Université Jean Moulin Lyon 3 École doctorale : Management, Information, Finance (MIF)

Les transformations structurelles des clubs sportifs : Recherche d’un cadre d’analyse approprie a leur gestion

par Gautier FONTANEL thèse de doctorat en Science de gestion sous la direction de Véronique ZARDET et Robert PATUREL présentée et soutenue publiquement le 12 juillet 2007 Thèse au format PDF

Membres du jury : Robert PATUREL, Université de Toulon Véronique ZARDET, Université Jean Moulin Lyon 3 Christian CADIOU, Université de Bretagne Gilles PACHÉ, Université Montpellier I Arnaud DAGORNE, Directeur de la Ligue de Rugby 1

Tables des matières

INTRODUCTION ...... 5 1. Problématique ...... 7 1.1. Champ et objet de la recherche ...... 8 1.2. Questions et problèmes généraux...... 10 2. Hypothèse centrale ...... 12 3. Fil conducteur...... 15 3.1. Positionnement de la recherche...... 16 3.2. Proposition de démarche...... 17 3.3. Perspectives adoptées ...... 19

PARTIE I : Fonctionnement et évolutions des clubs sportifs...... 21 1. Les fondements du club sportif...... 23 1.1. Fonctionnement de la structure sportive associative...... 23 1.1.1. Évolution des associations sportives...... 24 1.1.2. La logique associative du modèle européen...... 28 1.1.3. Les relations avec les partenaires ...... 32 1.1.3.1. Les partenaires publics ...... 32 1.1.3.2. Les partenaires privés économiques...... 36 1.1.4. Les obligations des clubs sportifs...... 42 1.1.4.1. La législation ...... 42 1.1.4.2. La fiscalité ...... 46 1.1.4.3. La comptabilité ...... 47 Conclusion...... 48 1.2. L’orientation des clubs sportifs vers la professionnalisation...... 49 1.2.1. De l’amateur au professionnel...... 51 1.2.2. Le processus de transformation et ses raisons...... 53 1.2.3. Les différentes transformations ...... 55 1.3. Les caractéristiques de la professionnalisation...... 58 1.3.1. La stratégie naturelle modifiée ...... 59 1.3.2. L’importance du management stratégique ...... 63 1.3.3. La controverse concernant la professionnalisation...... 66 1.3.4. Les évolutions dans la gestion des clubs ...... 68 Conclusion...... 75 2. L’analyse des clubs sportifs ...... 77 2.1. Les structures des clubs...... 77 2.1.1. Définition des organisations...... 78 2.1.2. Intérêt pour l’analyse des organisations ...... 80 2.2. L’hétérogénéité de la structure des clubs sportifs...... 82 2.2.1. L’hétérogénéité entre les disciplines sportives ...... 83 2.2.2. L’hétérogénéité entre clubs d’une même discipline...... 84 2.3. La perte d’identité de la gestion des clubs sportifs ...... 85 Conclusion ...... 87 3. Le club est-il une entreprise ? ...... 88 3.1. Les particularités du secteur sportif ...... 89 3.2. Les deux modèles sportifs dominants et leurs caractéristiques...... 94 3.2.1. L’analyse du modèle européen par une Commission de l’Union européenne ...... 94 3.2.1.1. Le régime juridique du sport dans l’espace européen...... 96 2

3.2.1.2. La gouvernance d’entreprise du sport. L’exemple du football . 99 3.2.1.3. Les recommandations...... 102 3.2.2. Présentation du système des franchises appliquées dans le modèle du sport professionnel américain ...... 105 3.3. La gestion d’un club sportif s’apparente-t-elle à celle d’une entreprise ? 108 3.3.1. Des études peu nombreuses ...... 108 3.3.2. Une enquête originale sur la question ...... 112 Conclusion...... 119 Conclusion de la première partie...... 120

PARTIE II : Cadre théorique et méthodologie de la recherche...... 123 1. Le choix d’un outil d’analyse ...... 124 1.1. Réflexion sur l’outil adéquat ...... 125 1.1.1. Un outil d’analyse stratégique ...... 125 1.1.2. Un outil lié à la structure...... 126 1.1.3. Un outil adaptable aux spécificités sportives ...... 126 1.1.4. Un outil conceptuel propre aux clubs...... 127 1.1.5. Un outil multicritère ...... 127 1.1.6. Un outil capable de mettre en évidence la croissance ...... 128 1.1.7. Un outil classificateur...... 129 1.1.8. Un outil pratique ...... 130 Conclusion...... 130 1.2. Les modèles de métamorphose (MDM)...... 131 1.2.1. Les stades de développement ...... 135 1.2.2. Les changements de dimension...... 137 1.2.2.1. Simultanéité des évolutions des caractéristiques des entreprises en développement ...... 137 1.2.2.2. Progressivité ou rupture...... 139 1.2.3. La succession des phases ...... 140 1.3. Justification du choix de l’outil ...... 141 1.3.1. L’application des MDM, une réponse adaptée à une première analyse 141 1.3.2. Les MDM : plus qu’une simple réponse ...... 145 Conclusion...... 147 2. Cadre de la recherche...... 149 2.1. Le positionnement théorique...... 149 2.1.1. Adaptation de la synthèse de Godener [1996] ...... 149 2.1.2. Les facteurs de changement ...... 150 2.1.3. Les différents types de transformation ...... 150 2.1.4. Le déterminisme contesté ...... 151 2.1.5. Une approche multicritère ...... 152 2.1.5.1. Représentativité Vs. Fiabilité...... 152 2.1.5.2. Définition des caractéristiques des clubs sportifs...... 153 2.1.6. Croissance et développement ...... 154 2.1.7. La période d’évolution concernée...... 155 Conclusion...... 155 2.2. Les caractéristiques des organisations sportives sélectionnées...... 156 2.2.1. Les fondements de la présélection ...... 156 2.2.2. Les caractéristiques propres aux clubs sportifs ...... 159 2.3. Méthodologie proposée ...... 164 2.3.1. Nature de la recherche...... 164 3

2.3.2. Une approche qualitative abductive ...... 165 2.3.3. Le moment de l’observation...... 171 2.3.4. Le type de recherche ...... 175 2.3.5. L’interlocuteur pertinent...... 182 3. Le recueil des données relatives aux clubs sportifs...... 186 3.1. Les caractéristiques de l’étude de terrain...... 186 3.1.1. Le périmètre du terrain ...... 186 3.1.2. Les types de clubs sportifs...... 190 3.1.2.1. Clubs de tout niveau de développement ...... 190 3.1.2.2. La structure des clubs sportifs...... 190 3.2. Méthodologie du traitement des données...... 193 3.2.1. Le recours à la littérature existante ...... 193 3.2.2. Recueil et analyse des données ...... 196 3.2.3. Le codage des données ...... 200 3.2.4. La validation des résultats ...... 207 3.2.5. La confrontation avec la rigueur scientifique...... 209 3.2.6. Un complément statistique ...... 217 Conclusion de la deuxième partie...... 218

PARTIE III : Adaptation des MDM aux clubs sportifs ...... 221 1. Les caractéristiques représentatives des clubs...... 224 2. Les résultats de l’enquête...... 231 2.1. Les catégories de clubs sportifs...... 231 2.1.1. Les caractéristiques internes...... 232 2.1.1.1. Le critère de la taille...... 232 2.1.1.2. Le critère du niveau de compétition ...... 234 2.1.1.3. Le budget ...... 236 2.1.1.4. La répartition des ressources ...... 237 2.1.1.5. Les priorités de gestion ...... 242 2.1.1.6. L’organisation...... 248 2.1.1.7. Le fonctionnement ...... 252 2.1.1.8. La gestion du personnel ...... 257 2.1.2. Les caractéristiques externes ...... 263 2.1.2.1. La gouvernance ...... 263 Les statuts 264 La répartition du capital ...... 265 2.1.2.2. La production ...... 270 La rencontre sportive...... 271 La billetterie 276 Les abonnements...... 279 La formation 281 Les produits dérivés ...... 284 2.1.2.3. La communication ...... 288 2.1.2.4. Le marché...... 292 Public non-initié ...... 293 Public initié 294 2.1.2.5. Le partenariat...... 296 2.2. Les successions de phases des clubs...... 301 2.2.1. Historique des clubs de l’échantillon...... 302 2.2.2. Les caractéristiques aux évolutions aléatoires : le niveau de compétition et le budget...... 309 2.2.3. L’évolution de la gouvernance des clubs ...... 310 4

2.2.4. L’évolution de la production ...... 310 2.2.5. Les évolutions de la communication ...... 312 2.2.6. L’évolution en termes de marché...... 313 2.2.7. L’évolution de la répartition des ressources...... 314 2.2.8. L’évolution des priorités de gestion...... 315 2.2.9. Les évolutions du dispositif interne des clubs ...... 316 Conclusion...... 317 3. Les MDM appliqués aux clubs sportifs...... 319 3.1. Le modèle...... 319 3.2. Explication du modèle...... 329 3.3. L’appoint d’une analyse statistique adaptée ...... 333 3.3.1. Exemples de corrélations significatives...... 336 3.3.1.1. Les corrélations entre le Niveau d’organisation et le Niveau de compétition...... 336 3.3.1.2. Les corrélations entre le public initié et la formation...... 338 3.3.2. Les corrélations entre les caractéristiques...... 341 3.3.3. Les graphiques en trois dimensions ...... 346 4. Utilisation du modèle ...... 354 4.1. Les changements de dimension perçus par les dirigeants...... 354 4.1.1. Les résultats ressortant du terrain ...... 355 4.1.1.1. La période « d’après résultats sportifs positifs » ...... 356 4.1.1.2. Le processus de formalisation de l’activité ...... 358 4.1.1.3. L’amélioration de la production : ...... 360 4.1.1.4. Le concours d’un tiers...... 362 4.1.1.5. La médiatisation ...... 364 4.1.2. Comparaison avec les résultats de Godener concernant les PME..364 4.2. Les éléments catalyseurs ...... 368

CONCLUSION GENERALE ...... 376 1. L’utilité du modèle...... 377 1.1. Un cadre conceptuel renouvelé ...... 377 1.2. Intérêt pratique ...... 379 1.2.1. Un guide d’accompagnement ...... 380 1.2.2. Un indicateur de contrôle des dépenses excessives ...... 381 1.2.3. Un modèle adapté et utilisable par tous les clubs ...... 381 1.2.4. Un facteur d’identification...... 382 1.2.5. Une information sur la valorisation des clubs...... 382 1.2.6. Un dispositif de préparation à la décision ...... 383 1.2.7. Un outil favorisant l’amélioration de la gestion des clubs...... 384 1.2.8. Un instrument d’anticipation ...... 384 1.3. Intérêt théorique ...... 385 2. Les limites du modèle ...... 386 3. Les prospectives de recherche ...... 389

BIBLIOGRAPHIE ...... 392

Table des tableaux et schémas ...... 401

ANNEXES ...... 404 5

INTRODUCTION

6

Si le sport est une activité très ancienne (les Jeux Olympiques de l'Antiquité sont nés au cœur du monde hellénique1), le sport moderne prend sa source dans la Grande-Bretagne du XIXe siècle, dans le contexte du développement des sociétés industrielles et du monde citadin, avec la création du football, de l’athlétisme et du rugby2. L’activité sportive se présentait alors comme un élément important de l’éducation, faisant référence aux notions d’effort, de dépassement de soi, de compétition. Le sport s’est nourri du capitalisme, avec les valeurs relatives à la victoire et à la justification des avantages moraux, physiques et même pécuniaires relatifs aux récompenses à accorder aux vainqueurs. Le sport moderne est né du développement économique qui réduit les heures de travail et augmente les temps de loisirs, et de l’économie de marché qui glorifie la concurrence3. Avec le mouvement de l’olympisme, développé par Pierre de Coubertin, les questions concernant, d’une part, la mise en place de compétitions organisées et, d’autre part, le développement d’une pédagogie sportive dans une ère industrielle nécessitant l’application de règles et de solidarités, ont été posées. Au fond, le sport devait contribuer à l’établissement de la paix dans le monde. Le sport était considéré comme un instrument d’éducation universel. L’application stricte de l’amateurisme, qui conduira à des exclusions et même à des interdictions d’exercice de certains sports, constituera un obstacle important à la commercialisation des activités sportives et à leur développement. Cependant, le sport a attiré les passions, politiques et économiques. La liaison entre les médias et le sport fut consacrée par les radios et les télévisions. C’est en 1936 que les premiers Jeux olympiques furent retransmis à la télévision4, ce qui leur conféra une nouvelle « valorisation économique », dont l’importance pour l’avenir des sports n’avait pas encore été

1 Les sportifs représentaient des régions, des pays. Ils étaient professionnels, dans le cadre d’activités souvent violentes et très prisées du public qui en faisait déjà des héros. Certaines activités sportives ont été maintenues après l’effondrement de l’Empire romain. Les tournois de chevaliers étaient très prisés à la fois comme activité sportive et comme spectacle. Ils étaient réservés aux seigneurs, dans une société où les loisirs n’étaient pas accessibles au plus grand nombre. Les nobles entretenaient de véritables « écuries » qui défendaient l’étendard d’une seigneurie et recevaient les prix relatifs à leur victoire. Cette idée de représentation d’une entité géographique par une compétition physique reste encore aujourd’hui dominante dans le sport professionnel. 2 La relation entre le sport et le monde économique va se développer. Les besoins d’équipement pour certains sports conduisent à des productions économiques, au même titre que les activités de « bookmakers » concernant aussi bien les courses hippiques que les courses organisées pour les hommes. En effet, l’économie et le sport ont commencé leur aventure au XVIIIe siècle avec les combats de boxe professionnels, la production de gants de boxe, puis vers 1830 la production de canots et d’avirons pour la course, de vélocipèdes de compétition en 1868. Le football, puis le rugby connaissent une forte demande et se structurent autour de clubs, de compétitions et de spectacles. 3 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de , Paris, 5e édition, 128 p., p3-4 4 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p 4. 7 décelée. Cette liaison entre les médias et le sport fut consacrée par les radios et les télévisions. Si l’amateurisme est resté très présent dans les étages de moindre compétitivité, les disciplines sportives visent l’excellence par la spécialisation des joueurs afin d’intéresser les médias, ce qui conduit inéluctablement au professionnalisme5. Aujourd’hui, le sport est une activité économique complexe, regroupant plusieurs branches aussi hétérogènes dans leur contenu que différentes eu égard à leur intégration dans l’économie de marché. C’est devenu un outil de communication et une activité de spectacle importante. Les grands événements sportifs sont suivis par des centaines de millions de personnes, le choix des sites olympiques fait l’objet d’une concurrence féroce dans laquelle les polémiques et les effets de corruption sont trop souvent présents. Les Jeux Olympiques de Los Angeles ont mis en évidence, au-delà des problèmes politiques et diplomatiques, la rentabilité économique de cet ensemble de manifestations sportives mettant en évidence le potentiel sportif global des Nations6. L’étude des clubs sportifs sous l’angle de leur gestion est relativement récente. Cependant, en situation de concurrence dans une économie ouverte, l’accroissement considérable des enjeux économiques conduit les dirigeants des clubs à acquérir des compétences nécessaires au management. Dans cette perspective, la gestion des clubs, notamment parmi les plus huppés, s’apparente à celle d’une entreprise. Pour analyser le degré d’implication des techniques managériales dans la conduite de cette entité économique, il est nécessaire de mettre en évidence la problématique de notre recherche, d’en présenter l’hypothèse centrale, avant de dégager le fil conducteur de notre réflexion.

1. Problématique

Il convient de définir et de délimiter l’objet de notre étude, de déceler, ensuite, les questions centrales et leurs corollaires, et de saisir, enfin, l’intérêt de cette recherche.

5 Depuis 1980, le poids économique du sport est considérable, du fait de plusieurs événements importants du sport mondial : d’abord, l’ouverture des Jeux Olympiques aux professionnels en 1981 puis, dès 1984, l’organisation d’un programme de partenariats mondial de la part du CIO (Comité International Olympique). Dans ce contexte, le sport entre de plain-pied dans l’univers des activités économiques de service. C’est la « marchandisation » du sport. 6 Les sommes engagées peuvent être considérables, compte tenu du nombre de personnes intéressées, des spectateurs aux téléspectateurs, des entreprises aux collectivités publiques. Aujourd’hui, les J.O. deviennent une formidable affaire financière générant des revenus directs et indirects importants pour les sites. Cette évolution est exemplaire et tous les sports s’engouffrent dans la voie tracée par le CIO. 8

1.1. Champ et objet de la recherche Au regard de cette première présentation « historique », nous nous proposons d’analyser les activités sportives « officielles », dotées de compétitions organisées. Nous ne traiterons pas des activités physiques qui s’apparentent à un loisir individuel. Notre recherche sera, en effet, tournée exclusivement vers les sports pratiqués au sein des « clubs sportifs fédérés et organisés en compétition ». Il convient donc de définir le concept de sport tel qu’il s’inscrit dans l’actualité quotidienne au XXe siècle. Ses évolutions diversifiées rendent délicate une définition précise. En 1964, G. MAGNANE7 définissait le sport comme une « activité de loisir dont la dominante est l’effort physique, participant à la fois du jeu et du travail, pratiquée de façon compétitive, comportant des règlements et des institutions spécifiques, et susceptible de se transformer en activité professionnelle ». Dix années plus tard, BRÖHM8 [1976] le représentait comme l’« ensemble de pratiques sociales institutionnalisées et régies par le principe de rendement, l’entraînement, la compétition et la sélection ». Dans les années 1980, N. ELIAS9 [1986] définissait curieusement le sport comme une « forme de combat qui donne du plaisir sans choquer les consciences ». Pierre PARLEBAS10 propose d'appeler « sports » les activités caractérisées par trois traits principaux: la pertinence motrice11, la codification compétitive12 et l'institutionnalisation13. La Charte européenne du sport [1992] définit le sport comme « toutes formes d’activité physique qui, à travers une participation organisée ou non, ont pour objectif l’expression ou l’amélioration de la condition physique et psychique, le développement des relations sociales ou l’obtention de résultats en compétition de tous niveaux »14.

La conception du sport a cependant évolué au fur et à mesure des transformations de la société, mais aussi de la place que cette activité physique et économique a prise dans la vie quotidienne des gens, soit par sa pratique, soit

7 MAGNANE G. (1964), « Sociologie du sport ». Situation du loisir sportif dans la culture contemporaine, Coll. Idées, Gallimard, Paris, 190 p. 8 BROHM J.-M. (1976), « Sociologie politique du sport », Paris, J. P. Delarge, 357 p. 9 ELIAS N. (1986), « Sport et violence », Actes de la recherche en sciences sociales, n°6, p 2-21. 10 PARLEBAS P. (1986), « Eléments de sociologie du sport », Paris, Presses Universitaires Françaises, Collection « sociologie », 278 p. 11 Elle définit le fait que le sens de l'activité est dans l'engagement moteur. La pertinence du tir à la carabine est motrice, c’est donc un sport, contrairement aux échecs dont les parties sont opératoires. 12 Elle désigne la présence de règles permettant d'attribuer la victoire. 13 Elle suppose l’existence d'une instance nationale ou internationale qui organise les compétitions. 14 Charte Européenne du Sport, (approuvée le 20 mars 1975 par la Conférence des ministres européens responsables du sport), Article 2 – définition et champ d’application de la Charte. 9 par le spectacle qu’elle offre. Or, les considérations économiques du sport ne sont pas toujours prises en compte. Depuis le début des années 1980, le caractère économique des activités sportives est pourtant clairement mis en évidence, avec l’accroissement exponentiel des enjeux économiques. Ainsi, POCIELLO15 [1983] analyse le sport comme « un ensemble de pratiques de consommations et de représentations qui procède de la culture contemporaine et participe des mythes actuels ». Aujourd’hui, les dimensions économiques ont pris une importance suffisamment grande pour transformer l’idée que Pierre de Coubertin se faisait du sport16. Le sport offre une palette large de situations économiques particulières, du football professionnel aux activités physiques destinées à lutter contre la sédentarité. L’alpinisme et l’escalade qui, à la base, affichent de fortes ressemblances, n’ont pas nécessairement la même éthique, les mêmes objectifs, ni même des situations économiques similaires.

Dans le contexte de notre thèse, le sport est d’abord une activité économique, susceptible de satisfaire les critères du profit dans le cadre d’une économie de marché, mais aussi de valoriser certaines valeurs collectives dans lesquelles peut s’exprimer le financement de biens publics. Notre recherche doctorale se propose d’analyser le sport dans l’exercice de management des clubs constitués et officialisés à l’intérieur d’une fédération. C’est une activité de groupe organisée, dans le cadre d’une compétition réglée et réglementée, aboutissant à un résultat fixant in fine un vainqueur. Dans leur quête de la performance sportive, les fédérations sont contraintes d’organiser des entraînements et des compétitions sportives, d’établir des classements, des titres et des règles. Au contraire des clubs du sport associatif compétitif fédéré, ne seront pas analysés dans notre thèse, - d’une part, les clubs constitués en sociétés commerciales normales (sans référence au sport), n’appartenant à aucune fédération reconnue, qui proposent des activités sportives comme service commercial (club de fitness ou paintball, par exemple) et, - d’autre part, les clubs liés aux groupements sportifs « affinitaires », « corporatifs », « scolaires » et « universitaires » dont les finalités ou les

15 POCIELLO CH. (1981), « Sports et société : approche socioculturelle des pratiques », Vigot, p 171 - 237. 16 CHAIX P. (2003), « Analyse économique du rugby professionnel en France », Université Pierre Mendés France (UPMF) de , Faculté des Sciences économiques, 450 p., p 2. 10

raisons sociales ne sont pas nécessairement orientées vers la performance et le résultat sportif17.

1.2. Questions et problèmes généraux Le sport fait aujourd’hui l’objet de nombreux débats, concernant notamment sa relation avec la santé d’un peuple, les questions d’éthique18, l’importance de sa valeur éducative et de son rôle social. L’ensemble du secteur sportif a connu une transformation profonde de ses valeurs économiques, ce qui a eu des conséquences importantes sur sa nature propre d’activité sociale, éducative et ludique. Le terme « marchandisation » (utilisé notamment par Eichberg dès 197919), néologisme économique soulignant la relation lucrative qui s’institue entre les partenaires du sport (joueurs, dirigeants, clubs, supporters, médias, Etats, communes), est en forte progression. Chaque fois que la logique économique et financière prend le pas sur la logique sportive, le processus de marchandisation est engagé. Le sport est alors d’abord un produit et un service dont la commercialisation importe au moins autant que le respect des valeurs sportives qui font pourtant l’objet de tous les arguments publicitaires. La « marchandisation » concerne donc l’ensemble des situations dans lesquelles l’argent et le sport deviennent indissociables, l’argent étant susceptible d’améliorer les performances sportives qui, elles-même augmentent « l’effet d’attractivité » du club pour les médias et les sponsors. Autrement dit, le sport s’éloigne des règles de la gratuité et du bénévolat pour s’inscrire délibérément dans le respect des règles de l’économie de marché. Le développement économique du sport est devenu, en effet, inéluctable au regard des évolutions sociétales. La logique économique constitue un élément nécessaire à la survie et la compétitivité des clubs sportifs. Certaines disciplines ont fait le choix ou ont été contraintes de se professionnaliser pendant que d’autres ont maintenu leur statut amateur. En effet, l’économie de marché a compris l’intérêt des vertus du sport et a cherché à les exploiter dans le cadre de

17 LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p. 18 FONTANEL, M. (2007), « La formation morale par le sport », in Questions d’éthique, (Fontanel, J. ed.), Collection Les théories et les idées à l’épreuve des faits », L’Harmattan, Paris, p 157 - 170. 19 PÖTTINGER P. (1989), « Wirtschaftliche und soziale Grundlagen der Professionalisierung im Sport », Wiesbaden : Limpert. 11 ses principes fondamentaux, donc à des fins purement lucratives. LORET [1995]20 fait ressortir les différentes niches apparues au XXème siècle avec :  la promotion des spectacles sportifs ;  l’utilisation du sport comme « support événementiel » ;  la capacité à gérer la qualité des services sportifs que produisent les fédérations ;  l’appréciation en temps réel des facteurs de rentabilité de l’innovation sportive ;  la mise en œuvre de structure d’apprentissage utilisant les technologies et les méthodologies les plus récentes ;  l’exploitation de certaines pratiques sportives novatrices dans le cadre de l’animation de futures stations de sport de plaisance (stations-voiles, stations de sports d’hiver, stations vertes) ;  l’intégration du sport dans les politiques de développement touristique.

Le sport s’est donc à la fois développé, professionnalisé et démocratisé, ce qui a conduit les clubs sportifs à modifier leur gestion pour répondre aux nouvelles attentes sociétales, tout en poursuivant des objectifs sportifs qui restent a priori le but prioritaire de ces organisations. On pourrait ajouter la capacité du sport à l’intégration sociale locale ou nationale, par le soutien à un club ou à une équipe nationale21. Selon la Commission européenne, le sport représenterait 3% du commerce mondial22. En 2001, le poids du sport en France représentait près de 25 milliards d’euros23, soit 1,6 % du PIB. Cependant, la catégorie sport qui a fait l’objet d’études conceptuelles importantes n’en renferme pas moins pour autant des éléments très hétérogènes qui rendent difficiles l’estimation de son importance d’un point de vue économique. Les acteurs les plus représentatifs de cette évolution économique sont les « clubs sportifs fédérés et organisés en compétition », organisations où il est de plus en plus question d’économie, de rentabilité et de Bourse dans le secteur du sport. Dans ce contexte, les clubs

20 LORET A. (1995), « Sport et management : de l’éthique à la pratique », sous la direction d’Alain Loret, Editions Revue, 631 p., p.18. 21 Que n’a-t-on parlé de cette France multicolore lors de la victoire de la France dans la finale de la Coupe du Monde de football en 1998. 22 SOBRY C. (2003), « Socioéconomie du sport : structures sportives et libéralisme économique », Editions De Boeck Université, 165 p 23 SOBRY C. (2003), « Socioéconomie du sport : structures sportives et libéralisme économique », Editions De Boeck Université, 165 p. 12 sportifs qui constituent la « cellule de base du sport »24, souvent encore fondés sur les règles associatives et sur le principe de non lucrativité, doivent engager une « révolution structurelle » s’ils veulent concourir au plus haut niveau. Il devient nécessaire d’analyser la logique économique de leur gestion, la pertinence de leur organisation ou la qualité économique de leurs structures. Au regard de ces évolutions, la thèse selon laquelle les méthodes applicables à l’entreprise le sont aussi dans les clubs sportifs a été avancée, négligeant ainsi le fait que ceux-ci sont des entités économiques singulières et hétérogènes. Il convient de mettre en évidence ces facteurs de différenciation et de mesurer l’importance de leurs effets sur l’application des méthodes de management des entreprises.

2. Hypothèse centrale

La professionnalisation des « sportifs » et de leur gestion inscrit les clubs dans le monde de l’entreprise, du droit du travail et de l’économie de marché25. Nous entendons par professionnalisation, le processus de transformation d’une organisation amateur en une organisation professionnelle, mais aussi en une organisation qui s’en approche fortement, même si elle conserve son statut amateur. Autrement dit, si elle n’a pas le statut de professionnel, elle se comporte comme tel. La définition juridique du professionnel s’intéresse au seul critère de rémunération mais une définition plus large prend en compte la notion de compétence. D’autre part, la professionnalisation d’une organisation peut designer le renforcement de son efficacité, la pratique systématique de la rationalisation de son activité, c’est-à-dire l’établissement d’une relation claire entre objectifs, moyens, résultats et évaluation. Les clubs ressemblent, alors, de plus en plus à des entreprises, ils appliquent certaines règles de gestion, notamment le respect des règles comptables. Désormais, les clubs ont la possibilité de s’organiser sous forme de Sociétés Anonymes spécifiques, comme les SASP (société anonyme sportive

24 BROHM J.M. (1992), « Sociologie politique du sport », Nouvelle édition, Presses Universitaires de Nancy, 398 p. 25 TRIBOU G. (1995), « Ethique sportive et culture d’entreprise » in Sport et Management – De l’éthique à la pratique, A. LORET (sous la direction), Dunod, Paris, p 55-70, 631 p. ; GASPARINI W. (1995), « Les organisations associatives et le jeu entrepreneurial », in Sport et Management – De l’éthique à la pratique, A. LORET (sous la direction), Dunod, Paris, p 80-89, 631 p.; AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p. 13 professionnelle) ou les SAOS (société à objet sportif), autrement dit des structures se rapprochant du modèle de l’entreprise. Il en ressort une forte hétérogénéité des clubs sportifs en termes de structures, ce qui rend leur analyse plus difficile au regard du caractère non lucratif des associations qui s’oppose aux contraintes économiques de bénéfices des sociétés. Il subsiste, en effet, deux divergences d’approche. Premièrement, le sport est une activité économique spécifique qui fait référence à la « glorieuse incertitude du sport », à une logique sociale propre ou encore à des modalités de concurrence singulières. Les organisations du secteur sportif ne peuvent recourir aux seules contraintes de l’économie de marché, elles s’organisent sous la tutelle d’une Fédération qui a une délégation de responsabilité de type monopoliste de l’Etat. Dire qu’un club est une entreprise comme une autre constitue une idée simpliste, en tout cas simplificatrice de la réalité. AUGE [1998]26 parle de « perte d’identité » des clubs sportifs. Deuxièmement, tous les clubs sportifs ne se sont pas professionnalisés. Nombre d’entre eux ont encore un statut associatif, basé sur un but non lucratif, le bénévolat, le service public (de type « club ») et le don de soi. Leurs structures et leurs comportements ne ressemblent que de loin à ceux des clubs professionnels. Le cadre de référence de l’entreprise n’est alors plus opportun27. Il n’existe pas réellement de « théories sur l’économie du sport »28, ce qui favorise les hypothèses trop souvent réductrices, concernant notamment les analogies hâtives avec la gestion des entreprises qui ne sont pas toujours justifiées et encore moins démontrées29. La plupart des études engagées sur la question sont alors descriptives et limitées dans leur objet. Les activités sportives impliquent une prise en compte différente des risques. Le contexte dans lequel les analyses se situent habituellement revient, de manière analogique et

26 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 53. 27 Pour conforter cette observation, LOIRAND (2003) nous fait part que, en 2000, seuls « 30% environ des clubs sportifs compétitifs fédérés recourent aux services d’un personnel salarié » LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p. 28 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p.6. ; MINQUET J.-P.-L. (1997), « Economie et gestion du sport », Ed. City and York, 225 p., p 12. 29 Un livre important vient d’être publié sur la question. Il fait le tour d’horizon des connaissances actuelles de l’économie du sport. ANDREFF, W., SZYMANSKI, S. (2006), « Handbook of the Economics of Sport » (Edited by), Edward Elgar, Cheltenham and Northampton. 14 concrète, à comparer la structure d’une grande entreprise à une TPE, ce qui n’a que peu d’intérêt. En d’autres termes, l’évolution inéluctable et inégale d’une logique économique au sein des clubs sportifs entraîne de fortes disparités entre eux, celles-ci occasionnant à leur tour une perte sensible de fiabilité à toute préconisation générale ou particulière concernant la recherche d’amélioration de leur gestion. L’application des méthodes de l’entreprise n’est pas utile ou adaptée à tous les clubs sportifs au regard de leurs objectifs, de leur dimension et de leur statut. Pourtant, la médiatisation sans doute excessive du sport, l’intérêt sociétal porté aux clubs sportifs, l’information sur leurs méthodes de gestion, leurs transformations rencontrées depuis plus de 20 ans ainsi que l’apparition de nombreux cas de dépôts de bilan ou de rétrogradations pour raisons financières conduisent à une réflexion sur les pratiques de gestion des clubs sportifs et à ressentir les potentiels et besoins d’une nouvelle rigueur de gestion. La bonne gestion d’un club est devenu un impératif s’il ne veut pas être condamné au dépôt de bilan ou à la liquidation de biens. De nombreux concepts ont été élaborés au sein des clubs. C’est la raison pour laquelle, au lieu de proposer des solutions en aval de ce qui existe déjà pour aider les clubs sportifs à survivre compte tenu de leur situation singulière, notre recherche se propose de repartir en amont des travaux déjà entrepris en construisant un cadre conceptuel propre aux clubs sportifs. Une bonne gestion des clubs passe, d’abord, par un refus des transpositions hâtives de pratiques issues du monde de l’entreprise à celui des clubs sportifs. Elle suppose aussi une analyse des types de clubs à gérer et, dans ce dessein, de mettre en évidence une classification des clubs en fonction de leur chiffre d’affaires, de l’importance de leurs réputations et de l’hétérogénéité de leurs structures. Cette classification fondée sur le critère du degré de développement des clubs sportifs se propose de conceptualiser leur gestion, leur organisation et leur structure sous la forme d’une grille de lecture et d’utiliser ces schémas pour donner quelques préconisations évolutives pertinentes en matière de gestion. Il s’agira de démontrer la nécessité d’utilisation d’un outil permettant d’analyser l’évolution, la croissance et la vie des clubs sportifs. La recherche d’un outil conceptuel nous a conduit aux Modèles de Métamorphose (MDM). Fondés sur les 15 cycles de vie de l’entreprise30, ils permettent d’expérimenter l’hypothèse d’évolutions différenciées des clubs sportifs au regard de leurs ambitions, de leurs résultats sportifs, de leurs traditions, de leur capacité financière et de l’importance des enjeux économiques et politiques qu’ils représentent. Ils mettent en évidence l’évolution des structures de l’entreprise parallèlement à son expansion31. Ces modèles s’efforcent de décrire de manière significative la firme dans les différentes étapes de sa vie et de son développement. Cependant, les MDM n’offrent pas un ensemble d’utilisation homogène de concepts et techniques sur lequel s’appuyer en toute rigueur, ils ne font « explicitement référence à aucune théorie et se fondent simplement sur l’observation des faits »32. L’application des MDM permet de reprendre les concepts de stades de développement et de changements de dimension des clubs sportifs. La première question de recherche a porté sur l’application des méthodes managériales de l’entreprise aux clubs sportifs. La forte hétérogénéité des clubs, fondée sur la différence de leur niveau de développement et de la nature de leurs activités, implique une analyse plus fine. Dans cette perspective, il est devenu intéressant d’engager une réflexion sur la croissance des clubs sportifs pour en comprendre les schémas généraux d’évolution. Comme toute organisation, il semble que les clubs sportifs suivent des schémas d’évolution généraux, même s’il existe de fortes inégalités entre les disciplines sportives. Pour identifier les stades de développement, l’application des MDM aux clubs sportifs a constitué, de prime abord, une hypothèse de travail cohérente.

3. Fil conducteur

La démarche scientifique suppose la définition du positionnement de la recherche engagée. Elle implique un mode opératoire cohérent et la mise en évidence des perspectives attendues.

30 MARSHALL, BOULDING évoqués par PENROSE E.T. (1952), « Facteurs, conditions et mécanismes de la croissance d’entreprise », Neuilly, Edition hommes et techniques, traduction de : « The theory of the growth of the firm », Oxford. Basil Blackwell and Mott Ltd, 223 p. et SALTER M. S. (1970), « Stages of corporate development », Journal of Business Policy, N°1, p 23-37 31 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 46. 32 GODENER A. (1996), ibid., p 47 16

3.1. Positionnement de la recherche Cette thèse se propose d’utiliser les Sciences de gestion et, plus particulièrement le management stratégique, dans le secteur du sport. Notre pratique sportive à haut niveau, au cours de laquelle nous avons rencontré de nombreux clubs sportifs en situation financière difficile ayant abouti à un dépôt de bilan, à une rétrogradation, voire à leur disparition33, nous a incité à réfléchir à cette question. Il est nécessaire de lutter contre les comportements « managériaux » intuitifs des dirigeants. Les clubs sportifs ont beaucoup de difficultés à gérer la nouvelle demande des partenaires en termes de résultats sportifs et économiques et se laissent souvent dépasser par la passion sportive des résultats au prix de dépenses excessives. La rigueur de gestion des clubs est devenue une obligation économique. Pour mettre en évidence cette contrainte économique croissante, il est à la fois nécessaire de comprendre le processus de marchandisation du sport, de souligner le besoin d’amélioration de la gestion des clubs eu égard aux enjeux économiques et de définir des propositions d’action sur la base des résultats obtenus par l’application des modèles de métamorphose (schéma n°1).

33 La discipline sportive à laquelle nous faisons allusion est le hockey sur glace. Le paysage du hockey sur glace en France a connu de nombreuses modifications en raison de rétrogradations fréquentes et impromptues survenues en partie à cause d’une gestion plus ou moins hasardeuse des dirigeants des clubs. Par exemple, les clubs de Mulhouse et de Tours ont vu leur saison 2005 respectivement couronnée par la 1ère et 2ème place du championnat, mais aussi par une rétrogradation l’année suivante, pour des raisons financières, en division 3. 17

Schéma n°1 - Positionnement de la recherche

POPULATION Clubs de sports collectifs prestataires de spectacles sportifs, CONCERNEE fondées sur le principe des associations de statut loi 1901.

LA MARCHANDISATION DU SPORT

EVENEMENT

BESOIN D’AMELIORATION DE LA GESTION DES CLUBS

Propositions d’actions en Propositions d’actions en aval de ce qui a déjà été amont de ce qui a déjà été réalisé. réalisé.

POSITIONNEMENT DE NOTRE THEME Etre plus indépendant : Réalisation d’un nouveau cadre DE RECHERCHE - des résultats sportifs ; conceptuel propre aux clubs - de son environnement ; sportifs. - d’un seul et unique actionnaire ; - etc. Application des Modèles de Métamorphose.

3.2. Proposition de démarche Cette analyse se propose premièrement d’indiquer les correspondances de gestion des clubs sportifs avec celle des entreprises, compte tenu des singularités de chaque catégorie de clubs. Il conviendra avant tout de décrire chacun de ces principes. Il s’agira, ensuite, d’expliciter l’adaptation de ces modèles aux spécificités des clubs sportifs. Cependant, compte tenu de la difficulté à conceptualiser le système de gestion du sport, mais aussi d’effectuer des recoupements déjà existants avec l’entreprise, l’amélioration de la gestion des organisations sportives passe par l’application de règles de management bien établies provenant du monde de l’entreprise. Néanmoins, si le club sportif professionnel souhaite améliorer ses performances sportives et financières, il est 18 aujourd’hui important de le considérer en premier lieu comme une entreprise, en incorporant les effets de sa légitimité sociale qui fait de lui une « entreprise sociale »34. Il semblerait plus adéquat même de parler d’« entreprise sociétale ». Les critères de gestion doivent être adaptés au mode de développement « marchand » du club, selon son caractère plus ou moins professionnel et son environnement compétitif. Sur la base de réflexions déjà engagées par différents auteurs, un questionnaire assez large a été mis en place pour que les spécialistes puissent répondre à la question qui sous-tend notre thèse : « Faut-il gérer un club professionnel comme une entreprise ? ». Certaines comparaisons directes entre les clubs sportifs et les entreprises ne manquent pas d’intérêt et plusieurs règles de gestion s’appliquent aux uns ou aux autres. Il convient cependant de répondre à la question de savoir s’il est possible de concilier l’éthique sportive à l’esprit managérial. Une réponse à cette question est évidemment importante dans le choix à opérer entre le service privé de la gestion d’un club et son rôle public par les actions d’intégration qu’il développe au sein de la cité. Les MDM permettent d’appréhender les passages de stades et de fournir ainsi des indications concernant la gestion des clubs sportifs. En d’autres termes, l’objectif est de mettre en évidence les indicateurs utiles en vue d’anticiper les passages d’un club à un autre stade de développement. De cette manière, les clubs sportifs seront en mesure de mieux maîtriser les périodes de transitions (changements de dimension), lesquelles exigent une forte attention des gestionnaires dans la mesure où la survie des organisations sportives dépend de leur bon déroulement.

L’application des modèles de métamorphose (MDM) aux clubs sportifs pour faire ressortir à la fois un cadre de conceptualisation et un outil innovant dans la recherche d’amélioration de leur gestion n’est pas aisée, d’autant qu’elle n’a pas encore été appliquée au domaine du sport. Il s’agit de mettre en évidence l’ensemble des caractéristiques financières, organisationnelles, de production ou sportives significatives, en vue de construire un outil utile et efficace. Nous appuierons cette analyse par les études déjà engagées par les chercheurs pour compléter chacune des caractéristiques.

34 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 53. 19

Cette thèse se propose d’analyser la gestion des clubs sportifs dans leur réalité situationnelle, en faisant référence à leur passé. Il est vrai que les modèles de métamorphoses sont applicables communément aux entreprises en croissance, ce qui n’est pas forcément le cas de tous les clubs et de toutes les disciplines sportives. Nous ferons l’hypothèse très probable que les clubs sont des organisations en mutationqui évoluent en fonction de l’importance toujours précaire de leurs disciplines sportives.

Pour démontrer la réalité des phases des clubs sportifs, il est évident que le football constitue une discipline sportive de choix puisqu’elle est en avance dans ce processus de « marchandisation » avec des chiffres d’affaires plus élevés, s’accompagnant, dans les divisions inférieures, sur une forte tradition de bénévolat. Cependant, la médiatisation des autres disciplines sportives en Europe ne peut être comparable à celle du football même si certaines, comme le rugby ou le basket-ball, prennent une dimension économique intéressante. Leurs clubs se professionnalisent rapidement, offrant ainsi de nouvelles informations sur les stades de développement de leur gestion. Notre étude se focalisera uniquement sur les sports collectifs les plus populaires tant en nombre de licenciés que de notoriété, de médiatisation ou d’audience directe, mais aussi parce qu’ils se comportent comme des professionnels (création de ligues, contrat de travail,…). Notre choix s’est porté sur les cinq disciplines sportives, à savoir le football, le rugby, le hockey sur glace, le hand-ball et le basket-ball. Il convient de choisir des clubs ayant atteint un certain niveau de compétition.

3.3. Perspectives adoptées L’application des MDM aux clubs sportifs permet de mettre en évidence une tendance générale d’évolution des clubs. Cette recherche se veut qualitative, puisqu’il s’agit de trouver des schémas d’évolutions de caractéristiques représentatives, de les comprendre et de les utiliser à des fins d’action. Dans ce contexte, les interviews de plusieurs responsables de clubs de disciplines sportives différentes ont permis de percevoir les composantes de gestion dans les stratégies sportives des clubs, mais aussi de réaliser une collecte d’informations rétrospectives fondées sur la perception des dirigeants quant à l’évolution et aux raisons de ces modifications. Pour le recueil et la 20 validation des données du terrain, la méthodologie de recherche utilisée s’inspire des principes de la « théorie enracinée ».

Dans une première partie, nous mettrons en évidence l’évolution rapide du fonctionnement et de la gestion des clubs sportifs. Les critères de gestion sont de plus en plus appliqués dans les clubs, mais à des degrés différents selon l’ambition sportive et économique et le potentiel régional des clubs. Or, les clubs sportifs ont connu de nombreuses réformes juridiques, organisationnelles, sportives, fondées sur les exigences du marché et des rapports évolutifs entre les différents partenaires des clubs (chapitre I). La rapidité avec laquelle ces réformes ont été enchaînées n’a pas toujours permis aux clubs de prendre la mesure de ces évolutions. Il en résulte une précarité de leur vie, compte tenu du fossé qui s’est installé entre la gestion sportive et souvent autocratique des clubs et l’importance accrue des enjeux économiques (chapitre 2). Pour analyser les clubs selon les étapes de leur développement, les modèles de métamorphose (MDM) ont été utilisés (Partie 2). Dans un premier temps, il a été nécessaire de justifier le choix de l’outil (chapitre 3), de décrire son fonctionnement, l’intérêt et les limites des MDM (chapitre 4) et de mettre en évidence l’intérêt de l’application de la méthode au regard des attentes de conceptualisation (chapitre 5) et d’amélioration de la gestion des clubs sportifs (chapitre 6). Cette partie méthodologique aura pour but de présenter les modalités et l’intérêt de la méthode appliquée. La troisième et dernière partie est relative à la recherche « sur le terrain ». Les informations qualitatives empiriques et les résultats obtenus par l’application des MDM seront analysés en détail, en vue de fournir des indications intéressantes concernant l’amélioration de la gestion des clubs. Une réflexion sur les limites et l’intérêt de l’application des modèles de métamorphose sera engagée, en vue de mesurer la validité de la généralisation des résultats globaux obtenus. En fin, de nouveaux axes de recherche seront envisagés pour compléter et confirmer les conclusions principales de cette thèse.

21

PARTIE I : Fonctionnement et évolutions des clubs sportifs

22

L’histoire des clubs sportifs en France a été marquée par la loi des Associations de 1901 et, jusqu’à une période très récente, la très grande majorité des clubs vivaient encore sous ce statut. Aujourd’hui, la loi n’ayant pas évolué, les Clubs du sport de haut niveau se sont trouvés à l’étroit. Avec le développement du professionnalisme, il a fallu modifier, rapiécer, contourner un statut qui s’appliquait mal à une organisation sportive en pleine évolution économique. Les rapports entre les Clubs et l’Etat ont souvent été houleux, notamment en ce qui concerne la fiscalité ou les cotisations à la sécurité sociale. Certains clubs ont eu droit à des redressements qui les ont conduits à l’arrêt de leur activité. Dans ces conditions, face aux profondes évolutions économiques du sport, les clubs ont cherché à organiser des structures nouvelles adaptées à la spécificité de leur activité économique, afin de réduire la « précarité » de la gestion d’une entité économique qui ne se reconnaissait ni dans les entreprises commerciales stricto sensu, ni dans les formes associatives par trop restrictives. L’évolution la plus marquante, hors l’augmentation considérable des enjeux économiques du sport, s’inscrit dans le domaine du droit, avec la création de plusieurs formes juridiques destinées à recevoir légalement le fonctionnement et la gestion des clubs professionnels ou semi professionnels. Aujourd’hui, un choix juridique non négligeable existe concernant les clubs. Il semble d’ailleurs adapté aux circonstances diversifiées des conditions économiques de chaque sport. Cependant, plus généralement, on peut s’interroger sur l’évolution économique des sports qui pourrait conduire, pour ceux d’entre eux qui connaissent des enjeux économiques considérables, à devenir des entreprises « normalisées », avec sans doute quelques règles éthiques ou organisationnelles rappelant l’accomplissement d’un service public en vue de lui accorder des dérogations. Cependant, sur le plan d’une réflexion en matière de gestion, il s’agit, dans ce contexte, de répondre à la question suivante : « un club professionnel est-il une entreprise et doit-il être géré comme cette dernière? ». Enfin, quelles que soient les modalités juridiques des clubs sportifs, quels sont les moyens ou les instruments applicables dans les entreprises qu’il serait approprié d’appliquer dans le domaine de leur gestion ? Au fond, les modalités anciennes de gestion des clubs, fondés sur le bénévolat, sont d’autant plus contestées que les sports connaissent des engagements financiers importants. Pour mettre en lumière ces évolutions, il convient de présenter les fondements des clubs sportifs (1), avant de faire une analyse de leurs principales 23 caractéristiques (2). Il sera possible alors d’analyser les clubs sportifs sous l’angle de la gestion des entreprises.

1. Les fondements du club sportif

Pour connaître la structure des clubs sportifs, il convient de présenter l’association sportive depuis sa création et d’identifier les dates importantes de son évolution. De simple groupement associatif, le club a pu parvenir à une véritable société sportive à but lucratif. Il est alors question de professionnalisation des clubs sportifs. Cette professionnalisation n’est pas inéluctable, mais, pour les clubs des grandes villes, elle semble constituer la voie naturelle suivie par l’ensemble des clubs sportifs de haut niveau se proposant d’organiser un spectacle sportif. Dans ce contexte, il nous faut analyser d’abord le fonctionnement de la structure sportive associative traditionnelle qui fonctionne encore parfois pour des sports de haut niveau confidentiels, l’orientation des clubs vers la professionnalisation, avec toutes les modifications juridiques et économiques afférentes ensuite, avant de mettre en évidence les caractéristiques principales de la professionnalisation.

1.1. Fonctionnement de la structure sportive associative Avant de constituer un club professionnel, la plupart des clubs européens s’engagent d’abord dans les sentiers de l’amateurisme35. Ils suivent l’idéologie « coubertinienne » selon laquelle la vie associative est le cadre adapté à l’activité sportive. Il est donc intéressant de mettre en exergue ce système juridique qui insiste surtout sur la pratique du sport pour tous, dans le cadre d’une compétition amicale et souvent bénévole. Ensuite, les clubs se structurent, obtiennent, pour les meilleurs, des résultats qui les font monter dans une pyramide sportive, jusqu’au point où les questions de financement se posent cruellement à leurs dirigeants. Il est donc utile de retracer l’historique du club sportif. Il s’agira, enfin, de comprendre la tendance d’évolution qui conduit inexorablement à la professionnalisation des clubs obligeant une autre organisation au sein du club. Cette mise en évidence des nouvelles structures acquises par l’évolution du club vers le haut niveau interpelle sur la question des

35 Ce n’est pas le cas du système des franchises américaines qui peuvent acheter une équipe professionnelle à une franchise et créer une équipe ex nihilo, sans lien avec l’amateurisme. 24

éléments qui définissent la professionnalisation des clubs et l’importance de la « marchandisation » du service sportif.

1.1.1. Évolution des associations sportives Pour mieux comprendre le fonctionnement du club sportif, il est intéressant de retracer les diverses étapes rencontrées de sa constitution en association à sa professionnalisation. Nombre de spécialistes s’y sont évertués, notamment CALLEDE36 [2003], GASPARINI37 [2000] ou encore DEFRANCE38 [2004]. Ils démontrent cette évolution en plusieurs étapes et en relation avec certains changements sociaux notoires du XXe siècle. Les prémices des groupements sportifs ne provenaient que de « pratiques collectives et publiques, relevant de l’initiative privée »39. Ces pratiques ont débuté dans la deuxième moitié du XIXe siècle et ne sont pas encore organisées en clubs inscrits dans un championnat sportif. Les activités sportives ne constituaient en réalité que des jeux physiques, des exercices gymnastiques, les arts de combats et les distractions de plein air. Diverses institutions, comme l’Ecole, l’Armée ou l’Académie de médecine s’intéressaient au sport pour les valeurs morales et physiques qu’il génère. Le modèle britannique qui reposait sur des pratiques éducatives et des formes ludiques et compétitives, est apparu en France par l’intermédiaire des « lycéens, étudiants, rentiers et actifs qui avaient connaissance de l’exemple anglais »40. Les sportifs se sont regroupés au sein de clubs pour organiser leur pratique, puis ils ont constitué des fédérations en vue d’établir les matchs ou des rencontres interclubs sur des bases réglementaires communes et constantes41. Dès 1886, les « Unions »42 de l’Irlande, de l’Ecosse et du Pays de Galles créèrent l’« International Rugby Football Board », rejoint par l’Angleterre en 1890. Cet

36 CALLEDE J.-P. (2003), « Les associations et l’ « action sportive locale » : une phase achevée de modernisation sociétale ? » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel Prouteau, Les Presses Universitaires de Rennes , Collection L’Univers des normes, p 125 – 140, 216 p. ; CALLEDE J.-P. (1988), « Approche sociologique des transformations du club sportif. Contribution à une analyse des politiques sportives », le sport en pleine mutation, Les Cahiers de l’Université sportive d’Eté, Editions de la Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, n°3, p55-80. 37 GASPARINI W., (2000) « Sociologie de l’organisation sportive », Paris, Editions La Découverte, coll. « Repères », 117 p. 38 DEFRANCE, J. (2004), « Les institutions sportives », Cahiers Français N°320 : « Sport et société », La documentation française, Mai-Juin 2004, p 11 – 18, 88 p. 39 DEFRANCE, J. (2004), « Les institutions sportives », Cahiers Français N°320 : « Sport et société », La documentation française, Mai-Juin 2004, 88 p., p11. 40 GASPARINI W., (2000) « Sociologie de l’organisation sportive », Paris, Editions La Découverte, coll. « Repères », 117 p., p.9 . 41 DEFRANCE J. (1995), « Sociologie du sport », Editions La Découverte, Collection « Repères », Paris, 123 p. 42 "Fédération" amateur 25 organisme britannique créa paradoxalement la première fédération internationale qui avait pour objectif de gérer le rugby mondial, en prenant la responsabilité de sa promotion, de son développement et de la gestion du jeu de rugby, tout en fixant les règles du sport, les statuts et les règlements. Le caractère purement amateur de l’activité sportive était clairement établi. L’Union des sociétés françaises de sports athlétiques (USFSA) voit le jour en 1887 et représente l’ensemble des disciplines sportives. C’est en 1896 que les nouveaux Jeux Olympiques seront organisés à l’initiative du Baron Pierre de Coubertin. En 1901, la loi du 1er juillet, autorisant l’association volontaire des personnes, a offert au sport une base juridique adaptée à son développement du moment. Les associations sportives se sont en effet multipliées. Les rapports entre associations et municipalités se limitaient à des relations administratives (déclaration, contrôle de la non politisation des associations)43. Or, après la guerre de 1914-18, les pratiques sportives exigèrent des équipements modernes, poussant les dirigeants sportifs à réclamer de l’aide auprès des collectivités locales et de l’Etat. Ainsi, en 1919, lors des élections municipales, le problème des équipements sportifs devint un véritable enjeu électoral. Le sport était intégré dans une politique publique aux visées sanitaires, éducatives et sociales avérées. La création de fédérations internationales par « l’élite » britannique conditionna l’évolution du sport moderne et sa relation avec le monde économique. L’implication croissante des municipalités et de l’Etat, avec la mise en place d’une « administration publique d’un service sportif »44, s’est étendue dans les années 30. Les municipalités relayèrent les initiatives privées. Nous entrions dans une nouvelle ère dans laquelle les municipalités allaient intervenir fortement au sein même des associations sportives. En décembre 1944, ce phénomène sera amplifié avec la circulaire Sarrailh qui poussa les communes à se doter d’un OMS (Office Municipal du Sport) gérées par des bénévoles et des représentants de la municipalité. La situation de monopole reconnue par l’Etat coupa l’herbe sous le pied aux promoteurs privés qui n’avaient plus le soutien financier et statutaire que l’Etat offre aux Fédérations depuis le gouvernement de Vichy. Chaque fédération était responsable sur les questions concernant la

43 GASPARINI W., (2000) « Sociologie de l’organisation sportive », Paris, Editions La Découverte, coll. « Repères », 117 p., p.18 44 DEFRANCE, J. (2004), « Les institutions sportives », Cahiers Français N°320 : « Sport et société », La documentation française, Mai-Juin 2004, p 11 – 18, 88 p. 26 généralisation du salariat, l’internationalisation des compétitions et la commercialisation du spectacle à l’échelle nationale. Or, dans le même temps, les activités physiques et sportives constituent pour les pouvoirs publics un instrument essentiel d’éducation, de culture et d’intégration dans la vie sociale. Dans ces conditions, les pouvoirs publics, les associations et les fédérations sportives participèrent à la promotion des activités physiques et sportives. La délégation de missions de service public aux fédérations, qui a été réalisé en échange de subventions et des équipements sportifs à partir de 1945, a renforcé leur rôle sur l’organisation du sport en France. Les années 1960, comme pour nombre de secteurs, ont donné une autre impulsion au secteur sportif et, notamment, au sein des clubs sportifs. Depuis la création et l’organisation des activités sportives, une réelle rivalité s’est installée entre les pratiques rétribuées, autrement dit professionnelles, et les pratiques des amateurs. Pour DEFRANCE [2004], c’est dans les années 1965-1980 que la balance entre les activités de loisirs et le sport de compétition, l’esprit ludique et l’esprit de sérieux, la distraction et la préparation à la haute performance, évolue en faveur des seconds et provoque un déséquilibre majeur45. C’est en 1975 que le CNOSF (Comité National Olympique Sportif Français)a été, résultat du regroupement du CNS (Comité National des Sports) et du COF (Comité Olympique Français). « Entre 1975 et 1980, la diffusion de modèles d’organisation conformes aux principes du libéralisme, la « marchandisation »46 des évènements et des performances, la désagrégation partielle des politiques sportives s’observent dans le secteur sportif » en France, mais aussi dans un nombre de pays dans le monde (hors pays socialistes). Dès 1980, la vague de libéralisme transformera les ambitions des clubs sportifs. Pour subsister, il fallait qu’ils se constituent en de véritables entreprises de production de spectacle à la recherche de médiatisation, de financements et d’autonomie. Depuis, les clubs sportifs de haut niveau ne font qu’évoluer en ce sens. Il est possible de déceler quatre grandes périodes dans l’évolution des clubs sportifs (Tableau N°1).

