OCEANOLOGICA ACTA 1982 -VOL. 5 - No 4 ~ -----~-

Golfe du Lion Évolution de la turbidité Turbidité Milieu lagunaire Hydrodynamique des eaux du complexe lagunaire Courant Gulf of Lions Turbidity de Bages-Sigean-Port-La-Nouvelle Lagoon Hydrodynamics (, ) Current

D. Cataliotti-Valdina INRS-Océanologie, 310 des Ursulines, Rimouski, Québec G5L 3A1, Canada.

Reçu le 25/1182, révisé le 28/4/82, accepté le 5/5/82.

RÉSUMÉ f/étang de Bages-Sigean s'allonge entre au Nord, Sigean au Sud-Ouest et Port-La-Nouvelle au Sud-Est (Aude). Il fait partie de la guirlande d'étangs qui borde la côte du Golfe du Lion entre Sète et St-Cyprien. Il est relié à la Mer Méditerranée par un chenal dans lequel se concentre l'activité portuaire de Port-La-Nouvelle. La turbidité dans le complexe lagunaire et le chenal portuaire est fortement influencée par les apports du ruissellement direct (104 t par an), des rivières (2 à 3.104 t par an) et par la remise en suspension des vases lagunaires sous l'influence des clapots animés par le vent. Il s'y ajoute 2.104 t par an de matériaux organiques (biomasse végétale). Une étroite corrélation existe donc entre les régimes météorologiques et la répartition des sédiments en suspension dont les vents, en dernier ressort, sont responsables car ils déterminent : - les clapots nécessaires à la remise en suspension : la turbidité apparaît lorsqu'ils ont une amplitude de 0,30 à 0,35 rn, condition réalisée pour des vitesses de vent égales à 10 m.s-1 (environ 11,7 o/o du temps); - les courants transportant et diffusant les particules ainsi mobilisées. L'étang qui stocke les matériaux en suspension, fonctionne également comme réservoir alimentant en éléments fins le chenal portuaire de Port-La-Nouvelle en fonction des régimes météorologiques : 186 000 ml de matériaux y sont dragués chaque année dont 70 % sont d'origine lagunaire. Oceano/. Acta, 1982, 5, 4, 411-420.

ABSTRACT Water turbidity evolution of the Bages-Sigean-Port-La-Nouvelle lagoon (Aude) Bages-Sigean is encompassed by Narbonne in North, Sigean in South-West and Port­ La-Nouvelle in South-East (Aude). It belongs to the series of lagoons extending along the coast of the Gulf of Lions between Sète and St-Cyprien. It is connected to the Medi­ terranean Sea by a channel in which is concentrated the harbour activity of La­ Nouvelle. The turbidity in the lagoon and the harbour channel is influenced by fluvial discharge (2.104 to 3.104 metric tons by year), surface run off from the shoreline (1.104 metric tons by year) and wave induced resuspension of lagoon sediments. The latter factor also contributes by 20 x 103 metric tons of organic material (plants) annually. A strong correlation therefore exists between meteorological factors, principally wind, and the distribution of suspended material in the lagoon. Sediment resuspension is observed when waves exceed an amplitude of 0,30 rn to 0,35 rn, a condition occurring whenever wind velocities reach 10 rn sec. -1 (about 11,7 % of the time). Wind also deter­ mines currents in the lagoon which transport and distribute the mobilized particles. The lagoon, with its suspended load, acts as a source or reservoir, of fine particles to the harbour channel of La-Nouvelle. Of approximately 186,000 ml of material dredged yearly from the harbour about 70 o/o originate in the lagoon. Oceanol. Acta, 1982, 5, 4, 411-420.

0399-1784/1982/411 f$ 5.00/© Gauthier-Villars 411 O. CATALIOTTI-VALDINA

INTRODUCTION 1778 va aggraver le problème de l'envasement. En effet, auparavant les eaux marines à la suite des vents Le complexe lagunaire de Bages-Sigean a fait l'objet de Sud-Est franchissaient le mince cordon littoral et se d'investigations diverses concernant : déversaient dans l'étang de Bages en exhaussant le - les propriétés physico-chimiques des eaux (Fiala, niveau des eaux de 1,2 à 1,3 rn au-dessus du zéro de la 1972); mer. La renverse de NW, souvent rapide, créait une - la topographie générale et la morphologie sous­ chasse énergétique dans le chenal ·de La-Nouvelle. marine (Petit, 1953; Petit, Mizoule, 1962); Depuis la construction du canal de La Robine, ce phé­ - la répartition des espèces végétales dans les eaux nomène est supprimé, il ne subsiste qu'un courant, succinctement, celle des sédiments et les conditions insuffisant pour contrarier l'élévation des fonds météorologiques qui règnent sur le milieu (Boutière, jusqu'à 1,5 à 2 m. A l'heure actuelle la sédimentlltion 1974); dans le chenal portuaire et à la sortie du chenal avoisine - les apports détritiques à Bages-Sigean et les oolithes 186 000 m1 par an (moyenne entre 1969 et 1976). Les de Lapalme (Courtil-Xavier, 1977). dragages entretiennent un« plafond » à la côte- 8 rn NGF à l'entrée maritime du chenal et - 4 rn NGF à Ces travaux pour la plupart ont toujours été réalisés l'entrée occidentale du chenal. dans le but d'une étude biologique du milieu. En consé­ quence, une étude sédimentologique complète restait à faire, et en particulier turbidimétrique pour résoudre le PHYSIOGRAPHIE problème d'envasement du chenal portuaire de Port­ La-Nouvelle. L'expression « étangs de Bages-Sigean » est impropre Le complexe lagunaire de Bages-Sigean, d'une superfi­ car en réalité il s'agit d'un ensemble de plans à'eau 2 cie de 37 km , est situé en arrière d'un cordon sableux assez bien individualisés (fig. 1) : qui l'isole de la Mer Méditerranée. Il s'insère entre les au Nord l'étang de Capeille, étangs de l' Ayrolle au Nord et de Lapalme au Sud. Il au centre les étangs de Bages-Sud et de Peyriac, communique avec la mer par un chenal artificiel au Sud l'étang de l' Aute, encaissé entre deux jetées parallèles depuis 1704 au Sud-Est l'étang de Sigean et de La Nadière. (fig. 1). Depuis cette date, dans le chenal les fonds se stabilisent vers 2,5 à 3,5 rn, grâce au courant de chasse balayant la passe d'entrée lors des coups de vent de Nord-Ouest. La construction du canal de La Robine en

