Contribution a l'étude des stkles discoidales dans la d'ultra-puertos

MICHEL DUVERT

D ans un travail précédent (Duvert, 1981) nous avons étudié un groupe ho- mogene de discoidales en Basse-Navarre. Cette étude nous avait permis de constater l'existence de particularismes, et de leur maintien au cours du temps, dans une aire donnée et plus précisément dans un village donné. Nous allons élargir ce travail a la Basse-Navarre en tenant compte de deux données que nous illustrons par deux citations. 1. «Si le relief dessine des valléis naturelles, les collines basques esquissent elles aussi des ensembles géographiques plus ou moins vastes ou le peuplement s'est, comme dans les vallées montagnardes, spontanément différencié; tandis que des tribus primitivement distinctes garantissaient dks l'origine l'individualité respective de chaque «province», a son tour chacun de ces ensembles naturels a suscité une sorte de conscience collective par laquelle ses habitants, se sentant solidaires, se sont démarqués de leurs voisins, phénoméne banal et cependant ra- rement exploité par les ethnographes et les linguistes, qui devraient y chercher une clé essentielle du «fait dalectal)) -au sens le plus large du terme. Ainsi se sont constitués les «pays», unités plus ethnographiques que strictement géograp- hiques, que définissent certains usages collectifs en matikre de comportement et de langage: citons en deca de la frontikre les «pays» de Baigorry (en l'occurren- ce une vallée !), de Cize, d'Arberoue, d'ostabarret, de Mixe; au dela, outre les vallées proprement dites de Roncal, d'Aezcoa ou de Baztan (cf. le Val &Aran aujourd'hui gascon et sa personnalité ethnographique si affirmée), des unités comme les ((Cinco-Villas))ou la Burunda. Ces communautés ont souvent servi jadis de cadre naturel aux découpages politiques, et leur réalité reste bien vivante dans la conscience populaire)). (Allikres, 1977). Dans la meme perspective: ((Ainsi, des vallées du Pays Basque jusqu'a celles d'Andorre, chacune avait ses associations, chaque village ses assemblées particu- MICHEL DUVERT likres ou l'autorité supreme appartenait a une aristocratie rurale, la classe privilé- giée des voisins, seuls propriétaires des montagnes. Liés par un collectivisme ri- gide souvent fort contraignant mais qui servait leurs intérets, leur esprit de quartier y fut tres puissant et, par un enchainement logque, ((l'esprit de clochen) en fut renforcé. Malgré les désaccords qui ne manquaient pas d'exister entre les villages d'une meme vallée, les habitants, liés par des intérets communs for- maient des entités sociales fermées a l'étranger au point d'en &re agressives)) (Toulgouat, 1981). Les discoidales que nous allons étudier datent des XVI et XVIIkmes siecles. A ces époques l'organisation du pays, par les associations de voisins, n'a cessé de prendre de l'importance face aux lignages; jusqu7a la fin du Moyen-Age ces derniers s'étaient appropriés de moyens de productions et avaient largement mo- delé l'espace. On peut imaginer ces communautés liées par des accords non écrits, affirmant leur personnalité mais aussi conscientes de leur force face aux lignages et aux bandes organisées. Elles devaient se réunir pour organiser leur vie et délibérer, sous les vastes porches des sanctuaires (qui devaient etre plus des espaces sacrés que des églises chrétiennes?), parmi les morts (dont les steles étaient plus des signes que des symboles chrétiens?). Ces assemblées (anteigle- sias, assemblées paroissiales...) devaient concerner de petits territoires, autorisant l'apparition ou le maintien et le développement de particularismes qui pourraient se traduire dans l'art populaire. 2. Durant le Moyen-Age les basques s'affirment comme étant un peuple 2 la personnalité bien marquée. Leur importante ne cessera de croitre en Espagne durant les XVI, XVII et XVIIIkmes siecles (Baroja, 1974). Au nord le Pays Basque qui fabrique les stkles que nous allons étudier, est un pays dynamique et entreprenant (Goyheneche, 1979). On y édifie, ou on y rebitit, de nombreuses maisons (3500 in 1608, pour le seul , en l'espace de trente ans); un art religieux rural voit le jour (c'est un art profondément original dont l'archétype est labourdin, ses antécédents son inconnus); l'art funéraire, notamment les ste- les discoidales, est un art populaire d'une qualité rare; les labourdins adoptent des stkles tabulaires inconnues dans les autres provinces (et surtout en Basse- Navarre ou se définissent des types de stkles tout a fait originaux, et ce, 2 la meme époque); les basques sont des bitisseurs, ils connaissent la science de la taille de la pierre; ils exportent leur savoir dans toute la péninsule ibérique ou ils construisent chiteaux, églises... (ils ont faconné un gothique basque bien connu), durant les XV, XVI, XVIIemes et jusqu'au XVIIIkme sikcles. Ces activités trou- verít leur prolongement dans la vie de tous les jours. La chasse a la baleine jus- qu'au XVeme siecle (le pays en avait le monopole en Europe), puis la peche a la morue, apportent de solides revenus; les chantiers navals sont en pleine activité, jusqu'au au del2 du XVIIeme sikcle, leurs productions comptent parmi les mei- lleures d'Europe; le pays fournit de grands géographes, marins, explorateurs ... (qui ne sont pas tous nés sur la cate, Renaud d'Elissagaray est né a Armenda- ritz). Au debut du XVIeme siecle le mais est introduit, il bouleverse l'économie traditionnelle; cette introduaion n'est pas un cas isolé, le milieu rural n'a jamais cessé d'expérimenter des techiniques nouvelles et des moyens de production ori- ginaux (voir Baroja, 1974; Goyheneche, 1979); vers ces époques l'élevage tend a se développer. La population augmente, surtout a partir des ~VII-XVIII~~~S siecles (phénomene de bordiers) oú des conflits éclatent entre pasteurs et agri- culteurs-eléveurs maitres de maisons anciennes ou de bordes. Ce pays vit large- CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES ment ouvert sur l'Europe et plus particulikrement tourné vers l'Europe du Nord (mais aussi le bassin méditérranéen); il exporte ses productions (fer, acier, outils, armes; ainsi, a titre d'exemple, quand on consulte les listes des armuriers fabri- quant les fameuses épées de Toléde, on voit que les noms basques abondent, -Caro Baroja, 1974), il diffuse son savoir (art de la navigation, chasse 2 la ba- leine...); il modernise ses moyens de production en fonction des innovations de son époque (ce fut le cas pour les forges au Moyen-Age; puis pour les produc- tions d'armes de toute sorte...). Dans notre pays circulent non seulement les idées, parfois les plus avancées (a travers la ((Sociedad Vascongada de los Arni- gos del Pais» au XVIIIkme sikcle), mais aussi les produits les plus en vogue et les modes européennes. Le tableau que nous venons de brosser a grands traits n'est pas destiné 2 donner une image «objective» de notre pays; il a uniquement pour but de mon- trer qu'aux XVII-XVIIIkmes sikcles, le pays ne donne pas l'impression d'un mi- lieu archaique, replié sur lui meme. C'est au contraire un pays dynamique, qui échange, exporte ses idées et ses hommes. Dés lors il nous faut repenser com- plétement l'image de i'art basque telle qu'elle nous a été hativement transmise par de nombreux chercheurs et notamment Colas. A sa suite, ou par respect pour son autorité (si ce n'est par conformisme intellectuel), il était de bon ton de dire que l'art basque n'existait pas: ((Although «Basque art» has been so much discussed of late that the expression has become a cIiché, serious writers on the subject such as Colas an Philippe Veyrin have raised the question whether such a thtng as Basque art can truly said to exist» (Gallop, 1970). Croire avec Phlippe Veyrin, par exemple, que l'art funéraire basque est le fait d'hommes qui combi- nent astucieusement des motifs géométriques, sans trop réaliser ce qu'ils font, est une erreur. L'image du Pays Basque que nous venons d'esquisser, aux XVI- XVIIIkmes sikcles, meme si elle est naive (car simplifiée a outrance), nous incite a voir dans les oeuvres de cette époque autant d'affirmations d'un pays ouvert, sGr de lui meme, qui agit sur son environnement et cherche, en le modelant, a se donner de lui meme une image forte, correspondant a sa vision du monde.

Méthode de travail

Nous avons retenu un certain nombre d'ensembles d'oeuvres, certains sont cohérents d'autres sont purement artificiels, cela dépend des faits que nous vou- lons mettre en évidence. Dans le premier cas il nous a été possible de définir des archétypes possédant les caractéristiques de base de ces ensembles. Chaque ensemble étant défini (a travers un archétype ou non), sa répartition actuelle est donnée sur une carte. Nous avons utilisé la carte des communes du Pays Basque publiée par Viers (1975); les délimitations des pays on été faites confor- mément a Goyheneche (1979). Ces répartitions tiennent compte des observa- tions de Colas (1923), de Barandiarán (1981), de l'association Lauburu (inven- taires non publiés) et de notre propre recherche. Dans les communes mention- nées nous n'avons pas fait figurer le nombre d'exemplaires conservés, ainsi cer- taines distributions peuvent etre exagérées. Cependant nous avons essayé de donner un aspect semi-quantitatif sur la carte F uniquement; dans ce cas la den- sité des pointillés «rend compte)) de la densité actuelle de l'archétype considéré; dans les communes indiquées par : ?, les données sont insuffisantes ou absentes. MICHEL DUVERT

