HISTOIRES DU PAYS D’

N° 3 - Octobre 2000 Prix : 25 F HISTOIRES DU PAYS D’AIGRE SOMMAIRE Section de l’ADAPA Intercommunalité Editorial 1 10, rue du Pont Raymond 16140 AIGRE Présentation de Barbezières (Yves FIGAROL) 2 - 4

Association régie par la loi 1901 La population de Barbezières en 1841 (Stéphane MÉTAYER) 5 - 7

Membres du bureau Le sang royal des Barbezières ( J. PARFAIT) 8 - 9

Président de l’ADAPA Un amoulangeur à Barbezières (André RAVION) 10 - 11 Jean-Claude MONTUELLE Responsable Une institutrice de Barbezières (M.Th. RIMBAUD) 12 - 13 Michel PERRAIN Secrétaire Stéphane METAYER Pierre LABACHOT (Didier RAVION) 14 - 16 Trésorier Thierry DUPUIS Un champion cycliste … (Jean FOREST) 17 - 18 Bibliothécaire Dominique GRANDJAUD René LEVESCOT (Jean-Claude BERGEON) 19 - 21 Comité de lecture Jacques AUDOUIN Frairie de Saint-Fraigne (Janine AUDOUIN - Y. GUIBET) 22 - 25 Jean-Claude BERGEON Guy BERNARD A Lanville en 1737 (Jacques AUDOUIN) 26 - 28 Aurélie BRIS René FONTROUBADE Les Chabot, une famille de forains… (Charly GRENON) Dominique GAUTIER 29 - 33 Dominique GRANDJAUD Michel PORCHERON Un Ambéracois au Cap-Horn (René FONTROUBADE) 34 Pierre Louis RAPIN Didier RAVION En 1914 à l’école de Saint-Fraigne (Janine AUDOUIN - André LATOUCHE) 35 - 37

Histoire d’un lavoir (Cécile GOUGEAUD) 38 Les articles sont publiés sous l’entière responsabilité de leur auteur. L’aqueduc de Afin d’éviter tout litige, ne pas fournir (Véronique DUJARDIN - Patrick F. JOY) 39 - 41 de documents originaux. Au fil de l’eau, au gré du vent (Dominique GRANDJAUD) 42 - 47 Toute reproduction d’un article, même partielle est interdite sans Coument on souégnait la grippe autefoué l’accord préalable de l’auteur. (Henriette FENIOU) 48

Les statuts et le règlement de l’association sont disponibles auprès Tous les documents, photos, cartes postales, plans etc… de ce numéro sont du bureau de la revue. extraits ( sauf mention contraire) de collections privées.

Cotisation : 50 Francs pour 1 an. Abonnement : 70 Francs pour 1 an.

Responsable de la publication Michel PERRAIN

Dépôt légal : 4° trimestre 2000

N° ISSN : en cours

Conception et mise en page par Dominique GAUTIER

Impression : éditions DU LÉROT 16140 TUSSON Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

EDITORIAL

Amis lecteurs d’Histoires du Pays d’Aigre, nous voici déjà au 3° numéro. Pour fêter cette première année d’existence, nous avons emprunté ce des- sin à LABACHOT *.

BARBEZIERES est flatté de nous recevoir et son « gueurlet », qui avait cessé de chanter depuis bien longtemps, a re- trouvé son air guilleret.

Vous êtes déjà des fidèles et votre empressement à découvrir les numéros suivants est pour nous le meilleur des stimulants.

Forts de vos critiques et suggestions, nous nous évertuons à vous faire connaître ou redécouvrir des fragments de notre patrimoine en diversifiant nos sujets.

Les nouvelles signatures nous encouragent à poursuivre cette passionnante aventure de quête de notre identité.

* Dessin fêtant le premier anniversaire du « Gueurlet », ancienne revue locale de Barbezières.

______1 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

PRÉSENTATION DE LA COMMUNE ______

ARBEZIERES, aujourd’hui, compte 150 habitants, à l’extrémité Ouest du B canton, aux confins de trois départements : , Charente-Maritime et Deux-Sèvres. Il s’agit d’un lieu qui fut habité fort anciennement car on y trouve des tuiles et des monnaies romaines. A l’origine, il dut y avoir une villa gallo-romaine dont l’activité était l’élevage des moutons. Le toponymiste nous apprend que BARBEZIE- RES représente un type « Berbicaria » et s’appelait «Berbegeriis » en 1295. On y par- lait de « parrochia » (paroisse) de « Berbegeyres » en 1303.

La présence des sources du « Péré » est sans doute à l’origine du village. Cette « rivière » n’est alimentée que l’hiver lorsque les pluies ont été suffisamment abon- dantes, ce qui est presque rare aujourd’hui. Il n’en fut pas toujours ainsi ou alors le chemin de la « Levée » aurait été inutile. BARBEZIERES est exclusivement agricole, les artisans ont disparu. Il y a cent ans nous avions : les cordonniers, les sabotiers, les tisserands, les couturières, les forgerons, le menuisier, le coiffeur, un arracheur de dents, deux épiceries, un café et une laiterie coopérative créée par le curé LUGUET avant la guerre de 1914 - 1918.

Après avoir subi le phylloxéra, aux alentours de 1875, et perdu ses 216 ha de vigne de 1831 (date d’établissement du cadastre), les exploitants de l’époque plantèrent en bois les terres les plus lointaines et les plus difficiles. Ils se reconvertirent alors vers une polyculture à base de vaches laitières. Cette situation dura jusque vers les années

______2 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

1970-1980. La vigne culmina, dans la période 1966-1980, à une surface d’environ 45 ha (moins de 30 ha aujourd’hui). Avant le phylloxéra, on dut avoir jusqu’à 250 ha mais le rendement était très inférieur : 30 hectolitres/ha. De nos jours, on parle couramment de 100 à 150 hectolitres/ha. La vigne a donc de nouveau perdu du terrain mais le maïs irrigué est apparu. Les temps changent très vite depuis les années 1950. Aujourd’hui, les vendanges manuelles sont abandonnées au profit de la machine tout comme en 1965, le battage traditionnel à poste fixe prit fin.

L’EGLISE

L’église, qui dépendait de l’évêché de Saintes, avait été donnée en 1060 à l’abbaye de Saint-Amant par l’évêque BOSON. Ces Bénédictins de Saint- Amant la cédèrent aux Templiers en échange de domaines que ceux-ci pos- sédaient dans la forêt de Boixe. Elle fut inscrite récemment à l’inventaire supplémentaire en raison de sa voûte romane. Elle est actuelle- ment en cours de restauration.

LE CHATEAU

Le château primitif, qui datait du XI° siècle, a été détruit pendant la guerre de Cent Ans comme en témoi- gnent les nombreuses armes (pointes de flèches, boulets de pierres etc…) conservées au petit musée de BAR- BEZIERES. D’après les recherches de A. FAVRAUD, il se composait d’un donjon unique (15 mètres sur 15 mè- tres) entouré de douves, construit sur un ensemble de souterrains retrouvés en 1968. Le château actuel a été construit près de l’église à la fin du XV° siècle par la famille de Barbezières issue des seigneurs de Mar- cillac. La tradition orale rapporte que la démolition du donjon du XI° avait fourni une partie des pierres nécessaire à sa construction. La famille de Barbezières conserva le château jusque vers 1750 où il fut affermé puis acheté par la famille FAURE-RENCUREAU originaire du logis du Perret. L’héritière des RENCUREAU, Marguerite d’Aubigné, apparentée à Mme de MAIN- TENON, se dessaisit du château en 1871. Il fut acheté alors par Jean-Baptiste FER- RET dont les descendants le conservèrent jusqu’en 1970.

______3 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

Après avoir frôlé la destruction totale dans les années 1970, le château fut restauré par des propriétaires successifs qui, de 1972 à 1982, l’amenèrent à son aspect actuel (avant la tempête). Les Barbezières possédaient de nombreuses seigneuries en Angoumois, Poitou et Saintonge.

En Angoumois : « La Talonnière », « Montigné », « Bois Breton », « Bois Auroux », « Saint Mary ».

En Poitou : « Chemerault et la Roche Chemerrault ». Deux membres de cette branche de la famille se distinguèrent particulièrement : Aymeri ou Méry de Barbezières qui fut un des hommes de confiance des rois Charles IX et Henri III. Jean Noël de Barbezières de la Roche Chémerault qui fut un militaire talentueux du règne de Louis XIV. Il est mort à la bataille de Malplaquet en 1709. Il était maréchal de camp.

En Saintonge : « Nogeret »

Les Barbezières multiplièrent les alliances illustres et les charges prestigieuses. Ils furent chevaliers de Saint-Louis, du Saint-Esprit, abbés de Celles-sur-Belle etc…

Yves FIGAROL

Note : Aujourd’hui la commune de Barbezières se compose en plus du bourg, de 2 hameaux, « La Brousse », « Lucheville », ce dernier partagé en deux avec Ranville- Breuillaud et d’une ferme isolée, « Le Bouchaud ». Sur la carte de Cassini figure le lieu-dit « La Cheville » duquel il ne reste aucune trace.

______4 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

LA POPULATION DE BARBEZIERES EN 1841 ______

nstitué en 1801, le recensement se déroulait tous les cinq ans. Si aujourd'hui les I informations que l'on communique aux agents recenseurs sont strictement confi- dentielles, il n'en était pas de même au XIX° siècle. Cette absence de secret permet aux curieux de notre époque d'avoir une vue d'ensemble de la population de nos commu- nes. Le plus ancien des registres de population concernant Barbezières date du 9 Mai 1841. Les informations qu'il nous apporte (noms et prénoms des habitants, leurs pro- fessions ainsi que leur situation matrimoniale) y sont assez sommaires mais non dé- pourvues d'intérêt.

La commune de Barbezières comptait 491 habitants - 250 hommes pour 241 fem- mes - répartis de la manière suivante: Le Chêne 79 hab./ 21 ménages Le Bourg 42 hab./ 9 ménages Les Guérins 45 hab./ 9 ménages Chez Joutaud 37 hab./ 9 ménages Chez Feuillet 22 hab./ 7 ménages La Vieille Garenne 103 hab./ 20 ménages Les Dessons 25 hab./ 7 ménages Lucheville 73 hab./ 17 ménages La Brousse 58 hab./ 11 ménages Le Bouchaud 7 hab./ 2 ménages

Si, de nos jours la population de nos villages semble « vieillir », ce n'était pas le cas en 1841 puisque le nombre de célibataires (232) , reflet d'une population jeune à cette période, représente un pourcentage important des habitants tandis que les veufs ne sont que 36 dans tout Barbezières. Ces derniers, ou plus précisément, ces dernières, car il s'agit principalement de femmes (26), sont presque toujours hébergées par leurs enfants après le décès de leur conjoint. De plus, il est intéressant de constater que le nombre d'hommes mariés (115) est plus important que celui des femmes mariées (108). En effet cette différence est due à la présence d'hommes employés comme domestiques dans une exploitation agricole ou comme ouvriers chez un patron et qui ne vivent pas avec leur famille.

Profitons-en pour étudier les divers corps de métiers présents à cette époque. Cela n'étonnera personne d'apprendre que près de 90% des habitants sont soit propriétaires terriens, cultivateurs, métayers soit ouvriers agricoles. Pour le reste, nous retrouvons des professions liées à cet environnement agricole comme le maréchal-ferrant François

______5 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

GADREAU qui résidait Chez Feuillet. Dans le bourg, il était possible de trouver des cordonniers comme LACOSTE - DURIF et leur ouvrier Léonard SENIOU ou bien BORNE et sa fille, des sabotiers comme Jean FOREST, par exemple, des « tailleurs d'habits » et des tisserands avec, pour toutes ces professions, le choix entre deux ou trois adresses. Un mur à construire ? Il suffisait d'aller voir le maçon Michel POIRIER qui, s'il n'avait pas le temps de vous le faire, vous aurait envoyé l'un de ses six em- ployés. Pour les banquets c'était Jacques GADREAU qu'il fallait aller voir. Sans ou- blier les nombreux charpentiers et le scieur de long, en raison sans doute de la forêt à proximité. Et il y avait aussi un bordier en la personne de Pierre COURONNEAU, un garde champêtre (Jean AVRILLAUD), un buraliste (Charles GUERINAUD), ainsi qu'un huilier (François PETIT). Comme Barbezières ne bénéficiait pas d'un prêtre à demeure, l'église était confiée aux soins de Jean DESSE qui, après avoir fait son travail de cultivateur, endossait la fonction de sacristain. Quand vous aviez les moyens d'offrir l'école à vos enfants - l'école gratuite et obli- gatoire n'apparaissant que près de quarante ans plus tard - vous aviez alors affaire à Martin VARAGNAC et à sa femme.