45 Le rugby et le football choisirent des voies différentes, l’une favorable à l’amateurisme strict, l’autre au professionnalisme. Cette distinction conduisit nombre de rugbymen à être suspendus, voire exclus de la pratique de leur sport pour cause de professionnalisme. 46 DEFRANCE, J. (2004), « Les institutions sportives », Cahiers Français N°320 : « Sport et société », La documentation française, Mai-Juin 2004, p 11 – 18, 88 p. 27

Tableau N°1 – Schéma de l’évolution de l’organisation sportive : les différents états du système sportif. États de Types Caractéristiques développement d’organisation État 1 Organisation Société de gymnastique, clubs sportifs, (XIXe siècle) sportive privée de cercles, clubs privés, salles de culture type libéral. physique, sociétés commerciales diverses (armes, danse ou canotage) État 2 Organisation Sociétés, clubs, associations, unions, (1880-1930) sportive privée et fédérations, Comité International gymnastique Olympique (CIO), introduction de la scolaire. gymnastique obligatoire de l’école, sociétés commerciales de prestations d’exercices corporels. État 3 Organisation Associations, clubs, mouvements de (1930-1970) sportive privée et jeunesse, fédérations sportives, affinitaires, publique d’Etat. scolaires, sport professionnel, intervention de l’Etat dans l’organisation et la gestion du sport. État 4 Organisation Segmentation du modèle sportif, nouveaux (1970-1990) sportive privée et modes d’organisation associative, tourisme publique sportif, intervention des collectivités territoriale. territoriales (régions, départements, communes), entreprises de services et de biens sportifs, clubs professionnels. Source : Gasparini, W. (2000), « Sociologie de l’organisation sportive ». Collection Repères, Editions La Découverte, Paris, p 8.

Nous pouvons nous rendre compte, au regard de ces différentes périodes, que coexistent aujourd’hui de nombreux modèles d’organisation du sport et qu’il en résulte, de ce fait, une forte hétérogénéité au sein du mouvement sportif. B. AUGE [1998]47 considère, à juste titre, que « le modèle uniforme du club n’existe pas ». J-P. CALLEDE [2003]48, en prenant pour facteurs les relations des clubs avec l’environnement ainsi que leur fonctionnement, en dénombre sept : 1. le modèle associatif initial 2. le modèle de service municipal 3. le modèle constitué par l’articulation des deux modèles précédents 4. le modèle du club hégémonique 5. le modèle d’interpénétration(s) non normalisée(s)

47 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 14. 48 CALLEDE J.-P. (2003), « Les associations et l’ « action sportive locale » : une phase achevée de modernisation sociétale ? » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel Prouteau, Les Presses Universitaires de Rennes , Collection L’Univers des normes, p 125 – 140, 216 p. 28

6. le modèle d’interpénétration(s) normalisé(s) par surajustement(s) 7. le modèle d’interpénétration(s) normalisée(s) par élimination des écarts

Pour ce qui concerne notre analyse, il n’est sans doute pas nécessaire de rentrer dans un détail excessif, mais plutôt de mettre en évidence les évolutions « obligées » des clubs de haut niveau. Les finalités des clubs doivent être orientées vers la performance et le résultat sportifs, ce qui est le cas des sports associatifs de compétition gérés par une Fédération clairement reconnue par l’Etat49. Dans ce contexte, cette recherche exclue plusieurs formes de clubs sportifs, notamment les sociétés anonymes proposant l’activité sportive comme un service commercial, les associations qui relèvent des fédérations non ouvertes sur une compétition dûment organisée, les clubs liés aux groupements sportifs « affinitaires », « corporatifs », « scolaires » et « universitaires » et tous les sports pratiqués en loisir.

Néanmoins, la professionnalisation des clubs entraîne une confusion des objectifs puisque le sport devient lui-même un produit de consommation. Les clubs sportifs fédérés vendent ce produit sous différentes formes, notamment en billets pour l’accession à un spectacle sportif ou aux médias. Dans ce contexte, quelle est la victoire finale ? La réussite sportive ou la réussite économique ? La réussite économique au service du succès sportif ? La victoire en compétition au service des bénéfices des actionnaires ? Dans le sport américain, le profit est un élément essentiel dans les « franchises », au point que l’on ne sait plus très bien quel est l’objectif « in fine ».

1.1.2. La logique associative du modèle européen Les clubs sportifs ont été créés à partir de la loi 1901 sur les associations. Cette loi reconnaît, en effet, la liberté d’association. L’article 2 affirme : « les associations de personnes pourront se former librement sans autorisation ni déclaration préalable ». C’est un contrat librement consenti entre les citoyens qui stipule qu’il s’agit de « l’association de la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun d’une façon permanente leurs

49 LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p. Selon l’auteur, il est question de « sport associatif compétitif fédéré ». 29 connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices… » (Article 1). Leur mode de gestion est à but non lucratif avec une revendication de don de soi et de bénévolat. La création d’une association sportive n’a pas pour objectif de générer des profits (ce qui ne veut pas dire qu’aucun bénéfice n’est tiré de leur activité). Cette situation implique souvent la quasi gratuité de l’activité. En effet, « la demande sociale dans ce secteur, ne se limite pas à une offre destinée à satisfaire en priorité des publics solvables50 ». Tout autour de la pratique sportive, les clubs sont fondés sur des relations de convivialité qui constituent le fondement prioritaire de ces associations. La création du club c’est aussi un rassemblement de personnes, un moyen de lutte contre la sédentarité et, parfois, une recherche de solidarité. AUGE [1998] décrit le club comme un « groupe sportif, constitué par le rassemblement de personnes liées par des pratiques, des sentiments, des représentations et des intérêts. Lieu de socialisation et de sociabilité, organisé autour du bénévolat, le club apparaît comme une référence identitaire fondamentale51 ». Le référentiel culturel permet de conserver les valeurs associatives auxquelles le baron Pierre de Coubertin fait référence, comme l’indépendance, le désintéressement (amateurisme et bénévolat), l’humanisme, l’éthique, la solidarité et le respect de l’autre52. Selon CALLEDE [2003], « l’association – sportive – est une des figures, une des « personnes morales » de l’économie sociale, assez proche, quant aux valeurs privilégiées, des coopératives, mutuelles, fondations… »53.

Le modèle associatif revendique aussi un système participatif et démocratique avec des dirigeants d’associations sportives élus. Un président est placé à la direction de l’organisation sportive, souvent accompagné d’un trésorier, d’un secrétaire et d’au moins un entraîneur. L’évolution de la structure des clubs se caractérise par une spécialisation croissante des rôles entre les joueurs, les entraîneurs et les dirigeants. Ces activités, précédemment occupées par une seule personne, sont aujourd’hui dissociées du fait de la technicité de

50 CALLEDE J.-P. (2003), « Les associations et l’ « action sportive locale » : une phase achevée de modernisation sociétale ? » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel Prouteau, Les Presses Universitaires de Rennes , Collection L’Univers des normes, 216 p., p. 134. 51 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p. 15. 52 Cité par AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p.19. 53 CALLEDE J.-P. (2003), « Les associations et l’ « action sportive locale » : une phase achevée de modernisation sociétale ? » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel Prouteau, Les Presses Universitaires de Rennes , Collection L’Univers des normes, 216 p., p.134. 30 chacune d’elles et des contraintes bureaucratiques54. Chaque « associé » est responsable de tâches bien définies, même si chacun d’entre eux participe, d’une manière ou d’une autre, à l’ensemble des activités. Si, en théorie, il existe une hiérarchie de positions dans l’association définissant des rôles, ce schéma n’est pas toujours rigide. Ainsi, dans le domaine sportif, l’entraîneur et le directeur sportif se partagent seuls, a priori, les compétences sportives, mais il arrive fréquemment que les dirigeants interviennent dans les choix techniques. S’il existe habituellement une frontière entre les « administratifs » et les « sportifs »55, celle-ci n’est pas étanche. Plus précisément, le secrétaire a pour mission de gérer l’ensemble des documents administratifs, l’accueil, la mise en relation des membres de l’association ou encore les licences. Le trésorier a la charge des prévisions budgétaires, de la comptabilité et des dépenses et recettes du club. L’entraîneur encadre les licenciés et développe sa politique sportive. Enfin, le dirigeant est chargé de « diriger de façon collégiale un organisme, au sein d’un bureau ou d’un conseil d’administration »56. Il est cependant d’usage que chaque responsable du club participe au bon fonctionnement de l’association en remplissant des tâches dont il n’a pas directement la charge. Le but principal est le même pour tout acteur : le développement de la pratique sportive. Néanmoins, face à cette structure rudimentaire, le dirigeant endosse souvent le rôle « multi-casquettes » (selon le principe de l’omniscience et de l’omnipotence) qui le conduit à gérer la direction générale, le secrétariat, les affaires financières, le suivi d’une équipe ou d’un groupe particulier (aux côtés des entraîneurs), la promotion des jeunes, le matériel ou la formation des cadres. À cela s’ajoutent deux manières d’envisager le club : soit le loisir, soit la performance sportive. « On peut décrire les associations sportives contemporaines en fonction de quatre dimensions ou polarités : 1. l’objectif (axé sur l’intégration ou sur le fait de proposer un service) ; 2. le type d’offre (traditionnelle, changeante et dynamique) : 3. la recherche ou non de résultats sportifs ;

54 HAUMONT A., LEVET J.-L., THOMAS R. (1987), « Sociologie du sport », Presses Universitaires de France, Paris, 222 p. 55 CALLEDE J. P. (1987), « L’esprit sportif – Essai sur le développement associatif de la culture sportive », Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, Bordeaux, 194 p. 56 MALET J. (1981), « Quels responsables pour le sport ? », Thèse de Doctorat, 3ème cycle : Philosophie de l'éducation ; : Université Paris I (Panthéon – Sorbonne). P. 374. 31

4. le caractère bénévole ou professionnel de leurs ressources humaines57.

Notre thèse se propose d’analyser les clubs tournés vers la performance sportive, préparant soit un maintien difficile dans le haut niveau, soit une promotion, soit encore l’obtention de titres. Dans ce contexte, LOIRAND [2003]58 décrit la volonté de nombreuses associations sportives d’amateurs « d’augmenter significativement le niveau de compétition de leurs équipes ou de leurs sportifs individuels », afin d’aboutir à ce que l’auteur appelle « la spécialisation athlétique ». Ceci induit que le club (à différents stades de compétition et de taille) en est venu à construire des objectifs de rationalisation compétitive, en vue de ramener des trophées. À cette fin, la rationalisation porte sur des éléments techniques, humains et matériels. En d’autres termes, la spécialisation athlétique qui conduit à la « rationalisation technique » génère normalement la « rationalisation économique ». La recherche de performance sportive transforme les objectifs, les bases de gestion, la structure des clubs. Leurs résultats sportifs, mais aussi leur niveau de compétition, sont sources de financement, de notoriété et de soutien populaire. La performance sportive est recherchée, ce qui implique un investissement plus important en termes sportifs, financiers ou de temps. LOIRAND [2003] considère que le mouvement suivi par les clubs sportifs voit les pratiques sportives associatives se détourner de nombre des fonctions sociales (éducation et moralisation de la jeunesse, épanouissement personnel, santé, sociabilité locale, fraternité, solidarité), qui constituaient l’essence même de la logique sportive associative. Aujourd’hui, la victoire est une fin en soi, en tout cas c’est la priorité59. Il est question aujourd’hui de « professionnaliser » l’ensemble des associations sportives60.

57 PUIG et HEINEEMANN (1992), « El Deporte en la perspectiva del ano 2000 », in el hecho deportivo : aspectos sociologicos, culturales y economicos (Apuntes, 256), UNISPORT, Malaga, p. 94-113. 58 LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p., p 91. 59 LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p., p 92. 60 Certains auteurs se sont intéressés à ce phénomène à l’instar de CHANTELAT P. qui en a réalisé un ouvrage entier : CHANTELAT P. (2001) (textes réunis et présentés par), « La professionnalisation des organisations sportives : nouveaux enjeux, nouveaux débats », Ed. L’Harmattan, 380 p. 32

Cette professionnalisation génère, notamment pour les clubs conservant leur statut associatif, de nombreux emplois. Cependant, Le ROUX et CAMY [2001] mettent en évidence deux types d’emplois : ceux du monde professionnel, relativement bien rémunérés et ceux du monde « amateur », souvent mal payés. Tous ces emplois sont souvent très « précaires »61. De plus, « les contrats à durée déterminée (CDD) représentent, aujourd’hui, la norme du sport professionnel qui fait partie des secteurs d’activité visés aux articles L122- 1-1 et D121-2 du Code du travail, pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée »62. Quelle que soit la ligne directrice suivie par les clubs sportifs, la majorité d’entre eux fonctionne encore sur des bases associatives. Cependant, pour les clubs professionnels français, de nouveaux statuts ont été établis qui les éloignent progressivement des règles associatives et les rapprochent du système des entreprises mixtes (mi-publiques, mi-privées).

1.1.3. Les relations avec les partenaires Pour AUGE [1998], « l’environnement institutionnel regroupe des acteurs politiques et économiques qui gravitent autour du club sportif et exercent de multiples pressions. Source de contraintes ou facteur de développement, l’environnement institutionnel interfère sur les choix stratégiques et la gestion courante des clubs »63. Il existe plusieurs partenaires des clubs, des pouvoirs publics (Etat, collectivités locales), au secteur privé (entreprises, supporters) en passant par les autorités de tutelle (fédération).

1.1.3.1. Les partenaires publics Les relations entre les Clubs et les pouvoirs publics nationaux et territoriaux sont anciennes et très solides. CALLEDE [2003] affirme cependant que les associations sportives sont trop souvent en situation de dépendance au regard des financements publics. La mise à disposition d’agents publics et des infrastructures sportives municipales s’accompagne inéluctablement d’une

61 Le ROUX N. et CAMY J. (2001), « Professionnalisation de l’emploi dans le secteur du sport : une comparaison France/ Royaume-Uni », dans « la professionnalisation des organisations sportives » (textes réunis par Pascal CHANTELAT), L’Harmattan, 380 p., p. 46 et p. 56. 62 Rapport de DENIS J-P. (2003), Inspecteur des finances à Jean-Francois Lamour (Ministre des Sports), sur certains aspects du sport professionnel en France, Novembre, p. 59. . 63 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 43. 33 certaine perte de la fonction critique des dirigeants face aux pouvoirs politiques. Une certaine confusion des genres a même existé à certaines périodes, les responsables locaux appartenant aux équipes dirigeantes des clubs. De manière assez courante, les hommes politiques (maires, députés ou même Premier Ministre) ont souvent été précédemment Présidents de Clubs professionnels d’une ville (Borloo, Tapie, Berlusconi, par exemple). En France, à la fin de la seconde guerre mondiale, un accord général a été établi entre les municipalités et les clubs de sport. Les installations sportives sont construites et rénovées par la municipalité en vue de les mettre prioritairement à disposition des clubs. Cette municipalisation des équipements sportifs commence à être parfois remise en cause par les clubs sportifs de football professionnel notamment, à l’instar de ce qui existe en Angleterre où les clubs sont directement propriétaires de leurs stades. En France, quand les municipalités sont propriétaires, elles sont contraintes de tenir compte des obligations sécuritaires et économiques de mise en conformité imposées par l’Etat et les instances fédérales. Elles choisissent, souvent en concertation, elles financent l’infrastructure d’équipements nécessaire, elles assurent les coûts d’investissements, de fonctionnement et de maintenance et, dans certains cas, elles accordent des subventions aux associations sportives. En retour, les associations sportives s’engagent à exercer des fonctions de service public, sur la base du bénévolat, d’encadrement « du modèle pédagogique de sociabilité culturelle, d’apprentissage des techniques sportives et de pratique de la compétition en championnats » 64. Les associations sportives vivent souvent, dès l’origine, des subventions octroyées par les collectivités locales (communes), les Conseils généraux (département) ou encore les Régions. En France, ANDREFF et NYS [2002]65 les décrivent comme « les principaux acteurs du financement public du sport » dans la mesure où leur contribution est trois fois plus importante que celle de l’Etat (avec le Ministère de l’Education Nationale et le Ministère de la Jeunesse et des Sports entre autres). Plusieurs lois de décentralisation ayant une importance considérable sur le financement du sport ont été entérinées :

64 CALLEDE J.-P. (2003), « Les associations et l’ « action sportive locale » : une phase achevée de modernisation sociétale ? » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel Prouteau, Les Presses Universitaires de Rennes , Collection L’Univers des normes, 216 p., p126-127. 65 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p10 à 26. 34

1. loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions ; 2. lois du 7 janvier 1983 et du 22 juillet 1983 répartissant les compétences entre les collectivités.

Les communes ont une influence déterminante dans le financement des associations sportives, puisque leur contribution s’élevait à 43 milliards de francs soit 6,55 milliards d’Euros en 2002, principalement affectés à la construction et au fonctionnement des équipements sportifs, alors que les Régions et Conseils généraux (départements) atteignaient 4,1 milliards de francs, soit 625 millions d’Euros cette même année. Les régions consacraient d’ailleurs la moitié de leurs soutiens financiers aux manifestations et à l’aide au sport de haut niveau. ANDREFF et NYS [2002] considèrent que les collectivités publiques territoriales ne mettent pas vraiment en œuvre une véritable politique sportive régionale, elles s’inscrivent plutôt dans la catégorie des « commanditaires ». L’Etat, les départements ou la commune se proposent d’abord de promouvoir leur image par le canal du sport. Leur politique choisit soit le sport de loisir, soit le sport de compétition, tout dépend de la volonté d’animation des responsables politiques, avec une prise en charge plus ou moins affirmée dans les orientations données aux clubs.

En mai 2001, la Commission européenne a accordé le droit de versement de subventions, à condition qu’elles ne dépassent pas le seuil des 15 millions de francs (soit 2,3 millions d’euros). L’aide aux clubs professionnels ne doit pas excéder 5 % du chiffre d’affaires, à condition que les subventions soient octroyées en vue de les aider à remplir des missions d’intérêt général66 comme la formation, l’animation et le développement local67.

Le financement n’est pas le même pour toutes les associations sportives. Il existe des critères de répartition, décidés directement par la municipalité ou par

66 La loi de 1984 modifiée par celle du 28 décembre 1999 et du 6 juillet 2000 offre aux collectivités deux possibilités de soutien financier : Attribution de subventions pour les actions d’intérêt général et Convention de partenariat dont le montant est encadré par voie réglementaire. 67 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p14. 35 les OMS (Offices Municipaux des Sports). Les critères avancés sont généralement les suivants : 1. les équipes (cote, nature du sport) ; 2. le niveau de compétition ; 3. l’âge des sportifs (bonus pour les jeunes licenciés : formation) ; 4. les frais engagés par les clubs (les personnels, les frais des sportifs, les équipements) ; 5. les performances et le palmarès ; 6. les recettes réalisées.

Selon AUGE [1998], « la part de la subvention peut être symbolique ou constituer la part essentielle des ressources financières du club. Si cette part dépasse 30% des ressources, elle peut constituer un facteur de « municipalisation du sport »68. Ces soutiens financiers sont de plus en plus considérés comme de véritables « partenariats ». On parle plus de rémunération d’une prestation lorsque des disciplines comme le football, le basket-ball ou encore le rugby sont concernées. Les sports professionnels américains produisent « un effet d’attraction » sur l’image des villes, ce que les municipalités européennes commencent à intégrer dans leurs politiques. Autrement dit, les entreprises se localisent dans des régions qui offrent un certain nombre de services. Si, aux Etats-Unis, les personnels acceptent d’autant plus facilement une mobilité de l’emploi, ils n’en tiennent pas moins compte de l’existence proche d’une ou plusieurs franchises dans les sports majeurs (football américain, hockey sur glace, base-ball et basket-ball) comme « indicateurs » de l’intérêt d’une ville. En France, une telle reconnaissance n’est pas encore aussi clairement exprimée, mais il est indubitable que l’existence de clubs professionnels phare constitue un élément (parmi d’autres) de la localisation des entreprises et des réponses aux offres d’emplois. Dans ce contexte, le financement public des municipalités est justifié non seulement par l’image, mais aussi par l’influence des clubs sportifs sur les choix réalisés par les acteurs de l’économie.

Les collectivités exercent aussi un rôle de contrôle. Les municipalités fournissent et surveillent les subventions. Deux procédures de contrôle existent.

68 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p. 45. 36

- Par le canal de la comptabilité, elles peuvent demander une enquête par les services financiers de la Trésorerie générale. La loi Sapin (ou anticorruption) du 29 janvier 1993 donne l’obligation aux clubs de fournir annuellement un compte de résultat et un bilan, et de désigner un commissaire aux comptes pour les associations qui ont perçu une subvention égalant ou dépassant la somme de 1 million de francs69, soit un peu plus de 150.000 euros). - Le contrôle peut aussi être effectué par la commune elle-même lorsqu’elle siège au comité directeur de l’association sportive70.

Quant au contrôle de l’Etat, il s’exerce d’abord sur les compétitions. L’ordonnance du 28 Août 1945 précise que « l’Etat, par l’intermédiaire du ministre de l’éducation nationale, s’attribue le droit exclusif d’organiser les compétitions sportives et de procéder à la sélection des athlètes ou des équipes appelées à représenter la France dans les compétitions internationales ». L’Etat intervient dans la politique sportive nationale, il participe à la construction d’équipements sportifs, il assure la formation de certains cadres, il encourage le sport de masse et il soutient le sport de haut niveau71. D’un point de vue purement sportif, l’Etat intervient par l’intermédiaire des fédérations, lesquelles, par délégation ministérielle, ont pour mission d’organiser les compétitions sportives. On parle de « monopole fédéral72. Son intervention concernant l’animation sportive ou la gestion d’équipements dans les régions est désormais déléguée aux collectivités locales. Ses missions concernent davantage la coordination et la régulation du mouvement sportif. Dans ce contexte, « l’organisation « libérale » des clubs, s’efface au profit d’une organisation « municipalisée » cherchant à contrôler la vie associative »73 .

1.1.3.2. Les partenaires privés économiques Au-delà des soutiens financiers octroyés par les partenaires publics, les clubs ont compris peu à peu le potentiel qu’ils pouvaient constituer au sein de la

69 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p15 -19. 70 A noter que les municipalités étaient parties prenantes dans les Sociétés d’Economie Mixte Sportives Locales (SEMSL), disparues depuis 1999. 71 BOURG J.-F. et GOUGUET J.-J. (1998), « Analyse économique du sport », Presses Universitaires de France, Paris, 380 p. 72 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p. 46. 73 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 45. 37 société économique. D’autres opportunités de ressources ont été dégagées avec l’intérêt, moyennant une prestation, de partenaires privés. La forme la plus connue est le sponsoring (partenariat). Elle a pris son véritable essor après la seconde guerre mondiale, avec une accélération après la crise pétrolière de 1973. Ces pratiques ne s’apparentent pas au mécénat ou à la philanthropie, mais sont fondées sur des analyses économiques, dans le cadre d’un contrat définissant les prestations engageant les deux parties74. Le parrain (sponsor) fournit des moyens financiers, des produits et des équipements. Il en attend une amélioration de son image et de sa notoriété et un message publicitaire efficace concernant ses nouveaux produits. Le parrainé associe son nom à la « marque » ou au « nom » du parrain lors des compétitions sportives. En échange, il reçoit de nouveaux moyens financiers et matériels susceptibles d’améliorer sa gestion économique et, par contre coup, ses résultats sportifs. Le sponsoring se pense en termes de développement des chiffres d’affaires et de promotion des ventes75. Le mécénat constitue une autre forme de partenariat proche du parrainage, mais il n’existe pas d'échange contractuel entre le commanditaire et un club. Il n’y a donc aucune exigence concernant les résultats sportifs et financiers. Le mécénat peut être considéré comme un acte unilatéral, gratuit76. C’est une forme de bénévolat dans le domaine financier, un don. Le sport est une pratique à laquelle quiconque peut participer, mais, dans certains cas, il constitue un spectacle dont le service mérite rémunération77. En effet, pour assister à une rencontre, le spectateur peut se voir réclamer légalement un droit d’entrée. Pour J-P. MINQUET78, les spectateurs « solvables » constituent un gisement de « création de valeur » dans la mesure où, de prime abord, des tickets d’entrée sont vendus et permettent, selon l’audience, d’obtenir des recettes substantielles nécessaires à la bonne gestion des organisations sportives. Ils constituent la source financière de base à partir de laquelle d’autres sources peuvent s’ajouter. Ainsi, si le lieu de rencontre, souvent le stade ou la salle de sport, connaît un fort taux de remplissage, c’est que le spectacle proposé revêt un intérêt pour la population, ce qui conduit nombre d’entreprises, les

74 BAILLET G. D. (2001), « Les grands thèmes de la sociologie du sport », Edition L’Harmattan, Collections Logiques sociales, 256 p., p 125- 126. 75 PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p. 76 FONTANEL G. (2005), « Un club sportif n’est pas une entreprise », Colloque ADERSE, Lyon. 77 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p.20. 78 MINQUET J.P.L, « Le nouvel âge d’or du foot business », cité par l’Expansion n°591, 18.02 – 03.03.99, p.48. 38 pouvoirs publics et les notables à s’intéresser à cette ferveur et à y participer à des fins lucratives ou intéressées. Il est parfois important d’être associé à l’image d’un club sportif glorieux, d’être vu et d’obtenir des « effets collatéraux positifs » de cette association en termes d’avantages personnels ou de revenus nouveaux. Des loges sont achetées, des contrats de sponsoring sont signés, des avantages en nature accordés et des subventions octroyées. Les spectateurs créent un « effet d’entraînement » sur les autres sources de financement. Pour les attirer, plusieurs facteurs entrent en ligne de compte, parmi lesquels l’ambiance, la discipline sportive, la qualité du spectacle, l’accompagnement de ses enfants, la présence des pratiquants, etc. W. ANDREFF et J-F. NYS [2003]79 citent d’autres arguments, parfois contradictoires :  l’incertitude du résultat :  la renommée des athlètes et des équipes ;  le classement de l’équipe ;  le nombre de « vedettes » présentes dans le stade ;  la réputation d’un sportif ou d’une tactique collective.

Chaque élément a son importance, mais dans un système compétitif dans lequel évoluent les clubs sportifs fédérés, la meilleure solution implique la qualité des résultats sportifs et les victoires. C’est souvent une condition nécessaire, elle n’est pourtant pas suffisante. La performance sportive semble le meilleur moyen de fidéliser le spectateur. Elle permet, de ce fait, de conserver un taux de remplissage constant. La nature de la relation entre le club et son public est alors différente. Le spectateur devient supporter et donc client fidèle et prosélyte. Le système des abonnements permet au Club de disposer de revenus importants dès le début de la saison, selon les modalités de paiements. En Grande-Bretagne (Arsenal ou Manchester United), en Espagne (le Barça ou le Real de Madrid) et aux Etats-Unis (pour les sports franchisés), certaines places des abonnés entrent dans les héritages. Dans ce contexte, les risques afférents à la billetterie sont très réduits. « Le supporter a d’abord été un simple spectateur qui s’est aperçu de la portée de ses encouragements et qui est revenu apporter à l’équipe de son choix l’appui de sa sympathie et de sa voix. Il s’est aperçu, en outre, que lorsque d’autres voix se joignaient à la sienne, l’équipe était galvanisée… le supporter

79 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p. 97-100. 39

était né »80. D’ailleurs, le spectacle ne provient pas uniquement des sportifs, mais aussi des supporters. M. PAUTOT [2003] fait référence aux effets de « masse », à la « panoplie de supporters », à « la Ola ! », aux « relations passionnelles avec les clubs »81. Il est fréquent que les associations sportives comptent parmi leur public un véritable « club des supporters ». Les spectateurs ne viennent pas uniquement pour le spectacle sportif, ils sont aussi sensibles aux prestations « offertes » par les organisateurs82. Le club de supporters joue son rôle dans ces prestations puisqu’il est l’instigateur d’une certaine ambiance sur les lieux de compétitions. D’autres éléments, cependant, entrent en jeu, notamment le confort de visionnage (stade, écran, buvette, sièges ou tables de marque). Une véritable politique d’abonnements peut être mise en place, en la complétant par la production de produits dérivés. Dans ce contexte, le supporter devient un client et un acteur, un consommateur des services sportifs et un producteur d’ambiance83. Dans les grands clubs de football espagnols, les « socios » sont des actionnaires d’un Club qui élisent le Président. C’est le cas du Real de Madrid ou de Barcelone. Dans ces conditions, les « socios » sont à la fois des clients, des actionnaires et des supporteurs.

ANDREFF et NYS [2003]84 révèlent que, jusque dans les années 1980, les spectateurs, les subventions et les sponsors constituaient l’essentiel du financement des clubs professionnels. Ces trois sources conservent aujourd’hui une part importante, mais elle s’affaiblit au profit d’autres sources, en particulier les financements des médias. La presse, les radios, les chaînes de télévision et Internet sont entrés dans le monde du sport, notamment professionnel, et ils constituent des partenaires d’une grande importance. Les médias « exercent une triple fonction, à la fois chambre d’écho des émotions sportives, élément régulateur de l’opinion publique en matière de sport et structure d’organisation

80 MESMEUR R., « Les supporters », cité par PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p., p. 212. 81 PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p., p 214- 215. 82 PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p., p.208. 83 A l’Olympique de Marseille, certains groupes de supporters assurent les abonnements et certaines formes de billetterie. Cette « confusion » n’est pas très saine et elle réduit notablement les degrés d’autonomie de l’équipe dirigeante. 84 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p.50. 40 des grandes épreuves populaires »85. La télévision en particulier et les autres médias ont transformé le spectacle sportif en un fait universel à l’échelle planétaire86. M. PAUTOT [2003] révèle même qu’ avec le sponsoring, la vente des droits de télévision constitue la principale ressource du mouvement sportif87. Il convient, cependant, de relativiser cette analyse, en indiquant que seules certaines disciplines ont la possibilité de recevoir d’importantes sommes issues des médias. C’est le cas notamment du football, du basket-ball ou du rugby88. La place octroyée par les chaînes de télévision aux autres sports collectifs est très faible. Or, les ressources se renforcent mutuellement. La forte couverture médiatique a pour conséquence d’attirer de nombreux sponsors89. Si la télévision est très sélective, malgré l’existence de chaînes thématiques, les autres médias le sont un peu moins. Ils participent autrement. Il n’est pas rare de voir la presse créer des compétitions sportives. Si l’enjeu était de multiplier les ventes, le spectacle sportif s’est indirectement aussi enrichi. Les courses cyclistes ont été souvent créées et sponsorisées par les médias, notamment le Tour de France, le Midi Libre ou le Dauphiné Libéré. L’Equipe inventera la Coupe d’Europe de football des clubs champions en 1954, puis de Basket-ball, de ski, et d’athlétisme en 1966 ou encore la Route du Rhum à la voile en 1978. Le spectacle sportif n’aurait pas l’ampleur qu’il a aujourd’hui sans l’imagination, les récits et le soutien actif de la presse90. Ensuite les radios ont suivi le mouvement de la presse. Au printemps 2002, la Ligue Nationale de Football (LNF) a proposé des droits radiophoniques pour la retransmission des matchs, alors que la radio avait permis au mouvement sportif de se développer dans le cadre d’un contrat non écrit de partenariat gratuit. En définitive, cette demande a été rapidement abandonnée devant les oppositions qu’elle avait déclenchées.

85 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 48. 86 BROHM J.-M. (1976), « Sociologie politique du sport », Paris, J. P. Delarge, 357 p., p. 208. 87 PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p., p.240. 88 La loi des finances de 2000 permettait un prélèvement de 5% sur les droits de retransmission télévisée des manifestations sportives à compter du 1er juillet 2000 pour la redistribution à d’autres organisations sportives dans une optique de développement du sport dans son ensemble, néanmoins la loi organique relative aux lois de finances du 1er Août 2001 empêchera, dès le 1er janvier 2005, le FNDS (Fonds National pour le Développement du Sport) de fonctionner de cette manière. 89 TOUCHAIS L. (2000), « Sport spectacle et contrôle de gestion : utopie ou réalité ? (Etude des clubs de football professionnel) », XXIème Congrès National de l’Association Française de Comptabilité, Mai 2000, Angers, p 940 - 960. 90 PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p., p.229. 41

Depuis plus de vingt ans, la télévision s’est investie dans le marché du spectacle sportif. Le « Sport-business » ne serait pas au niveau de développement qui est le sien sans la télévision. « Un spectacle sportif se décompose en deux produits joints : le spectacle direct constitué des entrées au stade et le spectacle indirect qui résulte de sa retransmission par les médias »91. Or, dès les années 1990, les chaînes peuvent devenir payantes (chaînes à péage) et sont financées par des entreprises de médias appartenant à des hommes d’affaires comme Berlusconi (la cinq) ou Bouygues (TF1). D’autres entreprises deviennent des filiales comme Havas ou la Générale des eaux (Canal +). Elles vont être à l’origine du phénomène de sport-spectacle92. Certains sports font l’objet de surenchères de la part des télévisions pour la retransmission des événements sportifs marquants. En contrepartie, ils permettent d’obtenir des taux d’audience sans précédents. La télévision est donc indissociable de l’argent du spectacle sportif, avec l’apparition de chaînes thématiques sur le sport. C’est en juillet 1948 que, pour la première fois, la télévision française retransmet du sport avec l’arrivée du Tour de France93. Depuis cette date, la télévision est présente dans tous les spectacles sportifs à forte audience potentielle, dont elle fait directement et indirectement la publicité. Au regard des différents partenaires existants dans la sphère des clubs sportifs, la question que l’on peut se poser est de savoir si le sport est du domaine privé ou public. En France, il semble mixte94, tandis qu’aux Etats-Unis il appartient plutôt au secteur privé et universitaire. Le sport fait référence à la compétition, à la communion collective et au jeu. Les rapports entre les sportifs et leurs « clients » sont donc fondés sur un acte de sympathie, une admiration, mais aussi une forme de partenariat économique qui ne peut généralement durer sans des retombées économiques positives95.

91 NYS J.-F., « Le marché des spectacles sportifs », dans le Monde du 21 Juin 2002. 92 SOBRY C. (2003), « Socioéconomie du sport : structures sportives et libéralisme économique », Editions De Boeck Université, Bruxelles, 165 p. 93 PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p., p.231. 94 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p 28-30. 95 Ce n’est pas toujours le cas. Les apports en capitaux et en liquide de M. R. Louis-Dreyfus, le dirigeant de l’Olympique de Marseille, se référencent plutôt dans le domaine du bénévolat. 42

1.1.4. Les obligations des clubs sportifs Les clubs sportifs associatifs ont des obligations fiscales et de gestion spécifiques. Lorsqu’ils se professionnalisent, leur statut et leur fonctionnement quotidien évoluent pour suivre des normes de gestion qui s’apparentent à celles des entreprises, à quelques exceptions près.

1.1.4.1. La législation La loi du 1er Juillet 1901 sur les associations a permis aux clubs sportifs de connaître un formidable développement, en insistant sur le caractère non lucratif (article 1) et la liberté de la constitution de ces groupements de personnes (article 2). Les évolutions financières du sport ont poussé le législateur à prendre des mesures pour faire face au développement de certains clubs qui se trouvaient à l’étroit dans ce texte initial, en modifiant les lois concernant la structure des clubs sportifs. Ces évolutions ont été l’occasion de controverses. En effet, devant le renforcement du poids économique de certaines disciplines, le régime des associations, pourtant idéal à la naissance de ce mouvement sportif, n’était plus en phase avec les réalités économiques et avec les nouvelles attentes des clubs comptant une section professionnelle en leur sein. De nombreux clubs, a fortiori les clubs de football, ont commencé à plus ressembler à des entreprises de spectacles qu’à des associations à but non-lucratif. Un nouveau cadre légal a été décrété en 1975 avec la loi « Mazeaud », amendée par la loi du 16 juillet 1984 (dite loi « Avice »), elle-même suppléée par la loi « Buffet » du 28 décembre 1999, complétée par trois décrets en 2001 et surtout par la « loi dite Lamour » en 2003. Ces lois constituent l’essentiel des règles juridiques qui réglementent l’organisation des activités physiques et sportives. La loi n° 99- 1124 du 28 décembre 1999, modifiant le régime des sociétés sportives et s’inscrivant dans le cadre du travail de modernisation des statuts des clubs sportifs entrepris par la plupart des Etats membres de l’Union européenne et de régulation de certaines pratiques inhérentes à l’environnement du sport professionnel, a particulièrement accéléré le processus de privatisation des clubs sportifs professionnels. Elle porte sur diverses mesures relatives à l’organisation d’activités physiques et sportives (J.O. du 29 décembre 1999). - les nouvelles formes juridiques aux associations sportives ; - les dispositions relatives aux relations entre l’association et la société qu’elle a créée pour la gestion du secteur professionnel ; 43

- le versement des subventions par les collectivités territoriales dans le cadre de missions d’intérêt général ; - les centres de formation des clubs sportifs professionnels ; - la protection des mineurs ; - l’entrée en bourse des clubs sportifs professionnels.

Cette loi a eu pour objectif de réactualiser les principes de lois plus anciennes qui ressemblaient à des rapiéçages de qualité discutable, objets de compromis. En France, la première tentative pour faire face aux évolutions sociétales en proposant des régimes juridiques spécifiques aux clubs sportifs a été la création de la société d'économie mixte locale (SEML), proposée de manière optionnelle par la loi « Mazeaud » de 1975. Elle n'a pas eu l’effet escompté et peu de candidats ont été recensés96. La loi du 16 juillet 1984, rebaptisant la société d'économie mixte locale (SEML) en société d'économie mixte sportive locale (SEMSL) et proposant la société anonyme à objet sportif (SAOS), a eu plus d’efficacité, même si elle a été retouchée et complétée en 1992. Cette loi constitue depuis, la base de la structuration des clubs et elle a fait l’objet de nombreuses modifications continues intéressantes. C’est à cette date de 1992 aussi que l'association à statut renforcé, créée en 1987, a pris fin, malgré son succès auprès des partisans du régime associatif. Les associations sportives sont alors dans l’obligation de choisir, en fonction du franchissement ou non de l’un des seuils, entre la création d’une société commerciale ou le retour à une forme associative classique. L’article 11 de la loi du 16 juillet 1984 (modifié par l’article premier de la loi du 28 décembre 1999) prévoit que les associations sportives dont le montant des recettes globales tirées de l'organisation de manifestations sportives payantes ou dont le montant des rémunérations versées aux sportifs professionnels dépasse des seuils fixés par décret en Conseil d’État, peuvent ou sont dans l’obligation de (s'ils prennent une certaine importance) constituer, pour la gestion de leurs activités professionnelles, une société commerciale. Dans ce cas, il s’agit de créer une filiale en constituant des sociétés à statut particulier, dans un délai d'un an.

96 Trois clubs seulement avaient opté pour cette formule avant 1984. 44

Un décret de 1986 avait fixé le seuil à 2,5 millions de francs de chiffre d’affaires et cette somme est demeurée inchangée jusqu’au décret du 17 juin 1999 n° 99-504. Celui-ci les portait à 7,5 millions de francs pour les recettes des manifestations payantes et à 5 millions de francs pour les rémunérations versées (soit, respectivement, 1.143.368 euros et 762.245 euros). Le décret n° 2002- 608 du 24 avril 2002, les a désormais fixés à 1,2 million d’€uros pour les recettes de manifestations payantes et à 800.000 €uros pour rémunérations versées aux sportifs97. Sont prises en compte, pour déterminer si ces montants sont atteints, les moyennes des recettes perçues et des rémunérations versées au cours des trois derniers exercices connus telles qu’elles résultent des documents comptables du groupement sportif. Ces seuils ont été rendus alternatifs et non plus cumulatifs, depuis la parution des trois décrets d’application du 16 février 2001. Désormais, sont donc inclus dans le champ de la loi, les groupements qui ne remplissent que l’un des deux critères. En outre, l’association sportive et la société qu’elle a constituée définissent leurs relations par une convention approuvée par leurs instances statutaires respectives. Les associations sportives, depuis la loi du 28 décembre 1999 qui reprenait les grands principes de la loi du 16 Juillet 1984, ont la possibilité d’opter pour plusieurs sociétés, dont la SAOS proposée en 1984. La loi Buffet de 1999 énonce que : - La constitution de société d’économie mixte sportive locale (S.E.M.S.L.) n’est plus autorisée à fonctionner, à l’exception de celles constituées avant la parution de la loi. Le capital de ces S.E.M.S.L. est détenu majoritairement soit par l’association-support seule, soit conjointement par l’association-support et les collectivités territoriales.

- Le régime juridique de la société anonyme à objet sportif (S.A.O.S.), prévu par la loi du 16 juillet 1984, n’a pas été modifié. La SAOS ne peut ni distribuer des dividendes, ni rémunérer ses dirigeants élus. « L’association-support » doit détenir au moins le tiers du capital social et des droits de vote de la S.A.O.S. Elle constitue une société sans but lucratif, elle doit adopter des statuts conformes à des

97 Rapport de Denis Jean-Pierre (2003), Inspecteur des finances à Jean-Francois Lamour, Ministre des Sports, sur certains aspects du sport professionnel en France de Novembre, p.23. 45

statuts types définis par décret en Conseil d'Etat98 et son capital doit être composé d'actions nominatives. Elle constitue la seule « survivante » des formules mises en place depuis 1984. Son statut déroge toujours au droit commun des sociétés anonymes.

- L’entreprise unipersonnelle sportive à responsabilité limitée (E.U.S.R.L.) est juridiquement une SARL ne comprenant qu'un seul associé. Elle a une responsabilité limitée à un associé unique qui n’est autre que l’association-support à l’origine de la création de la société. Au même titre que la SAOS, elle ne distribue pas de bénéfices, lesquels sont affectés en totalité à la constitution de réserves. Elle a cependant la possibilité de rémunérer ses dirigeants : en l’espèce, il s’agit d’un gérant tiers, personne physique désignée par l’associé unique. Elle devra adopter des statuts conformes à des statuts types définis par décret. Elle peut donc convenir aux associations sportives qui ne souhaitent pas rechercher des partenaires extérieurs. Elle offre une solution de substitution aux associations qui avaient, pour cette raison, choisi le régime de l'association à statut renforcé. On ne peut guère attendre, en revanche, qu'elle soit un instrument efficace du développement de la capacité de financement des clubs sportifs.

- Cette loi propose aussi une quatrième forme de sociétés qui semble la plus aboutie et la plus novatrice : la société anonyme sportive professionnelle (SASP). Elle constitue, en effet, une société anonyme proche du droit commun, avec la possibilité de rémunérer ses dirigeants et de verser des dividendes aux actionnaires. Néanmoins, la S.A.S.P. comporte certains aspects dérogatoires qui maintiennent une spécificité sportive et garantissent le respect de l’éthique sportive. Elle doit, comme les autres sociétés sportives, adopter des statuts conformes à des statuts types et organiser, dans le cadre d'une convention, ses relations avec l'association sportive qui disposera à son égard de certains pouvoirs de contrôle. Par ailleurs, l’Article 13 de la loi

98 Il est à noter, à ce propos, que ces statuts types, comme ceux de la SEMSL, comportent une clause soumettant les cessions d'actions à l'agrément de la société. Cette clause, qui limite la libre négociabilité de ces titres, s'oppose à leur admission aux négociations sur les marchés réglementés français, en application des règlements de la SBF-Bourse de Paris et de la Société du Nouveau Marché. 46

n°84-610 du 16 juillet 1984, modifié par la loi n°99-1124 du 28 décembre 1999 art. 2 prévoit encore, au même titre que les autres sociétés sportives, l’interdiction de faire appel publiquement à l'épargne99. La rédaction de l’article premier des statuts types impose aussi de réserver au moins une action à « l’association-support » dans le capital de la S.A.S.P.. Celle-ci doit conserver une participation minimale dans le capital de ladite société, mais les statuts types ne lui interdisent pas de céder ses parts, dans le respect des dispositions relatives aux cessions d’actions (article 9 des statuts types). En outre et pour préserver l’équité sportive, l’article 15-1 de la loi du 16 juillet 1984 susvisé prohibe, pour une même personne privée, la participation dans le capital de plus d’une société SASP.

On peut donc considérer que la SASP est la seule société sportive qui puisse véritablement être considérée comme une entreprise fonctionnant normalement dans une économie de marché dans la mesure où elle a la possibilité de distribuer des bénéfices à ses actionnaires. Elle se présente comme un groupement de personnes dont la finalité (ou l’une des finalités) est la réalisation et le partage d'un profit. Pour la première fois, le droit français donne la possibilité, par ce statut, d’atteindre une gestion réellement commerciale des clubs sportifs professionnels : C’est une véritable « révolution culturelle »100. La question de la fiscalité se pose alors.

1.1.4.2. La fiscalité Quatre critères peuvent conduire les associations sportives à un assujettissement à la fiscalité : 1. l’utilisation d’immeubles ; 2. la présence de salariés ; 3. l’exercice d’une activité lucrative ; 4. l’organisation de spectacles sportifs.

99 La loi n°84-610 du 16 juillet 1984, article 11, modifiée par la Loi n°2003-708 du 1 août 2003, article 3 (JORF 2 août 2003), perpétue cette volonté. 100 BORDAS, J. (1999-2000), « Proposition de loi portant diverses mesures relatives à l’organisation d’activités physiques et sportives » , Rapport 24, Commission des affaires culturelles, p 2. 47

Tout organisme, associatif ou non, dont l’objet est lucratif, est assujetti à trois impôts : la TVA, l’impôt sur les sociétés, la taxe professionnelle. Ainsi, un dirigeant de club qui ne poursuit pas de but lucratif n’échappe pas à ces impôts s’il perçoit des rémunérations ou des indemnités. « L’important n’est pas le but poursuivi par l’organisme mais les conditions dans lesquelles sont réalisées les opérations mises en œuvre pour atteindre ce but »101. Ainsi, quelle que soit la nature des organisations sportives, nombreuses sont contraintes, pour atteindre leurs objectifs, d’effectuer des opérations commerciales (comme la vente de billets d’entrée au stade, le commerce de gadgets ou la fourniture de boissons, par exemple102). Pour déterminer le caractère commercial, on prend en compte trois critères : - le but de l’organisme est-il d’enrichir ses membres ou non ? - la concurrence au secteur commercial est-elle présente ou non ? - la gestion du club est-elle différente de celle des entreprises ou non ?103

Au fond, le droit fiscal commun s’applique. Par contre, l’interprétation n’est pas de l’ordre de l’évidence.

1.1.4.3. La comptabilité La comptabilité est un outil de gestion à la disposition des dirigeants des organisations sportives. Son système n’est pas parfaitement adapté aux clubs sportifs. Le Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF) ainsi que de nombreuses fédérations proposent un plan comptable adapté au sport104. Le bilan traduit l’état du patrimoine, le compte de résultat et les opérations de gestion. Les exigences sont moins grandes pour les associations que pour les sociétés (élaboration obligatoire de documents)105. Lorsque les clubs sont professionnels, la fédération impose des obligations financières et de gestion : plan comptable professionnel, documents prévisionnels, présentation de comptes équilibrés (sous peine de rétrogradation, de limitation de masse salariale ou du

101 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p.55. 102 ANDREFF W., NYS J-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p.55. 103 ANDREFF W., NYS J-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p. 56. 104 ANDREFF W., NYS J-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p. 35. 105 ANDREFF W., NYS J-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p. 35-36. 48 recrutement)106. Aujourd’hui, les instruments de compte et les statuts des clubs se rapprochent des contraintes des entreprises normales. Dans ce contexte, même s’il existe encore des spécificités indéniables, de plus en plus reconnue d’ailleurs, les clubs professionnels rapprochent leur gestion, leurs obligations et leurs droits de ceux qui s’expriment dans l’économie de marché.

Conclusion Aujourd’hui, le modèle associatif est en train de traverser un tournant de sa vie tant les relations qu’entretiennent les clubs avec leur environnement changent, la législation s’adapte et la recherche de performance réclame une plus forte professionnalisation. Il semble s’essouffler au profit de modèles plus proches de l’entreprise de manière à mieux répondre aux nouveaux enjeux économiques. Apparaît une certaine ambiguïté depuis que de nombreux clubs sportifs « fédérés » se sont professionnalisés. En effet, la notion de professionnalisme s'accompagne souvent de celle de commercialisation du sport. Le sport, tel qu’il est proposé dans certains clubs sportifs professionnalisés, devient un véritable produit économique à but fortement lucratif. Toutes les nouvelles activités sont un moyen de « faire de l’argent ». Initiations à la discipline sportive, vente de billets de spectacles sportifs, vente de produits à l’effigie du club, visites du site sportif deviennent des pratiques courantes pour subvenir aux besoins de ressources des clubs sportifs professionnalisés. Dans les clubs au statut encore associatif, ces pratiques n’existent pas sous cette forme ou n’ont pas le même impact sur leur survie. Il n’existe plus ou pas de modèle universel de clubs sportifs.

106 TOUCHAIS L. (2000), « Sport spectacle et contrôle de gestion : utopie ou réalité ? (Etude des clubs de football professionnel) », XXIème Congrès National de l’Association Française de Comptabilité, Mai 2000, Angers, p 940 - 960. 49

Encadré n°1 – Résumé de l’histoire des clubs sportifs

Les clubs sportifs ont été créés au début du XXe siècle, sous une forme associative qui valorisait les valeurs attribuées au sport. Ils ont été soutenus dans leur démarche par les pouvoirs publics et les agents économiques. La recherche de la performance et l’intérêt grandissant des agents économiques pour les clubs sportifs accroissent la complexité de la gestion des clubs sportifs et le modèle associatif n’est pas armé pour faire face à ces nouvelles contraintes financières. Ainsi, si le modèle associatif subsiste pour toutes les valeurs qu’il véhicule, certains clubs fonctionnent aujourd’hui selon des règles de gestion qui appliquent les principes et les méthodes des entreprises.

1.2. L’orientation des clubs sportifs vers la professionnalisation Pour AUGE [1998]107, un club sportif est « une entité sociale particulièrement intégrée dans notre société » qui demeure « en interaction permanente avec l’extérieur ». La recherche de la performance sportive est une des raisons qui a entraîné les clubs sportifs à modifier leur gestion et à chercher des financements complémentaires. L’apport d’argent dans le sport est censé améliorer le niveau de performance des clubs, ce qui conduit la concurrence à répondre aussi à ce défi économique. Il en résulte une amélioration progressive de la qualité du spectacle offert, ce qui incite les investisseurs, les collectivités territoriales ou les supporters à améliorer leurs soutiens financiers, selon différentes modalités de prestations. Par cette ligne de conduite, LOIRAND [2003] considère que les clubs sportifs peuvent passer de « groupements locaux d’individus librement associés autour d’une passion commune pour un sport envisagé comme loisir, au statut d’instance de production de victoires sportives plus ou moins coupées de leur ancrage local initial108 », évolution qui suppose la professionnalisation de l’organisation sportive. Si cette ligne directrice choisie par le club sportif induit une professionnalisation des organisations sportives,

107 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 43. 108 LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p., p.94. 50 l’évolution des clubs sportifs a aussi un lien étroit avec celle de son environnement. LE ROUX et CAMY [2001] estiment que « la professionnalisation des organisations sportives peut s’expliquer à partir d’éléments plus généraux tels que la pression exercée par la demande (niveau d’exigence croissant et plus diversifié ayant facilité l’apparition d’un marché pour le secteur privé commercial) ou par les pouvoirs publics qui, en période de restrictions budgétaires tendent à exiger une rationalisation de la gestion des organisations (généralisation des contrats d’objectifs, par exemple) »109. En effet, comme l’historique des clubs sportifs a pu le mettre en évidence, les vertus du sport ont été reconnues d’utilité publique, ce qui a favorisé les relations privilégiées avec les collectivités locales et l’Etat. Progressivement, elles ont ensuite été utilisées à des fins purement lucratives. L’intérêt de la société pour les vertus, les joies ou les recettes que le sport est en mesure d’apporter ont conduit les clubs sportifs, transmetteurs de premier ordre, à modifier leur fonctionnement et leur mode de gestion, tout en poursuivant leurs objectifs sportifs qui restent, a priori, fondés sur des objectifs de victoire, au moins dans le modèle européen. Aujourd’hui, le sport est entré dans une nouvelle dimension en raison de l’engouement populaire, de la médiatisation de plus en plus élargie et intense ou encore de la prise de conscience des vertus sportives dans les rapports entre les hommes. Depuis les années 80, l’évolution de l’environnement des clubs sportifs fédérés s’est accélérée, transformant profondément les relations au sein du monde sportif. Certaines disciplines sportives, comme le football, ont tiré leur épingle du jeu. Nombre de clubs ont transformé leur activité sportive en un véritable produit commercial dont ils ont désormais besoin pour survivre. Dans cette conjoncture, plus qu’un service public, le club doit des comptes à ses parties prenantes avec l’avènement d’agents économiques comme les entreprises partenaires, les médias, les collectivités locales ou encore les notables. L’obtention d’un environnement large et sophistiqué exige une attention toute différente. Une logique économique s’est immiscée entre les acteurs, ce qui conduit à une plus grande responsabilisation des clubs. Dans ce contexte, la tentation de la professionnalisation, aussi bien dans le secteur sportif qu’administratif, s’impose peu à peu aux membres de l’association.