Ces considérations nous amenent ?iposer les limites de ce travail. L'absence de données quantitatives oriente la lecture des cartes en exagérant les réparti- tions réelles (et donc les influences qui se sont exercées au niveau de la créa- tion). Par exemple Macaye est le seul village non navarrais qui figure sur la car- te B,or l'archétype étudié n'y a été rencontré qu'une fois, encore s'agit-il d'un fragment en remploi dans le mur du cimetikre. Ces cartes traduisent l'état actuel de la recherche et des connaissances de l'auteur. D'une part nous ignorons le contenu et la provenance de collections particulikres (parfois, comme 2 Arcangues, nous ignorons la provenance exacte des nombreuses steles qui ont éte transportées), d'autre part il est fort probable que l'or, découvrira dans les villages des steles ou des fragments qui nous sont inconnus (combien de ces monuments ont servi 2 empierrer des chemins ou 2 confectionner des murs). Des lors, les aires de répartition devront etre sensible- ment augmentées mais nous ne croyons pas que l'essentiel de ces carte soit re- mis en question; il nous parait par exemple impossible que les stéles d'Amikuze, au XVIIeme sikcle, aient massivement pénétré le Garazi, la , le Labourd, etc. Ces cartes peuvent etre inexactes par excés. En effet les stkles sont des mo- numents transportables, trois exemples: le premier est emprunté a Colas (n." 233, 234); il y a 2 Hélette une stele qui provient d'Itxassou (et qui est caractéris- tique de la production de ce village), elle a été amenée ici il y a quelques années; enfin nous avons vu dans une ferme de Juxue, en Ostabarret, un banc de pierre contre la facade &une maison, il est confectionné avec un linteau de porte pro- venant de Tardets, en Soule... Une aire de répartition trop vaste pour un type de stkle ne signifie pas grand chose 2 priori, d'autant plus que la densité réelle du type en question est en principe inconnue. Les cartes que nous publions donnent une idée, il faut les accueillir avec prudence, ce ne sont pas des ((instruments de mesure)). Afin de ne pas alourdir le texte nous ne reviendrons pas sur ces réserves au cours de notre exposé. Afin de rester dans des limites raisonnables nous n'avons selectionné que certains ensembles de stkles discoidales; la Basse-Navarre est plus riche que ne le laisserait croire notre travail (nous ne parlons pratiquement pas des ateliers du Pays d'Ossés, de ceux de l'ostabarret ...). Au cours de ce travail nous avons utilisé le mot ((atelier)),nous voulons dire par la que certains créateurs partageaient une meme conception de l'espace par- fois une meme sensibilité quand ils n'utilisaient pas un meme type d'imagerie (et ceci est tres révélateur de la cohérence des ateliers, les éléments retenus sont tout aussi significatifs que ceux qui sont exclus des productions). Ces ateliers sont le fait de tailleurs de pierre (harginak) ou de familles de tailleurs de pierre qui semblent tous agriculteurs, au moins au Labourd (Lafourcade, 1978), dans les époques qui nous occupent.

Terminologie

Dans la description des discoidales nous allons utiliser un certain nombre de termes (voir Duvert, 1976) rappelés sur le schéma suivant. La stéle est formée par un socle et un disque délimité par une bordure. On y trouve deux axes prin- cipaux (V et H) et deux axes secondaires portant la base de quatre. Les axes CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASOUES principaux portent les régions 6, 9, 12 et 3; h leur interseaion se trouve la ré- gion O. Axes et régions ont des valeurs particulieres l.

Origine Province ou 0 disque col épaisseur diamétre Pays de la col Basse-Navarre

1. Suhescun G 43 ? 7,5 2. N G 52 28 17,5 13 3. >> G 50 28 5 2 5. Orsanco AM 54 27 17 2 6. >> AM 56 27 14 2 7. Larribar AM 58 30 19 1,9 8. Orsanco AM 46 23 15 2 9. Gabat AM 50 23,5 14 2,l 13. SUCCOS AM 51,5 29,5 12 1,7 14. >> AM 5 1 27 11 1,s 15. Orégue AM 49 27 14 18 16. AM 55,5 33 17 1,7 17. Helette AR 54 27,5 18,5 1,9 18. Suhescun G 53 24,5 13 2,1 19. » G 49 29 13,5 1,7 20. Masparraute AM 53,5 30 10 13 23. AM 60 34 16 1,8 24. Amorots AM 70 35 12,5/15 2 25. Masparraute AM 6 7 35 12 1,9 26. Luxe AM 6 1 3 1 17/19,5 1,9 27. ? AM 58,5 30 23,5/25,5 1,9 28. Lecumberry G 35,5 2 1 11 1,7 30. Domezain S 51,5 25 19 2 31. Saint Esteben AR 53,5 24 13 22 32. Beguios AM 45 20 12 2,2 33. Orégue AM 59,5 28 14 2.1

34. N AM 51 25 14 2 35. Luxe AM 54 27 14 2 36. Iroulégui B 30 14 1O 2,1 37. >> B 30 14 1O 2.1 38. >> B 34 14,5 10,5 2.3 39. >> B 38 19 10 2 40. >> B 42 2 1 10,5 2 41. >> B 39,5 20 1O 1,9 42. B 37 20 10 13

43. N B 36 > 8 4'4. >> B 28,5 15,5 11 13 45. >> B 33,5 14,5 9,5 2,3 49. Saint Esteben AR 38 2 1 10 13 50. Iholdy 48 26,5 6 1.8 51. Saint Michel G 44,5 ? 7 52. Béguios AM 53. >> AM 54. Iroulegui B 55. >> B 56. Béguios AM 57. Lantabat L 37,5 2 1 12 13 21. divers LA 22. Arrosa O MICHEL DUVERT

Dimensions des discoidales étudiées dans ce travail. On notera le grande taille des steles de l'A- mikuze (a Amorotz, Bizcay, Masparraute, trois villages voisins). La forme des steles n'est pas quel- conque, les rapport diametre / col son voisins de 2. G: Garazi; AM: Amikuze; AR: Arbéroue; S: Soule; B: pays de Baigorry; L: Lantabat; LA: Labourd; O: pays d'Ossés.

1. Ces valeurs impliquent autant de contraintes qui président au choix et i l'evolution des élé- ments décoratifs chargés d'animer l'espace. Enfin, le disque impose une loi du cadre, du fait de sa structure circulaire. CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES

Aire de distribution

Sur la carte A nous avons indiqué , en rétablissant les noms basques, les vi- llages ou se trouvent les monuments que nous allons étudier. Certains villages labourdins sont soulignés car on y trouve des formes d'art tres influencées par l'art navarrais, inversement dans les villages de l'Arberoue qui sont soulignés on trouve quelques formes typiquement labourdines. L'art fu- néraire au nord de la province est peu ou mal connu. Bardos et Guiche sem- blent avoir été sous l'influence des ateliers ((Bas-Adour)).Ce dernier village sem- ble avoir eu une production diversifiée; sur les huit pierres connues actuelle- ment, deux sont de type Bas-Adour et trois ont une forme unique au Pays Bas- que (Colas, n." 243, 244, 245). Nous ne connaissons pas i'art funéraire a Bida- che et c'est bien regrettable car ce village fut de tout temps un centre créateur de premiere importante en Pays Basque nord. Enfin, au sud de la Gascogne, au nord de Bidache, il reste peu de discoldales; Colas en rapporte quelques unes (n." 232 a 240). On remarquera que ces dernieres oeuvres sont surtout gravées et tardives (fin XVIIkme, XVIII et XIXeme sikcles). A Bergouey par exemple, les stkles et les plate-tombes qui les accompagnent, et qui sont de la meme épo- que, sont gravées. Cette facon de faire se retrouve a Charritte sur deux stkles (parmi les neuf connues) datées de 1784, ou ne figure que le nom des défunts. On retrouve également des steles gravées plus en avant dans l'Amikuze, a Mas- parraute par exemple, ou l'une est datée en fonction du calendrier révolutionnai- re (et donc de la fin du XVIIIeme sikcle). Nous n'avons pas pris ces oeuvres en considération, compte tenu de leur facture mais surtout de leur caractere récent et par la de leur intéret moindre comparé aux pikces du XVIIkme siecle. De meme nous ne parlons pas des croix pour ne pas alourdir ce travail. Beaucoup sont du début du XVIIIeme siecle et présentent, surtout en Amikuze, dans le pays d'Ossés et dans l'ostabarret, un tres grand intéret. A partir de cette époque jusqu'au début du XXkme siecle la Basse-Navarre fera des croix de grande taille (deux mktres et plus de haut, pour certaines) qui marquent encore bien de nos cimetikres; nous ne les étudierons pas. L'art bas-navarrais ne pénktre que sporadiquement en Soule, dans la dégairie de Domezain et a i'ouest de celle d'Aroue, ainsi qu'a Pagolle. 11 est inconnu ai- lleurs. Nous ne connaissons pas l'art funéraire a Hasparren ni a Labastide (ou il ne reste plus rien); Cambo et Itxassou représentent l'avancée extreme de l'art nava- rrais en Labourd (hormis de rares productions isolées comme a Larressore et Arbonne).

Ensembles d'oeuvres et leur répartition

Nous présentons dix ensembles d'oeuvres de la province, un ensemble pro- pre au village d'Iroulégui et, pour finir, le maitre de Saint Michel en Cize.