Lorsque l'on s'attache au nom des personnes, il est surprenant de constater qu' il existe 133 noms de famille différents sur toute la commune de Barbezières. Cependant, il émerge quand même quelques noms qui rappelleront sans doute quelque chose aux plus anciens comme les familles AVRILLAUD, NAULIN, GADREAU, LHOU- MEAU... et pour les plus jeunes les familles FOREST, FAVREAU, BERNARD, AN- DRÉ, SEBILLAUD ... Toutes ces familles sont indéniablement liées au passé de Bar- bezières. Que les gens encore présents dans la commune, ayant le même patronyme, sachent qu' à la fin du XVII° siècle ces noms étaient déjà présents dans la population locale. Malheureusement sur les 133 noms recensés en 1841, une grande partie a dispa- ru, soit par le croisement des familles comme par exemple une branche des AVRIL- LAUD s'est alliée avec une branche de la famille BERNARD, soit par migration de ces familles au fil du temps ou extinction. Certains noms présents il y a 160 ans se retrou- vent parfois dans les autres communes du pays comme les LEPINOUX, AUDOUIN, MATARD ... Il y a aussi un petit aspect anecdotique dans l'étude des prénoms. Ainsi dans la même maison ils pouvaient être au moins quatre ou cinq personnes à porter les mêmes noms et prénoms comme par exemple un propriétaire du nom de Jean ANDRÉ qui nomma son fils comme le voulait la tradition, Jean qui, lui-même, prénomma deux de ses fils également Jean. Il est aussi vraisemblable qu'il devait y avoir des modes dans l'attribution des prénoms, principalement celui des filles car un prénom relativement rare comme celui de Marie Geneviève apparaît plusieurs fois dans le registre. Mais il faut tout de même admettre que les prénoms étaient souvent identiques et ceci quelle que soit la commune: François, Louis, Pierre et Jean pour les garçons et Marie, Jeanne, Louise ou Magdelaine pour les filles. Certains parents faisaient quand même preuve de beaucoup d'originalité dans la re- cherche de prénoms pour leur progéniture puisque l'on trouve des Mélie, Nannette,

______6 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

Euphrasie d'un côté et des Gugnot, Saint Jean, ou autre Alphroïd de l'autre. La palme de l'originalité revenant sans doute à l'adjoint au maire Jean Baptiste FERRET qui prénomma ses trois enfants Mélestre, Lindinne, et Gonde. A René BERNARD…

Stéphane METAYER

Sources: Archives départementales de la Charente

Population de Barbezières sur près de 180 ans

600 500 400 300 200 100 0 1821 1831 1836 1841 1846 1861 1866 1872 1876 1881 1886 1891 1896 1901 1906 1911 1921 1926 1931 1936 1946 1954 1962 1968 1975 1982 1990 1999

1821 1831 1836 1841 1846 1851 1856 1861 1866 1872 1876 1881 1886 1891 1896 416 479 485 491 468 470 428 425 411 386 376 361 304 293 277

1901 1906 1911 1921 1926 1931 1936 1946 1954 1962 1968 1975 1982 1990 1999 274 277 288 288 265 281 252 212 219 224 200 186 167 157 147

Dominique GAUTIER

Sources : Démographie 1824 / 1992 publié par l’INSEE Poitou-

______7 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

Le SANG ROYAL DES BARBEZIERES ______

1981: Le monde entier découvre que François MITTERRAND, récemment élu Prési- dent de la République, serait un lointain cousin de la Reine d'Angleterre et de nom- breuses autres têtes couronnées actuelles, elles-mêmes descendantes de la Reine Victo- ria. Nous faisons alors connaissance avec la famille de BARBEZIERES, ancêtres du Président, famille originaire du village charentais du même nom. En poussant plus loin les recherches, on découvre également le « cousinage » des descendants de cette fa- mille avec des prétendants à une couronne perdue (Comte de Paris, Famille Napo- léon…) 1. Redécouvrons l’arbre généalogique, très simplifié, de la famille de BARBEZIE- RES :

Pierre de BARBEZIERES, seigneur du dit lieu, décédé avant 1426 marié avec Catherine GUINÉE ↓ ↓

Jean, seigneur de BARBEZIERES Pierre de BARBEZIERES, seigneur de marié avec Amicie LHERMITTE Montigné marié avec N… de MONTIGNÉ   Pierre de BARBEZIERES  marié avec Guyonne ESCHALLE  Louis de BARBEZIERES  marié avec Catherine GUITAUD   Hercule de BARBEZIERES  marié en 1528 avec Guillaumine JAY ↓ Reine d’Angleterre et autres têtes couron-  nées. ↓ Famille de Paris - Famille Napoléon François MITTERRAND

Les BARBEZIERES et leurs descendants « cousins » de Rois ? Certainement… mais ce que l’on va découvrir au- jourd’hui c’est que, eux mêmes, descendent en ligne directe des rois mérovingiens, carolingiens, d’Angleterre etc… et ceci de très nombreuses fois… par les femmes.

Blason des BARBEZIERES : « fuselé d’argent et de gueule »

______8 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

Pour illustrer ce propos, nous avons établi l’ascendance simplifiée de Guillaumine JAY dont nous avons fait la connaissance un peu plus haut :

Hercule de BARBEZIERES marié avec Guillaumine JAY, fille de : Julien JAY et Marguerite REGNAULT, descendante de : Arnaud 1° REGNAULT 2 et N… de , fille de : Guillaume de CHABANAIS et Béatrice de PASSAVANT, petite fille de : Barthélémy de PASSAVANT et Elise de LUSIGNAN, petite fille de : Geoffroy II de LUSIGNAN et Humberge de LIMOGES, fille de : Adhémar de LIMOGES et Sara de CORNOUAILLES, fille de : Renaud de CORNOUAILLES, fils naturel de : Henry I°, roi d’ANGLETERRE, fils de : Guillaume le Conquérant 3 et Mathilde de FLANDRES fille de : Beaudouin V de FLANDRES et Adélaïde de , fille de : Constance 4 et Robert II le Pieux, fils de : Robert I° 5 et Béatrix de VERMANDOIS, descendante de : CHARLEMAGNE6, descendant de : Clovis I° et Clothilde 6

Par cette même Guillaumine, nous pourrions remonter non moins de douze fois jus- qu’à Clovis et ses ascendants, cinq fois jusqu’à Guillaume le Conquérant et ses ascen- dants. De la même façon d’autres épouses des seigneurs de BARBEZIERES ont ap- porté, au cours des siècles, dans cette famille, un peu de sang royal. Cette étude ne se veut pas présomptueuse car quiconque se découvre une ascen- dance de petite noblesse provinciale peut être sûr d’avoir dans ses veines une goutte de « sang bleu ».

Si certaines personnes désirent des compléments sur l’ascendance royale des BAR- BEZIERES, elles peuvent me contacter.

Josette PARFAIT

Sources : 1 - Etude de Pierre BENSOT in bulletin du C.E.D.R.E. (1992). 2 -Voir la Généalogie complète des « REGNAULT de la SOUDIERE » de Eric PERCY- MARINIER. 3 - On peut remonter la généalogie jusqu'à ROLLON. 4 - On peut remonter la généalogie de cette Reine jusqu’au Pharaon Ramsès II . voir : « Nos ancêtres de l’antiquité » de Christian SETTIPANI. (Editions Christian) 5 - Fils de Robert le FORT tige des rois Capétiens. 6 - Il est fort probable que Charlemagne descend des Mérovingiens (par une femme), mais la preuve absolue n’en a pas encore été faite .

______9 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

Un amoulangeur A BARBEZIERES ______

utrefois, on parlait de la moulange et de la boulange. La moulange concernait A tout ce qui se rapporte au moulin et à la transformation des grains en farine, alors que la boulange visait la fabrication du pain. Au 12° siècle, on vit apparaître en France les premiers moulins à vent en prove- nance d’Orient, technique probablement développée par les Croisés venant de Jérusa- lem. Ce n’est qu’à partir du 13° siècle qu’on en trouve mentionnés dans notre région.

Intérieur d’un moulin à vent d’après le livre « Le moulin à vent et le meunier »

La construction du moulin à vent, outre les pierres de la tour et des meules, nécessitait un ensemble important de toiture, ailes, arbres de transmission, rouets et engrenages en bois. L’amoulangeur, ou charpentier de moulin, avait la responsabilité d’équiper ce moulin de tout l’appareillage et, en plus de la construc- tion, d’entretenir celui-ci lors de réparations ultérieures. Le moulin à vent de Barbezières se trou- vait au nord du bourg, avant les bois, en di- rection de . Il fut construit par la sei- gneurie, probablement au 16° siècle, pour permettre à ses sujets, moyennant redevance, de venir moudre leurs pochées de grain.

On le distingue très bien sur la carte de «Cassini » et il donna son nom au lieu-dit « le plantier du mou- lin » et aux « vignes du moulin », auxquel- les on accède par le « chemin du moulin ».

______10 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

Il fonctionnait encore au début du 19° siècle et sa tour ne disparut complètement que vers 1900.

Les actes conservent la trace de plusieurs meuniers et fariniers. En 1692, Pierre FOREST est en même temps meunier du moulin et fournier du four banal. En 1695, c’est Jean DESSE qui est meunier. En 1807, François SOUCHARD est le dernier meunier. On trouve également des fariniers qui livraient la farine du moulin ; Jean Barit, en 1803, était farinier chez François SOUCHARD, précédé par Jean GADRAT en 1734 et lui-même par Charles DESSE en 1731. Ce petit coin du Pays d’Aigre était pauvre en cours d’eau et un certain nombre de moulins à vent occupait les hauteurs environnantes. On en trouvait 2 ou 3 Aux Gours, 2 dont une tour subsiste à Sècheboue sur la commune voisine de Chives, 2 ou 3 entre Breuillaud et Fontaine, un près du bourg de Ranville et plusieurs vers Beauvais dont le moulin de Regret en direction de Bresdon.

Ces moulins avaient souvent besoin de réparations, certains ne furent construits qu’au 18° et peut-être 19° siècle, ce qui justifiait la présence d’un amoulangeur à proximité. En 1793, René AURUY est amoulangeur à Barbezières. En 1859, il est précisé que Jules Constant Mulon l’avait remplacé. En 1860, son fils, Ferdinand MU- LON est le dernier amoulangeur du village.

Notre moulin à vent n’a pas laissé de traces, si ce n’est quelques fragments de meule retrou- vés lors de labours, et c’est grâce aux do- cuments que nous avons pu savoir qu’un métier peu fréquent, celui d’amoulangeur, avait été exercé à Barbezières pendant plus d’un siècle.

André RAVION

Autre vue d’un moulin à vent extraite du livre « le moulin à vent et le meunier »

Sources : Registres paroissiaux de Barbezières Registres d’Etat Civil de Barbezières Actes familiaux Bibliographie : « Le moulin à vent et le meunier » - Claude Rivals.

______11 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

UNE INSTITUTRICE DE BARBEZIERES : Madame DABBÉE ______

arbezières, depuis de nombreuses années déjà, n’a plus d’école et je ne peux évo- Bquer sans mélancolie l’époque lointaine, il est vrai, où nous avons été jusqu’à 42 élèves.

