Wilde à Lord velles du dodécaphonisme. Ses œuvres Alfred Douglas, alors que l’auteur était Frederic Rzewski les plus récentes font, quant à elles, en prison pour « outrage aux mœurs » Né en 1938 dans le Massachusetts, Fre - appel à une écriture plus libre et spon - à Reading Goal. La pièce pourrait être deric Rzewski entreprend des études tanée. The Triumph of Death (1987- décrite comme un oratorio sous for - musicales avec Charles Mackey à 1988), la plus monumentale à ce jour, me de mélodrame, en huit sections Springfield, puis étudie à Harvard et est un oratorio de deux heures sur des avec texte, précédées de huit préludes Princeton avec (orches - textes adaptés de la pièce de Peter instrumentaux. L’œuvre a été écrite tration), (contre - Weiss, Die Ermittlung . De 1995 à 2003, à l’instigation de Luke Theodore, un point), et Milton Babbit. il compose The Road , une pièce de cinq vieil ami qui travaillait au « Living En 1960, il s’installe à Florence et heures pour piano seul ; Cadenza con Theatre » et à qui je l’ai dédiée. Quand entame une carrière de pianiste spé - o senza , en 2003. Depuis 2007, il com - je lui ai rendu visite en 1984, il jouait cialisé dans les musiques nouvelles. À pose, en plusieurs cahiers, les Nano - dans une pièce consacrée au monde , en 1966, il fonde avec Alvin sonatas pour piano. des prisons.E lle comprenait des épi - Curran et , Musica http://icking-music-archive.org/ sodes du Frankenstein dans la version Elettronica Viva (MEV), un collectif ByComposer/Rzewski.php du « Living Theatre » et une lecture mêlant improvisation et musique élec - très lyrique et très émouvante de pas - tronique, qui rassemble des musiciens Marianne Pousseur sages du livre de Wilde. J’avais lu le li - classiques et avant-gardistes, dont Tout en étudiant le chant classique et vret du spectacle mais c’est à travers Anthony Braxton et Steve Lacy. Ils déve - la musique de chambre au Conserva - l’interprétation de Luke que j’ai été loppent ensemble une esthétique toire de Liège, Marianne Pousseur a frappé par la puissance de cette écri - musicale conçue comme un proces - chanté dans les deux ensembles diri - ture. sus spontané collectif. En 1977, il gés par Philippe Herreweghe, le Colle - En 1989, le cinéaste Larry Brose m’a devient professeur de composition au gium Vocale et La Chapelle Royale. demandé d’écrire une œuvre pour le Conservatoire royal de Musique de Elle participe dans le même temps à pianiste Anthony de Mare qui puisse Liège, alors dirigé par Henri Pous - plusieurs spectacles du Théâtre du Ciel servir de point de départ à un film. Je seur, avec lequel il collabore assidû - Noir dirigé par Isabelle Pousseur. Leur connaissais les qualités de Tony, aus - ment. Il est, en outre, visiting professor version scénique de Pierrot Lunaire de si bien comme pianiste que comme dans de prestigieuses universités amé - Schoenberg a fait l’objet d’un film, avec acteur. En me souvenant de l’interpré - ricaines et européennes (Yale, Cinci - l’Ensemble Musique Oblique (direc - tation du texte de Wilde par Luke, je natti, San Diego, La Haye, Berlin). tion de Philippe Herreweghe), ainsi que l’ai suggéré comme une source pos - Frederic Rzewski reçoit des bourses d’un CD (Harmonia Mundi). sible : nous étions tous préoccupés et prix des fondations Fromm, Ford, Elle se produit avec des ensembles tels par les questions relatives à la sexua - Woodrow Wilson, Fulbright et du Natio - que l’Asko/Schoenberg Ensemble, lité dans la société et cet aspect là de nal Endowment for the Arts. Son œuvre, (direction Reinbert de Leeuw), Remix l’histoire de Wilde paraissait aussi ac - Song and Dance , est sélectionnée pour de Porto, Die Reihe de Vienne, ainsi tuel qu’il y a cent ans. Le projet mit représenter les Etats-Unis à la Tribune qu’avec l’Ensemble intercontemporain, quelque temps à se mettre en route, internationale des compositeurs notamment sous la direction de Pierre mais j’ai finalement écrit la pièce en (Unesco) en 1979. Boulez, dans un répertoire essentiel - l’été 1992. Elle a depuis été jouée par Marxiste et antimilitariste déclaré, lement tourné vers le XX esiècle, la créa - plusieurs pianistes, gay ou straight , l’œuvre de Rzewski est marquée par tion et le théâtre musical. En 2001, elle hommes ou femmes. Toutes les in - un engagement politique incondition - enregistre avec l’Ensemble Risognanze