Premier ensemble, n." 1 2 4 et carte B: L'archétype est illustré en n." 4. 11 est caractérisé par l'identité des régions, 9, 12, 3 et 6 et par un traitement identique des quatre seaeurs; ces derniers sont

[71 151 MICHEL DUVERT CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASOUES MICHEL DUVERT formés par une série concentrique de structures paralleles aux axes V et H, sé- ries qui se referment sur la base de quatre. 11 ne sagit donc pas de quatre struc- tures rayonnantes issues de la base de quatre mais bien de structures centripetes. Le socle n'est pas décoré et ces steles ne sont jamais datées. L'archétype est en fait un modele stéréotypé reproduit largement en Baigo- rri, Ossés mais sourtout en Garazi (carte B); au contact de l'Arberoue et de YA- mikuze il se transforme sensiblement. Ainsi & Lantabat (n." 57) et & Suhescun (n." 1 a 3): - le meme theme n'occupe pas obligatoirement les deux faces, - la région 6 affirme une individualité par rapport & 9, 12 et 3, - les structures concentriques sont beaucoup moins compactes, - ces structures n'occupent plus obligatoirement les quatre secteurs. Cet archétype est inconnu en Ostabarret, Amikuze et Arberoue, il est incon- nu en Soule et en Labourd semble-t-il (sur la carte figure Macaye, ou nous avons trouvé un fragment de discoidale de ce type, dont une face figurait une arbalete, inclus dans le mur du cimetikre). A notre avis nous sommes la en pré- sence &un art navarrais «de la montagne)). CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES

Second ensemble, n." 5 a 7 et curte C: Cette fois-ci nous nous déplacons vers le nord de la province, dans I'angle sud-est de 1'Amikuze; une région que nous citerons plusieurs fois tant les discoi- dales y sont exceptionnelles. Quelques unes de ces stkles furent transportées a Arcangues mais on ignore leur origine. L'archétype peut Ctre ainsi défini: - axes V et H soulignés par des structures paralleles, - les plus externes portent des éléments en demi-cercle sauf a la recontre des axes V et H, en O, ou les éléments sont carrés, - région O bien individualisée, MICHEL DUVERT

- région 6 bien marquée, différente de 9,12 et 3. L'axe V se prolonge dans le socle a travers cette région, - socle décoré par des struaures qui tendent a se déployer a partir de la région 6, - le vocabulaire décoratif est trés caractéristique; dans les quatre secteurs se trouvent quatre cartouches avec «INRI», une date, «IESUS» et «MA- RIA», accompagnés de structures circulaires, en croissant de lune... et surtout de fleurs de lis au dessin trés particulier (n." 5), signant la un trait de style qui nous semble propre au nord de la Basse-Navarre et plus particulikrement a 1'Arnikuze. Nous avons relevé les dates suivants: 1610, 1621, 1628, 1629, 1630, 1631, 1639, 1644, 1650, 1656, 1686 et 1687. Cet archétyple et ses variantes ont donc été fabriques pendant prks de 80 ans dans cette région. CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASOUES

Inconnu hors d'un petit périmétre dans l'Amikuze (carte C), rejeté du Lanta- bat (qui a pourtant admis plusieurs types provenant de ce pays, nous le ve- rrons), son centre de diffusion pourrait etre Beyrie. L'oeuvre n." 5 provient d'Orsanco, comme l'oeuvre n." 6 qui est analogue a celle rapportée a Uhart-Cize par Colas (n." 744). A ce propoos il nous faut faire une remarque, Colas dit «les évidements de la croix sont probablement inspirés par de vieilles monnaies)) ...ces vieilles monnaies ne circulaient alors que dans cette région de l'Amikuze? nous sommes convaincu que les monnaies ont servi de source d'inspiration, quand elles n'ont pas été tout simplement recopiées (Duvert, 1982)' mais ici une telle explication nous parait difficilement soutena- ble a moins d'évoquer un modéle inspiré de monnaie et diffusé, pendant 80 ans environ, par un meme atelier ou une meme famille de tailleurs de pierres, confi- nés dans cette région. L'oeuvre n." 7 provient de Larribar, on la comparera a Colas n." 670, 676... cette stele a été rapportée par Colas (n." 736). Cet archétype a connu des variantes, on remarquera par exemple Colas n." 760 ou seul le traitement des axes V et H est identique, de meme le répertoire (hache, cercle, et fleur de lis au dessin bien typé). 11 existe donc toute une série d'intermédiaires; les archétypes sont reliés les uns aux autres. Nous allons préci- ser cette donnée par les exemples suivants.

Troisihe ensemble, n." 8 et 9 et carte D: Cet ensemble est tout a fait artificiel; c'est une sorte de ((groupe charnikre)) entre l'ensemble précédent et les grands modéles du Labourd et de l'Arberoue. L'oeuvre n." 8 rappelle l'ensemble précédent, pour une face. 11 se produit ici un phénomene curieux que nous avons déja noté a propos du premier ensemble (n." 1 a 4). Cette stkle est incontestablement rattachée au second ensemble mais: MICHEL DUVERT

- les deux faces ne sont pas identiques (comme c'était le cas pour les stkles n." 2 et 3), - sur la face analogue au second ensemble, les secteurs 111 et IV (sous l'axe H, c'est i dire sous la partie «sommitale» du disque) ont un traitement particulier. Le meme phénomkne a lieu sur la stkle n." 1 (par rapport aux stkles n." 2, 3 et 4). Nous assistons donc comme i une sorte de dilution de l'archétype précédent qui dérive lentement vers d'autres formes. Sur la stkle n." 9 l'écart se creuse; le traitement des axes V et H et de la région 6 nous amene de plus en plus vers YArberoue (voir quatrikme ensemble), par contre le répertoire décoratif («INRI», la date dans un cartouche et le dessin des deux fleurs de lys), est celui de i'en- semble précédent. Ces deux steles sont donc des formes de transition typiques; elles font le lien entre plusieurs archétypes, elles sont au carrefour d'influences, a i'articulation de types d'imagerie. CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES

Sur ce type d'oeuvre on note les dates suivantes: 1602, 1607, 1608, 16 10, 1611, 1612, 1615, 1616, 1617, 1618, 1619, 1620, 1622, 1624, 1625, 1626, 1627, 1628, 1629. Cette production s'étale sur 30 ans (alors que la précédent dure 80 ans) et débute huit ans avant celle de l'ensemble précédente. C'est trop peu pour penser qu'elle a pu lui donner naissance. Cet ensemble est propre a l'Amikuze (carte D) oi~il a du avoir plusieurs centres de diffusion, l'un a Orsanco et l'autre a Gabat au moins. - n." 8, probablement Colas n." 686; provient d'Orsanco, - n." 9, provient de Gabat ou existent des stkles avec ces types de répertoi- re sur les deux faces (Colas, n." 703, 705, 706). 11 y a la un atelier avec un maitre identifiable qui a fait l'oeuvre n." 8 et la 706 de Colas. Ces formes hybrides ont été exportées en Soule, a Ainharp (Colas, n." 1008 dont le revers, n." 1009, appartient incontestablement a lYAmikuze). Le caractkre hybride de cet ensemble d'oeuvres va nous permettre d'élargir le probléme. La stkle n." 9 est au carrefour entre Amikuze et Arberoue, mais il y a plus. Examinons la stkle n." 11 (qui est plus a ((tendance Amikuze)) qu'a «ten- dance Arberoue)), voir n." 8), nous l'avons placée entre deux oeuvres: la n." 10 provient du Lauragais (Occitanie, a I'est du pays de Comminges), la n." 12 pro- vient de Sos (Huesca). On ne peut qu'etre frappé par la ressemblance de structu- re entre ces oeuvres, importance de I'axe V et traitement particulier de la région 6 (comparer n." 8 et 12 par exemple et 10 et 11). Ce n'est pas la premiere fois que des ressemblances entre steles basques et pyrénéennes sont notées (Herber, 1936; Marco Simon, 1975, 1980); bien d'autres modeles pourraient etre évo- qués, nous ne le ferons pas afin de rester dans le cadre que nous sommes fixé. 11 MICHEL DUVERT

est évident que la stkle que nous appelons «basque», parce qu'elle est sittlée de nos jours dans. le cadre des sept provinces, est liée aux productions analogues abondantes le long de la chaine pyrénéenne et de ses abords (ou la présence basque est at- testée avant i'époque historique, au haut Moyen-Age et au delh-Narbaitz, 1975, Goyheneche, 1979, Riquet, 1981-), ainsi qu'au Portugal. Sans entrer dans de longs débats il nous parait évident que la stkle discoidale des sept provinces est liée non seulement au monde pyrénéen (h des espaces, des modes de subsistance CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES

et de pensée) mais aussi a la culture basque (a toutes ses nuances) qui a occupé des espaces se réduisant au cours des temps. Dans cette optique le terme ccstele bqwreste entikrement a définir, le réduire au cadre géographque des sept provinces actuelles est tres insuffisant.

Quatriime ensemble, n. " 13 a 20 et carte E: C'est un ensemble cohérent qui peut &re défini: - socle et disque sont décorés, - les régions sont bien indiquées et la région 6 peut avoir une personnalité bien affirmée. - la région O a le plus souvent un traitement original, quand le centre du disque n'est pas intentionnellement marqué par un coup de ciseau lais- sant un léger creux, meme dans les oeuvres les plus achevées sur le plan technique, - la base de quatre est régulikrement présente 5 travers des élément cons- truits au compas, - le rayonnement est présent au moins sur une face, et de facon générale a travers le langage décoratif retenu par les mdtres (dans cette série le choix des éléments décoratifs, supports du langage esthétique, n'est ja- mais quelconque; les éléments circulaires sont la regle; parmi eux, ceux qui supportent le rayonnement sont préférés), - ce type d'oeuvre montre souvent le nom du défunt; il indique aussi une date. Ce modele est répandu tout au long du XVIIeme siecle et meme au del% ce point de vue, rarement un type de discoidale aura connu un te1 succés. 11 a donné naissance a de tres nombreuses variantes au sein desquelles il faudrait fai- re des sous-groupes (par exemple nous en présentons un: n." 13 a 16, avec MICHEL DUVERT

