Commune de Germs

Canton de

Arrondissement d’Argelès-

Département des Hautes-Pyrénées

Monographie rédigée en 1887 par l’instituteur

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N° I

La commune de Germs est située sur le penchant d’une colline, et les habitations se trouvent placées au milieu des terres, ce qui fait que la commune n’a pas du tout l’aspect d’un village. Elle est bornée au nord par les landes communales d’Arrodet et de Neuilh, à l’est par le ruisseau de l’Oussouet qui la sépare de la commune de Labassère, à l’ouest par la montagne de la Clique et par des hameaux de séparés de la commune de Germs par un petit ruisseau qui donne naissance à l’Echez, et au midi par les montagnes désignées sous le nom de Courbet et de Couret. La commune a pour diamètre une longueur de six à sept kilomètres sur dix-huit à vingt kilomètres de pourtour. Jusqu’au chef-lieu de canton, la distance est de quatorze kilomètres, c’est la même distance jusqu’au chef lieu d’arrondissement et le trajet est double jusqu’au chef-lieu de département. La partie du village qui se trouve au Nord est moins accidentée que le restant du village ; c’est le terrain le plus riche et le mieux cultivé ; c’est là qu’on trouve également le plus d’arbres fruitiers. Celle qui est située au sud forme un vaste horizon dont la vue peut s’étendre très loin. Aussi des étrangers viennent pendant la belle saison parcourir la montagne de la Clique et du sommet de cette montagne ils aiment à contempler le joli panorama qu’ils ont devant eux ; leur vue peut s’étendre au moyen d’une lunette depuis Bayonne jusqu'à Perpignan. Des fois, d’autres touristes s’arrêtent avant d’arriver au cap de Germs, c’est à dire qu’ils bornent leur ascension jusqu'à une croix, désignée la croix blanche placée sur les limites des landes commales (sic) des trois communes voisines de Neuilh, d’Arrodet et de Germs. Ce lieu serait un point stratégique comme on en trouve rarement dans l’art militaire, soit pour y faire manœuvrer l’artillerie soit également l’infanterie. Les montagnes de Garrabousta, de Bazus, de Lasbouigues sont des dépendances de la montagne du Courbet appartenant à la baronnie d’Angles. Ces montagnes renferment d’excellents pâturages pour toute espèce de bétail, de la bruyère, d’arbustes de hêtre. La montagne de la Clique située au couchant renferme une pierre calcaire qui pourrait servir à la fabrication de la chaux ; c’est également une pierre très recherchée pour la construction des édifices. Les richesses du sol consistent en mines d’ardoises qui sont exploitées à ciel ouvert ; on essaie d’exploiter quelques carrières en galeries souterraines, seulement certains ouvriers souffrent d’être privés d’air ; ils trouvent cette besogne et le manque d’air surtout au-dessus de leur forces. Ces carrières avec celles de Tibassère qui sont dans la même direction, jouissent d’une réputation méritée ; chaque fois que cette ardoise a été envoyée dans une exposition, elle a toujours obtenu une récompense ; elle a même mérité la médaille d’honneur Ces chantiers d’exploitation sont une véritable richesse pour les habitants et même pour les habitants des communes avoisinantes. Les patrons distribuent en moyenne aux ouvriers par quinzaine une somme de deux mille à trois mille francs, ce qui fait de cinq mille à six mille francs par mois et un total de soixante dix mille à quatre vingt mille francs par an. Si l’ardoise n’avait pas d’écoulement la fabrication pourrait être diminuée et les ouvriers souffriraient de cet état des choses. La commune est arrosée par de nombreux cours d’eau qui sont : celui de Laspeyre de Neuilh situé au sud du village, celui de Lingors qui travers le centre de la commune, les ruisseaux de Hayaou, de la Sarie et de Sanquiet sont les moins importants et servent pour arroser les propriétés de la partie du nord du village. Tous ces ruisseaux vont grossir la rivière de l’Oussouet. Le débit de ces cours d’eau varie considérablement d’une saison à l’autre, ainsi en hiver et bien souvent au printemps, à l’occasion de la fonte des neiges, les ruisseaux désignés débordent et occasionnent des fois des dégats (sic) dans les propriétés riveraines. En moyenne, le débit de l’Oussouet varie entre deux cents à deux cent cinquante litres par minute ; les autres ruisseaux fournissent de cinquante à soixante litres par dans le même temps. En eaux potables, la commune est assez riche, elle a des sources assez abondantes en certains endroits ; ce qui est assez singulier, c’est que pendant l’hiver, l’eau de la plupart de certaines sources est chaude, tandis que pendant l’été l’eau de ces mêmes sources est froide. Cependant une partie des habitants de la commune placés (sic) à coté de la montagne de la Clique, avaient autrefois un trajet de deux kilomètres pour aller chercher leur provisions d’eau. Un prêtre nommé Morère, desservant de cette commune, il y a environ vingt-cinq années, eut l’idée de faire venir un filet d’eau pris à la source du (dont les eaux descendent dans la vallée de Castelloubon) de le faire arriver au Cap de Germs pour l’utilité de ces habitants qui en étaient privés. Des difficultés surgirent, les habitants de Cotdoussan, d’Ourdis et de Cheust, s’y opposèrent sous prétexte que toute cette eau leur était nécessaire pour faire marcher des usines. Un procès eut lieu et le différend fut jugé en faveur de la commune de Germs ; et aujourd’hui cette eau qui parcourt une distance de deux kilomètres à ciel ouvert avant d’arriver au Cap de Germs, rend les plus grands services, soit d’abord aux habitants qui se trouvent dans les environs, soit également aux enfants des deux sèxes (sic) qui fréquentent les écoles. Les élèves ne rentrent pas après la première classe ; ils ont le soin d’emporter chaque jour un petit morceau de pain qui leur sert de goûter ; et sans cette eau, ils ne pourraient pas se désaltérer, lorsqu’ils ont soif, et c’est surtout pendant l’été que les élèves souffiraient (sic) davantage si cette eau venait à manquer. On trouve à côté de l’Oussouet et au fond d’un rocher dit Courade une source minérale sulfureuse qui porte le nom de Doubaou, désignation qu’elle tire du nom de ce quartier du village ; elle a des propriétés curatives elle est utilisée en boisson et en bains. Ce fut l’abbé Morère dont il a été déjà question qui fit faire à ses dépens le captage de cette source et pour l’indemniser la commune lui laissa pendant vingt ans la jouissance de cette eau, c’est à dire le droit de l‘exploiter a (sic) son avantage. Mais l’abbé Morère aurait dû faire d’autres dépenses afin de bien faire connaître les qualités de cette eau, il aurait fallu pouvoir construire un établissement pour recevoir les étrangers, tandis qu’il n’avait fait construire qu’une simple cabane où l’on ne pouvait mettre qu’une seule baignoire. Cependant lorsque cette eau fut analysée par le docteur Filiol, il trouva que la quantité de minéral qu’elle renfermait était aussi élevée que dans les eaux de Barèges. Cette source fut revendiquée ensuite par le syndicat de la vallée de Castelloubon, invoquant qu’elle se trouvait dans un terrain qui lui appartenait. Un procès qui a coûté de grandes dépenses à la commune, eut lieu entre le syndicat et la commune et celle-ci fut condamnée une deuxième fois par la cour d’appel qui débouta la commune de ses droits sur les terrains en litige et comme la fontaine sourd dans le terrain appartenant à la vallée, la commune fait abandon des droits qu’elle pourrait invoquer ; de sorte que cette source appartiendra aux habitants de Castelloubon. Sur la direction de Doubaou se trouve également la source d’eau minérale de Labassère jouissant d’une grande renommée. Au couchant de ces deux sources, il en existe une troisième qui est ferrugineuse ; elle jaillit dans la propriété d’un habitant de la commune. Si une compagnie venait à a louer ces trois spécialités d’eau, elles pourraient être une véritable richesse pour la contrée. L’altitude de cette commune varie entre neuf cent cinquante mètres au bas de la colline et mille cinquante mètres environ au sommet. Les vents qui se font le plus souvent sentir sont ceux de l’ouest et du sud ; ce dernier occasionne presque toujours de grands dégats (sic) ; il renverse les toitures, il déracine des fois les arbres. La quantité d’eau qu’il tombe, varie d’une saison à l’autre ; ainsi au printemps, à l’époque des orages, il pleut à tel point que des torrents se forment en très peu de temps et qui disparaissent aussitôt que la pluie cesse. Le climat est très froid pendant l’hiver ; tempéré au printemps et en automne. Le thermomètre, pendant l’hiver, ne marque guère au delà de 7 ou 8 degrés ; au printemps, il peut varier entre 15 à 20 degrés et pendant l’été il reste toujours au-dessous de 30 degrés. L’air qu’on y respire est des plus purs, aussi les habitants ont en général la physionomie rouge et ils sont rarement malades ; les enfants et les jeunes gens se font surtout remarquer par leurs figures bien fraîches. Cela tient à ce que le pays est très sain et qu’on n’y trouve nulle-part ni lacs, ni marais qui ne manqueraient pas de vicier l’air. ______