109 Le ROUX N. et CAMY J. (2001), « Professionnalisation de l’emploi dans le secteur du sport : une comparaison France/ Royaume-Uni », dans « la professionnalisation des organisations sportives » (textes réunis par Pascal CHANTELAT), L’Harmattan, 380 p., p 42. 51

1.2.1. De l’amateur au professionnel Dans leur guide pratique, E. BAYLE et M. BRUZEK [2005]110 proposent, au titre de leur dixième enjeu intitulé « vivre avec les partenaires » d’injecter de la « professionnalité ». Selon eux, tout accord de partenariat public ou privé impose aujourd’hui à toutes les associations de modifier leur état d’esprit et leurs comportements, en vue d’adapter une partie de leur organisation à une activité gérée de manière rigoureuse. Ils insistent sur le « comportement professionnel », y compris de la part des bénévoles. Dans ces conditions, il s’agit d’éviter l’aléa moral, concept bien connu des économistes. Lorsque la responsabilité des dirigeants n’est pas suffisamment précise quant aux résultats financiers et sportifs, notamment lorsque des circonstances atténuantes aux gestions approximatives leur sont accordées du fait du bénévolat, le risque est de faire subir aux clubs sportifs les effets néfastes de la prévarication, de l’incompétence ou d’un management mis en place pendant le seul temps libre des principaux Présidents de clubs. Un véritable changement d’état d’esprit apparaît dans la gestion moderne des clubs sportifs. L’obligation de répondre à de nouvelles attentes auprès des partenaires, des supporters ou des pouvoirs publics induit de plus en plus le passage de l’amateurisme au professionnalisme. Or, « la recherche accrue de professionnalisme engendre un certain nombre de contradictions au sein du système traditionnellement bénévole »111. Aujourd’hui, le bénévolat reste une dimension fondamentale du mouvement sportif, mais la « professionnalisation » de certaines fonctions semble inéluctable, avec toutes les conséquences relatives au droit fiscal112. Aujourd’hui, il a évolué d’un statut sans contrainte particulière à des responsabilités légales, mais aussi managériales, accrues113. Au fond, la recherche de compétence est devenue obligatoire dans la plupart des clubs de haut niveau, même pour les bénévoles. G.D. BAILLET [2001] évoque « une crise

110 BAYLE M., BRUZEK M. (2005), « Le management associatif (guide pratique) », Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF), Paris, 100 p., p. 65. 111 Le ROUX N. et CAMY J. (2001), « Professionnalisation de l’emploi dans le secteur du sport : une comparaison France/ Royaume-Uni », dans « la professionnalisation des organisations sportives » (textes réunis par Pascal CHANTELAT), L’Harmattan, 380 p., p. 45. 112 HOUEL (1989), « Le club, entreprise de sport ? A quelles conditions ? Est-ce souhaitable ? » "Les cahiers de l'université sportive d'été n°04 - Le club sportif au quotidien. mythes. réalités. Projets ». 210 p, p 101. 113 CALLEDE J.-P. (2003), « Les associations et l’ « action sportive locale » : une phase achevée de modernisation sociétale ? » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel Prouteau, Les Presses Universitaires de Rennes , Collection L’Univers des normes, 216 p., p 139. 52 du bénévolat »114 pendant que G. LOIRAND [2003] parle de « crise de l’amateurisme » 115. Celui-ci l’explique par la constatation empirique selon laquelle on « ne peut rien demander à des bénévoles économiquement désintéressés en termes d’objectifs sportifs précis à atteindre – sous peine de provoquer leur retrait - ni les sanctionner en leur retirant « leur » équipe ou « leurs » sportifs pour peu que les résultats « laissent à désirer » - sous peine de susciter une éventuelle révolte des amitiés dans le club »116. C’est pourquoi le bénévolat ne semble pas toujours compatible au sein des clubs recherchant prioritairement la performance sportive. G.D. BAILLET met en évidence la crise du bénévolat comme phénomène économique et social lié au développement des recettes provenant des spectacles sportifs, à l’élévation du niveau de performances sportives, à l’amélioration du matériel et de l’équipement et à la rencontre de l’offre de certaines entreprises industrielles et d’une demande émanant de certaines catégories sociales. Il existe aussi des considérations d’ordre « politico- institutionnel », avec la prise en charge financière des athlètes, par les autorités publiques de leur pays d’origine, pour figurer sur les plus hautes marches du podium lors de compétitions internationales comme les Jeux Olympiques. Il convient, cependant, de ne pas faire l’amalgame entre «l’ amateurisme » et le « bénévolat ». Le bénévole peut avoir un comportement et une compétence professionnels, qu’il met gratuitement à la disposition du Club. Ainsi, une association peut être gérée avec toute la rigueur professionnelle, même si les bénévoles en portent la responsabilité. D’ailleurs, comme l’explique B. JEU [1993]117, le bénévolat n’est pas synonyme d’incompétence et, réciproquement, le salariat ne veut pas dire absence de dévouement, tout comme le professionnalisme ne se traduit pas par une absence d’amour du sport. Il n’existe pas forcément d’antagonisme entre le salariat et le bénévolat.

114 BAILLET G. D. (2001), « Les grands thèmes de la sociologie du sport », Edition L’Harmattan, Collections Logiques sociales, 256 p., p. 113-114. 115 LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p., p. 97. 116 LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p., p. 98. 117 JEU B. (1993), « Analyse du sport », Collections pratiques corporelles, Paris, Presses Universitaires de France, 192 p., p. 126. 53

L’association constitue souvent un domaine de réunion de compétences, où une synergie entre les bénévoles donne vie à un club, souvent avec l’aide de professionnels qui ont pour fonction d’accroître l’efficacité et de réduire les vulnérabilités de l’entité sportive118.

1.2.2. Le processus de transformation et ses raisons La professionnalisation d’un club ne suppose pas le recours au recrutement des seules personnes salariées, elle met en évidence surtout l’importance relative croissante des acteurs rémunérés à partir d’un certain niveau de développement, jusqu’à s’apparenter à une entreprise de service. Pour JEU [1993]119, il existe un processus dominant. Les athlètes, ainsi que les dirigeants, ont d’abord été des amateurs, puis le domaine sportif s’est professionnalisé compte tenu de l’évolution du sport, entraînant par la suite la nécessité d’implanter des membres permanents au sein des bureaux pour encadrer le club et gérer un environnement de plus en plus demandeur. Il en résulte une nécessaire professionnalisation, notamment lorsque les clubs recherchent la performance sportive optimale dans un sport devenu de plus en plus populaire ou médiatisé. Si le club sportif doit se comporter de manière plus professionnelle pour répondre aux nouvelles demandes de son environnement, cette nécessité reste très différente selon les clubs, avec des évolutions diversifiées selon les disciplines et le degré de développement du club dans son historique et son management. Réciproquement, le niveau de développement de la structure et du fonctionnement interne du club sera différent selon les attentes de son environnement. En ce sens, nombre d’analystes120 suggèrent, lorsque le club atteint une certaine taille et dispose d’un certain niveau de ressources, d’intégrer le rang du professionnalisme, avec une gestion administrative, comptable, commerciale, de ressources humaines et de stratégie fondée sur le travail responsable financièrement des professionnels salariés.

118 CALLEDE J.-P. (2003), « Les associations et l’ « action sportive locale » : une phase achevée de modernisation sociétale ? » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel Prouteau, Les Presses Universitaires de Rennes , Collection L’Univers des normes, 216 p., p 125-140. 119 JEU B. (1993), « Analyse du sport », Collections pratiques corporelles, Paris, Presses Universitaires de France, 192 p. 120 LEBLANC M. (1992), « Le club de l’an 2000 », INSEP, Collection droit, économie et management, Paris, 268 p. ; MAYAUX et REVAT (1993), « Marketing pour associations », Editions Liaisons, Paris, 193 p. ; WELCH (1994), « The professional in a voluntary world », in Second European Congress on Sport Management, Official Proceedings, EASM-ISEF, Firenze, p 651-676. 54

Arrivés à un certain stade de développement, entraîneurs, joueurs, partenaires, commanditaires, actionnaires, mécènes, salariés et bénévoles, public, collectivités locales, organisations non gouvernementales, parents et d’autres encore constituent l’environnement d’un club. Ils réclament directement ou indirectement une certaine rentabilité de leurs investissements financiers ou personnels. J-P. AUGUSTIN et A. GARRIGOU [1985]121 ont mis en évidence les trois forces relatant les disparités du marché global, « le pouvoir politique (subventions et équipements), le pouvoir économique (dons, services et bénévoles) ou encore le public (argent, bénévoles et pression sur les pouvoirs politiques et économiques) ». J-P. MINQUET [1997]122 identifie près de douze marchés auxquels peut s’adresser l’organisation sportive. On y retrouve ceux des bénévoles, des cadres, de la fédération, des autres fédérations, des autres organisations de pratiques, des pratiquants, des parents, des spectateurs (supporter, « spectateurs spectacles »), des entreprises (sponsors, entreprises de proximité proches du secteur sportif, entreprises favorables au sport corporatif), des médias, des téléspectateurs ou des pouvoirs publics (nationaux, territoriaux, internationaux). Un environnement aussi complet implique une approche particulière dans la mesure où la pérennité, la rentabilité ou encore l’image du club forment des objectifs tout aussi importants que la performance sportive elle-même. De nombreux dirigeants de clubs sportifs cherchent à rationaliser leur organisation dans la mesure où cette dernière constitue une « entreprise éducative » qui se doit de « répondre aux exigences technologiques et opérationnelles d’une entreprise normale, même si ses objectifs sont essentiellement centrés sur le développement de l’homme, plutôt que sur la rentabilité financière des opérations qu’elle dirige123. Il convient de remarquer que cette situation n’explique pas le professionnalisme du « mode américain de sport ». Le chemin menant à ce résultat est toutefois parsemé d’embûches, notamment en raison des fortes incompatibilités des attentes environnementales. Par exemple, les subventions ne sont octroyées par les collectivités locales que si le club remplit une fonction éducative ou des missions d’intérêts généraux, alors

121 AUGUSTIN J.-P. et GARRIGOU A. (1985), « Le rugby démêlé – Essai sur les associations sportives, le pouvoir et les notables », le Mascaret, Bordeaux, 359 p. 122 MINQUET J.-P.-L. (1997), « Economie et gestion du sport », Ed. City and York, 225 p. 123 PAILLOU N. (1986) (ancien président du CNOSF), « Les trois enjeux du sport français », Droit et économie du sport, Dalloz, Paris, 158 p. 55 que les sponsors cherchent à maximiser leur investissement. Les parents d’enfants pratiquants souhaiteraient avoir accès au spectacle sportif gratuitement sous prétexte qu’ils font partie de l’association, ils cherchent même à participer aux sélections sportives. Une relation organisationnelle particulière entre résultats sportifs et gestion du club sportif doit être mise en évidence. Cette gestion s’apparente de plus en plus à celle d’une entreprise. Ainsi, le discours jusqu’alors tabou des années de l’amateurisme olympique, exprimant la nécessité de financer et de gérer le sport comme pratique et comme spectacle d’intérêt public124 devient la norme.

1.2.3. Les différentes transformations De petite association, le club sportif peut devenir une véritable entreprise de spectacle à l’instar des clubs de football. Il convient de relativiser ces propos en considérant la différence de potentiel d’évolution d’une discipline sportive à une autre. Néanmoins, quel que soit le sport, il existe de fortes divergences entre un club sportif associatif au stade de sa création et un club professionnalisé ou professionnel. Un club professionnel de haut niveau ne peut être géré de la même manière qu’un club amateur de dernière division. Le premier renvoie à des attentes diverses, variées et difficilement conciliables, à une recherche de complémentarité entre une logique économique forte et une logique sociale toujours présente. Les conséquences d’un échec ont une amplitude plus importante sur l’environnement. Le management intuitif, que nous retrouvons malheureusement trop souvent dans les associations bénévoles, n’est donc plus en mesure de répondre aux nouvelles attentes environnementales. Dans ce contexte, le club sportif peut atteindre « un niveau de développement où la logique associative devient inopérante »125. L’état d’esprit des clubs sportifs se voit contraint d’évoluer en harmonie avec l’environnement des clubs. Il doit insuffler des règles strictes de gestion selon les règles généralement admises dans les entreprises.

Le législateur a fait évoluer ses lois sur les clubs sportifs en ce sens, autrement dit, en obligeant les clubs professionnels à se conduire comme des

124 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002) « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, 5e édition, 128 p, p3-4. 125 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 22. 56 responsables d’entreprises professionnelles. Désormais, les fédérations auxquelles les clubs professionnels sont affiliés imposent des obligations financières et de gestion : un plan comptable professionnel que la ligue a défini, des documents prévisionnels, la présentation des états annuels et semestriels formalisés et visés par un commissaire aux comptes. Les clubs prennent souvent l’initiative de les accompagner d’états trimestriels. Si les comptes ne sont pas équilibrés ou si ces documents ne sont pas fournis aux autorités pyramidales du mode d’organisation européen du sport, le club est passible d’une sanction, comme une rétrogradation, une limitation de la masse salariale ou du recrutement126. Le club sportif n’a pas toujours connu cette pression environnementale, laquelle est devenue importante127, surtout depuis la deuxième moitié du XXe siècle. Auparavant, le sport s’inspirait largement du modèle anglo-saxon du XIXe siècle et des principes de Pierre de Coubertin qui faisaient référence à l’amateurisme, au bénévolat et à l’associativité. Si ces dimensions restent encore majoritairement d’actualité, il n’en va plus de même pour le sport professionnel qui, compte tenu des enjeux économiques et financiers, se rapproche des « modèles de l’entreprise traditionnelle ». Le modèle anglo-saxon traditionnel doit désormais coexister avec d’autres modèles innovants conçus sur les mêmes bases. Aujourd’hui, la loi sur les Associations dites de 1901 n’est plus toujours adaptée aux réalités économiques. Les clubs ont obtenu la possibilité (ou sont dans l’obligation) de s’organiser sous forme de Sociétés Anonymes spécifiques (les plus connus étant les SASP ou SAOS), sous certaines conditions128, bénéficiant de dispositions particulières. Cette dénomination particulière constitue un signe important du législateur français pour indiquer que l’activité sportive doit garder une spécificité économique et sociale. Ces évolutions des statuts supposent, entre autres, l’exercice de mesures de protection des clubs et de tous ses partenaires face au développement du caractère lucratif de leur activité dans le cadre d’un processus de professionnalisation.

126 TOUCHAIS L. (2000), « Sport spectacle et contrôle de gestion : utopie ou réalité ? (Etude des clubs de football professionnel) », XXIème Congrès National de l’Association Française de Comptabilité, Mai 2000, Angers, p 940 - 960. 127 Beaucoup diront que l’argent a toujours existé dans le sport. Il n’empêche que sa contribution n’est pas comparable la première moitié du XXe siècle à celle rencontrée au cours de la deuxième. 128 Cf : partie « 1.2.3.1 la législation ». 57

Ainsi, des clubs sportifs de certaines disciplines ont été dans l’obligation ou ont eu la volonté de se professionnaliser. Ce processus dominant des clubs sportifs de haut niveau aboutit de plus en plus à la création de Sociétés Anonymes spécifiques à objet sportif, même si la forme associative de loi du 1er Juillet 1901 existe toujours. « Les structures juridiques du sport professionnel se sont, au fil du temps, alignées sur le droit commun des sociétés, la forme associative devenant progressivement l’exception, même si elle est encore d’usage quasi général dans une discipline comme le volley-ball »129. Outre cette transformation des clubs sportifs en société, les dirigeants d’entreprises ont eu la possibilité de « s’offrir » un club. Beaucoup d’entre eux ont pris le contrôle de clubs de renommée, notamment issus du monde footballistique, avec plus ou moins de réussite d’ailleurs. Les exemples de Daniel Hechter au PSG, de Jean-Luc Lagardère au Racing Club de Paris, de Bernard Tapie à l’Olympique de Marseille, d’Alain Afflelou aux Girondins de Bordeaux, de François Pinault au Stade Rennais, de Robert-Louis Dreyfus (ancien PDG Adidas) à l’O.M., de Silvio Berlusconi au Milan AC, de Mohamed Al-Fayed (Harrod’s) à Fulham, de Phillips au PSV Eindhoven, du Bayer au Bayer Leverkusen, de Peugeot à Sochaux ou d’Abramovitch à Chelsea sont éclairantes à ce propos130. Dans cette énumération, nous pouvons différencier les « patrons d’entreprise » qui l’ont fait à titre personnel, avec leur propre fortune, sans lier leur investissement à leur entreprise. C’est le cas de Robert-Louis Dreyfus (O.M.) ou d’Abramovitch (Chelsea). Dans d’autres cas, les retombées publicitaires et commerciales sont attendues (Afflelou ou Lagardère pour Matra). Pour certains chefs d’entreprise, les fondements de ces liens sont fondés sur leur volonté d’intégration sociale dans un pays (Al-Fayed), sur leurs responsabilités territoriales fondées sur la localisation de leurs entreprises (Phillips et Peugeot) ou sur la recherche d’ambitions politiques immédiates ou à venir (Berlusconi et Tapie). En somme, tout porte à croire que l’évolution naturelle des clubs depuis les années 1990 est orientée vers la professionnalisation des clubs sportifs de haut niveau.

129 Rapport de Denis Jean-Pierre (2003), Inspecteur des finances, à Jean-Francois Lamour, Ministre des Sports, « Sur certains aspects du sport professionnel en France », Novembre 2003, p. 54. 130 PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p. 58

1.3. Les caractéristiques de la professionnalisation La recherche de professionnalisation des clubs sportifs est un phénomène dominant dans la pratique des sports. L’amateurisme devient plutôt un facteur d’échec pour les sports de haut niveau qui n’arrivent pas à intéresser les médias. Aujourd’hui, l’amateurisme d’un sport n’est plus un choix, mais une conséquence d’un désintérêt économique. Certes, dans toutes les divisions inférieures, l’argent circule sans pour autant être suffisant pour justifier le professionnalisme. Le Tableau n°2 met en évidence la transformation du football comme jeu en un spectacle marchand131.

Tableau n°2 - La transformation d’un jeu en un spectacle marchand : l’exemple du football Périodes Tendances Dominantes Objet Significations mythiques (rites de fertilité), Jusqu’au XVIIIe siècle Pratique de jeux de ballon guerrières (préparation militaire) ou ludiques (divertissement) Codification du jeu par des Définition des règles du 1800-1850 collèges britanniques football et du rugby Création et multiplication des clubs, fédérations et Structuration de l’offre de 1850-1900 compétitions spectacle (championnats, coupes, rencontres internationales) Apparition et généralisation du salariat (Angleterre, Constitution d’une offre 1900-1950 Espagne, France, Italie, de travail etc.). Internationalisation des compétitions (Coupe 1950-1960 d’Europe, d’Amérique du sud, intercontinentale) Médiatisation des Commercialisation du Depuis compétitions nationales et 1960-1980 spectacle à l’échelle 1950 internationales (radio, mondiale télévision, presse écrite) Pénétration de capitaux d’origine extra-sportive Depuis 1980 (prise de contrôle, parrainage)

131 BOURG J.-F. (1994), « L’argent fou du sport », Ed. La table ronde, Paris, 272 p. 59

La professionnalisation des sports induit de nouvelles fonctions qui ne peuvent être remplies en toute rigueur sans de nouvelles structures, des évolutions dans l’organisation du club et le respect des contraintes de gestion. Il est intéressant de mettre en évidence la nécessité de changement stratégique, avant de chercher à en donner une signification. Le débat sur la professionnalisation des sports a changé de nature dans un contexte où plusieurs formes de « marchandisation » du sport se révèlent.

1.3.1. La stratégie naturelle modifiée Comme nous l’avons vu précédemment, la recherche des résultats sportifs ne peut plus constituer l’unique objectif des clubs sportifs ayant atteint un certain niveau de professionnalisation au regard des évolutions sociétales. Le discours des dirigeants de clubs, dans les années 80, insistait sur la nécessité d’obtenir des résultats sportifs pour survivre, élément parfois bien insuffisant pour définir une stratégie. La recherche de ces résultats conduisait souvent les clubs à s’endetter, se mettant alors en grande difficulté financière lorsque les résultats ne suivaient pas. Parfois même, les clubs étaient mis en faillite au moment où ils obtenaient un titre de Champion de France. Ce fut souvent le cas des clubs de hockey sur glace pendant les vingt dernières années du XXe siècle. Aujourd’hui, le discours selon lequel il est nécessaire d’obtenir des résultats sportifs pour survivre n’est plus véhiculé avec la même force. Il est reconnu aux clubs des valeurs d’intégration et de représentation locales qui les rendent moins sensibles aux évolutions sportives. En même temps, les critères économiques sont avancés pour engager une stratégie de pérennité des clubs, au-delà même de leurs résultats sportifs. Il est toujours vrai qu’ils sont partiellement tributaires de leurs performances sportives pour réussir dans la sphère de l’économie de marché, mais d’autres arguments sont avancés concernant le soutien de toute une localité, la notoriété, les financements publics complémentaires (sous forme de subventions) et privés (sous forme de « sponsoring » ou de mécénat) ou la médiatisation. Le club ne représente pas que lui-même, il est aussi un enjeu économique, politique et social de ses partenaires publics et privés. Cependant, en raison des décalages possibles entre les résultats sportifs escomptés et ceux qui sont réalisés, la recherche de la performance sportive « à tout prix » comporte un risque. Cette stratégie implique d’importants 60 investissements dans la mesure où, théoriquement, elle ne peut être obtenue que par la constitution d’une équipe de qualité, aux prix élevés. Une équipe concurrentielle requiert le recrutement de joueurs reconnus pour leurs compétences dans la discipline et pour lesquels nombre de clubs sportifs sont prêts à payer le prix fort pour accéder à leur service. En plus d’être coûteuse, cette « course aux armements132 » contraint les clubs à s’engager dans des « investissements à risque » dans la mesure où une équipe composée d’éléments considérés comme des valeurs sûres ne permet pas de prédire avec certitude de bons résultats sportifs. Autrement dit, le retour sur investissement n’est pas garanti. Ainsi, des investissements coûteux sans résultats sportifs acceptables peuvent aboutir à des conséquences financières graves. En effet, un contrat de partenariat qui octroyait aux clubs sportifs, en contrepartie d’une représentativité de qualité, un soutien financier dont ils sont devenus tributaires pour leur survie pourrait être interrompu dans la mesure où les attentes des partenaires ne seraient pas satisfaites. Plus grave encore, en raison de dépenses trop importantes par rapport aux recettes réalisées, le club peut n’être plus en mesure d’honorer ses engagements financiers, le conduisant au dépôt de bilan ou une rétrogradation en dépit de la confiance des parties prenantes. L’histoire du sport compte nombre de clubs ayant connu leurs moments de gloire, mais aussi de déboires. Une stratégie visant à obtenir la meilleure équipe possible aboutit à plusieurs autres conséquences non négligeables: 1. L’aléa sportif constitue un des éléments importants qui contribuent vigoureusement à stimuler l’intérêt du public pour une discipline sportive. Confectionner la meilleure équipe tendrait à maîtriser l’aléa sportif et diminuer l’incertitude d’une discipline sportive, ce qui conduirait petit à petit à une perte notable d’intérêt des médias et, donc, à une réduction des revenus133.

2. Cette stratégie conduit à une inflation des salaires et, de ce fait, des dépenses supplémentaires. Certains clubs « achètent » les services de

132 COLLIN Y. (2003-2004), Rapport d'information n° 336, fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, déposé le 8 juin 2004 intitulé « Quels arbitrages pour le football professionnel? Les problèmes liés au développement économique du football professionnel ». Paris. 170 p. 133 La formule 1 constitue un exemple de choix avec les nombreuses victoires de Michael Schumacher et son écurie Ferrari. 61

joueurs non pas tant pour les faire jouer que pour qu’ils ne jouent pas avec leurs adversaires.

3. L’inflation des salaires (notamment dans le football) est l’objet de nombreuses critiques sociétales. En effet, les sommes offertes par les clubs sont parfois disproportionnées eu égard à l’origine de la discipline sportive. Dans ce contexte, la mondialisation de la « marchandisation » du sport conduit à négliger les problèmes éthiques et à verser des revenus souvent mal connus du public qui rendent très délicate la gestion des clubs sportifs. Les écarts de revenus à l’intérieur même des équipes constituent aussi un facteur de « fragilisation » de l’équilibre collectif de clubs aux valeurs de solidarité affirmées.

En somme, si la confection d’une équipe de joueurs talentueux semble nécessaire à la compétitivité du club sportif et, pour ainsi dire, à sa survie, sa stratégie de survie ne doit pas pour autant être fondée uniquement sur les seuls résultats sportifs qu’une équipe, aussi forte soit elle, ne permet pas de garantir. L’exemple des « galactiques » du Réal de Madrid est bien connu, avec des salaires considérables (de l’ordre de 150.000 euros par semaine) pour un résultat finalement bien moyen. Bien qu’ils constituent un facteur déterminant de sources potentielles de revenus, les résultats sportifs ne sont pas toujours maîtrisables. Ils dépendent des autres clubs et de leur compétitivité. C’est pourquoi, les fondements économiques des clubs sportifs ne peuvent pas se limiter aux seuls résultats sportifs, même si ces derniers constituent toujours, à terme, un enjeu de taille. Autrement dit, un club doit pouvoir se passer des résultats sportifs espérés pendant deux ou trois années, à condition de ne pas être relégué. Par contre, l’absence de résultats à moyen terme diminue l’attractivité du club pour les partenaires économiques, ce qui rend encore plus difficile l’amélioration des performances du club. Une stratégie visant à obtenir des résultats sportifs, fondée sur la recherche de tous les moyens nécessaires à la réalisation des objectifs sportifs, ne répond plus totalement aux nouvelles attentes environnementales du club sportif, lesquelles réclament une certaine stabilité au regard des enjeux financiers engagés et de la symbolique de la compétition sportive. Les clubs sportifs sont contraints désormais de répondre à de nombreuses attentes 62

émanant de multiples acteurs gravitant tout autour d’eux, qui exercent une influence déterminante sur leur survie. Ils ont une obligation de viabilité économique, de transparence, de rentabilité, donc de bonne gestion. De plus, au-delà de l’aspect économique, la société n’accepte plus les clubs exagérément dépensiers qui n’ont comme seul objectif que les seuls résultats sportifs au prix d’un pari sur la survie du club. Aujourd’hui, la concurrence doit être loyale entre clubs économiquement sains, c’est pourquoi des règles de contrôle remettent en cause l’appartenance à une compétition d’un club aux finances trop instables. C’est une nouvelle donnée dans les compétitions gérées par les Fédérations. Il s’agit d’éviter les dépôts de bilan. Dans ce contexte, des organes de contrôle sont mis en place. Ils peuvent refuser l’inscription d’un club au championnat élite sur la base de ses comptes financiers, il peut lui interdire le recrutement de nouveaux joueurs ou l’empêcher d’augmenter la masse salariale. Des règles plus générales peuvent être édictées, selon les disciplines, comme un plafond des salaires ou une réglementation stricte des transferts et des recrutements. Il s’agit d’une réglementation du « secteur professionnel », comme il peut en exister, selon des modalités contrôlées par la loi, dans d’autres branches. Cependant, cette constatation nous permet d’observer que si un club sportif peut être considéré comme une entreprise, celle-ci se meut dans un univers spécifique qui n’est pas celui des règles de fonctionnement normal des firmes du fait d’une réglementation particulière de la concurrence.

Aujourd’hui, les clubs sportifs se proposent d’être moins tributaires des résultats sportifs, ce qui les conduit à « penser » et à « s’organiser » comme de véritables entreprises. De nombreux clubs sportifs ont changé d’état d’esprit et ont choisi cette voie. Ils recherchent leur acceptation sociale, en endossant notamment un rôle d’animateur local et en se présentant comme des vitrines pour les collectivités territoriales. Ils deviennent aussi des déclencheurs de bénéfices économiques et sociaux pour une agglomération, un acteur d’intégration sociale (un moyen de lutter contre la délinquance et l’oisiveté) et professionnelle (par la création d’emplois), un vecteur de communication performant pour les entreprises ou un facteur d’identification sociale. La demande sociétale a évolué, elle s’élargit. Désormais, parmi ses objectifs, le club sportif n’inclut pas les seuls résultats sportifs, il présente aussi ses résultats économiques et il revendique une identification locale et même la réalisation d’un 63 service public. En suivant cette ligne directrice, les clubs semblent aujourd’hui plus à même de répondre à de mauvaises performances sportives. Si le résultat sportif demeure toujours un enjeu prioritaire, il ne constitue plus l’unique enjeu majeur. Sa survie est toute aussi importante. Auparavant, les dirigeants de clubs se glorifiaient d’avoir mené leur équipe au titre, au prix de soucis financiers récurrents en fin de saison. Aujourd’hui, ils se prévalent de conserver leur club au plus haut niveau, dans des conditions financières saines, susceptibles d’intéresser de nouveaux partenaires. Aujourd’hui, un déficit financier constitue, au même titre que de mauvaises performances sportives, un facteur de relégation.

Le club s’éloigne du moule dans lequel il s’est traditionnellement construit pour devenir une organisation de plus en plus proche du modèle de l’entreprise. La pérennité des clubs est recherchée, comme gage d’un fonctionnement normal de la marchandisation du sport. Elle devient, au même titre que pour une entreprise traditionnelle, un facteur essentiel de son fonctionnement. Les clubs sportifs doivent-ils pour autant se comporter comme des entreprises ? La singularité du secteur sportif ne permet pas d’affirmer a priori qu’un club sportif constitue une entreprise à part entière. Cependant, il faut reconnaître qu’il s’en rapproche de plus en plus nettement. D’ailleurs, l’entrée en bourse des clubs sportifs qui, dans le « modèle européen », est encore réservée à quelques clubs de football, permet de dire que certains clubs sont déjà des entreprises, même si les conditions boursières restent spécifiques. Ainsi, une hypothèse serait de dire qu’il pourrait être judicieux d’ « adapter » les outils, méthodes et stratégies managériales d’entreprises au sein des clubs sportifs, de manière à les préserver quelque peu de ce rôle de soumission qu’ils subissent au regard des aléas des résultats sportifs.

1.3.2. L’importance du management stratégique Nombre d’économistes, sociologues et gestionnaires134 ont saisi l’importance que revêt le sport dans notre société et le besoin de rationaliser sa

134 LORET A. (1995), « Sport et management : de l’éthique à la pratique », sous la direction d’Alain Loret, Editions Revue, 631 p. ; AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p. ; DEFRANCE J. (1995), « Sociologie du sport », La découverte, Collection « Repères », Paris ; MINQUET J.-P.-L. (1997), « Economie et gestion du sport », Ed. City and York, 225 p. ; CHANTELAT P. (2001) (textes réunis et 64 gestion au sein des clubs sportifs. La compétition implique dorénavant des compétences sportives, financières et commerciales. En d’autres termes, le club sportif, arrivé à un certain stade de son développement, doit se comporter comme une entreprise, sans perdre de vue sa spécificité. Il recherche à conceptualiser sa gestion en s’inspirant de pratiques managériales nécessaires aux entreprises, de manière à répondre à une logique économique de plus en plus forte. C’est donc un réel « management stratégique »135 qu’il convient de mettre en place. Pour BAYLE et BRUZEK [2005]136, il est aujourd’hui question de « plan stratégique ». Parallèlement à la recherche de résultats sportifs, viabiliser le club et focaliser sa réflexion sur sa structure, sa formalisation, son intégration économico-sociale devient une nécessité. Selon MARTINEZ DEL CASTILLO [2001]137, la plus grande partie des clubs sportifs est confrontée dès maintenant, ou aura à se confronter, à ces différentes stratégies : - accéder à l’indépendance et à la stabilité financière, avec un effort considérable concernant la capacité d’autofinancement ; - élargir et diversifier les services du club en s’engageant dans l’exercice de pratiques non reliées au modèle sportif compétitif traditionnel ; - définir avec clarté les rôles et apports complémentaires des professionnels et des bénévoles ; - moderniser les cultures organisationnelles, par un mariage des valeurs et des procédures des entreprises et des associations ; - améliorer les compétences des dirigeants élus et des ressources humaines professionnelles ou bénévoles, en insistant sur la formation.

Le management stratégique a pris progressivement la place du management intuitif à un certain degré de développement atteint par le club sportif. Le schéma n°2 permet de comprendre la valorisation du management stratégique au sein des clubs, parallèlement aux résultats sportifs.

présentés par), « La professionnalisation des organisations sportives : nouveaux enjeux, nouveaux débats », Ed. L’Harmattan, 380 p. 135 LORET A. (2004), « Concevoir le sport pour un nouveau siècle », Presses Universitaires du Sport, numéro 24, juin. 240 p. 136 BAYLE M., BRUZEK M. (2005), « Le management associatif (guide pratique) », Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF), Paris, 100 p. 137 MARTINEZ DEL CASTILLO J. (2001), « Le processus de professionnalisation des ressources humaines dans les associations sportives en Espagne », (Traduit de l’espagnol par Nathalie Le Roux) dans « la professionnalisation des organisations sportives » (textes réunis par Pascal CHANTELAT), L’Harmattan, 380 p., p.76. 65

Schéma n°2 - Evolution de la gestion des clubs sportifs « fédérés »

Clubs sportifs fédérés

Marchandisation du secteur sportif

Club au stade de développement avancé

 Résultats sportifs  Service public Nouvelles attentes sociétales  Rentabilité  Représentativité

Solutions

Années 80-90 Nouvelle ère

Obtenir des résultats Obtenir des résultats Management stratégique sportifs sportifs

Terrain instable Terrain instable Moins dépendant des

résultats sportifs

Management intuitif Situation moins instable

Probabilité Probabilité Renforcement Probabilité Succès Affaiblissement Succès Echec Probabilité Echec

Le management stratégique prend une place tout aussi importante que les résultats sportifs dans la stratégie de survie des clubs sportifs. Le management intuitif n’est qu’une résultante face à la fragilité émanant d’une stratégie orientée vers la recherche de résultats sportifs. Les résultats sportifs ne s’acquièrent pas à n’importe quel prix, la rentabilité et la représentativité d’un club deviennent aussi un gage de soutiens financiers, notamment des pouvoirs publics, au même titre que le soutien moral de toute une localité. 66

1.3.3. La controverse concernant la professionnalisation Si le club sportif, à un certain degré de développement, doit appliquer désormais un réel management stratégique, il « s’apparente » davantage à une entreprise à part entière. Peut-on affirmer, pour autant, que le club sportif est une entreprise ? Si le débat est toujours d’actualité, il n’en reste pas moins que le développement économique du sport semble inéluctable au regard des évolutions sociétales. Les clubs sportifs sont « contraints » d’évoluer, tout en conservant les valeurs associatives inhérentes à leur activité, en intégrant une logique économique qui fonde la survie et la compétitivité des clubs. Au fond, il est probable que certains clubs, représentant un pourcentage très faible, s’apparentent aux entreprises, alors que la très grande majorité des autres clubs font toujours référence au fonctionnement des associations. Les succès sportifs d’un club attirent les convoitises puisqu’ils génèrent la passion populaire. Néanmoins, se résoudre à intégrer une logique économique dans la gestion des clubs ne signifie pas pour autant la professionnalisation du club sportif. Il n’empêche que son organisation doit s’adapter aux mutations de l’environnement, conduisant au choix stratégique orienté vers la professionnalisation tant le phénomène de « marchandisation » modifie les relations du secteur sportif.

De plus en plus, une comparaison entre clubs professionnels français et franchises américaines s’impose, malgré de nombreux préjugés quant à l’intégration d’une culture d’entreprise au sein des clubs en France. Les deux modèles ont leur réalité sociale. Aux Etats-Unis, la culture sportive est fondée à la fois sur le sport universitaire et celui des franchises professionnelles. Dans les pays européens, les disciplines sportives comprennent à la fois des composantes proches de l’amateurisme et d’autres qui s’apparentent aux activités professionnelles. Par le canal des Fédérations, ces deux composantes s’allient selon une forme pyramidale dont le haut est de plus en plus professionnalisé. Dans les perspectives américaines, il s’agit de deux entités séparées. En France, de nombreux acteurs refusent l’idée d’instaurer une pratique plus « professionnelle », d’adopter une rationalité économique qui semble inévitable au regard des évolutions du sport, sous prétexte que la rationalité sociale doit toujours prévaloir dans le milieu sportif. Pourtant, à un moment donné de sa vie, lorsque le club atteint un certain degré de développement, 67 même si le potentiel n’est pas semblable d’une discipline à l’autre, sa structure fondée sur des valeurs associatives ne lui permet plus de faire face aux attentes de son environnement. Ainsi, selon l’avancement du développement du club, on ne parlera pas des mêmes besoins en termes économiques si l’on analyse un club comme l’Olympique Lyonnais, club « star » en France depuis plus de cinq ans grâce, notamment, à ses cinq titres consécutifs, mais aussi à sa réussite économique, et un club de hockey sur gazon évoluant en troisième division138. Le niveau de compétition semble avoir son importance. Néanmoins, compte tenu de l’évolution sociétale des clubs, tant en volume qu’en valeur, il semblerait que la recherche d’efficacité et d’efficience constitue, quel que soit le club, une réalité à laquelle doivent se soumettre, à un moment donné, les clubs sportifs s’ils souhaitent survivre. Certains clubs, qui ont mérité sportivement parlant de « monter » dans la catégorie supérieure, refusent cet honneur en vue de préserver leur équilibre financier139. Dans certaines fédérations, ce refus peut conduire à une nouvelle rétrogradation, ce qui est particulièrement injuste eu égard aux impératifs financiers fixés par les responsables nationaux lors de l’accession à l’élite. Pour appartenir à l’élite du football français, les clubs doivent respecter des règles particulières, comme le contenant minimal d’un stade en termes de spectateurs ou ses capacités sécuritaires. Si le secteur sportif prend conscience de cette réalité, il semble encore difficile aujourd’hui d’observer de manière concrète au sein des clubs une réelle conceptualisation de leurs pratiques managériales pour atteindre ses objectifs. Le sport a, en effet, sa spécificité et sa mesure sur la seule base de ses performances économiques est encore refusée par les partenaires. Le sport exigerait une approche interdisciplinaire compte tenu du fait qu’il constitue, selon Andreff et Nys140, un « fait social total ».

138 Loin de nous l’idée de dénigrer ce sport tant il est beau. Nous avons pris cet exemple dans la mesure où la fédération sportive de hockey est la fédération olympique de sport collectif qui comporte le moins de licenciés en 2002 (7 635), ce qui permet d’établir un contraste flagrant avec le football : 2 066 339 licenciés. Les hockeyeurs sur gazon se déclarent, dans le site officiel même de la fédération, « loin du sport business ». 139 C’est le cas récemment d’un club de basket-ball de PRO B pour la saison 2006-2007 qui, désireux de mieux se structurer pour affronter les divisions Pro, a fait le chemin inverse. Il a décidé de s’ « auto-rétrograder » en N1 pour construire ses nouvelles fondations. 140 ANDREFF W., NYS J-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p. 68

1.3.4. Les évolutions dans la gestion des clubs La marchandisation du sport entraîne les clubs sportifs à s’apparenter davantage à des entreprises et, par conséquent, les contraint à considérer une dimension économique plus importante. Les dirigeants des clubs doivent mettre en œuvre divers moyens pour répondre aux nouveaux objectifs de pérennité qui consistent à la fois à la recherche d’autonomie envers les résultats sportifs, mais aussi envers leur environnement. Nombre d’entre eux ont choisi, en complément d’une stratégie de recherche de résultats sportifs, la voie de la diversification sociale et économique. Ainsi, si le cœur de métier des clubs sportifs est de proposer un « spectacle sportif », beaucoup ont trouvé d’autres moyens pour obtenir des ressources financières. - Premièrement, certains clubs ont choisi de s’inspirer des « entreprises de spectacles » de manière à se rapprocher des modes de gestion de ces dernières. Pour attirer le spectateur, les clubs ont compris la nécessité d’élargir leur métier. Certains ont investi dans l’évolution du spectacle en transformant le « spectacle sportif » en un « spectacle total ». La compétition n’est plus le seul facteur de création de spectacle, d’autres éléments entrent en jeu comme la beauté du stade, le niveau technologique, le confort des infrastructures ou encore l’intégration de « petits spectacles annexes » extra-sportifs à l’instar des fameuses « pom-pom girls », des jeux de lumières, des « chauffeurs » de salle ou des écrans géants. Ces pratiques sont souvent inspirées du modèle américain dans lequel la perception de la compétition sportive est différente, puisque qu’elle constitue avant tout un spectacle et une activité rentables. Le spectateur se différencie du supporter dans la mesure où, au contraire de ces derniers pour lesquels seul le résultat sportif compte vraiment, le spectacle constitue la motivation principale. Si l’équipe gagne le spectacle aura davantage de poids mais, en fin de compte, une personne non-initiée obtiendra une forte satisfaction uniquement par le simple fait d’avoir assisté à une rencontre sportive. Or, la qualité du spectacle constitue un élément plus facilement maîtrisable que les résultats sportifs. Le spectateur est donc plus aisément en situation de satisfaction, même s’il est moins fidèle que le supporter. Les clubs essayent de modifier les habitudes du spectateur, moins sensible aux résultats sportifs, en obtenant une fidélité aussi ferme que celle du supporter, autrement dit un spectateur qui assiste régulièrement aux matchs. Ainsi, pour le fidéliser, les clubs s’efforcent de devenir un lieu d’exception, un lieu propice aux convoitises, 69 aux effets de mode, un faire-valoir dans le statut social de tout propriétaire de place, le lieu des événements, l’endroit où il faut être pour être vu, la place des élégances. Cette entreprise nécessite souvent la mise à disposition d’une infrastructure prédisposée à recevoir ce type d’actions. La qualité du spectacle provient aussi de la manière dont il est possible d’y assister. Certains clubs ont désormais à disposition des infrastructures hi-tech améliorant le confort de visionnage et offrant, en boucle, des images fortes aux spectateurs.

- Deuxièmement, la diversification des activités constitue un moyen logique de viabilisation et d’autonomisation du club. Cependant, elle engage de nouvelles productions de biens et services dont les liens avec les résultats sportifs sont moins prégnants dans le court terme. Autrement dit, elle suppose le développement d’activités annexes aux ressources importantes, du « merchandising » aux opérations commerciales en partenariat avec d’autres grandes marques. Les clubs doivent multiplier leurs sources de revenus, afin de ne pas être dépendants d’ « investisseurs à fonds perdus »141, des subventions et autres revenus indirects. Ne pas être dépendant d’un investisseur à fonds perdus consiste aussi à dénicher un maximum de partenaires octroyant des soutiens financiers de manière à ne pas subir le départ de l’un d’entre eux. Ainsi, en cas de mauvais résultats sportifs, la probabilité de perdre la totalité de ses financements est plus faible. Le club sportif recherche plus d’autonomie. Pour être autonome, le club doit créer de la valeur et ne pas se contenter de soutiens financiers extérieurs. Il doit s’autofinancer grâce à des revenus directs et stabilisés.

- Troisièmement, le club ne doit pas dépendre d’un mécène. Souvent ceux-ci interviennent pour rétablir une situation financière délicate. Comme l’affirme Y. COLLIN142, les soutiens financiers octroyés par les « investisseurs à fonds perdus » ne constituent en réalité qu’un moyen de détourner les

141 COLLIN Y. Rapport d'information n° 336 fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification (2004) : « Faire appel à ce type d’investisseurs ne constitue qu’un moyen peu stable de réguler une situation d’endettement puisque ce sont des « agents qui n’attendent pas de leurs investissements dans ce marché des retours financiers directement liés aux produits commerciaux qu’il engendre. Ainsi leurs intérêts financiers ne sont satisfaits que par la prise de position dans un club. ». Or trop souvent, les clubs se sont retrouvés dans une situation difficile après le départ de ce type partenaires. 142 COLLIN Y. (2003-2004), Rapport d'information n° 336, fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, déposé le 8 juin 2004 intitulé « Quels arbitrages pour le football professionnel? Les problèmes liés au développement économique du football professionnel ». Paris. 170 p. 70 déséquilibres financiers même s’ils semblent encore nécessaires à la survie des clubs sportifs. Dans le rugby, M. Martinet ou M. Kempf ont apporté leur soutien aux clubs de Bourgoin et de Grenoble pour répondre à une demande supplémentaire de financement de la DNACG (Direction Nationale d'aide et de contrôle de gestion). Dans le football, les soutiens financiers directs du Président Dreyfus en faveur de l’Olympique de Marseille sont bien connus (de l’ordre de 900 millions d’euros). Les mécènes ont toujours été présents dans certains sports, notamment dans le rugby. Ils ont même été à la base du « sport marron », véritable niche de l’économie souterraine. Comme Présidents de Clubs, ils finançaient des joueurs comme s’ils étaient des employés de leurs établissements, ce qui aujourd’hui est puni pénalement. Les entreprises furent de « gros employeurs » de rugbymen. L’équipe championne de France, le B.O () reçoit toujours des financements de M. Kempf à fonds perdus, de l’ordre de un à deux millions d’euros par an. Au départ, son soutien n’impliquait aucune action de parrainage, ni aucune fonction officielle dans le club. Aujourd’hui, la politique de partenariat avec Cap Gemini Ernst&Young est conséquente, même si le financement apporté semble peu en rapport avec les « retombées » économiques que la firme peut attendre au regard de la notoriété de la Ligue de rugby. L’équipe de Castres n’aurait pas le même train de vie sans l’intervention des Laboratoires Fabre qui recherche une image de marque positive locale de la firme. L’exemple de Michelin à Clermont-Ferrand s’inscrit plutôt dans la lignée des patrons paternalistes d’une région143. L’équipe de Toulon s’est offert un Champion du monde, Umaga, grâce au financement personnel de son Président. Les retours attendus sont de l’ordre de la notoriété pour les uns, du don et de la passion pour les autres. Les mécènes ont une passion pour leur sport, mais ils bénéficient aussi d’une image de marque positive qui peut les servir dans leurs entreprises ou dans leurs activités annexes (politiques ou sociales). Cette situation n’est pas économiquement saine. Elle n’est en tout cas pas très professionnelle.

- Quatrièmement, certains clubs ont choisi de développer une forte reconnaissance sociétale. Lisser son image et devenir un modèle pour la

143 La tradition du secret chez Michelin ne permet pas de connaître l’investissement de la société dans son club de rugby. On peut noter les infrastructures (le stade, par exemple), les emplois directs ou indirects (en faveur des femmes de joueurs) ou les droits d’image rattachés à la maison mère ou aux filiales française ou étrangères. 71 société est un gage de bonne situation économique. L’évolution des attentes sociétales révèle l’importance de l’image d’un club dans sa pérennisation. Les résultats sportifs ont une influence sur celle-ci, mais elle peut s’acquérir par d’autres moyens notamment : - en jouant un rôle de modèle social144 par une gestion saine ; - en proposant un spectacle de qualité ; - en donnant une image forte en tradition ; - en développant une identité sociale de fierté pour une localité145 ; - en livrant un travail pour l’intérêt commun ; - en perpétuant une identité régionale par la formation de joueurs146 ; - en devenant un agent économique générateur d’emplois ; - en participant à la mise en place d’une société meilleure ; etc.

Au-delà de son rôle d’animateur local proposant un spectacle sportif, le club doit désormais représenter plus qu’un simple rassembleur d’activités sportives.

- Cinquièmement, les clubs ont compris l’intérêt de sensibiliser leur environnement en les impliquant dans leur fonctionnement. Les clubs entretiennent des relations particulières avec les collectivités locales, mais cette recherche d’implication concerne aussi d’autres acteurs. Un investisseur privé « normal » a un impact différent sur le club dans la mesure où il constitue un agent qui « attend de son investissement des recettes qui puissent le rentabiliser». En d’autres termes, le club doit développer l’intérêt des investisseurs privés de manière à ce qu’ils s’y impliquent. Certains clubs mettent en place des projets intégrant les investisseurs privés regroupant des objectifs à la fois économiques, sociaux et sportifs147. RAMANANTSOA et THIERY-BASLE

144 Gérard Collomb, Maire de Lyon, se glorifiait d’ailleurs de posséder une équipe de football comme l’OL, considéré comme le meilleur vecteur de communication de la ville. Selon lui, une équipe comme l’OL devait recevoir de sa ville le plus grand soutien l’exonérant de sa redevance locative relative au stade de Gerland et lui octroyant des subventions s’élevant à 1 million d’euros. 145 Un club de football de D1 qui ne joue depuis longtemps que le bas de tableau du championnat constitue toujours une fierté pour une ville dans la mesure où le club figure à un niveau dans lequel peu de clubs sont capables d’évoluer. Même si le club n’obtient pas de bons résultats, il a le mérite de se maintenir à ce niveau. 146 Si l’objectif du club est d’obtenir des performances sportives, il doit aussi proposer la possibilité de pratiquer une activité sportive. La formation de joueur au potentiel sportif constitue une réelle création de valeur pour le club. De plus, posséder un centre de formation constitue un gage de subventions des collectivités locales et apporte leur soutien. 147 BAYLE M., BRUZEK M. (2005), « Le management associatif (guide pratique) », Comité National Olympique et Sportif Français (CNOSF), Paris, 100 p., p 58 – 66 et 73. 72

[1989]148 révèlent une véritable « stratégie relationnelle entre le club et les collectivités locales » avec « la constitution de contrat d’objectifs ». L’action des investisseurs privés intervient aussi dans leur rôle au sein des clubs, comme une place au conseil d’administration. Le public fait aussi l’objet d’actions similaires, notamment avec les clubs de supporters auxquels est parfois laissée la charge de la vente des abonnements et des places dans les virages, à l’instar de l’Olympique de Marseille149. Les clubs ont compris que des supporters ne constituaient pas uniquement des clients et qu’ils contribuaient au spectacle. Au fond, l’ambiance nécessaire à la qualité du produit de la billetterie est assurée par les supporters qui exercent le rôle de « chauffeurs » naturels des ambiances sur un stade, parfois nécessaires pour galvaniser l’équipe et lui donner un meilleur rendement sportif.

D’autres moyens financiers sont envisageables, à condition d’adapter la législation, vers une professionnalisation croissante. La législation réduit parfois le potentiel de marchandisation du secteur sportif, sauf pour les sports télévisés. La réglementation qui encadre le secteur sportif ne semble plus toujours adéquate. Il serait judicieux de normaliser, à l’échelle nationale mais aussi européenne, les règles de manière à réduire les effets pervers provoqués par des divergences de réglementation de pays à pays. Les championnats et coupes d’Europe mettent en compétition des clubs sensiblement différents en raison notamment de ces divergences, ce qui entraîne de nombreux dysfonctionnements au regard des critères « coubertiniens ». En effet, un club qui parvient à participer aux compétitions européennes a inéluctablement des objectifs bien plus prestigieux qu’un club de milieu de tableau du championnat. Il est contraint de s’aligner sur les équipes participantes et de prendre de nombreux risques pour être compétitif sur le tableau européen. Des écarts se créent entre clubs d’un même championnat national et entre clubs participants aux coupes d’Europe. La question est de savoir si cette revendication est légitime au regard du respect de l’égalité devant la loi.

148 RAMANANTSOA B., THYERY-BASLE C. (1989), « Organisations et fédérations sportives », Sociologie et management, Presse Universitaire de France, Paris, 260 p. 149 Cette disposition particulière montre le niveau du partenariat des supporters avec les Clubs. Cependant, du fait de la ferveur de ces seconds, mais aussi de leur « instrumentalisation », cette faculté accordée aux clubs de supporters devrait progressivement être supprimée par la loi, notamment depuis que les clubs sont ouverts aux capitaux boursiers. 73

Les cas en termes d’homogénéisation de la réglementation ne manquent pas. Certains n’ont pas de solutions immédiates, d’autres reviennent souvent concernant notamment la propriété du stade. En France, contrairement aux clubs des pays anglo-saxons, les clubs ne sont pas propriétaires des infrastructures sportives, lesquelles sont construites par les collectivités publiques. Ainsi, si les clubs s’apparentent de plus en plus à des entreprises traditionnelles, il serait normal qu’ils puissent disposer de leur outil de travail comme bon leur semble. Néanmoins, ils sont dans l’obligation de remplir des devoirs d’intérêt général. Jusqu’en septembre 2006, les clubs sportifs, en particulier de football, n’avaient pas la possibilité de recueillir des capitaux boursiers, malgré leurs nombreuses revendications. La propriété du stade constituait un élément capital dans cette volonté. Les instances européennes, dans un souci d’homogénéisation, ont demandé à l’Etat français de permettre aux clubs sportifs de faire appel à l’épargne malgré de nombreux échecs rencontrés à l’étranger. En effet, des clubs de football comme l’AS Roma150 (Italie) a vu sa valeur boursière passer de 18 euros à 35 centimes d’Euro, Newcastle (Angleterre) de 2 euros à 67 centimes d’euros ou encore Dortmund (Allemagne) 11 euros à 2.46 euros. Manchester United, Aston Villa ou encore Chelsea (Angleterre) ont aussi été rachetés et appartiennent à un seul et même propriétaire, ce qui est aujourd’hui le cas de l’Olympique de Marseille. Malgré ces chiffres, l’Olympique Lyonnais est entré sur le marché boursier durant l’année 2007, pour récolter près de 90 millions d’euros. En Ligue 1, le Paris-Saint-Germain appartient partiellement à des fonds étrangers, les fonds d’investissements Colony Capital et la banque d’affaires Morgan Stanley, tous deux d’origine américaine, à parts égales avec le fonds d’investissement français Butler Capital Partner. De même, Robert Louis-Dreyfus (Français naturalisé Suisse) a cherché à vendre le capital de l’Olympique de Marseille pour 180 millions d’euros à l’homme d’affaires canadien Jack Kachkar. La vente a été depuis remise en cause, puis définitivement annulée. Depuis 1997, sept clubs professionnels de football anglais ont été rachetés par des propriétaires non britanniques, témoignant de l’importance du processus de mondialisation économique et des intérêts financiers importants dont ce sport est la source (Tableau n°3).

150 L’équipe TV : 22.09.06 74

Tableau n°3 – Clubs de football anglais rachetés par des fonds étrangers Club Propriétaires Fulham Mohammed Al-Fayed (Egypte) Chelsea Roman Abramovitch (Russie) Manchester Malcom Glazer (USA), déjà propriétaire des Tampa Bay United Buccaneers (football américain) Portsmouth Alexandre Gaydamak (Russie) Aston Villa Randy Lerner (USA) déjà propriétaire des Cleveland Browns (football américain) West Ham Consortium d’affaires d’Islande Kop Football Limited Group. Celui-ci est dirigé par George Gillett (propriétaire des Miami Dolphins en football américain, des Liverpool Canadiens de Montréal en hockey sur glace et des Harlem Globe Trotters) et Tom Hicks (propriétaire des Dallas Stars en hockey sur glace et des Texas Rangers en base-ball, club racheté à George W. Bush).

Concernant le club de football de Liverpool, les négociations ont été tumultueuses. Quelques jours avant le rachat par deux milliardaires américains, le Cheikh Mohammed Bin Rashid Al-Maktoum (cinquième fortune mondiale) et sa branche d’investissement Dubai International Group étaient parvenus à un accord avec David Moore, l’actionnaire majoritaire. L’offre américaine, venue plus tardivement, l’a finalement emportée151. Elle suppose le financement de la valeur boursière de Liverpool (265 millions d’euros) et les dettes du club (70 millions d’euros). Il leur faudra aussi financer un stade de 60.000 places d’un coût estimé à 380 millions d’euros. Pour les propriétaires, « l’avenir de la Premier League s’avère radieux, avec des droits télévision extraordinaires de l’ordre de 1,4 milliard d’euros pour 2007-2008 »152. On peut constater que l’importance des enjeux financiers est considérable et les attentes de profit sont conséquentes. Dans ce contexte, la gestion d’un club de football s’apparente à celle d’une entreprise, avec des actionnaires et des enjeux collectifs et territoriaux moins prégnants dans les décisions stratégiques.

151 On prête au Cheihk éconduit la volonté d’acheter le club d’Arsenal dont le stade porte le nom de sa compagnie aérienne (Emirates Stadium) 152 ROUET, M. (2007), « Liverpool, prend l’accent US »,, L’Equipe, 7 Février, page 8. 75

D’autres points sensibles, liés indirectement à la privatisation des clubs, jouent comme l’intervention des collectivités locales ou de l’Etat : est-elle encore souhaitable ? Si le sport devient une activité économique comme les autres, pourquoi serait-elle subventionnée par les Etats ou les collectivités publiques ? Les soutiens des collectivités ne doivent-ils être que financiers ? Quelle que soit la réponse, en France, si le club a la possibilité de se professionnaliser, il semble devoir conserver l’objectif principal du secteur sportif, à savoir un objectif d’intérêt général. Le sport doit convenir et être accessible à tout le monde. Il est un vecteur de valeurs et de vertus. Il doit jouer un rôle modèle, notamment par l’intermédiaire des sportifs et des clubs sportifs. Pourtant, s’il semble judicieux d’assouplir les réglementations, celles-ci ne doivent pas constituer des obstacles à la gestion des clubs sportifs.