896de vent. nul o~%

t.5 5u t1010tt t1515u 120 on mfs

1 1' 1 1 1 1 1 relevé à la atatioh meteorologique de 1 Perptgnan _ Llabanere 1 1 s

Figure 2 Rose des vents : 1976-1977. Compass-card: 1976-1977.

Dans le cadre de cette étude, nous ne nous sommes inté­ ressés qu'aux étangs de l'Aute et de Sigean - La Nadière car ils sont dans l'axe des vents dominants. En effet, la rose des vents générale (fig. 2) pour les années 1976/1977, tenant compte de la fréquence des vitesses et des directions de vent, montre deux régimes fonda­ mentaux: Echelle: - le régime de NW : 56 % des observations (280- 0 1Km - 3600); - le régime de SE : 18 OJo des observations (100-180°). L'histogramme des précipitations (fig. 3) montre que Figure 1 les variations mensuelles sont très accusées entre 1976 et Plan de position de la région étudiée. 1977. La moyenne pour ces deux années (567, 15 mm) Location of Bages-Sigean Lagoon. est proche de celle calculée par Casanobe (1961) sur

412 LA TURBIDITÉ DANS L'ÉTANG DE BAGES-SIGEAN !AUDE!

I40mm d'eau

.~'F 1 M 1 A 1 M 1 ~ 1 ~ 1 A 1 S 1 0 1 N'DI~'F'M 1 A 1 M 1 ~ 1 ~ 1 A'S'D'N'D: 1978 1 1977

Figure 3 Histogramme des précipitations: 1976-1977. Precipitations (1976-1977).

Figure 4 108 années de mesures (591,7 mm). La disparité men­ Plan de position des points de prélèvement dans l'étang de Sigean-La­ suelle s'explique par le caractère orageux et violent de la Nadière. Sampling station in the Sigean-La-Nadière lagoon. pluviosité dans le domaine méditerrannéen. Ce phéno­ mène se répercutera sur le régime hydrographique et en conséquence, sur l'apport d'origine fluviatile ou issu du ruissellement direct. continu à l'aide d'une centrifugeuse Sharples. Les pré­ Les apports hydrologiques proviennent du bassin ver­ lèvements de faible volume ont été filtrés sur des mem­ sant du complexe lagunaire de Bages-Sigean, d'une branes millipores de 0,45 Jtffi. Le filtre est ensuite séché 2 superficie de 455 km • La Berre, qui se jette dans et pesé. l'étang de Peyriac, est la rivière la plus importante de ce Dans le complexe lagunaire, les valeurs de turbidités (en domaine (36 km de long) avec le Rieu (5 km) débou­ mg/1) ont été obtenues en effectuant un échantillon­ chant au sud de l'étang de La Nadière. La Berre a un nage le long de différents profils longitudinaux et trans­ débit très faible en période normale : 90 OJo des débits versaux (fig. 4). Nous avons également effectué une sont inférieurs à 2m3/set 99 % à 10m3 /s (Laboratoire série de prélèvements dans le même intervalle de temps Central d'Hydraulique de France, 1975). A la suite de le long du chenal portuaire (fig. 5). fortes précipitations son débit peut augmenter notable­ L'échantillonnage dans la Berre et le Rieu, principales ment. Les crues annuelles ont un débit moyen de rivières du domaine étudié, est réalisé de la même 50m3 /s et les crues décennales de 300 à 400 m3 /s manière que celui de la lagune. (Laboratoire Central d'Hydraulique de France, 1975).

N MÉTHODE D'ÉTUDE \

L'étude turbidimétrique a été effectuée uniquement sur les plans d'eaux situés dans l'axe des vents dominants, soit ceux de l' Aute, de Sigean et de La Nadière; la passe Pointe Cabal - Port Mahon ne constituant pas un bar­ rage important au développement des courants et des Figure 5 clapots (et par conséquent des turbidités). Plan de position des points de prélèvement dans le chenal portuaire. Pour prélever le matériel en suspension et compte tenu Samp/ing station in the harbour channel. de l'impératif de l'étude qui nécessitait une couverture fréquente et extensive, nous avons eu le plus souvent recours à des bouteilles en verre d'Il, faciles à manipu­ LES FACTEURS DE LA TURBIDITÉ DES EAUX ler, plutôt qu'à des bonbonnes de 20 1 en polyvinyle. Toutefois on perd en qualité sur les mesures lorsque les Lors des fortes pluies, l'érosion des sols, le ruisselle­ turbidités sont très faibles. ment et les rivières contribuent à alimenter eh matériel Les prélèvements dans l'étang ont été efféctués dans la le complexe lagunaire de Bages-Sigean. Ces sédiments partie superficielle des nappes d'eau car on a admis que ne sont pas entraînés directement vers la mer, ils se le brassage au moment des coups de vent (d'une durée déposent sur place en grande partie. Une remise en ·sus­ égale à 36 heures au moins) et la faible épaisseur de la pension ultérieure et un transport plus ou moins étendu tranche d'eau (1,5 rn en moyenne) assurent une bonne sous l'effet du vent peuvent provoquer, en fonction des homogénéité de l'ensemble. conditions d'agitation du milieu, soit un transport de Les matériaux solides, contenus dans les prélèvements matériaux à la mer, soit un nouveau dépôt dans la de grand volume, ont été séparés par centrifugation en lagune ou le chenal portuaire.

