Synthèse bibliographique sur l’écologie des Syrphidae

Projet CASDAR « les entomophages en grandes cultures » : diversité, service-rendu et potentialités des habitats.

Auteurs : Adrien Jean, Charlotte Dor, Julie Maillet-Mezeray (ARVALIS-Institut du Végétal), Relecteurs : Véronique Sarthou (Syrphys Agro-Environnement), Nina Rabourdin (ACTA) Juin 2011

Sommaire

Synthèse bibliographique sur l’écologie des Syrphidae ...... 1 Projet CASDAR « les entomophages en grandes cultures » : diversité, service-rendu et potentialités des habitats...... 1 Juin 2011 ...... 1 Sommaire ...... 1 Introduction ...... 2 1. Intérêt des syrphes en grandes cultures ...... 3 1.1. Les pucerons, ennemis des grandes cultures ...... 3 1.1.1. Les pucerons des céréales ...... 3 1.1.2. Les pucerons présents sur les autres grandes cultures ...... 4 1.1.3. Des dégâts directs et indirects ...... 4 1.1.4. Contrôle biologique des pucerons ...... 4 2. Reconnaissance et biologie générale des Syrphes ...... 5 2.1. Morphologie ...... 5 2.1.1. Caractéristiques communes aux diptères ...... 5 2.1.2. Spécificités des Syrphidés ...... 5 2.2. Habitats et répartition française ...... 6 2.2.1. Habitats ...... 6 2.2.2. Répartition en France ...... 7 2.3. Cycle biologique ...... 8 2.3.1. Cycle ...... 8 2.3.2. Eléments relatifs à la ponte ...... 8 2.3.2.1. Facteurs influant la ponte : cas particulier de E. balteatus ...... 9 2.3.2.2. Hauteur de ponte ...... 10 2.3.3. Période de vol ...... 10 2.3.3.1. Nombre de générations par an ...... 10 2.3.3.2. Stratégies d’hivernation ...... 11 2.4. Régimes alimentaires ...... 12 2.4.1. Adultes ...... 12 2.4.2. Larves ...... 13 2.4.2.1. Spécialisation alimentaires ...... 13 2.4.2.2. La spécificité de prédation des larves : ...... 14 2.4.2.3. La voracité des larves :...... 14 3. Pratiques agricoles : impacts et propositions ...... 15 3.1. Evaluation de l’impact des pratiques agricoles sur les communautés de syrphes ..... 15 3.1.1. A l’échelle locale ...... 15 3.1.1.1. Dans les parcelles ...... 15 3.1.1.2. Dans les aménagements ...... 17 3.1.2. A l’échelle du paysage ...... 18 3.1.2.1. Influence de l’ouverture du paysage sur les syrphes non aphidiphages ..... 18 3.1.2.2. Influence de l’ouverture du paysage sur les syrphes aphidiphages ...... 19 3.1.2.3. Etude du comportement d’E. balteatus ...... 20 3.2. Propositions de pratiques d’optimisation du contrôle biologique ...... 21 Conclusion ...... 23 Références bibliographiques ...... 24

Introduction

Le remembrement, la revalorisation des terres et la modification des pratiques agricoles vers une plus forte intensification depuis les années 50 en Europe ont entraîné une importante modification de la structure des paysages. Elle se traduit principalement par une augmentation de la fragmentation et une diminution de la connectivité entre les habitats. Parallèlement, les progrès dans le domaine de la protection des plantes ont largement contribué à l’augmentation des rendements et à la régularité de la production. Faciles d’accès et d’emploi, relativement peu chers, les produits phytosanitaires de synthèse se sont révélés très efficaces et fiables dans un nombre important de cas, sur de grandes surfaces. L'agriculture française a, plus que d'autres, développé des systèmes de production fondés sur l'utilisation de ces produits, Elle apparaît actuellement très dépendante des pesticides, et fait de la France le troisième consommateur mondial de produits phytosanitaires ( Scess et UIPP , 2000). Ce modèle commence à montrer ses limites car après une constante augmentation depuis la fin de la seconde guerre mondiale les rendements en grandes cultures stagnent depuis une dizaine d’années (source : statistique Agreste 2006). La plupart des grandes cultures sont concernées, principalement les céréales telles le blé tendre, le blé dur, l’orge et le triticale, mais aussi les cultures oléagineuses comme le colza et le tournesol. Aujourd’hui le constat est bien réel : l’utilisation importante des pesticides dans les parcelles ainsi que la transformation des paysages agricoles suite à l’intensification de la production est responsable du sévère déclin de la biodiversité dans les agroécosystèmes des pays industriels (Ewald et Aebischer , 2000). Peu à peu, les politiques agricoles européennes et nationales s’orientent vers une volonté de produire différemment ; la PAC a renforcé la conditionnalité environnementale des aides agricoles. Par ailleurs, la loi de programmation relative au Grenelle de l’environnement fixe l’objectif de réduire de moitié les usages des produits phytopharmaceutiques en 10 ans en accélérant la mise en place de méthodes alternatives. Suite à cet objectif, l’INRA a lancé en 2007 une étude sur les itinéraires culturaux économes en pesticides donnant naissance en 2010 au rapport « Ecophyto R&D : quelles voies pour réduire l’usage des pesticides ». Une des pistes exploitées par les chercheurs et agronomes consiste à préserver et à augmenter les populations d’auxiliaires naturellement présents dans les agroécosystèmes : c’est la « Lutte Biologique par Conservation et Gestion des Habitats ». Cette dernière se traduit par l’aménagement d’infrastructures écologiques (haies, bandes enherbées, jachères fleuries…) permettant de fournir aux auxiliaires ressources trophiques et abri. Selon ce même rapport cette méthode pourrait s’appliquer aux grandes cultures. C’est dans ce contexte de mini révolution agricole que de nombreuses études se sont intéressées à la famille des Syrphidés afin de caractériser son comportement et d’évaluer son efficacité en tant qu’auxiliaire des cultures. L’étude bibliographique suivante vise à comprendre pourquoi les Syrphidés peuvent être considérés comme des alliés de l’agriculteur. Pour cela, la biologie de cette famille sera d’abord évoquée, ainsi que les habitats qu’occupent les différentes espèces en France. Dans un deuxième temps, seront présentés les impacts des pratiques agricoles à l’intérieur mais également en bordure des parcelles sur le développement des syrphes et des propositions de pratiques permettant l’optimisation du contrôle biologique. Enfin, l’influence de l’ouverture du paysage sur l’abondance et la capacité de dispersion des syrphes sera étudiée.

1. Intérêt des syrphes en grandes cultures Les syrphes sont, pour la plupart, des auxiliaires ayant pour cible principale les pucerons, qu’ils attaquent au stade larvaire, les adultes étant surtout floricoles. Nous nous intéresserons en particulier aux syrphes dits « aphidiphages », le terme latin « aphis » désignant le puceron. La biologie de ces ravageurs est présentée ci-dessous.

1.1. Les pucerons, ennemis des grandes cultures

Insectes au tégument mou, petits (2 à 4 mm), en forme de poire aplatie, les pucerons appartiennent à l’ordre des Hémiptères, au sous-ordre des Homoptères et à la famille des Aphididés. Plus de 4000 espèces sont répertoriées, dont 250 sont des ravageurs (Fraval , 2006) qualifiés de de piqueurs-suceurs, se nourrissant de sève élaborée. On les retrouve tant sur les cultures maraîchères qu’en verger ou en grandes cultures. Les pucerons présentent plusieurs modes de reproduction, avec des phases sexuées et asexuées (parthénogénèse). Leur cycle se déroule sur plusieurs hôtes végétaux : - un hôte primaire sur lequel ils pondent leurs œufs d’hiver (à l’automne). - un hôte secondaire de la même famille botanique (pucerons monoéciques) ou d’une famille différente (pucerons dioéciques), sur lequel ont lieu les pullulations printanières, permises par une multiplication asexuée très rapide ; les adultes engendrent des larves qui possèdent en elles les embryons de la génération suivante. Cet emboîtement permet un développement très rapide ( Leclant , 1978). Le cycle peut se faire avec ou sans œuf d’hiver (holocyclie / anholocyclie) ; chez Rhopalosiphum padi par exemple, la rareté de l'hôte primaire dans les régions à céréaliculture intensive entraîne le plus souvent l'anholocyclie.

