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c/vu C.-T. LE ROIJX

RAPPORT SCIENTIFIQUE

SUR LA FOUILLE DES ATELIERS D'EXTRACTION

ET DE TAILLE DE LA "DOLERITE DU TYPE A"

A PLUSSULIEN (COTES-DU-NORD)

CAMPAGNE 1976

Depuis leur découverte en 1965, les ateliers de fabrication de haches polies de Plussulien ont fait l'objet d'une exploration méthodique avec deux campagnes de prospection en 1966 et 1967, suivies par cinq campagnes de fouil- les de 1969 à 1973. Une ultime campagne a été entreprise en 1976 ; elle avait pour but, après une mise en sommeil de 2 ans, de parachever le dégagement des structures d'extraction visibles sur la face est de l'affleurement rocheux, de compléter les informations par la fouille d'une zone très différente de celles explorées précédemment et de rafraîchir les coupes anciennes pour en revoir l'inter- prétation après ce délai de réflexion et les présenter à l'excursion Bretagne du Congrès U.I.S.P.P.

ETAT DES LIEUX

Les tranchées anciennes avaient été garnies de bottes de paille sous une bâche plastique ; l'enlèvement de cette protection ainsi que le dêbrous- saillage, ont constitué le premier travail. - 2 -

PROPRIETE

Comme les années précédentes, Mne LE FALHER et ses enfants, proprié- taires, nous ont fort aimablement autorisés à poursuivre nos recherches, de même que l'exploitant, M. Y. MAGOUROUX.

CONDUITE DES TRAVAUX

Le chantier a fonctionné en continu, du 26 juillet au 14 aoiit 1976. Les méthodes de travail sont restées les mêmes que précédemment (grands décapages horizontaux, relevé tridimensionnel des pièces importantes, prises d'échantillons globaux pour décompte granulométrique et typologique des dé- chets de taille. Le matériel mis en oeuvre a été l'outillage léger classique.

MESURES DE PROTECTION

En fin de chantier, après visite du Congrès U.I.S.P.P., les tranchées ont été rebouchées par une entreprise pour remise en état des lieux conformé- ment aux engagements pris â l'égard des propriétaires. Par contre, les structures dégagées sur l'affleurement sont restées accessibles à la visite.

LISTE DES PARTICIPANTS

M. C.-T. LE ROUX, Directeur du chantier, Directeur des Antiquités Préhistoriques de Bretagne, M. Y. LECF.RF, Agent Technique de la Circonscription, M. F. LE PROVOST, Instituteur, Correspondant du Directeur des Antiquités, M. M. GAUTIER, Instituteur, M. M. BATT, Etudiant, Mne A. BATT, Etudiante, Me!le M.A. MELL, Institutrice, Melle Cl. LUCAS, Secrétaire, MeTle L. CHATONEY, Etriante, Melle D. DELALOY, Secrétaire, M. D. GALLOU, Ingénieur, M. J.-C. LE GOFF, Instituteur.

SITUATION DES COLLECTIONS

Le matériel récolté est actuellement pour une petite partie en cours - 3 -

d'étude au siège de la circonscription â Rennes ; il est destiné à rejoindre l'ensemble du produit des campagnes précédentes, au Dépôt départemental des fouilles préhistoriques des Côtes-du-Nord, à Otiingamp.

PUBLICATIONS

Depuis le précédent rapport de 1973, citons :

- Gallia-Prëhistoire (Informations archéologiques) : 18, 1975, pp. 520-522, D° " " : 20, 1977 (à paraître). - C.-T. LE ROUX, Stone axes of Brittany, Symposium on stone implements, Nottingham, 1977 (à paraître).

PRINCIPAUX RESULTATS DE LA CAMPAGNE 1976

Rappelons tout d'abord que la nomenclature des carrés de fouille est établie sur une grille dont chaque maille, de 10 m de côté, est désignée par une lettre sur l'axe Nord-Sud et par un chiffre sur l'axe Ouest-Est. Le point origine situe sur le sommet topographique du rocher porte la cote Oo.

Il a été complété dans deux secteurs :

- Partie nord-est (Zones 01 SW, 01 NW) : La roche, abrupte et bien dégagée, conservait cependant plusieurs importantes poches de végétation dans les creux qui ont été nettoyés ; il s'agissait d'anfractuosités à angles vifs, dirigées par 1- réseau de diaclases et provenant de l'extraction de blocs. Aucune trace de percussion n'y a été reconnue mais le remplissage, formé d'éclats de tous calibres simplement emballés dans l'humus, montre que la taille s'est pratiquée sur le sommet, au voisinage de ces anfractuosites (comme d'ailleurs dans la zone de fouille voisine 00 SE fouillée en 1969-70, qui avait été datée de 5000 B.P.).