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• Des matériaux d'origine organique se surajoutent à la Tableau 1 sédimentation lagunaire. Une évaluation quantitative Bilan solide et liquide de la Berre en période de crue. de ces apports solides sera donc entreprise. Water and suspended matter discharge budget in high river flood of the Berre river.

Date Volume solide Volume liquide Les apports fluviatiles Juin 1977 s 000 t 4.1

12 Comme pour la Berre, la turbidité et le débit ont une décroissance parallèle mais les bilans solide et liquide sont très différents (tableau 2). Ces derniers tradùisent •-• turbtdlte débit _. _ _. debJt 1,5 m3fs la faible influence de cette rivière. •--oturbidote en débot laeRReJ _ \ 'lRtEU 1 Les valeurs des débits solide et liquide ainsi que celles fonction du o.t "fis O. / débot • 0 c 1 des bilans solide et liquide des deux principales rivières 1 1 de l'étang de Bages-Sigean montrent qu'elles sont con­ ditionnées par l'intensité et la durée des précipitations Crue du18 ;: ~% // i\., // et octobre 1977 ,' :; / 19 ~ 50 0 5 sur une partie ou la totalité du bassin versant, mais la ~0,2 1 1. charge solide dépend en outre de l'état d'imprégnation ~0,1 , • /' ~ des terrains drainés . 1 0 1 • 12h ,,h 0 ~24h-6JL • l..t_~h ~~temps 100 50 débit rrilfs Tableau 2 c débrt Bilan solide et liquide du Rieu en période de crue. m31s •~• turbidité Water and suspended matter discharge budget in high river flood of 0,15 8 1,5 .6..4 déM ..._. turbidité en the Rieu river. fonctfon du debit Date Volume solide Volume liquide

Octobre 1977 4 t 104 000 m' Crue du 4 et 5 mars Mars 1978 15 t 200 000 m' 1978

Les apports issus du ruissellement direct

20 40 10 débit rrilla Dans les bassins versants de type méditerranéen, l'éro­ sion spécifique annuelle est en moyenne de 150 à Figure 6 2 200 t/km • an. Dans 10 OJo des cas, elle est supérieure à Variation de la turbidité et du débit en fonction du temps dans la 2 Berre et le Rieu. 500 t/km • an et dans 10 OJo des cas, elle est inférieure à 2 Turbidity and discharge in the Berre and Rieu river as a function of 10 t/km • an (Laboratoire Central d'Hydraulique de ti me. France, 1978). Par ailleurs, 40 à 50 OJo des matériaux

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'a LA TURBIDITÉ DANS L'ÉTANG DE BAGES-SIGEAN !AUDE! issus de cette érosion sont transportés par les grandes L'origine des vases du chenal portuaire est à rechercher crues dans un bassin versant de 400 à 500 km 2 (Labora­ totalement dans le remaniement des sédiments lagunai­ toire Central d'Hydraulique de France, 1978). En res et dans les apports directs issus du ruissellement et conséquence pour un bassin versant de 450 km 2 comme des crues. celui du complexe lagunaire de Bages-Sigean, les apports annuels moyens seraient d'environ 35 000 t. La remise en suspension Lors des fortes précipitations du mois de mai 1977 (234,2 mm), des observations faites dans la partie ouest Des observations visuelles, lors des coups de vent du promontoire de Port-Mahon, montrent une ablation (vitesse élevée et durée minimale de 36 heures) ont mon­ de 150 m1 (300 t) de matériel marno-calcaire sur les tré une variation de couleurs des eaux de la lagune. Ce 500 rn de long de cette côte. Or, 2 à 3 km de rives pré­ changement de teinte est dû à une remise en suspension sentent une disposition analogue (en falaise de bordure) des vases lagunaires. et une lithologie comparable. L'apport solide résultant Nous allons donc essayer de déterminer la part de cha­ de précipitations de durée identique (2 à 3 jours) peut cun des paramètres hydrodynamiques (courants et cla­ ainsi être estimé de 1 200 à 1 500 t. pots) en relation avec l'intensité et la direction des vents En supposant trois périodes de forte pluviosité par an dominants, responsables de la remise en suspension des (fig. 3), il y aurait par ce seul processus un apport de matériaux tapissant le fond de l'étang de Bages-Sigean. 3 600 à 4 500 t/an en moyenne de matériaux. Comme les rives en falaise marno-calcaire ne représentent qu'un La remise en suspension par les courants très faible pourcentage des rives du complexe lagunaire, l'apport solide dû au ruissellement direct doit, par En fonction de son intensité et de la distance sur conséquent, être supérieur à ces valeurs. laquelle il agit, le vent a un effet d'entraînement dyna­ mique sur les eaux de surface. Dans le cas du complexe Les apports organiques lagunaire de Bages-Sigean, où les profondeurs sont fai­ bles, c'est toute la masse d'eau qui sera poussée par le Les apports organiques sont définis comme les apports vent avec une certaine célérité. dus à la biomasse végétale et organique qui vit dans la lagune. Mercier (1973) estime à 20 000 tian la biomasse L'entraînement des matériaux cohésifs tapissant le végétale qui circule dans les eaux du complexe lagu­ fond a lieu lorsque la force tractive r0 est supérieure aux naire. forces qui l'opposent au mouvement (Action de la La production animale n'est pas connue mais néan­ houle sur les sédiments, 1976). La force tractive r0 est moins elle existe. En effet l'observation du fond des liée à la vitesse critique d'entraînement U• par la rela­ étangs montre, en certaines zones, un important tapis tion de coquilles entières ou en débris de mollusques qui (1) nécessairement se mêleront aux sédiments lors de leur dépôt. Q : masse spécifique du fluide.