N° II

D’après le recensement de 1886, la population de la commune est de 668 habitants, celui de 1881 avait donné 656, celui de 1876, 608 habitants ; en 1841, le chiffre de la population était de 582 habitants. On voit par ces données que le chiffre de la population va en augmentant et cela par rapport aux ardoisières. La commune est divisée en six quartiers : le cap de Germs a une population de 111 habitants ayant 22 maisons, c’est dans cette partie du village qu’est située l’église ainsi que la maison commune ; le Hourt-Débat qui est le quartier le plus important a une population de 199 habitants et 38 maisons, le Quartier Cantérot a 76 habitants et 11 maisons ; celui de Rey 57 habitants et 14 maisons, celui du Pla d’Arbéret 62 habitants et 12 maisons, celui de Clousurère, 19 habitants et 4 maisons, celui de Doubaou 72 habitants et 13 maisons et enfin celui de Mail de a 72 habitants également et 11 maisons, ce qui fait un total de 668 habitants et 126 maisons. Les premiers actes de l’état civil datent de 1810, antérieurement à cette époque date, la commune de Germs était rattachée pour le civil à celle de Cotdoussan ; aussi lorsqu’il faut avoir quelques renseignements des actes de l’état civil avant cette date, il faut aller à la mairie de Cotdoussan, et pour les cultes également la commune dépendait de cette dernière, ce qui était très pénible, c’était de transporter les corps des décédés à plus de 8 kilomètres sur des sentiers dont la pente était très raide et très difficile. La commune est administrée par un maire assisté de douze conseillers municipaux, vu que la population dépasse 500 habitants. Pendant longtemps l’esprit de division a régné au sein du conseil municipal et cela dans le but de ne rien faire d’utile pour la commune, ce qu’aurait voulu l’un des partis l’autre travaillait à faire échouer le projet ; aujourd’hui il semble qu’il y a plus d’entende, (sic) cela est dû en partie à la bonne direction donnée aux affaires par le premier magistrat. Malheureusement sa santé est gravement compromise et si la commune vient à le perdre, elle ne le remplacera qu’assez difficilement. Pour les cultes, la commune est desservie par un prêtre qui occupe ce poste depuis plus de vingt ans, son rêve, c’est celui de faire construire une nouvelle église ; on a déjà mis la main à l’œuvre, mais avant que tout ne soit terminé il faudra du temps et de grandes dépenses. Pour la perception, la commune quoique dépendant de Castelloubon, fait partie de la perception d’Arcizac-ez-Angles et partant de la recette d’Argelès. Les percepteurs ne craignent pas de faire plusieurs fois par an l’ascension au cap de Germs pour faire des recouvrements afin de donner plus de donner plus de facilité aux contribuables. Pour les postes et le télégraphe, la commune dépend du bureau de poste de Lourdes. En 1882, par une circulaire de M le Sous-Préfet d’Argelès en date du 22 février, le Conseil municipal de cette commune fut invité à faire connaître les avantages que la commune trouverait à être servie, soit par le bureau de poste de Lourdes, soit par celui de si l’on venait à en créer un. Le conseil répondit que pour le service du facteur, le bureau de Juncalas est était plus rapproché de cette commune et qu’ainsi le service serait plus facile que par le bureau de Lourdes. Seulement il fit observer qu’il s’agissait d’établir pour la correspondance une marche aussi directe par le nouveau bureau, qu’elle l’est par celui du chef lieu de canton. Le conseil après avoir fourni ces explications, décida qu’il était d’avis qu’il fut créé un bureau de poste à Juncalas et que cette commune y serait rattachée, si toutefois l’administration le jugeait convenable. Avant 1882, la commune avait pour le service de la poste un facteur de relais domicilié à Arrodet, et alors la commune éprouvait pour la correspondance un retard de 24 heures ; alors une pétition des habitants de cette commune fut adressée à l’administration des postes pour avoir un service direct. Celle-ci comprit que les raisons invoquées par les plaignants étaient fondées ; il fut donné suite à leur demande. Depuis lors, il fut arrêté par l’administration des postes que le facteur de relais aurait son domicile à Germs et qu’il ferait une première fois la levée de la boite de 8 à 9 heures le matin, qu’il irait remettre les paquets trouvés à la boîte au facteur qui est venu de Lourdes pour échanger entre eux la correspondance. Le facteur de relais vient ensuite une deuxième fois le même jour faire de nouveau la distribution des lettres et des journaux qu’il a pris. L’administration des postes avait aussi essayé de faire disparaître le facteur de relai (sic) en rattachant directement le service de la commune au bureau de poste de Lourdes. Mais ce devoir était au-dessus des forces du facteur. Ce dernier avait d’abord un trajet de 14 Kilomètres pour arriver au Cap de Germs, des fois il avait encore de 4 à 6 Kilomètres pour faire la distribution dans toute la commune ce qui faisait près de 20 kilomètres pour aller et 20 autres pour revenir, ce qui faisait en tout 40 Kilomètres. Pour faire journellement ce trajet, la santé des facteurs aurait été bien vite compromise, ce service étant si pénible on a du l’abandonner. La valeur du centime est de 0 franc 13. Les revenus ordinaires consistent en un rôle de bacades qui donne une recette annuelle de 300 à 350 francs ; on établit également chaque année un rôle de thuyes et fougères dont le revenu s’élève de 60 à 70 francs. Ces ressources sont insuffisantes pour faire face aux nombreuses dépenses que doit faire la commune : entretiens, réparations aux édifices publics, traitement pour une première messe, traitement du garde champêtre ; etc. etc. ; la caisse communale est presque vide, la commune est même grevée d’une imposition extraordinaire. Et il ne faut pas s’étonner si la commune n’a pas de ressources, elle est restée presque toujours en procès, tantôt avec la vallée de Castelloubon, tantôt avec les propriétaires qui possèdent les landes du Bédat, voisines des landes communales, d’autrefois avec la commune de Cotdoussan. Que d’argent n’a t’il pas fallu pour soutenir tous ces procès ! C’est avec la vallée que la commune mangea le plus d’argent, car celle-ci après avoir été condamnée à Lourdes, elle fit appel à la cour de Pau qui confirma le jugement de Lourdes. Ce procès a bien coûté à la commune de 2000 à 3000 francs. Si cet argent avait été employé à construire un local soit pour l’institutrice ou pour l’instituteur, la commune n’aurait pas tout à construire, comme elle le devra certainement avant longtemps ; car les édifices scolaires sont réellement dans des conditions très défectueuses. ______