C’était dans les années 1925 - 1935 environ. Notre institutrice s’appelait Madame DABBÉE. Elle exerçait depuis de nombreuses années dans notre petit village. Elle était arrivée toute jeune, s’y était mariée et y avait fait toute sa carrière. C’était une personne assez forte, pas très grande, le teint coloré, les cheveux tirés dans le chignon classique de l’époque. Elle était douce, patiente et cependant menait son petit monde de main de maître : supporter toute la journée le bruit de 80 petites galoches impatien- tes, des ardoises qui tombent, des rires étouffés, des pleurs soudains, des petites conversations, tout cela n’était pas une sinécure et l’obligeait à bien relative sévérité. Elle distribuait quelques gifles de temps en temps. Nous ne nous en formalisions guère et nos parents non plus. C’était le mode d’éducation d’alors. Elle avait aussi une grande baguette de bambou et la maniait avec une dextérité extraordinaire. De son estrade, elle arrivait à frapper la tête et les oreilles des dissipés de la rangée du fond. Ce ne devait pas être trop terrible car les victimes ne semblaient pas affectées outre me- sure et savaient très bien se protéger avec leurs mains. Elle menaçait aussi souvent d’enfermer, dans sa cave, ceux qui ne travaillaient pas bien. Les petits avaient très peur. Les grands étaient plus sceptiques. Existait-elle seulement, cette cave ? Elle savait aussi être bonne, maternelle même. Elle soignait les petits bobos, pansait les genoux écorchés. Les jours de pluie, les enfants des hameaux voisins arrivaient avec leurs lourdes capes épaisses imprégnées d’eau. Elle les en débarrassait bien vite, étalait les vêtements sur des chaises autour du poêle et l’on voyait une épaisse vapeur monter lentement. Certains parents, l’été, demandaient l’autorisation pour leur enfant de sortir avant l’heure afin qu’il garde les vaches. Compréhensive, elle accordait la permission. Elle excusait les absences au moment des vendanges, menaçait parfois de prévenir les gendarmes si certains exagéraient, mais c’était tout. Par contre, elle était intransigeante pour la propreté. Tous les matins, il y avait l’examen des mains. Les filles présentaient avec complaisance leurs menottes bien nettes alors que certains garçons faisaient virevolter les leurs avec une rapidité ahuris- sante. Elle n’était pas dupe et les envoyait se laver au seau d’eau destiné à cet usage. De temps en temps, elle fouillait dans les chevelures à la recherche des poux. Elle en trouvait très peu mais quand cela arrivait, elle se fâchait très fort. Elle organisait aussi notre journée scolaire de façon impeccable et ce n’était pas une mince affaire ! une classe unique, une quarantaine d’enfants de 5 à 12 ans. Par exem- ple, lorsqu’une division récitait une leçon, les autres étaient plongés dans des exercices

______12 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______de calcul et le cours préparatoire planchait sur une page d’écriture. Pas de temps mort. Tout le monde travaillait. Au moment des grandes vacances, elle remettait à chacun un cahier de devoirs de vacances, pas un cahier Magnard, tout imprimé, mais un cahier où tous les textes de devoirs étaient écrits par elle-même. Un pour chacun, d’une cinquantaine de pages, bien adapté au niveau de chaque enfant et elle corrigeait tout cela à la rentrée. Je ne veux pas oublier de mentionner toute la peine qu’elle prenait pour ses candi- dats au Certificat d’Etudes. A partir du 3° trimestre, elle les faisait travailler tous les soirs deux heures après la classe pour qu’ils soient absolument prêts pour le fameux examen ; sa récompense, c’était leur succès car tout cela était complètement bénévole. Parents et enfants trouvaient cela normal.

Ecole de Barbezières en 1928 avec Mme DABBÉE l’institutrice

Je pourrais encore citer bien d’autres exemples du dévouement et du désintéresse- ment de notre ancienne maîtresse à qui nous devons beaucoup. Mais sans vouloir le moins du monde diminuer son mérite, je dois dire qu’ils étaient tous ainsi les institu- teurs de cette période et tous, depuis Jules FERRY, quel rôle important ils ont joué dans notre pays. Et ils ont tous bien mérité leur titre de « Hussards de la République ».

M. Th. RIMBAUD

Sources : Souvenirs personnels

______13 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

Pierre LABACHOT , dessinateur et animateur infatigable. ______

uand Albert, alors instituteur au long cours, Q et Noëline sont arrivés au début des années 50, avec dans leurs bagages les jumeaux Pierre et Robert, on n’imaginait pas tout ce que cette fa- mille allait apporter comme joies (des tonnes), mais hélas aussi comme peine irréparable. C’est toute une génération qui a bénéficié du talent de maître d’école, de Monsieur LABA- CHOT, nous faisant découvrir au même niveau que les matières fondamentales, le chant, le des- sin, le sport… Forts de ces enseignements et des valeurs reçues, il nous a été très facile de conju- guer convivialité, amitié, solidarité à tous les temps. Nous avons eu la chance de grandir aux côtés de Pierre et Robert, partageant leurs jeux, enfants, puis associant notre bonne volonté à leurs talents d’artistes et organisa- teurs. Combien de soirées avons nous passées à refaire le monde ? Nul ne s’en sou- vient…peu importe tant cette amitié im- mense et cette complicité nous plongeaient dans un univers imaginatif et créatif. « Loisirs au Village » était né. Une pé- riode de rodage, dès 68, donna naissance à une discothèque, le « Rapace », rendez- vous des ados, alors que parallèlement le site du Bois du Château nous vit « guides » et fouilleurs à la recherche d’un souterrain enfin découvert, puis bâtisseurs d’un premier « musée ». Devenus, au hasard des idées des uns et des autres, organisateurs de soirées specta- cles, (veillées et soirées cabaret) ou repas campagnards, (Repas de Goret), journa- listes, (le « Gueurlet » garde précieuse- ment la trace écrite de souvenirs chers à notre village), footballeurs au « tournoi

______14 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______des minorités » ou lors d’une tournée mémorable en Bretagne avec une équipe du cru en 1974. Toutes ces entreprises, Pierre n’y était pas étranger et combien de fois l’avons nous sollicité pour prêter son concours à des manifestations, expositions ou autres. Il ne savait pas refuser malgré nos incessantes demandes, si bien que d’autres asso- ciations faisaient appel à lui pour animer ou simplement réaliser des affiches que notre atelier sérigraphie s’empressait d’imprimer. Si son talent d’artiste était très éclectique, c’est sa plume habile et malicieuse qui lui valut sa notoriété. Après de premières réussites quand, ado- lescent, il s’illustrait dans quelques con- cours comme celui de « Pilote », son pas- sage au lycée Guez- de-Balzac permit au « Potache », le journal du bahut, de délivrer une photo de famille du corps enseignant, à nulle autre pareille. La caricature, toujours juste, au service du dessin événementiel avait fait de lui l’indispensable dessinateur de la Charente Libre pour une complicité de 15 années. Sa signature, passée de Félix à Labachot, soulignait clins d’œil, satires, coups de griffe, coups de cœur ou coups de gueule et son trait était devenu aussi reconnaissable que familier aux lecteurs de « La Vie charentaise », de « L’Ecole Libératrice » ou d’autres revues. Il excellait dans l’humour, de toutes les couleurs, recueillant lors de festivals, des récompenses, ô ! combien méritées ! Epinal, Anglet, St Just-le-Martel, Bruxelles… Il côtoyait les plus célèbres humoristes du moment au Salon d’Angoulême et participait avec certains, comme Plantu, à l’association « Un bon dessin vaut mieux qu’un long discours ». Plusieurs recueils nous permettent de voir et revoir avec toujours autant de délectation nombre de ses dessins « Défense d’affliger », « Pas malade-malade mais bien atteint quand-même », « C’est déjà dans le journal ».

Son engagement auprès des pacifistes, écologistes et humanistes lui a valu de figu- rer en très bonne place dans un recueil de Greenpeace « Silence on coule » et de parti- ciper aux multiples combats du MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples).

______15 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

Et puis un sale jour de 87, le destin a fauché Pierre, le dessi- nateur, l’instituteur, l’animateur, l’ami de tous. « Un bon dessin vaut mieux qu’un long discours. Mais nous ne savons pas dessiner notre peine. Depuis la nuit dernière, CL ne sait plus dessiner ». La Charente Libre venait de perdre un précieux collaborateur et son village adoptif de Barbezières et ses nombreux amis en réfèrent toujours à ses multiples facéties comme si Pierre partageait en- core leur chemin.

Didier RAVION

Dessin de PLANTU en hommage à Pierre LABACHOT paru dans « La Charente Libre » du 21 février 1987

______16 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

Un champion cycliste né au « Bouchaud » commune de BARBEZIERES le 2 mars 1926 ______

a tourmente passée, le sport cycliste repart, les vélos de course jusqu’alors pres- L que introuvables, font leur apparition dans les magasins de cycles. Les épreuves sont réorganisées à Aigre, , Villejésus, Le Bouchet, etc…

A Aigre, la première course, qui se dispute sur le circuit - Grand’rue, Gendarmerie, Crèvecoeur -, voit le Cognaçais MALLET l’emporter devant Stanis URBANIACK et Mimile BANCIERE.

En 1947, trois Charentais vont passer « pros ». Ce sont Robert RIPPE d’Angoulême, Guy ALLORY de Roumazières-Loubert et Jacques PRAS de Bréville. Ce dernier remporte l’étape Nantes / La Rochelle du Tour de France 1948. C’est alors qu’un jeune agriculteur de la ferme du « Perret » d’Oradour, issu d’une famille cycliste d’avant guerre, va faire une belle carrière chez les amateurs. Il s’agit du regretté « Coco » TRAINAUD. Il va donner ses premiers coups de pédales, avec le vieux vélo « Alleluya » du tonton « Nono ». Ensuite c’est avec le « Royal Codrix » neuf et une licence au Vélo Club Angoumoisin qu’il va glaner des dizaines de victoires sur les routes du Poitou-Charentes. Passé amateur indépendant, 1° catégorie, à l’UCAP Angoulême - chez Peugeot Michelet - il remporte le prix Salomon à , le prix de devant URBANIACK et Jacques VIVIER, ce dernier vainqueur de deux étapes du tour de France. L’année suivante, il termine 2° de ce même circuit en com- pagnie de son beau-frère, Robert PALLU. Ensuite, il va remporter, en solitaire, le 2° critérium de Saint-Claud. A Matha, c’est avec les ROBIC, REMY, TEISSERE, Ber- nard GAUTHIER, BOBET qu’il participe. Il est également au départ du Bol d’or des Momédières à Chaumeil (Prix Jean SEGUREL). Les COPPI, BARTALI, BOBET , GEMINIANI, ROBIC en sont les favoris ; une belle place d’honneur le récompensera. Le prix d’Aigre lui échappe par deux fois, la première derrière PELÉ de Tours et devant André DANGUILLAUME qui l’avait « tassé » dans la côte du « Galiment ». L’année suivante, il laisse la victoire à Pierre BEUFFEUIL, sur le fil. BEUFFEUIL passé « pro » l’année suivante remporte 2 étapes du Tour. Michel FRIOU, le Saintais, VENIEN, le Poitevin, Robert PALLU, le Jarnacais, et bien d’autres, viendront inscrire le prix d’Aigre à leur palmarès.

« Coco », marié, vient s’installer et ouvrir un magasin de cycles à Verdille dans les années 50. Il va créer le Vélo Club Verdillois. La présidence est assurée par M. DU- CHAIS. Le prix cycliste du printemps toutes catégories voit le jour. Le Manslois, Ro- bert SUIRE, en est le premier lauréat, ensuite PENAUD de Matha, l’ex « pro » Michel

______17 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

DEJOUANET de Châteauroux, BELLOCQ de MONTAUBAN, Stanis URBANIACK et bien d’autres en seront les vainqueurs. « Coco », comme à Aigre terminera deux fois second de DEJOUANET et de BELLOCQ.

Le Vélo Club Verdillois organisera plusieurs épreuves. Le premier prix de « Bouchet » revient au Manslois Paul DESFORGES. Jacques VALLADE, licencié à Matha et demeurant à Ranville-Breuillaud, gagne à Lupsault. Aux Gours, c’est Chris- tian PAILLÉ, de Jonzac, qui l’emporte devant Michel GRAIN de Poitiers. Celui-ci, passé « pro » et équipier de Jacques ANQUETIL, remportera « Le Midi Libre » et fera deux tours d’Italie et cinq tours de France. A Chillé, Guy POINEAU, d’Angoulême l’emporte. N’oublions pas le Prix de la ferme du « Perret » où le Saintais, William ROUILLÉ, s’offre la gerbe.

Ma mémoire me fait un peu défaut pour certaines autres épreuves. A vous amis du cyclisme de les raconter.

Au « Perret » le départ d’une course de Chillé.

Debout de gauche à droite : RAYNAUD, Nénesse ROUX, PENAUD, MIRONNEAU, PANETIER, Mimile BANCIERE, BOISSINOT. A genoux : Guy POINEAU, Monique TRAINAUD et « Coco ».