Les apports marins La vitesse critique u. dépendant des conditions physico­ chimiques, de la nature, de la granulométrie et de l'état Les matériaux d'origine marine déterminent un apport de consolidation des matériaux cohésifs, peut s'écrire : significatif sous la forme d'une sédimentation sableuse 0 25 à l'entrée maritime du chenal portuaire de Port-La­ U• = 0,023 Ty · (2) Nouvelle. Les sables représentent 30 à 35 OJo des maté­ riaux dragués chaque année dans le chenal portuaire Les concentrations moyennes des vases du complexe (valeurs fournies par les Ponts-et-Chaussées Maritimes lagunaire, consolidées pendant quelques jours, attei­ de Port-La-Nouvelle). gnent 200 à 300 g/1 et les rigidités initiales de telles vases 2 Une étude granulométrique des sédiments du fond du fluctuent entre 0,2 et 1 N/m (Laboratoire Central chenal portuaire a confirmé l'existence de sables dans le d'Hydraulique de France, 1975). Cela correspond à des premier kilomètre du chenal côté maritime (Cataliotti­ vitesses critiques d'entraînement U• de 1,5 à 2,3 cm/s. Valdina, 1978). Par ailleurs, les vitesses moyennes d'écoulement néces­ saires à la remise en suspension sont liées à la vitesse cri­ L'influence des apports marins en suspension semble tique U• par la relation : négligeable même si certains traceurs (paillettes de mica, illite de type beidellitique) indiquent l'existence 0 = 24 u. (Migniot, 1977). (3) d'une faible quantité d'éléments fins marins dans les sédiments du chenal portuaire mais qui ne se retrouvent D'après la relation (3), pour les vitesses u. calculées pas dans les sédiments de l'étang de Sigean-La-Nadière précédemment, U varie entre 36 et 55 cm/s., Ce sont là (Laboratoire Central d'Hydraulique de France, 1978). des vitesses d'écoulement rarement atteintes dans le Le remaniement des prodeltas qui se produit au large milieu naturel. En effet, les célérités dans l'étang de des embouchures notamment de l'Aude (fleuve médi­ l'Aude et de Sigean-La-Nadière sont de 40 cm/sen sur­ terranéen qui débouche à 30 km au nord de Port-La­ face et 25 cm/s au fond en mai 1977 pour des vents de Nouvelle) contribue surtout à alimenter les secteurs NW de 8 à 10 m/s (Cataliotti-Valdina, 1978). D'autre profonds de la bordure méditerranéenne (Aloïsi et al., part des résultats courantologiques obtenus durant la 1975). même campagne de mesures, montrent que la vitesse

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des vents néce11saire à l'érosion des fonds serait de 15 observations faites entre janvier 1976 et décembre 1977 mis (Cataliotti-Valdina, 1978). Ce phénomène n'est (Cataliotti-Valdina, 1978). réalisé que pendant 4 o/o du temps annuel (rapport Les calculs empiriques appliqués à l'étang de l' Aute PNEG29, 1975). (fetch de 3,5 km) et de Sigean-La-Nadière (fetch de Dans le chenal portuaire de Port-La-Nouvelle, pour les 5 km) fournissent donc une bonne estimation de la mêmes conditions météorologiques, les vitesses d'écou­ vitesse de vent critique nécessaire à la remise en suspen­ lement sont de l'ordre de 0,5 à 0,9 m/s en surface et sion. Si on admet que le détroit Port Mahon-Pointe inférieures à 0,2 m/s au fond, donc inférieures au seuil Cabal ne constitue pas un barrage au développement de remise en suspension - entre 0,33 et 0,55 m/s des clapots, la remise en suspension peut prendre nais­ (Cataliotti-Valdina, 1978). sance pour des vents de vitesses inférieures à 10 rn/s. En conséquence, la remise en suspension des vases dans Par ailleurs, nos observations sur le terrain montrent le complexe lagunaire de Bages-Sigean est due à un que la nappe d'eau lagunaire est troublée dès qu'un autre facteur : les clapots. vent de vitesse égale à 10 m/s se maintient pendant une durée égale ou supérieure à 36 heures. Cette durée est La remise en suspension par les clapots moindre si une crue se surimpose au régime de vent. Sous l'action des clapots, des mouvements oscillatoires périodiques se développent dans la vase et entraînent un mouvement elliptique des particules (Migniot, 1977). LA TURBIDITÉ DES EAUX DU COMPLEXE Sur le fond, le mouvement se limite à un déplacement LAGUNAIRE DE BAGES-SIGEAN total dont il est possible de calculer la vitesse maximale Le matériel en suspension dans les eaux de l'étang de orbitale sur le fondU ..... et la vitesse orbitale critique u •. Bages-Sigean a été prélevé en surface dans des condi­ 1rH ( Hz tions météorologiques variables; vent fort et faible, pré­ u ..... = et u. = 0,07 )1/4 cipitations abondantes ou non (tableau 4). . . Tsh 2 zd Tlsh 2 zd Les valeurs de turbidité (en mg/1), poids du refus sur filtre ou récupéré par centrifugation, ont été reportées avec H, T et L respectivement amplitude, période et en fonction du temps et de la position des points de pré­ longueur d'onde du clapot; d :profondeur. lèvements (fig. 7, 8 et 9).