N° III

Le terrain communal pourrait à peine nourrir le quart de ses habitants ; il n’y a pas un seul propriétaire qui récolte assez de grain pour les provisions d’une année c’est l’élève du bétail d’un coté et l’exploitation des carrières de l’autre qui fournissent les moyens d’existence aux habitants de la commune. Elle récolte en moyenne de 120 à 150 hectolitres de froment, de 180 à 200 hectolitres de seigle et de 130 à 140 hectolitres de maïs ; seulement les gelées tardives compromettent des fois cette dernière récolte. En pomme de terre, le rendement est plus considérable la commune peut récolter en moyenne de 1500 à 2000 hectolitres et cette production n’est pas encore suffisante. Les cultures principales sont en céréales. La commune ne possède plus de forêt, cependant dans les premiers temps une grande partie du terrain communal était couvert d’arbres à haute futaie, ainsi que d’arbustes et de broussailles ; mais insensiblement on a défriché ces terrains boisés et aujourd’hui ils sont remplacés par de belles prairies ou de terres labourables. Ce qui est fâcheux, c’est qu’on ne cultive pas les champs avec goût, ni avec soin c’est plutôt par routine qu’on laboure, au lieu de de (sic) chercher à bien connaître la nature des terres, pour leur donner à chacune d’elles les engrais et leur confier les graines qui leur conviendraient le mieux ; ils ne cherchent nullement à faire produire à la terre le plus fort rendement possible. La commune possède par indivis des bois avec la vallée de Castelloubon, ces bois sont soumis au régime forestier. Cette administration a bien voulu autoriser les habitants indigents de la commune à pouvoir enlever le bois sec deux jours par semaine. Cette faveur était indispensable pour les pauvres, car on trouve très peu de bois à acheter et ensuite il se vend à un prix très élevé. On ne se contente pas toujours d’enlever le bois sec, on abat beaucoup de bois vert au risque d’encourir un procès verbal, si le délinquant est surpris par le garde-forestier. Il y en a bon nombre qui se laissent mettre à l’amende et comme la plupart n’ont pas de quoi payer, l’administration forestière demande aujourd’hui leur incarcération. Aussi il arrive que le garde fait une surveillance continuelle et sa tâche est beaucoup plus pénible et des fois même dangereuse. Dans la partie du nord et du centre du village, les propriétaires s’appliquent à faire venir beaucoup d’arbres fruitiers et particulièrement des pommiers et depuis quelques années plusieurs propriétaires font jusqu'à quatre à cinq hectolitres de cidre qui leur sert de boisson pendant l’été lorsqu’ils s’occupent des travaux pénibles. On élève surtout des vaches, des moutons et surtout des brebis parce qu’il y a deux ou trois ans ce dernier bétail se vendait à des prix très élevés ; aussi un certain nombre de propriétaires avaient vendu leurs vaches pour les remplacer par des brebis. Depuis deux ans, le cours du bétail a considérablement diminué ; ainsi pour les moutons et pour les brebis il y a une baisse de 10 à 12 francs par tête et au marché les vendeurs sont des fois embarrassés pour les livrer. Quelles peuvent être un peu les causes de ces réductions ? C’est que dans certaines contrées des maladies font périr beaucoup de bêtes à laine ; aussi on craint d’acheter ; d’un autre côté la crise commerciale se fait sentir ; et surtout le manque d’argent empêche les échanges. Il faut rendre cette justice aux éleveurs de la commune ; ils ont un tact tout particulier pour soigner le bétail, d’un autre coté, la qualité et l’abondance des pâturages contribuent également pour l’élève du bétail. D’après le relevé du rôle des bacades, il y a dans la commune 1200 bêtes à laine environ et 240 vaches. Des maladies occasionnent des fois à certains propriétaires des pertes sérieuses dans l’élevage des vaches. Ainsi l’année dernière le typhus a fait éprouver à des chefs de maison de grandes pertes, à tel point que ceux qui ont été victimes du fléau s’en ressentiront pendant longtemps pour faire face à leurs affaires. Les vaches sont de très bonnes laitières, elles ont un lait excellent excellent soit pour faire du beurre, soit pour engraisser les jeunes veaux. Le lait le beurre et le fromage sont encore une ressource pour les habitants de la commune ils en font une grande consommation dans l’art culinaire et d’un bout de l’année à l’autre ils en font un revenu assez considérable. Le prix des vaches, comme du reste de toute espèce de bétail, a diminué beaucoup aussi ; il y a une baisse de 100 francs au moins par tête. Cependant les bonnes vaches laitières et de belle qualité ont une valeur assez raisonnable, puisqu’elles arrivent encore à une somme de 300, 350 et même 400 francs. Autrefois ces mêmes bêtes auraient valu 400, 450 et même 500 francs ; c’étaient (sic) des prix excessifs. Les chasseurs ou pour mieux dire la vérité, les braconniers sont très nombreux dans la commune et certains sont assez adroits pour le tir. Il y en a plusieurs qui vont parcourir les montagnes, faire la chasse, soit aux coqs de bruyère, soit aux chamois vulgairement appelés isards. L’année dernière deux chasseurs de la commune en compagnie de chasseurs d’une commune voisine ont pris deux isards, l’un même en vie. Aussi on trouvait autrefois beaucoup de gibier sur la montagne de la Clique qui touche au village, il y avait chaque année plusieurs couvées de perdreaux et aujourd’hui on n’en trouve que dans les hautes montagnes. Ces braconniers se permettent de tuer les oiseaux même en temps prohibé ; ainsi en été à la St Jean ils ont le courage de détruire les cailles et ne craignent pas non plus d’occasionner des dégâts considérables dans les propriétés, soit dans les champs, soit dans les prés. Pour remédier à cet abus, les propriétaires qui reçoivent des dommages devraient être plus sévères et sévir impitoyablement sur les individus qui ne respectent aucune loi. Ce serait l’affaire d’en faire punir quelques-uns uns comme il faut, on ferait ensuite un peu plus d’attention. Le garde-champêtre devrait aussi de son coté exercer une surveillance attentive sur ces délinquants pour les obliger à mieux respecter la propriété d’autrui et à ne pas violer aussi facilement les lois qui nous régissent. On