Jean FOREST

______18 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

FIGURE LOCALE AIGRINOISE René LEVESCOT ( 1899-1970) ______

oici maintenant trente ans, disparaissait à AIGRE un personnage « haut en cou- V leur » dont le souvenir persiste dans la mémoire de nombreux Aigrinois de ma génération et de celles qui nous ont précédés. Nous souhaiterions, à travers quelques anecdotes, faire revivre notre concitoyen : il ne s’agit nullement d'une biographie mais simplement d'une « évocation » où chacun pourra venir, ensuite, compléter le tableau dans nos prochains numéros, en apportant de nouveaux témoignages, d'autres « histoires » qui ajouteront à la truculence d'un personnage sorti tout droit de quelque roman picaresque ou, pourquoi pas, d'une bande dessinée.

Le soldat : Engagé volontaire à 18 ans en 1917, après le décès de son frère aîné tombé au champ d'honneur, il participe aux combats de la 1° guerre mondiale et, à l'issue de cette dernière, à la campagne d'Orient en 1919 où il va découvrir l'Egypte, la Palestine, le Liban et la Syrie. Il y combat contre les Turcs, les Druzes et les Alaouites du Djebel Ansarieh sur la côte syrienne. Combien de fois, devant nous autres, enfants, dans les années 50-60, nous a-t-il fait le récit de ses « exploits guerriers » dans cet Orient qui continuait à le fasciner ; à son domicile, dans son « isba » comme il le dési- gnait, une carte ancienne du Proche Orient s'étalait sur le mur décrépi, maculée de son sang, en souvenir de cette « époque héroïque ». « Eh ! oui, mesdames, j'ai pissé dans le Nil, lorsque j'avais 20 ans » comme il le racontait à ses interlocutrices, quand elles prêtaient l'oreille à ses récits. Facétieux, il coulera un jour ses médailles et décorations dans le ciment, sur le trottoir, devant sa maison, en souvenir des jours glorieux !

L’amateur d’histoire : Doté d'une mémoire assez prodigieuse, il excellait, dès les bancs de l'école, en histoire et en géographie ; en histoire surtout, il fallait l'entendre réciter toutes les dates et c'est grâce à lui que j'appris un jour que l'Empereur Napoléon était décédé à l'âge de 51 ans 8 mois et 21 jours ! Quelle précision ! ... Nous en res- tions ébahis !

Le Révolutionnaire : « Citoyen » ou « camarade », il ne fallait surtout pas lui don- ner du « Monsieur » car, là, son sang ne faisait qu'un tour et le voilà parti, évoquant le souvenir de la Révolution Française de 1789, de la Commune de Paris, ou bien la Ré- volution d'octobre et la prise du Palais d'hiver par les bolcheviks. Plusieurs fois, je l'ai entendu dans le magasin que tenaient à l'époque mes parents, s'enthousiasmer lorsqu'un compte se terminait par le chiffre 93, et il repartait de plus belle « 93, mon étoile monte et brille », « 93, l'année qui a vu tomber la tête d'un roi » et de citer les grandes figures de la « Convention montagnarde » , les Robespierre et autres Saint-Just. Révolution- naire, certes, mais avec un vieux fond d'anarchiste et de libre-penseur qui l'empêchait d'adhérer pleinement à un quelconque parti, aussi révolutionnaire soit-il. C'était, avant

______19 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______tout, un franc-tireur, un solitaire et c'est toujours comme « candidat libre » qu'il se présentera à AIGRE aux élections municipales, menant campagne de façon tonitruante, rameutant les électeurs en jouant du tambour sur un vieux bidon, tout en déclamant sa profession de foi. A la Libération, on le verra escalader le clocher de l'église, pour ve- nir y planter le drapeau tricolore: il obtiendra alors un score maximum d'une soixan- taine de voix : le panache a payé !

Le « camarade » LEVESCOT dans sa petite vigne située au « Galiment » à la sortie d’Aigre.

L’anticlérical et l’anarchiste : Cet homme qui « bouffait du curé » habitait à côté du presbytère ! Ironie du sort ! Ah ! que de démêlés avec le « ratichon » comme il l'appelait ; « l'homme déguisé en femme et qui parle latin » ; les anecdotes ne manquent pas, elles ne sont pas toujours à l'avantage de notre personnage : un dimanche matin, en état d'ébriété (nous évoquerons plus loin son penchant pour la boisson consubstantiel à sa personne !) il vient provo- quer Monsieur le Curé en duel, pendant l'office, brandissant deux sabres d'abordage et interpellant l'homme de Dieu en ces termes : « Viens donc ratichon, descends de la chaire et viens te battre avec le « camarade », devant tous tes paroissiens si tu en as le courage ! ». On devine l'effet produit ! et sagement Monsieur le Curé déclina l'invita- tion ! Une autre fois, il s'en vint frapper à la porte de l'ecclésiastique et lui présenta une tête de cochon en s'écriant : « Tiens ratichon, voilà ton frère ! » Monsieur le Curé, très digne, ne répliqua point et, saisissant l'offrande, remercia son voisin pour le bon repas qu'il allait faire, laissant notre homme un peu désappointé ! Le sabre et le goupillon allant de pair, c'est aussi envers les représentants de la force publique qu'il exerçait sa malice et, quand l'occasion se présentait de jouer un bon tour aux gendarmes, il ne la manquait pas ; comme en ce jour de foire en présence d'une grande affluence où il réussit, on ne sait comment ? à faire monter à côté de lui dans sa carriole un représentant de la maréchaussée et fouette cocher ! les voilà partis à bride abattue faisant plusieurs fois le tour d'AIGRE aux cris de « A MOSCOU ! A MOS- COU ! » au grand dam du pauvre gendarme, honteux d'une telle équipée et suppliant

______20 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______notre homme de le faire descendre sur le champ ; hélas ! il lui fallu boire la coupe jus- qu'à la lie !

Un grand buveur par devant l'Eternel ! C'était là en quelque sorte, l'essence du personnage, aussi l'avons-nous gardée pour la fin de notre histoire. Qui ne se souvient, en effet, des frasques du « camarade LEVESCOT buveur impéni- tent, grand amateur, comme il le disait lui-même, de la « tisane de Souchot » ou bien du « grand Vittel de Moscou ! » bref du « gros rouge ». Interrogé, par nous autres, au sujet de l'énorme quantité ingurgitée tout au long de son existence, il nous assurait qu'il y avait là de quoi « faire tourner un moulin à cassottes pendant au moins vingt ans » ! « je ne me suis saoulé pourtant qu'une seule fois dans ma vie, affirmait-il, mais par contre je me suis souvent ressaoulé ». Nuance ! Les dernières années de son existence, arborant une longue barbe blanche, certes avinée et parfois ornée de rubans rouges, la sagesse lui était venue ; finie l'ivresse sur la voie publique, provoquant l'ire des gendarmes et les récriminations du voisinage, il avait trouvé un ingénieux système pour s'enivrer nuitamment : un tonneau suspendu au-dessus de son lit, avec un larron de bonne longueur, lui permettait de s'adonner à son vice en toute impunité, car, ajoutait-il « A mon âge on préfère maintenant Bacchus à Cupidon » ! Et de faire partager sa passion à sa malheureuse compagne, une petite chienne baptisée « Chopinette III » qui, elle aussi, buvait son coup de rouge dans son écuelle à l'instar de son patron !, la pauvre bête arborant sur son pelage une faucille et un marteau peints en rouge, ainsi que le bout de la queue, le tout du plus bel effet (ré- volutionnaire bien sûr).

Peut-être existe-t-il finalement un Dieu pour les ivrognes, car malgré son intempé- rance légendaire, notre homme mourut cependant septuagénaire. Qu'il repose en paix au milieu des vignes du Seigneur ! Et, si nous sommes venus un peu lui tirer la barbe, il nous le pardonnera volontiers car il ne fut point méchant homme et demeura parfai- tement honnête.

(A suivre) Jean-Claude BERGEON

Inauguration

Le mercredi 5 juillet 2000 à 18 h 30, le président de la Communauté de Commune et le Club MARPEN avaient convié de nombreux invités pour l’inauguration des 8 salles restaurées du Logis Marguerite de Valois à Tusson. Parmi ces invités se trouvaient beaucoup de membres de notre association, lesquels ont pu constater la qualité des travaux effectués.

______21 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

FRAIRIE DE SAINT-FRAIGNE EN 1937 ______

n juin 1936, une loi instaure les congés payés de quinze jours pour les salariés. En E 1937, Léo LAGRANGE, Sous-Secrétaire d’Etat à l’Organisation des loisirs, né- gocie avec les Chemins de fer « un billet populaire de congé annuel ». Ainsi, cette année-là, les parents et leurs descendants partis « travailler en ville » vont pouvoir revenir au pays retrouver leur famille, à l’occasion de la fête patronale qui, de ce fait, va connaître une activité particulière. « L’Ouche à Pénigaud » où se tenait la frairie de Saint- Fraigne

Nous sommes à Saint-Fraigne, le premier dimanche de septem- bre. Cette date coïncide avec l’ouverture de la chasse. Quelle animation dans le village ! Depuis la veille, le parquet-buvette Al- fred, les manèges Pierdon, la confiserie Rivet sont installés dans « l’Ouche à Péni- gaud ». Les jeunes filles étrennent une jolie robe. Les enfants rêvent de croquer les berlingots de toutes les couleurs et attendent avec impatience de pouvoir grimper sur le manège de chevaux de bois. Repeints tout à neuf, cinq petits chevaux blancs aux sabots vernis, une petite chèvre attelée à un carrosse, deux cochons roses, tournent et tournent encore au son de la musique. Pour les plus grands, les pousse-pousse… Attachés soli- dement aux sièges, les filles et les garçons s’envolent sur l’air de « Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux » ! Les chaînes entortillées font prendre encore plus d’altitude en se déroulant. Petits cris d’effroi de ces demoiselles et ravissement des jeunes gens !

Manège à Saint-Fraigne

Ici, le crépitement du tir… Les plus experts rapporteront le petit chien en porcelaine ou la belle poupée frisée comme précieux souvenir. Une roue

______22 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______aussi, sorte de roue de bicyclette, placée horizontalement, permet, quand on la tourne avec adresse, de gagner une bonne bouteille de vin ou un paquet de biscuits. La lame de corset chante sur les grosses pointes du pourtour.

Le bal nous invite… L’orchestre comprend une clarinette (Raymond MIRON- NEAU), un saxophone (Jean SAIMPON), un accordéon (Robert RENAUD) et une batterie (Henri SEGUIN). Les couples s’engouffrent sous le parquet. Ce sont la célèbre valse « L’amour est passé près de vous », le tango langoureux « Le plus beau des tan- gos du monde » puis la java coquine « La java du Parisien ».

Pendant les deux jours de fête, la piste de danse est bien employée. Sur les bancs, placés tout autour, les commérages vont bon train si le jeune homme « n’est pas de la commune ». Les mamans surveillent les évolutions de leurs filles.

A la buvette, Lucien CHAUVET et Yves MARCELIN racontent leurs exploits de la chasse du matin. Rien n’est oublié : les gesticulations, les détonations des fusils, les aboiements des chiens, tous les moindres détails ! … Alfred, en les écoutant, leur verse copieusement des verres de vin rouge.

Le lendemain est réservé aux jeux, petites compétitions entre les gens du village. Ils débutent par la course de vélos. Mimile BANCIERE gagne le sprint et a droit à la bise. Dans la cour du café, « Chez Madeleine », les amateurs de rampeau prennent le jeu très au sérieux. L’appât du gain donne lieu à des contestations et, quelquefois, des invecti- ves ! Mais, pas de rancune. Tout s’arrange devant le verre de « Pernod 45 pour Ar- thur ».

Bataille de polochon à Saint- Fraigne

Dans le quartier de la Saline (petite vallée entre deux bosses de terrain), la course à la brouette se prépare. En avant ! Pas facile de véhiculer le co- pain, de monter et descendre les dénivellations sans renverser le tout. La course à l’œuf, placé cru dans une cuillère bien serrée entre les dents, apporte aussi des surprises.

Daniel BORDERIE, Ambroise DECOUX, Raymond GOUGUET, Léo CAROLUS et Eugène GUILMENT s’enferment les jambes dans des sacs de jute. Qui arrivera le premier en courant, en haut de la colline ? La compétition est malaisée. Belle partie de

______23 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______rigolade… surtout quand le coureur malchanceux doit se relever. Mais, pas de per- dant ! Les participants acceptent globalement les prix alloués et vont étancher leur soif. Le mât de cocagne, à proximité, leur propose une bouteille fixée à son sommet.