((sceau de Salomon obligatoire)); sur les n." 15 et 16 la région centrale est expri- mée de facon analogue). Ce modele est pratiquement ignoré en Amikuz (carte E); il est clair que la il l lui a fallu composer avec un pays doté d'une puissante personnalité. 11 n'a pu pénétrer dans ce pays que sous des formes hybrides du genre de celle illustrée en n." 9. On comprend dans cette optique comment la discoldale traduit des rapports de force, avec des sortes de (dignes de front)), de compromissions. Elle met en scene de forts individualismes voire des sortes de conflits. Nous somme en présence d'un type de stele qui déborde actuellement en La- bourd, situation que nous n'avons pas rencontrée jusqu'ici. A vrai dire derriere cet ensemble (n." 13 a 20) se cache le véritable archétype commun aux labour- dins et aux navarrais, il est illustré par les oeuvres n." 17 et 20 et schéma ac- CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASOUES

compagnant la carte F. 11 se démarque légerement du modele que nous venons d'évoquer plus haut par un caractere: les régions 6, 9, 12 et 3 sont réunies par des arcs de cercle dont la courbure est dirigée vers O. Si l'on regarde mainte- nant la carte F on voit que cet archétype est beaucoup plus diffusé que le modé- le précédent. Comparons des productions ((Bas-Adoum (n." 21) et typiquement navarraises (n." 22), elles montrent une meme struaure a ceci pres: en Labourd on différencie peu la région 6. A vrai dire la comparaison des oeuvres 21 et 22 est tres intéressante, on se rend bien compte que l'esprit labourdin (fin et gra- cieux) est assez éloigné de la belle assurance (un peu lourde...) des bas-navarrais. 11 ne faudrait jamais parler de LA stkle basque, comme il ne faut pas parler de LA maison basque, de La danse basque, etc. Ce dernier archétype ne pénétre pas en Ostabarret peu en Amikuze, encore moins en Soule. En Pays Basque sud on le trouve a Valcarlos (Frankowski, n." 33-16) vraisemblablement a Goñi, ?i I'ouest de Pampelune (Caro Baroja, 1969) et peut etre une forme dérivée 2 Sora- MICHEL DUVERT

coiz (Urrutia et Fernandez Garcia, 1973; stele n." 7, face E), au Musée Archéo- logique Provincial d'Alava (mais les axes V et H ne sont pas indiqués), a Za- marze en Navarre (Leizaola, 1980), etc. Comme nous le voyons l'archétype sem- ble connu en Navarre (voir également au Musée San Telmo); comment se pro- noncer pour Alava, Biscaye et Guipuzcoa? il y a si peu de discoidales ici. L'archétype déborde largement en Labourd oriental, de Gréciette a Louhos- soa. Itxassou ne l'apprécie guere, a peine quelques steles sur les dizaines conser- vées ici. 11 faut dire qu'il y a dans ce village une forme d'art particuliere (un ((foyer de résistance))) et un art largement tourné vers la vallée de la Nive (c'est le village le plus oriental oú il y a des ateliers ayant fabriqué des steles tabulai- res). L'étude des trois premiers ensembles nous a permis de mettre en évidence l'extreme localisation de certains types de stkles, nous allons continuer a vérifier cette donnée. Pourquoi alors une aussi vaste répartition pour le dernier archéty- CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES

pe (carte F)? Tournons-nous vers l'histoire. Le Labourd fut érigé en Vicomté par Sancho Handia, en 1023. Ses limites étaient alors différentes des limites ac- tuelles. A l'origine seules Arnikuze et Ostabarret relevaient de I'éveché de Dax; Garazi et Arberoue étaient labourdins, ce dernier pays ne deviendra navarrais qu'en 1245. Garazi, Arberoue mais aussi Baztan, et pays de la Bidassoa jusqu'a une partie du Guipuzcoa, étaient également «labourdins» et relevaient de l'kve- ché de Bayonne (le statut des terres de Grammont n'est pas clair). Pour en reve- nir 2 notre problkme, la frontikre entre le Labourd et la Basse-Navarre ne sera stabilisée qu'au début du XIIIkme sikcle (voir Goyheneche, 1979). 11 n'est donc pas surprenant de voir, a priori, des modéles communs l'Arberoue et au La- bourd (et la limite entre les deux provinces n'apparait gukre dans le paysage) MICHEL DUVERT ainsi qu'au Garazi (voir une face du n." 28) et inconnus en partie en Amikuze et totalement en Ostabarret. L'histoire n'explique pas tout ici car, paradoxalement, l'archétype est absent dans tout le Labourd occidental (qui ne semble pas avoir été profondément marqué par le style «Bas-Adourn, sauf Anglet si l'on en croit les quelques fragments qui nous sont parvenus). Une vaste répartition de notre archétype sur deux provinces nous suggkre qu'il est peueetre tres ancien et antérieur au XIIIkme sikcle? 11 semble inconnu hors du Pays basque ... CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES MICHEL DUVERT

Cinquieme ensemble, n." 23 a 25 et carte G: Avec ces belles oeuvres nous voici 2 nouveau en Amikuze. L'archétype est net, inutile de le décrire, On notera surtout: - l'importance des axes et leur traitement (voir le deuxikme ensemble n." 5 a 7), - le souci d'exprimer les régions 6 et O, - l'importance des éléments circulaires (L'Arber~ueest proche), - le subtil rapport entre les pleins et les vides. CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES

La région 6 est ici exprimée avec force, meme au niveau de la croix aux branches curvilignes (voir l'élément en forme triangulaire). On remarquera enfin les excroissances au niveau du disque et parfois du col. Ces steles sont de bon- nes dirnensions (voir tableau). La face a la croix ?ibranches curvilignes connait de nombreuses variantes en Amikuze. Ces oeuvres sont en général datées, on releve: 1614, 1628, 1629, 1632, 1642, soit un intervalle de trente ans environ. Leur répartition (carte G) montre une extreme localisation, a l'ouest de l'Amikuze (elles different en cela des deu- xiemes et troisiemes ensembles, voir cartes C et D). On peut penser a l'activité d'un atelier particulier, on y reconnait des maitres; ainsi les steles n." 24 et 25 proviennent respectivement d'Amorotz et de Masparraute et sont manifestement de la meme main; noter le zig-zag qui termine l'inscription, c'est un trait de style connu dans ce pays (Colas n." 760). MICHEL DUVERT

Sixiime en~emble,n." 26, 27 et curte H: Ici la situation est tres différente, plus qu'un archétype il faut parler d'un type de représentation connu hors des sept provinces (ou il fut tres abondant a une époque donnée) et introduit délibérément dans l'art basque. La survie de ce genre de représentation dépendra de sa capacité a se plier au monde de la stele; ce fut le cas pour le monogramme I.H.S. Les deux faces font allusion a la Vierge et au Christ, la face de la Vierge est en fait un véritable enseignement traduit dans la pierre. Ces oeuvres s'inscrivent vers le milieu du XVIIeme sibcle, on y releve les dates: 1630, 1631, 1633, 1639, 1641, 1642, 1643, 1644, 1646, 1651 .Durant ces vingt années ces modeles furent diffusés en partie en Amikuze, en Lantabat, au nord de l'ostabarret; une mauvaise copie se trouve a Domezain (Colas n." 1086, 1087). CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DISCOIDALES BASQUES

Le type méme de ce modéle est représenté par la stkle n." 26, en outre c'est I'oeuvre d'un virtuose, comme il y en avait tant dans notre pays a ces époques. Sur la stkle n." 27 l'association entre le Christ et la Vierge est abandonnée, alors apparait une croix identique a celles de l'ensemble précédent (n." 23 a 25), et bien connue dans ce pays de Mixe. Nous avons relevé ce détail pour montrer comment insensiblement des modeles tres typés, meme s'ils ont été définis hors du pays sont peu a peu assimilés; il semble qu'une premikre étape dans ce pro- cessus soit la réindividualisation des deux faces de l'oeuvre (voir n." 4 et 2, 3; n." 8 et 5 a 7) qui brise ainsi le stéréotype. Lors de l'introduction de ce modele on remarque que le dessin reste toujours aussi vigoureux, dans la ligne navarraise. 11 y a manifestement un «esprit» une facon de faire qui préside au choix et a l'évolution des types d'imagerie. C'est ce que nous allons essayer de mettre en évidence avec l'ensemble suivant.

Septiime ensemble, n." 28 et 29) curte I: 11 n'y a pas a vrai dire d'archétype au sein de cet ensemble. Nous avons re- groupé ici des oeuvres dont la tendance générale est sur une face: - l'axe V qui brise, h travers la région 6, les limites entre socle et disque, - isoler la région 6 qui ne se rattache plus a la périphérie du monument (tendance que l'on retrouve aussi pour les régions 9, 12, et 3), - la bordure tend a étre doublée par une succession d'éléments (souvent des losanges) qui peuvent etre repris sur la face opposée, - la base de quatre n'est pas construite obligatoirement par des éléments circulaires, MICHEL DUVERT

- enfin ces oeuvres ont souvent une facture trks particuliere et ne mon- trent pas toujours la belle assurace des maitres d'Arnikuze, d'Arberoue et d'ostabarret. Les oeuvres qui répondent i cet esprit furent diffusées en: 1611, 1612, 1619, 1621, 1623, 1628, 1645, 1647, 1648, 1650, 1658 et 1674. Elles forment un ensemble trks diversifié (voir Frankowski par exemple, a Valcarlos, Uhart Cize, La Madeleine, etc). Ces oeuvres ont des répertoires particuliers mais sur- tout un style original qui se traduit a travers divers sous-groupes que nous ne détaillerons pas ici. L'aire de répartition de ces oeuvres nous montre leur locali- sation en Garazi et leur quasi absence ailleurs. CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

Huitieme ensemble n. " 3 0 et carte J Voici a nouveau un modele tres caractéristique, défini probablement hors du Pays basque ou en marge de la culture traditionnelle. On notera sur la bordure encadrant 1.H.S (ou le S est parfois redoublé, comme ici) la formule latine «Sancta Maria plena gratia mater mem, avec des variantes comme «Sancta Maria mater gracia misericordiae)), une autre est rédigée en espagnol (voir Colas a Pa- golle, n." 857). La forme des lettres de l'inscription est tout a fait caractéristique; tout se passe comme si un modele avait circulé car toutes ces oeuvres ne sont pas de la meme main. On ne peut s'empecher de penser ici a I'existence de ma- quette, ou de sorte de «catalogue», et L&tte a recueilli aupres &un tailleur de pierres, au début du sikcle, tout un vocabulaire ou figurait le mot «muskullo» qui signifie «maquette», son informateur était bas-navarrais. L'essentiel de ces oeuvres est localisé au nord de I'Ostabarret; elles ne sont pas datées. On notera la ressemblance entre les lettres R et la lettre i qui figure sur le linteau du chiteau d'Echauz (Baigorry), daté de 1555. MICHEL DUVERT CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

Neuvieme ensemble, n." 3 1, 32 et carte K: Meme type de situation, un modéle est introduite dans notre pays. Le mo- nogramme I.H.S. est traité dans un esprit de gothque tardif. La calligraphie de ce sigle a attiré les maitres du nord de la Basse-Navarre qui, comme les maitres du bas-Adour (mais dans un tout autre esprit), étaient avides de beaux effets et d'exercice de viauosité. Ce modele n'est pas localisé dans une région donnée; peut-etre est-il le fait d'un maitre itinérant? celui la meme que l'on peut repérer a Saint Esteben (voir Colas)? MICHEL DUVERT

Dixitke ensemble, n. ". 33, 34, 35 et carte L: Les oeuvres n." 33 et 34 sont du maitre d'Orkgue (qui a du mal a'centrer le monogramme) 11 est possible que ce maitre véhicule un stéréotype qui peu a peu se «dilue» dans la tradition. Ainsi l'oeuvre n." 35 reprend sur ses deux faces les schémas précédents mais les représentations des astres sont beaucoup moins af- firmées et des outils sont introduits. Sur cette pikce le traitement des axes V et H n'est pas sans rappeler celui qui apparait ri." 5, 6, 7 et par 1% 23 a 25; un meme esprit préside a la rnise en forme de représentations sur ces stéles (unité de style de types d'imagerie). CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

Le monogramme accompagné des lettres alpha et omega 2 est bien connu dans d'autres zones, de meme les représentations d'astres, mais ici l'originalité réside dans l'association de deux mondes (tres net en 33 et 34). Une face est dé- diée au monde des astres et par la des forces de la nature, de paa et d'autre des axes V et H qui se recoupent dans une région O bien marquée. L'autre face est celle oú le monde chrétien trone sans partage (malheureusement nous ne savons pas quelle était a l'origine la face tournée vers la tombe...) Cette oeuvre est sans nuance, c'est a peine si le monde des astres est tempéré par la croix qui est plus un élément de structure qu'un symbole chrétien (régions O et 6 bien marquées, de meme i'identité de 9, 12 et 3).