1.1.1. Les pucerons des céréales

Il existe de nombreuses espèces de pucerons associées aux céréales (hôte secondaire), mais seules trois sont considérées comme pouvant avoir des répercussions économiques sous nos climats ( Jarosik et al., 2002) : • Sitobion avenae , plutôt monoécique car inféodé aux graminées colonise les céréales en s’installant sur le limbe des feuilles puis sur les épis dès leur sortie. • Rhopalosiphum padi est une espèce dioécique (hôte primaire : Prunus padus , le Merisier à grappes). - A l’automne, la levée des céréales coïncide avec la reproduction sexuée sur le prunier, les œufs représentant la « forme de résistance au froid ». - Pendant l’été, l’hôte principal est le maïs. Les femelles parthénogénétiques sont très fécondes. Tous les individus sont aptères - A l’automne suivant, les femelles (parthénogénétiques) donnent naissance à des individus sexués ailés. Ces derniers quittent l’hôte secondaire pour aller se reproduire sur l’hôte primaire (prunier). • Metopolophium dirhodum est également une espèce dioécique, il pond ses œufs d’hiver sur des plantes du genre Rosa .

1.1.2. Les pucerons présents sur les autres grandes cultures

• Brevicoryne brassicae, (le puceron cendré) a un cycle qui se déroule entièrement sur les crucifères cultivées (chou, colza). Il présente aussi une alternance de reproduction sexuée et de reproduction asexuée au printemps et pendant l’été. Les œufs éclosent à la fin de l’hiver et donnent naissance à des femelles fondatrices. La dissémination a lieu lors des périodes de vol durant l’été. • Myzus persicae (le puceron vert du pêcher) est une espèce extrêmement polyphage. Outre son hôte primaire, le pêcher, on le trouve sur de nombreuses plantes comme la betterave, la pomme de terre ou le colza.

1.1.3. Des dégâts directs et indirects

Pour ces 5 espèces de pucerons, on observe deux types de dégâts :

La spoliation de la sève ainsi que la toxicité de la salive entraînent des dégâts directs : Flétrissement des feuilles, diminution de la croissance voire chlorose. Par exemple sur les crucifères, les colonies de B. brassicae se développent jusqu’à recouvrir la plante et handicaper sa croissance. Les piqûres des femelles déforment les hampes florales et provoquent l’avortement des fleurs, l’échaudage et la chute des grains. La nuisibilité est particulièrement importante lorsque les pucerons cendrés arrivent précocement et se multiplient tôt.

Beaucoup plus préjudiciables en général, les dégâts indirects ont plusieurs composantes : brûlure des feuilles et développement de fumagine* dus au rejet de miellat, et surtout transmission de virus, en particulier la Jaunisse Nanisante de l’Orge* (VJNO ou BYDV pour Barley Yellow Darf Virus), qui peut entraîner des pertes de rendements considérables ( Fabre et al., 2006), et affecte toutes les céréales à paille. Il s’agit d’un virus à ARN qui se propage dans les vaisseaux conducteurs de sève provoquant ainsi des bouchons. Les symptômes sont un jaunissement et une réduction de la taille de la plante pouvant aller jusqu’à sa mort. Pour Arvalis, la nuisibilité de la jaunisse nanisante de l’orge est très élevée, elle peut facilement atteindre 12 à 15 quintaux/ha et même obliger l’agriculteur à retourner sa parcelle. Rhopalosiphum padi est le principal vecteur de la JNO sur les céréales (orge, avoine, blé). Les individus parthénogénétiques colonisent les repousses de céréales à l’automne et transmettent la JNO. Si le semis suivant est fait précocement il y a une transmission importante des repousses aux jeunes céréales, mais également du maïs aux jeunes céréales. Les deux autres espèces et notamment Sitobion avenae sont aussi des vecteurs de la JNO, mais l’impact est beaucoup moins important puisque les plants de céréales sont à un stade de développement plus avancé qu’à l’automne. Cependant, cette espèce provoque d’importants dégâts directs au printemps, surtout si la plante est déjà affaiblie. Metopolophium dirhodum se surajoute à l’effet des deux autres pucerons (dégâts directs et indirects). En plus des dégâts primaires liés au prélèvement de sève et au développement de fumagine, Myzus persicae est également un vecteur de plusieurs virus sur la pomme de terre.

1.1.4. Contrôle biologique des pucerons

Les pucerons des céréales ont de nombreux ennemis naturels, pouvant être classés en plusieurs groupes selon le type de pression qu’ils exercent sur les ravageurs :

• Les parasitoïdes Ils se développent aux dépens d’un individu hôte et entraînent obligatoirement sa mort: la femelle pond un œuf dans le corps d’un puceron, qui continue à vivre jusqu’à éclosion de la larve. Le puceron devient alors une enveloppe vide, gonflée et dorée communément appelée « momie ». Micro-hyménoptères principalement de la famille des Aphidiidés ( Aphidius sp., Aphelinus sp., Praon volucre ,…), leurs cycles de vie sont de l’ordre de quelques semaines et ils peuvent même rester actifs l’hiver, en cas d’anholocyclie de leurs hôtes.

• Les prédateurs Il existe des prédateurs généralistes (Carabes, Staphylins et Araignées sont les principaux), qui chassent le plus souvent leurs proies au sol et n’ont qu’un impact limité, principalement à l’installation des pucerons dans la culture ( Brewer et Elliot , 2004). Les prédateurs plus spécialistes, voire uniquement aphidiphages que sont les syrphes , les coccinelles et les chrysopes, sont généralement aphidiphages au stade larvaire et floricoles au stade adulte. La spécialisation de ces derniers et tout particulièrement des larves de syrphe en font des auxiliaires potentiellement très efficaces dans le contrôle biologique des pucerons. C’est pourquoi de plus en plus de recherches et d’expérimentations sont mises en œuvre afin de comprendre et d’évaluer le fonctionnement de prédation de la larve du syrphe en grandes cultures. 2. Reconnaissance et biologie générale des Syrphes

2.1. Morphologie

2.1.1. Caractéristiques communes aux diptères

Les Syrphidés sont une famille de Diptères. L’une des plus importantes caractéristiques distinctives des Diptères est le fait que les adultes de ces insectes ont une seule paire d’ailes membraneuses. Chez les Diptères, la seconde paire d’aile présente normalement chez les insectes s’est muée en une paire d’organes gyroscopiques stabilisateurs connus sous le nom d’haltères ou de balanciers. Une seconde caractéristique de nombreux Diptères, syrphes inclus, réside en une modification importante des pièces buccales : les mandibules ont disparu et ont été remplacées par une structure spongieuse, le labelle, au travers de laquelle ces insectes absorbent la majeure partie de leur nourriture.

2.1.2. Spécificités des Syrphidés

La majorité des syrphes présentent une particularité sur les ailes, à savoir une fausse veine ou vena spuria , localisée près du centre de l’aile et plus ou moins parallèle à l’axe longitudinal de celle-ci. Cette fausse veine est la caractéristique principale permettant de distinguer les syrphes des autres Diptères. Les syrphes possèdent une autre caractéristique qui leur est propre, à savoir la présence d’un faux bord, c’est-à-dire qu’aucune nervure n’atteint l’extrémité de l’aile (cf « Figure 1 : Aile de syrphe » ci-après) (Speight et al., 2007).

Figure 1 : Aile de syrphe (d’après Van Veen , 2004).

Leur taille est très variée suivant les espèces. On peut rencontrer de tous petits spécimens qui ne mesurent pas plus de quelques millimètres et également des espèces beaucoup plus imposantes pouvant atteindre jusqu’à 3,5 cm de long comme Milesia craboniformis qui est la plus grande espèce d’Europe ( Sarthou, et Speight , 2005). De nombreuses espèces ressemblent aux abeilles ou aux guêpes et certaines ont un si bon mimétisme qu’il est difficile de les distinguer de leur modèle. On peut citer pour exemple Eristalis tenax ressemblant fortement à l’abeille domestique, les espèces de Chrysotoxum ayant des similitudes frappantes avec les guêpes sociales ( Vespula ) et Volucella bombylans qui ressemble de manière parfaite à un bourdon (Speight et al, 2007). On peut également citer le cas particulier de Myolepta dubia qui présenterait un mimétisme de la fourmi du genre Camponotus . En rabattant ses ailes le long de son abdomen ce syrphe pourrait intégrer la colonie de fourmi et y déposer ses œufs. La future larve pourrait par la suite se nourrir des œufs de fourmis sans être inquiétée ( Sarthou , 2007).