Marcel GRES, perché sur son portique, s’illustre dans la bataille au polochon. Les adversaires se relèvent en piteux état. Plus loin, le père BOUTET attire les lanceurs de pelotes, à son jeu de massacre. La panoplie est complète : un garde champêtre avec képi, un curé, un soldat au costume bleu horizon, un paysan avec sa blouse et un cou- ple de mariés. On peut se défouler et gagner un paquet de biscuits en prime, pour pas cher.

La course aux ânes à Saint- Fraigne

Le moment tant attendu est arrivé : la course aux ânes. Tout beaux, étrillés du matin, avec leurs cavaliers déguisés, ils sont alignés pour le départ : Kiki (monté par Robert GUIBET), Pom- pon (René DRILLEAUD), Monisse (Jean ZOLLER), « Monsieur Paul » (Dudule)1. Le plus difficile est de déci- der les concurrents à démarrer ensemble. Les supplications, les quolibets, les encoura- gements du public sont sans effet. Kiki recule, Pompon se roule, Monisse broute pa- tiemment et Monsieur Paul désarçonne son cavalier avec une vigoureuse ruade fort bien accompagnée. Les rires fusent. C’est parti ! Têtus comme des bourriques, les ânes courent dans tous les sens et Monisse, après avoir parcouru quelques mètres, s’arrête net et refuse d’avancer. Il brait tant qu’il le peut et se décide quand les autres revien- nent. Il est disqualifié. Kiki fait le tour du vainqueur, se fait applaudir et admirer, ainsi que son cavalier qui salue la foule en levant son gibus.

Le soir tombe. Après le dîner, Jean VANIER et Yves MARCELIN tirent le feu d’artifice et allument les feux de Bengale. La bataille de confettis bat son plein. Jeunes et moins jeunes s’en donnent à cœur joie. Les plus petits terminent la fête bon gré mal gré et se consolent en soufflant dans les mirlitons.

Encore un petit tour de danse ! C’est gratuit, ce soir ! « La valse brune » redonne des jambes de vingt ans à Ulysse PRUD’HOMME et à Albéric GROUX qui entraînent leurs cavalières. A la buvette, Roger BOUINOT, Julien GRES, André LÉMERIGE et Henri GUIBET terminent leur dernière belote sous le regard connaisseur d’Emmanuel VIAUD.

______24 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

Les manèges ne tournent plus. L’orchestre joue la danse finale, la danse du balai et Henri SEGUIN invite les demoiselles à choisir le cavalier de leur choix ! Tout s’apaise.

La buvette du parquet de bal

Les premières lueurs de l’aube percent à l’horizon … La fête est finie ! Mais dans le cœur des jeunes et sur bien des lèvres : « Y’a d’la joie, bonjour, bonjour les hirondelles, Y’a d’la joie, du bonheur par-dessus les toits, Y’a d’la joie et du soleil dans les ruelles, Y’a d’la joie, partout, y’a d’la joie ! ! »

1 - Dudule était un ouvrier maçon qui logeait chez « Madeleine » et travaillait à la réfection des ponts.

Janine AUDOUIN avec les souvenirs d’Yvette GUIBET

Sources : « Y’a d’la joie » musique Charles TRENET et Michel EMER. Paroles Charles TRENET

Nouvelles brèves du Pays d’Aigre

Le 17 mai 2000, vers 13 heures 30, les engins mécaniques ont détruit le château d’eau d’Aigre, après 52 ans de bons et loyaux services. En effet, celui-ci avait été construit en 1948 par l’entreprise LARBANET. La décision de sa construction avait été prise le 6 décembre 1947 par le maire, Jacques GAUTIER. Il mesurait 24 mètres de haut. Sa contenance était de 150 mètres cubes. Il a servi à alimenter en eau une partie d’Aigre jusqu’en 1998.

______25 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

A LANVILLE EN 1737 ______

e huit avril 1737, les gendarmes capturent deux femmes aux environs d’Aigre. L Qu’avaient-elles bien pu faire de répréhensible pour subir les foudres de la loi ? L’année 1736 a été très mauvaise pour les récoltes. La disette menace. On ne connaît pas encore la pomme de terre ! Augustin Parmentier ne sera lauréat du concours pour un nouvel aliment végétal qu’en 1769. (Il avait découvert la pomme de terre au Hano- vre en 1757).

Le lieu du « crime » Vers AIGRE

Domicile des accusées

Vers ROUILLAC

Carte IGN au 1/25000°

Le neuf décembre 1736, le Contrôleur Général demande à l’Intendant du Limousin de prendre des mesures appropriées pour remédier à la pénurie proche en encoura- geant, par exemple, les négociants à s’associer pour faire venir des blés et des sei- gles des endroits abondants afin de les faire vendre où il en manque. L’Intendant Tour- ny quitte alors Limoges pour installer son quartier général à Angoulême. Le Contrôleur Général l’encourage : « Vous ne devez rien changer au parti que vous avez pris de faire faire des achats. Il n’est pas question de chercher à se pourvoir de blés à bas prix ; mais, l’essentiel est d’en avoir et, quand le pain de froment reviendrait à deux

______26 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______sous six deniers la livre, je conviens que c’est bien une cherté mais, du moins, ce n’est pas la disette ».

A l’époque, Aigre est un gros centre de marché des grains. Les halles servent à les entreposer en attendant le marché du jeudi et le jour de la foire mensuelle (3° jeudi). Les cafés, auber- ges, et hôtels sont nom- Halle aux Grains breux. A la fin du siècle dernier, on en comptait encore une dizaine répar- tis, pour la plupart, aux environs de la place no- tamment l’ancien café du « Minage ».

Plan d’Aigre en 1881

Cette année là, (1737), les petites gens essaient de frauder et de faire la chasse à ceux qui trans- Bief Jacquet portent le grain vers les régions voisines. Le 3 avril, le Lieutenant d’Angoulême, averti sans doute d’incidents précé- dents, ordonne à l’Officier de police de Ruffec d’aller tendre une embuscade à Aigre. Le 8 avril, « aux environs du grand chemin de la poste, d’où on va de Gourville à Ai- gre, après avoir posté dans des lieux écartés et couverts les nommés Gorget et Sartre, cavaliers du département, ainsi que nous l’avions fait jeudi dernier, jour du marché d’Aigre et ce, pour être à portée d’empêcher l’enlèvement des « bleds » qui se trans- portent dans les paroisses de Gourville, Saint-Cybardeaux, Rouillac, , Méri- gnac, Asnières, et autres voisines… » Au cours de la faction, entre le Pont des Ecures et la moitié du chemin d’Aigre, ils aperçoivent, au Puy Chauvet, des gens en train d’arrêter des conducteurs de chevaux, mules et bourriques, transportant du blé, pour s’en emparer. Au moment de les surprendre, les hommes se sont déjà retirés laissant dix ou douze femmes qui essaient de s’enfuir. Ils se saisissent de deux d’entre elles. Sur les lieux de l’accrochage, ils découvrent vingt à trente boisseaux de grain répandus à terre, les sacs coupés, éventrés. A ce moment, arrivent du marché d’Aigre d’autres personnes venues acheter du blé, prétendant qu’elles ont été attaquées et volées par une trentaine d’hommes et de femmes armés de serpes, fourches, pioches et gros bâtons.

______27 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______

Les deux femmes sont conduites à la prison de Marcillac, lieu le plus proche, par le groupe de gendarmes. Le lendemain, 9 avril, les accusées avouent. L’une est la femme du nommé Félit et l’autre du nommé Lapille l’aîné, du village d’Ampanaud. Elles sont conduites dans les prisons royales d’Angoulême. Le 10 avril, a lieu l’interrogatoire de Françoise D… 53 ans, épouse de Jean A… dit Félit, laboureur à bras, demeurant à Ampanaud. Elle dit que le 8 dernier elle allait por- ter à boire à son mari qui bêchait dans une vigne appartenant aux religieux de Lanville et aussi que « si les hommes et les femmes s’étaient portés à enlever ″ le bled ″ c’est parce que les dits voituriers le fai- saient enchérir si considérablement que les pauvres gens n’en pouvaient pas avoir ».

Extrait de B.T. N° 516-517 de mars 1962

L’interrogatoire de Marie B…, 35 ans, épouse de Jean D…, laboureur, demeurant à Ampanaud, amène les mêmes réponses que celles de Fran- çoise, sa belle-sœur. « Personne n’avait dessein de prendre ″ le bled ″ mais seulement d’empêcher lesdits voituriers d’aller prendre du bled du dit lieu d’Aigre parce qu’ils le faisaient enchérir à un point que les pauvres gens mouraient de faim ».

Le 24 avril 1737, le Procureur du Roi demande que les prisonnières soient transfé- rées aux prisons de Poitiers (Aigre se situait dans le Poitou) et que le dossier soit transmis au Prévôt de la Maréchaussée du Poitou. Que sont-elles devenues ? Le rapport ne le dit pas mais on peut supposer, car c’était la coutume de l’époque, qu’elles ont été condamnées et déportées avec les autres déte- nues des convois qu’on envoyait alors, faute de volontaires, dans nos comptoirs colo- niaux des Indes ou de Louisiane.

Note : Les noms des intéressés figurent en toutes lettres dans le rapport mais il nous a paru préférable de ne mentionner que les initiales, eu égard aux descendants éventuels.

Jacques AUDOUIN à partir d’un document communiqué par Pascal BAUDOUIN

Sources : -Rapport de la Maréchaussée d’Angoulême (AD 16, 13139-8) -QUID 2000 -La Charente au 18° siècle par G. TESSERON (Ed. Coquemard - Angoulême)

______28 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______

UNE GRANDE FAMILLE D’ARTISTES FORAINS -LES CHABOT - ______

u XIX° siècle, la distraction et même l’éducation populaire sont très tributaires A de la foire : la feria. Une enquête, conduite en 1994 par le CNRS, souligne qu'à la Belle Epoque, le champ de foire se présente comme un véritable « abrégé du monde » et les foules, notamment les plus humbles, y découvrent alors les dernières merveilles de la science : elles s'affichent sur les tréteaux des « cabinets de curiosités », se découvrent au fond des vitrines des musées anatomiques, se déploient le long des toiles peintes des panoramas ou sur les façades des théâtres forains pour le cinéma.

L’établissement forain qui laisse la plus forte impression dans la mémoire collective est, sans contredit, le fameux Théâtre CHABOT. La patoisante saintaise Germaine ELIE, (1887-1979 ) en parle dans ses souvenirs et l’ethnographe-philologue charentais Raymond DOUSSINET (1899-1978), instituteur à Bréville, cite effectivement « le Thyâte Chabot » dans son ouvrage Les travaux et les jeux en vieille Saintonge : « Que de larmes ont fait verser « Les deux orphelines » et « La porteuse de pain », se souve- nait notre savant ami.

Vision quelque peu réductrice. Certes, le « Théâtre de la famille CHABOT » sacri- fiait au mélodrame. Mais l'on y jouait aussi l’opérette, le vaudeville, voire des œuvres plus difficiles comme ″Résurrection de TOLSTOI″. Et l'on y présenta aussi de char- mantes féeries chorégraphiques animées par de gracieuses ballerines.

Le Théâtre Chabot voyagea dans toute la France, mais son aire d'expression favorite était le grand Centre-Ouest, de la Normandie à l’Aquitaine. La famille est d'origine charentaise et, perçue comme telle, prophète en son pays.

C’est d’ailleurs en cela qu’elle constitue une exception. La plupart des autres diver- tisseurs itinérants sont d'origine étrangère. Nous ne citerons qu'un exemple, celui de Théodore RANCY, né à Chalais en 1818, de parents tyroliens qui avaient monté leur tour de toile sur le champ de foire, lorsque la jeune danseuse de corde - déjà mère de cinq enfants - accoucha de ce futur directeur de cirque !