2. Alors que ce travail était sournis i publication, paraissait un travail de L. Barbe ((Obser- vations générales sur les monogrammes divins a propos de leur inventaire dans le lectourois)); So- cieté archéologique du Gers, 3." trimestre 1983, p. 286-304. Dans ce travail, ou les productions basques sont prises en considération, l'auteur étudie notamment l'association du monogramme IHS avec les lettres alpha et oméga. 11 démontre, de facon convaincante, que ces dernieres sont en fait les lettres M et A de Marie, monogramme de la Vierge. Dés lors ces types de représentation doivent se traduire par ((Jésus-Marie~et non par ((Jésus-alpha et oméga (principe et fin de tout))). Au cours de cette année, nous avons pu observer, en Basse-Navarre, une disco~daleavec pour seul theme: M et A, traités exactement comme les pseudo lettres alpha et oméga. 11 faut donc rec- tifier l'interprétation donnée dans ce travail. L'enxemble ZIroulégui, n." 36 2 45 et carte M: 11 y a des villages qui nous consolent des pertes subies par notre art funérai- re, Iroulégui est de ceux-la. Ce petit village a i'apparence modeste, renferme une série d'oeuvres peu banale. 11 y a eu la un atelier de tailleurs de pierres qui ont fait des oeuvres peu diffusées et qui ont personnalisé ce village. Sur la carte M CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

nous voyons la répartition de ces oeuvres, l'essentiel est a Iroulégui et quelques unes a Lasse (la stele n." 47 est le revers de celle que Colas transcrit, n." 323, et qu'il n'a pas pu lire), Anhaux, Uhart-Cize et surtout Ascarat, n." 46. Cet ensem- ble se définit par son style. Nous sommes tres loin ici des modeles sophistiqués des maitres de l'Amikuze ou de l'Arberoue, les maitres de ce petit village se sont emparés du monogramme I.H.S., dans sa forme la plus simple et ont parlé bas- que a travers lui. On remarquera le traitement particulier de la lettre S souvent accompagnée &un élément végétal, cette facon de faire est bien connue en Hau- te-Navarre, ainsi a Urraul Alto (n." 48, Peña Santiago et San Martin, 1966, voir également Cruchaga et col., 1966, etc.) Nous voyons la un fait que nous pou- vons vérifier continuellement, l'ouverture du nord sur le vieux royaume. Plusieurs maitres se sont exprimés 3. travers ce style, on en reconnait cer- tains: - n." 39 et a Anhaux (Cols, n." 285)? - n." 41 et 45 - n." 43 et 44 - n." 42 et a Anhaux (Colas, n." 284)? MICHEL DUVERT

On ne manquera pas &&re frappé par une curieuse ressemblance entre la stele n." 40 et des steles de la c6te labourdine (voir Colas, n." 9, 30, 102...j; comme en Navarre, a Juslapeña (a l'est de la capitale-Peña Santiago, 1977, p. 183-) et plus librement a Espelette (Colas, n." 151), on voit des sortes de ramu- res envahissant la bordure 2 partir des régions 6 et (plus régulikrement) 12. 11 n'y a pas seulement qu'une unité de structure dans la stkle des sept provinces, il y a aussi une unité de voc?bulaire et de style.

Le rnaitre de Saint Michel en Garazz' La stkle n." 51 est peu-&re celle dessinée par Colas, (n." 475, 476) mais ce n'est pas évident. Nous parlons ici de ce maitre pour trois raisons: - la premikre, toute sentimentale, ce maitre a dii connaitre Bernat Deche- pare, curé de ce village, qui fit paraitre en 1545 le premier livre connu en lan- gue basque ((Linguae vasconum primitiae)). - ce maitre met en scéne une imagerie comparable a celle du maitre &Ore- CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

gue par exemple (n." 33, 34); il oppose nettement, sur ses deux faces, deux vi- sions, deux types de répertoire. C'est ce meme type d'opposition que l'on retrou- ve entre le rayonnement (et non la représentation d'astres) et le monde chrétien. Dans la mesure ou les axes V et H servent de support a la croix du Christ (et c'est loin &&re évident, voir plus loin), les oeuvres 8, 9, 29, le groupe de l'Ar- beroue (n." 13...) illustrent cette opposition. Dans un travail antérieur nous avions déja signalé cette relative spécialisation («polarité») des deux faces des ste- les (Duvert, 1981). - Comme a Iroulegui (n." 43, 44), le maitre de Saint Michel utilise le thk- me de la croix aux extrémités enroulées. Ce trait de style est retrouvé en La- bourd (Ainhoa) et en Navarre (Lanz, avec une variante a Elbeted -voir Fran- kowski-). On peut donc penser que des le seizikme siecle il y avait une certai- ne cohérence a travers les sept provinces jusque dans des détails mineurs comme ce trait de style. Enfin la stele d'Ainhoa (voir Colas, n." 121, 122) a une allure beaucoup plus navarraise que labourdine, son revers rapelle une oeuvre d'Ar- bonne qui a également une allure franchement navarraise. Y a-t-il eu des équi- pes itinérantes ou circulation de modeles (muskullo)? cette derniere éventualité rendrait mieux compte de la relative unité de style a travers de vastes territoires.

Remarques générales

Le mot symbole sous entend a priori une intention; que savons-nous des in- tentions d'un créateur? Lui meme lorsqu'il trace une croix sur une stele, que fait-il? il reprend un élément décoratif ou il symbolise la croix du Chirst? 11 ne nous semble pas du tout évident que les oeuvres n." 5, 6, 7, 21, 22, 23 i 25, 28, 29, 33, 34, 50 (face avec inscriptions) et 51 (face avec les astres) illustrent la croix du Christ. Nous voyons avant tout sur ces pierres l'expression des axes V MICHEL DUVERT

et H, des régions qu'ils portent et, secondairement, une croix; éventuellement celle du Christ. A titre d'exemple, sur la face portant des inscriptions de la stele n." 49, on voit une croix; si on y regarde de plus pres, cette croix est avant tout c~nstruiteautour d'une succession de cercles (0, régions, limites de la bordure); elle traduit aussi bien la prépondérance de la région O (et du rayonnement) que la présence des axes V et H. 0u est le ybole chrétien? La croix du Christ est- elle évidente sur la face portant les inscriptions de la stele n." 50'; sur l'autre face en revanche elle apparait plus évidente, elle est reléguée sur le socle alors que le rayonnement triomphe sur le disque. , Dans la mesure ou la croix du Christ elle-meme n'est pas évidente sur une discoidale, que pouvons-nous dire des autres élements? sont-ils des «symboles»? Prenons l'exemple des motifs géométriques du type cercle, croissant et structure rayonnante, situons-les dans le cadre des ensembles que nous avons étudiés. - n." 52: on voit une nette allusion au soleil dans le second secteur; dans la région O il y a un visage (lune?, tete du Christ?). - n." 33, 34: quittons Béguios et allons 5 Oregue, toujours en Amikuze. Ici aussi des astres ont un visage humain, lune (n." 33) et soleil (n." 34). On CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

peut raisonnablement penser que le motif rayonnant du premier secteur (n." 33) symbolise le soleil el le cercle du second secteur (n." 34) symbo- lise la lune. Dans ces deux oeuvres on note en plus la présence d'une étoile. - n." 35: toujours en Arnikuze, allons a Luxe. Nous avons de bonnes rai- sons de penser que les éléments circulaires du premier secteur et le crois- sant du troisikme secteur symbolisent effectivement des astres. Ce réper- toire: cercles emboités, croissant, motif rayonnant, se retrouve sur des pierres de styles fort différents come ici, n." 53, toujours a Béguios. - on peut penser que bien des éléments circulaires et des croissants, utili- sés en Amikuze au moins, dérivent de représentations du soleil et de la lune (n." 5, 6, 7, 23, 24, 25? etc.) On pourrait tenir le méme raisonnement pour la hache qui est peut étre liée au culte du tonnerre, de la foudre? Ces types de représentation pourraient avoir pour origine des imageries de stkles d'époque hispano-romaine (Duvert, 1982). Elles auraient fourni en partie un vocabulaire de base qui se serait introduit chez nous surtout par la Navarre et peut-étre l'Alava qui sont riches en belles stkles décorées des premiers sikcles de notre kre (Elorza, 1970; Marco Simon, 1978, 1979). Ces types de représenta- tion ont pu continuer vivre dans un Pays Basque peu ouvert au christianisme, et a évoluer en marge des modes circulant en Europe (voir Marco Simon, 1978). On ne peut qu'approuver Barandiaran lorsqu'il dit: «On a remarqué de- puis longtemps au Pays Basque, comme partout, que certains signes occupent la place du Soleil sur les monuments. Ce sont les figurations qui se présentent sous la forme de cercle simple, de cercles concentriques, de roues, a raies rectilignes et curvilignes, de , de pentalphas, de signes oviphiles, de rosaces, etc. MICHEL DUVERT