2.2. Habitats et répartition française

2.2.1. Habitats

Les syrphes couvrent une gamme d’écosystèmes extrêmement large. Les différentes espèces peuvent fournir des informations sur toutes les strates verticales des milieux, de la zone racinaire de graminées jusqu’à la canopée des arbres dominants en forêt. Ils sont également présents dans une large gamme d’habitats : il existe des espèces caractéristiques de presque tous les habitats présents en France excepté les habitats aquatiques des lacs et rivières, les falaises et les grottes. Tableau 1 : Les milieux colonisés par les syrphes Milieux forestiers Milieux ouverts Forêt de feuillus Formations herbacées Forêt de résineux Lisières forestières thermophiles Forêts alluviales Landes, marécages, tourbières Forêts sclérophylles Cordons dunaires et marais salés Forêts marécageuses Eboulis, moraines Formations arborescentes et buissonnantes Agro-écosystèmes méditerranéennes

On les retrouve notamment dans les agro-écosystèmes , représentant à la fois les cultures, les jachères et les autres zones de compensations écologiques (haies, bords de champs, talus, friches…). Suivant les habitats, les espèces rencontrées diffèrent, leur niveau de spécificité étant variable. En effet, certaines espèces sont présentes dans une large gamme d’habitats (comme Episyrphus balteatus ) d’autres sont plus spécifiques d’un nombre très restreint ou même d’un seul habitat (comme Callicera fagesii ou Chrysotoxum lineare ). Ces dernières se révèlent ainsi être, contrairement aux espèces type E. balteatus, de bons indicateurs écologiques* d’habitats [(espèce végétale ou animale dont la présence ou l’absence révèle certaines caractéristiques de l’environnement)] contrairement aux secondes. ( Sarthou et Speight , 2005).

2.2.2. Répartition en France La base de données Syrfid fournit des informations interactives sur les observations des espèces de Syrphidés en France. Les départements peuvent y être caractérisés par le nombre d’espèces (ou richesses spécifiques) observées à ce jour (cf. Figure 2).

Figure 2 : Carte des richesses spécifiques départementales 2006 (légende en nombre d’espèces) (source : www.syrfid.fr) Les différences observées entre les départements sont dues à des facteurs d’ordre climatiques, topologiques et paysagers mais également au nombre de prospections effectuées. Cette carte prend en compte l’ensemble des prospections qui ont été réalisées et qui ont fait

l’objet de publications. La fréquence et l’intensité des prospections sont variables en fonction des départements.

2.3. Cycle biologique

2.3.1. Cycle

Les syrphes passent un temps variable sous forme imaginale, fonction bien sûr de l’espèce considérée. La plupart des espèces s’accouplent dans les airs alors que d’autres comme Eupeodes corollae , E.voluris et Ischiodon scutellaris s’accouplent à terre. La femelle choisit un site où pondre ses œufs (isolément ou en petit amas comme le genre Platycheirus ) selon différents critères. Les œufs de couleur blanchâtre sont allongés et mesurent approximativement 1 millimètre de long pour les espèces aphidiphages. Généralement la maturation des œufs ne dure pas plus d’une semaine et donne naissance à une larve, le plus souvent de couleur transparente, vert pâle, jaunâtre ou brune. La larve est apode et acéphale, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de pattes et que la tête n’est pas différenciée du reste du corps. Cette dernière peut se développer en deux semaines seulement (c’est le cas pour Episyrphus balteatus ) ou rester 2 ans dans un dendrothelme (une cavité remplie d’eau et de débris organiques au niveau d’un tronc d’arbre (comme pour Callicera fagesii )) (Sarthou et Speight , 2005). Toutes les espèces de syrphes présentent trois stades larvaires bien différenciés. On observe la présence d’une « queue » postérieure constituée de deux tubes fusionnés qui portent les spiracles postérieurs. La forme des larves diffère de façon importante dans leur morphologie. Chez les syrphes, les tubes peuvent être réduits, comme chez la plupart des espèces aphidiphages, ou au contraire extrêmement longs comme chez les Eristalini. Chez les espèces aphidiphages, la larve en fin de développement mesure environ 1,5 cm et sécrète une déjection noire très visible, le méconium. La larve au troisième stade se métamorphose ensuite en pupe qui chez les espèces aphidiphages mesure en général aux alentours de 8 mm et peut prendre plusieurs formes : gouttelette restant accrochée au végétal (Episyrphus balteatus et Spaerophoria scripta), tonnelet ayant tendance à tomber au sol (Scaeva pyrastri et Eupeodes corollae ), ou autre. Au bout de 10 à 15 jours, la pupe donne un adulte et après fécondation entre mâle et femelle le cycle recommence.

2.3.2. Eléments relatifs à la ponte Les facteurs déterminant la ponte ont été très étudiés chez les Syrphidés prédateurs, il s’avère que ces espèces manifestent nettement deux comportements de ponte ( Chandler, 1968 cité dans Sarthou , 1996): Chez les espèces facultativement aphidiphages, les femelles pondent en une seule fois plusieurs œufs sur une plante susceptible d'être colonisée par des pucerons. Ces espèces sont appelées phytotropes et ont recours au cannibalisme voire à la phytophagie si le nombre de proie est insuffisant ( Melanostoma scalare , M. mellinum et Platycheirus sp ., excepté P. scutatus). Chez les espèces obligatoirement zoophages, les femelles ne pondent qu'en présence de pucerons, des œufs isolés les uns des autres. Le nombre d’œufs pondu correspondrait aux capacités de la colonie de pucerons à assurer la survie des larves. Ces espèces sont appelées aphidotropes . Il s’agit entre autres d’ Episyrphus balteatus, Eupeodes corollae, Sphaerophoria scripta et Scaeva pyrastri.

2.3.2.1. Facteurs influant la ponte : cas particulier de E. balteatus

Les prédateurs comme les syrphes répondent positivement à la perception de substances chimiques provenant de l’association entre les proies et les plantes hôtes. Une fois dans la parcelle cultivée, la femelle Episyrphus balteatus , qui peut par ailleurs pondre entre 2000 et 4500 œufs durant sa vie ( Sarthou , 2008), est soumise à de nombreux signaux qui influencent le choix du site de ponte. Plusieurs facteurs déterminants ont ainsi été retenus : • L’espèce de puceron, • Les caractéristiques physiques et chimiques de la plante hôte associée à l’espèce de puceron, • La taille et la densité de la colonie de pucerons, • L’âge de la femelle.

Le choix du lieu de ponte d’ E. balteatus semble fonction de deux paramètres principaux: la nature de la plante hôte et l’espèce de puceron, en particulier sa taille. Chandler (1968) a montré que la sélection d’un site de ponte appropriée par les syrphes femelles proche d’une colonie de pucerons est essentielle pour assurer la survie et le développement rapide des larves. Dans cette étude, on s’intéresse à la hauteur de ponte de plusieurs espèces de syrphes aphidiphages, sur des plants de féverole Vicia faba infestés par Aphis fabae. Et à la ponte sur différents substrats (tissus, feuilles de betteraves,…). Almohamad et al. (2007) a quant à lui étudié trois espèces de pucerons ( Acyrthosiphon pisum, Megoura viviae , et Aphis fabae ) et deux plantes-hôtes (pomme de terre Solanum tuberosum et morelle Solanum nigrum ), révélant ainsi une préférence pour S. tuberosum infestée par M. persicae et pour les pucerons de l’espèce A. pisum et M. viviae plutôt que A. fabae. Le développement larvaire (et la viabilité des œufs) n’est pas touchée par le choix de la plante-hôte, seules la nymphose et la métamorphose en adulte sont plus rapides, elle l’est par contre par l’espèce de puceron, déterminante dans le temps nécessaire pour arriver au stade pupe (plus long dans le cas de A. fabae ), sans pour autant jouer sur le taux de survie larvaire. En termes de « performance larvaire », cette étude ne révèle aucune influence de la plante hôte sur la fécondité mais la valeur d’adaptation biologique est significativement supérieure sur pomme de terre. Le choix de l’espèce de puceron a lui une influence sur la performance biologique, plus élevée chez les larves se nourrissant de M. viciae (en comparaison avec A. pisum ). La raison pour laquelle E. balteatus préfère une plante plutôt qu’une autre reste incertaine. Lorsque les prédateurs tentent de localiser l’habitat d’une proie, ils utilisent généralement des senteurs associées à la présence de la proie, émanant de la proie elle-même ou de ce qu’elle produit (fèces, miellat…) ( Francis et al., 2005). Les prédateurs peuvent également utiliser les molécules volatiles produites par les plantes en réponse aux dommages causés par les phytophages. Les résultats ont également confirmé que le choix du site de ponte est fonction de l’espèce de puceron, la taille du puceron pouvant intervenir de façon non négligeable. Le stimulus de ponte pourrait également venir du miellat, qui varie en quantité et en qualité d’une espèce à une autre et durant la saison. Une meilleure connaissance de ces préférences permettrait peut-être de sélectionner des couverts végétaux et des aménagements agro- écologiques parcellaires favorables aux syrphes.

