La Conquête Du Mézenc Illustrée
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La conquête du Mézenc illustrée ou les cartes commentées de lévolution du peuplement de quelques communes du versant Nord-Ouest jusquen 1800. À partir du dictionnaire topographique de la Haute-Loire de MM. CHASSAING et JACOTIN, publié à la fin du amis sicle. Aan-popo Dictionnaire de Chassaing et Jacotin a été l'occa- sion de ce modeste travail qui n'a utilisé qu'un es plateaux du Mézenc sont les seules seul élément d'information, la chronologie. hautes terres du Massif Central où l'habi- tat permanent s'est installé à des alti- L La oce tudes aussi élevées : près de 10 chefs-lieux de communes sont situés à 1 200 m d'altitude et Cet ouvrage est sans doute fort critiquable. plus, jusqu'à 1 340 m pour Les Estables ou 1 320 Le fin connaisseur du Mézenc, l'historien local ne m à Lachamp-Raphaël. Des dizaines et des manqueront pas d'énumérer les oublis, les erreurs dizaines de fermes se sont implantées jusqu'à qu'il contient. C'est vrai, mais, en même temps ,plus de 1 500 mètres (la ferme de Mézenc sur la c'est une somme de travail considérable, pré- commune des Estables, celles de Fonteysse sur cise et fort documentée. Il n'est qu'à feuilleter celle de Borée). d'autres tentatives de ce type, à la même époque, 1. - LÉOGIER Jean-Jacques, 1993, Il est pour établir une comparaison tout à l'avantage de revenu, le temps du Mézenc i n Les Cette situation tout à fait exceptionnelle nos auteurs. Cahiers du Mézenc n 5. démontre une capacité peu banale de ce territoire Du reste, la cartographie présentée ici appa- à accueillir la vie et l'activité, capacité mise à mal raît dans bien des cas comme une validation. Il depuis un siècle. faut cependant attirer l'attention sur le fait que, L'attractivité qui connut son apogée au selon les sources de Chassaing et Jacotin, il y a cours du XIXe siècle est le fruit d'une longue his- sans aucun doute des décalages parfois considé- toire. André FEL (Les hautes terres du Massif rables entre la fondation du lieu et la relation de Central, entre tradition et modernité) a tenté son existence. C'est pourquoi le lecteur aura une reconstitution brillante et documentée de garde de ne pas attacher une importance consi- l'histoire du peuplement, intimement liée à celle dérable à la datation mais devra plutôt envisager de la valorisation agricole de ce territoire. Des l'évolution prise dans sa totalité géographique et modestes et précaires cabanes des premiers ber- historique. gers transhumants du néolithique aux villages et En tout état de cause il ne peut s'agir ici que aux fermes d'aujourd'hui des dizaines de siècles d'une approche partielle, modeste contribution à se sont écoulés. Mais l'évolution est loin d'être l'Histoire du peuplement du Mézenc qui reste, régulière : guerres, épidémies, accidents clima- bien entendu, à entreprendre. tiques, s'intercalant entre des périodes de crois- Le principe de l'ouvrage est simple. Les sance et de prospérité, ont rythmé - comme auteurs ont classé par ordre alphabétique les partout - l'Histoire du Mézenc. lieux-dits existants (ou ayant existé). Pour chacun Romains, peuples de l'Est et du Sud sont ils ont recherché son passé toponymique dans des passés par là, repartis ou restés, contribuant peu sources très diverses (cadastres, état-civil, à peu à façonner une morphologie de l'habitat minutes notariales, cartulaires d'abbayes, etc.) en particulièrement étonnante. indiquant les dénominations antérieures avec la La toponymie s'essaie à l'Histoire des lieux date de la relation et l'origine documentaire.La à travers leur nom. Il pouvait paraître intéressant zone étudiée est limitée à la Haute-Loire (ce d'en savoir plus sur l'Histoire du Mézenc en type d'ouvrage n'existe pas, à ma connaissance, Jean-Jacques LÉOGIER plongeant dans cette approche fort en vogue à la pour l'Ardèche), communes de Chaudeyrolles, fin du siècle dernier, et encore dans la première Les Estables, Freycenet-La-Cuche, Freycenet- moitié de celui-ci. Le « re-feuilletage » du Latour, Laussone, Moudeyres, Saint-Front. LES CAHIERS DU MÉZENC - N'7 -JUILLET 1995 Les auteurs nous signalent 20 lieux-dits Les futurs chefs-lieux de commues sont (relatés pour l'essentiel dans le cartulaire de presque tous là : Laussonne, Freycenet-Latour, Saint-Chaffre) . Moudeyres, Saint-Front, Chaudeyrolles . Cette première carte montre l'absence de Cependant existent déjà des habitats qui resteront citations pour toute la partie sud de la zone étu- extrêmement modestes comme Maubois (com-m diée . À cet égard il faut d'abord rappeler la très une. Par de ailleursSaint-Front) une ligne de grande différenciation actuelle dans la morpho- peuplement semble se dessiner