aime également dans la commune la pêche, soit à la ligne, soit au filet ; dans le ruisseau de l’Oussouet on y trouve de belles truites qui sont très recherchées, malheureusement, comme pour la chasse, des malfaiteurs osent les empoisonner pour en prendre en grande quantité ; de sorte que ce ruisseau ne renferme pas longtemps la quantité de poisson qu’il pourrait contenir. Ces malfaiteurs font leur maudite besogne pendant la nuit pour n’être gêné de personne. Des étrangers viennent même d’assez loin, ils ne craignent pas d’emporter leurs engins destructeurs et venir piller et tuer le poisson. Que les habitants riverains s’entendissent un peu pour en surprendre quelques-uns en contravention, les faire ensuite punir sévèrement pour qu’ils n’eussent pas ensuite envie de revenir tout de suite à la charge. Il y a quatre chantiers d’ardoisières dans la commune où travaillent de 100 à 120 ouvriers. Ces carrières sont une véritable richesse pour les habitants ; car bon nombre d’entre eux devraient aller chercher ailleurs les moyens d’existence Primitivement il n’y avait qu’une seule carrière exploitée par feu de Castets de Trébons ; mais alors il n’y avait que des sentiers pour faire transporter l’ardoise, ce qu’on était obliger de faire à dos d’âne et de mulet ; on comprend combien ce travail était pénible et combien il était coûteux. Plus tard on construisit le chemin N° 4 de grande communication, c’est alors que trois autres chantiers furent établis et depuis lors ils ont régulièrement marché et occupé un nombre considérable d’ouvriers. Des confectionneurs étrangers furent appelés pour travailler l’ardoise et apprendre en même temps aux ouvriers de la commune qui n’étaient pas bien au courant pour la confection. C’est d’Angers qu’il en vint plusieurs. Ces étrangers gagnèrent au début des journées excessivement élevées, quelques-uns uns aimèrent à vivre raisonnablement et trouvèrent le moyen de faire des économies. Ils commencèrent à se faire une petite position et aujourd’hui ils sont à la tête d’un bien assez considérable. D’autres, comme c’est le propre un peu de tous les ouvriers, dépensèrent follement tout ce qu’ils gagnaient ; ils passaient les nuits et souvent deux ou trois jours consécutifs dans les auberges dépenser complètement tout le fruit de leur travail. Aujourd’hui les ouvriers de la commune sont aussi forts que les étrangers, les mineurs entendent aussi très bien leur besogne ; et ce qui excite leur émulation, c’est qu’il y a actuellement des mineurs de la Haute-Garonne qui sont très intelligents et qui connaissent bien leur métier ; cela oblige aux ouvriers de la commune à faire des efforts pour marcher, dans le travail et dans le montant du salaire, de pair avec eux. Pendant une certaine période de l’empire, le cours de l’ardoise était excessivement élevé de sorte que les patrons pouvaient payer davantage les ouvriers ; ainsi certains confectionneurs gagnaient par jour de 10 à 12 francs, aujourd’hui les meilleurs ouvriers ne gagnent que de 3 à 5 francs ; ainsi bien des fois dans leur conversation les ouvriers s’écrient : « Si l’empire pouvait revenir, comme l’ardoise se vendrait bien alors « et qu’ainsi ils seraient mieux payés » Voilà un des motifs que ces ouvriers mettent en avant lorsqu’il s’agit de voter. Ils reconnaissent parfaitement que le gouvernement de l’empire nous a été funeste, qu’il nous a fait perdre cette chère Alsace et une partie de la Lorraine, qui nous a coûté cinq milliards, malgré cela ils donnent la préférence à des candidats de l’empire et repoussent ceux du gouvernement actuel. Si le commerce peut prendre un nouvel essort (sic) (ce qui est à désirer) on finira par reconnaître que le gouvernement démocratique est le seul qui puisse rendre le peuple heureux. C’est par l’instruction que l’on rendra les électeurs plus raisonnables, qu’ils auront alors bien conscience de leur vote, qu’ils sauront faire un bon choix pour élire leurs mandataires. A l’instituteur incombe ce travail pénible, qu’il remplisse consciencieusement sa tâche, qu’il la fasse de bon cœur en y consacrant toutes ses forces, qu’il aime surtout les enfants, qu’il ne néglige rien pour leur donner une instruction primaire aussi solide que possible. Qu’il répande également le bien autour de lui, il sera ainsi estimé de tout le monde et il répondra de cette manière au désir du gouvernement. Deux moulins à eau existent dans la commune ils fonctionnent au moyen de l’eau du ruisseau de l’Oussouet et pendant l’été surtout lorsque l’une des meules marche, l’autre est obligée de chômer, attendu qu’il n’y a pas assez d’eau pour les faire marcher en même temps ; aussi une partie des habitants vont (sic) faire moudre ailleurs leurs blés. Les ouvriers achètent tous les quinze jours le blé dont ils ont besoin, ils le remettent au marché même à des meuniers de Juncalas ou de Soulagnets qui leur font moudre ce blé et leur rendent ensuite le son et la farine. Les voies de communication sont en très mauvais état ; le chemin n° 4 de grande communication qui longe le ruisseau de l’Oussouet est très pratiqué, il sert particulièrement pour transporter l’ardoise ; les véhicules ne peuvent pas y traîner facilement, attendu que les chars d’ardoises pratiquent de grandes ornières, il est loin d’être en bon état. Ce qui est singulier, c’est que la commune dépend dépend du canton de Lourdes, tandis que pour la vicinalité elle dépend de Bagnères. A plusieurs reprises, la commune aurait exprimé le vœu d’être rattaché à la direction de son canton, ce qu’elle n’a jamais pu obtenir. Ainsi le conseil municipal, par une délibération en date du 17 août 1873, signalait à l’administration supérieure les inconvénients qui résultaient pour la commune de ce qu’elle se trouvait sous l’administration vicinale de Bagnères. Il faisait ressortir d’un coté que la commune de Germs est la seule qui ne relève pas de l’administration du canton pour ce qui concerne la voirie, que d’un autre coté tous ses nombreux chemins sont dans un état littéralement impraticables et accidentés, que l’administration de Bagnères ne songe pas beaucoup à remédier à cet état de choses. Ce qui aurait pu arranger un peu passablement les chemins, c’est que la commune put faire ses prestations