Conclusion La professionnalisation même si elle n’est pas acceptée par tous, semble constituer la ligne directrice normale de tous clubs sportifs à la recherche de performances sportives et de pérennité. Elle réclame d’importantes révisions dans tous les domaines de l’organisation. Face à l’importance du sport dans notre société, les clubs sportifs ont compris qu’il fallait séduire le public pour survivre. Selon J-L. MINQUET153, le public semble constituer la base de la création de valeur. Plus il y a de spectateurs, plus l’attraction sera grande pour la vente des loges, des abonnements, des produits dérivés, l’arrivée des sponsors (publics et privés), la réalisation des transferts et l’obtention des droits télévisés. Les économistes parleront d’ « effets d’attraction ». Dans le même ordre d’idées, le recrutement de nouveaux joueurs et entraîneurs talentueux a pour vocation d’améliorer les performances sportives, ce qui attire de plus en plus de spectateurs. Se constitue ainsi un cercle vertueux, les facteurs d’entraide pour attiser l’intérêt d’un public solvable. La présence physique du public semble en outre essentielle154. Ces facteurs peuvent être de nature sociale (comme les actions pour l’intérêt public ou la reconnaissance de la société), sportive (en comparant la performance sportive avec les objectifs) ou encore économique (l’évolution du spectacle, sa rentabilité et l’assurance de la pérennité). Les

153 MINQUET J.-P.-L., « Le nouvel âge d’or du foot business », l’Expansion n°591, 18.02 – 03.03.99, p48. 154 L’AS Monaco semble être une exception à la règle, puisque le stade Louis II rencontre de grandes difficultés à se remplir. Pourtant, l’équipe de Monaco est un des clubs les plus retransmis à la télévision, notamment du fait de ses résultats sportifs. 76

spectateurs peuvent être des particuliers, des comités d’entreprises, des notables ou encore les représentants des pouvoirs publics. Les clubs ont compris l’intérêt d’impliquer davantage les parties prenantes qui gravitent autour du club pour une plus grande stabilité. L’implication des acteurs environnementaux dans le bon fonctionnement du club favorise la « marque » et incite les partenaires à une implication totale, en d’autres termes à un véritable engagement155. La législation constitue parfois un obstacle à l’évolution de leur gestion. Elle a fait l’objet, en effet, de nombreuses modifications, comme en témoignent les questions concernant notamment l’arrêt Bosman, la propriété des stades, l’accès à l’épargne, le plafonnement des salaires, les droits télévisuels, le droit à l’image et à l’information, la fiscalité, la recherche de normalisation des règles à l’échelle internationale et, surtout, la question du financement public de l’Etat ou des collectivités territoriales dans une économie de marché. La réglementation doit tenir compte, au même titre que le secteur culturel, de sa singularité. Reconnaître la spécificité d’un secteur c’est lui permettre de bénéficier d’un statut particulier. Le gouvernement a compris l’enjeu et s’ouvre, voire contribue, à la professionnalisation du secteur en limitant petit à petit le poids de ces réglementations. Les clubs sportifs s’apparentent davantage à des entreprises classiques mais peut-on affirmer pour autant qu’elles sont des entreprises ?

Encadré n°2 – Résumé de la professionnalisation des clubs sportifs

La recherche de la performance sportive et la place conquise par le sport dans la société poussent les clubs à se professionnaliser, soit en se comportant comme des entreprises spécifiques, soit en créant de véritables postes de permanents rémunérés au sein d’une association. La professionnalisation implique la mise en place d’un nouveau mode de gestion, d’un nouvel état d’esprit et de nouvelles structures. La législation évolue en ce sens, en permettant aux clubs sportifs de se constituer en structures commerciales spécifiques.

155 On différenciera le terme implication de celui d’engagement par la métaphore suivante : dans la préparation d’œufs au bacon, la poule est impliquée alors que le cochon, lui, est directement engagé. 77

2. L’analyse des clubs sportifs

« L’analyse d’un secteur très éclaté comme celui du sport au travers d’enquêtes officielles comporte le risque d’une perte d’information importante. En effet, l’activité économique liée au sport est encore très mal identifiée au sein des nomenclatures »156. En outre, l’analyse des acteurs du secteur du sport est particulièrement délicate compte tenu de la variété des situations dans lesquelles ils se meuvent157. Aujourd’hui, les statuts des clubs sont diversifiés et leur rapport à l’argent et à l’activité économique s’avèrent très hétérogènes. Hormis le fait de pratiquer une discipline sportive selon des normes bien établies, mais appliquées plus ou moins rigoureusement, le seul point commun entre un grand club professionnel et une bande d’amis désireux de pratiquer un « hobby » en commun est la pratique d’une activité physique. Si la première entité est institutionnalisée, si les règlements s’appliquent sur l’exercice sportif, si le stade lui est propre, si les spectateurs engagent une relation « marchande » avec le club, il n’en va pas de même pour le groupe informel du pratiquant du « dimanche ». Cette comparaison extrême souligne le fait qu’il n’existe pas de modèle uniforme de conditions de pratique sportives et de gestion des clubs. Cette observation primaire met en évidence la difficulté d’identification claire du modèle structurel de club sportif. Face à cette hétérogénéité, si l’analyse synthétique des clubs sportifs et de leurs structures est difficile, il convient, cependant, de mettre en évidence les analyses existantes sur le sujet. Il sera ensuite possible de faire une synthèse adaptée et d’établir un début de typologie. Enfin, sur la base des études précédentes, les enjeux d’une approche par les structures seront présentés.

2.1. Les structures des clubs Comment expliquer les différences entre les structures des clubs sportifs ? Peut-on se référer uniquement au statut de l’organisation ? Doit-on tenir compte de l’organisation économique réelle de l’entité sportive ?

156 Le ROUX N. et CAMY J. (2001), « Professionnalisation de l’emploi dans le secteur du sport : une comparaison France/ Royaume-Uni », dans « la professionnalisation des organisations sportives » (textes réunis par Pascal CHANTELAT), L’Harmattan, 380 p., p. 48. . 157 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p. 53. 78

2.1.1. Définition des organisations H. MINTZBERG [1982] définit l’organisation comme « une action collective à la poursuite de la réalisation d’une mission commune » 158. Or, « toute activité humaine organisée – de la poterie à l’envoi d’un homme sur la lune – doit répondre à deux exigences fondamentales et contradictoires : la division du travail entre les différentes tâches à accomplir et la coordination de ces tâches pour l’accomplissement du travail ». H. MINTZBERG complète sa définition initiale analysant la structure d’une organisation comme « la somme totale des moyens employés pour diviser le travail entre tâches distinctes et pour ensuite assumer la coordination nécessaire entre ces tâches »159. Au regard de cette définition, l’importance de la variable organisationnelle dans la recherche de compréhension de la structure et réciproquement est mise en évidence. La théorie de MINTZBERG remet en cause les théories rationnelles du « one best way » qui traditionnellement constituaient un point fort de la théorie des organisations en identifiant la gestion optimale d’une organisation. Elle propose l’application de règles spécifiques, fondée sur le principe « getting it all together » consistant à démontrer qu’une organisation peut être gérée de plusieurs façons. Il n’existe pas une gestion universelle pour l’ensemble des organisations. Nombre de facteurs interfèrent dans le choix de la structure organisationnelle ainsi que sur le style de management. Il s’intéresse alors au rôle du manager et le considère comme le centre nerveux de la structure de l’organisation, l’autorité qui coordonne l’ensemble des membres de l’organisation en divisant pour chacun les tâches à accomplir dans l’optique d’action commune. Cette mission se traduit par l’émergence d’une stratégie. Il identifie cinq composants internes des organisations160 : 1. le sommet stratégique : 2. les cadres de la ligne hiérarchique ;

158 MINTZBERG H. (1990), « Le management. Voyage au centre des organisations. » (traduction du titre anglais : Mintzberg on Management. Inside our strange world of organizations »), Les Editions d’Organisation, Paris, 703 p., p. 14. 159 MINTZBERG H. (1982), « Structures et dynamiques des organisations. » (Traduction du titre anglais : « The structuring of organizations : a synthesis of the research »), Les Editions d’Organisation, Paris, 440 p., p 18. 160 Voir les différents ouvrages de Mintzberg, notamment : MINTZBERG H. (1986), « Le pouvoir dans les organisations », (traduction du titre : « Power in and around organization »), Paris, Les Éditions d'Organisation, 688 p. ; MINTZBERG H. (1982), « Structures et dynamiques des organisations. » (Traduction du titre anglais : « The structuring of organizations : a synthesis of the research »), Les Editions d’Organisation, Paris, 440 p. ; MINTZBERG H. (1990), « Le management : Voyage au centre des organisations » (traduction du titre anglais : Mintzberg on Management. Inside our strange world of organizations »), Paris, Les Editions d'Organisation, 703 p. . 79

3. le centre opérationnel ; 4. la technostructure ; 5. la fonction de support logistique.

Il met en exergue sa métaphore intitulée la stratégie du « potier » pour expliquer sa conception de la stratégie d’une organisation, dont la flexibilité constitue un moyen efficace en réaction aux changements de l’environnement. L’artisan travaille l’argile au même titre que le manager façonne son organisation. Autrement dit, le processus d’élaboration de la stratégie s’adapte de manière itérative aux apprentissages, aux opportunités et aux contraintes internes et externes. Il propose une action « volontariste » capable de faire face aux éléments imprévisibles. Il parle de « stratégie délibérée » et de « stratégie émergente ». Un processus d’élaboration de la stratégie purement délibéré exclurait l’apprentissage, de la même façon qu’un processus d’élaboration de la stratégie émergente exclurait le contrôle. Dans leurs limites extrêmes, aucune de ses deux approches n’a beaucoup de sens161. Autrement dit, la stratégie constitue un conciliateur entre une planification et une adaptation continuelle du processus tout au long de son existence. Les stratégies sont à la fois des plans pour l’avenir et des modèles d’action issus du passé. Or, quand l’organisation élabore une stratégie, la structure doit s’adapter et, réciproquement, la stratégie doit être élaborée en relation avec la structure de l’organisation. Pour HALL et SAIAS [1985], la structure serait d’abord la résultante de la stratégie. Elle est non seulement un « réseau ordonné de rôles, de fonctions, de moyens et d’activités », mais elle est aussi « faite d’idées, de croyances et de valeurs qui dynamisent le système, résultat de l’histoire autant que du fonctionnement actuel »162. Le réseau lui-même constitue le résultat de ces enjeux. Ensuite, des éléments comme l’âge et la taille, le système technique, l’environnement ou encore le pouvoir ont des liens plus ou moins étroits avec la structure. Ils constituent les facteurs dits de contingence. Ils influencent le choix des « paramètres de conception » qui sont à l’origine de « la conception organisationnelle ». La spécialisation du travail, la formalisation du

161 MINTZBERG H. (1990), « Le management : Voyage au centre des organisations » (traduction du titre anglais : Mintzberg on Management. Inside our strange world of organizations »), Les Editions d'Organisation, Paris, 703 p., p 57. 162 HALL D.J., SAIAS M.A. (1979), « les contraintes structurelles du processus stratégique. » Revue Française de Gestion. N° spécial « Les nouveaux défis de la stratégie. » p. 4-15. 80 comportement, la formation, l’endoctrinement, le regroupement en unités, la taille des unités, les systèmes de planification et de contrôle, les mécanismes de liaison et la décentralisation constituent les principaux paramètres de conception. La manière dont ces attributs d’une organisation se combinent donne naissance à sept types de configurations structurelles que MINTZBERG appelle les « configurations dérivées ». Lorsque la structure de l’organisation devient objet de recherche, il est nécessaire de prendre en compte des paramètres importants tels que le statut de l’entreprise, la mise en place de pratiques de gestion, le degré de formalisation, la décentralisation ou les orientations stratégiques. Une meilleure compréhension du fonctionnement des clubs passe par l’étude de leurs structures.

2.1.2. Intérêt pour l’analyse des organisations Pour DESREUMAUX [1992], plusieurs raisons justifient que l’on s’intéresse à la notion de structure163 d’entreprise qui constitue un « maillon important de l’analyse de la société », « un support essentiel de l’analyse de son fonctionnement », « un volet important de tout diagnostic en profondeur » puisqu’elles « reflètent les théories et principes de gestion ». Il considère que la structure constitue un élément révélateur de la logique de la firme, notamment par l’identification de ses développements. C’est une véritable source d’information explicative d’un état, permettant de déceler et de chercher des solutions adaptées aux dysfonctionnements de l’entité. Il affirme ensuite que la structure joue « un rôle majeur en matière de formation et de mise en œuvre de la stratégie ». L’évolution de la complexité des « problèmes structurels » constitue un enjeu important pour les entreprises, lesquelles sont conduites à déterminer une modélisation des structures en vue d’en accroître l’efficacité de fonctionnement. Enfin, les structures des entreprises doivent s’adapter à l’évolution des besoins et des attentes des individus, à condition d’en réduire la complexité. Repérer les évolutions des et dans les structures conduit à mieux comprendre et anticiper les changements imprévus et subits. Il n’existe pas un modèle absolu de structure. Il n’est pas possible d’affirmer qu’un modèle est meilleur que les autres. Cependant, pour chaque contexte, période et entreprise donnée, il existe des structures satisfaisantes,

163 DESREUMAUX A. (1992) « Structures d’entreprises. » Vuibert, Section 2, p 24 et suivantes. 81 même s’il est difficile de déterminer les structures optimales elles-mêmes. Or, il n’existe pas de modèle uniforme du club sportif, même à l’intérieur des mêmes disciplines. Les recherches réalisées sur la structure des clubs n’ont pas permis de mettre en évidence des règles applicables à toutes les situations. Il n’empêche qu’il est intéressant de s’interroger sur les contenus et les qualités des structures qui offrent des bases solides à la gestion efficace d’une entreprise. La reconnaissance de « l’importance de la variable structurelle comme élément fondamental de compréhension du fonctionnement des organisations »164 est essentielle.

Aussi, plus que l’analyse des structures elles-mêmes, l’étude du processus de structuration met en évidence une perspective dynamique des contraintes économiques nouvelles qui concernent les clubs et les conduit à apporter des réponses rapides aux exigences d’un environnement en mouvement. La structuration constitue un processus de transformation organisationnelle et fonctionnelle de la structure, conduisant souvent à une complexité accrue de celle-ci en vue d’en accroître l’efficacité. Dans l’analyse de la structuration, il est nécessaire de faire aussi référence aux termes aménagement (ensemble des menus changements apportés à un état pour l’améliorer), arrangement (rendre favorable ou meilleur un état), élaboration (réalisation effective et progressive de ce qui a été conçu) et développement (évolution vers un stade plus avancé d’un état).

La structure est très différente selon les clubs pour de nombreuses et diverses raisons. Pourtant, si la structure des clubs sportifs ne fait pas l’objet d’un ensemble homogène, il demeure cependant de fortes similitudes entre clubs de même rang. Nombre de caractéristiques sont souvent proches entre clubs de même niveau de compétition et évoluant dans une même discipline sportive. Il est intéressant de mettre en évidence les caractéristiques communes et d’étudier les divergences. Malgré ces rapprochements, il n’existe pas, comme l’indique MINQUET [1997]165 ou encore ANDREFF et NYS [2002]166, de théories sur la

164 DURAND C. (1994), « Essai d’analyse structurelle et de diagnostic des clubs sportifs professionnels », Université de Caen, Thèse de doctorat Sciences de Gestion, p30. 165 MINQUET J.-P.-L. (1997), « Economie et gestion du sport », Ed. City and York, 225 p., p.12 166 ANDREFF W., NYS J.-F. (2002), « Economie du sport », Collection Que-sais-je ?, Presses Universitaires de France, Paris, 5e édition, 128 p., p.6. 82 gestion ou l’économie du sport. Les recherches portant sur les organisations sportives mettent en évidence les fondements des changements dans les pratiques de management mises en place et les préconisations relatives à l’amélioration de leur gestion. Cependant, dans la littérature en sciences de gestion, il n’existe pas, à notre connaissance, de conceptualisation spécifique de la gestion des clubs sportifs. On peut s’interroger sur la possibilité d’engager cette recherche par l’analyse des structures des clubs. On constate l’hétérogénéité structurelle des clubs sportifs ou encore la transposition souvent mal adaptée aux clubs sportifs des pratiques de gestion en entreprise. En règle générale, les chercheurs de diverses disciplines scientifiques s’emploient à formaliser l’activité des clubs sportifs en partant généralement de l’étude des entreprises pour s’interroger ensuite si les méthodes préconisées sont adaptées aux clubs sportifs.

2.2. L’hétérogénéité de la structure des clubs sportifs Existe-t-il un modèle de gestion spécifique des clubs sportifs? La réponse est sans doute négative, compte tenu de l’hétérogénéité croissante des clubs. L’analyse des clubs ne peut faire l’objet d’une généralisation excessive. Elle suppose une meilleure compréhension des différences d’objectifs, de fonctionnement et de performance selon les ambitions et le statut social et sociétal des clubs sportifs. Depuis plus de trente ans, les évolutions des clubs sportifs ont accru l’hétérogénéité de la gestion des clubs. Elles n’interviennent pas cependant n’importe quand. Elles sont une réponse aux performances sportives ou au degré de popularité des clubs, ce qui les incite à modifier leur structure et leur organisation. En outre, le potentiel de développement est différent selon les disciplines sportives. En effet, dans le système européen, il semble difficile de concevoir que des clubs de disciplines autres que le football puissent atteindre un niveau de développement similaire à cette spécialité très médiatisée. Parallèlement, tous les clubs de football n’atteindront pas le même niveau de développement que celui des grands clubs comme le Réal de Madrid ou Manchester United. Certains clubs n’ont jamais eu la nécessité ou la volonté ou encore la possibilité d’intégrer des pratiques « managériales » complexes similaires à celles des entreprises. Il est difficile pour un club de dernière division 83 de Roller hockey, par exemple, d’impliquer les investisseurs privés et publics de la même manière qu’un club comme l’Olympique Lyonnais (O.L.), même à une échelle réduite. De la mise en place ou non de ces pratiques de gestion, naît cette importante hétérogénéité entre les clubs. Les différences apparaissent à la fois selon la discipline sportive pratiquée, mais aussi selon l’importance et le palmarès des clubs d’une même discipline sportive.

2.2.1. L’hétérogénéité entre les disciplines sportives Il existe des disciplines sportives qui connaissent des évolutions financières et économiques importantes et d’autres qui subissent les conséquences d’une concurrence mal maîtrisée. Ce déséquilibre dans l’intérêt porté par le public à une discipline par rapport à une autre semble croître d’années en années, ne laissant que peu de place à la plupart des disciplines, tant en termes de médiatisation qu’en termes économiques ou encore de popularité. Si le système des fédérations donne un monopole disciplinaire, les sports n’en restent pas moins concurrents entre eux. Les choix de retransmission des médias ou les partenariats font l’objet d’âpres luttes qui modifient singulièrement les enjeux économiques des clubs ainsi concernés. En France, comme dans beaucoup de nations européennes, le football est roi. Des sports tirent leur épingle du jeu comme le basket-ball ou le rugby, laissant les miettes à d’autres sports pourtant appréciés comme le hand-ball, le volley-ball ou encore le hockey sur glace. La société capitaliste est une société élitiste qui ne partage pas et qui tend au « quasi-monopole ». C’est le dilemme du processus de « monopolisation » qui fait en sorte que la concurrence s’autodétruit elle-même, car le plus fort finit par éliminer tous les autres. Dans ce contexte, le recours à l’autorité publique est revendiqué, notamment par les « lois antitrusts ». Dans le fonctionnement des télévisions publiques, des contraintes étaient jusqu’à présent exigées par les autorités de tutelle. Aujourd’hui, le marché devient le principal acteur de promotion des sports, ce qui tend à réduire les retransmissions à un nombre de plus en plus limité de sports, mais pour des temps d’antenne accrus. Non seulement peu de disciplines ont un potentiel de développement leur permettant de mettre en place ce type de pratiques, mais seulement quelques champions et quelques clubs sportifs connaissent une véritable reconnaissance, laissant dans l’oubli et la faible importance économique nombre de leurs homologues. 84

2.2.2. L’hétérogénéité entre clubs d’une même discipline Si une forte hétérogénéité s’est développée entre les disciplines sportives, celle-ci existe aussi entre les clubs sportifs d’une même discipline. Premièrement, il est effectivement difficile de trouver des similitudes entre un club professionnel et un club amateur de division d’honneur, si ce n’est la même pratique sportive. Le haut niveau ne laisse que peu de place aux divisions inférieures. Il s’avère cependant que tout club à sa création démarre au bas de l’échelle et se construit petit à petit en franchissant les échelons les uns après les autres pour atteindre le haut niveau et, de ce fait, le degré de développement qui lui incombe. Ce modèle est fondé sur un système méritocratique, mais aussi financier, par les faibles restrictions appliquées au pouvoir de l’argent dans le respect, cependant, des résultats sportifs. Se dresse, par rapport au niveau de compétition, une sorte de classification naturelle. Ainsi, au fil du temps l’Olympique Lyonnais s’est structuré, formalisé, agrandi, professionnalisé, diversifié ; il a remporté des titres, formé de jeunes sportifs, solidifié son capital, développé des mesures permettant d’être moins tributaire des résultats sportifs (création d’une marque, de filiales ou d’un projet RSE167). Aujourd’hui, le marché boursier lui est ouvert, avec la promesse de la construction d’un stade. Dans les retransmissions télévisées, les mêmes clubs font l’objet des convoitises, car ils attirent un public plus large que celui de leur région d’origine. Il est clair que si Sedan intéresse les Ardennais, l’Olympique de Marseille crée une passion chez ses supporters locaux, laquelle, positivement ou négativement, s’exprime aussi dans l’ensemble de l’hexagone, voire dans le monde. Dans ces conditions, d’autres médias étrangers peuvent être intéressés, augmentant ainsi l’intérêt financier de l’opération. Un match entre l’Olympique Lyonnais et Marseille présente des enjeux économiques supérieurs à celui d’un Sedan- Valenciennes dont l’importance locale n’est pourtant pas négligeable. Si un club comme l’Olympique Lyonnais a réussi son développement, d’autres clubs de football n’ont cependant pas les mêmes possibilités, pour de multiples raisons. Par exemple, la démographie auxerroise est différente à bien des égards de celle de Lyon, ce qui affaiblit son potentiel de développement

167 Responsabilité Sociale de l’Entreprise. 85 comparatif. J-P. CALLEDE [2003]168 confirme ce déséquilibre en retenant plusieurs facteurs de développement comme l’histoire sportive locale, la densité démographique ou encore la répartition de la population dans l’espace municipal ou régional. Il n’empêche que pour atteindre le haut niveau, chaque club franchit sensiblement les mêmes échelons, même si pour certains les potentialités sont plus importantes. Chaque club utilise ses propres armes. Pour reprendre l’exemple du club de football d’Auxerre, il est le seul en France, évoluant au plus haut niveau, à posséder son stade, gage essentiel à tout club sportif désirant « in fine » accéder au marché boursier. D’autres facteurs peuvent être significatifs du potentiel de développement des clubs. Les résultats sportifs constituent un élément majeur, ainsi que la popularité d’un club, d’une discipline, l’activité économique locale, le degré de médiatisation du club.

2.3. La perte d’identité de la gestion des clubs sportifs Les clubs ont des potentiels, des objectifs, des structures, des évolutions et des ambitions très hétérogènes d’une discipline sportive à l’autre ou à l’intérieur même d’une même discipline. Il est donc difficile de définir des règles de gestion applicables à tous les clubs. Il y a eu des efforts entrepris pour conceptualiser la gestion des clubs sportifs169. Ils ont sans doute permis l’amélioration de la gestion des clubs, mais ils ont aussi produit des imprécisions et des ambiguïtés dans l’analyse managériale des clubs. En cherchant à conceptualiser les clubs par le canal des fondements de l’entreprise, la spécificité et l’hétérogénéité des clubs ont peu à peu été négligées. Or, pour DEFRANCE [1995]170, l’univers sportif « n’est pas comparable à une unité de production économique » dans la mesure où il semble difficile d’appliquer les principes de management dans les organisations au sein desquelles il est difficile d’identifier matériellement le produit. Ainsi, le président-dirigeant n’est pas un employeur

168 CALLEDE J.-P. (2003), « Les associations et l’ « action sportive locale » : une phase achevée de modernisation sociétale ? » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel Prouteau, Les Presses Universitaires de Rennes , Collection L’Univers des normes, 216 p., p 131. 169 HOUEL (1989), « Le club, entreprise de sport ? A quelles conditions ? Est-ce souhaitable ? » "Les cahiers de l'université sportive d'été n°04 - Le club sportif au quotidien. mythes. réalités. Projets ». 210 p. ; TRIBOU G. (1995), « Ethique sportive et culture d’entreprise » in Sport et Management – De l’éthique à la pratique, A. LORET (sous la direction), Dunod, Paris, p 55-70, 631 p. ; GASPARINI W. (1995), « Les organisations associatives et le jeu entrepreneurial », in Sport et Management – De l’éthique à la pratique, A. LORET (sous la direction), Dunod, Paris, p 80-89, 631 p. ; AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p. ; LARDINOIT T. et TRIBOU G. (2004), « Gère-t-on un club sportif comme on gère son entreprise ? Entretien avec Anny Courtade », dans Revue Française de gestion, volume 30 – numéro 150 – Mai / Juin 2004, Lavoisier, p 193- 202, 220 p. 170 DEFRANCE J. (1995), « Sociologie du sport », Editions La découverte, Collection « Repères », Paris. 86

« normal » et la grande majorité du personnel est bénévole. Si certains clubs sportifs constituent aujourd’hui des entreprises à part entière, ils n’en conservent pas moins certaines spécificités. L’application stricte de modèles issus de l’entreprise n’est pas toujours évidente, du fait des singularités du modèle sportif. En effet, une logique sociétale spécifique est développée par ou dans le sport. Elle conduit à des particularités en termes de : - concurrence (comme le monopole des Fédérations qui ressemble à un cartel légalisé) ; - production (un classement est opéré qui peut conduire à une rétrogradation dans une catégorie réservée à des amateurs) ; - productivité (l’intérêt du rapport bénéfice/investissement est partiellement limité par l’importance des résultats sportifs au regard des ambitions du club) ; - retour sur investissement (pour des actionnaires qui souvent deviennent « in fine » de vrais mécènes) ; - structures juridiques (spécifiques et réservées aux sports comme les SAOS et les SASP) ; - rémunérations (lesquels intègrent des droits d’image pour les « employés »).

Pourtant, les clubs semblent se structurer autour des fonctions habituelles de l’entreprise, à savoir la production ou le service, la recherche et développement, l’administration / finance, les ressources humaines, le commercial / marketing, la communication. La « glorieuse incertitude de sport » constitue l’élément essentiel distinctif dans la mesure où les échecs sportifs peuvent entraîner d’importants désagréments dans la recherche de pérennité d’un club, autrement dit, dans la recherche d’une bonne gestion d’entreprise. C’est la raison pour laquelle certaines modalités nouvelles sont appliquées dans les règlements. Pour les Coupes européennes de basket-ball, les clubs peuvent dorénavant être qualifiés pour plusieurs années, sur la base de leurs résultats sportifs de l’année, mais aussi des années précédentes. C’est une disposition qui permet de réduire les risques d’un investissement coûteux nécessaire à l’inscription à une compétition de plus haut niveau, impliquant un risque économique considérable si les résultats sportifs de l’année ne sont pas ceux qui sont attendus. En effet, quelle 87 que soit l’équipe, les performances sportives ne peuvent être garanties, alors qu’elles constituent un élément catalyseur de la réussite économique. Pour ces raisons, les clubs sportifs européens, quel que soit leur niveau de développement, ne sont pas des entreprises ordinaires. De plus, le modèle européen, suivi par la France, est un modèle fondé encore sur les valeurs éthiques du sport. Il se différencie, de ce fait, du modèle américain dans lequel la logique est différente. En effet, la population américaine révèle une mentalité tout autre puisqu’elle accepte la possibilité de « faire de l’argent »171 avec le sport. Les franchises sont considérées comme de véritables entreprises proposant un spectacle de sport. Si l’idée d’utiliser les fondements de l’entreprise au sein de clubs sportifs au développement avancé semblait judicieuse, elle a entraîné aussi une perte d’identité. « Déterminé par des logiques institutionnelles et organisationnelles en évolution, le club sportif illustre la complexité du phénomène sportif au niveau local. Légitimé par une logique sociale, certains auteurs souhaitent lui faire intégrer le modèle entrepreneurial au risque de perdre son identité spécifique »172. Certains clubs sont gérés comme des entreprises et non plus comme des clubs sportifs. La gestion des clubs ne constituerait qu’une juxtaposition des pratiques existantes en entreprise, pas toujours en adéquation avec les particularités du secteur sportif traditionnel.

Conclusion L’analyse des clubs sportifs est délicate, car elle manque cruellement de précision eu égard à leurs spécificités. En effet, lorsque la notion de « club sportif » est employée, tout club sportif, quel que soit son niveau de développement, est concerné. La dénomination est la même, malgré les différences de structures. La « marchandisation » du spectacle n’est pas vécue de la même manière par tous les clubs. Pour certains auteurs, elle a développé la professionnalisation en induisant une nouvelle structure proche du modèle de l’entreprise, pour d’autres, l’impact a été bien moindre conduisant la plupart des

171 PESTANA BARROS C., MURADALI I., SZYMANSKI S. (2002), « Transatlantic sport : the comparative economics of north american and european sports », published by Edward Elgar Publishing Limited, Massachussetts, USA, 493p., p 2- 6. 172 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 53. 88 clubs à conserver leur statut amateur et associatif. On peut constater un manque évident d’homogénéité de la gestion des clubs sportifs. À cela s’ajoute la tentation de la perte d’identité des clubs sportifs, comme c’est déjà partiellement le cas dans les quatre grands sports américains. Si la juxtaposition du modèle de l’entreprise semble judicieuse au départ, elle devient rapidement préoccupante dans la mesure où la gestion des clubs sportifs possède des spécificités nombreuses. Appliquer à la lettre le modèle de l’entreprise à la gestion des clubs sportifs semble complexe, d’autant plus qu’ils perdraient leur identité et, par la même, toutes les raisons qui fondent les activités sportives sur les notions d’éthique et de beauté. Aujourd’hui, il en résulte un manque de modélisation173 spécifique des clubs sportifs. Ces deux obstacles pourraient être levés si un consensus pouvait être accepté concernant la question suivante : « le club est-il une entreprise ? ». Une réponse positive permettrait de transposer au moins partiellement le modèle de l’entreprise aux clubs sportifs.

3. Le club est-il une entreprise ?

Pour comprendre le processus de professionnalisation du sport et son insertion dans l’économie de marché, des enquêtes concernant les pratiques managériales des clubs sportifs de l’élite sportive peuvent être faites dans un premier temps. Il s’agit de mettre en évidence le degré de parenté des clubs aux entreprises. Cette question ne fait pas encore l’objet de réponses consensuelles, du fait même des spécificités des activités sportives elles-mêmes dans l’environnement social et sociétal. En outre, les intérêts économico-sportifs divergents entre les clubs désireux de conserver des formes associatives et les clubs professionnels qui appellent à l’application des règles de l’économie de marché, avec toutes les obligations afférentes proposées par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ou par l’ Union européenne, sont source de conflits et de divergences. La préparation d’une enquête suppose une réflexion sur le contenu même de la question posée. Les particularités du secteur sportif doivent être mises en évidence, avant de présenter les résultats des enquêtes

173 Du terme « modèle » : Structure formalisée utilisée pour rendre compte d’un ensemble de phénomènes qui possèdent entre eux certaines relations. Représentation d’un phénomène physique, économique, humain, etc., réalisée afin de pouvoir mieux étudier celui-ci (Petit Larousse, grand format). 89 faites dans les rapports d’expertise ou par les Commissions politiques. Sur cette base, nous ferons une enquête originale, sur la base d’interviews et de questionnaires, sur l’application des règles de gestion des entreprises aux clubs sportifs.

3.1. Les particularités du secteur sportif Le secteur sportif, au regard de son activité, constitue par nature un secteur spécifique. Nous nous intéresserons à ses particularités (Tableau n°4).

Tableau n°4 - Les particularités du secteur sportif en matière de gestion Singularités Présentation La compétition est organisée par une fédération, laquelle est souvent reconnue par les pouvoirs publics, qui met en place des règles spécifiques en vue de maintenir la concurrence entre les clubs sportifs nécessaire à la fameuse « incertitude du sport ». Cependant, les fédérations disposent d’une délégation de pouvoir qui leur confère, dans la discipline concernée, une forme de Spécificité monopole, laquelle est normalement interdite par l’OMC de la concurrence et l’Union européenne. Certes, des fédérations privées pourraient voir le jour, mais les « barrières à l’entrée » seraient tellement fortes que leur survie professionnelle est peu probable. En d’autres termes, il faudrait des financements considérables pour « entrer » sur ce marché. Les expériences négatives de Ligues professionnelles de rugby de Murdoch ou la création des « Goodwill games », concurrentes respectivement de l’International Board de Rugby et des Jeux Olympiques sont suffisamment significatives pour être rappelées. Les clubs ont besoin les uns des autres pour créer le « produit ». Autrement dit, la compétition sportive et le spectacle sportif ne peuvent retenir l’intérêt économique que dans un cadre réglementaire précis. Cependant, la diversification des produits et les « effets d’attraction », 90

ainsi que l’importance des investissements engagés, Singularité de la réduisent les effets de la concurrence réelle, en vue de la production réalisation de marchandises conformes, de qualités différentes, mais aux règles marchandes initiales identiques. Certains clubs produisent plus que la simple compétition sportive et se sont diversifiés (produits dérivés ou matchs de galas, par exemple).

Le sport a acquis le caractère de « mission publique », laquelle est fondée sur la recherche de l’intérêt général. Originalité de la Le sport est porteur de valeurs sociales qui méritent le relation avec l’Etat soutien de l’Etat, des collectivités territoriales, mais aussi des instances de régulation continentales ou même mondiales.

L’éducation et la formation de la jeunesse, la production et la gestion des élites ou les activités d’intégration sont autant de valeurs associées à l’activité sportive, Particularité des partiellement fondatrices des sociétés. La société attend relations sociétales du club sportif, en retour de son soutien, une implication dans les domaines de l’intégration et de la justice sociales.

La productivité « sportive » ne peut être améliorée par le recours éventuel aux valeurs des entreprises. Ainsi, il est impossible de faire jouer 12 joueurs sur un terrain de football pour améliorer la productivité. Par contre, cette productivité peut être calculée sur les résultats Une conception économiques, mais l’interprétation des résultats ne va différente de la pas de soi, car souvent faussée par le caractère aléatoire productivité des résultats sportifs. Il est vrai que gouverner c’est aussi prévoir, ce qui veut dire que le dirigeant d’un club se doit de limiter les risques financiers et économiques des mauvais résultats. 91

Augmenter ses recettes a un lien souvent étroit avec les performances sportives. Si quelques clubs grâce à leur popularité conservent le niveau de leurs recettes malgré de mauvaises performances sportives, c’est qu’ils ont La singularité du obtenu suffisamment de performance sportive pour retour sur pallier le peu d’engouement du public sur une période investissement plus ou moins longue. Il n’empêche qu’à un moment donné, le club sportif ne pourra plus faire face à de mauvaises performances sportives. La réalisation de performances sportives requiert une équipe de qualité que les financements en baisse ne permettent plus de réunir aisément, sauf à obtenir un niveau de qualité/prix de l’équipe supérieur aux autres équipes. Une équipe de qualité ne permet pas de garantir les performances sportives. Le retour sur investissement est difficilement maîtrisable, ce qui met les clubs sportifs dans une situation souvent instable. Au départ, le club est fondé sur le statut des associations et il n’a pas de but lucratif. Ensuite, s’il dépasse certains La spécificité des seuils financiers, il se voit contraint d’adopter une forme structures juridique différente. Cependant, ces sociétés sont juridiques hybrides puisqu’elles conjuguent à la fois les caractéristiques des Société anonymes, mais aussi les particularités du club sportif. Le joueur a le même statut qu’un ouvrier dans la mesure où il est d’abord un exécutant. Pourtant, son salaire est parfois, à l’instar des footballeurs, très élevé. De ce fait, La singularité des son contrat de travail ne peut prendre que la forme rémunérations habituelle du CDD174, selon des modalités complexes et négociables de gré à gré, sauf dans les cas limites fixés par certaines chartes (charte du footballeur professionnel).

174 CDD : Contrat à Durée Déterminée. 92

Ainsi, le transfert des outils, méthodes et stratégies managériales d’entreprises au sein des clubs sportifs n’est pas toujours opportun. De nombreuses controverses existent sur cette question. C’est la raison pour laquelle le terme « adaptation » sera préféré à celui de transfert. Dans une optique de transposition des valeurs managériales au sein des clubs sportifs, l’élément essentiel à prendre en compte est l’incertitude du sport. Il peut d’ailleurs parfois s’apparenter à l’incertitude des affaires pour les « marques ». Cependant, si Lacoste peut pendant une année rater sa nouvelle collection, elle ne descend pas nécessairement dans une « division inférieure », ce qui est le cas d’un club sportif. Autrement dit, l’erreur n’est pas permise dans le sport, alors qu’elle l’est dans les autres secteurs de l’économie. Lacoste pourra se reprendre par une nouvelle collection de qualité dès le printemps suivant, alors que le club sportif se retrouvera au « purgatoire » d’une division inférieure pendant au moins une année pleine. Dans ces conditions, on comprend à quel point les résultats sportifs sont une condition importante à la pérennité au club. Une équipe qui obtient des résultats sportifs sur une longue période attire l’intérêt populaire et commercial. En effet, si les entreprises, les médias ou les collectivités locales s’intéressent au monde sportif, c’est en raison de ses fortes audiences et de son image de marque. Or, un club qui obtient de bons résultats sportifs attire le soutien, la fidélité, voire la ferveur du public, lequel est une cible fondamentale pour les agents économiques. Assimiler leur image à celle d’un club, utiliser la notoriété de celui-ci à des fins lucratives ou pour toute idée de pouvoir sont des pratiques constantes et pour lesquelles les agents politico- économiques sont prêts à investir en termes d’argent, de soutien et de temps. Ces investissements sont plus ou moins importants selon les clubs sportifs, mais ils constituent pour beaucoup une part essentielle de leurs sources de revenus. Les ressources des clubs sont devenues, aujourd’hui, très hétérogènes et nombre d’entre elles ne proviennent pas directement de l’activité principale du club que constitue le spectacle sportif lui-même. D’ailleurs, nous entendons moins le terme de « soutien financier » que de « produit » lorsqu’il est question de relations d’argent entre les collectivités locales et un club sportif par exemple. Les ressources financières sont souvent proposées aux équipes méritantes, accroissant ainsi la dépendance des clubs sportifs aux résultats sportifs.

93

Les mauvaises performances sportives entraînent des conséquences désastreuses au sein des clubs sportifs, ayant atteint un certain niveau de compétition et de développement notamment. Elles peuvent conduire à leur dépérissement, du fait notamment de : 1. la baisse de l’audience, qui engendre des pertes en termes de billetterie et d’abonnements ; 2. la baisse de la notoriété et, donc, des ventes de produits dérivés ; 3. la baisse des subventions des collectivités territoriales, notamment en raison de la baisse de l’intérêt du club pour les personnes habitant la localité ; 4. la réduction, voire l’abandon des contrats de partenariat et des commanditaires ; 5. la baisse sensible de la médiatisation du club en raison de cette perte d’intérêt.

Autrement dit, une baisse des ressources est à prévoir entraînant l’impossibilité de conserver les joueurs bien rémunérés et donc de conserver le niveau de compétitivité de l’équipe. Les résultats sportifs constituent pourtant une condition essentielle de la pérennité d’un club sportif, notamment lorsqu’il atteint une certaine dimension, même si la règle « too big to die » reste souvent appliquée. Les grands clubs espagnols sont fortement endettés, mais compte tenu de leur importance locale et régionale, leur disparition reste illusoire. Il est pourtant difficile de prévoir les performances sportives, on peut simplement prendre les précautions nécessaires en employant non seulement de bons joueurs qui exercent leur talent, mais aussi en disposant de joueurs de réserve intéressants, capables de remplacer les titulaires et donc indisponibles dans les rangs de la concurrence. Cependant, le coût de l’opération devient très élevé, indépendamment des mesures proposées par les Ligues et les fédérations pour limiter ces pratiques anticoncurrentielles. La pérennité d’un club sportif s’applique sur des bases trop hasardeuses. Les sports professionnels américains lui préfèrent l’application de la méthode des franchises. Ainsi, sur quels terrains les clubs doivent-ils se lancer pour réduire le risque et rendre le club plus stable ? Pour beaucoup de dirigeants, il convient d’obtenir des ressources qui sont indépendantes des résultats sportifs. Il devient nécessaire de produire d’autres services que le simple spectacle sportif, ce qui induit un comportement 94 et une structure proche de ceux qui sont nécessaires à la gestion des entreprises. Pour autant, les clubs sont-ils des entreprises ?

3.2. Les deux modèles sportifs dominants et leurs caractéristiques Il existe deux grands modèles de clubs : le modèle européen et le modèle américain.

3.2.1. L’analyse du modèle européen par une Commission de l’Union européenne Pendant très longtemps, le sport n’a pas fait l’objet d’une réflexion approfondie par les autorités européennes. Depuis la Déclaration de Nice (2000), adoptée par le Conseil européen en 2000, de nombreuses caractéristiques spécifiques du sport sont jugées importantes pour l’Europe dans son ensemble. Le football semble devenir un modèle pour le sport professionnel. « Le football est une activité à nulle autre pareille : il s’agit sans doute du seul sport véritablement planétaire, dont l’influence transcende les ordres économique, politique, social et culturel… Cependant, il est évident, dans tous les Etats membres de l’UE, que le sport et plus particulièrement le football représentent bien davantage qu’une activité commerciale. Le football peut jouer un rôle important dans la réalisation d’objectifs publics plus larges, notamment favorable à l’intégration sociale, à la cohésion de la collectivité, au renforcement de la participation et au développement de modes de vie sains »175. Le Conseil européen est attaché à l’autonomie des organisations sportives et à leur droit d’auto-organisation selon des structures appropriées. Le sport est très diversifié. Il convient donc de définir des règles d’autant plus souples que les enjeux économiques sont faibles. Les Etats membres doivent encourager le bénévolat, car le sport repose sur des valeurs sociales éducatives et culturelles essentielles. La formation des jeunes doit être protégée et encouragée, selon des modalités à définir par les fédérations sportives. La nature spécifique du sport est reconnue dans la déclaration de Nice. « La Communauté doit tenir compte, même si elle ne dispose pas de

175 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com, p.35. 95 compétences directes dans ce domaine, dans son action au titre des différentes dispositions du Traité des fonctions sociales, éducatives et culturelles du sport, qui forment sa spécificité, afin de respecter et de promouvoir l’éthique et les solidarités nécessaires à la préservation de son rôle social »176. Dans ce contexte, l’Europe ne peut plus de désengager de ses responsabilités concernant les spécificités économiques, mais aussi éducatives, culturelles et sociales du sport. Il s’agit de donner les moyens à cette activité économique de conduire une gouvernance d’entreprise adaptée au contexte social, de favoriser son rôle d’intégration, de lui donner un cadre juridique qui lui permette de se développer, d’acquérir une transparence et une clarification de ses droits. Il lui faut aussi lutter contre ses effets pervers (dopage, corruption, racisme, xénophobie, paris illégaux, blanchiment d’argent), dans le cadre du respect du « modèle européen du sport ». La présidence britannique de l’Union européenne a lancé une étude indépendante sur le sport européen. Il avait pour objectif d’analyser la spécificité juridique du sport, d’étudier le football européen et les évolutions du sport professionnel et de parvenir, plus généralement, à des propositions concrètes d’organisation177. La commercialisation jugée excessive du sport crée un nouvel environnement qui le place devant d’importants défis à relever. Le rapport vise à « élaborer un cadre juridique complet et solide à l’intention du sport européen en général et du football en particulier »178. Plusieurs orientations y sont présentées : - La structure pyramidale doit être maintenue et même soutenue, car c’est elle qui crée un lien étroit entre le football des quartiers et celui des sportifs de haut niveau. Elle met en évidence des solidarités d’une grande famille aux conditions économiques de ses membres très diversifiées.

- La fonction sociale des clubs dans les collectivités locales et nationales prend une importance croissante, même s’il faut, à terme, éviter les « effets pervers » comme le clanisme, le communautarisme, la

176 Annexe IV des conclusions de la présidence du Conseil européen de Nice, de décembre 2000. 177 Le groupe de travail était constitué des Ministres des sports français, allemand, italien et espagnol, les instances européennes et les présidents de la FIFA, de l’UEFA et de la CAF. Douze experts ont été chargés par groupe de quatre d’étudier les questions juridiques, politiques et économiques. De nombreuses interviews ont été engagées, ainsi qu’un système d’audiences publiques dans plusieurs pays, regroupant tous les acteurs de l’économie du sport en Europe. ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com. 178 Ibid. p.8. 96

xénophobie, le racisme, autant de scories dans les événements sportifs qu’il convient de supprimer.

- Les questions relatives au gouvernement d’entreprise dans le football, susceptibles d’avoir une application dans les autres sports, concernent principalement la propriété des clubs, le contrôle de leur gestion, les réglementations, les systèmes spécifiques des transferts, la gestion des activités pénalement condamnables, les activités annexes comme les paris et, enfin, « last but not least », la sécurité dans les stades. Le rapport conclut que le « sport en général et le football en particulier ne sont pas en bonne santé »179. Cependant, le modèle européen du sport doit être préservé, sur la base des structures pyramidales, de la solidarité financière et de l’ouverture à la compétition de haut niveau. Au niveau des grands clubs médiatisés, le sport est devenu un « business » dont les litiges encombrent les tribunaux. Aujourd’hui, le droit est allé moins vite que la réalité économique. Depuis l’affaire Bosman180, les litiges se sont multipliés. Les Cours européennes ainsi que la Commission ont été saisies de nombreuses affaires dans le cadre des réglementations de la concurrence et de la libre circulation des personnes. Les règlements sportifs ne sont pas toujours en phase avec la réglementation européenne, ce qui ne peut évidemment plus continuer.

Trois questions méritent d’être analysées, d’abord, le régime juridique du sport dans l’espace européen, la gouvernance des clubs, ensuite, et, enfin, les modalités spécifiques applicables à la gestion des sports. Quelques recommandations de ce groupe d’experts seront aussi présentées.

3.2.1.1. Le régime juridique du sport dans l’espace européen L’autonomie des instances dirigeantes des sports est reconnue par la Déclaration de Nice. Cette reconnaissance n’indique pas pour autant que les clubs ne doivent pas respecter la règle commune, mais dans le cadre de la loi un

179 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com, p.8. 180 L’affaire Bosman a interdit aux clubs de considérer les Européens de l’UE comme des étrangers. Ces derniers ont les mêmes droits que les nationaux. Par contre, sauf s’il existe une autre convention, il est possible de limiter le nombre d’étrangers hors UE. 97 pouvoir discrétionnaire est reconnu aux dirigeants. Le sport n’est donc pas traité de la même manière que les autres activités économiques, compte tenu de sa spécificité. La question qui se pose est celle de la nature de cette spécificité qui justifie un traitement juridique particulier. Trois rubriques sont mises en évidence : la régularité et le fonctionnement des compétitions, l’intégrité du sport et l’équilibre des compétitions. - La gestion des compétitions comprend les règles du jeu, la structure des championnats et les calendriers. Elle est du ressort des dirigeants, selon des modalités à définir, notamment sur les questions concernant les équipes nationales (la mise à disposition des joueurs, selon des modalités à définir entre les Fédérations et les Ligues des sports professionnels) ou l’organisation territoriale des compétitions. Pour le Rapport, la structure pyramidale est « une structure indivisible, constituant, par certains aspects, une coopérative »181. D’autres règles, comme le transfert des joueurs, les contraintes liées au « spectacle public », les restrictions relatives par exemple à la couverture télévisuelle, sont indispensables pour assurer une stabilité des compétitions et le bon fonctionnement économique des clubs. Il n’y a pas de conflits majeurs entre ces règles « internes » et le droit européen.

- L’intégrité est essentielle dans une activité qui prône l’exemplarité. La lutte contre le dopage est d’abord du domaine sportif, même si elle peut ensuite se poursuivre devant les tribunaux civils. Compte tenu de ses retombées économiques, le sport fait l’objet de nombreuses convoitises qui cherchent à modifier les règles à leur avantage. Ainsi, il faut un contrôle des paris, de la propriété et de la gestion des clubs, exiger une transparence et l’intégrité financière, réglementer clairement toutes les opérations commerciales et financières qui peuvent favoriser l’émergence d’une économie illégale, corruptrice ou souterraine.

- Enfin, l’équilibre des compétitions doit être un objectif, en vue de conserver l’intérêt des spectateurs et des « parieurs ». Les « forces normales du marché » donnent un pouvoir excessif à l’argent. Il est ainsi

181 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com, p. 11. 98

possible « d’acheter » une compétition, en multipliant les achats de joueurs « du banc » afin que ces derniers, très talentueux, ne jouent pas dans les clubs adverses182. La proposition de l’UEFA de développer une formation locale va dans le sens d’un système réduisant l’importance du « commerce des compétences des hommes ». Dans ce contexte, la vente centralisée des droits commerciaux est admise par l’Union européenne, malgré les lois antitrusts de la loi commune, notamment parce qu’elle permet une redistribution financière équitable, tout en donnant les moyens à la compétition de s’exprimer sur un mode plus sportif que financier. La commercialisation centralisée de l’UEFA Champions League est même montrée en exemple. Elle a d’ailleurs été acceptée par la Commission européenne, mais aussi, au niveau national, par plusieurs Etats, comme l’Angleterre, l’Allemagne et la France. Enfin, la question de la maîtrise des coûts salariaux est invoquée, afin d’éviter l’achat de tous les bons joueurs par une seule équipe, ce qui ne va pas dans le sens des intérêts du public et, plus généralement, du sport lui-même. Dans ces conditions, un système d’impôt de redistribution sur les salaires élevés pourrait être considéré, au même titre qu’un ratio maximal de la masse salariale au regard du chiffre d’affaires.

Tous les sports sont différents. Dans le cadre de la loi commune, en acceptant certaines exceptions liées à l’intérêt collectif bien compris, l’autonomie des instances dirigeantes du sport doit être considérée, à condition que soient respectées la démocratie, la transparence et la séparation des pouvoirs. Le modèle pyramidal, le système de promotion-rélégation, la redistribution financière sont des principes auxquels l’Union européenne est attachée. Les structures doivent évoluer avec leur temps, avec le développement des ligues professionnelles, des syndicats de joueurs, des Commissions des compétitions et même des Associations de supporters. La résolution des litiges suppose, selon les cas, des systèmes d’arbitrage indépendants et reconnus soit par discipline, soit pour l’ensemble du sport. Aucune objection du droit européen ne s’oppose à ces pratiques. « Enfin, pour lever toute ambiguïté, aucune objection d’ordre juridique ne s’oppose à ce qu’une instance dirigeante du sport associe une activité

182 Cette possibilité est aujourd’hui réduite par la règle d’un nombre maximal de joueurs professionnels dans une équipe. 99 réglementaire à des fonctions commerciales… L’instance dirigeante (…) doit concilier des intérêts divergents (et parfois concurrents) de tous les acteurs, afin de préserver les intérêts du sport au niveau européen »183. Les organismes de gouvernance doivent être capables de rendre des comptes sur les procédures et leurs décisions, si besoin est.

3.2.1.2. La gouvernance d’entreprise du sport. L’exemple du football La gouvernance d’un sport comme le football concerne, bien sûr, les clubs, mais aussi les instances nationales et internationales et le fonctionnement des mécanismes réglementaires. Une première question concerne la propriété du Club et la qualité de sa gestion. Il existe plusieurs régimes juridiques en Europe qui vont des sociétés par actions boursières aux mécanismes de type associatif. Il semble difficile d’imposer une structure de propriété homogène applicable à l’ensemble de l’Europe. Par contre, il est plus efficace de s’interroger sur les principes d’une bonne gestion financière, sur la transparence des comptes et sur le contrôle des personnes qui assurent la direction des clubs en termes de moralité et de compétence. Aujourd’hui, les clubs s’achètent et se revendent, les exemples de Manchester United, de Chelsea et du Paris-Saint-Germain (PSG) sont à l’esprit de chacun. Dans ces conditions, les clubs fonctionnent comme des entreprises, notamment celles qui ont accès au marché boursier. Elles peuvent être simplement rachetées par le plus offrant. Dans le cas qui nous concerne, le financier peut se porter acquéreur et malgré les recommandations faites par la Commission qui a écrit le rapport, il est impossible, sauf à démontrer des procédures illégales, de contrôler les dirigeants des clubs qui sont en même temps les propriétaires. Le rapport demande aussi d’explorer de nouvelles structures intégrant les supporters. Il donne pour exemple le mouvement Supporter Direct qui agit en Grande-Bretagne. Cependant, dans le cas de Manchester, les supporters n’ont pas eu droit de regard sur la politique décidée par le nouveau propriétaire américain. En outre, cette question reste discutable, lorsque l’on assiste aux débordements des supporters du Paris-Saint-Germain ou de ceux de Marseille, dont la gestion des places dans le vélodrome mériterait un plus grand contrôle.

183 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com, p. 15. 100

La gestion financière des clubs n’a pas toujours été exemplaire. La question est de savoir si elle l’a moins été que celle des entreprises normales. Il est sans doute difficile de faire des comparaisons étant donné le poids qu’un sport professionnel a sur les ressorts psychologiques et sociologiques d’une région, sans faire valoir les considérations économiques comparables. Aujourd’hui, l’UEFA demande le respect d’une discipline financière. Cependant, il lui est plus facile de la faire respecter aux petits Clubs qu’aux Clubs du G14184. Ceux-ci ont parfois des dettes abyssales et un soutien très fort des collectivités locales ou nationales. L’aide du Roi d’Espagne au Réal de Madrid est bien connue. Dans ces conditions, les compétitions nationales et internationales, déjà très influencées par les considérations économiques, sont encore plus inégales si l’on tient compte de l’endettement et de la capacité d’endettement très différents des Clubs européens. Le Rapport propose, si possible, un « code de gouvernement d’entreprise adossé à une procédure d’octroi de licence »185 ou alors un système de « benchmarking » encourageant l’application de pratiques saines de gestion des clubs.

La maîtrise des coûts salariaux est parfois nécessaire. Dans le cadre du sport, chaque équipe a ses spécificités, ses talents, sa solidarité. Au fond, le sport ressemble aux activités de l’armement dans lesquelles l’excellence est une question de survie. Si les fusils des différents pays sont comparables en technicité et en efficacité à coûts constants, il n’en va pas nécessairement de même pour les armes majeures. Dans ce contexte, pour emporter la victoire, les coûts de l’achat de ces armes ne constituent plus l’argument essentiel, notamment lorsqu’il s’agit d’une question de vie ou de mort. La recherche des joueurs « qui font la différence » pèse lourdement sur les budgets des équipes de football. Dans ces conditions, l’Etat fixe des règles et des budgets en vue de réduire les coûts afférents au système de défense acceptable. Il en va de même pour le sport, même si les difficultés réglementaires et législatives peuvent, dans certains pays, être présentées.