2.3.2.2. Hauteur de ponte

Une étude menée dans les années 1965 et 1966 s’est penchée sur les hauteurs auxquelles les différentes espèces de syrphes déposent leurs œufs (Chandler , 1968). Les expérimentations, réalisées dans des champs de féverole ( Vicia faba ) artificiellement infestés avec Aphis fabae ont permis de caractériser des hauteurs préférentielles de ponte pour plusieurs espèces de syrphes. En général, la préférence de hauteur montrée par les différentes espèces de syrphes est conforme avec leur préférence d’habitat. Ainsi, les espèces présentes au début du printemps (Melangyna lasiophthalma et Epistrophe eligans ) correspondent à des infestations de pucerons sur arbres ou arbustes (peu sur plantes herbacées), et préfèrent donc des hauteurs proches de 180 cm. Les espèces du début de l’été ( Epistrophe nitidicollis et Leucozona lucorum ) préfèrent des hauteurs plus proches de 30 cm car leur période de ponte correspond à des périodes où les populations de pucerons diminuent sur les arbres et arbustes et se développent majoritairement sur les herbacées. Les espèces présentes toute l’année (Syrphus ribesii , Syrphus luniger ou Episyrphus balteatus ) n’ont pas de hauteur préférentielle. Elles ont donc la particularité de pouvoir trouver des pucerons dans n’importe quelles zones à n’importe quel moment. L’effet du vieillissement des femelles sur la hauteur de ponte a également été étudié (Chandler , 1968). Il en est ressorti que pour certaines espèces ( S. ribesii par exemple) quand la femelle est jeune elle préfère déposer ses œufs à une hauteur basse et plus haut quand elle vieillit. Ceci laisse entrevoir une possibilité de discrimination des aménagements agro- écologiques, autrement dit des caractéristiques des éléments paysagers « locaux », en fonction de leur taille, afin de favoriser certaines espèces de syrphes, avec un objectif de maintien et développement des populations de syrphes auxiliaires (aphidiphages).

2.3.3. Période de vol

2.3.3.1. Nombre de générations par an

Une étude menée durant 15 ans en Angleterre dans une région proche de Leicester a estimé le nombre de générations par an de 37 espèces de syrphes (Owen , 1991). Les différentes espèces ont été classées en 6 grands groupes présentés dans le tableau suivant :

Tableau 2 : Classement des espèces suivant la "stratégie biologique" adoptée (en rouge les espèces aphidiphages) Nombre/type stade Espèce de périodes Nombre de générations publications hivernant de vol Baccha elongata longue 2 larve Owen 1991 Cheilosia vernalis 2 2 pupe Owen 1991 Dasysyrphus albostriatus 2 2 variable Owen 1991 Epistrophe eligans 1 1 larve Owen 1991 Owen 1991 (1), Pollard 1971 (2) Episyrphus balteatus 2 1 (1-2) ou plusieurs (3) adulte et Schneider 1969 (3) Eristalis intricarius 1 1 larve Owen 1991

Owen 1991 (1) et Stubbs et Falks Eristalis pertinax 2 1 (1) ou plusieurs (2) adulte 1983 (2) Eristalis tenax 2 1 adulte Owen 1991 Eupeodes corollae 2 1 adulte Owen 1991 Eupeodes luniger 2 2 variable Owen 1991 Helophilus pendulus 2 1 adulte Owen 1991 Leucozona lucorum 1 1 larve Owen 1991 Owen 1991 (1) et Stubbs et Falks Melanostoma mellinum longue 2 (1) ou plus (2) larve 1983 (2) Owen 1991 (1) et Stubbs et Falks Melanostoma scalare longue 2 (1) ou plus (2) larve 1983 (2) Meliscaeva auricollis 2 1 adulte Owen 1991 Merodon equestris 1 1 larve Owen 1991 Neoascia podagrica 2 2 pupe Owen 1991 Platycheirus ambiguus 1 1 larve Owen 1991 Platycheirus angustatus longue 2 larve Owen 1991 Platycheirus clypeatus longue 2 larve Owen 1991 Platycheirus cyaneus longue plusieurs superposées larve Owen 1991 Platycheirus manicatus longue 2 larve Owen 1991 Platycheirus peltatus longue 2 larve Owen 1991 Platycheirus scutatus longue plusieurs superposées larve Owen 1991 Rhingia campestris 2 2 pupe Owen 1991 Sphaerophoria scripta 2 2 variable Owen 1991 Syritta pipiens longue plusieurs superposées larve Owen 1991 Owen 1991 (1) et Stubbs et Falks Syrphus ribesii 2 2 (1) ou plusieurs (2) variable 1983 (2) Syrphus vitripennis 2 1 adulte Owen 1991 Volucella bombylans 1 1 larve Owen 1991 Volucella pellucens 1 1 larve Owen 1991

2.3.3.2. Stratégies d’hivernation

Les syrphes optent pour différentes stratégies pendant les mois d’hiver. Pour certains c’est la femelle fécondée qui passe l’hiver tandis que d’autres préfèrent migrer vers des régions plus tempérées. En effet, certains syrphes, comme E.balteatus , Eupeodes corollae et Eristalis tenax, sont capables de voler sur de très longues distances, et donc d’entreprendre de véritables migrations lorsque le climat devient trop défavorable. D’autres modes d’hivernation ont été identifiés au stade larve ou pupe dans le sol, la carapace chitineuse permettant de résister aux grands froids et donc d’éviter une migration vers le Sud. ( Speight , 2008). De même certaines espèces peuvent passer l’hiver au stade adulte : espèce gynohivernante (femelle) voire même présence de mâles. Une grande variabilité dans le nombre de générations et le stade d’hivernation est observée pour de nombreuses espèces.. Sphaerophoria scripta , par exemple, est présenté comme ayant 2 générations par an (Pollard , 1971) et 3 ou 4 générations pour Bathia (1939). Il est reconnu comme hivernant sous forme de larve ( Scott , 1939), d’adulte ( Schneider , 1969) ou autre ( Bathia , 1939).

Lors d’une étude sur la dynamique de population d’ Episyrphus balteatus dans le paysage dans le sud-ouest de la France (Sarthou et al, 2005), il a été démontré que l’espèce présente trois stratégies d’hivernation : une partie des individus restant dans le paysage en hiver sous forme adulte, une autre dans le paysage sous forme pré imaginale et une dernière partie quittant la région et revenant au printemps. Ce sont précisément les individus hivernants qui vont être à même de pondre très précocement au printemps sur les cultures environnantes, empêchant ou limitant ainsi la pullulation des colonies de pucerons ( Arrignon , 2006).

2.4. Régimes alimentaires

2.4.1. Adultes

Les adultes manifestent une grande homogénéité lorsque l’on considère les grands types de régimes alimentaires. La quasi-totalité des espèces sont floricoles au stade imaginal et visitent assidûment une gamme plus ou moins large de phanérogames, généreusement pourvoyeuses de nectar, véritable carburant pour le vol, et de pollen. Certaines espèces sont spécialisées dans la récupération du pollen déposé sur les feuilles des arbres, arbustes et buissons, dont elles lèchent consciencieusement la surface avec leur labelle. De façon générale, les mâles se nourrissent de nectar principalement de fleurs jaunes ou blanches, car leurs pièces buccales relativement courtes ne leur permettent pas d’exploiter les fleurs nectarifères à corolle profonde très fréquemment ornées d’une coloration rose, rouge ou bleu. En effet, la phacélie ( Phacelia tanacetifolia ) qui est une Boraginaceae est inaccessible pour les syrphes mâles mais l’intérêt de la fleur pour les syrphidés aphidiphages femelles est reconnu ( Bugg , 1992, Hickman , 1995, Irvin et al, 1999). Les fleurs de Fabaceae dont certaines légumineuses fourragères comme les trèfles ou la luzerne ( Medicago sativa L.) ne sont pas accessibles aux syrphes mâles (Francis et al, 2005). Certaines possèdent cependant des nectaires extra floraux qui sont eux accessibles comme c’est le cas de la féverole. Les syrphes femelles, quant à elles, se nourrissent de nectar mais aussi abondamment de pollen, qui leur procure les protéines dont elles ont besoin pour la maturation des œufs. Les différentes espèces se distinguent par la famille botanique qu’elles exploitent le plus : les genres Melanostoma et Platycheirus se focalisent sur les espèces anémophiles (pins, coquelicots, plantins et Poacées) tandis que d’autres espèces aphidiphages préfèrent les Apiacées blanches (E. balteatus, S. scripta, E. corollae, S. pyrastri) et les Astéracées jaunes (S. ribesii ) (Speight et al, 2007)