dans ses chemins ; elle a demandé ce privilège à l’administration supérieure, mais ses demandes ont toujours été repoussées. En 1880, le conseil municipal fut appelée (sic) par l’administration compétente à voter certaines dépenses pour pouvoir bénéficier de la loi du 12 mars 1880 qui portait une allocation d’une somme de 62.750.000 fr. versée à la caisse des chemins vicinaux. La commune devait créer des ressources extraordinaires : 1° une imposition extraordinaire pour 3 ans donnant une somme de 148 fr. 2° Produits divers dont la somme put être évaluée à 300 francs, le tout montant à la somme de 654. Dépense que la commune devait prendre a sa charge en 1881. Comme il fallait le concours des plus forts contribuables, on recula devant la dépense établie par les ingénieurs. L’esprit de partie (sic) s’en mêla également, l’administration municipale était en premier lieu hostile à ce projet, par rapport à ce que le chemin qu’on allait construire devait traverser une bonne partie des propriétés du maire et de l’adjoint et malheureusement dans cette question on sacrifia l’intérêt général à l’intérêt particulier. D’un autre côté les patrons des carrières d’en bas craignirent aussi que les carrières placées plus haut et qui allaient profiter du nouveau chemin ne leur enlevassent une partie de leur clientèle, ils travaillèrent à faire tomber le projet dans l’eau. Une enquête de commodo et incommodo eut lieu, les opposants intriguèrent de plus fort pour faire échouer le projet. Le commissaire enquêteur fit également un rapport qui concluait que le chemin était tout à fait indispensable et qu’il était même étonné de voir que les habitants de Germs étaient ennemis de toute espèce de progrès. Tout le dossier, c’est à dire le résultat de l’enquête, le rapport du commissaire enquêteur, tout cela fut de nouveau soumis à la sanction du conseil municipal il persista toujours dans son refus. Une nouvelle occasion et bien avantageuse pour la commune se présenta, c’est que M. M Toujas et Seingès chefs de deux carrières voulaient se mettre à lieu et place de la commune et s’imposer tous les deux la somme de 654 francs, précisément la somme que devait dépenser la commune. L’administration municipale repoussa encore cette offre. Agir de la sorte, c’est être ennemi de toute espèce de tout progrès. Cependant ce chemin est le plus central c’est le chemin pratiqué par la plus grande partie des écoliers. Ce n’est pas des fois sans danger qu’ils se rendent en classe, les chemins étant plutôt de sentiers impraticables et très accidentés. Les habitants de Soulagnets ainsi qu’une partie de ceux de Labassère auraient profité de ce chemin pour se rendre plus commodément au marché de Lourdes. Si les habitants qui se trouvent au bas de la colline veulent se rendrent dans cette ville avec un véhicule, au lieu de pouvoir marcher directement par le cap de Germs, les voituriers doivent aller faire un contour de 10 Kilomètres au moins en passant par Trébons et Montgaillard, ce qui est très long et très pénible. Actuellement l’administration des ponts et chaussée (sic) vient d’affecter une somme de 1500 francs que la commune avait en caisse pour faire des travaux de rectification sur ledit chemin vicinal ordinaire n° 6 ; seulement on ne pourra exécuter qu’une faible partie de la besogne à faire. Il faut espérer que le projet qui avait été primitivement conçu sera repris par l’administration supérieure et il viendra un jour que l’embranchement partant du chemin n° 4 de l’Oussouet pour aboutir dans l’Engous portant également le nom de chemin de grande comm.on n° 4, deviendra parfaitement carrossable. Ce chemin est tout à fait indispensable, soit pour la plupart des habitants de la commune soit pour les habitants de Soulagnet ainsi que ceux de Labassère lorsqu’ils doivent se rendre au marché de Lourdes. Pour se rendre dans cette dernière ville, il faut traverser un pont désigné sous le nom déssariou. Au-dessous se trouve un abîme profond, les voituriers ont le soin de laisser marcher lentement leurs véhicules ; car s’ils venaient à se renverser, les voyageurs en tombant pourraient recevoir des blessures peut être mortelles ; il y a eu plusieurs fois de graves accidents. Ce pont aurait pu être mieux fait, il n’est pas assez large ; c’est à peine si une voiture peut y passer en allant encore bien doucement ; il y a une trentaine d’années qu’il a été construit ; il se trouve sur le chemin de grande communication n° 4. Pour les moyens de transport, une partie de la commune située le long de l’Oussouet n’est nullement embarrassée pour faire arriver chez eux les provisions du marché de Bagnères ; les voitures peuvent circuler facilement, seulement ces habitants sont en général les ouvriers qui travaillent aux carrières ils ne se rendent que rarement au marché de Lourdes, ils vont de préférence au marché de Bagnères tous les huit jours ou tous les quinze jours. Les habitants placés au sommet de la colline se rendent de préférence au marché de Lourdes, car ce sont eux qui s’occupent plus particulièrement de l’élève du bétail. Seulement pour faire parvenir leurs provisions au cap de Germs, cela n’est bien commode, c’est à dos d’âne ou de mulet qu’on le fait. Il y a bien à partir du chemin n° 4 de Lengous un embranchement qui va jusqu’au clocher du village ; mais la pente est très rapide et dangereuse cependant c’est ce chemin qu’on suit lorsqu’on fait venir par exemple du vin par le chemin de fer rendu en gare de Lourdes ; mais le charretier doit être très prudent et ouvrir bien l’œil, au moindre écart, la voiture pourrait tourner sens dessus, dessous et ce serait la perte du bétail et de barrique de vin. Si l’on désire faire arriver le vin en gare de Bagnères, c’est par la croix blanche qu’il faut passer à travers les landes communales de Neuilh, d’Arrodet et de Germs pour arriver au cap de Germs ; mais des deux côtés c’est à peine si l’on peut faire transporter une barrique environ de deux hectolitres. Les mesures qui sont en usage sont celles qui ont été établies par la loi, cependant lorsqu’il s’agit de peser du foin ou de la paille au lieu de prendre 100 Kilos pour un quintal, on ne donne au quintal qu’une valeur de cinquante Kilos ou cent vingt cinq livres. ______