- Partie sud-est (Zones PI SE, PI NE) : L'envahissement par la végétation était plus marque par suite du profil plus mollement et régulièrement bombé. Le décapage a révélé une surface très tourmentée avec une large zone à prélè- vements intensifs, guidée par une grande diaclase nord-sud. Au fond, une surface grêlée semblait tout à fait analogue â celle décrite en 1969-70 pour 00 SE. Comme elle, elle était associée à une poche de petits gravillons de bouchardage et un petit amas de charbon de bois. La masse des déblais correspondait essentiellement à d'assez gros éclats de débitage, étalés en coulée diffuse depuis le sommet de l'affleure- ment. - 4 -

Dans cette zone également, la bordure du rocher était remarquable par des phénomènes de corrosion pédologique mettant en relief un réseau de diaclases parfaitement régulier, débitant la roche en "briquettes" parallê- lépipédiqueS. Ce réseau explique le caractère anguleux très vif des traces d'extrac- tion dans ce secteur et son exploitation préférentielle par les préhistoriques.

- Partie sud (Zone Q1 NW) : Le décapage s'y est en fait limité à un simple nettoyage des petites poches d'éclats et humus emprisonnées dans les anfractuo- sités dues à des aracnements ; les diaclases, plus massives ici, amènent ces extractions à prendre l'aspect d'énormes conchoïdes qui ne sont qu'à peine guidés par quelques joints virtuels.

2°) Fouille_des_déchets_de_taille

Deux zones de fouilles contigues (en Q1 SE et Q1 NE) ont été ouvertes en ëquerre à l^.angle sud-est de l'affleurement de manière à attaquer une zone nettement différente de celles déjà explorées tout en prolongeant les coupes déjà obtenues.

- En Q1 NE (et son prolongement sur l'Ouest de Q2 NW) il s'agissait en fait de la prolongation du décapage sud-est, la roche continuant à plonger en pente douce vers l'Est, à peine interrompue par de modestes enlèvements. L'accumulation des déchets, elle aussi, était la prolongation de ce qui avait été observé plus haut : petits et moyens éclats emballés dans une argile humifiée. Une traînée de gros blocs assez nette venait cependant recouper cette série assez monotone, mais sans que l'on puisse .affirmer une structure intentionnelle reposant vraiment sur un niveau d'arrêt de l'ac- cumulation. Quelques poches charbonneuses ont été recueillies, mais toujours très modestes. Cependant, d'assez nombreuses ébauches ont été relevées dans ce secteur qui donnait l'impression d'être, en plus modeste, l'équivalent de la zone 03 NE, fouillée en 1972-73.

- En Q1 SE, les choses étaient nettement plus complexes : - La partie superficielle a donné, à la périphérie de l'affleurement, une auréole de petits éclats, large de 2 à 3 m et formant un niveau d'arrêt assez net pour avoir pu servir de limite de fouille et correspondant â ce qui vient d'être décrit en Q1 NE.

- Dessous, venait un amoncellement extrêmement grossier, riche en blocs bruts d'extraction ou â peine retaillés et en lentilles d'éclats de tous ca- libres mais généralement moyens ou grands. Certaines des poches de gros blocs entassés pratiquement à sec, avaient des limites sub-verticales supposant des recomblements de tranchées anciennes dans les déblais. Dans l'ensemble, cet entassement rappelait assez bien ce qui avait été observé dans les niveaux supérieurs de la coupe principale NI SW - NI SE, mais ici on n'observait pas les traces de granos brasiers de la phase 3 (si ce n'est un foyer, relativement modeste, plaqué sur le roc).

- Cet amas reposait sur un niveau H blocs et petits éclats, emballés dans une terre argileuse grise, mêlée de charbons de bois, niveau qui bloquait lui-même une ancienne zone d'extraction d'où la roche avait été débitée S gran ds éclats.

- En résumé, il semble qu'on puisse raccorder cette succession à la coupe principale de la façon suivante :

- Auréole superficielle : déchets glissés à différentes époques depuis les ateliers situés au sommet du rocher (sa base correspondant plus ou moins au sol 1).

- Grande masse de blocs et éclats à secs : phase 3, très développée ici, mais sans débitage par le feu par suite du caractère très diaclasé de la roche.

- Lit d'argile à charbons emballant blocs et éclats : Sol 3.

- Le pointement recouvert par le précédent, avec gros débitage à la volée, semble bien caractéristique de la phase ?..

CONCLUSIONS

Cette ultime campagne a donc permis de vérifier jusqu'à quel point les résultats acquis précédemment pouvaient être généralisés à l'ensemble du site ; on constate que, malgré quelques corrections nécessaires, le schéma précédemment proposé reste valable. A partir des renseignements recueillis tout au long de la fouille, il devient tentant, ne serait-ce que comme hypothèse de travail, d'essayer quelques estimations chiffrées sur la production de cet atelier et swr son impact dans-la vie des populations néolithiques armoricaines. - 6 -

I - Estimation de la production

Surface de la partie centrale de l'atelier, environ : 10.000 M2 Epaisseur des déchets accumulés : 0,5 à 3 m ; estimation moyenne : 1,5 m soit un volume de déchets de taille de : 15.000 M3 Surface des zones périphériques d'ateliers : 1 km 2 1/3 de cette surface est garnie d'un lit d'éclats repré- sentant une couche de 10 à 15 cm, soit : 45.000 f 13 Le volume total des pierres travaillées s'élève donc à environ : 60.000 M3 (A la précision de nos estimations, on peut négli- ger le coefficient de foisonnement du matériau compact au même matériau, débité en "tout venant", qui est de l'ordre de 20 %).