Les plus anciens spécimens connus appartiennent 2 l'époque romaine (...) Bien qu'aux époques hstoriques ces signes furent souvent employés a titre de simples ornements, ils ont continué a représenter maintes fois le Soleil, meme de nos jours ... » Dans ce meme travail, Barandiaran considere le rdle des représenta- tions et des symboles (hache, lune, soleil...) dans la mentalité populaire basque, c'est a dire dans le contexte immédiat ou se situent nos monuments funéraires (Barandiaran, 1974 et autres travaux). Parfois au sein d'un meme village et a l'intérieur d'un meme ensemble d'oeuvres, figurent des types de représentations variés. n." 54: lune et astre rayonnant; n." 55: lune et hache accompagnent des évocations de la vie agricole (comparer avec Leizaola, 1970, a Gsldaraz en Na- varre, photo n." 5). La valeur symbolique de ces représentations nous parait évi- dente. Meme dans les cas les plus favorables l'intention a travers le «symbole» n'ap- parait pas évidente. Des images ont pu passer «en bloc» dans l'art populaire, comme par exemple l'association calvaire -soleil- lune, bien connue dans I'art «officiel» jusqu'au dela du Moyen. Age (voir les gravures de Dürer par exemple). De meme des monnaies ont enrichi le répertoire décoratif (Duvert, 1982); dans des monnaies navarraises, jusqu'au XIIIeme siecle par exemple, on trouve l'asso- ciation étoile-lune (Sancho 11, Sancho V Ramirez, Sancho Azkarra par exemple) qui a tres bien pu &re reprise sur la stele sans aucune intention de «symbole». 11 CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

nous apparait évident que le mot «symbole» devrait &re manié avec de grandes précautions lorsque l'on parle de discoidale.

L'examen des steles n." 34, 51, 52 nous montre comment les maitres repré- sentaient les astres et notamment le soleil. La représentation du rayonnement est toute autre, elle est polymorphe car liée fondamentalement i la structure meme de la stele: faces sans inscriptions des steles n." 49, 50, face avec inscription de la stele 29, etc. Le rayonnement est energie, création, source de vie; les basques l'exprimaient des le Haut Moyen-Age a Argineta, en Biscaye. La comparaison sur la meme planche, des steles 49 a 51 est tres significati- MICHEL DUVERT

ve; les deux premieres expriment le rayonnement, sur une face. La derniére met en scéne un monde avec des astres.

Toutes ces considérations nous amenent peu a peu i regarder la stele com- me autre chose qu'un monument «décoré»; elle peut servir de support a tout un langage fort complexe (n." 56) ou se cotoient: des symboles d'astres, des signes chrétiens (parfois tres élabofes, n." 26), des représentations d'ustensiles, une date, un nom de maison, celui d'un défunt. Ces types de steles, surtout en Ami- kuze et Arberoue, sont avant tout un enseignement et une conception du mon- de; les oeuvres du maitre d'Orkgue par exemple ne sont pas innocentes (n." 33, 34). Au cours du temps la charge symbolique de ces monuments a eu tendance a s'effacer devant la technique et la virtuosité. Au XVIIeme siécle en Labourd comme en Amikuze, Arberoue, etc. les stkles sont spectaculaires mais surtout bavardes et tres soignées sur le plan technique. A cette meme époque les croix et les tabulaires, en Labourd, seront préférées; les discoidales se feront de plus en plus rares désormais.

n/ - Les courants de création: Les steles navarraises autorisent des lectures i des niveaux extremes: - a un niveau général nous pouvons mettre en évidence des propriétés ou des caracteres qu'elles partagent avec les autres steles des sept provinces (Duvert, 19 76), - au niveau le plus particulier nous pouvons mettre en évidence des for- mes d'expression qui nous permettent d'illustrer l'originalité de certains CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

pays, de certains ensembles de villages, d'ateliers, de maitres. Nous pou- vons également voir l'introducction de «modes» el l'evolution de stéréo- types; enfin, avec une gande réserve, nous pouvons apprécier la ((durée de vie» de styles ou de types d'imagerie les dans une aire donnée. Entre ces deux niveaux se déroule une grande partie de la création et nous pouvons de ce fait en faire une approche relativement sure. Nous contenterons ici de récapituler quelques données. Les steles des sept provinces sont tres diversifiées; cette variété n'est pas toujours quelconque puisqu'en dehors des phénomenes de modes, elle peut signi- fier la réalité de groupes humains a l'échelle de pays (Amikuze) voire de quel- ques villages (l'ensemble d'lroulégui). Le fait dialectal se vérifie au niveau de ces monuments (Allieres, 19 77). MICHEL DUVERT CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

Ces réalités auxquelles nous faisons allusion devraient etre précisées. 11 est probable que des études comparatives menées sur des bases identiques a la n6tre apportent un nouveau regard sur la création basque; il faudrait pour cela avoir de bonnes indications anthropologiques, ethnographiques, linguistiques... et his- toriques. Dans un te1 cadre on serait amené a définir avec plus de rigueur ce qu- 'il convient d'appeler stkle discoidale basque (notamment par rapport aux stkles discoidales d'autres cultures), compte tenu du fait qu'une grande partie de son histoire nous échappe, faute de document daté. On peut dégager dans une province donnée, ici la terre &Ultra-Puertos, un certain nombre d'archétypes (qui peuvent &re parfois des stéréotypes, n." 4 par exemple) tres différents les uns des autres. Cependant des formes intermédiaires existent, nous l'avons vu en détail pour les pierres n." 8 et 9 qui sont a mi- chemin entre les archétypes d'Amikuze et d'Arberoue. Ces formes traduisent les chocs entre sensibilités différentes qui cohabitent; ici les types de Amikuze n'ont pas été introduits tels quels en Arberoue et vice versa. 11 faut se garder cepen- dant de visions trop schématiques; ainsi le Lantabat qui a sur le plan esthétique une personnalité bien affirmée (Thévenon, 1978), a admis sans modification des modeles définis dans d'autres pays (cartes B, E, F, H et L). Comment rendre compte de cela> par l'existence de maitres itinérants? c'est peu probable compte tenu de la forte régionalisation de cet art; par la circulation de maquettes ou de simples dessins? par copie d'objets circulant facilement (meubles, ustensiles di- vers)? cette dernikre hypothkse est peu vraisemblable, la stkle est un monde par- ticulier dans le village de Juxue (Ostabarret) linteaux et stkles ont des répertoi- res trés différents par exemple. Les modeles trop étrangers a la mentalité basque, ou trop typés et ne pou- vant guere évoluer (n." 26, face consacrée a la Vierge; n." 31, 32) peut &re par- ce qu'ils se pliaient mal au monde de la stkle (ce n'est pas le cas du monogram- me I.H.S. meme dans ses formes élaborées), sont tres vite évacués. Ce phénomk- ne est net en Labourd (voir Colas, n." 1218, 1219 et une oeuvre identique a Itxassou). La mentalité populaire et la culture basque (au niveau de l'espace de la stkle et du contexte de la mort, ici) jouent le r6le de filtre. Les maitres sem- blent donc avoir eu toute liberté pour introduire des formes nouvelles, mais c'est la tradition qui se chargeait de faire fructifier ou non l'héritage. C'est pour cela que l'art de la stkle est toujours reste basque ... 11 a du se passer la meme chose avec la danse en Soule par exemple (voir les travaux de Guilcher ), mais aussi avec la pastorale, l'introduction de concepts ou de mots étrangers, etc... La stkle, comme toute production de ce pays, signifie l'homme basque et le met en sckne. On ne peut s'empecher de la situer dans le cadre ou Ithurriague (1942, 1943) placait le bertsolari: «Les improvisateurs sortent presque tous des couches populaires; ils en incarnent les tendances, les sentiments; c'est pourquoi, soit dit en passant, ils ont une si grande influence aux yeux du public. Le bertsolarisme, du reste, ne saurait se comprendre en dehors du milieu physique et moral ou il s'élabore et se traduit; il est un tout complexe, formé par le poéte et ceux qui i'écoutent; ceci va avec cela sans que l'on puisse distinguer et séparen).

V - Les r_ytbmes de création: Ce travail nous fournit un renseignement intéressant; il semble que les ar- chétypes aient une durée de vie limitée. L'imagerie liée a la mort n'est ni définie ni stabilisée: MICHEL DUVERT CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

- environ 80 ans pour l'ensemble n." 5, 6 et 7, - environ 30 ans pour l'ensemble n." 8, 9, 11, - environ 30 ans pour l'ensemble n." 23 a 25, - environ 20 ans pour l'ensemble n." 26, 27, - environ 60 ans pour l'ensemble n." 28, 29. En toute rigueur ces chiffres ne signifient pas grand chose. On a détruit beaucoup de stkles (il ne reste plus rien a Beyrie) et retaillé certaines. L'impor- tant est de voir que chaque archétype est limité dans le temps. On peut donc dire qu'au moins au XVIIkme sikcle en Basse-Navarre, des formes d'art liées a la mort étaient périodiquement remises en question et régénérées; malgré cette dy- narnique ELLES CONSERVAIENT TOUJOURS LEUR STRUCTURE FONDAMENTALE (axes, régions, valeurs de ces repkres, etc.) La tradition est un phénomene vivant, une somme d'équilibres toujours rompus dans une continuité. Elle renvoie aii groupe humain une image dynami- que qui l'aide a se repérer et se définir. La perte de l'art funéraire mais aussi de la langue, de l'architecture, etc... sont autant de repkres qui s'effondrent. 11 faut non seulement les maintenir mais surtout les faire vivre, les faire évoluer; c'est la lecon des vieux maitres navarrais...