Une expérimentation menée durant l’année 2008 à Pleine-Fougères en Bretagne (Couanon , 2008) a révélé par l’étude de la composition de l’intérieur des jabots de syrphes aphidiphages les pourcentages des différents pollens consommés par les syrphes femelles. Les résultats ont révélé une faible diversité de pollen par jabot. En effet, un tiers des pollens consommés appartient à des plantes de la famille des Fabacées ( Trifolium repens, Lotus corniculatus ), 10% sont issus d’Astéracées et 8% d’Apiacées. La plupart des végétaux butinés sont des espèces prairiales ( Lotus corniculatus, Sonchus asper asper, Trifolium sp ., etc…) Quelques traces de pollen de Poacées ont également été retrouvées dans le jabot des syrphidés étudiés. Cependant, les bandes enherbées présentes dans le paysage agricole au moment de l’étude étant principalement composées de Poacées, suggérant une faible attractivité de celles- ci envers les auxiliaires syrphidés au vu de la composition du contenu digestif. D’autres études soulignent que les espèces à fleurs à corolles plates comme les Renonculacées et Rosacées sont intéressantes et attractives pour les syrphes auxiliaires ( Francis et al, 2005).

2.4.2. Larves

2.4.2.1. Spécialisation alimentaires

Les spécialisations alimentaires des larves de syrphe sont plus variées que celles des adultes. On dénombre ainsi 3 groupes différents qui seront présentées du plus rare au plus fréquent (en nombre d’espèces).

Les larves phytophages (environ 20% des espèces), forent pour la plupart les feuilles, la base des tiges, les grosses racines ou les bulbes des plantes non ligneuses. Elles correspondent à 130 espèces en France et approximativement 180 espèces en Europe. Trois genres de la sous famille des Milesiinés entrent dans cette catégorie : Cheilosia, Eumerus et Merodon.

Le deuxième régime alimentaire (30%des espèces) est constitué par des larves saprophages ou microphages qui utilisent une large palette de plantes en décomposition, se nourrissent d’organismes microscopiques et des tissus en décomposition. Elles peuvent également se nourrir dans les coulées de sève. Certaines larves microphages, se développent à la surface de fosses à lisier ou dans des trous présentant une accumulation de jus et résidus de fumier et d’ensilage. Toutes les larves ayant ce régime alimentaire ont la particularité de se nourrir de microorganismes comme des bactéries ou des protozoaires. Elles représentent le deuxième type de régime avec 150 espèces dénombrées en France et 200 en Europe. Certaines espèces microphages appartiennent à la sous famille des Eristalinés (par exemple Eristalis tenax ) et à la famille des Milesiinés. Beaucoup de ces larves sont subaquatiques ou aquatiques (Speight et al, 2007).

Les larves zoophages, se nourrissent pour la plupart d’homoptères à tégument mou, les pucerons étant de loin les proies les plus fréquentes. Mais certaines espèces sont véritablement polyphages et se nourrissent d’une grande gamme d’homoptères. Ce groupe est le plus important en termes d’individus, avec plus de 200 espèces en France (approximativement 40% du total dont 1/4 ont également d’autres comportements alimentaires). Elles font partie de la sous famille des Syrphinés et des Milesiinés. Episyrphus balteatus par exemple a été trouvé sur plusieurs dizaines d’espèces de pucerons différentes, ainsi que sur des cochenilles, des psylles, des cicadelles, ce qui en fait un auxiliaire de tout premier plan. D’autres espèces comme Syrphus ribesii, Scaeva pyrastri , Eupodes corollae ou Sphaerophoria scripta sont aussi considérées comme des auxiliaires importants car ils sont polyaphidiphages. Il existe également des syrphes zoophages spécialisés, s’attaquant par exemple aux larves de noctuelles, de tenthrèdes ou aux chenilles défoliatrices. Les femelles zoophages pondent leurs œufs à proximité ou même directement sur les espèces d’homoptères qui serviront de « garde-manger » pour les futures larves. La larve apode avance jusqu’à ce qu’elle rencontre un puceron, le soulève grâce à sa salive collante et le vide par aspiration. Des études sur deux populations de syrphes ( Tawfik et al, 1974, Wnuk , 1977) ont montré qu’ Episyrphus balteatus et Eupeodes corollae consomment respectivement approximativement 416 et 346 pucerons durant le stade larvaire en condition de laboratoire, ce qui en fait un prédateur très vorace. Leur consommation peut aller jusqu’à 1200 pucerons (Gilbert , 1986). La larve d’ E. balteatus est donc aphidiphage sur de nombreuses plantes qui peuvent être des cultures (betterave, laitue, pomme de terre, trèfle, orge…), des arbustes, (Buddleja, Euonymus, Sambucus ) et des arbres. La larve de cette espèce pourrait se nourrir de plus de 150 espèces de pucerons différentes, en plus d’autres proies non aphides ( Sarthou , 2008).

2.4.2.2. La spécificité de prédation des larves : Les espèces de syrphes dites « polyaphidiphages » sont peu affectées dans le choix de leur proie (espèce de pucerons ou plante hôte ( Dusek et Laska, 1966 cités dans Sarthou , 1996). Certaines comme Episyrphus balteatus peuvent être prédatrices de 215 espèces différentes de pucerons et cela sur des plantes hôtes diverses (Tableau 3). On comprend alors que ces espèces (Eupeodes corollae, E. luniger, Sphaerophoria scripta, Scaeva pyrastri, Syrphus ribesii, S. vitripennis, S. torvus, Epistrophe eligans,…) peuvent avoir un intérêt tout particulier dans le cadre de la lutte biologique par conservation . En effet, leur diversité de proie et de plante hôte leur permet de s’intégrer dans différents milieux et cultures, ce qui leur confère un rôle important dans une exploitation en grandes cultures non spécialisée. Par ailleurs, certaines espèces peuvent être plus spécialisées dans l’espèce de pucerons consommée : par exemple, Paragus bicolor n’est prédateur que de 3 espèces de pucerons (Tableau 3).

Espèce de Syrphidae considérée Nombre d’espèces (sp) d’ Aphidae Espèces d’Aphidae consommées consommées (en termes de service de protection des cultures) Eupeodes corollae Sitobion avenae (céréales) Rhopalosiphum padi (céréales) 121 sp Acyrthosiphon pisum (pois) Metopolophium dirhodum (céréales) Melanostoma mellinum Sitobion avenae (céréales) Rhopalosiphum padi (céréales) 21 sp Acyrthosiphon pisum (pois) Metopolophium dirhodum (céréales) Melanostoma scalare Sitobion avenae (céréales) 10 sp Acyrthosiphon pisum (pois) Metopolophium dirhodum (céréales) Paragus bicolor Aphis craccivora (luzerne) 3 sp Aphis fabae (fève) Dysaphis sp. (pommier poirier) Pipizella sp . Peu ou pas d’Aphidae Consommation de Psyllidae Platycheirus sp . 2 sp Acyrthosiphon pisum (pois) Scaeva pyrastri Sitobion avenae (céréales) Rhopalosiphum padi (céréales) 106 sp Acyrthosiphon pisum (pois) Metopolophium dirhodum (céréales) Sphaerophoria scripta Sitobion avenae (céréales) Rhopalosiphum padi (céréales) 86 sp Acyrthosiphon pisum (pois) Metopolophium dirhodum (céréales) Sphaerophoria rueppelli 38 sp Sitobion avenae (céréales) Acyrthosiphon pisum (pois) Episyrphus balteatus Sitobion avenae (céréales) Rhopalosiphum padi (céréales) 215 sp Acyrthosiphon pisum (pois) Metopolophium dirhodum (céréales) Syrphus ribesii Sitobion avenae (céréales) Rhopalosiphum padi (céréales) 79 sp Acyrthosiphon pisum (pois) Metopolophium dirhodum (céréales) Chrysotoxum sp . Pas d’ Aphidae pedissequum 3 sp sp. (plantes maraichères) Tableau 3 : Principales espèces de Syrphidés et leur potentiel auxiliaire ; nombre d’espèces consommées et plantes hôtes (non exhaustif), ( Rojo et al., 2003)

2.4.2.3. La voracité des larves : La voracité totale des larves est évidemment un facteur important pour évaluer le potentiel auxiliaire. Il varie en fonction des espèces des larves mais également en fonction de l’espèce de pucerons :

• E. balteatus consomme, pendant son développement larvaire, entre 137 et 190 Sitobion avenae (Ankersmit et al., 1986 cité dans Sarthou 1996) et environ 416 Aphis pomi (Wnuk , 1977 cité dans Sarthou, 1996). • Scaeva pyrastri consomme 550 Brevicoryne brassicae pendant son développement larvaire (Wnuk et Fuchs , 1977 cités dans Sarthou , 1996). • Eupeodes corollae consomme en moyenne 346 Capitophorus eleagni (Tawfik et al., 1974 cités dans Sarthou , 1996) ou encore 867 Aphis fabae et Myzus persicae consommés pendant la durée de son développement ( Bombosch , 1962 cité dans Sarthou , 1996). • Pour les espèces phytotropes, la voracité semble moindre : Melanostoma mellinum consomment 150 Acyrthosiphon pisum pendant son développement larvaire ( Bankowska et al., 1978 cités dans Sarthou, 1996).