Les CHABOT, au contraire, appartiennent à une vieille famille aigrinoise solide- ment enracinée en son terroir et que rien ne semble vouer à la « strada ». Leur aventure foraine commence avec Pierre, né à Aigre le 12 février 1820, de Marie CHABOT et de père inconnu. C’est la sage-femme de Villejésus, Françoise VERRON, épouse de François DELOUCTRE, âgée de 55 ans, qui en fait la déclaration le lendemain à 8 heures du matin, à Louis BOISNIEL, le maire d'Aigre, en présence de Pierre BOU-

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CHAUDY, 50 ans, scieur de long et de Jean ESTEYRIEL, 35 ans, cordonnier, demeu- rant à Aigre. Pierre CHABOT est donc né la veille « à huit heures du soir ». Ce qui frappe, dans l'acte conservé en mairie d’Aigre, c’est son extrême discrétion. L’intitulé, déjà, donne le ton : « Naissance de pierre, fils naturel ». Ce qui ne facilite pas la recherche. Il faut ensuite décrypter soigneusement le rédigé pour savoir qui a donné le jour à ce bébé. Alors que nous avons l'état-civil complet de la matrone et des témoins, nous ignorons l'âge de la parturiente et ne savons pas si elle est veuve ou céli- bataire. L’enfant qui vient au monde dans ces conditions bien mystérieuses, se situe pour- tant au point de départ d'une dynastie d'artistes voyageurs apparentée aux plus grands, tels les PERES et les RANCY. Voilà qui intriguera fort les historiens du monde forain, dans les années 1970. D'autant qu'en 1968, dans leur volumineuse ″histoire comparée du cinéma″ parue chez Casterman, Jacques DESLANDES et Jacques RICHARD par- lent de nos Aigrinois qu'ils nomment CHABOT de GIRONVILLE en leur attribuant une ascendance noble... Un autre auteur spécialisé, Jacques GARNIER, se récrie : « Pierre CHABOT, né à Aigre, était mécanicien et l’on ne peut remonter au-delà de Marie CHABOT, fille-mère » !

Nous croyons que J.GARNIER a regardé trop rapidement cet acte de naissance, à supposer qu’il l’ait eu sous les yeux. Pierre est le rejeton, non pas d'une pauvre fille de ferme ou d'une servante d’auberge mais d’une honorable « propriétaire, demeurant en cette commune ( ... ), accouchée dans sa maison située à Aigre ». Une bourgeoise no- table, autrement-dit !

Quant à la profession de mécanicien qu'il avouera à 38 ans, lors de son mariage à Bordeaux avec l'écuyère de cirque Henriette SCHOSSIG, elle tient sans doute au fait que Pierre CHABOT était, en réalité, « directeur d’un théâtre mécanique », ainsi qu'il est qualifié dans l'acte de naissance de son fils, Henri, lequel eut l'audace de venir au monde parmi les fantoches, ces marionnettes à fils peuplant l'établissement paternel ! Cela ne prouve pas que Pierre CHABOT ait été mécanicien à Aigre.

Comment cet enfant est-il devenu artiste forain ? Serait-il tombé amoureux d’une belle amazone lors du passage d’une troupe à la foire-frairie d’Aigre, le troisième jeu- di de mai ? Henriette SCHOSSIG a un an de moins que Pierre CHABOT auquel elle unira sa destinée ; elle est née dans le Hanovre le 17 juillet 1821; son père est écuyer dans un cirque. C’est une hypothèse. Autre possibilité : en raison de sa naissance « hors normes » pour l’époque, Pierre aurait-il été confié tout petit à des saltimbanques qui l’élevèrent, ainsi que cela s'est pratiqué ? Toujours est-il qu'il s' intégra complètement, ainsi que sa descendance, au monde si particulier des artistes forains.

Les enfants de Pierre Chabot Avant d’envisager une éventuelle ascendance CHABOT de GIRONVILLE, consi- dérons quelques instants la remarquable progéniture du jeune Aigrinois et de sa pétu-

______30 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______lante écuyère. Par leur mariage à Bordeaux, le 15 avril 1858, ils « reconnaissent et légitiment cinq enfants procréés d’eux », aux termes d’un acte d'état-civil constituant une mine de précieux renseignements : • L’aîné de ces enfants est une fille, Euphrasie (Metz, 21/05/1884 - ? ), elle sera la bisaïeule de Sabine RANCY, la grande directrice de cirque née en 1929, arrière- petite-fille de Théodore RANCY né à Chalais (Charente).

• En deuxième position, l’aîné des garçons: Pierre Eugène (Briey, 06/07/1850- Etampes, 09/10/1924) qui ouvrira le modeste établissement paternel à la comédie melodramatique, à la danse et en fera un théâtre forain de 1200 places, après la guerre de 14. Eugène CHABOT occupe longtemps la charge de commissaire à l’Union syndicale patronale éditrice du journal « L'Industriel forain ». DESLAN- DES et RICHARD n'hésitent pas à l'inclure au nombre des esprits fort distingués de l’aristocratie voyageuse qui expriment, dans les colonnes de l’organe corporatif, un réel talent de chroniqueur ou de polémiste.

• Troisième enfant de Pierre CHABOT et Henriette SCHOSSIG : Pierre Henri Vic- tor (Wazemmes, 14/05/1852 - ? ). Il avait élu domicile à Royan et fut le premier banquiste français à présenter le cinématographe dans une fête foraine, aux foires de juillet 1896, à Rochefort-sur-Mer, comme en attestent trois articles d'un journal local du temps : Les Tablettes des Deux-Charentes. Il s'est ensuite produit à Tours et Limoges. Nous détenons une lettre écrite au maire de Nantes dans laquelle il dé- crit l'attraction.

• Le quatrième enfant est une fille, Marie Augustine (Avesne, II.5. 1853). Nous ne savons rien d'elle. On remarquera que le prénom usuel est précédé de celui de sa grand'mère aigrinoise.

• Cinquième et dernier enfant, encore une fille : Hen- riette Rose (Caudebec, 6.3.1855) qui épousera Jo- seph PERES, propriétaire du Théâtre des marion- nettes milanaises. Ils auront Henriette qui épousera Albert, fils d'Eugène CHABOT et de sa première femme, Marie MOULIN, cependant que l’aîné, Ga- briel, convolera avec Nina PERES, sœur cadette de Marcelline, seconde conjointe d'Eugène CHABOT.

On notera que 1'usuel de Rose est précédé de celui de sa mère et qu' elle le donnera à sa fille. Chacun des gar- çons a Pierre en premier prénom. La conjugalité évo- quée ici débouche sur une fusion des deux entreprises devenues : Théâtre Pérès-Chabot.

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Les cinq enfants CHABOT, nous le voyons, sont tous nés « sur le voyage », après que Pierre, le fondateur, eut quitté Aigre... tout en étant « domicilié à Angoulême » comme il le précise au maire de Wazemmes lors de la naissance de son fils Henri.

Eugène CHA- BOT et sa femme Marcelline de- vant le monu- mental Théâtre PERES - CHA- BOT en foire de Tours.

Les Chabot du Pays d’Aigre

Abordons maintenant I’hypothétique ascendance CHABOT de GIRONVILLE avancée par DESLANDES et RICHARD, en 1968, d'après une note du journal « L’Industriel forain » présentant Eugène comme le « fils d'un hobereau charentais parti sur le voyage quand il avait huit ans ». Ces historiens réputés sérieux ont admis depuis qu'ils ont peut-être accordé trop de confiance à l’entrefilet de l'organe corpora- tif.

Cependant, un tel nom ne s’invente pas et tout n'est pas inexact dans cet article : Eugène CHABOT a bien huit ans lorsque son père Pierre convole à Bordeaux avec l'écuyère Henriette SCHOSSIG et qu'ils reconnaissent et légitiment les cinq enfants procréés d'eux.

Mais ce n'est pas à ce moment-là que Pierre CHABOT est parti « sur le voyage ». Il s'y trouvait six ans plus tôt. Nous en avons l'absolue certitude par l’acte de naissance d'Henri qui a « bouté » dans le théâtre forain de ses parents... « comme ine taupe au biâ mitan d'un pré », disait un patoisant charentais ! Une décennie plus tôt encore, en 1844, Pierre CHABOT né à Aigre en 1820, menait bien déjà la vie errante des artistes ambulants puisque son premier enfant, Euphrasie, naît à Metz la 21 mai 1844, lors d'une foire de Printemps qui existe toujours, actuellement.

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Maintenant, « fils d'un hobereau charentais » ? La Révolution ne l'a pas permis. Il faut remonter le temps d'une génération pour rencontrer, à Aigre, François CHABOT de GIRONVILLE, écuyer et capitaine d'infanterie au régiment de la Guadeloupe. Il assiste à I’assemblée de la noblesse de Saintonge, convoquée à St-Jean d'Angély pour nommer des députés aux Etats Généraux et y signe, le 23 mars l789, le cahier des do- léances de la sénéchaussée. Il y est d'ailleurs en compagnie d'un cousin plus jeune, CHABOT de MARSILLY, plus ou moins sieur de Courcelles. Car il existe, à Aigre, au XVIII° siècle, plusieurs familles nobles du nom de CHABOT. Et même une branche dite « CHABOT de CHABAULT ». Un Michel de CHABOT tenait de son mariage avec Marie-Madeleine de CONAN, le château Renaissance du Bouchet. En l'an VIII de la République, Michel CHABOT est maire de Lupsault. Sous la Restauration, il re- prend la particule et reçoit le titre d’écuyer, comme ses frères Jean, juge de paix d’Aigre, et Pierre, ancien garde du corps de Louis XV et Louis XVI.

D'après Beauchet-Fillaud, nouvelle édition commencée en 1890 non encore ache- vée, CHABOT de GIRONVILLE ne serait pas du groupe familial des CHABOT de JARNAC. Toutefois, La Morinerie (1861) se référant à un travail bien antérieur (le vieux Fillaud en 2 volumes), rapporte que CHABOT de MARSILLY-COURCELLES et CHABOT de GIRONVILLE appartenaient à la famille CHABOT (...) qui subsiste en Poitou comme la branche de Jarnac, le rameau de Gironville, à Aigre, descendrait donc bien de la grande famille du Poitou dont l’origine avec filiation continue remonte à 1040. On sait que son illustration date surtout du XVI° siècle, époque de sa division en plusieurs branches.

Les CHABOT de GIRONVILLE, sont blasonnés : « d’azur à deux chabots d’argent posés en fasce, celui du chef regardant à dextre, celui de la pointe à senes- tre ». Ce nom figure également dans la distribution de « Résurrection », de TOLSTOI, au programme du Théâtre Chabot ! Enfin, il y a la note relevée dans « L'Industriel fo- rain », avec une confusion dans les générations certes, mais semblant néanmoins repo- ser sur une information fondée, ne serait-ce qu’en partie.

Marie CHABOT, cette propriétaire ayant pignon sur rue, femme libérée* en avance sur son temps, pourrait être née sous la Révolution. Elle était décédée en 1858, lorsque Pierre s'est marié. Etait-elle la fille de François CHABOT de GIRONVILLE ? Le se- cret de la naissance de Pierre a pourtant dû s'accompagner d'un beau scandale dont il est surprenant que la mémoire du lieu n'ait gardé la moindre souvenance, par le tru- chement d'une tradition orale habituellement plus bavarde dans nos petites villes de province. La balle est dans le camp des investigateurs locaux...

Charly GRENON

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(*) Cette Aigrinoise aisée, apparemment esseulée, se serait-elle donnée à un bel artiste forain à l'occasion de la précédente frairie ? De mai 1819 à la naissance de Pierre en février 1820, il y a très exactement 9 mois ! Cela pourrait alors expliquer la suite des événements ...

Sources. Enquêtes personnelles Bibliothèque municipale François Mitterrand, Saintes Extraits de « Aigre, petite patrie » par Henri BERNAZEAU - Aigre 1913. et de « Notes historiques » du Dr Joseph MOUCLIER - Ruffec 1906, aimablement communiqués par Dominique GRANDJAUD.

UN AMBÉRACOIS AU CAP-HORN

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acques MATHIAS dit « Chapon », né le 18 juin 1806 aux « Granges » d’Ambérac, Jfils de Pierre MATHIAS et de Jeanne AUMONT fut incorporé comme matelot à Rochefort le 31 décembre 1829.

Il fut d’abord timonier à bord de la frégate « La Caroline » et, plus tard, à bord de la corvette « La Thisbé ». Selon le rôle d’équipage de ce bâtiment (archives maritimes de Rochefort) , il se trouva à :

• Rio de Janeiro (Brésil) du 16 novembre 1832 au 10 mars 1833 • Bahia (Brésil) du 29 mars 1833 au 4 avril 1833 • Rio de Janeiro du 15 avril 1833 au 14 mai 1833 • Valparaiso (Chili) du 30 juin 1833 au 10 juillet 1833 • Cobija (Chili) du 19 juillet 1833 au 28 juillet 1833 • Arica (Chili) du 1° août 1833 au 6 août 1833 • Callao (Pérou) du 13 août 1833 au 20 septembre 1833 • Valparaiso (Chili) du 4 octobre 1833 au 31 décembre 1833

Il a donc passé le Cap-Horn en juin 1833 (en plein hiver austral). Revenu dans sa Charente natale, il n’en a plus bougé. Il s’est fixé à Coulonges où il est décédé le 24 novembre 1885.

