Préface

Le cyclisme français, c’est du haut de gamme !

Il y a des courses dont nous, acteurs, oublions les détails, mais je me souviens d’absolument chaque instant du championnat de , ce 1er juillet 2018, à Mantes-la-Jolie. Toute la journée, notre équipe Groupama-FDJ a bien maîtrisé la situation, même si nous n’avons jamais été sereins non plus car le danger rôdait en permanence. Il fallait que les éléments s’articulent. Par exemple, si revenait seul sur dans le final, notre position ne devenait plus aussi favorable. Il fallait un peu de chance en plus de bien courir. Et, surtout, il fallait avoir des jambes de feu pour conclure. Je les avais. Qui ne rêve pas de devenir champion de France ? Nous faisons partie des grandes nations du vélo et c’est incroyable de pouvoir porter les couleurs de son pays. C’est une chance qui n’existe pas dans de nombreux autres sports. Voilà six fois sur sept que nous décrochons ce titre, mais je n’ai pas attendu que mes coéquipiers portent le maillot bleu-blanc-rouge pour en rêver. Je le voulais depuis tout petit ! C’est une belle aventure à vivre. Elle n’est pas donnée à tout le monde. 7 Ensuite, j’ai eu le plaisir de lever les deux bras en montrant ces belles couleurs au . J’ai d’autant plus apprécié que je me souviens d’autres victoires acquises in extremis où, au mieux, j’avais pu décoller une seule main du guidon. Puis, toujours avec mon maillot de champion de France, je suis monté sur le podium de la Classique de Saint-Sébastien, en World Tour ! Franchement, c’était tout aussi grand ! Cette performance m’a permis de montrer que je mérite réellement mon titre. Ce maillot donne des ailes, mais aussi de la pression. Heureusement, nous sommes dans une époque où nous, coureurs français, répondons assez bien aux attentes du public. Nous sommes la deuxième nation au classement UCI (derrière la Belgique) et la première en nombre de victoires (devant l’Italie) à la fin de la saison européenne. Nous avons des grands coureurs dans chaque discipline, sauf peut-être le contre-la-montre : des grimpeurs, des sprinters, des puncheurs… C’est fini le temps où l’on disait que les Français ne savaient pas gagner. En plus, nous nous imposons sur tous les Grands Tours — regardez la Vuelta cette année… Avoir un coureur comme Julian Alaphilippe capable de remporter la Flèche wallonne et Saint-Sébastien, c’est vraiment du haut de gamme. Il faut en profiter ! Bonne lecture…

• Onze années de professionnalisme pour en arriver là. Anthony Roux, nouveau champion de France, rayonne de bonheur. Bleu-Blanc-Roux