La voracité semble ici sous-estimée par rapport aux affirmations de Gilbert (1986), pour qui elle varie en moyenne de 400 à 800 selon les espèces de pucerons et de syrphes, pouvant atteindre 1200 pucerons (Gilbert, 1986).

3. Pratiques agricoles : impacts et propositions

Les espèces de syrphes aphidiphages présentes dans les cultures sont soumises à l’itinéraire technique mis en œuvre dans la parcelle. Très peu d’études se sont intéressées à l’impact direct de ces pratiques sur la biologie et le comportement de ces espèces, d’où la difficulté de l’évaluer avec précision.

3.1. Evaluation de l’impact des pratiques agricoles sur les communautés de syrphes

3.1.1. A l’échelle locale

3.1.1.1. Dans les parcelles

• Assolement et choix des cultures

Le type de culture peut influencer fortement la proportion de syrphes aphidiphages capturés. En effet, lors d’une expérimentation en 2002 en Belgique sur une culture de froment et une culture de betterave , la proportion des espèces prédatrices capturées a été très faible. En effet, moins de 15 % des individus collectés dans les deux cultures appartenaient à des espèces aphidiphages, alors que près de 70 % des syrphes piégés par la même méthode dans d’autres agro-écosystèmes étaient des ennemis naturels des pucerons ( Francis et al, 2002). Cette différence s’explique par le fait que les espèces aphidiphages principales que sont Episyrphus balteatus , S. scripta , S. ribesii, E. corollae et E. luniger, sont peu abondantes en betterave et en froment, bien qu’ils possèdent une distribution géographique large dans des habitats très diversifiés, et que l’espèce Episyrphus balteatus soit même considérée comme étant l’auxiliaire aphidiphage le plus présent dans les cultures (Chambers et al, 1986).

• Travail du sol et pratiques phytosanitaires

Des liens directs existent entre les taux d’occupation des microhabitats larvaires et les pratiques agricoles d’un site (Speight et al., 2000) pour ce qui est des activités d’élevage. Ces dernières sont bien différentes de celles réalisées en grandes cultures, cependant, certains

aspects de prophylaxie et de travail du sol peuvent se recouper et donner ainsi une tendance de l’impact des pratiques en grandes cultures sur les larves de syrphes (cf Tableau 3). Les auteurs ont utilisé des indices pour évaluer l’ampleur de l’impact des opérations culturales dont voici la signification :

[3] = impact maximal de l'opération sur l'espèce, prédit l'éradication de l'espèce au niveau de la surface concernée

[2] = impact modéré de l'opération sur l'espèce, prédit la perte de la plupart des individus de l'espèce au niveau de la surface concernée, mais pas à son éradication

[1] = faible incidence de l'opération sur l'espèce, prédit la perte d'une partie de la population de l'espèce au niveau de la surface concernée, mais pas de perte de la majeure partie ou de l'ensemble de sa population

[ ] = aucun impact perceptible de l’opération sur l’espèce dans la zone concernée. Tableau 3 : Impact des pratiques culturales sur les larves de 5 espèces aphidiphages (Speight et al. 2000) Pratiques culturales évaluées E. balteatus S.scripta S. ribesii E. corollae M. mellinum Herbicide (herbes et arbustes) 1 1 1 1 1 Herbicide large spectre 1 1 1 1 1 Herbicide anti chardons 1 1 Insecticide systémique ou de contact 2 2 2 2 dose normale Pâturage végétation par bétail 3 3 2 3 Pâturage modéré par bovins 1 3 2 3 2 Pâturage élevé par bovins 2 3 2 3 2 Pâturage élevé par moutons 3 3 2 3 3 Piétinement sol + végétation par bétail 3 1 1 Labour mécanique du sol (2 à 10 cm de 1 1 2 1 2 prof) + couverture végétale : + d’1 / saison travail sup du sol (5 cm) pour faire 1 1 1 1 1 remonter les graines d’adventices Labour profond (15 à 30 cm) 1 1 1 3 Désherbage mécanique pdt phase max de croissance des feuilles : + d’1 / saison 1 1 1 1 1 Arrachage des houppes (nivellement) 2 Coupe des fleurs dans prairies de 1 1 1 pâturage : 1 / saison Coupe des fleurs dans prairies de 2 1 2 1 pâturage : plus d’ 1 / saison Désherbage mécanique et arrachage 1 2 2 arbres + exportation

On observe un impact relativement faible de l’application d’herbicide dans un champ, en particulier des anti-chardons. Ceci pouvant être lié à un faible impact des herbicides sur les larves ou à une moindre abondance de celles-ci sur les chardons. A l’inverse, l’application

d’insecticide (de contact ou systémique) a une influence beaucoup plus marquée sur la mortalité larvaire, 4 des 5 espèces étudiées. Le pâturage est l’intervention la plus nuisible aux larves de syrphes, pouvant provoquer la disparition de tous les individus d’une même espèce, par le cumul de deux effets négatifs : l’arrachage et le piétinement de la végétation conduisant à la destruction des œufs et des larves. La coupe des fleurs a un effet mineur sur les larves en comparaison avec le piétinement de la végétation, les fleurs ne constituant ni un refuge ni une ressource de nourriture. L’impact du labour varie en fonction de la profondeur et de la fréquence à laquelle il est effectué : - Un labour mécanique entre 2 et 10 cm de profondeur effectué plus d’une fois au cours de la saison aura de lourdes conséquences sur deux espèces de syrphes aphidiphages : Syrphus ribesii et Melanostoma scalare. -Un labour profond à 30 cm de profondeur sera « catastrophique » pour l’espèce Melanostoma scalare. En effet, les pupes et/ou les larves (selon la date d’intervention) tombent au sol et se retrouvent donc enfouies, et ainsi incapables de donner naissance à un adulte.

3.1.1.2. Dans les aménagements

• Taille des haies et désherbage des bandes enherbées

Speight et al. (2000) a également, au cours de cette étude évalué l’impact des pratiques en bords de pâtures sur les larves des syrphes (cf Tableau 4). Selon la même échelle que la tableau présenté précédemment, on obtient le tableau suivant :

Tableau 4 : Impact des pratiques de bords de champs sur les larves de 5 espèces aphidiphages Pratiques culturales évaluées E. balteatus S.scripta S. ribesii E. corollae M. mellinum Désherbage mécanique le long des bords de champs et haies : 1 / 1 1 1 saison Désherbage mécanique le long des bords de champs et haies : plus d’ 2 1 2 1 1 1 / saison Taille sévère des haies 1

Il s’avère ainsi qu’un désherbage mécanique et une taille des haies en bordure des prairies à une fréquence plus élevée que saisonnière affecte principalement Episyrphus balteatus et Syrphus ribesii, dont la plupart de la population est potentiellement décimée. On suppose que les larves de ces 2 espèces se trouvent préférentiellement au niveau des éléments herbacés situés en bords de prairies et non à l’intérieur. En revanche, la taille « sévère » des haies n’a aucun impact sur les larves des 4 espèces étudiées, et un impact très faible sur S. ribesii . Les larves de ces espèces ne se développent pas dans les haies, certainement moins riches en pucerons que les éléments herbacés proches.

La présence ou non de haies ou de bandes enherbées sur les bords de parcelles influence fortement la dynamique de ponte des syrphes aphidiphages (Sommaggio , 1999). Ainsi, une

augmentation significative du nombre de sites de ponte est observée au sein de champs entourés d’un paysage diversifié (abondance de haies notamment). Cette différence s’observe surtout en début d’année, lorsque les haies offrent des ressources alternatives de nourriture aux syrphes aphidiphages. Ainsi, une ponte importante au début de l’année, à un moment où les ravageurs sont peu présents, est un facteur très discriminant dans le contrôle biologique de la dynamique des pucerons.

