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Ciné-Bulles

Panique en banlieue Little Children de Stéphane Defoy

Volume 25, Number 1, Winter 2007

URI: https://id.erudit.org/iderudit/60799ac

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Publisher(s) Association des cinémas parallèles du Québec

ISSN 0820-8921 (print) 1923-3221 (digital)

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Cite this note Defoy, S. (2007). Panique en banlieue / Little Children de Todd Field. Ciné-Bulles, 25(1), 59–60.

Tous droits réservés © Association des cinémas parallèles du Québec, 2007 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/

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Surtout, MacDonald a su illustrer com­ 4 ment un tyran réussit à maintenir l'opi­ Le récit s'oriente autour de deux person­ fi nion publique de son côté par une image nages, un homme et une femme trentenaires Tha Last King of Scotland charismatique, patriotique et optimiste. • demeurant à la maison à temps plein avec qualifié de bouffon meurtrier. En fait, leurs jeunes enfants tandis que leur con­ MacDonald dresse le portrait d'un tyran joint respectif occupe un emploi bien rému­ The Last King of Scotland obsédé par son image positive, laquelle con­ néré. Une rencontre fortuite dans un parc tribue à le maintenir au pouvoir. Sa bouffon­ 35 mm / coul. /121 min / 2006 / fict. / amènera les deux individus à se rapprocher nerie voile la terreur qui entoure l'Ouganda Royaume-Uni-Allemagne pour finalement conduire à une liaison à mais aussi sa propre existence puisque la fois torride et hasardeuse. Évacuant en Amin manifeste constamment des sautes Real. : Kevin McDonald Seen. : Jeremy Brock partie l'approche satirique de la nouvelle d'humeur et des crises de paranoïa. Habi­ Image : Anthony Dod Mantle de Perrotta, le réalisateur nous présente un lement, il regagne aussitôt la confiance de Mont. : Justine Wright monde qui, derrière la tyrannie du confor­ ses proches en tournant la situation à la bla­ Prod. : Cowboy Films Dist. : Fox Searchlight Pictures misme, camoufle sa part d'aspirations gue ou par des taquineries enjôleuses. Int. : Forest Whitaker, James McAvoy, déçues. Ainsi, les personnages de Brad Kerry Washington, Gillian Anderson (Patrick Wilson) et Sarah () Le roi d'Ecosse est le titre que s'est lui- parviennent à se satisfaire d'un quotidien même donné Idi Amin Dada. L'Ecosse et peu stimulant en se réfugiant dans leurs l'Ouganda ont en commun un mouvement Little Children illusions de jeunesse. Brad passe des heures d'indépendance face à l'Angleterre. Ce titre de Todd Field à regarder les prouesses de jeunes skaters, ne révèle pas seulement la face délirante • rêvant de se joindre à eux pour leur démon­ et irrationnelle du dictateur : il affirme l'ap­ trer ses capacités malgré la trentaine avan­ partenance imaginaire d'Amin à une nation cée. De son côté, Sarah participe à un club luttant pour son autonomie. De même, Panique de lecture et finit par s'identifier au per­ Amin se déclara conquérant de l'Empire en banlieue sonnage d'Emma Bovary du roman de Flau­ britannique quand l'Angleterre rompit ses bert, femme mal mariée refusant sa triste relations avec son régime. Cette complexité STÉPHANE DEFOY destinée. Loin de se laisser gagner par les identitaire rappelle le célèbre documen­ rêveries de ses protagonistes, Little Chil­ taire Les Maîtres fous de Jean Rouch, dren se plaît à ramener les amants dans dans lequel les Hauka deviennent possédés écidément, la classe moyenne une réalité qui ne cesse de se détériorer. par l'esprit des colonisateurs français au nord-américaine des calmes ban­ S'ajoute à ce portrait désenchanté d'une cours d'un rituel : même inversion d'iden­ lieues cossues représente une inta­ D société prisonnière de son conservatisme, tité, même transfert imaginaire accentuant rissable source d'inspiration pour bon nom­ la présence d'un pédophile remis en liberté la ressemblance ou la dissemblance d'un bre de talentueux réalisateurs. Le cynique (comme dans le film de Morin), créant un individu ou d'une communauté par rapport Todd Solondz y campe l'action de l'en­ véritable climat de paranoïa au sein de la à un autre groupe. semble de ses réalisations (Welcome to petite communauté. the Dollhouse, Happiness, Storytelling). Le personnage d'Amin est saisissant tandis Le Britannique Sam Mendes dépeint cet que celui de Garrigan est aussi naïf qu'en­ univers conformiste avec un humour déca­ Il ne faut pas se laisser berner par le titre nuyeux. Dommage que la présence de ce pant dans son meilleur film à ce jour, Ame­ du film (faisant référence à la fois aux en­ dernier finisse par envahir le récit au détri­ rican Beauty. Plus près de nous, Robert fants du récit de même qu'à l'immaturité ment de celle d'Amin. Dommage aussi Morin s'attarde aux angoisses et aux insa­ des personnages adultes), en apparence que les faits historiques soient obscurcis tisfactions banlieusardes dans Que Dieu anodin. Little Children s'avère une radio­ par une banale intrigue de tricherie bénisse l'Amérique. Et voilà que le comé­ graphie scrutant un pan de la population, sexuelle. Le film aurait pu être l'occasion dien Todd Field, qui avait impressionné confinée à l'étroitesse de ses préjugés.