Tableau 3 Vitesses oscillatoires maximallfs et ritesses critiques engendrées sur le fond par le clapot. Maxima oscillatories and criticals velocities generated on sea-bed by the waves.

Force Fetch : 3,5 km Fetch: 5 km Fetch: 7 km du vent H T L Uo u. H T L Uo u. H T L Uo u. (m/s) (rn) (s) (rn) (m/s) (emis) (rn) (s) (rn) (m/s) (emis) (rn) (s) (rn) (m/s) (cm/s)

5 0,15 1,20 4,56 0,10 1,29 0,18 1,25 4,75 0,13 4,45 0,20 1,3 4,49 0,15 1,55 10 0,30 1,60 6,08 0,26 1,43 0,33 1,72 6,50 0,30 2,04 0,35 1,7 6,68 0,32 2,11 15 0,39 1,94 7,30 0,32 2,04 0,44 1,98 7,50 0,40 2,27 0,47 2,0 7,60 0,47 2,46 20 0,51 2,10 7,98 0,52 2,56 0,53 2,15 8,17 0,54 2,59 0,54 2,1 8,20 0,55 2,63

A partir des abaques fournies par Shore Protection Tableau 4 Manual (1973) nous pouvons déterminer, pour une hau­ Relevé des vents et des hauteurs de précipitations entre le 17 mai et le 3 juin. teur d'eau moyenne de 1,5 rn (correspondant à celle des Wind and precipitation summary between 17 May and 3 June. bassins de l'étang de l'Aude et de Sigean-La-Nadière), l'amplitude H, la période Tet la longueur d'onde L du Mai-juin Vent en Direction Précipitations clapot ainsi que calculer les vitesses maximales orbitales 1977 mis en mm et critiques sur le fond pour différents fetchs. Les résul­ 17 3,25 NW 2,5 tats sont regroupés dans le tableau 3. 18 3,6 NW 101,6 î9 5,5 E 17,9 20 2 NW 7,8 Les vitesses critiques u. développées sur le fond par la -21 2 NW 1,5 22 2 ENE 0,7 houle et qui sont reliées également à la force a tractive r0 23 2,25 ENE t sur le fond par la relation (1) doivent être comprises 24 2,5 E 0,2 entre 1,5 et 2,3 cm/s pour éroder les vases consolidées 25 2,8 E t au niveau du fond. De telles valeurs sont atteintes par 26 1,5 NW 0 27 8,9 NW 0 des clapots d'un minimum de 0,30 rn (fetch de 3,5 km), 28 6,25 NW 0 0,33 rn (fetch de 5 km) pour des vents égaux ou supé­ 29 4,25 WNW 0 30 3 E 0 rieurs à 10 m/s et de 0,20 rn (fetch de 7 km) pour des 31 3,5 NW 0 vents de 5 mis ou supérieurs. Les vents de 10 m/s et 1 2,75 E 0 plus représentent 11,73 % des vents soufflant dans 2 2,6 E 0 3 6 NW 24,2 l'année et ceux de 5 mis correspondent à 42,7 % des

416 LA TURBIDITÉ DANS L'ÉTANG DE BAGES-SIGEAN !AUDE)

Variation spatio-temporelle des turbidités dans l'étang Le long de la rive sud les phénomènes sont quelque peu de Bages-Sigean différents. On y remarque (fig. 7 b) : - la faible influence de la crue de la Berre du 18 mai; Dans l'étang de Bages-Sigean (fig. 7 a), le long du pro­ fil axial, on observe une atténuation rapide, entre les 20 - une élévation sensible de la turbidité des eaux, à la et 21 mai 1977, d'une crue survenue le 18. Les valeurs suite du coup de vent de NW, dans la partie sud du bas­ de turbidité dans l'étang de l'Au te, le plus proche de sin de Sigean, lieu d'accumulation de tous les éléments l'embouchure de la Berre, décroissent alors fortement en suspension provenant du reste de l'étang; de 30 à 5 mgil. - une augmentation de la turbidité le 3 juin après la crue de la Berre et un relèvement de l'intensité du vent Lorsque la force du vent croît, les turbidités augmen­ de NW qui favorise un nouvel apport au niveau du che­ tent (le vent de NW varie de 1,5 mis à 7-9 mis les 27 et nal de l'étang (seul exutoire de l'étang). 28 mai); elles passent de : Le long de la rive nord-est (fig. 7 c) on note : - 5 à 40 mgil au nord de l'étang de l'Aute; - 5 à 20 mgil au centre de l'étang de Sigean. - une hétérogénéité de la teneur en particules en sus­ pension. La concentration est forte au nord du rivage Elles augmentent également de 3 à 10-15 mgil, le 3 juin, de l'île Sainte-Lucie après la crue du 18 mai car ce sec­ en relation avec un vent de NW·de 6 mis couplé à une teur est dans l'axe des courants; crue de la Berre. - une turbidité plus élevée au nord de l'île de la Les turbidités plus élevées, au cours du coup de vent des Nadière que le long de l'île Sainte-Lucie lors du coup de 27 et 28 mai, dans l'étang de l' Aute que dans le èentre vent de NW des 27 et 28 mai; là encore probablement de l'étang de Sigean proviennent d'une circonstance sous l'effet d'une accumulation dans un piège sédimen­ fortuite. Les alluvions de crue au large de la Berre (crue taire; du 18 mai) ont atteint l'étang de l'Au te mais pas encore - une légère augmentation des turbidités le long de la celui de Sigean et n'ont pas eu le temps de se consolider. rive ouest de l'île Sainte-Lucie à la suite de la crue du Elles sont plus facilement reprises, lors du coup de 3 juin et du renforcement des vents de NW. vent, que les sédiments du fond des autres parties de la Le report des valeurs de turbidité obtenues en fonction lagune. de la position des points de prélèvements, sur le profil PROFIL AXIAL A turbidîtê axial (fig. 8), à la suite de précipitations abondantes sur mg fi 40 ., points le bassin versant de l'étang (entre le 15 et le 19 mai 35 1977), permet de tracer les courbes d'évolution de la ~-·••• 2 turbidité. D'une manière générale, la turbidité décroît du Nord vers le Sud dans un rapport voisin de 3i2. En résumé, lors de la crue de la Berre les turbidités sem­ blent plus. fortes dans la partie nord-ouest de l'étang de Sigean que dans la partie sud-est. Par contre, les turbi­ dités sont en moyenne plus élevées au sud que dans la partie nord lors des coups de vent de NW.