• Présence de bandes fleuries

De nombreuses études se sont également penchées sur l’influence des bandes enherbées et fleuries sur le comportement des syrphes aphidiphages et donc sur leur abondance et leur richesse spécifique. La phacélie a notamment été étudiée en tant que plante éventuellement attractive (Hickman J.M et al, 1995 ). L’expérimentation, menée deux années de suite dans 6 champs de blé d’hiver, présentant des bandes fleuries, n’a pas révélé de différence significative, bien que les syrphes soient toujours plus abondants en présence de phacélie (bandes de 50 cm de large). Une étude menée en 2008 à la Chambre d’Agriculture de Charente-Maritime a également cherché à évaluer l’impact des bandes fleuries sur les syrphes aphidiphages et est arrivée à la même conclusion (Trinquesse M, 2008). Ainsi, la composition des bandes fleuries s’est révélé avoir un effet local mais peu d’effet sur l’abondance à l’intérieur de la parcelle. Une bande composée majoritairement de bleuet ( Centaurea ) et d’anthémis des teinturiers (Anthemis tinctoria ), appartenant toutes à la famille des Astéracées, aura un pouvoir attractif beaucoup plus fort qu’une bande possédant une densité de plantes et de fleurs beaucoup moins importantes et à dominante « légumineuses ». Il apparaît que les effectifs de syrphes sont significativement plus élevés dans les parcelles munies du premier type de bande fleuries. Ceci s’expliquerait sans doute par l’accessibilité plus ou moins importante du nectar, les syrphes préférant les plantes à corolle ouverte de la famille des Astéracées aux fleurs en forme de tube, comme les légumineuses. (Trinquesse M, 2008).

3.1.2. A l’échelle du paysage

3.1.2.1. Influence de l’ouverture du paysage sur les syrphes non aphidiphages

Les facteurs qui semblent influencer l’abondance 1 et la distribution des syrphidés non aphidiphages sont d’ordre paysager. En effet, la présence de linéaire de haies sert de corridor et favorise leur abondance. D’autre part, en l’absence de traitement agricole les bandes enherbées peuvent servir de zone-refuge pour les syrphes ainsi que de zone de reproduction privilégiée. On a ainsi pu constater que les indices de diversité des syrphes (Richesse spécifique 2, Abondance, Indice de Shannon 3 et Indice d’équitabilité 4) sont supérieurs dans un paysage à caractère bocager que dans un paysage ouvert, la différence étant significative uniquement pour l’indice de Shannon (Couanon T, 2008). (Rq : Les autres indices de diversité ne se sont

1 Abondance : nombre total d’un organisme ou le nombre d’organismes par unité d’espace. 2 Richesse spécifique : nombre d’espèces présentes dans l’espace considéré. 3 Indice de Shannon : quantifie l’hétérogénéité de la biodiversité d’un milieu, il varie de 0 à ln S, S étant la richesse spécifique. 4 Indice d’équitabilité : cet indice peut varier de 0 à 1, il est maximal quand les espèces ont des abondances identiques et minimal quand une seule espèce domine tout le peuplement.

pas avérés significativement différents entre les deux types de paysage lors de l’étude probablement du fait d’un faible nombre de réplicats). Ainsi, la présence de haies au sein du paysage semble favorable à une plus grande diversité au sein de la communauté de syrphes. Une baisse de connectivité entre les habitats semi-naturels affecte les syrphes différemment selon leur degré de spécialisation et leur capacité de dispersion (Hanski et Gilin, 1997). Les espèces spécialistes doivent bouger entre les éléments d’habitat pour y puiser des ressources spécifiques et sont donc généralement significativement affectées par les facteurs paysagers qui inhibent la dispersion. Les espèces généralistes, elles, sont en comparaison plus à même de trouver des ressources au sein d’un élément. Si en plus d’être généralistes au niveau du régime alimentaire ces espèces sont très mobiles, elles peuvent percevoir un paysage fragmenté comme suffisamment connecté. Les groupes avec une forte proportion d’espèces spécialistes sont pour la plupart très affectés par la diminution de la diversité et de la qualité de l’habitat local, la baisse de diversité des cultures, le pourcentage de surface boisées dans un paysage et la structure des éléments herbacés semblant causer des extinctions locales de groupes contenant majoritairement des espèces avec des degrés intermédiaires de spécialisation (Schweiger O. et al , 2007).

3.1.2.2. Influence de l’ouverture du paysage sur les syrphes aphidiphages

Les espèces dont les larves se nourrissent de pucerons ne sont pas ou très peu influencées par l’ouverture du paysage. Les indices de diversité évoqués précédemment ne présentent pas de différences significatives entre paysage ouvert et paysage bocager. En effet, de nombreuses espèces (Episyrphus balteatus, Melanostoma sp., etc..) présentent un caractère ubiquiste. Il est donc commun de les retrouver dans des paysages bocagers mais aussi au sein de paysages ouverts. (Couanon T, 2008). Cette tendance se retrouve également si l’on s’intéresse à l’effet des haies sur la diversité des syrphes, bien qu’aucune différence significative n’ait été observée (Pollard, 1971). De par leur alimentation à l’état adulte, les syrphes ont un rôle pollinisateur non négligeable. L’étude de la dispersion des pollinisateurs syrphes (aphidiphages à l’état larvaire et floricoles à l’état adulte) et abeilles depuis un habitat semi naturel (bosquet par exemple) vers la matrice agricole adjacente (Jauker F, et al. 2009) révèle que la richesse spécifique des abeilles sauvages ne varie pas selon la distance au sein de paysages possédant une proportion « suffisante » de prairies, mais diminue significativement lorsque les prairies semi naturelles se raréfient et deviennent plus isolées dans la matrice agricole adjacente). La richesse spécifique des syrphes ne diminue pas en fonction de la distance quel que soit le paysage. L’abondance augmente elle en fonction de la distance à l’habitat principal, quelle que soit la « qualité » de la matrice. A l’inverse des abeilles, les syrphes ne semblent pas affectés par les pratiques agricoles, la richesse spécifique n’étant pas affectée par la distance à l’habitat principal même au sein de paysages ayant une matrice sommaire (de pauvre qualité). Alors que l’on a déjà observé que les paysages agricoles facilitent les mouvements des syrphes, les résultats de cette étude suggèrent que même de petits fragments de prairie et des ressources florales isolées le long des bordures de parcelle s’avèrent utiles à plusieurs espèces. L’opposition de comportement entre syrphes et abeilles s’explique par des différences dans la stratégie de reproduction. Les syrphes, à l’inverse des abeilles, ne collectent pas le pollen et le nectar pour leur descendance, c’est pourquoi les femelles peuvent se disperser au sein des paysages de façon linéaire, alternant « prise alimentaire » et ponte. Les syrphes peuvent donc jouer un rôle

important dans le maintien des services de pollinisation au sein des paysages agricoles défavorables aux abeilles. Plusieurs facteurs sont susceptibles de diminuer le potentiel de prédation des syrphes aphidiphages : la sensibilité des larves aux pesticides, la raréfaction du pollen, entravant la bonne maturation des œufs, ou la présence de bordures de champs alors « obstacles », qui limitent les vols à l’échelle du paysage. Par ailleurs, Si cet effet des bordures est avéré,, les capacités de régénération des prédateurs, suite à une baisse sensible de la population (suite à l’action de pesticides par exemple), ou de dispersion dans une métapopulation, peuvent être fortement amoindries. (Wratten S.D et al, 2003).Afin de caractériser la perméabilité de différents types de barrières, deux espèces aphidiphages (E. balteatus et M. corollae) ont été étudiées. On observe un effet significativement négatif sur la dispersion en implantant une barrière composée de peupliers en formation dense ou éclaircie. Dans ce cas-là les syrphes se dispersent préférentiellement du côté où la barrière de peupliers est absente. On suppose que les syrphes doivent détecter l’ombre plus importante des barrières de peupliers et changer de direction à mesure qu’ils s’en approchent. (Wratten S.D et al, 2003). Ainsi, un paysage composé de nombreuses haies hautes (plus de 10 mètres) serait défavorable à la dispersion des syrphes aphidiphages.