N° IV

La commune de Germs tire son nom des prairies nommées (germes dans le langage vulgaire) que la plupart des propriétaires possèdent le long des montagnes ; laquelles (sic) prairies renferment le plus souvent une grange pour y serrer le foin et le regain. A l’époque de faire paître le bétail, des pâtres de la commune y conduisent leurs troupeaux de vaches et de brebis ; ils restent la nuit dans ces granges pour être constamment avec le bétail, c’est là même qu’ils y préparent leurs aliments. Certains habitants des communes de Neuilh, d’Arrodet et même d’ possèdent également des prés dans le territoire de Germs uniquement pour faire pacager leur bétail à travers les montagnes environnantes. Autrefois ces prairies étaient très recherchées, aussi le terrain était des fois payé au dessus de sa valeur, aujourd’hui, comme l’argent est devenu assez rare, ces prés n’auraient pas de longtemps la valeur qu’elles avaient eue (sic). Il y avait autrefois dans la commune des hommes d’une force herculéenne, ils ne manquaient pas tous les dimanches et souvent presque tous les soirs de s’exercer à la lutte. Pour les fêtes locales, pour le tirage au sort, pour le conseil de révision, c’étaient des scènes de désordre presque inévitables ; les jeunes gens n’étaient pas contents, s’ils n’avaient pu se battre un peu. Chaque fois que des étrangers venaient dans la localité, des voies de fait avaient lieu avant leur départ ; même de nos jours de tels désordres se reproduisent quelquefois. Cependant il faut le reconnaître, il y a un grand progrès sous ce rapport ; l’instruction a contribué beaucoup pour adoucir les mœurs et faire disparaître ces mauvaises habitudes. Les jeunes gens sont devenus plus raisonnables ; ils accueillent aujourd’hui les étrangers avec assez de politesse ; ils leur offrent même si c’est nécessaire l’hospitalité avec beaucoup de plaisir. Quoique les maisons soient très disséminées, les gens aiment beaucoup la société, ils éprouvent un certain besoin à se voir souvent et de causer ensemble ; c’est principalement le dimanche qu’ils se rassemblent dans les auberges dans divers groupes. C’est là qu’ils raisonneront sur les affaires de la commune ou sur d’autres choses, ils discuteront sur les actes de tel individu ; c’est de cette manière qu’ils s’éclairent et qu’ils deviennent nécessairement plus intelligents. Un propriétaire a-t-il une affaire sérieuse qui lui donne du souci ? aussitôt il court trouver un homme pour s’inspirer de ses idées et lui demander quelle est la meilleure marche à suivre pour réussir dans son affaire. Il y a une trentaine d’années plusieurs habitants jouaient un bien mauvais rôle, ils firent des emprunts considérables, ils devenaient caution les uns des autres ; les jours de marché, les dimanches et plusieurs fois les jours de la semaine, ils se réunissaient pour boire et manger et dépenser follement leur argent. Ces propriétaires qui étaient à la tête des biens considérables ne tardèrent pas à devenir complètement indigents et leurs descendants n’ont pas encore pu se relever de la situation fâcheuse où les ont plongés leurs parents. Ils ne s’étaient pas seulement contentés de dépenser leur avoir, ils avaient fait des dupes pour des sommes assez rondes. Ce qui ne prouve pas en faveur de la commune, c’est que plusieurs individus faisaient, il y a quelques années, le trafic suivant : ils faisaient venir plusieurs barriques tantôt à un négociant de vin, des fois à un autre et jamais sans en payer du tout. Aussitôt que ces voleurs d’adresse avaient reçu le vin, ils le vendaient eux pour de l’argent comptant et comme ces individus étaient complètement indigents, les pauvres fournisseurs ne pouvaient exercer droit contre eux. De tels actes ne peuvent que nuire à la bonne renommée de la commune. Dans la conversation les habitants ont un accent assez convenable, ils parlent le patois, langage qui est usité dans le pays. Pour le chant, il y a des voix dont le timbre est très agréable ; seulement ces voix ne sont pas encore bien cultivées, lorsque les jeunes gens chantent, ils forcent en général un peu trop la voix, de sorte que le chant n’a plus la même beauté ; la voix n’étant pas conduite avec modération, on ne sait point faire ressortir les sons graves des sons aigus, le chant ne produit pas du tout un bon effet agréable. D’une autre part, les jeunes gens ont la mauvaise habitude de fréquenter trop les auberges, de fumer continuellement lorsqu’ils n’ont rien à faire ; leur voix devient rauque, de sorte que leur chant finit par devenir en très peu de temps tout à fait désagréable. Les hommes et les femmes ont aussi l’habitude de fréquenter les auberges ; celles-ci y vont surtout le dimanche ; elles se réunissent par groupes de quatre ou de six ; elles s’en vont après les offices à l’auberge et y faire leur partie aussi bien que les hommes. Cela s’est fait ainsi un peu de tout temps et cela se tien continue encore. Cela n’empêche pas les habitants d’être d’assez bon catholiques ; ils assistent assez régulièrement aux offices les dimanches et les jours de grandes fêtes ; ils se font même un honneur de pratiquer les sacrements, sans exception, les jeunes comme les vieux. Ils sont assez bien habillés, ils portent le plus souvent des habits de laine assez bien conditionnés, ils affectent même un certain luxe ; les jeunes filles recherchent un peu trop la toilette ; elles ont du goût pour coudre et tricoter. Le pain, le fromage et le beurre sont une des principales ressources dans leur alimentation. En général, on achète du blé de première qualité, les ménagères ont le soin de bien séparer le son de la farine et de celle-ci elles en font un pain excellent. Pour le matin, les cuisinières préparent du bouillon avec de la pâte et pour le soir, c’est une autre espèce de pâte qu’elle préparent avec du lait (des gaudes). Dans certains ménages, la nourriture pourrait être plus substantielle ; cela tient à ce que le chef de la maison fréquente un peu trop souvent les auberges le dimanche ; ils vont y dépenser l’argent en partie qu’ils ont gagné la semaine et peut-être à la maison son épouse n’a pas de pain à A pouvoir donner à ses enfants. Elle voudrait faire comprendre à son mari que sa manière d’agir est blâmable et qu’il ne doit pas fréquenter autant les auberges. Celui-ci mécontent des ces observations qui ne sont que trop justes se permet des quelquefois de lever la main pour battre son épouse. Quel triste et indigne père de famille n’est-il pas ! Quel mauvais exemples ne donne-t il pas à ses enfants. La malheureuse toute meurtrie est obligée de recourir au maire pour que ce magistrat fasse comprendre au malfaiteur que s’il continue d’agir de la sorte, il sera obligé de le signaler à qui de droit. Ainsi avec l’argent que la plupart des ouvriers vont jeter à l’auberge, s’ils le dépensaient à la maison, leurs ménages s’en trouveraient mieux sous tous les rapports, d’abord l’aisance y régnerait, le bon exemple serait donné aux enfants et ceux-ci ne seraient jamais privés du nécessaire. Si le père veut corriger ses enfants, il aura certainement plus d’autorité sur eux ; ils seront mieux disposés à lui obéir, à le respecter et lui témoigner une grande reconnaissance pour les bienfaits reçus. De cette manière la famille est unie comme les doigts de la main, tout marche pour le mieux. Ces enfants bien élevés font la joie et le contentement de ses (sic) parents et plus tard ils sont d’utiles et honnêtes citoyens. Tandis que si les enfants ne voient que le mal, tout ce qui ne devrait pas se faire ; ils sont tout naturellement plutôt portés à faire le mal que le bien. Ces enfants seront comme pour leurs pères, d’indignes époux et de mauvais citoyens. ______