Au cours de ses quinze premières années (1997-2011), l’équipe FDJ des frères Madiot, eux-mêmes sacrés en 1986 Championnats (Yvon) et 1987 (Marc), n’a décroché qu’un titre de cham- pion de France, par Vogondy en 2002. En revanche, elle de France les accumule depuis 2012 avec Bouhanni, Vichot (2013, Date : 28 juin-1er juillet 2016) et Démare (2014, 2017). Seul , sous les couleurs d’Auber 93, a brisé la série en 2015. Ce jour- Lieu : Mantes-la-Jolie (Yvelines) là, il avait devancé Anthony Roux finalement disqualifié www.championnatsdefrancecyclismeroute.fr pour avoir provoqué la chute de Bouhanni dans le sprint Contre-la-montre : final. On s’en souvient forcément alors que le Lorrain, Femmes : 31 ans, pro dans la même boutique depuis 2008, apporte 1. Audrey Cordon (Wiggle High5) les 28,7 km en 42’ 43” ; 2. Labous (Sunweb) à 29” ; à la désormais Groupama-FDJ un sixième maillot bleu- 3. Eraud (Experza-Footlogix) à 1’ 30” blanc-rouge en sept ans. C’est aussi son troisième podium Élites : 1. (AG2R La Mondiale) les 45,1 km personnel, neuf ans après le premier. en 57’ 36” ; 2. Gallopin (AG2R La Mondiale) On dénombre six Groupama-FDJ dans la grande échappée à 2’ 23” ; 3. Thomas(Groupama-FDJ) à 2’ 31” du jour composée de trente et un coureurs. , Route : , et Benjamin Thomas Femmes : 1. Aude Biannic (Movistar), les 103,9 km 83 relancent à l’avant à la mi-course. Le trèfle tire les bons en 2 h 54’ 34” ; 2. Verhulst (Team Léopard Normandie) numéros en contre : Anthony Roux, et Rudy à 10” ; 3. Dreville (Lotto) m.t. Molard que Julian Alaphilippe prive du titre. Tout se joue au Élites : 1. Anthony Roux (Groupama-FDJ) les 253 km millimètre malgré le surnombre. Au grand plateau aussi dans en 6 h 4’ 53” ; 2. A. Turgis () ; 3. Alaphilippe un sprint en petit comité. Roux, gros moteur, dispose d’un (Quick-Step) ; 4. Latour (AG2R La Mondiale) t.m.t. ; inhabituel 56 pour supplanter le Francilien . 5. Martin (Wanty-Groupe Gobert) à 6” ; 6. Molard (Groupama-FDJ) à 9” ; 7. Barguil (Fortuneo- Cofidis, née en 1997 comme la FDJ, attend toujours… Samsic) à 23” ; 8. Boudat (Direct Energie) à 34” ; 9. Ledanois (Fortuneo-Samsic) ; 10. Antomarchi (Roubaix Métropole) t.m.t. De haut en bas • Pierre Latour, vainqueur de l’épreuve contre la montre, réconforte . Son coéquipier court toujours après un titre de champion de France. • À l’image de la météo, est bien chaud. Dès le premier tour, il a lancé les grandes manœuvres avec . • Victoire gros plateau au terme d’un sprint long. Anthony Roux remonte Anthony Turgis et s’impose en puissance. • Le circuit usant de Mantes-la-Jolie lamine le peloton. Les coureurs s’en souviendront. • Anthony Roux succède à Bouhanni, Vichot et Démare. Le sixième titre, en sept années, pour l’équipe de . World Tour Thomas sort de l’ombre de Froome L’honneur d’être le premier à s’élancer hors d’Europe est revenu au Giro. Le Tour d’Italie s’est élancé de Jérusalem, non loin du mur des Lamentations, mais c’est le Date : 7-29 juillet (105e édition) Tour de France qui engendre un maximum de jérémiades. Classe : 2.WT La rengaine du moment tient à l’ennui devant les heures de course monotone. Mais ce n’est pas nouveau ! Il y a cin- www.letour.fr quante ans, alors que soufflait sur la Grande Boucle l’esprit Vainqueur : Geraint Thomas de mai 68, Félix Lévitan, codirecteur du Tour, accusa les (Sky, sur cycles Pinarello) journalistes peu enthousiastes d’avoir « les yeux usés » après Étapes remportées par : une victoire au sprint de sur la piste de F. Gaviria (Col), P. Sagan (Slq), BMC, clm/éq., F. Gaviria (Col), Lescure, à Bordeaux. Du coup, le lendemain, la chronique P. Sagan (Slq), D. Martin (Irl), D. Groenewegen (P.-B.), d’Antoine Blondin, dans L’Équipe, évoqua « une étape de D. Groenewegen (P.-B.), J. Degenkolb (All), J. Alaphilippe (Fra), 220 borgnes », réclamant « l’extinction du paupiérisme », G. Thomas (G.-B.), G. Thomas (G.-B.), P. Sagan (Slq), et les journalistes déployèrent une banderole au passage O. Fraile (Esp), M. Cort (Dan), J. Alaphilippe (Fra), du peloton à Labouheyre : « Coureurs, des yeux usés vous N. Quintana (Col), A. Démare (Fra), P. Roglič (Slo), T. Dumoulin (P.-B.), A. Kristoff (Nor) regardent ». « Le Tour est un dieu qu’il faut vénérer comme tel », tonnait, péremptoire, Lévitan. Classement final : 85 Les traceurs d’aujourd’hui, Christian Prudhomme et 1. Thomas (G.-B.) 7. Landa (Esp) à 7’ 37” Thierry Gouvenou, s’appliquent pourtant à truffer le en 83 h 17’ 13” 8. Martin (Irl) à 9’ 5” parcours de subtilités de nature à enflammer les courses. 2. Dumoulin (P.-B.) à 1’ 51” 9. Zakarin (Rus) à 12’ 37” Les victoires au sprint de Fernando Gaviria, deuxième 3. Froome (G.-B.) à 2’ 24” 10. N. Quintana (Col) à 14’ 18” 4. Roglič (Slo) à 3’ 22” …13. Latour (Fra) à 22’ 13” Colombien en jaune après Victor Hugo Peña en 2003, 5. Kruijswijk (P.-B.) à 6’ 8” …17. Barguil (Fra) à 37’ 6” 6. Bardet (Fra) à 6’ 57” …21. Martin (Fra) à 44’ 18”