PROFIL LONGITUDINAL NORC B

turbtditè 35 mgfi turbidité en 35 mg/1 vent fort de points NW • ~ -6 5 ----7

courbes de tendance----_

•2omai ~21 ma• .. 22ma• PROFIL LONGITUDINAL SUD C po1nts de turbidité ~ mgjl œ pointS 11 prélèvement ~ 2-4 u ---9 •• •t Figure 8 Évolution spatio-temporelle de la turbidité dans l'étang après une ---· crue (mai 1977). Turbidity in spa~e and time in the lagoon following a flood river during May 1977.

Variation spatio-temporelle des turbidités dans le che­ Figure 7 nal portuaire Variation de la turbidité en fonction du temps dans l'étang de Sigean­ La-Nadière. Dans le chenal portuaire, les mesures ont été effectuées Turbidity measurements in the Sigean-La-Nadière lagoon as a june­ dans le même intervalle de temps (entre le 17 mai et le lion of t1me. 3 juin 1977) que celui de l'étang.

417 D. CATALIOTTI-VALDINA

L'ensemble des mesures turbidimétriques réalisées turbidité en entre les mois de novembre 1976 et juin 1977 met en évi­ vent fort de mg/1 potnts HW •• •13 dence une évolution des turbidités en fonction de la •• -14 vitesse et de la direction du vent et des points de prélè­ -.&o-15 --16 vements (fig. Il); Par régime de NW les turbidités sont . --fT plus fortes à l'entrée du chenal qu'à la sortie maritime u" ••• •18 --4--canal dela dans un rapport variant de 2 (pour les faibles turbidités) • Robi à 5 (pour les fortes turbidités). Lorsque l'intensité du • • vent avoisine ou dépasse les 10 m/s, les valeurs de turbi­ dité croissent notablement, puisqu'elles s'échelonnent entre 60 et 300 mg/1. Un seuil de vitesse apparaît donc, au-delà duquel se produisent des remises en suspension importantes. Toutefois, ces fortes concentrations ne s'observent que lorsque le vent est bien établi. Par

22 24 régime de SE (fig. 10) le sens du gradient de décroisse­ ment est inversé et son taux est plus élevé (de l'ordre de Figure 9 10 le 2 mai 1977). Variation de la turbidité en fonction du temps dans le chenal por­

tuaire. turbidité en Turbidity measurements in the harbour channel as afunction of time. 1000 ""'''

L'aug~entation de la turbidité dans le chenal à la suite de la crue du 18 mai est différée d'une journée (fig. 9) par rapport à l'étang. En effet, malgré un léger vent de NW (tableau 4), l'eau reste bloquée dans l'étang par suite d'un haut niveau de la mer et d'une houle rési­ duelle de SE à l'entrée maritime du chenal portuaire. Le matériel est ainsi moins rapidement entraîné vers la mer. Les valeurs de turbidité passent de 5-10 mg/1 à 10- 30 mg/1. A l'inverse, la crue du 3 juin se manifeste immédiate­ ment dans le chenal portuaire par suite d'un léger coup de vent de NW (6 m/s), favorisant un écoulement vers la mer. A la suite du coup de vent de NW le 27 mai, les turbidités augmentent rapidement. Elles fluctuent de 3-8 mg/1 à 15-30 mg/1 pour diminuer dès que le vent

faiblit. Le maintien de la turbidité le 23 mai entre 8 et 1 14 16 17 18 potnts de 15 mg/1 peut s'expliquer par les apports du canal de La preleve nt Figure Il Robine qui récupère les eaux de l'Aude en crue pendant Évolution de la turbidité dans le chenal portuaire en fonction de la la période de mesures. vitesse du vent. Les valeurs de turbidité obtenues après un coup de vent Turbidity in the harbour channel as function of wind velocity. de NW (du 26 au 28 mai), reportées en fonction de la position des points de prélèvements, montrent une DISCUSSION décroissance progressive (fig. 10) de l'entrée lagunaire du chenal à la sortie maritime quelle que soit la vitesse Les précipitations, par leur action érosive sur le bassin du vent (tableau 4). versant du complexe lagunaire des Bages-Sigean, sont responsables d'un apport solide et liquide important 6 3 turbidité en dans l'étang : 20 à 30 000 t pour 126.10 m d'eau envi­ mg/1 30 ... ron par an. -~.::::.. Le ruissellement direct est à l'origine d'une forte abla­ 25 -.. _ '0:::-- courbes de tendance -- tion des rives du domaine lagunaire et, en particulier, 20 ------~.:-0'::_ des falaises marno-calcaires oligocènes d'un certain ...... ::----- 15 • ...... ---- nombre d'îles et de promontoires. Cette érosion ajoute &ct.. _..,.~ ..."":-...:,•···. -> ---C un apport d'environ 10 000 tian de matériaux fins 10 •••••• ::····:::.:~:::::.:::.·.·-··,~ •• :.-::: .. - .....~5:·:~ 2emai • directement dans le complexe lagunaire. • 27mai c 2Bmai ~ Les suspensoïdes dans les eaux douces des rivières peu­ points de 14 15 10 17 18 prelev ment vent évoluer de trois manières différentes au contact Figure 10 des eaux salées de l'étang (fig. 12) : Évolution spatio-temporelle de la turbidité dans le chenal portuaire après un coup de vent de NW (mai 1977). - floculation et sédimentation d'une partie ou de la Turbidity in space and time in the harbour channel following a wind totalité des éléments pélitiques aux embouchures lors­ storm from the NW, during May 1977. que l'intensité du vent est nulle;