N° V

Jusqu’en 1840, la commune n’avait pas de local affecté pour faire l’instruction des enfants. C’était dans les maisons rapprochées de l’église que l’instituteur faisait l’école et ces habitations étaient encore occupées par le chef de la maison. C’est à peine si l’on pouvait placer une table au milieu de la salle, tous les élèves ne pouvaient pas même s’asseoir. Ceux qui savaient lire couramment dans l’imitation, pouvaient écrire, bien entendu ce n’était bien entendu que les élèves d’élite qui avaient ce privilège. Cette manière de procéder fut employée pendant longtemps ; pourtant la commune comprit qu’il était essentiel, pour pouvoir bien faire l’instruction des enfants, de construire un local qui serait à la fois le logement de l’instituteur et la maison d’école. On se mit à l’œuvre et le local fut bâti à cet effet. L’instituteur y fut installé et il y resta quelques années. Le desservant se plaignit de ce qu’il était mal logé, il voulait un presbytère tout neuf ; on devait s’en occuper, car autrement la commune pourrait être privée de service pour les cultes. Aussi le conseil municipal décida en 1856 que le local de l’instituteur servirait de presbytère et que le local affecté au logement du curé deviendrait la maison commune. Ce fut un véritable coup de Jarnac et le pauvre instituteur dut s’exécuter pour faire plaisir au curé et depuis lors l’instituteur est logé dans l’ancien presbytère. Ce local contient la salle d’école de garçons ; elle est située dans un bas fond, a près d’un mètre au-dessous du sol ; du côté du nord se trouve une petite rigole d’eau qui rend la salle très humide et par conséquent très malsaine ; elle est aussi mal aérée ; elle est encore insuffisante car elle ne mesure que 4 mètres de long sur 4 mètres de large et 2m50 de hauteur. Pourtant elle doit contenir en moyenne de 50 à 60 élèves en hiver et de 40 à 45 en été. Il résulte que chaque élève n’a pas un demi mètre carré de surface, tandis que le règlement porte qu’il devrait avoir un mètre carré. La salle d’école contient quatre tables pour écrire et chacune d’elles doit contenir de 10 à 12 élèves et des fois même davantage. Dans de telles conditions, il est presque impossible d’obtenir de l’application des élèves soit en écriture, soit en dessin. Lorsque le maître doit faire composer les écoliers, c’est très difficile d’obtenir que l’élève fasse de lui-même la composition, il peut jeter facilement les yeux sur la copie de son voisin et en faire son profit pour faire sa tâche. Groupés de cette manière, les élèves sont portés tout naturellement portés au désordre et la discipline et les progrès de l’école en souffrent certainement. Il faut également également de la part du maître une surveillance plus attentive. La partie restante de la maison commune forme le logement de l’instituteur qui n’est pas non plus convenable. Il se compose d’une cuisine servant de chambre à coucher. Et d’une mansarde encore en mauvais état située au sud du local qui doit servir cependant de chambre à coucher. De sorte que ce local est bien loin de remplir les conditions voulues, soit d’abord pour la maison d’école qui peut compromettre la santé des élèves et du maître, soit aussi pour la partie de la maison occupée par l’instituteur, elle est insuffisante et non convenable. Le logement occupé par l’institutrice appartient à la commune, c’est une chaumière comme on en voit rarement de cette espèce ; les murailles ne sont même pas d’aplomb, il a fallu soutenir les poutres avec des pieux pour que les murs ne s’écroulent pas. Comme elle se trouve abritée et souterraine, le vent n’a pas pu la renverser sans cela elle n’existerait pas depuis longtemps. Ce qui est désagréable et même fâcheux pour ce fonctionnaire ; c’est que des fois la nuit lorsque le vent du sud se fait sentir, l’institutrice quitte son logement craignant quelque fâcheux accident. Ainsi ce local est loin d’avoir la beauté et la solidité. Pour faire la classe des filles la commune a dû louer une salle et chaque année elle paie au bailleur la somme de 70 francs ; et depuis plus de 20 ans qu’elle a fait cette dépense la commune aurait pu faire un emprunt et construire un nouveau local pour l’institutrice, on aurait amélioré beaucoup sa position. Ce qui est à regretter c’est que la commune n’ait pas su profiter des avantages que l’état accorde particulièrement aux communes qui n’ont pas de ressources. Quel était le devoir de la commune ? De créer des ressources, faire un emprunt si cela était nécessaire et bâtir un groupe scolaire, c’était la marche la plus directe pour adoucir le plus tot (sic) possible la situation critique de l’instituteur et de l’institutrice. Ainsi en 1882, M le sous-préfet d’Argelès envoyait une circulaire à M le maire par laquelle ce haut fonctionnaire le priait de réunir d’urgence le conseil municipal et de lui soumettre le vœu de l’administration supérieure qui consistait à prendre sans retard une résolution afin de construire un groupe scolaire. De plus, M le sous-préfet faisait connaître de quelle manière la commune pouvait créer des fonds, sans s’imposer d’autres sacrifices pour la dite construction. La commune paye 70 francs pour le loyer de l’école des filles, par suite de non prélèvement sur les fonds ordinaires, elle jouira de la somme de 44 francs ce qui faisait un total de 114 francs, laquelle somme suffirait à amortir une dette de 3000 francs. Le conseil décida qu’il était parfaitement d’avis de faire l’emprunt de 3000 francs pour faire une la construction pour une nouvelle maison commune et que le local occupé par l’instituteur serait livré à l’institutrice. Ce projet n’a pas eu de suite. En 1886, l’autorité supérieure signalait à l’administration municipale, combien le local de l’institutrice surtout était défectueux et qu’elle devait mettre la main à l’œuvre pour construire une autre habitation ou sinon il était urgent de chercher un logement plus convenable et surtout plus solide. L’administration a beau insister, elle n’obtient jamais rien de la commune. Elle s’occupe en ce moment, il est vrai de la construction de son église et elle a beaucoup à faire avant que la construction ne soit achevée ; aussi pour le quart d’heure, elle repousse toute autre entreprise de construction. La fréquentation dans les deux écoles est assez régulière, si ce n’est des fois pendant l’hiver lorsqu’il est tombé beaucoup de neige ou qu’il fait du vent mêlé de la pluie, les élèves qui doivent faire un trajet assez considérable pour se rendre à l’école auraient les habits mouillés avant d’y arriver, alors ils sont obligés de rester à la maison. Pendant la belle saison, quelques élèves sont occupés à la garde du bétail, les pères de famille attachent aujourd’hui assez d’importance à l’instruction de leurs enfants, ils les envoient autant que possible en classe ; la plupart aiment l’instruction et ils sont bien aises de donner à leurs enfants une instruction passable. En général tous les jeunes gens savent lire, écrire et compter, ce n’est que