184 Groupe de grands clubs de football qui exerce une forte influence sur les instances internationales du football. Il est composé des plus grands clubs européens, les plus riches, du Réal de Madrid à Manchester United. Aujourd’hui, il y a une vingtaine d’adhérents. La France compte trois clubs dans ce groupe huppé : l’Olympique Lyonnais, l’Olympique de Marseille et le PSG. 185 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com, p. 16. 101

Pour les autres instances dirigeantes que les clubs, le système des transferts de joueurs est accepté par le droit européen et laissé au contrôle des fédérations nationales dans le cadre de leurs responsabilités territoriales ou aux instances européennes ou mondiales pour les opérations internationales. L’importance des sommes engagées dans le football a accru le nombre et l’importance des actes délictueux. Il concerne les questions du blanchiment de l’argent, du « trafic » de jeunes joueurs, du dopage, du racisme et de la xénophobie. En outre, les paris constituent un sujet de préoccupation majeure, d’autant que les législations nationales sont précises sur ce thème. Ainsi, en France, tous les Jeux sont le monopole de l’Etat. Dans ces conditions, il y a une divergence d’intérêt entre les sociétés de jeux privés qui sont permises dans certains Etats européens. Une affaire récente à Monaco a mis en évidence l’importance de cette question. Il reste, enfin, à régler le problème de la sécurité dans les stades, avec la recrudescence des actes de non-respect des droits de l’homme. Une réglementation spécifique concernant la vente des billets pourrait endiguer le marché noir.

Aujourd’hui, si le sport reste évidemment soumis aux règles communes du droit européen, les règles juridiques ne permettent pas au sport de se développer en toute quiétude, car il existe trop de zones d’ombre. Il doit donc respecter le droit de la concurrence. Cependant, dès l’origine, la question de l’entité économique fondamentale du sport n’est pas claire. S’il s’agit des clubs, ceux-ci devraient alors avoir le droit de discuter eux-mêmes les droits de télévision. Aujourd’hui, sur cette question, le droit européen admet que les fédérations internationales se substituent aux clubs, comme si elles étaient des organisateurs de spectacles. Il est vrai qu’un club n’a de réalité que dans la compétition avec les autres clubs. Cependant, on peut constater que les deux entités ont des rôles particuliers dont la valeur juridique pourrait être contestée. « La réglementation d’exemption (Block Exemption Regulation) par catégorie est un instrument qui, d’une manière générale, offre une protection juridique à certaines catégories d’accords eu égard au droit de la concurrence »186. Cette commercialisation centralisée a été admise par la Commission européenne ; il faudrait en consolider le principe pour les activités sportives.

186 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com, p. 18-19. 102

Les règles concernant la concurrence des activités professionnelles, le développement des associations ou des coopératives ou les relations de travail dans le cadre des conventions collectives devraient s’inspirer de la jurisprudence. Comme le sport peut être reconnu d’intérêt public au sens de l’article 86 du traité de la Communauté Européenne, certaines dérogations aux règles du traité sont envisageables, s’appliquant notamment aux aides de l’Etat et des collectivités publiques et territoriales. Plusieurs directives européennes concernant les mineurs ou les conventions collectives s’appliquent à "minima" sur les activités sportives, mais cette question est partiellement traitée par l’Accord partiel élargi sur le sport du Conseil de l’Europe. La Commission prévoit la création d‘une Agence européenne du sport chargée d’assurer la liaison et la coordination avec les instances spécialisées en Europe. Enfin, « à l’avenir, nous pensons que l’UE devrait, par exemple, conclure un accord formel avec l’UEFA clarifiant la nature de la relation bilatérale entre les deux instances, en vue de créer un environnement stable pour une coopération permanente sur toutes les questions relatives au football, au droit et à la politique de l’Union européenne »187.

3.2.1.3. Les recommandations L’expertise demande aux institutions de l’Union européenne d’apporter au sport une législation stable, spécifique, claire qui exprime les pratiques acceptables dans le cadre de l’autonomie des instances dirigeantes du sport. Il faut évidemment que ces nouvelles règles sportives soient compatibles avec le droit communautaire, en tenant compte du rôle spécifique de « service public » du sport. Le Rapport propose aux institutions européennes, par les moyens appropriés de droit (directifs, règlements d’exemption par catégorie, instruments législatifs nationaux ou européens, lignes directrices) de donner une couverture juridique aux questions suivantes : - l’octroi des licences aux clubs, à partir des normes minimales fixées en 2004 par les associations de football de l’Europe ; - la réglementation des transferts de joueurs (principes définis avec la Commission européenne en 2005) et une directive concernant les agents de joueurs, avec l’établissement d’une licence, des contrats dont les

187 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com, p. 20. 103

normes minimales sont fixées, des sanctions disciplinaires pour les fautes, l’interdiction de la « double représentation », une plus grande transparence et le système de paiement des agents (par les clubs ou les joueurs) ; - la commercialisation centralisée des droits (principes définis par la Commission européenne) ; - la régularité et l’intérêt des compétitions, par le contrôle des coûts et le nombre maximal de professionnels recrutés ; - la mise à disposition des joueurs de l’équipe nationale sans aucune indemnité (ce qui n’est pas la pratique de tous les sports) ; - le maintien de la structure pyramidale du football européen, avec une reconnaissance officielle de toutes les instances par les institutions européennes ; - la protection des droits de propriété intellectuelle et la définition de la structure et du calendrier du championnat, dans le cadre d’une législation nationale et communautaire selon l’importance territoriale de la compétition ; - des mécanismes de correction concernant la libéralisation du marché des paris qui conduiraient à une indemnisation des entités du sport, par le canal d’une taxe ; - la lutte contre le « marketing embusqué » et la protection des droits de la propriété intellectuelle pour les événements sportifs par la législation appropriée ; - le refus de la pratique de la « revente » des billets et une harmonisation de la lutte contre le hooliganisme, en accord avec les forces de police ; - la reconnaissance du rôle et des fonctions des instances dirigeantes du sport par une législation adaptée ; - un système de formation locale des joueurs, avec l’obligation éventuelle des clubs de disposer de joueurs locaux dans leurs effectifs, selon des normes à définir ; Le Rapport recommande, notamment, un Code européen de gouvernance d’entreprise à l’intention des clubs et la création d’une instance de contrôle diligentés par la Commission européenne.

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Tableau n°5 - Les instruments européens nécessaires à la reconnaissance de la spécificité économique du sport188 Proposition Bases juridiques Procédure Lignes directrices de Article 211 CE Commission européenne l’application du droit de la concurrence au sport Exemption de certaines Article 8 du règlement Proposition de la catégories d’aide de l’Etat 994/98 du Conseil Commission, consultation Article 87 (3) du Comité consultatif en matière d’aides d’Etat et décision du Conseil (majorité qualifiée) Aides de l’Etat Article 87(3) Décision de la acceptables dans le Article 88 (2) Commission ou du Conseil domaine du sport Signature d’une Article 138 CE ¨Proposition de la convention collective pour Article 139 (1) et (2) CE Commission, décision du chaque sport Conseil (majorité qualifiée ou unanimité) Tâches d’intérêt général Article 86 (2) et (3) CE Décisions de la assumées par les Commission ou directives. organisations sportives Établir des instruments de Article 211 CE Commission normes douces (soft law) concernant les recommandations, les instructions, les codes de conduite, etc. Adoption des règlements Article 83 (2) CE Proposition Commission, d’exemption par catégorie Règlement n°19/65/CEE Consultation du (commercialisation concernant l’application Parlement européen, centralisée des droits, de l’article 85 (3) modifié décision du Conseil transferts des joueurs) par le règlement 1/2003 (unanimité)

Directives sur les mineurs Article 94 CE Proposition Commission, dans le sport Article 137 (1) CE avis du Parlement et du Article 251 CE Comité économique et social et du Comité des Régions, Décision du Conseil.

Décisions sur les paris Article 44 (1) CE Proposition Commission, Article 52 (1) CE avis du Parlement et du Article 94 CE Comité économique et social, décision du Conseil (majorité qualifiée)

188 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com, p. 31-33. 105

Création d’une Agence Article 308 CE Proposition Commission, européenne du sport Règlement (CE) avis du Parlement. n°28/2003 du Conseil du 19/12/2002. Application des règles de Article 211 CE Commission la libre circulation dans le sport

3.2.2. Présentation du système des franchises appliquées dans le modèle du sport professionnel américain Le sport professionnel américain du base-ball, football américain, basket- ball et hockey sur glace sont depuis longtemps professionnalisés, avec l’aide des retransmissions télévisées, des radios et de la presse écrite. Le spectacle fourni par les clubs des franchises, créé conjointement par la Ligue et les joueurs, produit de la valeur. Les propriétaires et les patrons de la Ligue (propriétaires et les commissionnaires) achètent la force de travail des joueurs à un prix inférieur aux recettes directes ou indirectes du spectacle qu’ils proposent, ce qui leur permet de dégager une plus-value. Le professionnalisme américain repose sur deux principes de base : la maximisation du profit et le monopole bilatéral. Les négociations collectives (souvent âpres et conflictuelles) entre la Ligue et le syndicat des joueurs définissent la répartition de ce profit entre les propriétaires et les joueurs. Ce sont des résultats de ces négociations que découlent les dispositions concrètes. Les Ligues mettent en place les conventions collectives. Il s’agit d’une simple application de l’économie de marché, avec des règles qui permettent de ne pas laisser le plus fort rester indéfiniment le plus fort, écartant ainsi l’intérêt des spectateurs et des téléspectateurs. Plusieurs remarques peuvent être faites : - Si les Ligues sont en situation de monopole, la loi américaine considère qu’il s’agit d’une activité spécifique et qu’il n’y a donc pas lieu de faire appliquer les lois antitrusts. En fait, les barrières à l’entrée pour une nouvelle ligue dans le même sport sont très élevées et si la concurrence reste toujours possible, il faudrait un investissement considérable de l’ordre d’une vingtaine de milliards de dollars pour rompre ce monopole. Dans ces conditions, les investissements sont trop élevés pour une rentabilité trop peu évidente, compte tenu des accords déjà existants entre les Ligues et les chaînes de télévision. 106

- Les « franchises » américaines ont cherché, par contre, à maintenir la compétition des clubs. Elles ont donc institué deux systèmes, aux orientations aléatoires en fonction des discussions et négociations avec les joueurs : celui du draft qui permet le recrutement des meilleurs jeunes joueurs arrivant sur le marché, dans l’ordre inverse du classement de la saison précédente et celui du « salary cap » qui limite la masse salariale des clubs.

- Les franchises américaines bénéficient d’une redistribution égalitaire des droits TV nationaux. Un club (une franchise) estime anormal de ne recevoir des droits télévisés qu’une somme identique à celle d’autres clubs moins huppés ou sans grande notoriété. Le sport professionnel américain a été régulièrement confronté aux demandes des clubs aux résultats sportifs les plus élevés d’une attribution supplémentaire par rapport aux autres clubs. Cependant, ces pressions n’ont jamais abouti. Les ligues ont toujours réussi à faire privilégier l’intérêt collectif, y compris devant les tribunaux. Elles réagissent parfois en menaçant le club d’exclusion et au versement d’une lourde amende. Le club va devant les tribunaux. Jusqu’à présent, le club a quasiment toujours perdu au bénéfice de la Ligue « en vertu de l’utilité sociale ainsi née grâce au partage égalitaire des droits entre clubs qui améliore l’équilibre compétitif et augmente l’audience, le plaisir des spectateurs ». S’appuyant sur une exemption des lois antitrusts (Sports Broadcasting, act. 1962), les équipes professionnelles négocient les droits pour l’ensemble des clubs en vue d’assurer un partage égalitaire des droits et d’assurer un degré de compétitivité suffisant. Cette décision permet effectivement une redistribution des cartes, laquelle est nécessaire pour assurer l’audience et la qualité des spectacles proposés.

- Jusqu’à une certaine limite, plus les spectacles sportifs spécialisés (basket-ball aux Etats-Unis, hockey sur glace au Canada) sont télévisés, dans le cadre d’un championnat qui se présente comme un feuilleton haletant chaque semaine, et plus la demande est forte. Dans 107

les contrats d’aujourd’hui, les heures des retransmissions sont définies, ce qui peut d’ailleurs constituer des obstacles au développement d’autres sports.

- La production des Ligues porte sur la gestion sportive (humaine et technique) et la dynamique économique créée dans l’environnement immédiat du club (stade, merchandising, public). Concernant la concurrence entre producteurs, les acteurs du monopole bilatéral de chacun des sports professionnels cherchent d’abord à s’entendre pour augmenter leurs profits, y compris entre Ligues gérant d’autres sports.

- Les conflits entre les Ligues et les syndicats des joueurs ont souvent été qualifiés de positifs, compréhensifs et innovants. Ils ont abouti successivement à premier plafond salarial (1983), au premier partage des revenus garantissant 53 % des revenus de la Ligue aux joueurs et à un programme de lutte contre la drogue efficace. Jusqu’en 1998, le système d’organisation économique mis en place par le basket-ball était considéré comme un exemple de convention collective. La grande nouveauté relève de la mise en place d’une série de plafonds et planchers encadrant les salaires des joueurs (Tableau n°6). Aujourd’hui, les décisions portent sur l’existence d’un plafond salarial pour les mieux payés et d’un plancher salarial pour tous.

Tableau n°6 – Plafonds et planchers salariaux pour les joueurs de la NBA Ancienneté dans 0 – 5 ans 6 – 9 ans 10 ans ou + la NBA Salaire mini annuel 287.000 $ 400.000 $ 1.000.000 $ Salaire maxi 9.000.000 $ 11.000.000 $ 14.000.000 $ annuel

L’augmentation des salaires est limitée à 12% pour un joueur libre qui reste dans son club et à 10% s’il change de club. Les propriétaires freinent ainsi l’inflation de la masse salariale, mais la progression du salaire minimal est très importante au bénéfice des joueurs moyens. Si en 1998 la moyenne des salaires 108

était de 2,6 millions de dollars, le salaire minimal pour un vétéran était de 272.500 $, contre un million de dollars aujourd’hui. La France s’inscrit dans le cadre du modèle européen. On constate que les règles fixées par l’Union européenne donnent des droits aux Fédérations nationales pour appliquer des règles spécifiques en faveur du sport professionnel. Cependant, les dérogations sont rares et elles font l’objet de débats récurrents. Les divergences essentielles entre les deux modèles portent sur l’application des lois antitrusts, l’existence du « draft » (qui limite le fonctionnement du « droit du travail » accepté par la législation européenne), la définition d’un « salary cap » (laquelle est aujourd’hui plus ou moins acceptée par les règles européennes sous des formes cependant différentes), la redistribution égalitaire des droits de télévision nationaux aux Etats-Unis et inégalitaires en France en fonction des performances et des matchs retransmis, l’importance de l’actionnariat dans les clubs, ainsi que l’influence des syndicats de joueurs aux Etats-Unis. Si l’on excepte le « soccer », les rémunérations des professionnels américains sont aussi hors de proportion avec celles de leurs homologues français. Le sport professionnel américain répond à certaines exigences financières particulières, mais il se présente comme une activité économique normale, avec des règles de droit spécifiques.

3.3. La gestion d’un club sportif s’apparente-t-elle à celle d’une entreprise ? « Le club est-il une entreprise ? ». Cette question n’a pas de réponse immédiate, sans doute du fait de l’hétérogénéité des entités sportives en question. Il est intéressant de mettre en évidence les résultats d’enquêtes faites sur le sujet, avant de proposer un sondage original sur la question.

3.3.1. Des études peu nombreuses La question de savoir s’il est possible de transposer les pratiques de gestion en entreprise aux clubs sportifs est une question récente. Il est difficile de répertorier l’ensemble des analyses sur ce sujet, mais l’étude de B. Augé [1998] a constitué un point de départ. Sa recherche consiste à mesurer le degré de formalisation des Systèmes de Données de Gestion (SDG) au sein des clubs sportifs, à savoir le Système de Données Comptables (SDC), le Système de 109

Données Administratives (SDA), le Système de données Sportives (SDS) et le Système de Données en Relations Extérieures (SDRE). D’abord, B. AUGE a identifié de fortes disparités entre les clubs sportifs, ce qui l’a conduit à essayer de comprendre les différents degrés de formalisation (définition) des clubs sportifs. Il s’est posé la question de savoir s’il était possible de déceler des facteurs permettant d’affirmer qu’un club sportif est plus formalisé qu’un autre. Pour trouver ces facteurs de contexte susceptibles d’influencer le degré de formalisation des Systèmes de Données de Gestion (SDG) du club sportif, en quelque sorte le degré de développement de la structure du club sportif, il s’est inspiré de la littérature du courant contingent qui identifie les quatre facteurs structurels de l’organisation suivants : l’âge et la taille, le système technique, l’environnement et le pouvoir. Ces facteurs expliqueraient la façon dont les organisations se structurent. Ensuite, il les a adaptés au secteur sportif en retenant comme éléments décisifs du degré de formalisation des clubs la taille, le niveau de compétition ou encore les organes de direction (nombre de dirigeants, de cadres et fréquence de présence). Il ajoutera des facteurs d’ordre comportemental intitulés « l’acteur gestionnaire » et « l’acteur environnemental ».

Ensuite, la structure de l’organisation est représentée par le Système de Données de Gestion, lui-même divisé en quatre pôles représentatifs de la structure du club : la comptabilité, l’administration, les relations extérieures et le sportif. Le niveau de formalisation du club sera fonction de l’avancement de ces quatre pôles.

Les résultats de son analyse ont révélé qu’il n’existait vraisemblablement pas de relation significative entre ces caractéristiques et le degré de formalisation des Systèmes de Données de Gestion du club sportif. Il en déduit un échec de l’approche contingente. Il semblerait que cette première trace pourrait indiquer tout de même le chemin, dans la mesure où il applique les SDG aux clubs sportifs et qu’il identifie des spécificités propres à ces clubs. Malgré la prise en compte de la spécificité du secteur sportif et une approche tournée directement vers la structure de l’entreprise, son analyse de la structuration de l’organisation par l’intermédiaire de la formalisation n’a pas permis d’identifier des bases universelles sur les clubs sportifs. Il fait clairement apparaître une 110 formalisation hétérogène et chaotique fortement liée aux stratégies disparates d’acteurs multiples qui rendent difficile toute explication du fonctionnement des clubs sportifs. Il distingue 4 classes de clubs sportifs, sur la base de trois degrés de formalisation : faible, moyenne, développée189 : - la première est constituée de clubs sportifs moyennement à fortement formalisés, avec une formalisation développée du sportif et des relations extérieures ; - La deuxième représente les clubs sportifs moyennement à fortement formalisés, mais avec une formalisation développée de leur domaine comptable et administratif ; - une troisième classe est constituée d’une formalisation moyenne à faible dans tous les secteurs ; - La quatrième classe représente les clubs très faiblement formalisés.

La moitié de son échantillon est considérée comme moyennement à fortement formalisée. L’hypothèse selon laquelle un club se comporte davantage comme une entreprise dans la mesure où il dispose d’une gestion formelle plus élaborée est généralement retenue. Dans ce contexte, il semble cohérent de confronter les fondements des clubs sportifs à ceux de l’entreprise, de montrer qu’il existe cependant un besoin de spécification des facteurs relatifs aux clubs sportifs, de dégager l’importance de l’hétérogénéité entre les clubs sportifs et de signaler l’essor des clubs respectant le fonctionnement du modèle de l’entreprise. Cette étude peut conduire, in fine, à une analyse de la structuration des clubs sportifs.

D’autres chercheurs se sont intéressés à la question bien avant AUGE comme HOUEL (1989)190. Celui-ci considère que l’analyse économique du sport ne peut se faire sans rigueur de pensée. Il est inexact de considérer encore applicable le principe selon lequel « il ne faut pas rechercher le profit, mais défendre des valeurs humanistes » dans la pratique du sport. Il est opportun de le remplacer par la proposition suivante : « comment apprendre à faire des profits, afin que les valeurs humanistes puissent être défendues ? ». Il reprend

189 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p265. 190 HOUEL (1989), « Le club, entreprise de sport ? A quelles conditions ? Est-ce souhaitable ? » "Les cahiers de l'université sportive d'été n°04 - Le club sportif au quotidien. mythes. réalités. Projets ». 210 p. 111 l’exemple de l’Eglise catholique qui selon lui « a compris qu’on ne peut pas être une puissance spirituelle sans l’appui d’une certaine puissance financière, celle-ci mise au service de celle-là »191. Pour W. Gasparini, « un nouveau discours, construit sur une logique économique, émerge depuis le début des années 80 dans le monde associatif, incitant les associations à adopter des modèles de fonctionnement issus du monde des entreprises »192. G. Tribou, dans un chapitre intitulé « Ethique sportive et culture d’entreprise », s’intéresse à « la découverte de l’efficience taylorienne par les entreprises de production de services sportifs non-marchands »193. Il fait émerger les différences entre les organisations sportives non-marchandes et marchandes. Il conclut qu’au sein de l’entreprise marchande, les valeurs du sport sont déjà « finalisées », adaptées et soumises à l’objet marchand, ce qui n’est pas le cas des clubs sportifs pour lesquels ces valeurs constituent « l’essence » même de leur fonction. « Si l’entreprise marchande y gagne en légitimité, l’entreprise sportive non marchande, réduite à un triste pantomime entrepreneuriale, peut y « perdre don âme » »194. En 2004, G. Tribou, en collaboration avec Y. Lardinoit, pose la question « Gère-t-on un club sportif comme on gère son entreprise ?. Cette réflexion s’appuie sur un entretien avec Anny Courtade, qui combine la présidence à la fois de la centrale d’achat des magasins Leclerc du sud-est de la France mais aussi du Racing club de Cannes en volley-ball féminin. Les participants à cette « table ronde » mettent en parallèle la gestion d’un club à statut associatif et celle d’une entreprise. Ils concluent qu’il existe des points de convergence et des points de divergence évidents. Cependant, « il faut certes gérer un club comme une entreprise, mais en privilégiant une des vertus centrales de l’organisation qui est celle de s’adapter en permanence à l’environnement, en l’occurrence celui en pleine mouvance des institutions sportives »195.

191 HOUEL (1989), « Le club, entreprise de sport ? A quelles conditions ? Est-ce souhaitable ? » "Les cahiers de l'université sportive d'été n°04 - Le club sportif au quotidien. mythes. réalités. Projets ». 210 p, p 109. 192 GASPARINI W. (1995), « Les organisations associatives et le jeu entrepreneurial », in Sport et Management – De l’éthique à la pratique, A. LORET (sous la direction), Dunod, Paris, p 80-89, 631 p. 193 TRIBOU G. (1995), « Ethique sportive et culture d’entreprise » in Sport et Management – De l’éthique à la pratique, A. LORET (sous la direction), Dunod, Paris, p 55-70, 631 p. 194 TRIBOU G. (1995), « Ethique sportive et culture d’entreprise » in Sport et Management – De l’éthique à la pratique, A. LORET (sous la direction), Dunod, Paris, p 55-70, 631 p., p 68. 195 LARDINOIT T. et TRIBOU G. (2004), « Gère-t-on un club sportif comme on gère son entreprise ? Entretien avec Anny Courtade », dans Revue Française de gestion, volume 30 – numéro 150 – Mai / Juin 2004, Lavoisier, 220p., p. 200. 112

Par cette rapide revue de littérature, il est possible de constater que la question du lien entre la gestion de l’entreprise et celle des clubs sportifs trouve quelques réponses, celles-ci ne se prêtent pas à la généralisation, eu égard à la singularité des clubs sportifs. Si les travaux de recherche ont permis de faire avancer la réflexion, celle-ci mérite d’être approfondie.

3.3.2. Une enquête originale sur la question Avec l’aide des étudiants du DESS droit du sport et des loisirs de l’université de Savoie, nous avons construit un questionnaire (Tableau n°7) en vue de demander à trente dirigeants de clubs et acteurs sportifs de toutes catégories et disciplines sportives leur avis sur la question. Ont répondu à ce questionnaire des présidents de clubs professionnels de football, de hockey sur glace, de basket-ball, mais aussi des clubs amateurs de rugby, d’athlétisme, de football. Nous avons complété ce panel avec les avis autorisés d’un représentant de la Direction Régionale et Départementale de la Jeunesse et du sport, du président du Comité départemental de la fédération française pour l’Entraînement Physique dans le Monde Moderne Sports pour Tous (EPMM), de chefs du service des sports municipaux, d’un membre dirigeant de la Direction Nationale de Contrôle de Gestion (DNCG), des entraîneurs sportifs, d’une société de vente d’articles de sport spécialisée dans les collectivités et les associations sportives, et, enfin, d’un responsable d’une grande surface spécialisée dans le sport. Le but principal de cette investigation était de mettre en évidence la possibilité d’apparenter les pratiques de gestion observées en club à celles des entreprises. La ligne directrice de l’interview était la suivante : « Faut-il gérer un club sportif professionnel comme une entreprise ? » (Annexe 3). Cette étude a été réalisée sur la base des réponses d’une population dont les activités professionnelles et les responsabilités concernaient directement le domaine des sports. Le questionnaire a été rempli lors de rendez-vous en face à face et il est constitué de questions très fermées. L’objectif poursuivi était de découvrir la tendance des réponses et d’en retirer quelques enseignements quant à la perception des acteurs du sport sur le club sportif et sa comparaison avec l’entreprise.

113

Tableau n°7 - Réponses aux questions posées Questions Réponses

QUESTION PRINCIPALE. A priori, pouvez-vous OUI NON Globalement Plutôt non répondre à la question « Faut-il gérer un club sportif oui professionnel comme une entreprise ? » 17/30 0/30 13/30 0/30

1. Le sport professionnel, en France, est contrôlé par OUI UN PEU PAS DU des Fédérations. Celles-ci ont un pouvoir de délégation 11/30 14/30 TOUT accordée par l’Etat. Est-ce que cette situation modifie 5/30 les conditions de la concurrence pour les Clubs ?

2. Pour le respect des lois du marché propres aux OUI NON NE SAIT entreprises, faut-il supprimer, pour les clubs 7/30 21/30 PAS professionnels, la tutelle de la Fédération (et donc celle 2/30 indirecte de l’Etat) ?

3. Les Ligues de football ou de rugby vous semblent- Plutôt Plutôt Sans elles défendre des « valeurs » plutôt économiques ou économiques sportives préférence « sportives » ? 17/30 7/30 6/30

4 Pensez-vous que cette activité économique OUI NON Un peu Ne sait pas « contrôlée » par un organisme « organisateur » 5/30 8/30 différent 5/30 s’apparente à certaines autres activités économiques 12/30 particulières, comme l’ordre des médecins par exemple ?

5. Les ligues américaines sont des organismes privés, OUI NON Ne sait pas sans lien avec l’Etat. Pensez-vous que cette solution 28/30 2/30 0/30 rapproche la gestion des Clubs de celle des entreprises ?

6. La NBA (par exemple) est en situation de monopole OUI NON Activité Ne sait pas pour le basket de haut niveau aux Etats-Unis. Elle a 2/30 23/30 réglementée 0/30 reçu le droit d’échapper à la législation américaine 5/30 antitrust. Dans ces conditions s’agit-il toujours d’une activité économique normale ?

7. Cette situation s’apparente-t-elle à celle des OUI NON UN PEU industries nationales d’armement qui bénéficient des 7/30 2/30 18/30 mêmes conditions juridiques ? (3 ne savent pas) 8. Trouvez-vous normal que ces Ligues puissent OUI NON Ne sait pas négocier elles-mêmes les droits télévisés à la place des 22/30 3/30 2/30 Clubs ? (3OUI/NON) 9 .Dans les sports professionnels américains, il existe OUI NON Ne sait pas un « salary cap ». S’agit-il d’une exception au droit du 22/30 5/30 3/30 travail ?

10. Dans les sports professionnels américains, il existe OUI NON Ne sait pas le système de « draft ». S’agit-il d’une exception au 15/30 5/30 10/30 droit du travail ? 11. Aux Etats-Unis, les « barrières à l’entrée » sont OUI NON ça dépend Ne sait pas considérables pour l’instauration d’une nouvelle Ligue. 8/30 19/30 2/30 1/30 Pensez-vous que ce monopole soit économiquement acceptable dans une économie de marché ? 114

12 .Contrairement aux championnats européens, le OUI NON ça dépend Ne sait pas système des « franchises » aux Etats-Unis permet aux 0/30 19/30 10/30 1/30 Clubs de rester dans l’Elite, sans descente dans une catégorie inférieure. Ce faisant, il donne au contexte économique de rentabilité une priorité à long terme. Faut-il appliquer ce principe aux championnats européens, qui restent, au moins partiellement, dans une dynamique sportive ?

13. Connaissez-vous d’autres activités économiques où OUI NON Ne sait pas l’on puisse « vendre » le contrat d’un employé (joueur) 5/30 17/30 8/30 lors d’un transfert ? Les clauses de non-concurrence des employés ont-elles les mêmes effets et se rachètent-elles ?

14. Les stades appartiennent souvent aux OUI NON Ne sait pas municipalités. Celles-ci doivent-elles les rendre 8/30 21/30 1/30 disponibles et gratuits pour le sport professionnel ?

15. Peut-on apparenter le sport à une activité de OUI NON Ne sait pas spectacle souvent subventionnée ? 22/30 2/30 1/30 (5OUI/NON) 16. L’activité sportive professionnelle ne représente-t- OUI NON Seulement Ne sait pas elle pas plus qu’elle-même ? Autrement dit, a-t-elle 25/30 0/30 une 0/30 des effets d’externalités sur d’autres activités qui tradition justifient ses formes de soutien ou de tutelle de l’Etat 4/30 et des municipalités ? (1OUI/NON)

17. La lutte antidopage concerne le sport. Dans ces OUI NON Ne sait pas conditions, faut-il l’appliquer à toutes les activités des 11/30 17/30 2/30 entreprises ?

18. Le caractère récurrent du spectacle sportif ne OUI NON Ne sait pas favorise-il pas à des comportements de corruption, 25/30 2/30 3/30 d’entente ou de coalitions ?

19 .En Europe, l’activité d’agent de joueurs implique OUI NON Ne sait pas une licence obtenue par un examen. S’agit-il d’une 2/30 20/30 8/30 entorse au droit du travail ?

20. Le sponsoring et le merchandising sont-ils OUI NON Ne sait pas spécifiques au sport ou aux activités de spectacle ? 6/30 19/30 5/30

21. Peut-on appliquer aux Clubs sportifs les outils de OUI NON Ne sait pas management modernes des entreprises en situation 21/30 4/30 3/30 de concurrence ? (2OUI/NON)

22. Le responsable d’un Club a-t-il les mêmes OUI NON A peu près Ne sait pas responsabilités civiles et pénales que le dirigeant non 7/30 2/30 4/30 9/30 actionnaire d’une entreprise ? (8OUI/NON)

23. L’incertitude du sport est-il un gage de sa OUI NON Ne sait pas popularité, mais aussi de ses difficultés de sa gestion ? 23/30 5/30 0/30 (2OUI/NON)

24. Le processus de « starisation » ne va-t-il pas à OUI NON Ne sait pas l’encontre de l’incertitude du sport ? 5/30 24/30 1/30 115

25. La stratégie pour renforcer les liens identitaires qui OUI NON Ne sait pas unissent les clubs aux supporteurs est-elle comparable 23/30 7/30 0/30 à celle menée en faveur des clients ?

26. Faut-il que les Clubs soient cotés en Bourse ? OUI NON Ne sait pas Selon les 0/30 25/30 3/30 sports 2/30

27. La propriété d’un Club s’apparente-t-elle à celle OUI NON Ne sait pas Selon les d’une entreprise ? 10/30 8/30 5/30 statuts 7/30

28. Quelles sont, selon vous, les variables qui donnent - L’incertitude du sport……………………..21 de la valeur à un spectacle sportif, parmi les sept - La nature de la rencontre tels les propositions suivantes ? matches de « gala » (derby, rivalité entre deux clubs, période dans la compétition, …)…………………………………18 - La composante locale……………………….2 - La qualité du spectacle…………………..18 - Les conditions extra-sportives………...4 - La qualité de visionnage…………………16 - autres………………………………………………..1

29. Le sport a-t-il des valeurs qui transcendent son Valeurs humaines :...25* 1er, 7* 2e expression purement économique : (faire un Performance :..... 8* 1er, 5* 2e, 4* classement des trois premières priorités) 3e Lutte oisiveté :…………………4* 2e, 2* 3e Valeurs humaines…………………………………………………….30 Recherche Intérêt :………….5* 2e, 7* 3e Performances………………………………………………………………20 Attire cadres :………………….4* 2e, 2* 3e Lutte contre l’oisiveté et la criminalité………………………..6 Image positive :...... 4* 2e, 11* 3e Recherche d’intérêts collectifs régionaux………………...12 Autres :…………………………………………2* 3e Spectacle qui attire les cadres et les entreprises……..5 Recherche d’une image positive de la ville……………..15 Autres……………………………………………………………………………2 Lesquels ? respect de l’adversaire, dépassement de soi

30. Pour le responsable d’un Club professionnel, quelle Rentabilité :...... 7* 1er, 8* 2e, 2* 3e est la priorité de son action (faire un classement des Gestion LT :...... 5* 1er, 8* 2e, 8* 3e trois premières priorités) ? Réussite sportive:20* 1er, 7* 2e, 3* 3e Image dans ville :……………2* 2e, 5* 3e La rentabilité maximale du Club……………………………. 14 Ambitions politiques :…………………..2* 3e La qualité de gestion du Club sur le long terme.……. 19 Passion du sport :……………………………3* 3 Sa réussite sportive………………………………………………….28 Formation :………………………3* 2e, 7* 3e Son image dans la ville………………………………………………..9 Ses ambitions politiques…………………………………………….1 Sa passion du sport………………………………………………………4 La formation des jeunes…………………………………………..12 Autres. Lesquels ? marque, diversification…………….....3

31.Le sport représente-t-il plus que le sport, une OUI NON Ne sait pas culture et une recherche d’identité collective qui 25/30 4/30 1/30 subliment d’autres activités économiques, ce qui justifierait son statut d’économie mixte ?

32. Quels sont les outils de la gestion des entreprises Ne sait pas 30 qui sont difficilement applicables aux activités sportives ? 116

33.Quels sont les instruments de management Ne sait pas 30 applicables au sport qui ne sont pas généralisables aux autres activités économiques ?

 * indique le nombre de fois.  1er, 2e et 3e, lorsque la qualité a été classée première, deuxième ou troisième.  Ainsi, 25*1er indique que 25 personnes ont placé cette qualité au premier rang.

La grande majorité des réponses considère que le club sportif professionnel doit être géré comme une entreprise. Cependant, les réponses aux questions suivantes amènent à relativiser cette tendance.

a) Le système européen contre le système américain Plus de 50% des répondants estiment que les ligues de football et de rugby défendent des valeurs économiques plutôt que sportives. Ces deux disciplines, avec une avance considérable tout de même pour le football, constituent, en effet, les disciplines sportives les plus professionnalisées et développées sur le territoire français. Parallèlement, plus de 90% des interviewés considèrent que le système des franchises américaines rapproche la gestion des clubs à celle des entreprises. Ils considèrent, d’ailleurs, que l’activité économique au regard de la NBA n’est plus considérée comme normale lorsque les instances sportives échappent aux législations. Autrement dit, même si les ligues de football et de rugby défendent des valeurs économiques, le système sportif français constitue un système moins proche des entreprises que celui mis en place aux Etats-Unis. Cette observation peut être interprétée comme une explication de l’état d’esprit conservateur des valeurs sportives français. Cette observation se confirme par le fait que près de 65% des répondants pensent qu’il faut continuer sur un système de « promotion-relégation » plutôt qu’en ligue fermée qui, pourtant, assure une certaine rentabilité aux franchises. Ainsi, la mentalité européenne fondée sur le mérite sportif est encore d’actualité, ce qui singularise les clubs sportifs des entreprises, sauf avec le système des étoiles des grands restaurants ou hôtels. L’exception n’est donc pas unique. Or, les grands restaurants sont des entreprises au même titre que les autres. Il est vrai que les étoiles ne sont que des éléments d’appréciation qui n’ont rien d’officiel et qui peuvent changer en fonction des rapports des experts.

117

b) L’expression d’une singularité de l’activité sportive Près de 85% des répondants (sur 30 personnes) estiment que la présence d’une fédération modifie la concurrence, mais 70% d’entre eux considèrent qu’elle est nécessaire. Cette utilité se confirme dans la mesure où les trois quarts des répondants trouvent normal que les ligues puissent négocier les droits télévisés à la place des clubs. Or, ce choix de négociation a été mis en place dans un souci de contrôle de la concurrence entre les clubs sportifs. Il exprime le désir d’implanter une logique de stratégies collectives au détriment de stratégies de différenciations individuelles sur lesquelles les clubs se sont toujours appuyés jusqu’à aujourd’hui, en vue de conserver l’intérêt de la concurrence dans le sport. Or, l’intérêt du sport proviendrait d’abord de l’incertitude du sport comme l’exprime plus de 85% des répondants qui la considère comme un gage de popularité bien qu’elle induit des difficultés de gestion. Autrement dit, pour que l’intérêt du sport subsiste, l’incertitude des résultats doit se perpétuer bien qu’elle engendre des situations de gestion plus difficiles pour les clubs, ce qui induit une concurrence réglementée et, de ce fait, singulière. La concurrence dans l’activité sportive trouve aussi sa singularité lorsque la question du monopole des instances sportives est abordée, puisque 65% des répondants trouvent inacceptable l'importance des barrières à l’entrée. La singularité de l’activité sportive s’étend davantage que sur le simple domaine de la concurrence et elle touche le droit du travail puisque la majorité des répondants pensent que la « draft » ainsi que le « salary cap » constituent des exceptions au droit du travail et que le système de contrat d’employé existant dans le sport, lorsqu’il est question des joueurs, n’a pas son pareil dans aucune autre activité. De plus, l’activité sportive est fortement liée aux pouvoirs publics compte tenu de son impact social et économique. En effet, près de 85% des répondants sont d’accord pour dire que les formes de soutien ou de tutelle de l’Etat et des municipalités est justifiées en raison des externalités que dissémine l’activité sportive. Cette tendance est appuyée par le fait que les variables assimilées au terme « sport » les plus exposées sont les valeurs humaines, la performance ou la recherche d’une image positive de la ville. Il est véritablement question du statut d’économie mixte (85% des réponses). Rappelons parallèlement que les infrastructures appartiennent aux 118 collectivités locales en raison de l’histoire culturelle du sport en France. Or, l’impact du sport sur la société amène 70% des répondants à estimer que les stades ne doivent pas être gratuits ou disponibles aux sports professionnels. Comme l’exprime Pautot [2003], les municipalités sont souvent intervenues pour participer à l’édification de ces stades, gymnases, vélodromes, patinoires, courts de tennis ou circuits. Nombreuses sont les grandes villes pourvues de ces installations. « En effet, le stade ne constitue pas seulement un lieu de spectacle sportif, il est également un espace de rencontres, restaurants, salles de conférences, commercialisation, … Autrement dit, il constitue aussi un centre de relations sociales, commerciales et économiques organisées autour du spectacle sportif »196. L’activité sportive se différencie aussi par le fait que les sociétés hybrides qui la composent ne pouvaient, jusqu’à la loi de septembre 2006, entrer sur le marché boursier pour des raisons de concurrence, de rentabilité de l’action et de protection du petit actionnaire. Cette observation semble se confirmer au regard des 85% des répondants qui stipulent que les clubs ne peuvent être cotés en bourse, même si 6% pensent que cette éventualité dépend des sports. Aujourd’hui, l’entrée du capital des clubs dans les entreprises est permise, ce qui fait des clubs intéressés de véritables entreprises. Sur ce point, cette analyse est obsolète, témoignant ainsi de la rapidité avec laquelle le système sportif évolue rapidement dans l’utilisation des instruments de l’économie de marché.

c) Une proximité croissante du club et de l’entreprise Près des trois-quarts des réponses considèrent que le sport peut s’apparenter à une activité de spectacle souvent subventionnée. Cette constatation est confirmée lorsqu’il est demandé de choisir les variables considérées comme « importantes » dans le spectacle sportif ressortent l’incertitude du sport, la nature de la rencontre, la qualité du spectacle ainsi que celle du visionnage. Les spectateurs viennent donc assister à un spectacle comme des clients et ils ont les mêmes revendications de qualité. Le sport serait davantage considéré comme un spectacle qu’une simple compétition sportive. Il s’avère, néanmoins, que le spectacle se différencie en raison de la notion

196 PAUTOT M. (2003), « Le sport spectacle, les coulisses du sport business » Editions L’Harmattan, Paris, 332 p., p.205-206. 119 d’incertitude du sport qui est agrémentée souvent par les feuilletons que constituent les classements des championnats. Outre le spectacle qui, par définition, constitue le produit principal des clubs sportifs, les activités annexes ne font pas de l’activité sportive une activité singulière dans la mesure où, comme l’expriment près de 65% des répondants, le sponsoring et le merchandising ne sont pas des activités propres au spectacle sportif, ce qui est d’ailleurs partiellement discutable sur le fond. Les activités des clubs évoluent, ils suivent une tendance à la diversification et les outils de gestion ont dû évoluer. Or, bien que la concurrence semble différente des autres secteurs, plus de 70% des répondants pensent qu’il est possible d’appliquer aux clubs sportifs des outils de management modernes des entreprises. Entre autres, les stratégies de liens identitaires pourraient être considérées comme comparables à celles menées en faveur des clients (75% des réponses). Ces stratégies de liens identitaires démontrent une réelle volonté de fidéliser sa « clientèle », ce qui suppose la mise en place d’un véritable management stratégique. Cette considération prend plus d’ampleur lorsque la question des priorités du responsable en matière de gestion est évoquée, puisque « la qualité de gestion du club sur le long terme » ainsi que « la rentabilité du club » sont des éléments qui ont une place importante. Il convient, cependant, d’ajouter que la priorité qui s’est dégagée de cette enquête demeure encore et toujours « la réussite sportive ». Le club se considère davantage comme une entreprise qui doit réussir d’abord sur le plan sportif, avant de réussir économiquement, les deux domaines étant cependant bien souvent fortement corrélés. Ajoutons que pour près de 85% des réponses, le caractère récurrent du spectacle sportif conduit à des comportements de coalitions, de corruption ou d’entente. En d’autres termes, il existe, au regard de ces résultats, une certaine critique quant à la « marchandisation du sport » qui est à l’origine d’une certaine réticence concernant la professionnalisation des clubs sportifs.

Conclusion Cette étude a permis de mieux comprendre les singularités des clubs sportifs et de connaître les similarités et dissemblances de leur gestion par rapport aux entreprises à proprement parler. Nous pouvons nous rendre compte que la gestion d’un club sportif, notamment professionnel mais aussi 120 professionnalisé, pouvait être abordée comme celle d’une entreprise, à condition de retenir sa singularité. Deux éléments ressortent à la suite de cette première investigation. Premièrement, la gestion des clubs est difficile à conceptualiser dans la mesure où son analyse est malaisée, pour des raisons de représentativité provenant de l’hétérogénéité des clubs sportifs et d’un manque de modélisation tenant compte de leur spécificité. La nécessité de concevoir un cadre mettant en exergue les diverses formes existantes de clubs sportifs apparaît. La question qui se pose est de concevoir un cadre efficace répondant à toutes ces difficultés. Deuxièmement, le club a la possibilité de se rapprocher du modèle de l’entreprise. La constitution d’un cadre spécifique aux clubs sportifs pourrait trouver son origine dans celui des entreprises dans la mesure où celui-ci est déjà bien établi. La solution réside certainement dans l’utilisation des outils de sciences de gestion pour gérer et analyser les clubs sportifs.

Conclusion de la première partie

Les évolutions du secteur sportif et la recherche continuelle de performances sportives des clubs sportifs ont modifié le paysage économique du sport. Les clubs peuvent atteindre un développement proche des grandes entreprises quand d’autres restent avec le statut associatif. Cette possibilité conduit à des transpositions pas toujours adroites des pratiques observées en entreprises aux clubs sportifs. L’analyse des clubs sportifs s’avère, de ce fait, délicate dans la mesure où il est encore malaisé d’identifier des bases structurelles claires de la gestion des clubs sportifs faisant l’objet d’un consensus ou d’une image précise. Ces disparités de structures au sein des clubs sportifs empêchent, en effet, la réalisation de comparaisons fiables et la perception d’analogies significatives, sources essentielles de la conceptualisation d’un objet d’étude. La question concernant le rapprochement de la gestion des clubs sportifs de celle des entreprises trouve quelques éléments de réponse, mais ils ne donnent pas totalement satisfaction. Toute recherche d’amélioration de la gestion des clubs sportifs est problématique, si l’on considère que ce qui sépare les deux entités est suffisamment important pour ne pas appliquer les règles de l’une pour la gestion de l’autre. 121

Il est nécessaire de bâtir de nouvelles bases d’analyse pour comprendre les fondements du management des clubs sportifs. Dans ce contexte, il s’agit de construire un nouveau cadre conceptuel des clubs tenant compte de l’ensemble des spécificités que suppose leur activité sportive. Il est intéressant de reprendre l’analyse de la structuration des clubs sportifs en amont des bases des recherches habituelles, souvent fondées sur la gestion d’entreprise. Paradoxalement, le cadre pourrait provenir des outils des sciences de gestion, compte tenu de leur stabilité et leur fiabilité. Il s’agirait de les adapter au modèle sportif. Le choix de focalisation sur la « structure » permettra de repartir sur des bases de gestion générale adaptée. Nous serons en mesure de comparer des clubs structurellement identiques dans l’optique de mettre en évidence des analogies nécessaires à la recherche d’amélioration de leur gestion. L’encadré n°3 fournit un résumé de la première partie concernant le fonctionnement et les évolutions des clubs sportifs en matière de gestion. Il a été mis en évidence les hétérogénéités dans la gestion des clubs, l’importance nouvelle de l’application des techniques managériales dans le domaine du sport et les singularités du monde sportif. Il s’agit maintenant de choisir une méthode susceptible de fournir des informations pertinentes concernant l’utilisation des pratiques managériales des entreprises au monde très disparate des clubs sportifs en pleine évolution dans son intégration aux valeurs du marché, en dépit de singularités constamment affirmées. 122

Encadré n°3 – Résumé de la partie I

Sport

retranché dans une conception olympique fondée sur l’amateurisme

Fondements des clubs sportifs - Bénévolat - Rôle social

- gratuité

Marchandisation Professionnalisation

Parties prenantes public Investisseurs privés

Collectivités actionnaires Etat ONG locales

… Demande est plus importante compte tenu des enjeux financiers

Pérennité Rentabilité Citoyenneté Résultats du club du club du club sportifs

Le club sportif devient-il une entreprise ?

Singularité : Terrain instable : Glorieuse incertitude du sport Difficulté de répondre aux nouvelles attentes

Solution : être moins assujetti aux résultats sportifs

- Création de réseaux Posséder une structure économique stable pour - Impliquer les parties prenantes faire face à ces obstacles - Renforcer ses revenus hors soutiens financiers - Devenir un acteur important dans une Besoin d’un localité Mieux appréhender la cadre - Devenir un modèle de management gestion des clubs sportifs conceptuel - Etc. propre aux clubs sportifs 123

PARTIE II : Cadre théorique et méthodologie de la recherche

124

La conceptualisation de la structure des clubs sportifs est complexe dans la mesure où il paraît difficile d’aboutir à un « modèle représentatif » significatif de leur diversité. La forte croissance des activités sportives est l’une des causes de cet état de fait, elle réduit la lisibilité de la cellule de base que constituent les clubs dans le mouvement sportif. Il n’en reste pas moins vrai que l’analyse « économique » des clubs sportifs mérite aujourd’hui d’être approfondie. Au fond, malgré l’importance des enjeux économiques, la question de la gestion des clubs ne dispose pas d’une réponse générale susceptible de définir les règles de direction efficaces. Il s’agit alors de mettre en évidence les instruments susceptibles d’améliorer l’analyse des clubs sportifs, d’étudier les disparités entre les clubs et de proposer un « modèle représentatif » des clubs sportifs au regard de leur gestion. Cette approche à la fois synthétique et typologique n’est engagée, en France du moins, que dans la diversité des statuts législatifs spécialisés dans le secteur et la reconnaissance de la spécificité de celui-ci. En première hypothèse, les outils disponibles des sciences de gestion peuvent tous être mis au service de l’analyse des spécificités et de l’hétérogénéité des unités productives du sport. Il s’agira de faire un choix concernant l’outil de conceptualisation (1), de privilégier l’utilisation des principes des modèles de métamorphose (II.2.), de montrer l’intérêt de leur application à la gestion des clubs sportifs (II.3.) et de mettre en évidence la méthode qui sera retenue dans la thèse (II.4.).

1. Le choix d’un outil d’analyse

Dans un premier temps, il s’agit de choisir un modèle de conceptualisation et d’analyse. Dans ce but, il est intéressant de fonder cette recherche sur les observations fondamentales précédentes qui permettent d’identifier la spécificité des clubs sportifs au regard des principes généraux de gestion des entreprises. La recherche d’un outil d’analyse performant des clubs est une étape essentielle dans cette démarche scientifique. Il s’agit de mettre en place un outil d’analyse stratégique pratique, capable de prendre en compte les questions structurelles, adaptable aux spécificités de la gestion du sport moderne, applicable aux clubs, retenant plusieurs critères (analyse multicritères) et apte à intégrer les processus de croissance et à favoriser les typologies.

125

1.1. Réflexion sur l’outil adéquat Avant de trouver un outil permettant une analyse approfondie de la gestion des clubs sportifs, nous avons rassemblé les divers éléments sur lesquels il semblait judicieux de s’interroger. À la suite de cette réflexion nous étions en mesure de choisir un outil qui répondait aux besoins recherchés par notre analyse. La recherche d’une technique adéquate pour l’analyse en termes de management des clubs de sport suppose l’utilisation d’un outil qui allie plusieurs qualités : - permettre le développement d’une analyse stratégique ; - mettre en évidence l’importance des structures ; - souligner les spécificités des activités économiques du sport ; - dégager l’identité propre des clubs ; - prendre en compte plusieurs critères dans l’analyse de l’entité ; - refléter les forces de croissance, - dégager une réflexion typologique, et enfin - se présenter comme un outil fiable et pratique.

1.1.1. Un outil d’analyse stratégique

C’est en fonction des résultats obtenus dans sa thèse que B. AUGE [1998]197 a proposé une analyse stratégique complémentaire. Si ses recherches n’ont pas permis d’affirmer clairement les niveaux de formalisation des clubs sportifs et donc de leur structuration, elles n’en restent pas moins intéressantes. En effet, elles tiennent compte de la spécificité du secteur, tout en retenant la structure particulière des clubs afin de faire apparaître leurs fortes disparités au regard de leur gestion. AMBLARD et al [1996] vont dans ce sens en mettant en évidence les limites de l’approche contingente concernant sa référence au « comportement » qui relève plus d’ « une combinaison de variables extérieures ou antérieures » que de « l’acteur et son autonomie ». Les auteurs proposent de recourir à l’analyse stratégique où l’acteur, son autonomie et ses jeux de pouvoir occupent une place importante. C’est pourquoi nous proposons, dans un premier temps, de suivre cette voie qui semble adaptée à l’objet de notre recherche. Une analyse stratégique des clubs sportifs s’avère très utile, ce qui suppose l’utilisation d’un outil à

197 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p. 126 construire ou à choisir dans la boîte à outils des sciences de gestion et, plus précisément, du management stratégique.

1.1.2. Un outil lié à la structure

La mise en évidence de la structure même des clubs sportifs se justifie par les nombreuses transformations rencontrées au cours de leur vie. Nous avons pu observer dans notre première partie que la structure des clubs dans son ensemble connaissait de nombreuses modifications successives. Un processus continuel de (re)structuration des clubs sportifs s’est mis en place en vue de répondre aux nouvelles attentes de l’environnement, ce qui rend plus difficile l’analyse de ces organisations. Dès les années 1990, nombre d’auteurs ont compris l’importance de l’enjeu économique des structures des clubs. « Face au développement d’une culture managériale, l’un des enjeux du bénévolat sportif est aujourd’hui de dépasser une logique de non-lucrativité, sans véritablement remettre en cause le moule socioculturel et organisationnel du sport local fondé sur l’association et l’élection des dirigeants » 198. L’auteur insiste sur ce besoin prioritaire de recherches sur l’organisation et la structure même des clubs sportifs au regard des évolutions sociétales.

1.1.3. Un outil adaptable aux spécificités sportives

Il n’existe pas réellement de modèle de gestion propre aux clubs. Dans ce contexte, il s’agit de trouver un modèle provenant d’autres horizons et adaptables aux spécificités du secteur sportif. Le club sportif étant traditionnellement fondé, au moins en Europe, sur des valeurs associatives, nous pourrions nous référer au modèle associatif. Cependant, cette structure ne répond plus aujourd’hui aux nouvelles attentes de l’environnement professionnel et de son évolution prévisible. Il a été remplacé par un modèle entrepreneurial multiforme et hétérogène lorsque les clubs atteignent un certain niveau de développement. Il s’agit donc de configurer un outil capable de retenir à la fois le statut associatif des clubs et leur intégration dans les valeurs marchandes de la compétition et de l’importance des enjeux économiques. Au regard de la tendance des clubs sportifs dans leur diversité à l’assimilation à la gestion des entreprises, l’outil devrait trouver sa source dans les critères économiques

198 CHAZAUD P. (1995), « la difficile évolution du bénévolat sportif vers le management », in Sport et Management – de l’éthique à la pratique, Dunod, Paris, p71 –79, 631 p. 127 retenus sur les marchés. Cependant, il doit être adaptable aux particularités des clubs sportifs.

1.1.4. Un outil conceptuel propre aux clubs

Compte tenu de notre analyse sur l’évolution des clubs sportifs, il semble nécessaire de définir une identité propre des clubs sportifs, qui les différencie de celle des entreprises d’aujourd’hui. Or, pour ne pas assimiler la gestion d’entreprise à celle des clubs sportifs, il convient de ne pas partir de l’entreprise elle-même, mais des bases de fonctionnement propres aux clubs sportifs. La définition d’un outil performant capable à la fois de fournir un concept de « modèle représentatif » de gestion spécifique aux clubs sportifs et d’intégrer les évolutions organisationnelles et fonctionnelles rencontrées par les clubs devient nécessaire. En d’autres termes, il est nécessaire de mettre en évidence les disparités de structuration identifiées entre les clubs sportifs. Pour les expliquer, la définition des facteurs constitutifs et explicatifs du développement des clubs sportifs est essentielle.