418 LA TURBIDITÉ DANS L'ÉTANG DE BAGES-SIGEAN lAUDE!

Figure 12 Bilan qualitatif et estimation quantitative de la sédimentation dans le complexe lagunaire de Bages-Sigean et le chenal portuaire de Port-La­ Nouvelle. Qualitative budget and quantitative evaluation of the sedimentation in the Bages-Sigean lagoon and Port-La-Nouvelle harbour channel.

BASSIN VERSANT EMBOUCHURES COMPt.EXE LAGUNAIRE CHENAL PORTUAIRE MER

~Liquides ---+ Pnte1p1taltons c:=::=:::>Transport APPORTS ~ Terr1genes AGENTS ·----· Coura'lls PHENOMENES DD a Ct>Dépot ~ Tem98"1'S •t organ~ques •••••••• ..,.Clapots ~Rem•seen suspenston

transport par les courants si la crue est couplée à un Aucune évaluation de la quantité de matériel transitant léger coup de vent. Le dépôt des matériaux se fait alors par le chenal portuaire et arrivant en mer n'a pu être dans l'étang de Bages-Sigean; . faite, mais il semble qu'elle soit négligeable par rapport - transport direct jusqu'au chenal portuaire par à ce qui sédimente dans la zone portuaire de Port-La­ régime de NW bien établi suivi d'une sédimentation en Nouvelle : 40 à 50 000 t/an de matériaux terrigènes et raison de la diminution des vitesses de courant après 10 000 t environ de matériaux d'origine organique l'entrée occidentale du chenal portuaire. (débris d'algues essentiellement). Dans le cas général cependant, la plupart des éléments Finalement, les mécanismes régissant la sédimentation véhiculés par les rivières floculent, dans un premier des éléments fins dans un milieu margina-littoral temps, au niveau des embouchures où s'exerce le comme le complexe lagunaire de Bages-Sigean - Port­ « choc de salinité ». Ils ne· se distribuent qu'ensuite La-Nouvelle rappellent ceux que l'on observe dans cer­ dans tout le complexe lagunaire. taines zones de dilution, les estuaires par exemple. Tou­ Une étroite corrélation existe entre les régimes météoro­ tefois, la comparaison s'arrête très vite à une analogie logiques et la répartition des sédiments dont, en dernier de parcours et au caractère multicyclique des particules; ressort, les vents sont responsables car ils déterminent : les facteurs et les processus hydrodynamiques sont, en effet, très différents. Le vent, et en particulier celui de NW, par les clapots et Les clapots nécessaires à la remise en suspension les courants qu'il anime, est donc le facteur indirect, responsable de l'envasement du chenal portuaire. En effet les fortes turbidités apparaissent en premier lieu dans le centre des bassins de l'Au te et de Sigean lorsque les clapots ont une amplitude de 0,30 à 0,35 rn; CONCLUSIONS condition réalisée pendant 11,7 % du temps pour des vitesses de vent égales ou supérieures à 10 rn/s. Cepen­ L'intégration des courbes de débits solides permet dant, si le seuil créé par Port-Mahon/Pointe Cabal ne d'estimer l'apport en éléments fins dans le complexe constitue pas un obstacle au développement du clapot, la remise en suspension des sédiments du fond peut lagunaire à 10 000 ou 15 000 t pour le Rieu et la Berre si on admet 4 à 5 crues par an. En fait, le bassin versant commencer pour des vents compris entre 5 et 10 rn/s. de ces deux cours d'eau ne représente que la moitié du 2 bassin versant total du complexe lagunaire (450 km ), Les courants transportant et diffusant les particules donc pour la totalité de celui-ci l'apport peut être ainsi mobilisées estimé à 20 ou 30 000 tian pour les rivières, auxquelles il faut ajouter les éléments issus du ruissellement direct La vitesse de déplacement de la masse d'eau due au vent dans l'étang (plus de 10 000 t). L'apport terrigène total ne dépasse presque jamais 0,25 mis au fond dans la est, par conséquent, d'au moins 30 000 à 40 000 tian. lagune, alors que la vitesse minimale nécessaire à l'éro­ Comme, par ailleurs, la contribution biogène peut être sion et à la remise en suspension peut être évaluée à évaluée à 20 000 tian, l'apport total en suspension dans 0,36 mis. Les particules en suspension peuvent être l'étang de Bages-Sigean est d'au moins 50 000 à 60 000 véhiculées dans la totalité du domaine lagunaire en tian. fonction du régime de vent du moment. L'effet résul­ La remise en suspension ultérieure des matériaux tapis­ tant de cette circulation est la dispersion et le triage des sant le fond des étangs est effectuée par le clapot. En suspensoïdes. Finalement, les clapots assurent la fonc­ effet, la vitesse de déplacement de la mass'e d'eau due tion de mise en mouvement des particules et les cou­ au vent ne dépasse presque jamais 0,25 mis au fond rants celle du transport. dans la lagune, alors que la vitesse minimale nécessaire Un cycle conditionnel, fond- suspension- fond est par­ à l'érosion et à la remise en suspension peut être évaluée couru quel que soit le régime de vent jusqu'à l'élimina­ à 0,36 mis. Les clapots sont les agents de remise en sus~ tion éventuelle hors du complexe lagunaire (en régime pension , et les courants déterminent le transport du de NW seulement). matériel.· Cette remise en suspension par les clapots a