l’exception qui ne peut signer le tableau de tableau de recensement pour le tirage au sort. Lorsqu’ils sont sous les drapeaux, ils écrivent eux-mêmes les lettres à la maison sans faire trop de fautes d’orthographe et ils font même les phrases assez correctes. Pour l’honneur des parents et pour la satisfaction des paren maîtres qui les ont instruits, certains militaires rentrent au foyer paternel avec les galons de sergent. On compte par année de quatre à six mariages et les conjoints signent presque tous leurs actes de mariage ; il y a également chez les jeunes filles une certaine instruction. Il existe une bibliothèque pour l’école de garçons depuis l’année 1882. Une souscription fut ouverte par les soins de l’instituteur ; il s’inscrivit en tête pour la somme de 5 francs ; son exemple fut suivi du curé du maire, de l’adjoint et de toutes les personnes amies de l’instruction ; elle donna la somme de cinquante francs qui fut consacrée à acheter une armoire. Au mois de juillet, la même année une concession de vingt-deux ouvrages fut faite par le ministre de l’instruction publique. Dans le courant de l’année 1883 le conseil municipal, sur la demande de l’instituteur alloua la somme de 10 francs pour acheter des livres pour la dite bibliothèque. En 1884 une nouvelle concession de vingt-cinq livres fut faite une nouvelle concession de vingt-cinq livres fut faite par le ministère de l’instruction publique et en 1886 le conseil municipal a bien voulu sur les instances de l’instituteur accorder la somme de quinze francs pour acheter d’autres livres pour la bibliothèque. Le nombre d’ouvrages prêtés variaient (sic) les premières années entre soixante à quatre-vingt ; les deux dernières années il est arrivé de 170 à 180 livres prêtés et pour l’année courante ce chiffre est même déjà dépassé. Il y a même quelques jeunes gens de quinze à vingt ans qui sont bien aises de venir prendre des livres pendant les longues soirées de l’hiver. Des élèves de l’école, surtout les plus forts, font bien souvent le soir en famille des lectures qui sont bien goûtées de leurs parents. L’élève de cette manière aussi se formera beaucoup plus, il aura beaucoup plus de facilité pour se servir de la langue française, il ne sera pas non plus embarrassé pour résumer ce qui a fait l’objet de sa leçon de lecture ; il deviendra également plus fort pour écrire en orthographe ; car ordinairement l’élève fort en lecture, c’est à dire qui lit aisément, qui prononce distinctement les mots écrits assez bien sous la dictée. Du reste les hommes éminents qui nous gouvernent et qui veulent le bonheur du peuple ont compris que les bibliothèques étaient destinées à rendre de grands services dans le but d’instruire la jeune (sic). Cette œuvre est fortement encouragée, on ne néglige rien pour répandre autant que possible les bienfaits de l’instruction. Car c’est par l’instruction que l’on devient plus intelligent, plus apte à gagner son pain et surtout on devient meilleur. On voit presque toujours un élève qui commence à prendre du goût pour la lecture devenir plus raisonnable d’espiègle qu’il était, il devient plus sage, il est plus sérieux et c’est alors qu’il commence à faire quelque progrès. La bibliothèque contient soixante-six ouvrages et il faut espérer que la commune encouragée par les concessions du Ministère s’imposera encore quelques petites sommes pour dôter (sic) la bibliothèque d’une assez bonne concession de livres et certainement à son tour l’autorité compétente continuera ses concessions pour encourager la commune à ne point regretter les petites sommes qu’elle affecte pour l’achat de quelques ouvrages pour la bibliothèque scolaire. La caisse des écoles n’a pas été créée, seulement certains élèves ont de l’argent versé à la caisse postale. Aussitôt qu’ils ont un franc ou qu’ils ont un compte rond de francs, ils s’empressent de les remettre au facteur pour les faire inscrire de suite dans leurs livrets. Que les maîtres habituent les élèves à aimer les épargnes, ils prendront étant jeunes le goût d’employer avantageusement les quelques sous qui pourront tomber entre leurs mains et une fois devenus grands ils marcheront sur la même voie et ils vivront dans l’aisance. C’est une véritable émulation entre les enfants pour celui qui fera le premier et le plus fort placement ; s’ils sont en possession de quelques sous ils ne le (sic) dépenseraient pas de longtemps pour acheter des jouets ou des friandises, ils seront fiers de pouvoir le placer à la caisse d’épargne postale. Le traitement de l’instituteur est de 1250 francs et celui de l’institutrice et de 900 francs. Les locaux habités par les deux fonctionnaires appartiennent à la commune ; seulement ils devraient être, comme il a été déjà dit, remplacés par des constructions nouvelles. La salle d’école des filles est louée pour une période de cinq ans moyennant un prix annuel de 70 francs. Quel serait le devoir de la commune pour loger convenablement les fonctionnaires de l’enseignement ? Ce serait de se mettre en mesure de créer des fonds pour construire un local qui renfermerait le logement pour l’institutrice et ainsi que la salle d’école de filles ; ou si l’administration supérieure le jugeait convenable, on pourrait construire un groupe scolaire ; l’essentiel serait de mettre bientôt la main à l’œuvre. Que l’administration communale voulût prendre un peu au sérieux cette question et s’en occuper immédiatement. L’état ne manquerait pas de son coté d’accorder une subvention bien large qui permettrait de faire quelque chose pour améliorer la situation critique des fonctionnaires de l’enseignement. Le moyen de réaliser ce projet, c’est que la commune veuille s’imposer quelques sacrifices, faire un emprunt si c’est nécessaire et y mettre surtout de la bonne volonté car comme l’on dit proverbialement, celui qui veut la fin doit vouloir les moyens et la commune ne pourra qu’y gagner sous tous les rapports. D’abord les fonctionnaires seront plus portés à faire mieux encore leurs devoirs, la santé des maîtres ainsi que celle des enfants ne sera pas en danger d’être compromise. Si les salles de classe sont établies conformément aux prescriptions réglementaires, la bonne application et la discipline de l‘école ne pourront qu’y gagner, de sorte que les progrès des élèves en seront bien plus satisfaisants. La commune gagnerait encore une bonne note auprès de l’administration supérieure, lorsque celle-ci voudra remplacer les fonctionnaires elle fera certainement attention si la commune a fait son devoir ou au moins si elle a fait un peu ce qu’elle aurait pu. Aussi l’intérêt de la commune serait de prendre à cœur la question des logements des fonctionnaires afin de profiter des libéralités qu’accorde l’état.

A Germs, le 31 mars 1887 L’instituteur J Courrèges

La transcription a été réalisée par Philippe MANIETTE en respectant la graphie de l’instituteur. NB – Ce texte est la propriété des Archives Départementales des Hautes-Pyrénées. Sa reproduction et sa vente sont interdites.