1.1.5. Un outil multicritère

Nous avons pu observer dans l’analyse de B. AUGE [1998] que le degré de formalisation n’avait pas de relation avec la prise en compte de facteurs comme la taille, le niveau de compétition, les organes dirigeants ou encore le rôle de l’acteur du système. Pourtant, force est de constater qu’un club de haut niveau a souvent développé une organisation plus structurée qu’un club de division d’honneur quelle que soit la discipline sportive, ce qui justifie le choix du facteur « niveau de compétition » par AUGE. Ce facteur permet souvent de dresser une typologie naturelle au sein d’une discipline sportive, mais il n’explique pas tout. Des clubs de second rang peuvent, en effet, aboutir à une organisation plus structurée que des clubs d’élite et s’éterniser en division inférieure en raison d’autres facteurs. C’est le cas, par exemple, de l’équipe de basket-ball de Limoges qui a été rétrogradée pour des raisons financières, mais qui conserve une structure proche d’un club de haut niveau tout en évoluant pourtant en Nationale 1. Il semblerait alors qu’un facteur seul ne permette pas de donner précisément le niveau de développement du club sportif. De même, il n’est pas judicieux de situer le stade de développement du club sur le seul critère de la taille des personnels qualifiés et salariés. Cependant, il 128 existe probablement une véritable relation entre le nombre de personnes dans l’effectif administratif du club et le niveau de ses structures économiques. Plusieurs facteurs sont donc nécessaires pour comprendre le degré d’intégration du club dans les structures modernes du marché. Dans ce contexte, il est sans doute intéressant de mesurer le niveau de structuration des clubs sur la base de leur niveau de compétition, dans une discipline donnée, à statuts, tailles et âges comparables. De fortes analogies au regard du développement de certains facteurs apparaissent, qui favorisent la mise en place de structures sensiblement équivalentes. Cette observation trouve une explication dans le fait que la production des clubs sportifs n’est pas individuelle ou isolée. Pour survivre un club a besoin des autres clubs. Or, une trop forte disparité entre les clubs aboutit à une perte d’intérêt pour la discipline elle-même. Les clubs d’un même championnat sont donc contraints de se ressembler, au moins les premiers. Il serait donc intéressant de choisir un outil permettant la prise en considération de plusieurs caractéristiques des organisations que l’on mettrait en parallèle les unes par rapport aux autres en fonction des niveaux de développement des clubs.

1.1.6. Un outil capable de mettre en évidence la croissance

Une fois la mise en place d’une multiplicité de facteurs permettant de concrétiser la représentation d’un état, il est nécessaire de prendre en compte les processus de développement, conduisant à de fortes disparités, mais aussi à de fortes analogies dans les structures des clubs sportifs. Pour analyser les développements factoriels, l’outil doit être à même d’intégrer la croissance de ces organisations. En effet, deux clubs qui évoluent dans le même championnat élite, proches en termes de structures, ont franchi sensiblement les mêmes échelons au sein de chacune des caractéristiques structurelles pour atteindre ce niveau de développement. Ainsi, si l’on conserve le « niveau de compétition » comme un des facteurs explicatifs du niveau de développement d’un club, un club de division 1 devrait avoir des caractéristiques semblables à un autre club de division 1 et des caractéristiques plus développées qu’un club de division 2. Autrement dit, chaque club de division 1 aurait traversé le stade de la division 2 avec le niveau de développement qui lui correspond pour atteindre son niveau de développement actuel. 129

Or, le processus habituel pour atteindre la division élite dans un système de promotion-relégation est un cheminement réclamant des titres pour accéder à la division supérieure. C’est donc forcément un processus axé sur plusieurs saisons et sur le mérite sportif, chaque étape correspondant à des niveaux de développement. Relater chacun de ces stades induit une analyse de la croissance des clubs sportifs, facteur essentiel des fortes disparités structurelles entre les clubs. Il convient de reprendre le processus de la structuration des clubs sportifs depuis le modèle associatif à partir duquel les clubs sportifs ont été bâtis au départ et d’en analyser les transformations, les formes légalisées sur le tard étant les SAOS ou SASP. Enfin, il est nécessaire de définir un « modèle représentatif » des clubs sportifs de manière à éviter tout amalgame excessif avec l’entreprise. Dans ce dessein, l’analyse de la croissance permettra d’identifier, d’une part, les transformations rencontrées par les clubs sportifs les ayant conduits à intégrer les valeurs entrepreneuriales et, d’autre part, de rétablir les erreurs éventuelles dans les transpositions.

1.1.7. Un outil classificateur

La croissance de la structure des clubs ayant entraîné de fortes disparités, il est parfois difficile de comparer un club à un autre tant son niveau de développement est différent. Les nombreuses actions proposées dans la gestion du sport pourraient être plus fiables si nous étions à même de mettre en évidence ces hétérogénéités. En d’autres termes, les clubs sportifs ont des contraintes différentes selon leurs niveaux de développement, ce qui les conduit à appliquer des règles et des modalités de gestion variées. Parfois les règles leur sont imposées par leur Fédération. Il arrive aussi que le système fiscal oblige les clubs à disposer d’instruments comptables plus ou moins perfectionnés et fins. Il s’agit de trouver un outil témoignant de ces différents niveaux de développement, autrement dit, de cette hétérogénéité dans la structure des clubs. En même temps, la conceptualisation suppose l’utilisation d’un outil permettant d’observer des analogies entre les clubs sportifs. Il convient de rapprocher les clubs sportifs semblables de manière à les comparer au regard d’un ensemble homogène. C’est donc une réelle typologie que nous avons besoin de dresser dans laquelle chacune des classes représente un type de clubs dont le 130 facteur distinctif essentiel sera le niveau de développement. AUGE199 [1998] conforte notre idée lorsqu’il propose à la fin de son investigation de la compléter par une typologie de « configurations » de clubs sportifs.

1.1.8. Un outil pratique

Les étapes de développement étant semblables, de nombreuses caractéristiques évoluent de manière parallèle et simultanée dans la structure des clubs. Dans les détails, l’évolution des clubs reste propre à chacun d’eux. Il convient donc d’identifier les grands traits significatifs en sélectionnant les caractéristiques les plus représentatives pour expliquer l’état d’un club. Étant conscient de la difficulté à repérer l’ensemble des transformations d’une organisation, l’outil doit faciliter l’identification des facteurs les plus « significatifs » en vue de réaliser une synthèse représentative et pratique à l’utilisation de chaque niveau de développement. Cet outil doit être capable de fixer une typologie par niveau de développement stable et de proposer une conceptualisation pour chacun de ces stades.

Conclusion

Il semble judicieux de choisir un outil stratégique permettant de comprendre la spécificité de la gestion des clubs sportifs sur la base de leurs niveaux de développement et d’une multiplicité de facteurs structurels qui leur sont propres. Dans l’absolu, cet outil devra définir clairement des bases stables et permanentes pour chacun des niveaux de développement de manière à conceptualiser chacune des étapes traversées par les clubs sportifs. Dans ce contexte, la théorie des « cycles de vie de l’entreprise » semble s’imposer logiquement, même si elle rencontre de vives critiques. C’est pourquoi nous avons opté pour les modèles de métamorphoses qui décrivent l’évolution de l’entreprise parallèlement à son expansion200. Ces modèles s’efforcent de présenter les caractéristiques principales de la firme dans les différentes étapes qu’elle traverse, au cours des divers moments de son existence201.

199 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p, p 332. 200 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 46. 201 GODENER A. (1996), ibid., p 52, p 73. 131

1.2. Les modèles de métamorphose (MDM) Compte tenu de l’évolution très rapide des activités économiques et managériales du sport depuis un demi-siècle, le critère de la croissance constitue un argument essentiel de réflexion sur les rapports entre les clubs sportifs et la gestion des entreprises. Pourtant, depuis quelques années, les analyses en termes de cycle de vie ont été critiquées pour le poids excessif accordé au développement dans l’analyse de la firme. Il n’en reste pas moins vrai que, s’il ne fait pas l’objet d’un ensemble homogène de réflexion, cet angle d’attaque méthodologique est intéressant pour notre propos. Plus que la littérature des cycles de vie de l’entreprise, nous avons opté pour son prolongement, à savoir les « modèles de métamorphose ». L’application de ces modèles est susceptible de fournir des informations intéressantes, correspondant aux critères préalablement définis et concernant les modalités de gestion des clubs sportifs. Le travail réalisé par GODENER [1996]202 nous paraît à la fois intéressant et applicable, selon des modalités différentes, à l’analyse des clubs sportifs du début du XXIe siècle. Les Modèles de Métamorphoses203 (MDM) décrivent la croissance des entreprises, période par période, parallèlement à leur expansion204. Ils développent un corpus théorique s’inscrivant dans le prolongement de la théorie du cycle de vie205 et, de ce fait, insistant sur les caractéristiques relatives à la croissance. Cependant, l’analyse des MDM n’est pas encore rigoureusement définie dans le cadre d’un ensemble homogène de références de base reconnues pour toutes les applications. Elle donne parfois l’impression d’être utilisée de manière spécifique par chaque chercheur, sans volonté commune clairement exprimée de « recadrage » de leurs études respectives dans un ensemble commun homogène. Autrement dit, la conceptualisation des MDM qui suppose un vocabulaire commun, l’acceptation de procédures communes et la réalisation systématique de comparaisons en vue de proposer quelques éléments de vérification, n’est pas achevée. Il en résulte une large hétérogénéité des

202 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p46. 203 Auteurs les plus connus: L.L. STEINMETZ (1969), L. E. GREINER (1972), M. BASIRE (1976), N.C. CHURCHILL et V. L. LEWIS (1983). 204 GODENER A. (1996), ibid., p46. 205 MARSHALL, BOULDING évoqués par PENROSE E.T. (1952), « Facteurs, conditions et mécanismes de la croissance d’entreprise », Neuilly, Edition hommes et techniques, traduction de : « The theory of the growth of the firm », Oxford. Basil Blackwell and Mott Ltd, 223 p. et SALTER M. S. (1970), « Stages of corporate development », Journal of Business Policy, N°1, p 23-37. 132 analyses. Cette situation n’est pas encore très dommageable scientifiquement, car l’outil est taillé en fonction des usages et des besoins de chaque chercheur. Il se peut cependant que des règles plus strictes d’application soient bientôt développées206. Au sein de ce corpus théorique, deux catégories de modèles coexistent, à savoir les modèles du cycle de vie de l’entreprise (1) et les modèles des stades de développement (2) qui sont très proches l’un de l’autre. 1. Pour les modèles du cycle de vie, la croissance d’une entreprise peut être perçue de la même manière que la croissance d’un être vivant207. Elle fait apparaître quatre périodes principales de la vie : la naissance, la croissance, la maturité, le déclin. Cependant, il s’est avéré, dans la réalité, que des entreprises vieilles pouvaient se montrer évolutives et que des entreprises jeunes supportent des structures traditionnelles rigides. Il n’existe donc pas, comme l’indique pourtant l’essence même de la théorie du cycle de vie, une croissance systématique et naturelle. En outre, contrairement aux êtres vivants, au moins sur une durée d’un siècle, le déclin n’est pas inéluctable, la croissance peut être continuelle. Ces critiques nous incitent, in fine, à ne pas retenir ce modèle, dont les stades de développement sont prédéfinis et applicables à toutes les entités économiques concernées.

2. Dans les modèles des stades de développement, concernant uniquement les entreprises en croissance, l’entreprise ne suit pas forcément cette courbe et elle peut se régénérer et retrouver une croissance. Ils ne font « explicitement référence à aucune théorie et se fondent simplement sur l’observation des faits »208. Cependant, lorsque les auteurs s’interrogent sur les analyses existantes, ils ne semblent faire aucune distinction entre ces deux différents modèles. Pour notre propos, ces modèles sont plus satisfaisants en théorie, même si, pour notre étude, la distinction sera purement limitée à l’angle de vue, dans la mesure où les MDM dans leur globalité ont tous pour objet de décrire la firme au cours de ces différentes étapes.

206 L’ensemble de ce qui va suivre est inspiré de la présentation faite par A. GODENER, même s’il s’agit d’une interprétation de son analyse. GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p. 207 GODENER A. (1996), ibid., p18. 208 GODENER A. (1996), ibid., p47. 133

Selon les observations des auteurs des modèles de métamorphose, l’évolution de la firme serait sensiblement la suivante209 : de la société au capital exclusivement familial à la structure informelle et à l’activité unique, elle tend ainsi à se transformer en une firme au capital ouvert à de nouveaux partenaires, à la structure formalisée et décentralisée, à l’activité diversifiée avec une présence conséquente sur les marchés internationaux. Cette présentation rapide met en évidence la nécessité de l’ouverture de la propriété pour assurer le développement. Elle n’est cependant pas exclusive et systématique, notamment dans les activités singulières du sport qui ne fonctionnent jamais tout à fait selon les normes définies dans les entreprises commerciales. Cependant, les modèles des stades de développement permettent de décrire significativement l’entreprise en période de croissance à divers moments de son existence210, selon des stades de développement à comprendre, à synthétiser et à formaliser afin de mettre en évidence les évolutions économiques et marchandes des clubs. Autrement dit, la firme doit adapter l’ensemble de ses moyens aux exigences de la croissance211. Ainsi, toutes les caractéristiques de l’entreprise sont sujettes à évolution depuis ses relations avec l’environnement (Stratégie, Marché, Actionnariat, Relations avec les banques) jusqu’à son mode de fonctionnement (structures, système de contrôle, système de communication). Aujourd’hui, les analyses appliquant les Modèles des Métamorphoses (MDM) ne se sont pas intéressées aux mêmes caractéristiques de l’entreprise. Elles ont insisté alternativement sur le mode d’organisation (degré de formalisation, degré de spécialisation et de délégation), sur le rôle du chef d’entreprise, sur le système de motivation et de rémunération, sur l’activité commerciale en termes de nombre de produits et/ou de marchés visés, sur la composition de l’actionnariat, ou encore sur l’organisation de la production. Une multiplicité d’éléments de la gestion de l’entreprise a fait l’objet d’analyses intéressantes, notamment dans les domaines de la finance, de la production ou de l’organisation. Ainsi, si tous les organes de l’entreprise n’ont pas été analysés systématiquement, chacune des investigations a normalement été à même de compléter les autres.

209 GODENER A. (1996), ibid., p 31. 210 GODENER A. (1996), ibid., p 73. 211 HOROVITZ J., PITOL-BELIN J.-P. (1984), « Stratégie pour la PME », Paris, McGraw, 159 p., p 18. 134

En outre, il est à noter que toutes les analyses modélisées n’identifient pas toujours le même nombre de stades. Si certaines d’entre elles en identifient cinq (par exemple, GREINER [1972]212) d’autres n’en reconnaissent que trois (par exemple, SMITH, MITCHELL et SUMMER [1985]213). Néanmoins, toutes les études présentent une harmonie évidente concernant la description de la firme. Enfin, les auteurs des MDM mettent en évidence différentes manières d’évoluer qui traduisent des phases dans l’évolution des entreprises. Ils démontrent que l’évolution n’est pas progressive, mais qu’elle se réalise avec des alternances de stades, appelés stades de développement, au cours desquels l’entreprise ne se transforme que par petites touches, et de phases de transition, au cours desquelles a lieu une véritable révolution. Ainsi, entre deux stades de développement s’apparentant aux effets d’une croissance régulière, apparaît une période de transformation majeure et radicale à l’issue de laquelle l’entreprise ressort métamorphosée et en situation de répondre aux exigences du stade suivant. Ces passages d’un stade à un autre s’effectuent lorsque le fonctionnement actuel de l’organisation affiche des dysfonctionnements importants, l’empêchant de se développer du fait de ses nouvelles limites dans un monde en évolution. Ainsi, avant de passer d’un stade à un autre, il existe un « seuil » que le fonctionnement d’une organisation atteint et qui, une fois franchi, contraint l’organisation à passer au stade suivant pour répondre à l’évolution sociétale. C’est parfois une condition de survie. Il est certain qu’un club ayant réussi sportivement à rejoindre l’élite doit se poser la question du professionnalisme. Il est arrivé que, malgré des sanctions administratives et sportives, des clubs refusent la « montée » dans la division supérieure, jugeant peu engageantes les perspectives économiques de cette nouvelle situation. En effet, pour satisfaire les exigences des cahiers des charges de la division supérieure, le club peut considérer mettre en péril sa survie. Dans ce cas d’espèce, le stade de développement supérieur est évité sur la base de considérations économiques restrictives. Certaines analyses se sont intéressées aux stades de développement, d’autres aux périodes de transition. Il convient de les différencier. Les stades de développement seront particulièrement étudiés en vue d’engager une

212 GREINER L. E. (1972), « Evolution and revolution sa organizations grow », Harvard Business Review, Juillet- Août, p37-46. 213 SMITH K. G., MITCHELL T. R. et SUMMER C. E. (1985), « Top level management priorities in different stages of the organizational life », Academy of management journal, vol.28, N°4, p 799-820. 135 conceptualisation plus fine de la nature « managériale » de la gestion des clubs sportifs. Les changements de dimension de l’unité économique seront utilisés ensuite en vue de mettre en évidence l’existence d’obstacles nouveaux, rencontrés lors d’un développement modifiant significativement le fonctionnement du club du fait de sa croissance, et les remèdes éventuels proposés par l’expérience ou les leçons de management.

1.2.1. Les stades de développement

Il existe de multiples convergences et de nombreux recoupements sont possibles pour chacun des stades. L’analyse de GODENER214 [1996], qui s’appuie sur les travaux de GREINER, propose de regrouper les différents modèles des MDM. Elle met en évidence à la fois la complémentarité entre toutes les analyses et la cohérence générale (à quelques exceptions près) quant aux descriptions des stades de développement. Elle a pu ainsi observer et décrire les divers stades de développement rencontrés par les entreprises en fonction des caractéristiques spécifiques des entreprises au temps t. L’analyse des recherches effectuées par plusieurs analystes, a permis de construire un profil type de l’entreprise à un moment donné de sa vie. Globalement, sous des formes différentes mais toujours présentes, cinq stades de développement ont été identifiés, qui s’articulent de la manière suivante : 1. l’entreprise à la structure informelle ; 2. l’entreprise à la structure formelle et centralisée ; 3. l’entreprise décentralisée à l’activité diversifiée ; 4. la décentralisation coordonnée ; 5. la collaboration.

Cette « reconnaissance » des stades de développement est particulièrement intéressante dans son modèle descriptif de l’évolution des caractéristiques de l’entreprise dans la mesure où il existe peu de comparaisons d’un auteur à l’autre. Il est utile de tester l’idée selon laquelle les clubs sportifs auraient des évolutions sensiblement proches de celles des entreprises, en dépit de leur spécificité. Le modèle se doit de fixer des bases suffisantes dans la recherche de caractéristiques évolutives représentatives des clubs sportifs. Pour

214 GODENER A. (1996), ibid., p 52. 136 illustrer nos propos, nous avons réalisé un tableau synthétique de la littérature (Tableau n°8), sur la base des informations fournies par GODENER [1996] et vérifiées par nos soins.

Tableau n°8 - Exemple du Stade 1 : l’entreprise à la structure informelle215 CARACTERISTIQUES AUTEURS

Le capital de l’entreprise est JAMES (1973), GELINIER ET GAULTIER (1974), exclusivement familial BRAC DE LA PERRIERE (1978), CHURCHILL et LEWIS (1983), MILLER ET FRIESEN (1984)

L’entreprise est gérée de façon FILLEY et HOUSE (1969 cités par Y. GASSE et quasi exclusive par son C. CARRIER), STEINMETZ (1969), SALTER dirigeant (homme à tout faire) (1970), BASIRE (1976), BRAC DE LA PERRIERE (1978), MILLER ET FRIESEN (1984), PARENT (1985), ADIZES (1991)

Gestion du personnel SCOTT (1971), SMITH, MITCHELL et SUMMER individuelle, gestion (1985), BASIRE (1976), BRAC DE LA PERRIERE paternaliste (1978), GALBRAITH (1982)

La fonction production est la PARENT (1985) fonction principale de l’entreprise Exploitation d’un produit STEINMETZ (1969), SALTER (1970), BRAC DE unique (pas de diversification) LA PERRIERE (1978), MILLER ET FRIESEN (1984), PARENT (1985)

La production et la GREINER (1972), BASIRE (1976), CHURCHILL vente constituent les postes et LEWIS (1983) clés

Marché souvent local parfois BASIRE (1976), MILLER ET FRIESEN (1984), régional (s’il est plus large, on SALTER (1970), parle alors de niches). Existence d’un seul circuit de distribution

Pas d’activité de management STEINMETZ (1969), GREINER (1972), BASIRE (1976)

Prise de décision intuitive MILLER et FRIESEN (1984) plutôt qu’analytique

215 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 57 – 62. 137

Organisation informelle et STEINMETZ (1969), FILLEY et HOUSE (1969 fonctions peu spécialisées cités par Y. GASSE et C. CARRIER), SCOTT (1971, cité par R.E. QUINN et K. Cameron), WHYTE (1948 et 1961, cités par W. H. STARBUCK), GREINER (1972), JAMES (1973), BASIRE (1976), CHURCHILL et LEWIS (1983), MILLER ET FRIESEN (1984), PARENT (1985), SMITH, MITCHELL et SUMMER (1985), ADIZES (1991)

Communication informelle et WHYTE (1948 et 1961, cités par W. H. fréquente (grâce à la proximité STARBUCK), GREINER (1972), SCOTT (1971, géographique et à la taille de cité par R.E. QUINN et K. Cameron), l’effectif restreint) GALBRAITH (1982, cités par SMITH, MITCHELL et SUMMER (1985))

Exercice limité de la fonction MILLER ET FRIESEN (1984), SCOTT (1971, cité de contrôle, la planification est par R.E. QUINN et K. Cameron), ADIZES réduite, les signaux envoyés (1991), GREINER (1972) par le marché donnent l’alarme

Augmentation des locaux et de JAMES (1973), ADIZES (1991) la capacité de production

Ainsi, les modèles de stade de développement nous offrent une description significative de l’entreprise en croissance à divers moments de son existence, depuis sa création jusqu’à ce qu’elle entre dans le cercle fermé des grands groupes.

1.2.2. Les changements de dimension

Les analyses, peu nombreuses au demeurant, qui se sont penchées sur le problème ne cherchent pas à démontrer les évolutions d’un stade à un autre, mais à expliquer les raisons et le processus de ces changements. Les modifications de dimensions rencontrent plus de difficulté dans la recherche de consensus. Plusieurs points font l’objet de controverses importantes comme le processus de changement ou encore la simultanéité de changement de l’ensemble des caractéristiques de l’entreprise.

1.2.2.1. Simultanéité des évolutions des caractéristiques des entreprises en développement Si l’on en croit les analyses traditionnelles des stades de développement, les différentes caractéristiques de la firme en croissance (étendue des marchés, 138 nombre de produits, structure, mode de production, financement de l’entreprise ou actionnariat par exemple) évoluent conjointement. Ce type d’analyse parle de simultanéité de la transformation des différents organes de l’entreprise. Depuis plusieurs années, des auteurs comme SALTER [1970], GERVAIS [1978], CHURCHILL et LEWIS [1983], KAZANJIAN [1984]216, PARENT [1985]217, BIRLEY et WESTHEAD [1990]218 ont remis en question ce déterminisme absolu en révélant que les MDM ne représentent qu’une tendance d’évolution et que leur vision est simplificatrice219. Ils précisaient la portée de ce schéma en évoquant de nombreuses imprécisions, dues principalement au fait que les frontières entre les classes [d’entreprises] sont floues220. Cette constatation constitue une limite importante à l’application des modèles de métamorphoses et elle explique la focalisation de certains auteurs sur une seule caractéristique de l’entreprise. Certains auteurs décrivent alors des transformations non-simultanées des caractéristiques de l’entreprise. BASIRE [1976]221 propose ainsi une vision organique fondée sur la seule organisation de l’entreprise. Il cherche à démontrer que les transformations des différentes fonctions sont liées les unes aux autres et se produisent de façon cyclique et non simultanée. Dans la même démarche méthodologique, GODENER [1996] s’intéresse surtout aux seuils organisationnels des entreprises. L’application de la méthode des modèles de métamorphoses aux clubs, tenant compte de leurs caractéristiques, présente un intérêt certain dans la mise en évidence des évolutions d’un secteur économique aux dimensions encore très floues, compte tenu de l’importance de son développement et de la faiblesse des études engagées pour en comprendre les évolutions en termes de gestion. Le modèle de GODENER, susceptible de nous servir de base ou de « fil rouge », ne s’applique pas directement à la gestion des clubs. Il est nécessaire de mettre en évidence les évolutions spécifiques des clubs, concernant par exemple le seuil du capital ou la masse salariale, deux indicateurs importants du changement de

216 KAZANJIAN R. K. (1984), « Operationalizing stage of growth : an empirical assessment of dominant problems », Frontiers of Entrepreneurship Research, p 144-158. 217 PARENT J. (1985), « Les firmes industrielles », tome 3. Paris : Presses Universitaires de France, 415 p. 218 BIRLEY S. et WESTHEAD P. (1990), « Growth and performance contrasts between types of small firms», Strategic Management Journal, Vol. 11, p 535-557. 219 CHURCHILL et LEWIS (1983) expriment que « si une entreprise paraissait être, à première vue, à un stade donné, on pouvait d’autre part observer, en examinant de plus près sa position, qu’elle se situait à un certain stade à l’endroit de certains facteurs, et à un autre concernant des facteurs différents ». PARENT (1985), quant à lui, confirme cette analyse en révélant des frontières floues entre les classes. 220 PARENT J. (1985), ibid., p 271. 221 BASIRE M. (1976), « La théorie des cinq niveaux », Direction et gestion, 1ère partie, N°2 : p 11-21, 2ème partie N° 3 : p 11-22, 3ème partie N°4 : p 13-20. 139 statut des clubs. Dans ce contexte, nous nous intéresserons moins à la simultanéité des changements de dimension qu’à la recherche des caractéristiques qui permettent d’élaborer une typologie des clubs. On démontre que les transformations des différentes fonctions sont liées les unes aux autres, mais qu’elles se produisent de manière cyclique, sans référence initiale au caractère simultané des transformations.

1.2.2.2. Progressivité ou rupture Les changements des entités économiques ne connaissent pas toujours les mêmes trajectoires, ni les mêmes applications structurelles. Il existe, en effet, plusieurs types d’évolution, soit par petites touches, lesquelles à long terme créent une différence conséquente, soit par une transformation drastique qui révolutionne le club. Dans ce contexte, il s’agit de comprendre le processus de transformation des clubs. Dans le cadre de l’application des MDM, le processus de développement est continu et progressif dans la même étape, mais un processus cyclique intervient exprimant l’idée de rupture avec le cycle précédent. Autrement dit, au-delà d’une certaine frontière, les entreprises se métamorphosent radicalement et passent au stade suivant. Alain BIENAYME [1971] démontrera des « étapes critiques qui sont les phases de la vie de l’entreprise au cours desquelles la poursuite de la croissance exige des transformations qui en marqueront profondément les structures. (...) Au terme de ces décisions, l’entreprise ne sera plus ce qu’elle était auparavant et entame une nouvelle étape de sa croissance »222. D’autres auteurs, comme PARENT [1985] ou GODENER [1996], évoquent l’existence de transformations qui ne sont pas forcément radicales. Le processus de transformation peut ainsi être aussi progressif. Il semblerait que les stades de développement constitueraient des périodes pendant lesquelles ont cours de simples adaptations (progressivité) et que les changements de dimension constitueraient des périodes de transformations majeures ou radicales. Ainsi, selon PARENT [1985]223, les passages d’un stade à un autre pourraient être incrémentaux. Cette thèse est appuyée par les travaux réalisés par les spécialistes du « changement » qui identifient plusieurs manières d’évoluer :

222 BIENAYME A. (1971), « La croissance des entreprises », Paris : Bruxelles : Montréal : Bordas, tome 1, 288 p., p 230. 223 PARENT J. (1985), « Les firmes industrielles », tome 3. Paris : Presses Universitaires de France, 415 p., p 56-57. 140 continu, discontinu ou encore les deux. Dans ce contexte, GODENER [1996]224 utilise la notion de « changement de dimension par somme d’adaptations » pour exprimer les transformations des entreprises qui s’effectuent de manière continue et progressive. Quel que soit le processus de changement, l’entreprise traverse plusieurs phases lors de son existence, en alternant les stades de développement et les changements de dimension. Il ne s’agit pas d’un doux processus continuel, mais plutôt d’un processus marqué par des changements abrupts et discontinus, qui ne vont pas sans douleurs et enthousiasmes, sans heurts au quotidien. La question est de savoir si ces changements proviennent d’un besoin, d’une opportunité ou encore d’une volonté. Il convient de reprendre, en ce sens, la manière dont les auteurs des MDM conçoivent la succession des différentes phases.

1.2.3. La succession des phases

GREINER [1972] propose une explication aux différentes successions de phases. Il met en exergue à la fois la situation actuelle avant transformation, une explication de la transformation et une description des résultats de cette évolution. À chacun de ces éléments, l’auteur donne un titre significatif de l’état. Son approche très déterministe a été retenue in extenso par nombre d’auteurs de MDM. Ainsi, le schéma d’évolution de la structure qu’il propose serait immuable et commun à toutes les entreprises en croissance. Il semble que la réalité soit proche de cette configuration, à quelques nuances près tout de même. Le schéma d’évolution qu’il propose est le suivant : 1. Le stade 1 : le dirigeant gère tout, MAIS progressivement le besoin se fait d’un refus de l’omniprésence comme frein au développement au sein même de l’entreprise. Dans ce contexte, il doit commencer à déléguer et donc à introduire le management dans sa direction (crise de leadership). 2. Le stade 2 : le dirigeant met alors en place une structure fonctionnelle centralisée, MAIS l’encadrement ressent le besoin de disposer d’une réelle marge d’autonomie (crise d’autonomie).

224 GODENER A. (1996), ibid., p 89. 141

3. Le stade 3 : les différents niveaux hiérarchiques sont désormais à même de réagir au marché, MAIS survient un manque de mise en commun des ressources et des forces de l’entreprise (crise de contrôle). 4. Le stade 4 : des mécanismes de coordination se développent et permettent de bénéficier de nouvelles synergies, MAIS les excès de procédure bloquent l’adaptabilité de l’entreprise (crise de la bureaucratie). 5. Le stade 5 et dernier stade est celui de la collaboration.

Ainsi, on comprend mieux les phases traversées systématiquement par les entreprises lors de leur développement.

1.3. Justification du choix de l’outil Il s’agit désormais de comprendre le choix de l’outil en expliquant ce qu’il peut apporter au cas spécifique que constituent les clubs sportifs. La méthode des MDM répond de manière intéressante aux exigences primaires de l’analyse des clubs sportifs.

1.3.1. L’application des MDM, une réponse adaptée à une première analyse

Premièrement, l’utilisation des MDM semble judicieuse, si l’on en croit les voies sur lesquelles nos prédécesseurs nous ont orientés à l’instar de B. AUGE [1998]. En effet, les MDM constituent un outil d’analyse stratégique très intéressant en première analyse, conduisant à une meilleure compréhension de l’évolution des nécessités de gestion rigoureuse des clubs sportifs. L’utilisation de ce type d’outil au cas des clubs sportifs est à encourager.

Ensuite, Ils sont assez souples d’application, capables de fournir des informations intéressantes dans de nombreux domaines comme la finance, la production ou l’organisation. Tous les organes de l’entreprise n’ont pas toujours été analysés systématiquement, mais chaque structure, comme le démontre A. GODENER (1996) dans sa présentation de l’évolution de la structure des PME tout au long de leur vie, peut l’être indépendamment ou dans le cadre d’un ensemble. Dans ce contexte, l’outil semble a priori bien adapté pour étudier la structuration des clubs que nous cherchons à identifier. Ainsi, pour 142 comprendre le processus de développement des clubs sportifs, il est nécessaire d’identifier les spécificités structurelles de ce type d’organisations, puis d’appliquer les principes des MDM en vue d’une meilleure conceptualisation et compréhension des niveaux réels de développement des clubs. Avec leur capacité à mettre en évidence l’évolution de la configuration des organisations et de leurs principaux organes, autrement dit de leurs structures, les MDM constituent a priori un outil très peu utilisé, mais d’un intérêt certain, dont il faut cependant démontrer la capacité à fournir des informations synthétiques utiles permettant de dégager une typologie en fonction du critère de l’applicabilité des méthodes de gestion aux clubs sportifs.

Ceci sous-entend qu’il est nécessaire que l’application des MDM soit capable de prendre en compte aux spécificités clubs sportifs. Ils doivent être en mesure de rendre compte de l’évolution des clubs sportifs sans qu’aucune transposition avec des entreprises traditionnelles n’intervienne. Pour créer un moule spécifique aux clubs sportifs, nous devons démontrer qu’il existe des caractéristiques révélatrices propres à ce type d’organisations par rapport à d’autres plus traditionnelles. Les vertus sociétales associées au sport, le modèle de départ de type associatif et encore la « glorieuse incertitude du sport » constituent les facteurs les plus révélateurs de cette particularité. La question est de savoir si les MDM sont adaptables à ce type de spécificités, en d’autres termes si le secteur sportif peut être analysé par ces modèles. Dans la mesure où les MDM ont été appliqués à des entreprises de différentes sortes, comme les entreprises de haute technologie225, les entreprises industrielles226, des entreprises non-industrielles de type organismes publics227 ou des entreprises de 0 à 1000 salariés, la probabilité de leur adaptation semble importante. Si les applications ont pu être réalisées dans des organisations aussi différentes, il n’y a pas de raison pour qu’elles ne fonctionnent pas tout autant pour des organisations de types sportifs. Avant l’application des MDM aux clubs sportifs, il

225 KAZANJIAN R. K. (1984), « Operationalizing stage of growth : an empirical assessment of dominant problems », Frontiers of Entrepreneurship Research, p 144-158 ; KAZANJIAN R. K. (1988), « relation of dominant problems to stages of growth in technology-based new ventures », Academy of Management Journal, vol. 31, N°2, p 257-279. et KAZANJIAN R. K. et DRAZIN R. (1990), « A stage contingent model of design and growth for technology based new ventures », journal of Business Venturing, N°5, p 137-150. 226 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p. 227 QUINN R.E. et CAMERON K. (1983), « Organizational life cycles and shifting criteria of effectiveness : some preliminary evidence », Management Science, Janvier, vol. 29, N°1, p 33-51. 143 s’agira donc de dévoiler les caractéristiques évolutives représentatives des clubs sportifs.

Parallèlement, cette notion de « caractéristiques évolutives » renvoie aux transformations progressives des clubs sportifs. Pour améliorer la gestion des clubs sportifs, il convient de définir leur identité propre, non assimilable à celle des entreprises traditionnelles (ce qui rend difficile l’application stricto sensu des règles de gestion des entreprises dans une économie de marché), mais aussi de mettre en évidence leur hétérogénéité. Or, il semblerait aussi qu’un système de promotion-relégation, comme on le rencontre dans le monde sportif européen, induit une nécessaire hétérogénéité des clubs sportifs dans la mesure où elle constitue un facteur essentiel des fortes disparités structurelles entre les clubs. Dans ce cadre, la compétition principale n’est pas dans la maximation du profit, mais bien dans l’obtention de résultats sportifs, lesquels sont un facteur de profit éventuel dans un cadre professionnel. L’analyse de la croissance par les MDM est susceptible de permettre, d’une part, l’identification des transformations rencontrées par les clubs sportifs les ayant conduit à intégrer les valeurs entrepreneuriales et, d’autre part, de démontrer l’hétérogénéité en termes de structuration que rencontrent ces organisations. En offrant la possibilité de relater la croissance des clubs sportifs et en l’adaptant aux vertus sportives, les MDM constituent un outil adéquat pour répondre à la question concernant le club dans sa dimension d’entreprise. Il convient d’ajouter que les MDM ne s’appliquent que pour les entreprises qui opèrent par « croissance interne ». Compte tenu de l’adéquation entre les clubs et leur soutien régional ou municipal, leur appartenance au mode de croissance « interne » est favorisée par l’expression d’une entité mixte, utilisant des financements à la fois privés et publics. Dans de nombreux clubs, au moins dans les premiers stades de développement, l’apport des crédits municipaux est essentiel à la survie sportive et financière. Ajoutons que le système de promotion et rétrogradation implique une progression régulière des clubs, sans fusion ou diversification rapide et excessive des modalités de financement et d’organisation des équipes professionnelles. Il arrive qu’à certains stades de développement initiaux, des financements extérieurs importants créent les conditions d’une croissance externe, mais le fait est rare, limité au mécénat de très haut niveau. Pour les clubs du plus haut stade de développement, il est sans doute possible d’échapper 144

à la règle de la « croissance interne », selon des modalités à définir. Plus généralement, les MDM s’appliquent donc correctement au cas des clubs sportifs.

En outre, la prise en compte de plusieurs facteurs semble nécessaire pour une analyse plus fiable de l’ensemble des clubs sportifs. Dans le cadre des réflexions fondées sur l’application des MDM, l’entreprise doit adapter l’ensemble de ses moyens aux exigences de la croissance. Or, si certains analystes ne se sont intéressés qu’à une seule facette de l’entreprise228 et n’ont pas raisonné de façon globale invoquant une non-simultanéité de l’évolution des caractéristiques, il n’empêche que les MDM donnent des informations intéressantes sur les probabilités d’occurrence. En outre, les caractéristiques de l’entreprise en mutation évoluent très souvent simultanément229 même s’il apparaît que cette hypothèse reste simplificatrice et ne représente qu’une tendance d’évolution au regard de la réalité. Les MDM constituent donc bien un outil prenant en compte une multiplicité de caractéristiques, dans le cadre d’une analyse multicritères. La question est alors de savoir combien de critères retenir et lesquels. Dans le modèle de GODENER230, les clubs sportifs ne sont évidemment pas analysés, ce qui doit nous conduire à adapter les critères disponibles en fonction des considérations sportives, éthiques mais aussi, bien sur, économiques. Dans ce contexte, il est intéressant de mettre en parallèle les caractéristiques les unes par rapport aux autres, en vue d’obtenir un assemblage représentatif d’un niveau de développement. Enfin, répertorier pour chacun des stades de développement un ensemble de caractéristiques représentatives offre un moyen de classification efficace. En effet, s’il est difficile en se basant sur une seule caractéristique de l’organisation de déterminer, pour chaque club sportif, la classe à laquelle il appartient, la mise en place de stades de développement prenant en considération une multiplicité de caractéristiques est une démarche susceptible de faire ressortir des catégories explicites. Ces stades de développement mis en évidence sur la base de l’évolution de caractéristiques représentatives du club sportif, permettent de dresser une grille de lecture sur laquelle il est possible de différencier les clubs à partir de leur degré de parenté avec les entreprises. Dans

228 Voir GREINER L.E. (1972), BASIRE M. (1976). 229 STEINMETZ (1969), MILLER ET FRIESEN (1984), BRAC DE LA PERRIERE (1978). 230 GODENER A. (1996), ibid., p75, 76. 145 ce cas, l’hypothèse du rang dans la marchandisation se substitue à celui des stades. Les stades de développement des clubs n’évoluent pas significativement dans le temps, ce qui permet de considérer au temps t que certains clubs sont en avance dans la marchandisation et d’autres sont seulement en retard ou bloqués à un niveau de gestion qui leur convient, sans volonté réelle de progression sportive et économique. Plus que de classer, les MDM permettent de situer les clubs sportifs grâce à cette typologie. Ainsi, les nombreuses propositions d’actions concernant la gestion du sport deviendront plus fiables du fait de la mise en évidence de l’hétérogénéité existante dans le fourmillement des clubs.

En d’autres termes, les clubs sportifs ont des contraintes différentes selon leurs niveaux de développement, ce qui les conduit à appliquer des règles et des modalités de gestion différentes. D’un côté, chaque stade de développement est a priori constitué de clubs sportifs semblables tant dans leurs structures que dans leur organisation ou encore, comme le suggère AUGE [1998], dans leur formalisation. En revanche, un club se situant dans un stade de développement différent n’aura pas les mêmes exigences, ni les mêmes requis en termes de gestion. Ainsi, selon le stade de développement dans lequel se situent les clubs, il est intéressant de chercher à conceptualiser leur gestion, leur organisation, leurs structures et de définir des modes d’actions évolutives en matière de gestion en fonction de la situation objective de ces entités sportives.

1.3.2. Les MDM : plus qu’une simple réponse

D’autres considérations militent en faveur de ce choix. La première provient de la possibilité qu’offrent les MDM à différencier simultanément les clubs sportifs des entreprises, mais aussi de les comparer systématiquement dans leur fonctionnement. En outre, ils permettent aussi de fixer, par étapes, les évolutions rencontrées par les clubs sportifs, avec l’hypothèse de constance dans le temps des stades de développement. Troisièmement, ils mettent en évidence les changements de dimension des clubs, éléments essentiels pour la survie des organisations. Enfin, ils constituent un outil fructueux pour un secteur mal connu compte tenu de l’évolution rapide de ce type d’organisation.

Si, au départ, les clubs sportifs ont été créés sous la forme d’une association de loi 1901, ils choisissent ou sont dans l’obligation de revêtir un 146 nouveau statut plus approprié à leurs évolutions en termes de fonctionnement et de finances. Ainsi, certains clubs au développement avancé ont choisi d’adopter une configuration plus professionnelle, proche de celle des entreprises, en prenant la forme d’une Société Anonyme. Si elles ont une dénomination bien précise qui fait d’elles des sociétés spécifiques, il n’empêche qu’elles peuvent être considérées, à bien des égards, comme de véritables entreprises. Utiliser les MDM, modèles issus d’analyses auprès d’entreprises plus conventionnelles, permet de souligner à la fois la ressemblance des clubs avec les entreprises, mais aussi leurs spécificités qui en font des organisations peu ordinaires. Dissemblances et ressemblances étant mises en évidence, il apparaît fondamental de conceptualiser la gestion des clubs sportifs.

Retracer la vie des clubs par les MDM permet d’identifier les étapes traversées par les clubs tout au long de leur existence et de définir ainsi le nombre de configurations concrètes de clubs et de déceler les caractéristiques propres à chacune d’elles. La grille de lecture proposée offre la possibilité de définir le niveau d’hétérogénéité des clubs sportifs qui lsera mieux comprise et canalisée en vue d’améliorer leur gestion.

Enfin, les MDM permettent de mieux appréhender les changements de dimension puisqu’il s’agit d’identifier les stades de développement des clubs sportifs et de comprendre les raisons de ces évolutions. Rappelons que, selon les praticiens des MDM, l’évolution des organisations est parsemée de stades (stades de développement) et de périodes de transition (changements de dimension) qui apparaissent par alternance. Or, savoir appréhender les changements de dimension est nécessaire à la survie puisque c’est au niveau de ces phases de transition que surgissent de nouvelles difficultés et/ou de nouveaux risques. STEINMETZ [1969] considère même la disparition de l’entreprise comme inéluctable en cas de refus du changement de dimension nécessaire. De leur issue dépend la poursuite de la croissance, voire à la survie de l’organisation. BIENAYME [1971]231 décrit, en effet, que « la poursuite de la croissance exige des transformations qui en marqueront profondément les structures (…). Au terme de ces décisions, l’entreprise ne sera plus ce qu’elle était auparavant et

231 BIENAYME (1971), ibid., p 230. 147 entame une nouvelle étape de croissance ». « Les changements sont nécessaires. Sans eux, la firme finit par arriver à saturation et ne peut plus satisfaire la demande dans des conditions satisfaisantes »232. Se préoccuper des changements des clubs, qu’ils soient naturels ou choisis pour répondre aux nouvelles attentes, constitue un plus dans l’amélioration de leur gestion. Les MDM sont susceptibles de permettre aux clubs sportifs de connaître les mesures à prendre pour résister aux évolutions sociétales qui modifient leur structure organisationnelle. Au même titre que les modèles de cycles de vie ont apporté un angle d’analyse intéressant sur l’essor des firmes, les modèles de métamorphoses constituent un des courants de recherche fructueux pour une première approche d’un secteur économique encore mal étudié par les sciences de gestion. Ces modèles n’ont cependant jamais été utilisés dans un tel contexte.

Conclusion

Les MDM constituent une méthode intéressante pour analyser et améliorer la gestion des clubs sportifs. Son application aux clubs sportifs fournit de nouvelles informations propres à une catégorie d’organisation, constituant un complément original et intéressant à l’analyse synthétique de GODENER. Les études sur les MDM sont pertinentes si « elles sont focalisées sur une catégorie d’entreprises dont on pressent que certaines spécificités pourraient avoir un impact sur certains stades (entreprises de haute technologie, entreprise en croissance très rapide,...) »233. En première analyse, l’application des modèles de métamorphose aux clubs sportifs semble adaptée eu égard aux évolutions rapides de la « professionnalisation » et du développement du secteur économique du sport. Le schéma n°3 revient sur la démarche scientifique du choix opéré et synthétise les raisons préalables à l’application de la méthode dans notre champ de recherche sur la nature « entrepreuneuriale » de la gestion des clubs sportifs.

232 GODENER (1996), ibid., p 51. 233 GODENER (1996), ibid., p 73. 148

Schéma n°3 – Démarche conduisant aux MDM

Mieux appréhender la gestion des clubs sportifs

Besoin d’un cadre conceptuel propre aux clubs sportifs

Recherche d’un outil pour confectionner un cadre spécifique aux clubs sportifs

Les Modèles de Métamorphoses

Apports de l’outil Réponse aux besoins primaires : - Vérification des préconisations des prédécesseurs (outil stratégique). Réponse à d’autres besoins : - Intérêt pour la structure de - Possibilité de comparaison avec les l’organisation. - entreprises. Application à de multiples. organisations - Identification de changements de de différentes natures - dimensions : élément essentiel à la Analyse de la croissance interne surtout : facteur explicatif de la disparité dans la survie des organisations. - Définition du nombre de types de gestion des clubs de haut niveau. - clubs existants Multiplicité de caractéristiques prises en - outil adéquat à l’explicitation d’un considération. - secteur mal connu Construction d’une grille de lecture démonstrative de l’hétérogénéité des clubs

149

2. Cadre de la recherche

Le cadre de la recherche suppose un positionnement théorique et la mise en perspective des caractéristiques des organisations sportives sélectionnées.

2.1. Le positionnement théorique Le positionnement théorique conduit à :  analyser et adapter la synthèse de Godener :  mettre en évidence les facteurs du changement dans l’évolution des clubs sportifs ;  souligner les différents types, modalités et natures des transformations ;  mettre en garde contre la tentation du déterminisme absolu ;  déterminer les conditions et les modalités d’une approche multicritère ;  prendre en compte la croissance et le développement ;  mettre en perspective la période concernée.

2.1.1. Adaptation de la synthèse de Godener [1996]

Il convient tout d’abord de préciser que, à notre connaissance, l’application des modèles de métamorphoses sur l’analyse des clubs sportifs n’a pas encore été réalisée. Dans un premier temps, la méthodologie appliquée par GODENER [1996] semble intéressante du fait de la simplicité de son application, même s’il est nécessaire de l’adapter aux spécificités de la gestion des activités sportives. Cependant, contrairement à son analyse qui se focalise principalement sur les seuils organisationnels, nous utiliserons les MDM pour identifier les seuils de diverses natures, sur la base des caractéristiques de l’organisation (organisation, finance ou production) et des notions de stades de développement et de changements de dimension. Les stades de développement seront définis comme « les phases au cours desquelles la physionomie de la firme évolue peu. Ce sont, par excellence, des périodes de croissance où toute l’énergie disponible est tournée vers l’extérieur », alors que les changements de dimension constitueront « des périodes de bouleversements »234. Dans un premier temps, il

234 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p56. 150 a été nécessaire de fonder la réflexion sur les corpus théoriques existants qui font référence aux modèles de métamorphose, notamment la théorie du changement235 ainsi que celle des organisations236.

2.1.2. Les facteurs de changement

Pour l’analyse des MDM, les changements rencontrés par les entreprises apparaissent toujours en période de crise. Ils répondent à un besoin d’évolution, dont la non-satisfaction conduirait à une remise en cause de l’entité productive. Cette conception est trop systématique. La théorie du changement nous enseigne, l’existence de trois facteurs capables de provoquer un processus de changement, nommément la volonté (ou les désirs), la perception d’un besoin et la contrainte née237. Ainsi, le passage d’un stade à un autre peut être provoqué par un souhait, voire une opportunité, et pas obligatoirement par un besoin. Pour reprendre l’exemple des clubs sportifs, l’achat d’un joueur « vedette » est une volonté clairement exprimée et son arrivée peut constituer une révolution pour un club compte tenu des performances sportives qu’il est susceptible d’engendrer. Ainsi, le « patron » de l’Olympique de Lyon, Jean Michel Aulas, a souvent exprimé l’idée selon laquelle son club avait changé de dimension le jour où il avait engagé Sonny Anderson, à la suite d’un transfert très onéreux, le plus important historiquement pour un club français de football. Il estime ainsi avoir atteint la dimension européenne, à la fois dans le domaine sportif et d’un point de vue purement économique.

2.1.3. Les différents types de transformation

D’après les analyses des MDM, les transformations rencontrées sont perçues comme étant de même nature, même si elles n’ont pas toutes la même intensité. Elles représentent systématiquement des réponses à une crise dans un domaine particulier de l’entreprise qui peut s’étendre à l’ensemble des structures. En d’autres termes, elles sont supposées avoir un caractère radical. Cependant, ces transformations peuvent, dans les faits, être aussi

235 GODENER A. (1996), ibid., p130. 236 GODENER A. (1996), ibid., p41. 237 DESMARAIS J.M., HAMMELLE B. ?et NIEWENGLOWSKI P. (1990), « Anticiper et vivre le changement » , Ed. d’Organisation, 153 p. 151 progressives238. Elles ne sont pas vécues comme la réponse à une crise, mais comme une adaptation par petites touches, dans une expression itérative, sur une période plus longue. Elles ne sont pas systématiquement synonymes de révolution ou de transformation radicale.

2.1.4. Le déterminisme contesté

Le schéma d’évolution proposé par les MDM n’est pas si déterministe en réalité. Les changements de dimension peuvent, en effet, intervenir à des âges ou à des tailles différents239. De plus, les clubs sportifs passent d’un stade à un autre sans forcément respecter toutes les étapes proposées par le modèle théorique. Autrement dit, ils peuvent accéder du stade 2 au stade 4 en sautant le stade 3, par exemple. Aussi, les structures proposées par les MDM ne sont pas si rigides qu’ils le supposent. Les grands traits permettent d’identifier des similitudes, mais analysées dans le détail ces structures ne sont pas identiques. Ils font l’objet d’un lissage permettant la mise en évidence de facteurs homogènes. En reprenant l’analyse contingente, il existe deux types de structures caractérisées par des états de formalisation opposés240 : 1. une structure qui s’inscrit dans une conception mécaniste où la formalisation définit la tâche à accomplir dans un cadre où l’opérateur n’est qu’un exécutant qui ne peut déroger à la règle ; 2. une structure de type organique, dans laquelle la formalisation met en valeur les missions et objectifs à atteindre en laissant à chaque responsable l’initiative de combiner les tâches nécessaires à sa mission.

Plus l’environnement est stable, plus le recours au respect des règles et à l’écrit est important, avec le maintien d’une structure de type stable-mécaniste opposée à une structure adaptative-organique. Cependant, les clubs sportifs ont une structure de type adaptative-organique, autrement dit une structure qui doit s’adapter à un environnement par nature instable, du fait de l’importance des résultats sportifs. Ainsi, un club fonctionne en mettant en valeur les

238 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 127-128. 239 GODENER A. (1996), ibid., p 127 à 128. 240 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p68. 152 missions et les objectifs à atteindre, mais il laisse une forte autonomie aux responsables dans leurs choix structurels. Le sport enseigne l’adaptation, la concurrence, la flexibilité. Il en va de même pour sa gestion économique. À chaque moment, selon la conjoncture et les appuis économiques, les clubs peuvent faire évoluer leur statut vers plus de professionnalisme et de « marchandisation ». Il en résulte des frontières floues entre les stades241. Cependant, les règles sportives empêchent, dans le modèle européen, de donner une priorité aux facteurs économiques. Ainsi, en rugby, le Stade Français, pourtant très professionnalisé avec l’apport financier de Max Guazzini de NRJ, n’a pas pu se libérer des procédures de montée de division en division, jusqu’à atteindre l’élite. Dans cette perspective, les étapes sportives ont été respectées, mais les considérations économiques sont passées d’un stade de club semi professionnel en grande difficulté économique à une situation de gestion rigoureuse tendue vers une réussite sportive et économique. Si les moyens offerts au Stade Français n’avaient pas permis au Club d’atteindre l’Elite dans un temps relativement court, il est probable que les investisseurs auraient abandonné le projet.

2.1.5. Une approche multicritère

L’approche multicritère propose le choix entre représentativité et fiabilité de celle-ci, dans le cadre spécifique de la gestion des clubs sportifs.

2.1.5.1. Représentativité Vs. Fiabilité La plupart des études se sont focalisées sur une seule caractéristique de l’entreprise, ce qui ne nous paraît pas suffisant. Dans ce contexte, il s’agit d’identifier les caractéristiques représentatives des clubs sportifs et de mettre en évidence « l’équation personnelle » du club. Certes, la simultanéité des caractéristiques n’est pas toujours rigoureuse, mais des schémas généraux d’évolution se retrouvent nécessairement au sein de chaque club sportif. Autrement dit, les caractéristiques de l’organisation restent en phase les unes avec les autres et elles évoluent globalement en relation entre elles. Il y a une forte concordance dans l’évolution des caractéristiques, leur trajectoire est proche en termes d’évolution, à quelques exceptions près. Si elles ne s’inscrivent

241 PARENT J. (1985), « Les firmes industrielles », tome 3. Paris : Presses Universitaires de France, 415 p., p 271. 153 pas dans le même stade de développement, leur situation est proche. Ainsi, une organisation se situant au stade 5 n’aura sensiblement plus beaucoup de caractéristiques similaires à une autre appartenant au stade 1. Il est, en effet, difficile de concevoir une compétence commerciale d’un club sportif située au stade 5, dans un schéma de compétition sportive de niveau 1. Certes, l’exemple de l’aventure du Stade Français est là pour contester cette idée, mais il faut toujours quelques exceptions pour confirmer la règle. C’est en ce sens que le sport échappe aux règles communes, en ce sens que les contraintes sportives s’imposent parfois à toutes les considérations lucratives. Si le modèle appliqué sur la base de plusieurs critères est susceptible de perdre en « lisibilité », sinon en fiabilité, il répond de manière plus satisfaisante aux objectifs que nous nous sommes fixés concernant la recherche d’une conceptualisation des clubs sportifs au regard de ses rapports avec les entreprises et leur gestion. Il s’agit de construire un modèle susceptible de permettre aux clubs de se situer dans chacune des caractéristiques représentatives de leur organisation, ce qui constitue une information intéressante concernant les domaines dans lesquels ils ont des lacunes ou des forces. Cette analyse peut les conduire à prendre des initiatives en vue d’atteindre, dans les meilleures conditions, le stade suivant, si cette ambition est retenue.

2.1.5.2. Définition des caractéristiques des clubs sportifs Pour définir les caractéristiques des clubs sportifs, le recours à la théorie des organisations dans le cadre de la théorie de la contingence (et notamment l’adaptation de celle-ci aux clubs sportifs) paraît justifié, comme l’a déjà montré AUGE [1998]. Dans un premier temps, ce type d’application confirme l’existence d’une relation étroite bilatérale entre les structures de l’entreprise et les caractéristiques que sont la taille et l’âge de l’organisation, son système technique et la relation de pouvoir. Depuis deux ou trois décennies, l’âge de la firme joue un rôle important dans son évolution, mais cette relation ne constitue pas en elle-même une source d’information suffisante et intéressante pour les clubs sportifs242. Il existe aussi, selon PARENT [1985]243, une explication possible

242 GREINER L. E. (1972), « Evolution and revolution sa organizations grow », Harvard Business Review, Juillet- Août, p37-46 ; CHURCHILL et LEWIS (1983), « Les cinq stades de l’évolution d’une P.M.E.”, Harvard l’Expansion, p 51-63. 154 de la relation « taille – développement de la formalisation de la structure ». Si l’on admet l’hypothèse selon laquelle chaque individu a besoin d’être en relation directe avec tous les autres membres de l’organisation, l’augmentation du personnel rend, très rapidement, impossible le maintien de ces relations. Au-delà d’un certain effectif, il devient donc nécessaire de créer une structure avec la mise en place de niveaux hiérarchiques et de mécanismes de coordination sophistiqués. Pour AUGE [1998], il est possible d’adapter ces facteurs aux clubs sportifs, en retenant la taille, le niveau de compétition, la nature des organes dirigeants et le rôle de l’acteur du système. Cette dernière analyse servira de base pour la suite de l’étude.