René FONTROUBADE

Source : Documents communiqués par Mme Marie-Odile MICHON, arrière-arrière petite fille de Jacques MATHIAS

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EN 1914, A L’ÉCOLE DE SAINT-FRAIGNE ______

Témoignage d’André LATOUCHE, ancien maire d’Ebréon, vice-président de la Chambre d’Agriculture de la Charente.

… « Quelques années, très peu, me man- quent pour devenir centenaire. Mon inactivité forcée, la solitude, souvent, et quelques insom- nies, permettent à mon esprit de voyager dans le Pays d’Aigre que j’aime tant et qui porte mes racines.

La visite, presque quotidienne, de mes ar- rière-petits-enfants Emile et Léone, au sortir de l’école, m’entraîne tout doucement vers mon enfance et mes souvenirs d’écolier font surface. J’en souris encore quand je les évoque. Je vous les transmets grâce à la plume de Janine, car mes yeux sont fatigués et l’écriture devient pénible.

…Nous sommes en 1914. J’ai six ans et, avec Henri RICARD, nous parcourons chaque matin trois kilomètres pour rejoindre, à Saint- Fraigne, la classe de Monsieur Henri DELA- FOSSE. Pourquoi Saint-Fraigne ? Je ne sais plus… Le premier jour est mémorable. J’admire les plus grands : Henri TEXIER, Da- niel BORDERIE, Henri LAMY, Jean VANIER - J’en oublie, hélas ! - Ils lisent dans les livres, savent écrire à l’encre avec une plume et comptent les quatre opérations. Je joue avec ceux de mon âge : les jumeaux Pierre et Henri DELAFOSSE du Breuil- Seguin, Eudor ( je ne me souviens plus de son nom de famille ) qui habite près du Château-Adam, André LEMERIGE, toujours les poches pleines de billes et de ficel- les… Je suis très impressionné par Elie CHADUTAUD. Avec une jambe paralysée et les tiges métalliques qui l’aident à se tenir debout, il peut projeter le tout avec adresse contre la cheville du Maître qui veut le faire obéir ! En retour, il reçoit une bonne correction et je me cache pour rire de bon cœur. Et puis il possède une canne, une jolie petite canne en bambou pour l’aider à marcher. C’est merveilleux !

Maman m’a appris à lire. Aussi, pour certains, suis-je un « cador » dont le rôle principal consiste à apprendre aux copains de la petite section, le mécanisme de la lec-

______35 Histoires du Pays d’AIGRE Octobre 2000 ______ture. Au tableau noir, une longue baguette à la main, je montre et j’énumère les lettres de l’alphabet… Très utile la baguette, vous devinez pourquoi . Quelquefois la leçon de lecture se termine mal pour Lucien CHAUVET et André LEMERIGE qui sont très indisciplinés. Au bout d’un an d’efforts, le pauvre Marcel TURCAT ne sait lire que deux mots sur le tableau de lecture : bobinette et pompon. Nous l’appelons Bobinette et le surnom lui restera.

Ecole de garçons dans les années 1914.

Les plus grands préparent le certificat d’études. Certains sont assez agités et les punitions pleuvent. Nous trouvons Monsieur DELAFOSSE sévère. - « Attention aux taches ! Formez bien les pleins et les déliés ! Tenez-vous droits ! Taisez-vous ! »

Quant aux petits, ils gribouillent sur des ardoises avec des morceaux de craie. Nous crachons dessus et essuyons avec notre manche pour effacer. C’est génial ! Aucun matériel de calcul et pour quoi faire puisque nous avons dix doigts ? Nous imaginons des pommes, des hirondelles perchées par groupes, sur un fil. Très pratique, les oi- seaux, pour acquérir le sens de l’addition et de la soustraction. Sur le bureau de l’instituteur, trône un mètre étalon à section carrée pour deux usages. Le plus intéres- sant est de faire comprendre la relation entre les unités de longueur. L’autre emploi se devine. Nous avons vite acquis le réflexe de protéger nos oreilles ! Les retenues, après la classe, sont monnaie courante, jusqu’au soir où Madame DELAFOSSE découvre, par hasard, Amédée CRÉMOUX, de « Boisbeaudrant » endormi sur son banc car la nuit est tombée. Le maître parcourt alors les six kilomètres à pied avec sa lampe, pour reconduire l’élève dans sa famille nullement inquiète !

Après deux ans de scolarité, voilà le temps de la dictée quotidienne, de l’étude de la liste des départements - préfectures et sous-préfectures à réciter par cœur - des petites histoires de l’Histoire de France : François I°, Henri IV, Louis XIV et ses châteaux… C’est aussi l’étude des plantes qui nous entourent, l’élevage et les modes de culture…

A midi, les élèves des villages mangent dans la classe le contenu de leur musette - toujours le même - l’œuf dur, les tartines, la pomme et la petite bouteille de piquette. Moment heureux ! Sans surveillance, on peut raconter des bêtises, arroser les copains etc… Pendant les récréations, on joue aux marbres, aux boulets et à « tacona ». Le jeu consiste à faire tournoyer les copains le plus rapidement possible jusqu'à ce qu’ils tom-

______36 Octobre 2000 Histoires du Pays d’AIGRE ______bent et s’écorchent les genoux sur les cailloux de la cour ( Mme DELAFOSSE a tou- jours de la teinture d’iode à portée de sa main ). Pendant ce temps, le maître assure le secrétariat de mairie.

La classe se termine. Pour m’accompagner un peu, Elie va chercher son vélo en bois. Vous avez bien lu, un vélo en bois ! Son père, habile menuisier, lui a construit une sorte de cycle à deux roues, sans pédales. Il doit pousser l’engin avec sa jambe valide et tenir l’équilibre avec sa canne, pour avancer. Comme je l’envie ! Je demande, dans ma prière du soir, de ne plus pouvoir me servir d’une jambe afin de posséder une petite canne et un joli vélo en bois comme celui d’Elie !

Ces souvenirs d’enfance, je les dédie à mes copains, les écoliers d’autrefois, à mes arrière-petits-enfants, aux écoliers d’aujourd’hui et je les offre avec plaisir aux lecteurs des « Histoires du Pays d’Aigre ».

Jean VANIER Henri DELFOSSE Instituteur

Marcel TURCAT

Henri LAMY

Henri TEXIER

Daniel BORDERIE

Ecole primaire de garçons de Saint-Fraigne année 1913 / 1914

Hospice HABRIOUX, le 9 avril 2000. André LATOUCHE Recueilli et transcrit par Janine AUDOUIN

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HISTOIRE D’UN LAVOIR ______

ous trouverez, sans doute, une rue de « la Fontaine » à Saint-Fraigne mais point V de fontaine ! C’est un roncier qui la remplace. Le 16 avril 1846, un acte notarié fait état de l’achat par 22 Saint-Fraignois « d’une pièce de terre de 1 are 92 centiares… contre la somme de soixante francs… pour en jouir en commun et notamment de la fontaine… Cette fontaine sera érigée en laverie à laquelle tous les acquéreurs auront un égal droit de laver… » ainsi que les vendeurs et leurs sœurs. Il est aussi précisé que « les acquéreurs seuls et leurs héritiers, en ligne directe seulement, auront droit… à la laverie » sous réserve que ces derniers possèdent « une maison avec cheminée au chef-lieu de la commune ».

Lavandières à la rivière de Saint-Frai- gne

Ce lavoir qui était encore utilisé dans les années soixante dix est tom- bé dans le domaine public. Toutes les lavandières qui le souhaitaient pou- vaient s’y rendre depuis bien long- temps !

Les lave-linge étant de plus en plus répandus, le lavoir fut délaissé. La source elle-même disparut, sans doute captée en amont.

Un mécanisme astucieux permettait de relever ou d’abaisser les pontons, selon la hauteur de l’eau, qu’est-il devenu ? C’est peut-être dommage de ne pas avoir préservé ce patrimoine qui a dû en- tendre bien des secrets et des commérages pendant un siècle et demi.

Lavoir de Saint-Fraigne (partie) (photo retouchée) Cécile GOUGEAU

Sources : Acte notarié trouvé dans mes archives familiales.

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L’AQUEDUC DE FOUQUEURE ______

n sait que la commune de Fouqueure possède un passé très ancien dont on peut O voir encore des vestiges datant du néolithique (-5000 à -2800), représentés par deux structures quadrangulaires fouillées en 1880 par une équipe d'archéologues dont le rapporteur fut Gustave CHAUVET (1). Ces structures funéraires, faisant l'objet d'un article dans le n° 2 d'Histoires du Pays d'Aigre (2), ont toujours été indiquées précisé- ment sur la carte I.G.N. et avaient fait en leur temps (juillet 1998) l'objet d'une fiche d'inventaire auprès du Service Régional d'Archéologie de Poitiers (3).

De nombreuses autres découvertes, fermes indigènes (enclos gaulois), monnaies celtes, villa gallo-romaine avec thermes et mosaïques, sanctuaire et voie antique parsèment le territoire de la commune (4).

Le plateau surplombant le méandre de la Charente, à l'ouest de « La Grande Combe » est parsemé de nombreux bâtiments élevés à l’époque gallo-romaine tels que : sanctuaire, habi- tat, atelier de potier et né- cropole (cliché n°1). Cette importante occupation né- cessitait la présence de l'eau, soit sous la forme de puits ou de source. Si des puits furent creusés (aucun reste archéologique ne le prouve à ce jour), nous avons la preuve de l'exis- tence d'un aqueduc appor- tant l'eau d'une source si- tuée en forêt de Tusson (la Font de Frêne) jusqu'au site de « La Terne », en vérité « Les Bourriges » . (voir carte IGN ci-dessus)

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Cliché n°1 : le plateau surplom- bant la Charente, avec Luxé au centre et Fou- queure dans l’horizon gauche.

Cet aqueduc d'une longueur de 1 900 mètres à l'époque gallo- romaine (cliché n°2) transportait une eau très pure en se servant de la déclivité natu- relle de « La Grande Combe ».En prospection pédestre, il est possible de retrouver parfois sa trace dans les champs. Quand la canalisation, constituée de pierres plates maçonnées en caisson et liées au mortier de tuileau, est parfois accrochée lors des grands labours d'automne par la charrue, il en sort encore aujourd'hui une eau claire prouvant le bon état de l'édifice antique sur près de 1500 mètres.

Quant à la source même (cliché n°3), elle se trouve dans un creux verdoyant où l'on peut retrouver dans le sous-bois des restes d'habitat gallo-romain (tégulae, imbrices, céramique...). Aujourd'hui, une petite bâtisse se trouve à l'emplacement même de la source, abritant le matériel de pompage, conséquence de son captage à la fin des an- nées 40. Son eau est amenée à Luxé, sur un trajet parallèle à l'aqueduc actuel par une canalisation métallique.

Cliché n° 2 : empla- cement de l’aqueduc antique et de la cana- lisation moderne dans le « Fossé de la Font de frêne » et la « Grande Combe ». On aperçoit la source captée dans l’angle gauche du cliché.

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Pour en finir avec le passé, dans les bois entourant la fontaine, des soldats de la Wermarcht reposent anonymement, abattus par des S.S en 1944, comme traîtres et défaitistes (5).

Cliché n° 3 : la source captée avec son petit bâtiment. La photographie a été prise en août 1999.

Bibliographie : 1 - CHAUVET (G), Catalogue du Musée de la Société Archéologiuue de la Charente, Bulletin et Mémoires de la Société archéologique et historique de la. Charente, p. 3-70, Angoulême, 1885. 2 - Fouqueure retrouve son passé, Histoires du Pays d'Aigre, n° 2, Avril 2000 3 - JOY (P.F.), site n° 688, Rapport scientifique, DRAC SRA, Poitiers, Décembre 1998 4 - VERNOU (C), La Charente Carte archéologique de la Gaule, p. 35.40, Paris, 1993. 5 - Information de Madeleine BERNADAS et de Maurice PLANCHET

Véronique DUJARDIN Conservateur du Patrimoine Patrick F. JOY Archéologue, Pilote privé

Nous rappelons que toute découverte ayant un intérêt historique doit être faite aux autorités compétentes. L’association se propose de servir d’intermédiaire et de tenir à jour les compte-rendus de ces trouvailles. Tout renseignement est très précieux et sa localisation dans l’espace et dans le temps est absolument néces- saire.

