LA MALADRERIE DE LABROYE
EXAMEN
DES DROITS RESPECTIFS DES COMMUN ES
DE LABROYE ET - DE LE BOISLE
sur les biens de cette Mâladrerje
PAR HENRI LORIQUET Archiviste du Pas-de-Calais,
Correspondant du Minist/,e de / instruction publique.
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cA RRA S lmprhncric RouArto-00ORTIM, place du Pont-de-Cité, n 6.
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Le Mémoire qu on va lire a été motivé par une délibération de la commune du.Boisle, département de la Somme, arrondissement d Abbeville, canton de Crécy-en-Ponthieu, dont voici la teneur:
L ait mil huit cent soixante-dix-neuf, le 20 niai, le Conseil municipal de la commune du Boisle étant réuni en session rdinaire sous la présidence de M. le Maire, où étaient présents MM Petain, maire, Marchand, adjoint, Blondelu, Gaffet Hilaire, Gaffet dit Albert, Maillet Casimir, Maillet Louis, Unquesnoy, Poix et Caron, conseillers municipaux. Un membre demande au Conseil u de revendiquer le droit que la commune a sur les biens de ]a Maladrerie de Lahroye, canton d Hesdin (Pas-de-Calais), dont cette dernière commune s est attribué exclusivement les revenus depuis 29 ans n. Il , donne ensuite au Conseil, pour la revendication de ce droit, les raisons suivantes: u Avant la division de la France en départements, la com- mune du Boisle et celte de Labroye, qui ne sont séparées que par la rivière d Autbie, ne formaient qu une seule et même paroisse, ainsi que le prouvent les actes de l état-civil anté- rieurs à 1793 qui ont tous pour titre « Paroisse de Labroye et du Boisle son secours o, —(3-
» Un homme généreux avait, à une époque très reculée et que le membre qui parle ne petit préciser, fait un acte de donation de biens situés sur Labroye, désignés aujourd hui sous le 110m de biens de ?Jaladrerie, dont les revenus, d après l acte de donation, devaient être employés au soulagement des malheureux du Boisle comme de ceux de Labroye. e Un arrêt du 13 juillet 1695 et les lettres patentes de 1697 ordonnèrent que ces biens fussent réunis à ceux de l Hospice d Auxi-le-Château, à la charge de recevoir dans cet Hospice les malhiireus de ladite paroisse, c est-a-dire ceux de Labroye et du Boisle. n Los registres de l état-civil du .Boisle de 1773 et de 1774 constatent que trois habitants du Boisle sont décédés dans ledit Hospice. n Mais, dans la suite, les malheureux des deux communes préférèrent mourir de misère dans leurs foyers que de se séparer de leurs familles pour aller mourir isolés à 10 kilo- mètres de distance, de sorte que la donation n avait plus son effet et ne profitait qu aux pauvres d Auxi-le-Château. Cé que voyant, la commune de Lahroye, agissant seule, s adressa au Conseil d État et obtint un arrêt en date du 7 février 1850 qui rendait les biens donnés à leur destination premiers- » Les administrateurs de Lahroye se rendirent seuls alors à &uxi-le-Chatean , et les administrateurs de .1 Hospice leur remirent sur récépissé le titre de donation et autres concernant lesdits biens, eu leur disant qu ils devaient voir sur le titre de donation que la commune de Labroye n était pas seule appelée à jouir de ces biens et que la commune du Boisle y était dési- gnée comme devant y participer; ceci est affirmé par le membre qui faitS cet exposé, lequel affirme avoir vu alors à Labroye le titre de donation ct avoir recueilli les paroles pro- noncées par les administrateurs de l Hospice d Auxi-le-Chàteau concernant le droit que Le Boisle avait sur les biens de Mala- drerie. » Labroyo, malgré la recommandation qui lui en avait, été faite, n a rien dit au Boisle et jouit seul depuis de ces biens. » Le Conseil municipal du Boisle, après avoir entendu cet exposé, est d avis de revendiquer la part qui doit lin revenir f —7— dans les biens donnés pour cette commune aussi bien que pour celle de Labrnye et invite Monsieur le Maire du Boisle à s adresser à Monsieur le Préfet de la Somme pour qu il prie Monsieur le Préfet du Pas-de-Calais d ordonner que des recherches soient faites dans les archives de l Hospice d Auxi- le-Château, dans le but de faire reconnaître le droit qua la eomrnunedu l3oisle sur lesdits biens, avant que la commune de Labroye puisse invoquer la prescription trentenaire par suite d une jouissance non iurterrounpiie. Et ont les membres présents signé après lecture. Signé A. Petain, Jli-S Marchand, Blonuleiu RI., Gaffet, Gaet, Maillot, Maillet, Duquesnny .Poix, Caron
• Du Boile, son point de départ, cette délibération suivit la voie administrative habituelle et passa par Abbeville et Amicns pour arriver à la Préfecture du Pas-de-Calais; mais, parvenue en ce point-inilieude sa course,elle parait s y être arrêtée pour une raison qu il ne m appartient pas de rechercher. Vainement le Sous-Préfet d Abbeville s enquit-il (4 mars 1881), auprès de la commune inté- ressée, des suites d une affaire dont il avait cessé d en- tendre parler depuis deux ans. Découragée parle silence qui s était fait sur sa démarche, hantée, comme on vient de le lire, par le spectre de la prescription trentenaire, impuissante à retrouver les étapes de son histoire et les preuves de son droit, ignôrante des démarches possibles, ta pauvre commune du Boisle attendit qu un hasard heureux, en augmentant ses moyens d action, lui permit de relever la tête. Elle s était presque définitivement résignée, lors- qu une indiscrétion opportune la mit sur la trace d une. pince importante du XVIU O siècle où se trouvaient établis pêremptôirement sa communauté d origine avec la commune actuelle de Labroyc et ses droits certains sur la Maladrerie du mémo nom. Préalablement munie — S — d une copie du précieux documerït, elle rtprend auisitSt courage, rappelle sa requête au Préfet de la Somme qui la transmet à la Préfecture d Arras. Cette fois, les démarches devaient aboutir, et, dès le 18 janvier 1892, M. Alapetite, Préfet du Pas-de-Calais, me remettait la délibération du 20 mai 1879 en m ordonnant de recher- éher si, dans les archives de l Hospice d Auxi:leCliàteau et de la commune de Labroye, il existerait des titres établissant les droits de la commune du Boiste.
Je me suis mis àl œuvre aussitôt. J ai tiré des archives de Labroye et d Auxi-le-Chhteau les premiers titres qui devaient me servir de guides. Puis, aidé des ressources que lés Archives départementales du Pas-de-Calais et de la Sornihe et les Bibliothèques d Amiens et d Arras m ont procurées et que j ai patiemment amassées pendant près de deux ans, j ai pu fournir à l Administration départementale les indications historiques qu elle atten- dait de moi. Mais, pour arriver àune vision bien nette de la ques- tion et de toutes ses parties, pour inc prononcer en pleine sécurité d esprit, il me fallut successivement coor- donner tous ces matériaux, les distribuer en un canevas pratique, en déduire tous les faits utiles, en essayer le jeu normal. J ai dû, en un mot, écrire pour mon usage l histoire de la commune de Labroye sous l ancien régime et suivre sa Maladrerie pas à pas à travers les destins divers qu elle a successivement connus. C est cette étude surérogatoire que je livre au public aujourd hui.