2.1.6. Croissance et développement

Les MDM ont été bâtis sur la base de l’analyse d’entreprises en croissance interne. Cette démarche peut être engagée pour l’étude des clubs. Le secteur sportif étant en plein essor depuis une vingtaine d’années, nous pouvons considérer que de nombreux clubs connaissent une croissance interne satisfaisante, mais cette tendance n’est pas vraie pour tous. Néanmoins, les clubs sportifs étant dans la contrainte « morale » d’une certaine incertitude du sport, ils doivent évoluer en harmonie, dans le cadre de rapports qui supposent des vainqueurs et des vaincus individuels, mais dans lesquels la structure globale peut bénéficier d’un intérêt économique croissant dans son ensemble. Ainsi, un club de rugby peut tomber en faillite, alors que le championnat du bénéficie d’une attraction économique accrue. Si l’on reprend la définition de DE MONTMORILLON [1989]244, le concept de croissance fait référence à des chiffres d’affaires qui augmentent, des actifs qui s’accumulent, des effectifs qui se gonflent. Pour BIENAYME [1971]245, il correspond au processus d’augmentation de la taille de l’entreprise au cours d’une durée déterminée. Dans ce contexte, la référence à la croissance ne se réduit pas à la croissance interne au sens de PATUREL, c’est-à-dire une croissance réalisée au moyen, « d’acquisitions d’actifs séparés ou, d’une façon plus générale, de moyens de production non combinés, c’est-à-dire ne pouvant

243 PARENT J. (1985), « Les firmes industrielles », tome 3, Paris : Presses Universitaires de France, 415 p., p 163-165. 244 De MONTMORILLON B. (1989), « La croissance contractuelle », Revue française de gestion, Janvier-février, p 97-106. 245 BIENAYME A. (1971), « La croissance des entreprises », Paris : Bruxelles : Montréal : Bordas, tome 1, 288 p. 155 pas, à eux seuls, fournir d’outputs »246. La croissance interne exprime un processus de croissance qui intègre les changements de structures et de systèmes, ainsi que les progrès réalisés sur le long terme, souvent en réponse aux évolutions présentes et à venir de l’environnement, en matière de concurrence, de réglementation ou de statut juridique, par exemple247. Cependant, il est souvent fait état aussi de la croissance externe qui comprend l’acquisition d’actifs combinés. Ainsi, plus que de croissance, il faut parler surtout du développement.

2.1.7. La période d’évolution concernée

La période intéressante dans l’évolution des clubs sportifs se situe de son arrivée au haut niveau à son état actuel. Nous analysons l’intégralité de son existence. Néanmoins, notre terrain a révélé des clubs pratiquement centenaires. Il n’est donc pas toujours aisé de relater l’intégralité de leur vie, parfois mise en attente par les guerres ou les conflits. De plus, si la situation des clubs a beaucoup évolué au cours du siècle, les transformations les plus notables sont apparues dans les années 1980, en relation avec les adaptations législatives du secteur. Loirand248 [2003] démontre notamment un fort accroissement des emplois dans le secteur sportif depuis le début des années 80. La catégorie socioprofessionnelle « éducateurs sportifs et sportifs professionnels » a été multipliée par quatre. Cette période est particulièrement intéressante, car elle constitue la charnière de la structuration moderne des clubs notamment avec la loi de 1984.

Conclusion

La description des modèles de métamorphoses se présente, en première hypothèse, comme une représentation de l’évolution normale de la firme en croissance. Elle admet que de grands schémas se retrouvent d’une entreprise à l’autre et que, lorsqu’un seuil apparaît, il a souvent été précédé d’un contexte commun à nombre d’entreprises à l’aube du même seuil organisationnel.

246 PATUREL R. (1981), « Délimitation des concepts de croissance interne et de croissance externe », Revue Sciences de Gestion, N°2, Décembre 1981, 26 pages. 247 BARTOLI A. et HERMEL P. (1989), « Le développement de l’entreprise, nouvelles conceptions et pratiques », Paris, Economica, 421 p. 248 LOIRAND G. (2003), «Les paradoxes de la « professionnalisation des associations sportives » dans « Les Associations : entre bénévolat et logique d’entreprise » sous la direction de Lionel PROUTEAU, Les Presses universitaires de Rennes, Coll. L’Univers des normes, p 85 – 102, 216 p., p 89. 156

2.2. Les caractéristiques des organisations sportives sélectionnées Le positionnement théorique étant posé, il convient désormais de délimiter l’objet de la recherche. Premièrement, il s’agira de définir le type de clubs analysés et d’en justifier le choix. Dans un second temps, l’adaptation des analyses des MDM aux caractéristiques des clubs sportifs sera abordée.

2.2.1. Les fondements de la présélection

Selon Jean François LAMOUR, il existe 14 millions de licenciés en France et 170 000 clubs en France249. Au regard de ces chiffres, il n’est pas difficile de comprendre les écarts considérables existant entre les sportifs, les clubs sportifs et même les fédérations. Seuls les sports de compétition « encadrés » par une Fédération nous intéressent250. Ensuite, nous nous concentrerons uniquement sur le sport de haut niveau et le sport professionnel, celui qui suppose une gestion privée et commerciale. En effet, de manière générale, en première analyse, le niveau de compétition et la structuration des clubs évoluent parallèlement. Généralement, les clubs évoluant dans le haut niveau constituent des fers de lance des disciplines en termes de notoriété sportive et de structures. Les matchs sont souvent considérés comme de véritables spectacles. Ils constituent des référentiels pour les autres clubs de la discipline sportive et même des représentants de celle-ci. La société dans laquelle nous vivons est élitiste, les équipes championnes sont suivies et soutenues par de nombreux acteurs (fans, spectateurs, téléspectateurs, collectivités publiques ou parrainage) au détriment des clubs se situant dans la « masse ». Ce soutien conduit inéluctablement à un processus de restructuration continue, en fonction des enjeux économiques. Pour analyser l’évolution des clubs sportifs, il est intéressant en première analyse d’observer l’évolution des clubs les plus développés afin de comprendre

249 propos recueillis lors d’une interview de l’équipe TV le 05.01.05 250 Rappelons le principe des choix de clubs retenus dans notre échantillon. Nous n’incorporons pas les sociétés commerciales type sociétés anonymes non-fédérées qui proposent l’activité sportive comme service commercial (club de fitness, paintball, karting, etc.) ou encore les groupements sportifs affinitaires, corporatifs, scolaires et universitaires. Nous ne nous intéresserons pas non plus au sport individuel, même exercé collectivement dans des structures hiérarchiques comme le cyclisme (avec le leader ou les grégarios), dans la mesure où nous entendons analyser la structure d’organisations collectives qui obtiennent des résultats qui mettent d’abord en exergue les résultats de l’équipe. Le sport individuel met plus en avant le résultat du sportif lui-même que le club, même si ce n’est pas toujours vrai, notamment pour le cyclisme (course contre la montre par équipe) ou le tennis (Coupe Davis ou compétitions interclubs). 157 les raisons profondes de leur évolution sur le plan économique mais aussi parce que leur histoire mettra en évidence l’intégralité des situations possibles. Cependant, on peut faire l’hypothèse selon laquelle le développement de chaque discipline sportive est très différent. Un club de hockey sur gazon au plus haut niveau n’aura pas la même complexité structurelle qu’un club de football d’élite, tout simplement parce qu’il n’en a pas besoin. Il existe, en effet, des disciplines sportives reines qui prennent une place plus conséquente dans la vie quotidienne des gens et qui développent, de ce fait, des enjeux économiques importants. Il n’est pas rare qu’une nation considère une discipline sportive comme le sport national pour lequel la population se mobilise et se passionne. C’est le cas du hockey sur gazon en Inde, du badminton au Pakistan, de la lutte en Turquie et en Iran, du calcio en Italie, du rugby en Nouvelle-Zélande ou en Afrique du Sud, du ski alpin en Autriche, du football gaélique en Irlande, du hockey sur glace au Canada ou en Suède, du judo et du sumo au Japon ou du football américain aux Etats-Unis. Cette ferveur pour certaines disciplines a favorisé leur développement privilégié, ce qui empêche toute comparaison rationnelle avec d’autres sports évoluant pourtant au plus haut niveau international. L’équipe de France de roller hockey a été championne d’Europe en 2006, sans faire pour autant les grands titres des journaux parisiens et sans enthousiasme particulier des Français. Certains sports, dans leur pratique au plus haut niveau, se sont professionnalisés, ce qui est la situation la plus aboutie du développement des clubs. Ils ont créé des ligues pour réguler leur secteur professionnel et ils constituent des exemples pour de nombreuses disciplines sportives en termes de qualité de leurs structures managériales. Cette recherche se propose d’analyser les disciplines sportives collectives qui ont créé une ligue ou qui projettent d’en créer une. Nous avons choisi cinq disciplines importantes dans le sport français. Pour mettre en évidence la totalité des phases des clubs sportifs, il est évident que le football sera une discipline sportive de choix puisqu’elle est la référence concernant le processus de « marchandisation » des « grands clubs », tout en conservant dans les divisions inférieures des structures semblables à la masse des clubs de toutes les disciplines sportives confondues. Cependant, se focaliser sur cette pratique ne serait pas représentatif des activités sportives, car sa médiatisation, souvent jugée excessive, en fait une discipline sportive à part. Nous avons sélectionné des disciplines sportives qui semblent intéressantes en termes de comparaison et 158 d’ambition concernant le nombre de licenciés, la notoriété, la médiatisation ou l’audience directe. Ainsi, en plus du football, notre choix s’est porté sur le rugby, le handball, le basket-ball et le hockey sur glace, mon sport de compétence et de prédilection.

Le rugby constitue le deuxième sport le plus médiatisé en France251. Il présente toutes les caractéristiques d’un sport en forte évolution, notamment au niveau des médias.

Le basket-ball et le handball sont devenus respectivement les troisième et quatrième sports collectifs en France en termes de nombre de licenciés, mais aussi d’audience, notamment dans les grandes manifestations impliquant les équipes nationales ou les coupes d’Europe.

Une nouvelle Fédération du hockey sur glace vient d’être créée officiellement en 2006, témoignage d’une volonté d’indépendance professionnelle au regard de son ancienne tutrice, la Fédération Sportive des Sports de Glace qui regroupe d’autres activités sportives hétérogènes comme le patinage artistique, le curling ou le bobsleigh. Au plus haut niveau, les clubs de hockey sur glace sont professionnalisés, mais les salaires et les budgets restent modestes au regard du football.

Si les clubs de football font l’objet de nombreuses analyses et régulièrement de la « une » des journaux, ce qui nous permet de récolter de précieuses informations à leur sujet, les clubs de hockey sur glace et de rugby sur lesquels nous nous sommes focalisés ont fait l’objet de quelques études et thèses intéressantes, notamment celles de CHAIX [2003]252 et d’AUGE [1998]253. Les clubs de handball ainsi que de Basket-ball ne sont pas dépourvus non plus de toute littérature à leur sujet, mais elles sont de qualité inégale, de nature

251 CHAIX P. (2003), « Analyse économique du rugby professionnel en France », Université Pierre Mendés France (UPMF) de Grenoble, Faculté des Sciences économiques, 450 p. 252 Thèse de doctorat en Sciences économiques de Pierre CHAIX (2003), « Analyse économique du rugby professionnel en France », Université Pierre Mendés France (UPMF) de Grenoble, Faculté des Sciences économiques, 450 p. 253 Thèse de doctorat en Sciences de gestion de AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p. 159 journalistique quelques fois. Nous avons néanmoins trouvé des informations intéressantes à leur sujet contribuant à conforter notre choix.

Tableau n°9 - Tableau récapitulatif des caractéristiques des sports collectifs à l’étude

Nombre de Sports Statut (haut niveau) Enceinte licenciés olympiques sportive Fédération 2 066 339 SASP, SAOS, EUSRL, Française (FF) (1er) X SEMSL X de football FF de basket- 426 751 SASP, SAOS, EUSRL, ball (5ème) X SEMSL X FF hand-ball 318 895 Association (6ème) X SASP, SAOS, EUSRL, X SEMSL FF de rugby 252 638 SASP, SAOS, EUSRL, (10ème) SEMSL X FF hockey sur 40 405 Association glace (33ème) X SASP, SAOS, EUSRL, X SEMSL

Il est illusoire et sans doute inutile de prétendre à l’exhaustivité. Il convient donc de faire une sélection des clubs qui soit représentative de l’ensemble des structures existantes. Si, dans quelques disciplines, certains clubs s’imposent d’eux-mêmes, pour d’autres nous avons effectué une sélection sur plusieurs critères, parmi lesquels nous retrouvons l’importance du club pour les collectivités locales, sa popularité ou encore sa médiatisation. Après avoir identifié le terrain d’analyse, il convient d’adapter les MDM aux spécificités des organisations sportives. Nous avons cherché à identifier les caractéristiques représentatives des structures des clubs sportifs de haut niveau.

2.2.2. Les caractéristiques propres aux clubs sportifs

Une fois réalisée la synthèse de l’évolution des clubs et l’étude des pratiques de leur gestion, il est possible d’identifier les caractéristiques évolutives spécifiques aux clubs sportifs. Leur analyse permet de définir les stades de développement spécifiques aux clubs sportifs. Ainsi, selon le degré de développement de chaque caractéristique, il est possible de définir le stade de développement de chaque club. Il est intéressant de mettre en exergue l’assujettissement intégral des caractéristiques de l’entreprise à chaque stade de développement, depuis ses relations avec l’environnement (stratégie, marchés, 160 actionnariat, relations avec les banques) jusqu’à son mode de fonctionnement (structures, système de contrôle, systèmes de communication). En effet, pour profiter des marchés et croître, « la firme en expansion aménage son outil de production, ses moyens de financement, son système d’informations, son mode d’organisation, etc. »254. Il conviendra donc de choisir les caractéristiques les plus significatives pour retracer l’évolution des clubs sportifs. Dans son enquête adaptée aux clubs, AUGE [1998] a choisi d’utiliser les systèmes de données de gestion (SDG) en définissant quatre pôles représentatifs des clubs sportifs à savoir le pôle administratif, le pôle comptabilité, le pôle relations extérieures, le pôle sportif. Nous avons choisi de suivre cette démarche. Il s’agira désormais de ne pas déborder ce cadre de recherche et d’identifier les caractéristiques évolutives dans chacun des pôles. Il est possible de s’appuyer sur une littérature foisonnante relative à la structure de l’entreprise. Plusieurs courants de pensée ont permis d’identifier les évolutions structurelles de l’entreprise. En première analyse, le choix des caractéristiques utilisées par les auteurs des modèles de métamorphoses s’est imposé, au moins au titre des comparaisons possibles, notamment aussi du fait des analogies rencontrées dans cette littérature spécifique. Les MDM cherchent à identifier les stades de développement rencontrés par les entreprises, sur la base de caractéristiques clairement répertoriées. Ils s’appuient, pour identifier l’évolution des entreprises par stades, sur des caractéristiques récurrentes de l’entreprise comme le mode d’organisation (degré de formalisation, degré de spécialisation et de délégation) qui constitue la caractéristique la plus communément acceptée dans les recherches sur les métamorphoses. D’autres reviennent aussi régulièrement sur le rôle du chef d’entreprise, le système de motivation et de rémunération, l’activité commerciale en termes de nombre de produits et/ou de marchés visés, la composition de l’actionnariat et l’organisation de la production255. On peut penser que les caractéristiques évolutives des clubs sont proches de celles des entreprises. C’est pourquoi nous nous baserons sur ces premières caractéristiques en les adaptant aux clubs sportifs. L’approche contingente nous a semblé utile. Pour répondre à la question « par quels vecteurs la croissance exerce-t-elle une influence sur la structure

254 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 46. 255 GODENER A. (1996), ibid., p 52. 161 adoptée ? », Godener256 fait appel aux enseignements apportés par les modèles de métamorphose, mais également à ceux qui sont fournis par la « théorie de la contingence » dans le cadre de la « théorie des organisations ». Les auteurs de ce courant définissent les facteurs qui, associés aux paramètres de conception, expliquent la façon dont les organisations se structurent. D’une manière générale, au-delà de la taille de l’organisation qui, pour ce courant, est essentielle, certains auteurs relatent une certaine « complexité croissante de l’entreprise en expansion »257. Ainsi, les auteurs y faisant référence ajoutent aux éléments clés que constituent l’âge et la taille de l’entreprise, d’autres éléments ayant une influence sur le stade de développement d’une organisation, notamment les procédés de production258, le nombre de produits259, les canaux de distribution260, la diversité géographique des activités261, le taux de croissance du secteur262 et leur vitesse d’évolution263. Pour simplifier, des auteurs comme MINTZBERG, DUPUY ou encore KALIKA264 proposent quatre groupes de facteurs de contingence : l’identité (taille, âge, nationalité, origine, statut de l’entreprise, âge et formation des dirigeants), le système technique, l’environnement et le pouvoir. Il convient ensuite d’adapter les facteurs de contingence selon les spécificités des clubs sportifs265. AUGE [1998] est le pionnier en la matière. Il démontre d’ailleurs, après adaptation, qu’ils n’influencent pas le degré de formalisation des clubs sportifs. L’intérêt des facteurs de contingence adaptés aux clubs, à savoir la taille, le niveau de compétition et les organes de direction et de gestion, qui ont déjà été sommairement évoqués dans notre présentation des études portant sur les clubs, mérite d’être précisé.

256 GODENER A. (1996), ibid., p 118 257 GODENER A. (1996), ibid., p 122 258 WOODWARD (1965), « Industrial organization: theory and practice », Londres: Oxford, university press ; CHURCHILL et LEWIS (1983), « Les cinq stades de l’évolution d’une P.M.E. », Harvard l’Expansion, p 51-63. 259 SALTER M. S. (1970), « Stages of corporate development », Journal of Business Policy, N°1, p 23-37 ; CHURCHILL et LEWIS (1983), « Les cinq stades de l’évolution d’une P.M.E.”, Harvard l’Expansion, p 51-63 ; MILLER D. et FRIESEN P. H. (1984), « A longitudinal study of the corporate life cycle », Management Science, vol.30, N°10, p 1160-1183. 260 SALTER M. S. (1970), « Stages of corporate development », Journal of Business Policy, N°1, p 23-37 ; MILLER D. et FRIESEN P. H. (1984), « A longitudinal study of the corporate life cycle », Management Science, vol.30, N°10, p 1160-1183. 261 SALTER M. S. (1970), « Stages of corporate development », Journal of Business Policy, N°1, p 23-37 ; CHURCHILL et LEWIS (1983), « Les cinq stades de l’évolution d’une P.M.E.”, Harvard l’Expansion, p 51-63. 262 GREINER L. E. (1972), « Evolution and revolution as organizations grow », Harvard Business Review, juillet- Août, p 37-46. 263 CHURCHILL et LEWIS (1983), « Les cinq stades de l’évolution d’une P.M.E.”, Harvard l’Expansion, p 51-63. 264 Cité par AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p, p 70-72. 265 AUGE B. (1998), « La formalisation de la gestion des clubs sportifs : un essai d’observation et d’interprétation », Thèse de doctorat en Sciences de gestion, Montpellier II, 393 p., p 75 –77. 162

1. La taille constitue un élément qui a un impact fort sur le fonctionnement de l’entreprise. Son évolution constitue une caractéristique essentielle de la majorité des modèles de métamorphose et la théorie des organisations confirme l’existence de la relation « taille de la firme-structures »266. KALIKA [1988]267 précise que la relation entre la taille d’une organisation et la différenciation est forte, qu’une relation moyenne s’exerce avec la standardisation, la décentralisation et la planification-contrôle et que la relation entre formalisation et taille existe même si elle est faible. Selon une relation souvent vérifiée, plus la taille d’une organisation est grande, plus sa structure est élaborée : plus les tâches y sont spécialisées, plus ses unités sont différenciées ; plus la composante administrative est développée, plus la taille moyenne des unités est grande et plus la formalisation est nécessaire. La taille semble fournir d’importantes informations concernant le degré de développement de l’entreprise. Ainsi, il sera difficile de dresser un tableau comparatif entre des clubs de tailles trop sensiblement différentes. Les clubs pourvus de vingt responsables administratifs ne fonctionnent pas de la même manière qu’un club dans lequel le président est omniprésent et omnipotent. Dans la mesure où la structuration du club est différente selon la taille, il serait peut-être intéressant d’intégrer cet élément dans notre tableau des métamorphoses. Il est possible qu’il en ressorte pour chacune des tailles un stade de développement. Cependant, il faut aussi tenir compte de l’importance des professionnels concernés (en ne tenant pas compte des bénévoles), mais aussi du niveau d’organisation du club. Une structure de type « labour saving » peut exister dans un club, en vue de développer plutôt une politique d’investissement ou « d’outsourcing ». Dans ces conditions, la taille n’est pas nécessairement significative. Pour éviter les biais relatifs à cette constatation, il faut sans doute tenir compte aussi des chiffres d’affaires. 2. Le niveau de compétition constitue un élément intéressant, voire fondamental. Il pourrait constituer un facteur démonstratif des évolutions

266 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 118. 267 KALIKA M. (1988), « Structure de l’entreprise - réalités déterminants, performance », Economica, Paris, 488 p. 163

des clubs dans la mesure où une logique de compétition donne une place décisive à la recherche de la performance, ce qui suppose une structure et une organisation adaptées. En effet, une étude comparative entre un club de haut niveau et un club de division d’honneur semble habituellement d’aucun intérêt tant leurs structures organisationnelles peuvent être différentes. Néanmoins, les écarts entre les clubs ne sont pas identiques d’une discipline à une autre. Il existe, en effet, moins d’écart entre deux clubs de divisions différentes de hockey sur gazon qu’entre deux clubs de football. Là encore, il convient de relativiser. Un club de rugby qui souhaite « monter » dans le Top14 doit souvent disposer d’un budget au moins équivalent à celui du club médian du Top 14. Mais cette situation n’est pas généralisable, elle ne porte que sur un ou deux clubs tout au plus.

3. Enfin, il est intéressant d’analyser les organes de direction et de gestion qui constituent aussi des facteurs représentatifs et démonstratifs des changements de gestion des clubs sportifs268. Le nombre de dirigeants qui composent les différents organes de direction (Bureau et le Comité Directeur), la fréquence de leurs réunions, le nombre de personnes qui participent à la gestion des pôles ou encore la présence de personnels salariés et de personnes extérieures (expert-comptable ou cabinet de conseil, par exemple) peuvent influer sur la gestion des clubs sportifs.

En restant dans le cadre représentatif des clubs sportifs proposé par Augé, l’analyse des pôles administratifs, comptables, externes et sportifs est susceptible de fournir une information importante. Comme caractéristiques, il est nécessaire de retenir la taille269 du club, son niveau de compétition, ses organes de direction et de gestion mais aussi la professionnalisation du club (statut, système de motivation, système de rémunération,...), l’état de ses activités commerciales en termes de produits mais aussi de marchés, son degré de popularité (médiatique, géographique, son implication dans la vie

268 Les résultats de AUGE démontrent qu’il n’existe pas de relation entre tous ces facteurs et le degré de formalisation. Il n’empêche, comme l’affirme Augé en connaissance de cause puisque qu’ancien trésorier d’une organisation sportive, qu’ils ont un impact sur la gestion des clubs sportifs. 269 LOIRAND (2003) explique que la taille des clubs a son importance dans ce phénomène de « professionnalisation ». « La part des associations de plus de 100 membres atteint 35 % ce qui permet d’entrevoir […] l’une des raisons pour lesquelles seuls 30% environ des clubs sportifs fédérés recourent aux services d’un personnel salarié ». 164 communautaire), ses orientations stratégiques (rôle du président de club), son organisation fonctionnelle (centralisée, décentralisée, création de pôles) ou encore la composition de l’actionnariat. Les rôles spécifiques des individus dans les systèmes de contrôle d’une organisation ne sont pas négligeables dans le fonctionnement d’un club, mais il est difficile de généraliser leur impact collectif eu égard à leur hétérogénéité. Cependant, plus le club passe à un stade de développement supérieur et moins l’évocation de ces « équations personnelles » est justifiée. La professionnalisation s’accompagne d’un essor de l’organisation et de la bureaucratie, laquelle réduit les aléas des actions personnalisées. Compte tenu de ces analyses préalables, il convient de présenter la méthodologie présentée dans ce travail de recherche.

2.3. Méthodologie proposée Une fois choisi le modèle et en avoir défini les principes, il convient de mettre en évidence le type de recherches le plus adapté à la question posée.

2.3.1. Nature de la recherche

Depuis quelques années, l’application de cette méthodologie des MDM est rare, malgré son intérêt pour le thème qui nous concerne, notamment pour l’analyse typologique des clubs sportifs. Cependant, plusieurs études sur la gestion des clubs sportifs permettent d’identifier clairement leur évolution. Leur description fait l’objet d’une analyse précise, complétée par notre analyse sur le terrain. La recherche est, de ce fait, de type exploratoire et elle génère un caractère provisoire caractéristique de ce type d'investigation. Il sera nécessaire d'effectuer d'autres expérimentations pour vérifier empiriquement la valeur des formulations proposées. Les analyses des MDM appliquées aux entreprises ne font pas l’objet d’un véritable corpus théorique bien établi. Cependant, leur application à notre domaine d’étude est a priori intéressante eu égard aux études présentées précédemment. C’est donc une recherche de type fondamental puisque qu’elle « désigne les développements qui prennent la forme de découvertes, d’inventions, de réflexions, de modélisations, voire de conjectures »270.

270 USUNIER J-C, EASTERBY-SMITH M., THORPE R. (1993), « Introduction à la recherche en gestion, Paris, Economica, 2ème Edition 2000, 233 p. cité par SAVALL H. et ZARDET V. (2004), « Recherche en Sciences de 165

Au regard de ces caractéristiques inhérentes à notre recherche, il convient de faire des choix concernant l’approche à adopter. Nous avons étudié les différentes méthodes utilisées en Sciences de gestion pour décider celle qui conviendrait le mieux à notre travail.

2.3.2. Une approche qualitative abductive

Notre recherche étant de type exploratoire, nous avons choisi de réaliser une étude de type qualitative. En effet, les données qualitatives « permettent des descriptions des explications riches et solidement fondées de processus ancrés dans un contexte local. Avec les données qualitatives, on peut respecter la dimension temporelle, évaluer la causalité locale et formuler des explications fécondes. De plus, les données qualitatives sont davantage susceptibles de mener à d’ « heureuses trouvailles » et à de nouvelles intégrations théoriques ; elles permettent aux chercheurs de dépasser leurs a priori et leurs cadres conceptuels initiaux. Enfin, les découvertes dues aux études qualitatives revêtent un caractère d’ « indéniabilité » »271. L’analyse quantitative semblait donc moins appropriée qu’une analyse qualitative. Il existe, en effet, des différences entre ces deux types d’analyse. THIETART [2003], pour distinguer l’analyse qualitative de l’analyse quantitative, fait référence à « une plus grande flexibilité dans le recueil de données » dont bénéficie en général le chercheur et affirmé que « l’approche quantitative n’offre pas cette souplesse car elle implique généralement un calendrier plus rigide »272. Parfois, les données qualitatives offrent des informations irremplaçables concernant l’intensité et la clarté des significations. L’analyse qualitative permet de mieux comprendre les objets d’étude, car elle est riche en informations et elle se propose de mettre en évidence, de manière plus approfondie, les causalités273. Elle permet notamment de tenir compte de la perspective des acteurs, elle offre des illustrations au moins aussi convaincantes d’un état que de simples chiffres

Gestion : Approche Qualimétrique », Observer l’objet complexe, Préface du Pr. David Boje, Economica, Collection Recherche en Gestion, 432 p., p 62. 271 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p11. 272 THIETART R.-A. et coll. (2003 ), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p101. 273 HUBERMAN A.M. et MILES M.B. (1991), « Analyse des données qualitatives, recueil de nouvelles méthodes », Bruxelles, De Boeck-Wesmael, 480 p., p 22. 166 froids souvent transformés en mesure de variables complexes274. Les approches qualitatives sont particulièrement appropriées pour approfondir un sujet mal connu ou pour découvrir de nouvelles pistes de recherche sur le sujet. Elles sont créatrices d’informations, susceptibles de favoriser de nouvelles formulations théoriques. Elles incitent les chercheurs à dépasser les cadres conceptuels initiaux et de s’interroger sur la pertinence des réponses inattendues. Pour HUBERMAN et MILES [1991]275, la distinction entre les deux approches est opérée au regard des données traitées. Les méthodes quantitatives (plus fréquemment déductives) et qualitatives (souvent inductives) supposent le recueil d’informations de nature différente. Contrairement aux données chiffrées nécessaires aux études quantitatives, les informations d’une étude qualitative se présentent souvent sous une forme rarement numérique. STRAUSS et CORBIN [1990]276 mettent en exergue l’exemple d’une recherche au premier abord qualitative faisant l’objet d’une étude statistique fondée notamment sur un sondage par exemple. Dans ce contexte, le caractère qualitatif de la méthode est dénaturé. Selon les auteurs, le champ qualitatif est constitué de recherches produisant des résultats, mais ceux-ci sont obtenus par un processus qui n’est ni statistique ni même numérique. Le codage des données qualitatives permet cependant la réalisation d’analyses statistiques. Dans leur ouvrage de 2004, Strauss et Corbin restent sur cette idée et déclarent : « Les chercheurs (qualitatifs) quantifient, en fait, les données qualitatives. En évoquant l’analyse qualitative, nous entendons, non pas la quantification des données qualitatives, mais plutôt un processus non mathématique d’interprétation, entrepris dans l’objectif de découvrir des concepts et des rapports entre les données brutes afin de les organiser dans un schéma théorique et explicatif »277. Cette distinction n’est pas généralement admise. Il s’agit donc d’une typologie qui ne rencontre pas l’adhésion de tous les utilisateurs de la méthode qualitative. La nuance proposée par ALLARD-POESI F., DRUCKER-GODARD C., EHLINGER S. [2003], à

274 STRAUSS et CORBIN (1990), « Basics of qualitative research, Grounded Theory procedures and techniques, Nawbury Park : London : New Delhi : Sage publications, 270 p. ; HUBERMAN A.M. et MILES M.B. (1991), « Analyse des données qualitatives, recueil de nouvelles méthodes », Bruxelles, De Boeck-Wesmael, 480 p. 275 HUBERMAN et MILES (1991), « Analyse des données qualitatives, recueil de nouvelles méthodes, Bruxelles: De Boeck-Wesmael, 480 p. 276 STRAUSS et CORBIN (1990), « Basics of qualitative research, Grounded Theory procedures and techniques, Nawbury Park : London : New Delhi : Sage publications, 270 p., p 17-18. 277 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p.105-106. 167 savoir que « la différence entre analyse quantitative et qualitative réside dans la façon dont elles conçoivent la notion d’importance d’une catégorie : « nombre de fois » pour l’analyse quantitative ; « valeur d’un thème » pour l’analyse qualitative »278, nous semble plus acceptable. Pour différencier ces deux types d’approche, BAUMARD et IBERT [2003] s’intéressent à plusieurs critères que sont « la nature de la donnée, l’orientation de la recherche, le caractère objectif ou subjectif des résultats obtenus et la flexibilité de la recherche »279.

Ensuite, le choix entre ces deux types de méthodes peut être fondé sur la base du critère de la place que l’on accorde à l’étude de terrain par rapport à celle qui est accordée à la théorie. Une recherche déductive consiste à utiliser un modèle, défini a priori à partir de la littérature existante, qui sera ensuite testé pour être validé ou rejeté. Une recherche inductive est fondée sur un modèle bâti sur la base des informations récoltées sur le terrain, reléguant la littérature préexistante à un rôle de support ou éventuellement de « boussole ». L’analyse qualitative de MILES et HUBERMAN [2003] n’utilise pas « des lois de portée générale ou la logique déductive inhérente au positivisme classique »280, ce qui nous semble être applicable à notre étude. En effet, les MDM n’ayant jamais été appliqués aux clubs sportifs, nous ne pouvons déduire de nos données la pertinence d’une théorie. Nous sommes contraints de « rendre compte des événements, plutôt que de nous limiter à décrire leur déroulement. Nous recherchons un processus individuel ou social, un mécanisme, une structure matricielle des événements que l’on peut saisir afin de fournir une description de la causalité qui régit les forces en présence »281. En vue de cet objectif, il convient d’expliquer davantage la manière par laquelle les événements observés ont été produits par les différentes structures. Au regard de ces quelques précisions, nous nous orientons vers une approche qualitative inductive. Les modèles de métamorphoses n’ont été appliqués qu’aux entreprises. Nous nous proposons de les appliquer aux clubs

278 ALLARD-POESI F., DRUCKER-GODARD C., EHLINGER S., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p 463. 279 BAUMARD P. et IBERT J., in THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p95. 280 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p17. 281 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p17. 168 sportifs. Notre recherche exploratoire, au regard de la définition proposée par CHARREIRE S. et DURIEUX F. [2003], s’inscrit dans une démarche empirique. Selon les auteurs, elle « consiste à explorer un phénomène en faisant table rase des connaissances antérieures sur le sujet. Le chercheur travaille sans a priori. Cette voie permet théoriquement d’élaborer du « nouveau » indépendamment des connaissances antérieures »282. SNOM et THOMAS [1994]283 vont en ce sens en révélant que « dans les recherches en management, les méthodes empiriques (les différentes formes d’observation, les interviews, les enquêtes, les simulations ou la quasi-expérimentation, la combinaison de différentes techniques ou méthodes) sont fréquemment utilisées pour explorer et élaborer de nouveaux objets théoriques plutôt que pour les tester ». Il convient cependant d’ajouter la nuance apportée par CHARREIRE S. et DURIEUX F. [2003] qui reviennent sur la notion de « table rase ». Celle-ci n’est pas à prendre au sens strict dans la mesure où le chercheur n’est pas aussi indépendant que cela de ses connaissances antérieures. Si l’on tient compte de cette restriction, la réflexion inverse serait de dire que nous nous sommes appuyé sur l’application des MDM dans les entreprises. Si notre analyse empirique n’est fondée sur aucune hypothèse théorique préalable, elle n’est pas développée ex nihilo. Elle adapte le modèle synthétique proposé par GODENER [1996] aux clubs sportifs. Notre étude allie à la fois une analyse empirique et théorique. Cette méthode peut être définie comme une « exploration hybride » dont CHARREIRE S. et DURIEUX F. donnent les caractéristiques : « Elle consiste à procéder par allers et retours entre des observations et des connaissances théoriques tout au long de la recherche. Le chercheur a initialement mobilisé des concepts et intégré la littérature concernant son objet de recherche. Il va s’appuyer sur cette connaissance pour donner du sens à ses observations empiriques en procédant par allers et retours fréquents entre le matériau empirique recueilli et la théorie ». Les auteurs terminent en indiquant qu’il s’agit d’une « démarche abductive » et que celles- ci « tendent vers un « réalisme fort » de la théorie (KOENIG, 1993) et vers la production de construits théoriques fortement « enracinés » (GLASER et

282 CHARREIRE S. et DURIEUX F. dans THIETART R.-A. et coll. (2003 ), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2., 586 p., p 68. 283 SNOW et THOMAS (1994), « Field Research Methods in Stratégic Management : Contributions to Theory Building and Testing », Journal of Management Studies, vol.31, pp. 457-479, cité par CHARREIRE S. et CHARREIRE S. et DURIEUX F. dans THIETART R.-A. et coll. (2003 ), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2., 586 p., p 67. 169

STRAUSS, 1967) dans les faits considérés284. Notre recherche prend peu à peu la forme d’une analyse qualitative exploratoire abductive. Il existe cependant plusieurs critiques quant au choix de cette méthode. De nombreux chercheurs dénoncent le caractère « non scientifique » des recherches qualitatives et ils considèrent que le risque d’erreur d’interprétation dans le recueil d’informations est excessif. Dans ce contexte, une approche qualitative ne peut constituer, à proprement parler, une stratégie de recherche. Les modèles qualitatifs souffrent en réalité de méthodes peu rigoureuses dans la description de la recherche, au contraire des recherches quantitatives fondées sur des techniques statistiques depuis longtemps testées, éprouvées et intégrées dans le processus de réflexion scientifique. Il existe un certain consensus au regard de la qualité du protocole mis en place dans la validation des tests et l’utilisation d’outils stables. SAVALL S et ZARDET V. [2004]285 affirment même que « l’analyse des données qualitatives est souvent source de difficultés pour le chercheur, les « méthodes » étant en générale peu structurées voire confuses et floues ».

Si les recherches qualitatives ont fait l’objet de nombreux travaux qui permettent aux chercheurs de préciser leurs idées et de mettre en évidence les interprétations possibles, le traitement des données reste toujours sujet à caution. Dans ce contexte, les résultats de l’analyse elle-même n’offrent pas les critères de rigueur scientifique suffisants, même s’ils ne manquent pas d’intérêt. Ils servent souvent de première interprétation d’un objet scientifique à l’étude. Ils sont source d’intuition théorique, même si leur vérification reste délicate à mettre en place sans un travail de contrôle par le traitement de données fiables. Pour une validation expérimentale, les chercheurs utilisant les méthodes qualitatives sont dans la nécessité de dévoiler leur processus de travail, tant en termes de méthodologie que de traitement de données, s’ils désirent que leurs résultats soient jugés rigoureux de fiables286. Désormais, tout le processus de recherche est expliqué : les différentes phases, les moyens de validation, les moyens et critères d’échantillonnage, l’explication des résultats, les

284 CHARREIRE S. et DURIEUX F. dans THIETART R.-A. et coll. (2003 ), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2., 586 p., p 71. 285 SAVALL H. et ZARDET V. (2004), « Recherche en Sciences de Gestion : Approche Qualimétrique », Observer l’objet complexe, Préface du Pr. David Boje, Economica, Collection Recherche en Gestion, 432 p., p 85. 286 Pour ne citer que les travaux de l’ISEOR ou encore A.L. STRAUSS et J. CORBIN (1990), A.M. HUBERMAN et M. B. MILES (1991), SILVERMAN (1993)… 170 interprétations possibles et les synthèses utiles. Chaque résultat est discuté et validé sur la base d’une étude mettant en évidence les tenants et les aboutissants de chaque conclusion scientifique significative. Autrement dit, l’analyse qualitative se propose de convaincre ou de suggérer sur la base d’informations diverses, fondées sur des opinions, des idées, des constatations éparses dont les interprétations minutieuses offrent des hypothèses scientifiques intéressantes qui méritent, en dernier ressort, d’être testées de manière plus rigoureuse. Elle offre, cependant, un début d’information complémentaire sur la « réalité » d’une relation ou d’une hypothèse qui, en l’absence de tout autre modalité scientifique disponible, constitue une avancée plus ou moins importante pour la compréhension du phénomène à l’étude. Le caractère scientifique porte sur le caractère « probable » des explications fournies par l’étude qualitative. Ce caractère probable est légitimé par HUBERMAN et MILES [2003] qui affirment que si la plupart des construits théoriques sont invisibles à l’œil nu, ils ne sont pas pour autant invalides. « Après tout, nous sommes tous environnés de mécanismes régis par des lois physiques dont nous sommes, dans le meilleur des cas, à peine conscients »287.

Plus encore, dans certains cas, les résultats d’une recherche quantitative sont susceptibles de bloquer la mise en place d’une explication théorique pertinente, alors qu’une recherche qualitative peut être en mesure de fournir l’intuition de cette vérité camouflée derrière les chiffres ambigus ou erronés. Dans une recherche qualitative, paradoxalement, tous les cas exceptionnels sont conservés et ils trouvent leur légitimité dans la complémentarité qu’ils offrent avec l’ensemble des cas « usuels ». L’analyse qualitative s‘interroge de manière systématique sur les exceptions, sur tous les cas qui fonctionnent mal au regard de la théorie. La nature de la plupart des recherches qualitatives est dite « naturaliste ». Les caractéristiques récurrentes de la recherche naturaliste énoncées par MILES et HUBERMAN [2003] sont :

287 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p16. 171

- un « contact prolongé et/ou intense avec un terrain », avec pour objectif d’atteindre « une compréhension « holiste » (systémique, globale, intégrée) du contexte de l’étude » ; - de saisir « des données sur les perceptions d’acteurs locaux « de l’intérieur », à l’aide d’un processus d’attention approfondie, de compréhension empathique et de préconceptions mises en suspens » ; - d’isoler « certains thèmes et expressions » figés tout au long de l’étude (même si quelques corrections peuvent intervenir), afin de connaître l’évolution de leur utilisation ; - d’obtenir une explication des situations quotidiennes vécues par les interlocuteurs, « une analyse à l’aide de mots » pour « permettre au chercheur de constater, de comparer, d’analyser et d’établir des modèles » ; - de construire une interprétation possible qui respecte la validité interne et ouvre à une réflexion théorique288.

En somme, le choix d’une recherche qualitative dans un domaine comme le management stratégique est justifié dans la mesure où les acteurs ont un impact fort sur la valeur des données, notamment dans leur prise de décision ou l’expression de leurs idées. Son utilisation suppose une certaine rigueur dans l’application de la méthode, que ce soit dans la collecte ou dans le traitement des données, tout en veillant à une transparence maximale des techniques et des modalités d’enquête utilisées. Le chercheur est essentiellement l’outil principal de l’étude289.

2.3.3. Le moment de l’observation

L’analyse des organisations peut se faire à un moment précis (analyse statique), à plusieurs moments dans le temps (analyse d’une période à l’autre) ou sur une durée bien déterminée (analyse dynamique). FORGUES B. et VANDANGEAON-DERUMEZ I. [2003], affirment qu’il est courant d’opposer les analyses dites « longitudinales » aux études dites « transversales ». Les auteurs poursuivent en indiquant que les premières sont « des analyses pour lesquelles

288 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 21-22. 289 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p 21-22. 172 les données recueillies concernent au moins deux moments distincts, alors que les autres sont des études pour lesquelles les données recueillies concernent un instant donné »290. Autrement dit, la recherche peut être instantanée c’est-à-dire qu’ « elle porte sur un ensemble de faits qui se sont produits à un moment donné. Il s'agit de la photo au moment choisi de l'organisation sur le sujet retenu. Il est encore question de perspective synchronique ou de coupe transversale ou statique »291. La recherche peut être aussi longitudinale, en d’autres termes, « elle consiste en l'analyse d'un nombre donné d'observations repérées sur une période continue plus ou moins longue. Cette approche correspond au film de l'organisation et non plus à une photo ou à des photos successives pour comprendre comment change la structure suivie sur le sujet de la recherche. Ce type d'investigation est encore appelé analyse diachronique et nécessite une présence forte dans l'organisation »292. Au regard de notre choix concernant les MDM qui reprend l’évolution des clubs tout au long de leur existence, nous avons choisi logiquement d’appliquer une recherche longitudinale, qui met en avant les séquences des événements. Cette méthode qui facilite la confection de modèles de croissance et de transformation conçoit l’organisation dans sa globalité. Elle souligne, sur la période analysée, les « moments clés et les périodes critiques »293. Enfin, elle se doit de disposer d’un caractère longitudinal dans la mesure où le procédé de recueil de données utilisé, c’est-à-dire la retranscription de l’évolution des clubs sportifs par la mémoire des acteurs », constitue lui-même une caractéristique représentative d’une étude longitudinale. En effet, des séries d’informations réalisées à partir de données historiques font partie des recherches longitudinales.

Il convient ensuite de préciser les caractéristiques de notre étude, autrement dit la stratégie d’accès aux données mises en place dans cette

290 FORGUES B. et VANDANGEAON-DERUMEZ I., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p 423. 291 PATUREL R. (1998), « Panorama général et synthétique des thèses françaises en management stratégique (1996-1997) », travail analysant 149 thèses, Journée Recherche en Gestion de la FNEGE focalisée sur « Le « doctorat en Sciences de Gestion », Université Paris-Dauphine, le 23 Octobre, actes p. 28 à 58. 292 PATUREL R. (1998), « Etat des thèses en management stratégique – 1996-1997 », Travail portant sur 131 thèses, XIV Journées des IAE, actes du colloque, volume sur l’état des thèses, 28 et 29 Avril, p. 1 à 37. 293 MINTZBERG H. et WESTLEY F. (1992), « Cycles of organizational change », Strategic Management Journal, vol.13, p 39-60. 173 recherche. Celle-ci peut, en effet, être réalisée par des « études de cas » ou par « l’analyse de cas multiples »294. 1. La première s’intéresse à un ou quelques exemples dans l’optique de réaliser une étude approfondie de l’unité économique. Beaucoup de données en ressortent, mais la généralisation des résultats est périlleuse et elle fait souvent objet de débats. Dans un échantillonnage intra-site, « le cas qualitatif peut être défini très largement et se composer d’individus, de rôle détenus, de groupes, d’organisations, de programmes, de cultures »295.

2. La seconde est une recherche dite « inter-sites ». Elle suppose la mise en corrélation, la confrontation des différents cas étudiés dans une optique de généralisation des résultats. Cependant, les observations sont moins riches et les variables étudiées moins nombreuses. « L’échantillonnage multi-sites renforce la validité des résultats296. L’examen d’une série de cas similaires et contrastés permet de comprendre les résultats obtenus, en les caractérisant par les questions fondées sur le « comment » et « où » et, si possible, sur le « pourquoi » de son fonctionnement. L’échantillonnage multi-sites, qui comporte des aspects itératifs, doit toutefois être construit avec le plus grand soin, avec le cadre d’un échantillonnage explicite, guidé par les questions de recherche et le cadre conceptuel – pré-spécifié ou émergent. Un échantillonnage aléatoire est ici inutile297.

Notre objectif étant de définir un cadre conceptuel, nous avons opté pour l’analyse de cas multiples. Cependant, pour confectionner un nouveau « modèle de référence significatif », le choix des variables à analyser s’est avéré délicat et sans doute contestable. Nous avons réalisé une étude poussée du premier club de hockey sur glace du championnat élite, pour identifier ses variables représentatives. Pour ce cas particulier, nous avons collecté les

294 HUBERMAN A.M. et MILES M.B. (1991), « Analyse des données qualitatives, recueil de nouvelles méthodes », Bruxelles, De Boeck-Wesmael, 480 p. 295 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p61-63. 296 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p61-63. 297 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p61-63. 174 données, à intervalles réguliers, comme l’impose une étude longitudinale. Cette analyse a servi de « modèle de base » dans la définition des caractéristiques essentielles de l’évolution des clubs dans leur capacité à utiliser les enseignements des sciences de gestion.

Il convient aussi de préciser le type de collecte des informations de l’étude longitudinale. En effet, il n’est pas toujours possible d’obtenir des informations sur la simple observation d’une période donnée, d’autant que celle-ci s’étend sur un nombre d’années plus ou moins important. Il est difficile et sans doute inutile de retracer un historique conséquent, car ce qui nous intéresse, ce sont les points d’inflexion et les points de rupture. Nous avons été dans l’obligation d’obtenir l’information rétrospectivement auprès d’acteurs ou de témoins des évolutions rencontrées par le club. La collecte est dite « collecte rétrospective fondée sur la perception des dirigeants ». Notre étude se fonde partiellement sur la mémoire des dirigeants de clubs, ainsi que sur leurs avis quant à l’évolution des clubs298. De nombreux chercheurs sur les MDM ont suivi ce procédé avec une certaine efficacité299. Cependant, il n’est pas exempt de biais. WOLFE et JACKSON [1987]300 le démontrent dans une étude dans laquelle ils révèlent notamment que deux mois après une décision stratégique collégiale au sein d’une entreprise, les observations des acteurs étaient sensiblement différentes. La variable « temps » a donc une influence sur les perceptions. Pour que cette conduite ne soit pas trop préjudiciable à notre recherche, nous nous sommes efforcé, pour chacune des informations, de motiver nos interlocuteurs à préciser les informations fournies en cherchant sans cesse une remise en situation systématique du contexte d’alors. Lorsqu’une information semblait peu fiable, nous avons cherché confirmation par des questions croisées qui ont permis de tester la cohérence d’une partie des réponses. Néanmoins, le temps se

298 Nous avons retracé, avant toute interview, un historique complet du club par le canal de diverses sources disponibles (médias et lectures notamment). Cette possibilité est particulière au secteur sportif puisque des informations peuvent être obtenues sans cesse grâce aux médias, chose pas toujours possible pour les entreprises. 299 SALTER M. S. (1970), « Stages of corporate development », Journal of Business Policy, N°1, p 23-37 ; CHURCHILL et LEWIS (1983), « Les cinq stades de l’évolution d’une P.M.E.”, Harvard l’Expansion, p 51-63 ; MILLER D. et FRIESEN P. H. (1984), « A longitudinal study of the corporate life cycle », Management Science, vol.30, N°10, p 1160-1183. 300 WOLFE J. et JACKSON C. (1987), « Creating models of the strategic decision making process via participant recall : a free simulation examination », Journal of Management, vol. 13, N°1, p 122-135. 175 présente aussi comme une variable permettant une prise de recul nécessaire à une analyse plus construite, plus sensée et de meilleure qualité301. Faire appel à la mémoire des acteurs conduit, en effet, à fonder notre analyse sur une opinion qui leur est propre. L’avis des intéressés ne constitue qu’une manière d’analyse de l’évolution du club. Nous avons été contraint de nous appuyer sur leurs interprétations. Nous avons préféré prendre en compte la manière dont les dirigeants de clubs percevaient les évolutions puisqu’ils en étaient les acteurs principaux ou des observateurs aux heures des choix antérieurs. Ce choix méthodologique est souvent privilégié dans le management stratégique. Il s’agit, pour le chercheur, non pas d’évaluer ou de critiquer les pratiques observées, mais de les comprendre. L’analyse stratégique offre une place prépondérante au vécu des participants. Il est souvent difficile pour un chercheur de comprendre la dynamique à laquelle sont confrontés les managers impliqués dans un effort de changement stratégique. Or, il faut produire des résultats qui soient pertinents par rapport à la théorie et à la pratique du management stratégique. « Le sentiment prévaut que l’analyse des perceptions du décideur présente plus d’intérêt que des réponses rationalisées, ce qui souligne la nécessité du recours à des enquêtes en profondeur »302.

En somme, notre stratégie méthodologique consiste en une recherche longitudinale fondée sur une collecte rétrospective de la perception des dirigeants mettant en évidence la multiplicité des cas. Il convient, désormais, de connaître les relations entre le chercheur et son terrain.

2.3.4. Le type de recherche

Il existe plusieurs types de recherche possibles comme la recherche- intervention, la recherche extérieure à l’organisation ou encore la recherche clinique. Nous avons opté pour cette dernière qui consiste à analyser le fonctionnement de l'organisation en son sein afin de recueillir les données indispensables pour mener son investigation. Ce type d'observation n'implique

301 GLICK et al. (1990), « Studying changes in organizational design and effectiveness : retrospective event histories and periodic assessments », Organization Science, vol.1, N03, p 293-313. 302 MARCHESNAY M. (1993), « PME, stratégie et recherche », Revue française de gestion, p 69-77. 176 pas obligatoirement que le chercheur soit immergé dans l'organisation. Il peut s'agir concrètement d'entretiens approfondis de durée substantielle303. Ainsi, pour relater l’évolution des clubs sportifs, nous avons jugé nécessaire de rencontrer directement leurs dirigeants. La source média n’a pas été abandonnée non plus, mais nous lui avons tout de même préféré la construction d’une opinion personnelle par l’intermédiaire d’entretiens semi directifs et de l’observation directe. Tout questionnaire « fermé » a été autant que possible évité de notre investigation compte tenu du caractère trop réducteur de l’outil. Nous avons suivi la méthode des entretiens qualitatifs proposé par l’ISEOR. Elle applique plusieurs principes304 : - les entretiens sont le plus souvent individuels, - ils durent entre 1h30 et 3H00, - ils sont conduits à l’aide d’un guide d’entretien préétabli par l’intervenant du thème de l’étude.

Ce guide d’entretien présente « une liste de thèmes et sous-thèmes, qui sont à aborder au cours de l’entretien, dans un ordre quelconque ». BAUMARD P., DONADA C., IBERT J., XUEREB J.-M. [2003] confirment que, pendant l’entretien semi-directif, « le chercheur applique les mêmes principes, à la différence qu’il utilise un guide structuré pour aborder une série de thèmes préalablement définis »305. En ce qui concerne cette étude, les entretiens ont duré régulièrement 2 heures, mais certains ont pu atteindre 4 heures. Une dizaine d’interlocuteurs a aussi été interrogée plusieurs fois, en vue de préciser les informations récoltées ou d’en recueillir de nouvelles. Nous avons fait le choix de poser des questions ouvertes à nos interlocuteurs (Encadré n°4). Il existe différentes manières de poser des questions ouvertes. STRAUSS et CORBIN [2004] distinguent 4 types de questions : 1. les questions sensibilisantes orientent le chercheur vers ce que les données pourraient indiquer ;

303 PATUREL R. (1998), « Panorama général et synthétique des thèses françaises en management stratégique (1996-1997) », travail analysant 149 thèses, Journée Recherche en Gestion de la FNEGE focalisée sur « Le « doctorat en Sciences de Gestion », Université Paris-Dauphine, le 23 Octobre, actes p. 28 à 58. 304 SAVALL H. et ZARDET V. (2001), « Maîtriser les coûts et les performances cachés », le contrat d’activité périodiquement négociable, 3ème Edition, Economica (Prix de Management stratégique, Harvard-L’Expansion), 405 p., p 266-268. 305 BAUMARD P., DONADA C., IBERT J., XUEREB J.-M., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p235. 177

2. les questions théoriques permettent aux chercheurs d’analyser des processus, de percevoir les variations et d’opérer des relations entre les concepts ; 3. Les questions de nature plus pratique et plus structurelles fournissent une direction pour l’échantillonnage et elles assistent au développement de la structure de la théorie en train d’évoluer ; 4. Les questions d’orientation guident les entretiens, les observations et leurs analyses, en relation avec d’autres documents306.

Encadré n°4 – Guide d’entretien pour l’utilisation des MDM

Guide d’entretien

Approche exploratoire : recherche à explorer d’un phénomène mal connu questions ouvertes qui font appel au ressenti de l'analyste. L’intérêt porte sur les avis de chacun concernant la question posée.

Sur quoi porte la recherche ? Il est difficile de comparer un club associatif de hockey sur glace et un club de football de ligue 1 ou un club de division d’honneur et un club de haut niveau. Ce qui nous intéresse, c’est de déterminer les étapes par lesquelles le club sportif, quel qu’il soit, passe pour arriver là où il en est. En retraçant ses choix et son évolution, il est possible de définir des stades de développement de manière à situer les clubs dans leur courbe de vie.

L’hypothèse principale est qu’il existe des schémas généraux que l’on retrouve d’un club à un autre quelle que soit la discipline sportive à laquelle il appartient. L’étude de leur évolution met en évidence des stratégies et de nouvelles organisations et conceptions sociales du sport. Il s’agit de retracer les différentes évolutions rencontrées par le club, de sa création à aujourd’hui.