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Au fil de l'eau, au gré du vent...

Des moulins et des hommes au fil des ans. ______

es moulins édifiés au cours des siècles sur les terres de la paroisse, puis de la L commune de Villejésus furent d'une étonnante diversité. Une évocation des lieux va nous rappeler, l'espace d'un instant, que nos aïeux avaient à leur disposition des énergies et beaucoup d'idées !

Les plus importants étaient les Moulins du Château (de Villejésus) situés sur l’emplacement des Comptoirs « Cognac GAUTIER », une partie sur le chef-lieu de la commune d’Aigre, l’autre au lieu-dit du « Fouquérant » commune de Villejésus, consistant en trois roues réunies sous le même toit et faisant farine. La proximité des très importants marchés aux grains, qui se tenaient deux fois par semaine à Aigre, contribuait à la grande renommée des Moulins du Château.

Une anecdote assez surprenante et curieuse - qui nous prouve, s'il en était besoin, l'appartenance de ces moulins aux seigneurs résidant au Château dénommé La Cour de Villejésus, actuelle mairie - eut lieu le 31 Janvier 1771 par transaction passée par le curé d'Aigre et celui de Villejésus ; le premier a reconnu avoir, mal à propos, entrepris d’exercer les fonctions curiales aux moulins du Château et a été condamné au procès de Poitiers pour avoir fait enlever et enterrer, douze heures après son décès, Françoise Bergeron meunière et l'avoir enterrée dans le cimetière d'Aigre ! En 1832, les limites des deux communes subirent des modifications : « Par ordon- nance royale du 27 Novembre 1832, le hameau du « Fouquérant » fut distrait de la commune de Villejésus et réuni à celle d'Aigre et ceux de « La Motte » et « Chavrillaud » distraits de la commune d'Aigre et réunis à celle de Villejésus ».

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Outre les Moulins du Château, il existait, au hameau du « Fouquérant », un moulin à carton dénommé, sur certains documents, « Papeterie » ; le plan page précédente, dressé en 1839, permet d’en connaître l'emplacement. A cette époque ce moulin ne fonctionnait plus, l’appellation « ancienne papeterie » portée sur le plan le confirme. Le moulin à farine et à huile de « Basleville », construit sur un bras de L’Osme, fut trans- formé, vers 1889, en laiterie par François VERGNAUD. La roue à aubes, grâce à d’innombrables transmissions actionnait divers appareils des- tinés à la fabrication du célèbre beurre des Charentes. Le dessin ci-contre prove- nant d'une étiquette de camem- bert du « Domaine de Basle- ville », représente, avec beaucoup d’exactitude, la laiterie VERGNAUD vers 1912. On aperçoit au premier plan les deux piliers d'entrée, à gauche le vieux moulin, en arrière- plan la belle demeure avec son perron et ses mansardes, au fond à droite l’église d’Aigre, à l'horizon le « P’tit Mairat », au centre les méandres de l’Osme et les vaches dans les prés. Il y a quelques années, une des meules du moulin à huile a été localisée dans le ha- meau de « Basleville ».

Le plus ancien moulin de Villejé- sus est, sans conteste, le moulin de la Commande- rie. Comme l'indi- que son nom, il dépendait de la Commanderie des Hospitaliers de l’Ordre de St-Jean de Jérusalem ; édifié au sud-ouest de I’église, dans le prolongement des bâtiments de I’Or- dre, il fut tour à tour tannerie (voir plan cadastral de 1831), moulin à farine, puis en 1902 aménagé en menuiserie mécanique par Louis Rolland menuisier-ébéniste à Aigre.

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Au dire de MM. Fernand BERNAZEAU (petit-fils de Louis ROLLAND, neveu de Gaston ROLLAND) et d’André BROSSEAU qui furent ouvriers dans cette « usine hydraulique », la roue développait, au pignon du rouet de fosse, une puissance de 60 chevaux en période de niveau d’eau normal, niveau réglementé par la police des eaux ; elle entraînait affûteuse, scie à ruban, scie circulaire, dégauchisseuse, raboteuse, mor- taiseuse, toupie.

Quelques centaines de mè- tres en aval du moulin de la Commanderie, dans un écrin de verdure, à deux pas d'un ravis- sant pont, le moulin à blé de « Chollet » faisait entendre clapotis et tic-tac...

Il fut partiellement détruit par un incendie et reconverti, de 1947 à 1955, en tannerie par un nommé Rigaudie, tanneur à Baignes-Ste-Radegonde.

Quant aux moulins à eau et à vent de « La Motte » cons- truits l'un sur le ruisseau du Siarne, l'autre au lieu-dit « La Brange » et rattachés à la commune de Villejésus par la fameuse ordonnance royale de I832, laissons parler les actes notariés :

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Extrait de l'acte de vente du 28 Août 1817 :

« Le 28 Août 1817, Louis Laumosne propriétaire et meunier, Anne Talon sa femme, demeurant au village de la Mothe commune d’Aigre, ont de leur bon gré et libre vo- lonté, vendu, cédé, délaissé et transporté à André Tallon chasseron et Anne Coudret sa femme, demeurant au moulin Matard commune de Marcillac-Lanville, les immeubles qui suivent, situés sur la dite commune d’Aigre : « Les moulins à eau appelés de la Mothe Barollaud consistant en trois roues ré- unies sous le même toit, maison et bâtiments en dépendant, ensemble les îles et îlots tel que le tout se poursuit et comporte. Les dits moulins garnis de leurs ferrements, usten- siles et apparaux... » « Un moulin à vent garni de tous ses ustentiles et apparaux, tournant, virant et fai- sant farine, nouvellement bâti, situé au lieu appelé la Brange, avec le terrain qui en dépend de la contenance, y compris le sol sur lequel se trouve édifiée la tonnelle du moulin, de quarante cinq ares soixante centiares... »

Extrait de l'acte d'échange du 23 Mars 1831 :

« ... sont compris dans la cession des moulins ( à eau ) une barre, une esse, une masse, une chaise et quatre marteaux à piger, le tout en fer, un câble, trois blutoirs et un coffre en bois blanc ».

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« ...sont comprises dans la cession du moulin à vent quatre toiles plus que mi- usées ».

Extrait de l'acte de vente de 1872 :

« ...un moulin à blé en mauvais état, tournant par eau et appelé le moulin de la Mothe, consistant en deux roues hydrauliques, deux paires de meules, un autre petit moulin à cassotte y attenant, ayant aussi sa roue hydraulique et sa paire de meules, chambre à côté, écurie à la suite, et autres dépendances, aireau au levant des dits moulins, maison et bâtiments, terre en ouche actuellement en pré au midi du corps de bâtiments s’étendant par une surface irrégulière. Dans la partie du levant, jardin ou îlette partant du moulin à cassotte et s'étendant en pointe au midi... »

« …une pièce de vigne et chaume sur laquelle est édifié un moulin à vent en assez mauvais état, dépourvu de ses toiles et généralement dans l’état où ils se trouvent actuellement avec tous ses agrés, apparaux et autres accessoires... »

Extrait de l'acte de vente de 1880 : « ...une pièce de terre en fri- che sur laquelle existe un moulin à vent en complet état de vétus- té... »

Moulin à vent de la Brange en 1973

Au fil de l'eau, au gré du vent, ils étaient très animés et avaient fière allure nos « petits » moulins de jadis. Lieux de rencontre autour des roues, des ailes, des meules, ils faisaient partie de ce triptyque millénaire « château, église, moulin ». Symboles de vie, omniprésents dans 1’art populaire, ils avaient une âme et c'est peut-être pour cela qu’aujourd'hui nous continuons à les aimer !

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Remerciements à MM. Fernand BERNAZEAU, André BROSSEAU et Gilbert RO- CHER pour leurs précieux témoignages.

Cet article a été publié pour la première fois dans le Bulletin Municipal de Villejésus : « Les Echos du P’tit Mairat » en juillet 2000.

Dominique GRANDJAUD

Sources manuscrites: Archives Départementales de la Charente Mairie de Villejésus Bibliographie : « Petite Patrie AIGRE » par Henri Bernazeau 1913

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Coument on souégnait la grippe autefoué ______

Asteur que l’hivar é passé, anvec son corthège de vilains jhors, souv’nez vous, d’la grippe d’autefoués, a foutait toute ine famille a bésa (anéantie) quand a l’arrivait dans la maison. Olé les vouésins qui v’niant nous douner dau bouillon, d’la tisane, et, même qui vidiant le pot a débouère, vu qu’o y avait dau vatters qu’au fond dau jhardin. Jhe buvions d’la tisane de bourrache, que jh’avions pris soin d’cueilli dans l’été quand a l’était fieurie, avant d’la feure seuché , d’la tisane de queues d’cerises que jh’avions mangé, tout thieu paceque, o nous fasait suer…et pisser. O garissait pu vite !

Le souèr y mettions nout’ chausse autour de nout’cou, peur le mau d’gorge, y bouévions dau tileuille bein chaud anvec dau miel, les hou- mes zeu, aviant drouet au grog, en ajhoutant ine p’tite goutte de Niol…Et si o l’allait pas meu, in catapiasm a la farine de lin, su l’jhabot, o beun in Rigolo que jh’peurnions a la pharmacerie Battoue. Si y gueurmelions (tousser) teurjhou, on nous mettait ine dizaine de ventouses dan l’échine, des fouès o fallait même les ciarifié (scarifier) ; ou beun des sangsues darre l’oraille, peur tiré l’mauvais sang… Si l’nez saignait (o l’était pas rare anvec la grippe), on nous mettait ine quié (clef) dan l’dos, o zou copait tout d’suite.

Asteur, o faut t’in vaccin, mé coume olé jhamais l’bon, vu qu’thieula d’l’an deurnier, i l’était bon peur la grippe asiatique ou es- pagnole, ou beun encor pu loin, vous finissez peur creire que vous avez attrapé in vieurusse (virus). Aut’foués, jh’attendions qu’o passe, bein capis (blottis) dan nout’ veurre (lit), en suçant dau calabes (bonbons) et en bouévant dau sirop d’teurpine. Etait tou pas meu d’meime… ?

Henriette FENIOU Dessin de LABACHOT

______48 Nouvelles de l’association Depuis le mois de mai 2000, l’association possède un site Internet. Au sommaire de ce site, on trouve une description de l’association, des renseignements d’ordre historiques sur le « Pays d’Aigre », les textes du numéro 1 de la revue, un aperçu de la bibliographie charentaise, les archives, quelques biographies de personnes célèbres de notre Pays d’Aigre ainsi qu’un album de photos et de cartes postales anciennes.

Ce site est accessible à l’adresse suivante : http://perso.libertysurf.fr/pays-aigre

e-mail pour nous joindre : [email protected] N’hésitez pas à venir y faire une visite et donner votre avis.

Lecteur ! vous venez de terminer de lire le 3° numéro de notre revue HISTOIRES DU PAYS D’AIGRE. Nous aimerions avoir votre avis sur cette revue. C’est pourquoi, si vous avez des suggestions ou des critiques à formuler, vous pouvez nous contacter. A.D.A.P.A . « Section Histoires du Pays d’AIGRE » Intercommunalité 10, rue du Pont Raymond 16140 AIGRE

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Dessin de couverture : Mme Lucie DUBOURG de Saint-Groux. Dessin page 2 de couverture : M. Nicolas PEROT de Couture-d’Argenson. Bon village, accueillant, de la douce Charente, Avec son vieux clocher jouxtant un fier château Riche, grâce à son sol, en moissons abondantes. Belles vignes, prés verts, où paissent les troupeaux. Et ses grands bois touffus, aux bienfaisants ombrages. Zélateurs du bonheur, sont les fils du hameau. Ils oeuvrent de leur mieux pour la joie à tout âge En puisant, pleins d'ardeur, aux sources folkloriques Ranimant traditions, souvenirs et musiques En ce pays, la vie est heureuse vraiment Si l'on aime la paix, la douce paix des champs…

G. GOUNEL Dessin de LABACHOT