VI - Les stiréot_ypes: En marge de ces courants il y a des archétypes stables; nous en avons vu au moins un: n." 21, 22 et carte F. Ce type navarro-labourdin pourrait etre en place depuis le Moyen-Age au moins; il est trés différencié au XVIIkme siecle en deux MICHEL DUVERT composantes: le type «Bas-Adour)) et le type «Arberoue» (et Navarre par Valcar- los?). Chacune de ces composantes a un visage propre (n." 21 et n." 22). Dans le Bas-Adour nous sommes en présence d'un stéréotype qui a évolué vers l'exercise de style, vers la pure virtuosité. Ici n'importe que1 technicien peut réaliser ce type d'oeuvre et les majtres labourdins vont rivaliser d'habileté. C'est la faillite de la création et la naissance #un clacissime stérile, superficiel, bavard et mono- tone (comme tout classicisme). Bien des archétypes ont eu ainsi tendance & évo- luer vers ce'type de conformisme (n." 4; ensemble n." 5, 6, 7; etc.), c'est peut- &re l'une des raisons pour lesquelles l'imagerie était périodiquement régénerée?

VII - Les st2le.r datées: Cette étude nous montre que l'épigraphie va souvent de pair avec la data- tion, au moins en Amikuze, Arberoue, Ostabarret et Lantabat. Mais ce n'est pas une rkgle absolue. En fait la datation est liée i certains archétypes semble-t-il, aussi est-il faux de dire, d'une facon genérale, que les stéles basques son datées a partir du XVIkme sikcle. Cette affirmation n'est surtout valable qu'en Basse- Navarre et pour certains types de stkles. Les évknements qui se sont déroulés ici et qui ont amené au développement de l'épigraphie ne peuvent ktre généralisés aux autres provinces; en Biscaye, Guipuzcoa, Alava, Soule, le reste de la Nava- rre et dans une certaine mesure en Labourd, on date peu et l'épigraphie est rela- tivement peu développée si ce n'est absente.

VIII - La personnalité bas-navarraise: Comme l'indique l'hstoire (Goyheneche, 1979), l'art funéraire (mais aussi l'architecture par exemple), nous montre que la terre #Ultra-puertos est avant tout une fédération de pays dont le ciment est Pampelune. Parrni ces pays l'Amikme a joué un r6le tres important en matikre de créa- tion. Colas lui meme l'avait bien noté: «Dans l'étude générale placée en tete du Recueil consacré 2 la Basse-Navarre, j'ai attiré l'attention sur certaines régions de cette province qui méritent de figurer au premier rang pour la décoration funé- raire des discodales. On me permettra d'insister tout particulikrement sur le pays de Mixe)) (p. 178). Pourquoi le pays de Mixe alors que la Gascogne voisine et le Béarn ne montrent aucune production comparable? Tout voyageur venant par la Gascogne ne peut qu'ktre frappé par la vigueur et l'originalité des discoidales de ce pays (mais une telle originalité n'existe pas en matikre d'habitat, l'archétype basque que nous connaissons dans toute la partie occidentale de notre pays se retrouve en Gacogne, cet ancien pays vascon -voir Toulgouat, 1977-). Faute de pouvoir trouver des productions comparables a celles de l'Amikuze autour du Pays Basque nord, force est de nous tourner vers notre pays. Plusieurs cons- tatations s'imposent - il y a moins de (pays» en Labourd et Soule qu'en Basse-Navarre; des in- dividualités existent mais la diversité est faible. Si nous prenons le cas du La- bourd, quelques ensembles peuvent étre distingués: un type lié a la c6te (I.H.S. accompagné de de fougkres, fleurs de lys ...) et un lié Urrugne, Béhobie; un type lié 2 la vallée de la Nive, d'ustaritz ii Itxassou (I.H.S. cosntruit et trans- formé autour de l'axe V), le grand type «Bas-Adoun) avec des variantes locales dont l'une des plus typées est a Guiche, et quelques écoles comme a Arbonne. Curieusement Itxassou, dans sa montagne, offre un art absolument original au CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

-Stele provenant d'orégue, elle témoigne de la qualité d'éxécution de ces monuments et de la science des tailleurs de pierre au XVIIeme sikcle. On a de bonnes raisons de penser que ces mai- tres étaient de simples agriculteurs (c'est le cas en Labourd au XVIIIkme siecle). sein de la production basque (seule une stkle de Greciette (Colas n." 613) se rat- tache a cet ensemble). En Soule la situation semble plus simple, il y a grossikre- ment deux types de stkles (en fait deux types de sensibilités et d'approche du monde): l'un au nord d'Aussurucq et de Menditte, il ne ressemble en rien a ce que l'on peut voir dans les autres provinces (sauf peut-&re dans la Navarre montagneuse voir notamment les vallées de Arce, Oroz Betelu, et le travail de Urrutia a ce sujet); I'autre type qui s'étend vers toute la Basse-Soule et beaucoup plus nettement marqué par la Basse-Navarre (répertoire et facture). - les fortes individualités bas-navarraises semblent se situer dans le seul ca- dre navarrais, peut-&re dans celui qui est esquissé par Caro Baroja (1974), voir p. 24 et surtout 117 quand il dit: «El de la libertad de los vecinos de un área frente a los linajes, es un ideal que progresa mucho desde el siglo XV y que produce las hidalguias colectivas y las formas establecidas de los derechos de ve- cindad. En Navarra, el problema de las hidalguias colectivas se estudia clara- mente en el momento en que valles enteros fronterizos, como el de Baztán o el de Roncal o el de Lana, u otros, van obteniéndolas y van creando un tipo de personalidad distinto dentro del contexto navarro; y tan especifico que al mismo tiempo que se crean o consolidan las hidalguias colectivas en la montaña, en la ribera se crean los feudos mayores y más desaforados que ha tenido el reino...)) MICHEL DUVERT

- A partir du Moyen-Age, le Pays Basque se distingue en Europe par son dynamisme. Dés cette époque les basques exportent leur technique et leur sa- voir, forges et chantiers navals sont en pleine aaivité. Plus tard ils feront des équipes de bitisseurs (d'églises, de palais ...) qui se répandront dans la péninsule. Le pays est entreprenant, il est a la pointe de l'innovation et des progrés techni- ques de son temps (construction navale, aciers, armes, navigation, géographie, domaine agricole, etc.); des types de savoir seront imités par d'autres pays (an- glais et hollandais et la chasse a la baleine). Parallélement notre pays est large- ment ouvert aux modes européennes les plus variées (au XVIIIeme siecle no- tarnrnent).' De meme en ce XVIIkme sikcle la Basse-Navarre donne l'impression d'un pays fort, qui ne recopie pas l'art de ses voisins. Elle produit des types d'oeuvres inconnus dans le reste du pays; ces types sont variés, d'une grande qualité et continuellement régénérés. Nous sommes vraisemblablement en pré- sence d'une société dynamique, entreprenante; elle est faite d'individualités qui s7attachent a donner d'elles-memes des visages particuliers a travers des formes d'art tres élaborées. Un pays comme l'Amikuze a un visage tres nettement affir- mé; tout se passe comme si le petit monde que constitue ce pays, avait voulu se mettre en sckne d'une facon particulikre et témoigner de cet individualisme. Des lors les tailleurs de pierre furent, a leur manikre, des témoins et des porte- paroles de la vigueur et de l'assurance de ce type de société.

- Des formes de création se démarquent des grands axes d'activité comme le pastoralisme par exemple, qui tendent, comme on peut le penser, a véhiculer de «memes» types de sensibilité (des visions du monde) et par la 2 produire une relative homogenéité de formes. - Le Pays Basque, et plus particulierement le vieux royaume, est un pays largement ouvert sur le monde extérieur. Au XVIIeme siecle les modes circu- laient librement, meme dans leurs aspeas les plus sophistiqués (n." 26, 31, 32). Ce pays n'avait pas peur d'introduire dans sa culture des schémas étrangers; cet- te culture est vivante, elle échange. En résumé, la diversité de l'art funéraire, mais aussi des types d'outils (Baro- ja a souligné le fait que la charrue présente chez nous de nombreuses variantes a l'inverse de ce que l'on peut voir dans la meseta castillane; ces variantes ont des localisations distinctes), des types d'habitat, de danses, de dialectes de l'euskara, etc. nous mettent en présence d'un monde basque complexe. Cet ensemble de faits nous montre combien la société rurale basque n'a pas été ce milieu fermé, conservateur et archaisant que I'on s'est plu a dépeindre. 11 nous montre aussi combien 17imagede ses créateurs que nous en donnent Colas et Veyrin est faus- se. L'étude de l'art funéraire basque peut nous permettre de comprendre en par- tie l'histoire de notre pays. Lorsque seront publiées les monographies concer- nant les sept provinces, et plus particulierement les centaines d'oeuvres conte- nues en Navarre (Zubiaur Carreño, 1980) et dans les provinces nord, bien des aspects des mentalités seront mieux percus. Une telle étude reste a faire. Ces données nous permettront également de préciser ce que nous entendons par «stele discoidale basque)), une définition qui repose actuellement sur des bases trop fragiles (un critere de forme, a vrai dire peu précis, et un critere d'espace ou le mot basque ne fait référence qu'aux seules sept provinces, c'est ii dire au Pays Basque «minimun»; non seulement les facteurs temps et espace sont a CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

prendre en considération ici mais encore convient-il d'élargir le cadre aux no- tions de peuple et de Pays Basques-voir Caro Baroja, 1974).