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Little Children Dépassant le portrait caricatural de la ban­ Candy) en beau et bon gars rêveur. Aussi, dérouté par les événements et par les pres­ lieue, Field s'applique à déployer avec les comédiens qui campent les personnages sions d'Avalon, la compagnie qui emploie assurance une intrigue dense et complexe secondaires sont tous marquants, à com­ Ilona et qui veut la retrouver au plus vite, où derrière l'idylle d'un amour d'été se mencer par Jackie Earle Haley, assumant Karas s'enfonce dans un univers étrange cachent de grandes tragédies. Grâce à une le rôle ingrat du cadavérique abuseur d'en­ où les codes éthiques ne tiennent plus. Si mise en scène précise et rigoureuse, le réali­ fants. À mille lieues des séries télévisées à Renaissance a gagné le Cristal du long sateur entremêle la sensualité et l'angois­ la Desperate Housewives qui limitent leur métrage au Festival international du film se, l'intensité du désir et la progression du regard aux futiles doléances de riches fem­ d'animation d'Annecy en 2006, ce n'est pas sentiment de crainte. Il sait également faire mes de banlieue, Little Children représente seulement pour la qualité de son scénario culminer des segments vers des scènes frap­ une œuvre à la fois réaliste et courageuse, qui, du reste, comprend beaucoup de déjà- pant l'imagination. À cet effet, l'apparition ne versant jamais dans la tragédie grotes­ vu. Le premier film de Christian Volckman que. • subite du pédophile dans la piscine publi­ est, en effet, principalement remarquable que bondée d'enfants montre à quel point pour ses qualités esthétiques et techniques l'irrationnel peut devenir contagieux. qui en font un objet unique, un polar visuel­ Renaissance lement saisissant. Il faut noter les prestations exemplaires de Christian Volckman Kate Winslet (Titanic, Eternal Sunshine Entièrement en noir et blanc, sans niveaux of the Spotless Mind) en mère insatis­ de gris, les images de Renaissance rappel­ faite et de Patrick Wilson (Alamo, Hard Un polar lent les œuvres de la peintre polonaise visuellement Tamara de Lempicka, particulièrement Little Children son autoportrait qu'elle réalisa en 1929. saisissant On retrouve dans le film de Volckman un 35 mm / coul. /140 min / 2006 / fict. / États-Unis type de cadrages et un niveau de contrastes

Réal. : Todd Field CATHERINE OUELLET-CUMMINGS semblables à ceux des œuvres marquantes Seen. : Todd Field et Tom Perrotta de la peintre dans les années 1930. Ce n'est Image : Antonio Calvache d'ailleurs pas la seule référence à cette Mus. : Thomas Newman aris,2054. IlonaTasuiev, une jeune Mont. : Leo Trombetta scientifique promise à une brillante période : l'architecture magnifiée, l'univers Prod. : New Line Cinema carrière, est kidnappée. Spécialisé labyrinthique et l'imagerie futuriste rappel­ Dist. : Vivafilm P dans les affaires d'enlèvement, le policier lent à plusieurs égards le célèbre Cabinet Int. : Kate Winslet, Patrick Wilson, Jackie Earle Haley, , Noah Emmerich Karas prend l'enquête en main. Rapidement du docteur Caligari (Robert Wiene,

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