419 O. CATALIOTTI-VALDINA lieu pour des vents égaux à 10 rp/s, correspondant à des RÉFÉRENCES clapots d'amplitude minimum de 0,35 rn, conditions réalisées pendant Il, 7 OJo du temps. Les courants liés au déplacement de la masse d'eau participeront à l'érosion et se surimposeront très probablement à l'érosion due Action de la houle sur les sédiments, 1976. Publication du CNRS aux clapots pour une intensité de vent supérieure à (CNEXO) réalisée par le département de sédimentologie du Labora­ 15 rn/s. toire Central d'Hydraulique de France. Pour les faibles vitesses de vent de NW, la turbidité Aloisi J.C., Monaco A., Pauc H., 1975. Mécanisme de la formation des prodeltas dans le Golfe du Lion. Exemple de !'.embouchure de varie de 5 à 20 mg/1. Par contre, il existe un seuil de l'Aude (Languedoc), Bull. lnst. Géol. Bassin Aquitaine, 18, 3-12. vitesse de vent (10 m/s) à partir duquel la remise en sus­ Boutière H., 1974. L'étang de Bages-Sigean, modèle de lagune médi­ pension s'accentue. Dans ce cas les turbidités sont en terranéenne, Vie et Milieu, 24, 1-B, 23-57. moyenne de 400 à 500 mg/1 au débouché oriental de Casanobe G., 1971. Pluviométrie, Ann. Climatol., Chambre d' Agri­ l'étang de Sigean et de 100 à 200 mg/1 dans le reste du culture des P.O., 11-16. chenal portuaire. Cette diminution des turbidités entre Cataliotti-Valdina D., 1978. Modalités et bilan de la sédimentation l'entrée occidentale du chenal portuaire et sa sortie pélitique dans un milieu margino-littoral. Le complexe lagunaire de maritime montre que le chenal portuaire, exutoire de Bages-Sigean - Port-La-Nouvelle, Thèse 3• cycle, Univ. Toulouse, ~03 p., 64 fig., 18 tabl. l'étang de Bages-Sigean, joue le rôle de bassin de décan­ Courtil-Xavier C., 1977. Deux types de sédimentation lagunaire tation pour tous les éléments en suspension qui y transi­ actuelle en Méditerranée : apports détritiques à Bages-Sigean et ooli­ tent. Le volume des matériaux qui sédimentent dans le thes de Lapalme, Thèse 3• cycle, Univ. Paris VI, 145 p. chenal portuaire est élevé : 186 000 m3 1an en moyenne Fiala M., 1972. Étude physico-chimique des eaux et des sédiments de dont 55 800 m 3 ont une origine marine (sables) et se l'étang de Bages-Sigean (Aude), Vie et Milieu, 23, 1-B, 21-50. retrouvent dans le premier kilomètre du chenal côté Laboratoire Central d'Hydraulique de France, 1975. Étude de la sédi­ maritime. Les vases que l'on rencontre dans le reste du mentation dans le port de Port-La-Nouvelle :composition et proprié­ tés physico-chimiques des sédiments. chenal portuaire (1 ,5 km) ont une origine lagunaire et Laboratoire Central d'Hydraulique de France, 1978. Étude de la sédi­ correspondent à un apport d'environ 50 à 60 000 t/an mentation de l'étang de Bages-Sigean : apports et mouvements des de matériaux fins. sédiments. Le bilan est ainsi équilibré entre les apports fluviatiles Mercier A., 1973. Étude écologique de la végétation du complexe et organiques dans le complexe lagunaire (50 à 60 000 lagunaire de Bages-Sigean (biomasse et production primaire des tian) et la quantité de sédiments vaseux dragués tous les macrophytes), Thèse 3• cycle, Univ. Paris VI, 105 p. ans dans le chenal de Port-La-Nouvelle (50 à 60 000 Migniot G., 1977. Action des courants, de la houle et du vent sur les tian). sédiments, La Houille Blanche, 1, 9-47. Petit G., 1953. Introduction à l'étude écologique des étangs méditer­ Toutefois, il faut garder à l'esprit que ces valeurs ne ranéens, Vie et Milieu, 4, 4, 569-604. représentent qu'imparfaitement la réalité, car l'histoire Petit G., Mizoule R., 1962. Contribution à l'étude écologique du du complexe lagunaire a montré que si le chenal por­ complexe lagunaire de Bages-Sigean, Vie et Milieu, 13, 2, 205-230. tuaire s'envasait, le domaine continental gagnerait éga­ Rapport E.D.F., PNEG29, 1975. Centre de recherches de sédimento­ Iement sur le domaine lagunaire. Par conséquent, les logie marine de . apports dans le complexe lagunaire sont certainement Shore Protection Manual, 1973. Coasta/ Engineering Research Cen­ plus élevés que ceux présentés ici. ter, US Corps. Engineers, 3 vol., 1125 p.

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