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Resumen

El estudio de las estelas discoideas del País Vasco muestra conjuntos de obras que tienen, cada uno, una cierta originalidad. Esos conjuntos están locali- zados en zonas bien delimitadas, agrupaciones de barrios o de pueblos y «pai- ses)); a veces caracterizan un solo pueblo (Itsasu, Arbona ... en Lapurdi por ejem- plo). CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

Los conjuntos pueden caracterizarse con varios criterios: factura de las pie- dras, estructura de las obras, clase de repertorio, estilo,... Algunos conjuntos tra- ducen estereotipos reproducidos durante unas decenas de años; más frecuente- mente esos estereotipos se han mezclado con variaciones, más o menos alejadas, que introducen matizes. Baxenabarra es una provincia muy interesante para el estudio de esos con- juntos. Muchos «países» con fuerte personalidad constituyen esa parte del viejo reino (Oztibarre, Amikuze, ... ver mapa A). Se puede reconocer en cada uno, cla- ses de estelas localizadas en algunos pueblos cercanos. En ese trabajo hemos considerado algunos conjuntos naturales o más o menos artificiales. En el pri- mer caso hemos descrito el arquetipo correspondiente y hemos indicado en un mapa los pueblos donde se encuentran obras perteneciendo al conjunto estudia- do (por eso hemos utilizado un mapa donde figuran los límites de los pueblos, o ((cornmunes)),con sus barrios). - n." 1 a 4, mapa B: la estela n." 4 es un arquetipo bien conocido en Gara- zi. Presenta algunas variaciones (n." 1 a 3 por ejemplo) donde el arquetipo se transforma progresivamente; en este proceso se puede ver que las caras están reindividualizadas (cada una con tema propio), además el aspecto el más caracte- rístico del arquetipo va cambiando paulatinamente, sobre todo en su sentido y no mucho en su forma. Es un proceso que parece muy general. - n." 5, 6, 7, mapa C: tipo de estela estrictamente localizado en una parte de Amikuze. Las estelas que pertenecen a ese conjunto llevan una fecha, de 1610 a 1687. - n." 8, 9, 11, mapa D: tipo intermediario entre el precedente tipo y las es- telas de Arberu (n." 13 a 20). La primera (n." 8) es parecida a las obras de Ami- kuze, la segunda (n." 9) es más próxima a las de Arberu. Además ese tipo de obra (n." 11) recuerda estelas de los Pirineos, por ejemplo en Occitania y Aragon (eje V, región 6, estilo); se conocen otros casos (ver trabajos de Marco Simón). - n." 13 a 20, mapa E: tipos de estelas encontradas en Arberu y en la par- te oriental de Lapurdi (Arberu pertenecia a Lapurdi antes el siglo XIII). Esas obras traducen un arquetipo muy difundido en Lapurdi (estilo «bas-Adour))), Arberu, parte de Orzaise (n." 22) y Garazi, parcialmente en la Nabarra actual; apenas se conoce en Arnikuze (mapa F). - n." 23 a 25, mapa G tipo muy localizado en Amikuze, las estelas del conjunto llevan fechas, de 1614 a 1642. - n." 26, 27, mapa H: traduce una moda elaborada fuera del país y difundi- da entre 1630 y 1651 aproximadamente. - n." 28, 29, mapa 1: tipo bastante característico en Garazi, parte de Baigo- rri y encontrado en Valcarlos. Las estelas de ese conjunto se caracterizan ante todo por su estilo y su repertorio. Presentan algunas semejanzas con el arqueti- po de Lapurdi-Baxenabarre occidental (n." 13-22) - n." 30, mapa J; n." 31, 32, mapa K: traducen modas introducidas en el norte de la provincia. - n." 33 a 35; mapa L: tipo característico por su repertorio y las asociacio- nes de los temas, esencialmente localizado en Amikuze. - n." 36 a 47; mapa M: obras cuyo estilo (cara con I.H.S.) es bastante co- herente; la mayor parte procede de Irulegi. Modelos del I.H.S. parecidos se en- MICHEL DUVERT

cuentras en la actual provincia de Navarra (n." 48); no solamente en las estelas pero en otras obras también (trabajo de la madera por ejemplo) se nota siempre influencias de la actual Navarra en todo el País Vasco norte. Se puede sacar algunas conclusiones hypótesis acerca de la sociedad vasca y de sus creadores (talleres, maestros, verdaderas ((escuelas)), posibles maquetas ...) en el siglo XVII. Muchos elementos simbólicos en forma de circulo o de creciente en Amiku- ze (n." 5 a 7, 23 a 25) tienen sus correspondencias en representaciones de astros (sol, luna, estrella,... n." 52, 53, 56) sobre estelas de ese mismo país (ver los tra- bajos de J. M. de Barandiarán). La radiación (Duvert, 1978) que se desarrolla desde la región 0, es una ma- nifestación poliforma, muy diferente de las representaciones de astros y sobre todo del sol. Muchas estelas traducen una enseñanza en la piedra; no son constituidas por la yustaposición de elementos decorativos (n." 33, 34, 51, 52 y 56). Los conjuntos de estelas constituyen varios dialectos de un mismo lenguage, el de la estela y del mundo vasco. En ese lenguage se han introducido elementos y clases de representación por los maestros, con toda libertad. Esas aportaciones fueron seleccionadas por la tradición que los hacían vivir (n." 4 y 1, 2, 3; 26 y 27; 33, 34 y 35, etc.) o los rechazaban (n." 31, 32 por ejemplo) y quedan pues sin descendencia. Conjuntos de estelas fueron hechos durante un periodo variable (20 a 80 arios en los ejemplos que hemos estudiado). Es decir que tipos de estelas fueron continuamente cambiados, según ritmos, en ciertos lugares o «paises». No se debe tener una visión estática del arte popular, es una manifestación llena de vida. La estela de Baxenabarre está constituida por numerosos conjuntos de obras que tienen su vida propia, hasta cierto punto. Muchos conjuntos se encuentran en pequerios territorios, en los pueblos cercanos no penetran (intactos) sino gra- cias a formas mixtas o de transición (n." 8, 9 y 5 a 7, 13 a 22). El arte de la es- tela traduce, a su manera, verdaderos afrontamientos de sensibilidades.

Bilduma

Euskal hilarri biribilak ikertu-eta erran daiteke badirela hilarri multzoak bere- zitasun baten jabe direnak. Holako edo halako eskualdetan aurkitzen dira (herri multzo edo ((herrialde)),batzutan holako edo halako herria, adibidez Itsasu). Multzoak hunela berex daitezke: nolako harria, lanak nolako egitura, nolako osagailuak, nolako traka. Multzo horiek, batzutan, eredu batzu eman dituzte, zenbait hamar urtez berregin direnak, eta eredu horiek beren aldapenak izan di- tuzte, guti edo aski urrundu zaizkienak. Hilarri multzo horien iker-lana egiteko Baxenabarre frango egokia da. Pro- bintzia horrek nortasun haundiko eskualdeak baditu. Eskualde horietarik ba- koitzean hilarri molde bereziak ezagut daitezke, herrixka bakar zenbaitetan baka- rrik aurkitzen direnak, hala nola Amikuze. Etsenplu andana bat hortik hartua dup. Lan huntan multzo alde baten berri emaiten dugu. Mugatu ditugu, lehen- CONTRIBUTION A L'ETUDE DES STELES DICOIDALES BASQUES

eredu nabari baten aurpegia eskainiz, nihundik ahal bada. Azkenik, mapa batean, multzo horietako hilarri zenbait zoin herritan aurki erakusten dup. N." 1-4, mapa B: n." 4 hori Garazin ongi ezagutua den lehen-eredu bat da. Aldapenak baditu (n." 1-3). Hor ikusten dugu lehen-eredu hori emeki-emeki bes- telakatzen, alde bakoitzak bere nortasuna finkatzen duela, apaingaia ahulduz doa- larik. N." 5-7, mapa C: Amikuze parte batean bakarrik aurkitu eredua. Dataduna da,1610eta1687artekoa. . N." 8, 9 eta 11, mapa D: Aintzineko eredu horren eta Arberuko hilarrien ar- tekoa da (n." 13-20). Lehena (n." 8) Amikuzetik hurbil da bigarrena (n." 9) Arbe- ruri hurbilago. Bien arteko mota horrek Okzitaniako eta Aragonako hilarriak go- goratzen ditu (V haxea, 6 eskualdea, traka...) N." 13-20, mapa E: Arberun eta Lapurdiraino zabalduak diren ereduak (es- kualde hori Lapurdi zen XIII mende arte). Eredu hori eremu biziki zabal bateko lehen-eredu baten ume da (mapa F). N." 23-25, mapa G Amikuzen bakarrik agertu den eredua, 1614 eta 1642 artean gutienez. N." 26, 27, mapa H: Guti gora behera 1630 eta 1651 artean agertu eredu bat. N." 28, 29, mapa 1: Garazin zabaldu eredua, n." 13-22 obren antzekoa N." 30, mapa J; n." 31, 32, mapa K: Baxenabarreko herri zenbaitetan sartu eredu berezi batzu. Lehena, bereziki Oztibarren aurkitzen da. N." 33-35, mapa L: Bereziki Amikuzen sartu eredua. Bi alderdi horiek elga- rrekin doatzi. N." 36-47, mapa M: Obra horiek trakaren araberako osagailuak dituzte (al- derdi bat I.H.S. ekin). Irulegin egin dira bereziki. Amikuzeko erronda edo ilargi zizter formako sinbolo ainitzek (n." 5-7, 23-25) beren parekoa badute herri hortako iguzki eta ilargi itxuretan. Forma bat baino gehiago har dezaken dirdiradura (diskaren erditikakoa) eta izarren (iguzki, ilargi...) itxurak arras desberdinak dira. Hilari ainitzek erakaspen bat dakarte harrian; ez dira apaingailua apaingailua- renondoan(n." 33, 34, 51, 52, 55, 56). Hilarri multzo batzu euskara eta euskalkiak bezala dira. Hargin bakoitzak bere hizkuntza bazuen harrien moldatzean. Heiek asmatu berrikuntzak, ohidurak beretzen zituen (fig. 4 eta 1, 2, 3; 26, 27; 33-35) edo baztertzen (n." 31, 32). Hilarri mota batzu egiten ziren hunenbeste urtez (20 eta 80 urte arte hortan, hemen ikertu etsenpluetan). Hilarri mota batzu geldigabe berrituak ziren beraz. Baxenabartar hilarria, beren bizia daukaten ainitz multzoz osatua da. Multzo horietarik ainitz eskualde ttipitan barreiatuak dira. Ez dira, auzo herrietan, diren bezala sartzen, aldaturik baizik (n." 5-7; 13-20; 8,9 adibidez). Euskal hilarri- gintzan sendi-molde desberdinen arteko borroka nabari da. MICHEL DUVERT

Je remercie P. Etchehandy (a qui nous devons le préservation de l'essentiel des oeuvres étudiées ici) pour le résumé en Euskara. Je remercie également Monsieur E Goyheneche pour avoir relu le manuscrit et pour ses observations.