de l'Ouest à logie de l'habitat : les hameaux en sont l'ossature l'Est, du Crouzet de Laussonne à Arsac de dans le secteur d'altitude inférieure à 1 200 Chaudeyrolles via Moudeyres et Chaudeyrac mètres alors qu'ils deviennent presque absents (Commune de Saint-Front) au-dessus, au bénéfice des « fermes isolées » . Autrement dit, les implantations les plus Dès l'an mil, 5 des 7 chefs-lieux sont pré- anciennes correspondent plutôt à des secteurs sents, mais seulement un tiers des futurs gros de hameaux, d'habitat plus groupé, d'altitude hameaux, un quart des petits hameaux, et. 3 % plus faible, donc plutôt au Nord . des fermes isolées . Le xie siècle semble de prime abord peu Au total seulement 11 implantations nou- conquérant . Il faut toutefois constater que le velles, ce qui, y compris de possibles - pro- Sud de notre zone d'étude est enfin cité, avec bables - erreurs montre bien qu'ici, comme deux implantations dans la vallée de la Gazeille ailleurs, on ne s'est pas vraiment remis des péri- (sur ses hauteurs) : Les Eygaux et Les Estables ; péties du Haut Moyen-Âge . Il y a d'ailleurs à et deux autres dans la vallée de la Collance (sur faire l'hypothèse que sur ces 11 sites un certain les hauteurs aussi) : Les Raches et Deux Rabbes. nombre existait déjà auparavant mais n'avaient À remarquer que ces 4 toponymes sont pas été « retrouvés » par nos auteurs . des pluriels indiquant très certainement une petite communauté. Pour Les Estables, com- Il y a néanmoins 7 sites de plus pour le ment ne pas remarquer que le toponyme est Nord, et seulement 4 pour le Sud, le déséquilibre lourd de sens quant au système agraire en fonc- persiste ; les problèmes de sécurité et d'appro- tionnement sur « le toit du toit ». visionnement sont cruciaux . Un deuxième coup d'oeil permet d'obser- ver une occupation plus dense dans la combe du Haut-Aubépin (Faurie, Fauriettes . .). LES CAHIERS DU MÉZENC-N°7- JUILLET 1995 Deux siècles d'un coup pour saisir le mou- (manquent Couteaux de Saint-Front et Les vement des grands défrichements du XIIe siècle. Badioux de Laussonne). Il n'y a, en revanche, On dénombre 26 nouvelles implantations que 18 des futurs 29 petits hameaux, et, surtout 21 pour 31 présentes au début de la période. C'est « fermes isolées » sur 127. Il y a donc une corré- donc un presque doublement qui se répartit surtout lation forte entre ancienneté de l'implantation et au Nord-Ouest de la zone, et au Sud. C'est donc le volume de l'agglomération. secteur Nord-Est qui en profite le moins. Au Sud la conquête suit presque systémati- Il faut rapprocher ce fait des conditions quement les deux grandes vallées. Il y a même une d'insécurité permanente qui marquent ces siècles « tête de pont » sur un affluent de la Veyradeyre. du Moyen-Âge. Les disettes, les famines rejettent Au Nord-Ouest les 12 nouvelles implanta- dans « l'illégalité » une population nombreuse tions permettent de quadriller presque totalement obligée de se livrer au brigandage pour survivre. le territoire. Le féodalisme triomphant va de pair avec guer- Les 7 futurs chefs-lieux de communes sont royages incessants, pillages, livraisons forcées... présents ainsi que 11 des futurs 13 gros hameaux S'isoler, c'est prendre un risque considérable. LES CAHIERS DU MÉZENC-N ° 7-JUILLET 1995 Le décalage que nous avons évoqué plus Alors qu'en 1300 elles n'étaient qu'un peu haut doit être rappelé ici. La grande peste et la plus du tiers des implantations, un siècle plus tard guerre de 100 ans commencent à ravager le pays elles en forment la moitié. C'est dans la haute après 1340. vallée du Lignon que le phénomène est particu- On note 28 nouvelles implantations. lièrement visible avec une dizaine de nouveaux Aucune à l'Ouest, contrairement à la période établissements, aujourd'hui « fermes isolées ». précédente, mais l'essentiel est au Nord, au Nord-Est surtout, comme pour rééquilibrer les siècles antérieurs. Le Sud commence à s'étoffer. L'avant-dernier des futurs gros hameaux est présent. Mais, surtout, alors que la catégorie « petits hameaux » approche de son terme, ce sont les « fermes isolées » qui opèrent une avan- cée considérable ; c'est un doublement. LES CAHIERS DU MÉZENC-N°7 - JUILLET 1995 Dans les épreuves de ce siècle qui va de « fermes isolées » comblant les vides notamment 1350 à 1450, les nouveaux établissements sont sur une ligne allant des confins de Laussonne et peu nombreux ; c'est pourquoi nous nous pro- Freycenet-Latour à la haute vallée du Lignon. posons d'embrasser de nouveau deux siècles à la fois pour enregistrer une évolution significative La totalité de l'habitat groupé moderne est À l'Ouest, trois nouveaux hameaux sur la acquise. Concernant l'habitat isolé, un nouveau commune de Laussonne.