Nos propres essais de taille et de reconstitution des nucleus montrent que, si l'on tient compte de la perte par casse ou blocs impropres d la taille, il faut en- viron 10 litres (30 kg) de roche pour obtenir une ha- che moyenne (150 à 300 g), soit 100 habhes par M3 ex- trait d'oG une production totale de : 6.000.000 de haches Cette production est répartie sur 1200 ans de pleine activité (entre 5100 et 3900 B.P.), sott en mo- yenne annuelle : 5.000 haches ce qui représente, en supposant une activité sub-con- tinue (disons sur 250 jours par an), une moyenne jour- nalière de : 20 haches

II - Estimation de la population

La production a alimenté à 50 % toute la Bretagne et, à 30 une bonne partie de l'Ouest de la . Si on prend une base de 60.000 km2 alimentés à 40 %,,on obtient un "marché" annuel moyen de : 5.000 x 0,4 = 12,500 haches

A titre d'hypothèses imaginons que tous les hommes adul- tes soient des utilisateurs de haches (environ 1/4 delà population dans une société primitive) et qu'ils aient besoin de 1 hache par an (y compris les rëaffutages, la casse et les pertes), les 12.500 haches représentent : 50.000 personnes - 7 -

soit une densité moyenne sur la zone considérée de : 0,8 au km2 (assez proche des rares estimations chiffrées faites par ailleurs, sur des bases très différentes).

III - Estimation du territoire contrôlé

Nos essais de reconstitution technique de la fa- brication d'une hache amènent à proposer les durées sui- vantes :

Extraction de la roche : négligeable (1 journée de tra- vail peut fournir la matière pour plusieurs diaaines de haches) Taille de l'ébauche (y compris les ratés) : 1 heure Retouche de la hache taillée : 1 heure Bouchardage (selon le soin, la dimension et la forme de la pièce : 2-4 heures Polissage sur bouchardage (selon le soin) : 2-10 heures Une hache courante représenterait donc à peine : 1 journée de travail Une belle pièce pouvant aller jusqu'à : 2 ou 3 jours

Tout le polissage n'étant pas fait sur place, pre- nons la base de 1 hache par jour et par ouvrier (ou son équivalent, en cas de travail occasionnel). Une produc- tion quotidienne de 20 haches suppose la présence sur le chantier de : 20 ouvriers qui correspondent à une population (si Ton prend un coefficient réduit de 1/3 pour tenir compte d'une aide par des femmes ou des adolescents) de : 60 personnes

Celles-ci ne produisant pas normalement leur nourriture pencant leur temps de travail (que ce soit 60 professionnels "temps plein" ou leur équivalent en "occasionnels", le problème reste le même) quelle peut être l'importance de la communauté capable de les nour- rir sans difficultés ?

Si Ton admet 5 % comme un prélèvement acceptable (soit environ 1'équivalent de 1 jour par mois ou 15 jours par an) on obtient un groupe de : 1200 personnes

Si Ton admet pour cette population une densité de 1 légèrement supérieure â la moyenne, par suite des - 8 -

ressources apportées justement par le gisement, le territoire contrôlé sera de : 1.200 km2 ce qui correspond à un cercle de rayon : R = 19,5 km

Si Ton trace sur une carte un cercle de 20 km de rayon, centré sur les ateliers, on constate qu'il englobe un territoire remarquable englobant les hautes vallées de l'Oust et du Blavet, accès directs à la côte morbihan- naise et toute la partie orientale du bassin de Chateaulin encadrée au Sud par les collines schisto-grëseuses de la forêt de Quénécan et ses abords, et au Nord Tes hauteurs granitiques de - St-Nicolas-du-Pelem - Rostrenon. La répartition des mégalithes, concentrés sur ces deux groupes de hau- teur, se fait préférentiel!ement à l'intérieur de ce cercle idéal, de même que les habitats néolithiques des hauteurs de St-Nicolas-du-Pelem - Tremargat - . Au-delà, un blanc relatif s'impose à l'oeil, jusqu'à la zone littorale vers le Nord, bien que le terrain reste le même, et jusqu'à la nouvelle zone granitique des Landes de Lanvaux vers le Sud, au-delà de la plaine argilo- schisteuse de Pontivy. De telles extrapolations en cascade pourront paraître osées ; elles méritaient d'être tentées à notre avis ; le fait qu'elles recoupent assez bien à différents niveaux d'autres estimations faites indépendemment mais aussi des faits d'observation tendraient à montrer qu'il y a là plus qu'une vue de Tes prit et qu'à travers cette industrie originale c'est toute l'organisation hu- maine de la Bretagne intérieure au Néolithique qui commence à apparaître. C.-T. LE ROUX

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RAPPORT SCIENTIFIQUE

SUR LA FOUILLE DES ATELIERS D'EXTRACTION

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