De haut en bas • Quand Chris Froome et Jasper De Buyst s’en vont-au-champ… Une image inattendue pour ouvrir le grand bal de l’été. • Fernando Gaviria écrit l’histoire. Il est le premier Colombien à remporter une étape du Tour de France au sprint. • Nouvelle échappée pour . Avec dix-huit Tours disputés, et bientôt seize terminés, il signe un record. • Sévèrement exclu l’an dernier, l’illustre prend sa revanche. Personne ne pourra lui contester un sixième maillot vert. • Enfin épargné par la malchance, Geraint Thomas a régné sur la course. Les applaudissements de Tom Dumoulin et Chris Froome sont amplement mérités. de Peter Sagan dans les arrivées en montée, puis de Dylan Groenewegen, entrent juste dans la logique de l’histoire. Que Dan Martin, le puncheur, s’impose à Mûr-de-Bretagne correspond aussi à des caractéristiques techniques et phy- siologiques. Mais tout de même, ces étapes bretonnes méri- taient autre chose de la part des acteurs du Tour qu’une procession du peloton derrière les échappées publicitaires ! Les outsiders se défendent de leur passivité en ces lieux, où le succès populaire ne se dément pas, en arguant qu’ils ne peuvent débrider la course avant d’avoir franchi les 22 km de pavés du Nord répartis en quinze secteurs sur la neu- vième étape. Que le Team Sky contrôle, c’est une évidence, et même une obligation professionnelle, mais la préoccu- pation de leurs challengers est de ne pas tomber avant la montagne où ils ont de fortes chances d’être battus. Pour la deuxième année consécutive, Richie Porte se brise les os au neuvième jour de course, avant même d’atteindre les pavés qui, en définitive, ne chamboulent pas la hiérarchie. Vincenzo Nibali est le deuxième prétendant au maillot jaune écarté sur chute, dans la montée de L’Alpe d’Huez où l’ambiance n’a plus le caractère bon enfant du public du Tour de France. Désormais, les coureurs se font huer, siffler et essuient des crachats. Chris Froome avait pourtant raison quand il prévenait qu’à la fin de la procédure, tout le monde comprendrait qu’il n’avait commis aucune faute malgré son contrôle anormal de la Vuelta 2017. Mais là, ce sont des oreilles usées qui ne veulent rien entendre.

• La foule des grands jours au départ de Brest, le sixième jour. La France aime le Tour.

De haut en bas • renaît en Enfer. Il triomphe à Roubaix devant le Maillot Jaune . • Dan Martin émerge en force à Mûr-de-Bretagne. La suite lui sera moins favorable. • Richie Porte chute et abandonne sur la route de Roubaix. Puis, sur les pentes de L’Alpe d’Huez, c’est un autre favori, Vincenzo Nibali, qui succombera à la malchance. World Tour Alaphilippe, Huy bien sûr !

« Une classique, vite ! », titre le mensuel Vélo Magazine sous une photo de Julian Alaphilippe au début du passionnant Flèche wallonne mois d’avril. « Trop de pression », contestent les râleurs invé- térés sur les réseaux sociaux. Mais, non ! L’Auvergnat semble venu au cyclisme pour gagner la Flèche wallonne. N’a-t-il pas e terminé deuxième en 2015 et 2016 lors de ses deux seules Date : 18 avril (82 édition) apparitions sur l’épreuve (il était blessé au printemps 2017) ? Classe : 1.WT Le début de saison n’a pas permis de mesurer l’impact www.la-fleche-wallonne.be de la réduction des équipes d’une unité. La première des Vainqueur : Julian Alaphilippe Ardennaises — de grâce, qu’on laisse l’ (Quick-Step, sur cycles Specialized) à sa spécificité néerlandaise — met le changement en évi- dence. Il manque un homme à Movistar pour positionner Classement : idéalement le quintuple vainqueur au 1. Alaphilippe (Fra) Mur de Huy. C’est qu’il a fallu s’employer pour revoir les 198,5 km en 4 h 53’ 37” Vincenzo Nibali qui s’amuse sur sa fin de carrière. L’Italien 2. Valverde (Esp) à 4” met le feu à 45 km de l’arrivée pour donner une Flèche 3. Vanendert (Bel) à 6” wallonne bien plus enjouée que ces dernières années. 4. Kreuziger (Rtc) 5. Matthews (Aus) 125 Au pied du Chemin des Chapelles (le vrai nom de la 6. Mollema (P.-B.) montée mythique), les Lotto-Soudal semblent emmener 7. Wellens (Bel) Tim Wellens, mais ils s’emmêlent les pinceaux. Même si 8. Schachmann (All) Jelle Vanendert, troisième, ressuscite, c’est du pain béni 9. Bardet (Fra) t.m.t. pour leurs rivaux belges de la Quick-Step. Alaphilippe 10. Konrad (Aut) à 12” ­accélère aux 100 mètres. Contrat rempli, le maillot à pois …13. Molard (Fra) à 21” et la Clásica San Sebastián ne seront que bonus et bonheur. …15. Vuillermoz (Fra) à 28”

De haut en bas • David Gaudu au départ, un rien circonspect. Pourtant, les observateurs sont formels : il progresse de mois en mois, au plus haut niveau ! • Sergio Henao et Romain Bardet font l’effort. Le Français décrochera la neuvième place au sommet du Mur de Huy. • Vincenzo Nibali bouscule les habitudes. Mais son offensive précoce restera évidemment très surveillée. • Julian Alaphilippe décroche enfin une victoire de prestige. Un déclic dont on reparlera tout au long de la saison… • Passage de témoin ? En tout cas, Valverde apprécie en connaisseur la performance de son successeur.