3.1.2.3. Etude du comportement d’E. balteatus

L’étude du comportement de cette espèce révèle plusieurs éléments quant à sa dynamique saisonnière (Sarthou J.P. et al., 2006) : -E. balteatus semble préférer les lisières sud en hiver du fait d’un meilleur ensoleillement et notamment de températures plus favorables. -en été il est majoritairement en lisière nord du fait de l’abondance en fleurs. -au printemps, les adultes se trouvent dans les longues lisières sud plutôt que dans les lisières nord. Par ailleurs, la présence de jachère dans un rayon de 2 000 m à proximité d’un bois a également eu une corrélation positive avec l’abondance en syrphes. En automne, l’abondance est corrélée positivement avec la longueur des lisières nord et la forme du bois (importance de la lisière sud de la forêt notamment). D’une manière générale, la structure du paysage, la longueur des lisières forestières et probablement la présence de jachères influent donc sur l’abondance d’ Episyrphus balteatus. Grâce à ces observations il est possible de décrire plus précisément le comportement d’ Episyrphus au cours de l’année : Au printemps, E. balteatus pond sur les cultures environnantes infestées de pucerons et va ainsi se répartir dans la matrice agricole, qui présente à cette époque des ressources omniprésentes. En été, ces insectes vont s’abriter en lisière nord, plus riche en fleurs et au climat plus favorable. En automne, la tendance s’inverse : l’abondance d’ E. balteatus est négativement corrélée à la densité de fleurs en lisière (trouvées en lisière nord) (On peut supposer qu’une partie de la dynamique observée se prolonge en automne du fait de notre choix de la division des saisons). Les femelles fécondées (individus non migrants) hivernent préférentiellement en lisières sud, qui leur procurent des conditions favorables en termes de fleurs, abris et température. E. balteatus semble subsister dans des zones proches des lisières forestières, servant de refuge, mais aussi à proximité de zones présentant des ressources alimentaires (fleurs). Ainsi, pour optimiser le contrôle biologique des pucerons semble souhaitable de favoriser les aménagements les plus adaptés à la survie des femelles fécondées durant l’hiver, notamment les lisières sud les plus proches des parcelles cultivées.

3.2. Propositions de pratiques d’optimisation du contrôle biologique

On observe qu’au printemps l’augmentation du risque d’infestation des cultures par les colonies de pucerons ( Sitobion avenae et Metopolophium dirhodum ) doit être contrée par une floraison précoce des bandes enherbées qui sont alors attractives pour les auxiliaires. Certaines essences végétales sont en ce sens à privilégier comme les plantes à floraison hivernale telles que le chrysanthème Chrysanthemum coronarium ou la coriandre Coriandrum sativum, appartenant tous les deux à la famille des Astéracées. (Couanon T, 2008 ). Il est par ailleurs recommandé de favoriser les plantes vivaces ou bisannuelles qui utilisent leurs réserves pour se développer dès la fin de l’hiver. De plus, ces dernières sont hôtes de pucerons spécifiques (qui ne vont pas sur les cultures), attractifs pour les auxiliaires et servant ainsi de ressource alimentaire alternative pour les larves. De façon logique, quand la densité de Syrphidés devient importante au sein des bandes enherbées, les adultes migrent vers les zones cultivées adjacentes et y déposent leurs œufs. Ainsi, le semis d’espèces végétales à floraison précoce présente un intérêt dans la lutte biologique. On peut également favoriser la présence d’espèces à nectaires extra-floraux qui fournissent du nectar aux adultes, même en l’absence de fleurs.

L’implantation à proximité d’une parcelle cultivée dont on souhaite vendre la production, d’une culture « nurserie », prend ici tout son sens (cf. JP Sarthou). La nature de cette dernière et les pucerons qu’elle est susceptible d’héberger doivent être attractifs pour une ou plusieurs espèces de syrphes aphidiphages. Ces derniers se développent donc dans la «nurserie », les larves se nourrissant des pucerons « alternatifs » non ravageurs des cultures. Lorsque le risque de dégâts culturaux en parcelle par les pucerons atteint son maximum,, la « nurserie » est détruite. Ainsi, les syrphes adultes présents dans la « nurserie » migrent vers le champ adjacent où ils peuvent exercer une prédation. Les futures larves se nourriront des pucerons spécifiques de la culture d’intérêt. (rq : le coût de cette culture « nurserie » doit rester modeste dans la mesure où elle est destinée à être détruite.

J-P Sarthou a tenté de modéliser le rapport entre surface à protéger et surface « nurserie » nécessaire en imaginant la formule suivante :

Sp = surface à protéger=Sn x [[(NL2 +3 x 0,66 x 0,7 x 300) x (Sn / Sé)] / [NL1 +2+3 x (Sn / Sé)] où :

Sn = surface nurserie Sé = surface échantillonnée (car Sn souvent trop grande à échantillonner entièrement) NL1+2+3 = nombre de larves de syrphes au stade 2 et stade 3 sur Sé 0,66 --> sex-ratio d'environ 2/3 femelles - 1/3 de mâles 0,7 --> 30% de mortalité (naturelle des larves, parasitisme par Diplazontines, prédateurs comme Asilidae , ...) 300 --> fécondité 'utile' moyenne par femelle (nombre de larves arrivant à L3 engendrées par femelle adulte émergeant de Sn - chiffres moyens bas pour E. balteatus )

L’utilisation de ce modèle permet d’estimer qu’une surface « nurserie » de 400m² est nécessaire pour une parcelle 88 fois plus grande. Cependant, cette formule n’est pas valable tout au long de la saison car certains facteurs entrent en compte :

-le taux de mortalité larvaire augmente, en particulier suite au parasitisme (par Diplazontine* notamment), -le taux de fécondité baisse ensuite fortement a priori suite au manque de ressources florales, -beaucoup d’adultes émigrent/se dispersent dans le paysage voire entre régions, d'où fortes mortalités adultes très probables -les facteurs influençant le choix des sites de pontes par les femelles émergentes ne sont pas maitrisables

Rq : Il faut noter que cette formule et le raisonnement qui lui est associé partent du postulat selon lequel Sn produit une densité de larves donnée au m² avec une surpopulation de pucerons, et que Sp , avec la même densité de larves de syrphes, ne doit pas voir sa population de pucerons dépasser le seuil d'intervention.

Des recherches concernant les couples « végétaux – pucerons hôtes » ont déjà été menées sur certaines espèces aphidiphages. Une étude en Espagne en particulier (Rojo. S, et al, 2003) a déterminé les végétaux et pucerons attractifs et pouvant servir de ressources alimentaires pour les larves et adultes de différentes espèces de syrphes présentées ci-dessous (cf Tableau 5).

Espèce de syrphe Végétaux Pucerons hôtes aphidiphage Frangula alnus Anoecia corni Episyrphus balteatus Cornus sanguinea Anoecia corni Vicia angustifolia Acyrthosiphon pisum

Trifolium pratense Acyrtosiphon pisum Eupeodes corollae Chenopodium album Aphis craccivora Onobrychis sativa Aphis craccivora

Cytisus scoparius Acyrtosiphon pisum Scaeva pyrastri Robinia pseudoacacia Aphis craccivora Centaurea jacea Uroleucon jaceae

Tableau 5 : Exemples de « nurseries » pour trois espèces aphidiphages (Rojo, S, et al, 2003)

Conclusion

L’étude de la communauté des syrphidés est vaste et complexe dans la mesure où elle englobe une diversité d’habitats et de régimes alimentaires larvaires très importante. Nous avons choisi dans cette synthèse de présenter les résultats d’études pour l’ensemble des espèces, en insistant sur celles qui présentent un caractère zoophage et plus précisément aphidiphage à l’état larvaire. Il reste encore beaucoup à faire en matière de recherche expérimentale pour comprendre le comportement des syrphes dans son ensemble, et ainsi pouvoir agir sur le paysage et les aménagements des bords de parcelles. L’objectif visé étant de favoriser leur présence et augmenter ainsi l’efficacité du contrôle biologique des pucerons. Néanmoins, quelques grandes tendances se précisent, les auteurs s’accordant sur plusieurs points : Concernant les syrphes aphidiphages, l’ouverture du paysage ne semble pas influer sur leur richesse spécifique. C’est un paramètre important à prendre en compte dans le cadre de la lutte biologique en grandes cultures étant donné que pour ce mode de production, le paysage agricole est nécessairement ouvert ou semi ouvert. La présence de bandes enherbées et de bandes fleuries est, au sein de ce paysage ouvert, un atout incontestable pour attirer les syrphes auxiliaires. Cependant, les études réalisées sur ce sujet révèlent un effet majoritairement local de ces bandes, n’ayant que peu d’impact sur les syrphes aphidiphages à l’intérieur des parcelles. L’optimisation de la composition des bandes fleuries devrait permettre d’attirer suffisamment de syrphes et d’avoir un impact sur leur abondance à l’intérieur des parcelles. C’est en particulier le cas pour les Astéracées jaunes et les Apiacées blanches, qui sont les plus attractives. L’implantation d’essences à floraison précoces est également à privilégier.

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