6 (Milan) Infinito Nero pour le label Col Johannes Schöllhorn, Mark Andre, legno. Cet enregistrement paru en 2008 Helmut Lachenmann, Heinz Holliger...). gagne le MIDEM Classical Awards 2009. Chaque année, un concert est intégra - Son expérience théâtrale lui permet lement consacré aux œuvres de deux d’être interprète-récitante dans de jeunes compositeurs (Noriko Baba, grandes œuvres symphoniques comme Stéphane Borrel…) Psyché de César Franck ainsi que Peer Gynt de Grieg sous la direction de L’Instant Donné s’investit dans de nom - Kurt Masur avec l’Orchestre National breuses interventions pédagogiques de France et le London Philharmonic et participe à des ateliers et séminaires, Orchestra. aussi bien au Conservatoire de Reims Elle a créé, en collaboration avec Enrico qu’à l’École de Musique de Bondy, à Bagnoli, plusieurs pièces de théâtre l’Université de La Plata en Argentine musical : Songbooks de et où à la Musikhochschule de Hanovre. Le Chant des ténèbres , à partir de chan - Depuis deux ans, l’ensemble est en sons de Hanns Eisler et Bertolt Brecht ; résidence estivale au Domaine de Babar de Poulenc, L’enfant et les sor - Kerguéhennec (Centre d’Art Contem - tilèges de Maurice Ravel. porain – Morbihan). C’est pour elle que Georges Aperghis L’Instant Donné se produit en France compose en 2004 Dark Side , créé à dans des festivals ou des salles tels Athènes avec l’Ensemble intercontem - que : Festival d’Automne à Paris, porain. Après cette première collabo - Auditorium du Musée du Louvre, Cité ration, ils décideront de travailler de la musique, IRCAM – Festival Ago - ensemble à nouveau sur Ismène , poème ra, MUSICA (Strasbourg), GRAME – de Yannis Ritsos, un opéra pour voix Musiques en scène (Lyon), Opéra de seule. Lille, etc. Ainsi qu’à l’étranger : Espagne, Marianne Pousseur enseigne le chant Suisse, Allemagne, Mexique, Argenti - au Conservatoire Royal de Bruxelles. ne, Pérou... www.khroma.eu L’ensemble reçoit le soutien de la Direction Régionale des Affaires Ensemble L’Instant Donné Culturelles d’Ile de France – Ministè - L’Instant Donné est un ensemble ins - re de la Culture au titre de l’aide aux trumental qui se consacre à l’interpré - ensembles conventionnés, de la tation de la musique de chambre SACEM, et de la SPEDIDAM. contemporaine. Dès ses débuts en 2002, il choisit un fonctionnement col - www.instantdonne.net légial et table sur un travail d’équipe. Les projets de musique de chambre Elsa Balas, alto non dirigée sont privilégiés. Chaque Nicolas Carpentier, violoncelle membre – neuf musiciens et un coor - Caroline Cren, piano, clavier Directeur : Nicolas Joel dinateur – participe aux décisions ar - Hélène Colombotti, percussion 2 120, rue de Lyon tistiques. Esther Davoust, harpe 75012 Paris www.operadeparis.fr Le répertoire s’étend de la fin du XIX e Maxime Echardour, percussion 1 siècle à nos jours, avec des incursions Saori Furukawa, violon vers les époques antérieures (baroque, Cédric Jullion, flûtes classique, romantique…) Toutefois, la Philippe Régana, cor anglais programmation est principalement Joris Rühl, clarinettes consacrée aux compositeurs avec les - quels l’ensemble collabore étroite - Président : Pierre Richard ment. Depuis 2005, en partenariat avec Directeur général : Alain Crombecque le théâtre L’Échangeur (Bagnolet), l’en - Directrice artistique semble propose un cycle de concerts théâtre et danse : Marie Collin Directrice artistique musique : monographiques (Gérard Pesson, Joséphine Markovits Frédéric Pattar, Stefano Gervasoni, www.festival-automne.com

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