306 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 105-106. 178

Toute information importante est à révéler qu’elle soit sportive, économique, sociale ou politique. Les critères sont les suivants : - les évolutions de la taille ; - le niveau de compétition ; - Les organes de direction et de gestion (création de postes, types de postes,...) ; - les évolutions en termes d’organisation fonctionnelle (centralisée/décentralisée, création de pôles, système de contrôle, style de management...) ; - la communication ; - la professionnalisation (statut, système de motivation, système de rémunération, relation avec bénévolat...) ; - l’état des activités commerciales en termes de produits mais aussi de marchés ;

- les orientations stratégiques (popularité médiatique, situation géographique, implication dans la vie communautaire, agrandissement du stade, ...) ; - la composition de l’actionnariat.

Pour chaque information, il est demandé quand, pourquoi, comment ce changement est intervenu et quelles en sont les conséquences ? On sait qu’il existe plusieurs manières d’évoluer : - soit par petites touches, lesquelles à long terme créent une réelle différence, - soit par une transformation radicale qui révolutionne le club.

Les questions étaient posées en réaction aux réponses obtenues. De la même manière, l’observation était de type « non-participante » et « non- systématique » (ou « flottante »). A ce sujet, SAVALL H. et ZARDET V. [2001] révèlent que « quelle qu’en soit la forme, l’observation directe doit avant tout être organisée pour produire des informations pertinentes et fiables »307. Le chercheur peut recueillir toute forme d’information, tout indicateur disponible,

307 SAVALL H. et ZARDET V. (2001), « Maîtriser les coûts et les performances cachés », le contrat d’activité périodiquement négociable, 3ème Edition, Economica (Prix de Management stratégique, Harvard-L’Expansion), 405 p., p 271. 179 allant même jusqu’à l’étude des gestes pendant la conduite d’entretien. Il n’adopte pas pour autant le même dispositif de collecte et d’analyse pour chaque interview. Les éléments observés ne sont pas étroitement définis au préalable308.

Nous avons cherché à obtenir des conditions d’entretien semblables d’un club à l’autre, sur la base d’une marge de manœuvre importante. Le guide d’entretien permet effectivement de constituer une trame, mais celle-ci n’est pas forcément respectée, les questions pouvant être posées selon l’instinct du chercheur par rapport aux informations fournies par l’interlocuteur. La seule partie que nous retrouvions à l’identique dans tous nos entretiens est l’introduction dans la mesure où il convenait d’expliquer le contexte, le cadre dans lequel était organisé l’entretien, en respectant notamment les règles élémentaires de confidentialité et en obtenant les précisions attendues concernant les réponses données. Nous avons toujours commencé par la même interrogation. Il s’agissait de demander aux personnes interrogées de présenter l’historique du club, en mettant en exergue ses moments importants que ce soit dans les domaines sportifs, structures, organisationnels, sociaux ou politiques. Nous nous sommes efforcé de mettre en place un rituel, celui de demander à notre interlocuteur de se présenter et en même de se situer dans la structure. Cette question a souvent été accompagnée par la mise à disposition d’un organigramme afin de comprendre la manière par laquelle le club était structuré. Nous avions, de ce fait, un aperçu révélateur de la situation du club. Cette étape de l’entretien permettait aussi de dégager une atmosphère de confiance réciproque par notre intérêt pour l’activité propre de notre interlocuteur.

Le déroulement de l’entretien consistait à poser des questions relatives aux étapes que leur club sportif avait traversées, mais aussi d’indiquer les changements importants rencontrés dans chaque stade et d’en expliquer les raisons. Nous avons porté une attention toute particulière quant à la neutralité des questions, en essayant de ne pas orienter les réponses. Une seule fois, l’entretien terminé notre interlocuteur a été interrogé de manière plus directive, dans la mesure où il n’avait pas abordé un élément important.

308 BAUMARD P., DONADA C., IBERT J., XUEREB J.-M., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p 240. 180

Le climat de confiance avec ses interlocuteurs est un élément auquel le chercheur doit prêter la plus grande attention, dans la mesure où les réponses seront différentes selon la qualité de la conduite de son interview. SILVERMAN [1993]309 parle de profondeur de l’analyse. Celle-ci dépendra en partie de l’atmosphère amicale ou froide créée entre le chercheur et ses interlocuteurs. Comme l’explique CALLEDE [1987]310, le sport est un monde à part entière. En d’autres termes, ses valeurs, ses mœurs, ses règles, son langage, sa culture sont des éléments que tous « non-pratiquants » connaissent peu. Ils peuvent différer selon les disciplines sportives, mais beaucoup de ces éléments sont identiques. Nous nous sommes présenté comme membre de la famille des « sportifs de haut niveau », puisque nous pouvions jouer cette carte. Ainsi, le langage était souvent adapté à nos interlocuteurs de manière à obtenir la plus grande précision dans leurs réponses. Le dialogue a souvent été amical311. Nos interlocuteurs n’ont eu aucun mal à comprendre le langage académique proposé dans la mesure où notre échantillon était constitué d’interlocuteurs cultivés et instruits. Le climat de confiance s’est aussi installé, en partie du fait des recommandations reçues au préalable de la part de dirigeants fédéraux, avant de visiter le site. Rappelons que nous avons fait appel aux responsables d’instances fédérales pour rencontrer les clubs sportifs de leurs disciplines ou que nous nous recommandions de dirigeants que nous avions rencontrés au préalable. Fréquemment, nos interlocuteurs avaient été avertis de l’intérêt de ces rencontres. Un club sportif trouve une partie de sa légitimité par l’intermédiaire de son historique. Or, les clubs que nous avons rencontrés appartenaient à l’élite dans leur discipline respective. Il n’était donc pas difficile de présenter les performances et les déboires de ces clubs, « les hauts et les bas » rencontrés, pour expliquer leur état actuel. L’entretien prenait souvent plus de temps que prévu et il nous fallait parfois revenir sur les interrogations concernant les périodes de doute du club, devant des interlocuteurs plutôt engagés dans la présentation « du sentier de la gloire ». On apprend toujours autant dans l’échec que dans la réussite. MILES et HUBERMAN [2003] décrivent ces comportements

309 SILVERMAN D. (1993), « Interpreting qualitative data, methods for analysing talk, text and interaction », London : Sage, 224 p. 310 CALLEDE J. P. (1987), « L’esprit sportif – Essai sur le développement associatif de la culture sportive », Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, Bordeaux, 194 p. 311 Il est même arrivé de tutoyer certains de nos interlocuteurs, à leur demande, pour accroître ce climat de confiance. 181 comme suit : « Ce que vous « voyez » dans une transcription est inévitablement sélectif. […] Les informants eux-mêmes sont sélectifs, parfois délibérément, parfois involontairement. Ils peuvent ainsi cacher des aspects importants de leurs comportements et de leurs perceptions sans que le chercheur en soit conscient »312. Il s’agissait parallèlement d’éviter toute influence excessive de notre part, en conservant un comportement professionnel en réponse aux propos de nos interlocuteurs. Le chercheur doit à la fois respecter la liberté de parole », mais, en même temps, il ne doit jamais perdre de vue l’intérêt de son sujet au regard des informations fournies et cachées, volontairement ou non par son expert.

Enfin, il s’agit de clarifier la méthode que nous avons mise en place dans la collecte de données. Comme le souligne KVALE [1988], « au cours d’un entretien non directif, une grande latitude d’interprétations est rendue possible » 313. L’interlocuteur découvre de « nouvelles relations et de nouveaux modèles » au cours de l’entretien, notamment lorsque le chercheur, en résumant, « condense » et « interprète ce flux de signification ». Les données ne sont pas « collectées », mais « co-produites ». Mais, il en va de même pour l’auteur lors d’une question « plus structurée et centrée ». Pourtant, pour nombre de chercheurs en recherche qualitative, il est essentiel de mémoriser les données collectées de façon exacte, sans qu’aucune interprétation du chercheur n’intervienne. L’utilisation du magnétophone pourrait s’avérer adéquate pour conserver l’intégralité des propos de nos interlocuteurs. Néanmoins, comme l’expliquent GHIGLIONE et MATALON [1978]314, l’utilisation du magnétophone peut bloquer certains interlocuteurs dans leur discours. Ainsi, beaucoup d’élément manquent de profondeur ou sont complètement écartés. Compte tenu de la médiatisation du sport et des clubs que nous avons rencontrés, nombre de nos interlocuteurs n’ont pas souhaité être enregistrés de crainte que les informations recueillies « transpirent ». Nous avons été contraints d’effectuer une prise de note intégrale. Celle-ci contient à la fois ce qui a été dit, mais aussi la gestuelle, des

312 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p110. 313 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p72. 314 GHIGLIONE R. et MATALON B. (1978), « Les enquêtes sociologiques », Paris, Armand Collin, 301 p., p. 142. 182 tableaux, des organigrammes,... Il est donc difficile de tout reprendre in extenso. C’est pourquoi MILES et HUBERMAN [2003] encouragent le « chercheur à réaliser ses transcriptions dans un délai maximal de 24 heures après s’être rendu sur le terrain »315. La retranscription est essentielle. De cette manière, les données brutes « sont soumises à un traitement supplémentaire avant l’analyse. Les notes de terrain doivent être dactylographiées ou dictées pour être converties en « transcriptions » […] Une transcription permet, en général, de retrouver une partie du contenu manquant, la lecture des notes remettant en mémoire certains ponts évoqués alors mais non notés »316. La méthode de recueil des données suivie consiste en « une prise de note par l’intervenant qui se veut aussi exhaustive que possible ». Il est question de 10 à 20 pages de prises de notes manuscrites. L’exploitation des données se fonde sur « la mise en évidence de phrases-témoins, c’est-à-dire de phrases dites par les acteurs, selon leur vocabulaire et choisies pour leur caractère illustratif et représentatif »317. Les phrases-témoins sont donc des « phrases extraites d’entretiens, sans modification de la formulation sous réserve d’erreurs d’expression ou, parfois, de mots par trop argotiques ou injurieux qui sont alors traduits pour limiter le choc culturel »318.

2.3.5. L’interlocuteur pertinent

Le choix de l’interlocuteur est capital pour la poursuite d’une recherche. Selon son statut au sein d’une organisation, il doit disposer d’un certain nombre de données. De plus, selon son positionnement dans l’organisation, il sera plus ou moins en mesure de communiquer ces informations. Il ne faut donc pas se tromper dans son choix pour que la recherche soit pertinente. MORSE [1994] dans sa définition du « bon répondant » donne plusieurs éléments intéressants comme la connaissance et l’expérience recherchée pour l’analyse, la capacité à connaître et relater les informations, ou encore le temps qu’il peut bien octroyer, la volonté de répondre et la clarté dans les réponses. Il convient donc de réfléchir à l’interlocuteur le plus propice à notre recherche. Au premier abord,

315 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p106. 316 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p102-103. 317 SAVALL H. et ZARDET V. (2001), « Maîtriser les coûts et les performances cachés », le contrat d’activité périodiquement négociable, 3ème Edition, Economica (Prix de Management stratégique, Harvard-L’Expansion), 405 p., p 268. 318 SAVALL H. et ZARDET V. (2001), ibid., p 274. 183

étant donné l’objectif de notre recherche, nous pensons que l’interlocuteur le mieux placé pour relater la structuration des clubs sportifs dans sa globalité est le dirigeant autrement dit, le Président, car il a une vision globale des faits. De plus, il n’a pas d’influence de part et d’autre puisque qu’il n’a de comptes à rendre à personne dans le cadre de cette enquête. Il est plus libre dans son discours. Cependant, il faut préciser que nous ne nous sommes pas intéressé uniquement au discours du président car, souvent élu, il n’est pas toujours représentatif et connaisseur de l’histoire du club qu’il dirige. Rappelons que les clubs ont été construits sur les bases des statuts de l’association de 1901 laissant la direction à des volontaires élus, appelés bénévoles, dont l’intérêt n’a jamais été, au moins officiellement, d’ordre lucratif. Une fois le club professionnalisé, les dirigeants bénévoles ont souvent dû faire face à une réalité sociétale, à savoir le besoin de quitter la direction pour des raisons politiques, de compétences et d’autres encore. Ainsi, ces bénévoles ont été relégués à des tâches subalternes. Il n’empêche qu’ils sont souvent plus en mesure de relater l’évolution du club que leur successeur au poste de président. Leur attachement au club fait d’eux des cibles privilégiées, même s’ils n’occupent plus le poste de président. Rappelons, en outre, que la rotation des présidents dans les clubs de certaines disciplines sportives oblige à se tourner vers d’autres interlocuteurs. Cependant, il convient de préciser que si l’ancienneté dans le club a son importance dans la sélection des répondants, ces derniers se devaient de participer à la gestion des clubs sportifs dans le staff dirigeant. Le choix du Président, du Directeur général (DG), du Directeur administratif et financier (DAF) ou des membres du Conseil d’Administration (MCA) s’est imposé. Il convient d’ajouter que les présidents jouent un rôle de plus en plus tourné vers l’extérieur (commanditaires ou collectivités locales, par exemple), laissant la gestion interne de la structure à son ou ses directeurs.

Il est aussi nécessaire de déceler la personne la plus à même de nous répondre. Dans ce dessein, nous avons utilisé le réseau existant entre clubs sportifs ainsi que les instances nationales. Les championnats étant stables, ils constituent des microcosmes dans lesquels tout le monde se connaît et se reconnaît. Ainsi, une fois l’entretien effectué, nous avons interrogé notre interlocuteur sur les personnes avec lesquelles il était en mesure de nous mettre en relation ainsi que les personnes les plus aptes à répondre à nos questions de 184 recherche. Nous avons opté pour des rendez-vous directs auprès des instances fédérales (fédérations et les ligues des différentes disciplines étudiées). Nous avons alors rencontré les dirigeants des instances sportives de manière à obtenir une vue globale de l’ensemble des clubs et, pour nous orienter, pour chaque club, vers la personne la plus compétente pour nous répondre. Cette stratégie est d’ailleurs préconisée par MILES et HUBERMAN (2003) : « Il est également important de travailler un peu à la périphérie, de s’entretenir avec des personnes qui ne sont pas au centre du phénomène mais qui en sont proches, des personnes qui n’ont plus de rôle déterminant à jouer, des dissidents, des renégats, des excentriques »319. Cette stratégie s’est révélée opportune, car une fois ces dirigeants nationaux rencontrés, leurs recommandations auprès des clubs sportifs de toutes sortes nous ont permis d’ouvrir certaines portes difficilement accessibles. Leurs propos étant toujours explicités, nous avons pu rencontrer les personnes les plus compétentes. Si l’ancienneté constituait un caractère déterminant, le turnover des équipes dirigeantes au sein des clubs empêchait de rencontrer un « interlocuteur témoin » de toutes les transformations des clubs. L’historique d’un club est, en effet, souvent long et en relation avec son niveau de compétition. Les clubs évoluant au plus haut niveau font fréquemment partie des clubs les plus vieux de leur discipline. Les transformations ne peuvent être connues par une seule personne dans la mesure où l’historique d’un club dépasse le siècle. Cependant, la structure des clubs sportifs n’a pas rencontré de ruptures significatives jusque dans les années 1980. Les évolutions les plus notables en matière de structuration ont débuté seulement au cours de cette décennie. Il n’empêche que 30 ans séparent le début des transformations notables et notre époque. Il est alors difficile de retrouver un interlocuteur ayant vécu l’ensemble des transformations. Par contre, l’historique d’un club se doit d’être connu puisque qu’il constitue sa vitrine. Autrement dit, les informations sur lesquelles se fondent nos interlocuteurs font l’objet d’un consensus avant même d’être communiquées. Un club est une organisation publique dans laquelle de nombreuses personnes participent en tant que bénévole ou spectateur. De ce fait, l’historique est toujours d’actualité et connu de tout l’environnement. Il est

319 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p70. 185

évalué malgré lui et ne peut, de ce fait, être complètement falsifié. Ajoutons que les personnes interviewées ont pour beaucoup connu les transformations les plus notables du club, les autres transformations étant plus négligeables. Si des informations méritaient d’être explicitées, nous avons cherché à rencontrer d’autres dirigeants du club pour les compléter. Les points de vue collectés n’ont jamais créé de distorsion avec ceux des précédents interlocuteurs et ils se sont toujours complétés comme dans un véritable puzzle. Les recoupements n’ayant jamais fait ressortir d’incompatibilités, nous pensons que les biais n’en sont que moindres dans la retranscription de l’évolution des clubs sportifs étudiés. La triangulation des sources d’information est particulièrement intéressante pour mettre en évidence les plages d’erreur dans l’information reçue par plusieurs sources différentes. Si le choix d’interroger plusieurs personnes d’un même club engendre un sentiment de perte de valorisation de chaque interlocuteur320 et, de ce fait, une probabilité plus importante de refus pour un rendez-vous, nous avons préféré prendre ce risque lorsque l’information manquait de clarté et méritait une seconde entrevue dans l’optique de compléter ou de préciser les informations disponibles.

En somme, au regard de l’ensemble des positions prises, de la méthodologie de recherche et de l’objet étudié, nous sommes en mesure désormais de formuler notre question de recherche :

Questions de recherche : « Au regard des évolutions différenciées des clubs vers la professionnalisation de leurs activités et de leur intégration dans l’économie de marché, est-il possible d’identifier des schémas généraux d’évolution qui leur soient applicables et de mettre en évidence des stades de développement homogènes qui soient utiles à leur gestion ? ».

320 GLICK et al. (1990), « Studying changes in organizational design and effectiveness : retrospective event histories and periodic assessments », Organization Science, vol.1, N03, p 293-313. 186

3. Le recueil des données relatives aux clubs sportifs

Après avoir repris notre méthode de travail, nous dévoilons dans cette partie « l’échantillon » de notre terrain. Le degré de développement de certains clubs nous a imposé leur choix. Nous avons utilisé tous les réseaux possibles pour joindre des organisations sportives les plus judicieuses à analyser pour répondre à notre question de recherche.

3.1. Les caractéristiques de l’étude de terrain Il convient de délimiter le terrain, de définir les types de clubs et le terrain analysés.

3.1.1. Le périmètre du terrain

Lorsqu’une recherche qualitative se met en place, il convient de choisir « l’échantillon » sur lequel va porter l’analyse. Ce n’est pas un « échantillon » au sens statistique du terme, il est fondé d’abord sur la compétence reconnue des interviewés. Dans ce contexte, le terme échantillon est susceptible de créer une situation de « flou conceptuel » qu’il convient de lever. C’est pourquoi nous l’appellerons « échantillon qualitatif », car il est fondé sur des choix qui paraissent a priori subjectifs, mais qui, dans le sport de haut niveau dont la structure et l’évolution ne sont pas assimilables à une loi normale, sont empiriquement significatifs à un moment donné, eu égard à l’influence ou au rôle des composantes des personnes interrogées. Selon STRAUSS et CORBIN [2004], il est nécessaire de « construire l’échantillonnage selon des concepts émergents, afin d’explorer l’étendue des dimensions ou la variété des conditions par l’entremise desquelles les propriétés des concepts varient »321. Pour MILES ET HUBERMAN [2003], « l’échantillonnage en recherche qualitative implique deux actions qui parfois s’opposent. En premier lieu, il faut délimiter le champ de l’étude, définir les caractéristiques des cas à étudier en fonction du temps et des moyens dont vous disposez, directement liés à vos questions de recherche qui

321 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p101. 187 vont probablement comprendre des exemples de ce que vous voulez étudier. Deuxièmement et dans le même temps, il vous faut créer une structure qui vous aide à découvrir, confirmer ou qualifier les processus fondamentaux ou les construits sous-jacents à votre étude »322. Ils complètent en ajoutant que « la représentativité théorique, immédiate ou plus progressive » est recherchée par l’échantillonnage de type qualitatif « comme dans le cas de la théorie enracinée dans les faits »323. Certains adeptes de l’analyse qualitative proposent généralement le chiffre de quinze à trente cas324. Au-delà de ce seuil, les autres cas n’apportent que très peu d’informations supplémentaires et de fiabilité. Néanmoins, si analyser vingt à trente cas, selon R. GHIGLIONE et B. MATALON [1978], permet de déceler les éléments phares de l’analyse ainsi qu’une véritable classification, cette procédure peut aussi s’avérer quantitativement insuffisante et laisser subsister un besoin de matériau en vue de mettre en évidence les relations entre ces éléments et dégager une typologie. Il n’est donc pas nécessaire de déterminer au préalable un nombre fixe de cas. Il faut simplement interrompre ses recherches lorsque les nouveaux terrains n’apportent plus d’éléments inhabituels. Ainsi, pour déterminer la taille minimale, il suffit « d’obtenir une confiance satisfaisante des résultats »325. Pour obtenir cette confiance, I. ROYER et ZARLOWSKI [2003] déterminent deux principes qu’ils appellent la « saturation » et la « réplication ». En ce qui concerne la réplication, le cas est sélectionné « parce qu’on suppose trouver des résultats similaires (cas de réplication littérale) » ou, à l’inverse, parce qu’il est systématiquement en mesure « de conduire à des résultats différents (cas de réplication théorique) »326. YIN [1990] révèle que « lorsque les différences mises en évidence entre deux théories sont importantes ou lorsqu’on ne souhaite pas un degré de certitude important » deux ou trois cas de réplication littérale suffisent. Par contre, au moins cinq à six cas de réplication sont recommandés lorsque les différences sont seulement subtiles ou si l’on souhaite un degré de certitude plus

322 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p59. 323 Ibid. p. 59. 324 GHIGLIONE et MATALON (1978), p 50 ; BARDIN (1980), p 176 ; HUBERMAN et MILES (1991), p 22 ; etc. 325 ROYER I. et ZARLOWSKI, dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2., 586 p., p 215. 326 ROYER I. et ZARLOWSKI, dans THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p 215. 188 important »327. Concernant, la saturation théorique, elle n’est atteinte que « lorsqu’on ne trouve plus d’information supplémentaire capable d’enrichir la théorie » 328. Estimer que l’on atteint la saturation théorique est une tâche à laquelle seul le chercheur lui-même peut répondre, comme témoin et acteur privilégié d’un phénomène social à l’étude.

Au regard de ces recommandations, nous avons choisi, dès le départ de l’étude, d’analyser une quarantaine de clubs sportifs pour plusieurs raisons : - la première raison s’inscrit dans le besoin de rechercher une certaine présence de la discipline elle-même. Dans ces conditions, nous nous sommes fixé comme limite inférieure le choix de trois composantes par disciplines sportives ; - ensuite, il est intéressant d’analyser les clubs sportifs les plus structurés et médiatisés, mais aussi de tenir compte des clubs situés à des niveaux de compétition moindre pour obtenir un panel plus large des structurations existantes. Nous avons, de ce fait, intégré aussi quelques clubs de division 2 pour faire un parallèle avec les clubs de division 1 ; - il existe, enfin, de fortes hétérogénéités des clubs au sein d’un même championnat et nous avons voulu en comprendre l’intensité. Ainsi des clubs prestigieux, médiatisés et susceptibles d’être rencontrés ont été approchés, avec l’aide souvent des Fédérations ou des Ligues. À part l’Olympique Lyonnais, nos demandes ont été reçues positivement329.

Notre échantillon ne considère que les clubs de haut niveau évoluant dans les cinq disciplines sportives présélectionnées. Nous avons choisi notre échantillon par rapport à la notoriété des clubs, leur médiatisation, leurs performances sportives ou économiques ou encore leur histoire. Notre « échantillon qualitatif » a été mis en place sur la base d’une sélection de cas à partir de leur réputation, autrement dit « les cas sont choisis d’après la recommandation d’un expert ou d’un informateur clé »330. Nous avons aussi

327 cité par ROYER I. et ZARLOWSKI, dans THIETART R.-A. et coll. (2003 ), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2., 586 p., p215-216. 328 ROYER I. et ZARLOWSKI, dans THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p.216. 329 L’absence de l’O.L. n‘est pas très dommageable, tant ce Club et son Président sont médiatisés. Il existe donc une littérature abondante sur le sujet, qui fournit des informations précieuses pour notre étude. 330 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p60-61. 189 choisi des clubs ayant connu le plus haut niveau dans leurs disciplines, généralement bien structurés et ayant vécu parfois les affres d’une relégation pour raisons sportives ou financières. Ainsi, un des clubs analysés a conservé une structure hors de proportion avec le niveau de compétition proposé, car après sa rétrogradation et un dépôt de bilan, ses nouveaux dirigeants souhaitaient « remonter » rapidement dans l’élite331. Son retour au stade de développement précédent l’incite à retrouver les « ors » passés. L’élaboration d’un cadre conceptuel « oblige le chercheur à être sélectif, à décider quelles dimensions sont les plus importantes, quelles relations seront vraisemblablement les plus significatives et, en voie de conséquence, quelles informations devront être collectées et analysées »332. L’échantillon est donc orienté et non pas pris au hasard. La définition initiale de l’univers à étudier est relativement limitée. Les processus sociaux possèdent une logique et une cohérence qui ne peuvent être mis en évidence en cas d’échantillonnage aléatoire d’événements. Selon I. ROYER et ZARLOVSKI [2003], il existe plusieurs méthodes de sélection d’échantillon selon le mode d’inférence, à savoir « l’échantillon probabiliste », « l’échantillon par choix raisonné », « l’échantillon par quotas », « l’échantillon de convenance »333. Notre échantillon est de type raisonné. Il permet de choisir de manière réfléchie les éléments de l’échantillon et de garantir rationnellement le respect des critères de divergence conduisant à présenter des réponses différentes aux questions posées. Il convient donc de connaître suffisamment bien les structures étudiées, de déterminer l’influence de certains éléments qui fixent les règles dans leurs disciplines par leur pouvoir ou leur exemplarité et d’observer les caractéristiques essentielles susceptibles de constituer les fondements d’une typologie raisonnée. Choisir un échantillonnage qualitatif constitue une position stratégique de recherche d’homogénéité qui est susceptible de favoriser la mise en évidence de relations et la construction d’une réflexion théorique.

331 Ce dernier a été promu à la fin de son année sportive grâce à ses résultats sportifs. 332 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 41. 333 ROYER I. et ZARLOWSKI, dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2., 586 p., p 191. 190

3.1.2. Les types de clubs sportifs

Il s’agit d’analyser les clubs sur la base de leur niveau de développement et de leurs structures.

3.1.2.1. Clubs de tout niveau de développement Nous cherchons à identifier les différents stades par lesquels passent les clubs sportifs tout au long de leur existence (ou qu’ils seraient susceptibles de traverser en cas de développement). Il nous a semblé important de rencontrer, au début, divers clubs aux degrés de développement hétérogènes de manière à identifier les stades pertinents, tout en nous interrogeant sur leur représentativité. Il a donc fallu, dans un premier temps, rencontrer les clubs les plus développés, notamment les clubs de football qui représentent les entités sportives les plus abouties en termes de structuration et de médiatisation, mais aussi des clubs peu connus, toujours en structure associative, issus de disciplines peu reconnues mais en croissance comme le hockey sur glace. Enfin, des clubs issus d’une discipline médiatisée et importante, mais à un degré moindre eu égard au football et au rugby, ont été choisis, comme le basket-ball. La connaissance du sport nous a permis, en effet, d’identifier 3 types de degré de développement des clubs sportif de type « minimum-moyen- maximum ». Nous avons donc cherché à rencontrer les « petites comme les grandes entreprises » et pas uniquement les « grandes entreprises ». Il est intéressant de travailler sur le changement des entreprises de taille modeste. Les petites organisations sont susceptibles de grandes évolutions positives, mais elles subissent aussi une forte précarité. Pour comprendre l’évolution rencontrée par certains clubs, il est nécessaire de prendre en compte les stades de leurs structurations et restructurations.

3.1.2.2. La structure des clubs sportifs Nous avons donc essayé de trouver un panel aussi large que possible de « réponses » raisonnées. La structure la plus aboutie étant la SASP, il était nécessaire de travailler avec les clubs disposant de ce type de structure, sans oublier pour autant la forme associative. De plus si la SASP est la structure qui devrait s’imposer logiquement dans les années à venir dans les milieux professionnels du sport, quelques clubs d’élite n’ont pas encore fait ce choix. C’est le cas dans le hockey sur glace ou le basket-ball. D’autres structures 191 existent comme la SEMLS (mais celle-ci ne peut plus être créée, même si elle peut encore exister334) ou la SAOS ou encore l’EURSL. Nous avons privilégié les SAOS et les SASP, car elles sont révélatrices d’une certaine professionnalisation de l’organisation sportive. Cependant, nous voulions analyser tous les types de structures existants. Nous avons contacté 40 clubs. Compte tenu des contraintes de temps, de l’éloignement et des plages de rendez-vous limitées au regard des obligations professionnelles de l’interviewer et des répondants, il a été possible de rencontrer une trentaine de clubs, mais seuls 28 d’entre eux nous ont fourni l’ensemble des informations demandées. - 10 clubs de rugby (6 du Top 14, 2 de Pro D2 et 2 de Fédérale 1) - 3 clubs de football (2 de Ligue 1 et 1 de Ligue 2) - 5 clubs de hockey sur glace (5 de Ligue Magnus) - 5 clubs de basket-ball (5 de PRO A) - 5 clubs de handball (5 de Division 1)

Notre échantillon est constitué de 8 Présidents, 13 Directeurs Généraux, 7 Directeurs Administratifs et Financiers, 2 responsables communication, 1 vice président, 1 membre du Conseil d’Administration. Lorsque la nécessité se faisait sentir, nous avons rencontré plusieurs dirigeants dans certains clubs. En moyenne, ces personnes interrogées étaient au club depuis au moins quatre années. Au-delà des clubs sportifs, nous avons rencontré 8 dirigeants des instances fédérales exerçant au sein de la ligue ou de la fédération, ou encore au comité régional. Nous avons rencontré aussi 1 journaliste sportif. Au total, notre échantillon a atteint 41 personnes du monde sportif. Nous avons choisi aussi des clubs qui avaient un projet de montée vers la division supérieure et qui étaient bien avancés structurellement, comme le rugby grenoblois (Football Club de Grenoble ou FCG). Différents niveaux de compétition ont été analysés dans la mesure où nous considérons que les clubs évoluaient dans le haut niveau : TOP 14 et Pro D2 en Rugby mais aussi Fédérale 1 (Division 1 amateur), Ligue 1 et Ligue 2 en football. Le Tableau n°10 donne les noms et qualités des personnes qui ont accepté de participer à cette étude, en nous consacrant parfois plusieurs heures.

334 Depuis 1999, leur création est interdite, mais un club ayant choisi cette forme avant cette date a la possibilité de la conserver 192

Tableau n°10 - Les Terrains et nos interlocuteurs

Secrétaire général adjoint de la Rugby Christian DULLIN Fédération Française de Rugby Président du Comité du lyonnais de Rugby Daniel FALQUE rugby DG Ligue Nationale de Rugby Rugby Arnaud DAGORNE Président DNCG (football) Football François PONTHIEU Président Ligue Nationale Football Football Frédéric THIRIEZ Journaliste sportif (Canal+) Football Philippe DOUCET Ancien DG de ASVEL (Basket-ball) Basket-ball Laurent CABUS DG Ligue National de Handball Handball Etienne CAPON Fédération et Président des Yetis- Roller-hockey Gilbert NOTTURNO Grenoble Agen (SUA) Rugby – Top 14 Laurent LUBRANO (DG) Toulon (RCT) Rugby – Top 14 Ahmed TOUATI (Administrateur) Bayonne () Rugby – Top 14 Michel PARNEIX (DG) (USAP) Rugby – Top 14 Béatrice BORAS (DAF) Toulouse () Rugby – Top 14 Jean-Luc BRUMONT (DAF) Bourgoin (CSBJ) Rugby – Top 14 Jean-Claude RABATEL (DAF) (USO) Rugby – Pro D2 Bernard GUILLERMAIN (Président) (MTG XV) Rugby – Pro D2 Pierre BELLOC (DG) Depuis en TOP 14 Chambéry (SOC) Rugby - Fédérale1 Alain ARNOLDI (Président) Grenoble (FCG) Rugby - Fédérale1 Pierre CHAIX (Membre du CA) Depuis en Pro D2 Gilles CASSAGNE (MG) Claude CHURLET (DAF) Nicolas TRICHET (Responsable communication) Lille (Le LOSC) Football – Ligue 1 Michel SEYDOUX (Président) Rennes (Stade Rennais) Football – Ligue 1 Emmanuel CUEFF (Président) Grenoble (GF 38) Football – Ligue 2 Grégory MATHIEU (Responsable communication) Grenoble (les Brûleurs de loups) Hockey sur glace – Jean-Luc BLACHE (Président) Ligue Magnus Nicolas TOMASINI (DG) (les Dragons) Hockey sur glace – Guy FOURNIER (DG) Ligue Magnus Amiens (les Gothiques) Hockey sur glace – Antoine RICHER (DG) Ligue Magnus Villard-de-Lans (les Ours du Hockey sur glace – Didier BEUQUE (vice-président) Vercors) Ligue Magnus Morzine (les Pingouins) Hockey sur glace – Jérôme BAUD (DG) Ligue Magnus Lyon-Villeurbanne (ASVEL) Basket-ball – Pro A Gilles MORETTON (Président) Pau-Orthez (Elan Béarnais) Basket-ball – Pro A Pierre SEILLANT (Président) Bourg en Bresse (JL Bourg Basket) Basket-ball – Pro A Laurent TISSOT (MG) Roanne (La Chorale) Basket-ball – Pro A Valentin CAVALIER (MG) Clermont (Stade clermontois) Basket-ball – Pro A Fabien MANEUF (DAF) Chambéry (Chambéry Savoie HB) Handball - D1 Alain PONCET (Président) Créteil (US Créteil HB) Handball - D1 Kamel REMILI (DG) Nîmes (USAM) Handball - D1 Fabien QUENAULT (DG) Montpellier (MHB) Handball - D1 Frederick BERMONT (DAF) Paris (PHB) Handball - D1 David VILLECHAISE (DAF)

193

Nous avons ainsi été reçu par des grands noms du sport comme Pierre Seillant, Gilles Moretton ou Michel Seydoux, mais aussi par des dirigeants moins médiatisés, mais aux compétences et aux curriculum vitae de haut niveau.

3.2. Méthodologie du traitement des données Concernant le traitement de données, nous nous sommes appuyés principalement sur les ouvrages synthétiques et méthodologiques de A. M. HUBERMAN et M.B. MILES [1991, 2003]335 qui présentent les principales techniques d’analyse qualitative. Concernant les méthodes de recherche dans les sciences de management, l’ouvrage de THIETART [2003] s’est avéré très utile, au même titre que celui de GLASER ET STRAUSS [1967] pour la compréhension de la théorie dite « enracinée »336 qui a été renouvelée par la suite par plusieurs publications de STRAUSS et CORBIN [2004]337.

Il est donc intéressant de mettre en évidence les étapes essentielles dans le processus d’une recherche de type qualitatif. Après une revue rapide de la littérature, nous indiquerons les modalités pratiques du recueil d’information, leur codage et le système de validation des résultats, par une analyse de la validité interne, de la validité externe, de la reproductibilité et de l’objectivité.

3.2.1. Le recours à la littérature existante

Pour les auteurs de la « Théorie enracinée », méthode utilisée pour conduire cette recherche qualitative, il est impératif de n’avoir aucune idée préconçue de manière à éviter les biais relatifs notamment aux équations personnelles. Dans ces conditions, il s’agit d’aller le plus vite possible sur le terrain, avant même toute exploration intensive de la littérature, afin de laisser émerger les seules leçons du terrain. Cette méthode a été suivie autant que possible, eu égard à nos connaissances préalables des spécificités du monde sportif qui conduisent inéluctablement à établir des hypothèses avant même de

335 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p. ; HUBERMAN A.M. et MILES M.B. (1991), « Analyse des données qualitatives, recueil de nouvelles méthodes », Bruxelles, De Boeck-Wesmael, 480 p. 336 GLASER et STRAUSS (1967) « The discovery of Grounded Theory : strategies for qualitative research », Chicago, Aldine Publishing Company, 271 p. 337 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., 105 p. 194 laisser le nouveau terrain étudié révéler son contenu. Néanmoins, aucune analyse n’a, à notre connaissance, fait état des stades de développement appliqués aux clubs sportifs. S’il n’est pas particulièrement recommandé d’explorer de manière trop poussée la littérature, un degré suffisant de connaissance du milieu permet d’accélérer le recueil des informations nécessaires à ce type de recherche. Pour GLASER ET STRAUSS [1967], le recours à la littérature permet d’établir des comparaisons théoriques, elles-mêmes considérées comme « des outils (une liste de propriétés) pour analyser le plus objectivement possible le sujet à l’étude, notamment en fournissant des instruments heuristiques concernant les classifications, leurs propriétés et leurs dimensions338. En outre, les comparaisons « fournissent aussi des idées pour l’échantillonnage théorique »339. Le survol de la littérature relative au secteur sportif et des analyses appliquant la méthode des Modèles de Métamorphose (MDM) est utile et relativement peu contraignant. Ces analyses mettent en évidence leur fonctionnement et leur potentialité dans l’étude des organisations sportives. Les caractéristiques propres aux clubs sportifs ont été découvertes au fil des entretiens réalisés. Néanmoins, la littérature relative au sport a permis d’identifier plus précisément les thèmes intéressants concernant l’état et la situation des clubs sportifs. Nous avons utilisé plusieurs sources, qu’elles soient techniques ou non techniques, pour comprendre le monde sportif ainsi que les organisations qui le composent. Les études antérieures même non techniques permettent souvent de compléter les interviews et d’accroître le nombre d’observations. Il s’agit, dans ce contexte, de « vérifier les données par recoupement en examinant une large variété de documents et en les complétant, si possible, par des interviews et des observations »340. Ainsi, les chercheurs de terrain peuvent collecter et s’appuyer sur des documents de toutes sortes tels que des «ordres du jour de réunions, rapports d’évaluation, articles de journaux, budgets, brochures, menus, procès- verbaux de réunions, plannings : la liste sans être infinie n’en est pas moins

338 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 109 339 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p 125 340 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p 78. 195 longue»341. Cette procédure de la triangulation des informations fournit une meilleure idée de la qualité et de la fiabilité des informations fournies. F. ALLARD-POESI, C. DRUCKER-GODARD et S. EHLINGER [2003] respectent ce principe en affirmant que « les recherches en organisation et en management s’appuient sur des matériaux constitués de communications orales (discours, entretien individuel ou de groupe…) ou écrites (rapports annuels d’activités, plans stratégiques, lettres aux actionnaires…) »342. Ainsi, nombre d’articles, de sites officiels, de textes de lois, de rapports et discours gouvernementaux concernant les clubs ont été analysés, concernant notamment les clubs de football qui constituent l’essentiel de ce type de documents.

En outre, la théorie des organisations a pu être utilisée et appliquée en vue d’anticiper les différentes formes que pouvaient revêtir les organisations ainsi que les facteurs conduisant aux différentes combinaisons existantes. Il en va de même concernant les analyses des processus de changement. Les études de terrain ne peuvent être engagées ex nihilo. Elles impliquent souvent une praxis, conduisant à un passage constant entre les observations d’un phénomène et son interprétation dans un système plus large qui forme une réflexion théorique généralisable à d’autres cas, dans un système de pensée cohérent. Dans le cas de cette étude, ce n’est que lorsque les résultats de l’analyse du terrain ont été produits que le recours à la littérature disponible a été rendu possible.

Enfin, l’usage de la littérature, qu’elle soit relative au sport ou aux stades de développement, est réapparu de manière plus intense pour la validation de nos résultats, lorsque les différents stades ont été identifiés. La littérature managériale sur le changement, sur les organisations, sur les changements de dimension ou encore sur la gestion du sport nous a permis de valider des observations dont la logique doit ensuite être expliquée en toute rigueur. La validation « relative » a été soutenue par les comparaisons théoriques provenant de ces diverses sources scientifiques. Comme l’expriment MILES et HUBERMAN

341 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p109. 342 ALLARD-POESI F., DRUCKER-GODARD C., EHLINGER S., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p 449. 196

[2003], les théorisations et les recherches empiriques ont, naturellement, fourni des données importantes. Dans ce contexte, il « serait utile d’élaborer votre propre cadre directeur puis d’y projeter les variables et les relations extraites des principales études disponibles, pour situer les chevauchements, contradictions, perfectionnements et redéfinitions »343. L’analyse de B. AUGE [1998] vient en contrepoint de la nôtre quant à la détermination des caractéristiques représentatives de l’état des clubs sportifs. Cependant, la rigueur scientifique ne confond pas la fidélité des conclusions des résultats de plusieurs études avec la vérification de ceux-ci. Avant Galilée et Copernic, l’état de la science affirmait que la terre était plate. La confrontation des résultats d’une étude avec d’autres fournit seulement le moyen de nouveaux questionnements qui supposent constamment une rigueur d’analyse accrue. Les débats alimentent l’intérêt des réflexions scientifiques.

3.2.2. Recueil et analyse des données

Le recueil de nos données respecte les principes de la méthodologie de la « théorie enracinée », en respectant aussi les règles définies par MILES et HUBERMAN [2003] concernant l’application d’une méthode qualitative dans l’analyse des données. La plupart des enseignements se recoupent, l’un d’entre eux étant la logique itérative. Autrement dit, nous avons adhéré à une méthode de recueil et d’analyse de données prêchant « l’oscillation » entre le terrain et la théorie. Lorsque STRAUSS et CORBIN [2004] font état de la Théorie enracinée, ils relatent « une théorie qui dérive des données systématiquement récoltées et analysées à travers le processus de recherche ». Ils poursuivent en affirmant que le recueil des données, l’analyse et la théorie éventuelle sont interdépendants dans la méthode qu’ils prônent. Le chercheur débute par « un champ d’étude qui permet aux données de faire émerger la théorie »344. HUBERMAN et MILES [2003] suivent cette logique et recommandent eux aussi « une analyse en cours de recueil de données » pour la simple raison que « l’analyse devient une entreprise dynamique, en constante progression,

343 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p48. 344 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 30. 197 alimentée en permanence par le travail sur le terrain »345. Les auteurs expliquent que l’entrelacement entre les trois courants que sont « la condensation des données », « la présentation des données » et « l’élaboration/vérification des conclusions » avant, pendant et après la collecte des données, constitue « l’analyse » type elle-même. Ils poursuivent en révélant le « processus cyclique et interactif »346 que ces trois types d’activités analytiques et l’activité même de la collecte des données suscitent. Le schéma n°4 ci-dessous exprime, selon eux, cette relation.

Schéma n°4 - L’analyse de données qualitatives347

Ainsi, le chercheur déplace son intérêt et son énergie constamment entre ces quatre « pôles » pendant la collecte des données, avant de faire une navette constante entre la condensation, la présentation, et l’élaboration/vérification des conclusions pendant tout le reste de l’étude348. En fin de parcours, cette analyse donne lieu à une conceptualisation, voire à une théorie. Dans ce contexte, « on s’appuie sur un petit nombre d’éléments conceptuels généraux qui subsument une multitude de situations particulières »349. STRAUSS ET CORBIN [2004]

345 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p101. 346 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 31. 347 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., Figure 1.4 « Composantes de l’analyse des données : modèle interactif », p 31. 348 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p 31. 349 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p 40. 198 définissent une théorie comme « l’ensemble des concepts fortement développés inter-reliés par des énoncés de relations qui constituent un cadre intégré pouvant être utilisé pour expliquer ou pour prédire des phénomènes »350. Dans cette définition, l’attention doit être portée sur l’adjectif « inter-reliés », qui est le fondement même de toute procédure de théorisation. Le développement d’une théorie est particulièrement difficile, il suppose un « ordonnancement conceptuel » logique, cohérent et explicatif d’un phénomène, reproductible dans les mêmes conditions, mettant en évidence une organisation des informations dans un ensemble sélectionné producteur de propriétés adaptables et reliées351. Il permet de définir et d’ordonnancer les « événements » et « objets » contenus au sein d’un cadre de « dimension explicite et variable », en vue de formuler des classifications formant un schème explicatif global352. Si des thèmes sont développés et même classifiés, sans pour autant que la mise en relation de leurs combinaisons n’ait été engagée selon les critères d’une véritable réflexion scientifique rigoureuse, l’analyse « théorique » n’est pas achevée et reconnue. La théorisation est « l’acte de construire un schème explicatif à partir de données qui intègrent, de façon systématique, divers concepts à travers des énoncés de relation »353. La théorisation est une étape supérieure, réclamant plus qu’une description et supposant une véritable liaison entre les catégories. Pour STRAUSS et CORBIN [2004] « la théorisation est un travail qui comprend non seulement l’intuition ou la conceptualisation des idées (des concepts), mais également leur formulation dans un schème logique, systématique et explicatif »354. Au regard de cette revue de littérature, il convient de se poser la question de savoir si l’analyse engagée met en relations les différentes catégories développées. Rappelons que notre objectif est de déterminer un cadre conceptuel propre aux clubs sportifs, en évaluant leurs évolutions en vue de dégager une classification significative et une réponse adaptée à la question du caractère entrepreneurial de la gestion des clubs sportifs. Cette classification résultera de nos recherches sur le terrain, mais aussi de la littérature disponible. Elle devrait permettre d’améliorer la capacité de gestion des clubs sportifs au regard de leurs

350 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 35. 351 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p 41. 352 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p 47. 353 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p 47. 354 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p 42. 199 ambitions, de leur standing et de leurs engagements financiers. Les réflexions de type théorique, qui appliquent les interactions entre inductions et déductions, expliquent les phénomènes étudiés dans différents contextes et ils fournissent de véritables guides de l’action. La méthodologie de la Grounded Theory suppose la mise en relation rigoureuse des catégories. Ces relations sont mises en évidence lors d’un codage dit « ouvert » et relié lors d’un codage dit « axial ». Ainsi, pour définir une théorie, nous suivrons ce schéma de construction. Pour BUNGE [1967], une « théorie désigne un système d’hypothèses. Un ensemble d’hypothèses scientifiques constitue une théorie scientifique si, et seulement si, il se réfère à des faits donnés et si chacun des éléments de l’ensemble est soit une hypothèse première (axiome) soit une conséquence logique d’une ou de plusieurs hypothèses premières »355. Dans ce cadre, le chercheur en management, ne traite pas avec les lois ou théories universelles. La « théorie substantive »356, qui dépend du temps et de l’espace considérés, est enracinée dans un contexte donné. Dans les sciences sociales, les faits ne se renouvellent jamais pareils à eux-mêmes, ce qui suppose la mise en place de théories évolutives, adaptées à son temps et disponibles pour l’action·. Le lien qui lie ces deux types de théorie s’effectue par le fait que l’élaboration d’une théorie formelle au caractère plus « universel » qu’une théorie substantive, « passe généralement par les intégrations successives de plusieurs théories substantives »357. Les théories substantives n’ont pas la même « puissance explicative » que les théories scientifiques proprement dites, mais elles ont la capacité de comprendre une situation particulière et d’apporter des éléments de réponse. Elles s’inscrivent dans une cybernétique conçue comme une science de l’action.

Quelle que soit la force du modèle à construire, l’application des principes méthodologiques de la « Grounded Theory » est adaptée, au moins dans un premier temps, à l’étude des spécificités des organisations du secteur sportif, sur la base d’un codage systématique réalisé sur le terrain, conduisant à une

355 BUNGE M. (1967), « Scientific research », Berlin, Springer-Verlag, cité par CHARREIRE S. et DURIEUX F. dans THIETART R.-A. et coll. (2003 ), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2., 586 p., p 66. 356 Terme provenant des travaux de GLASER et STRAUSS (1967), Op.Cit. 357 CHARREIRE S. et DURIEUX F. dans THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p 66. 200 amélioration progressive du modèle proposé. L’expérience des premiers entretiens permet de mieux comprendre les propos des interlocuteurs suivants.

3.2.3. Le codage des données

Le codage est une étape importante dans le processus de théorisation. Il s’agit de bien identifier ce que l’on recherche et de mettre en évidence les relations significatives en toute rigueur. STRAUSS et CORBIN [2004] révèlent les différents objectifs des procédures de codages de la « théorie enracinée »: - « Construire plutôt que tester la théorie ; - fournir aux chercheurs des outils analytiques pour traiter des masses de données brutes ; - aider les analyses à prendre en considération des alternatives aux phénomènes ; - être simultanément systématique et créatif ; - identifier, développer et relier les concepts qui constituent des composants de la théorie »358.

Pour atteindre ces objectifs, il convient de commencer par un codage ouvert, autrement dit « le processus analytique par lequel les concepts sont identifiés et par lequel leurs propriétés et leurs dimensions sont découvertes dans les données »359. Il s’agit de découvrir les différentes catégories et les sous- catégories qui émergent des données brutes provenant directement du terrain. Les sous-catégories ont tout autant d’importance que les catégories elles-mêmes dans la mesure où elles constituent les concepts attachés à la catégorie, tout en lui donnant plus de précision et de contenu. Le codage ouvert consiste à déterminer des parties distinctes significatives, d’examiner et de comparer les données récoltées, soulignant ainsi les similitudes et les différences. Par ce canal, il est possible de construire des ensembles abstraits, appelés catégories en fonction des critères utilisés et de leur degré d’homogénéité. Ainsi, au regard des objectifs de cette recherche, l’identification des caractéristiques représentatives de l’état des clubs constitue la première étape

358 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p. 32. 359 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p. 133. 201

obligée. En effet, compte tenu des spécificités des organisations du secteur sportif, les MDM appliqués aux entreprises ne sont pas forcément adaptés aux organisations « clubs sportifs ». De plus, ces spécificités doivent être prises en compte dans l’analyse des clubs sportifs, ce qui peut conduire à déterminer un cadre distinct de celui des entreprises. L’enjeu de cette recherche est d’établir un modèle propre aux clubs sportifs de manière, entre autres, à éviter toutes les extrapolations hâtives des pratiques de gestion rencontrées en entreprise au sein des clubs sportifs. Ainsi, la reconnaissance de ces caractéristiques propres permet d’identifier les différents types de clubs sportifs selon leur développement. Il s’agit, dans un premier temps, de reprendre les domaines de réflexion de la littérature sur le management des entités sportives et de préciser, par les données du terrain, les informations fournies par nos interlocuteurs. Le schéma n°5 met en évidence la logique de l’étude réalisée.

Schéma n°5 – Logique et mode opératoire de l’analyse

Domaines de recherche Caractéristiques ressortant du terrain

Communication Ex : 1. communication Caractéristique 1.1 Niveau de compétition Statut Caractéristique 1.2 Organes de direction et de gestion Taille Activités commerciales Caractéristique 1.3 Orientations stratégiques Organisation fonctionnelle Ex : 2. actionnariat Caractéristique 2.1 Actionnariat Caractéristique 2.2

Un deuxième codage a pu être effectué. Il consiste à reprendre individuellement les caractéristiques identifiées pour chacun des domaines sur lesquels il semblait intéressant de travailler pour être représentatif de l’état d’un club sportif. Chacune d’elles a fait l’objet d’une analyse sur la diversité de leurs évolutions. Il convient de déceler les différentes formes que chacune a pu revêtir au sein des clubs sportifs observés, ce qui constitue une information déterminante pour mettre en évidence les stades d’évolution des clubs (Schéma N°6). 202

Schéma n°6 - La deuxième étape du codage

Formes revêtues

1.1 Etape 4 : Caractéristique 1.1 (N+3) Caractéristique

Etape 3 : Caractéristique 1.1 (N+2)

Etape 2 : Caractéristique 1.1 (N+1)

Etape 1 : Caractéristique 1.1 (N)

Formes revêtues

Caractéristique 1.2 Etape 4 : Caractéristique 1.2 (N+3)

Etape 3 : Caractéristique 1.2 (N+2)

Etape 2 : Caractéristique 1.2 (N+1)

Etape 1 : Caractéristique 1.2 (N)

Formes revêtues

Caractéristique 5.3 Etape 4 : Caractéristique 5.3 (N+3)

Etape 3 : Caractéristique 5.3 (N+2)

Etape 2 : Caractéristique 5.3 (N+1)

Etape 1 : Caractéristique 5.3 (N)

Ce deuxième codage a fait l’objet aussi d’un travail en parallèle qui consiste à identifier la manière dont chacune des caractéristiques a évolué. Nous faisons directement référence à ce que nous appelons « les changements de dimension ». Nous avons distingué les cas dans lesquels nos interlocuteurs ont perçu un changement de dimension comme une véritable révolution de ceux qui ont été perçus comme un changement de dimension de type progressif pour chacune des caractéristiques. Nous sommes parti du principe que, selon le niveau de développement d’une caractéristique d’un club sportif, les perceptions pouvaient être différentes eu égard au caractère du changement de dimension. 203

Certains clubs sportifs d’un niveau de développement donné voient le changement comme un phénomène radical, d’autres à un niveau de développement différent le considèrent plutôt dans sa progressivité. Il arrive aussi que deux clubs de niveau semblable perçoivent le changement de dimension différemment : l’un progressif, l’autre radical. Le schéma n°7 ci- dessous, illustre notre réflexion.

Schéma n°7 – La conception du changement par les clubs sportifs

Evolution de la caractéristique 1.2 selon les clubs sportifs

CAS 1

Formes revêtues Club au niveau de développement A radical Etape 2 : Caractéristique 1.2 (N+1)

Etape 1 : Caractéristique 1.2 (N)

CAS 2

Formes revêtues

Club au niveau de progressif Etape 4 : Caractéristique 1.2 (N+3) développement C radical Etape 3 : Caractéristique 1.2 (N+2)

progressif Etape 2 : Caractéristique 1.2 (N+1)

Etape 1 : Caractéristique 1.2 (N)

CAS 3

Formes revêtues

Club au niveau de progressif Etape 3 : Caractéristique 1.2 (N+2) développement B progressif Etape 2 : Caractéristique 1.2 (N+1)

Etape 1 : Caractéristique 1.2 (N)

= Changement de dimension 204

Ce premier type d’analyse permet d’avoir un aperçu de l’évolution des clubs sportifs, mais il n’est pas suffisant pour distinguer précisément des classes de clubs. Il faut désormais mettre en relation les caractéristiques des clubs sportifs identifiés pour déterminer un profil de club selon les évolutions de celles- ci. L’analyse prend toute son ampleur dans la mesure où l’ensemble opérationnel de codes décrivant les phénomènes et événements définis dans notre codage ouvert passe à un niveau plus explicatif par la mise en relations des catégories. MILES et HUBERMAN [2003] différencient deux niveaux de codage : « Le codage au premier niveau est un moyen de résumer des segments de données. Le codage thématique est une façon de regrouper ces résumés en un nombre plus réduits de thèmes ou d’éléments conceptuels plus synthétiques »360.

Dans la méthodologie de la théorie enracinée, le codage suivant est intitulé le « codage axial ». Il constitue une étape analytique dans laquelle les données sont rassemblées sur la base de la nature de la relation entre les catégories diverses et leurs sous-catégories. Le codage axial est défini comme « le processus de mise en rapport des catégories avec leurs sous-catégories, appelé « axial » parce que le codage se produit autour de l’axe d’une catégorie, liant ainsi les catégories en fonction de leurs propriétés et de leurs dimensions »361. Il s’agit de déterminer des « codes thématiques » identifiant un thème, un conduite (pattern) ou encore une explication « émergente » des sites sur lesquels le chercheur a effectué son analyse. Ces codes dont sont « explicatifs et inférentiels » et leur fonction « est de rassembler une grande quantité de matériels dans des unités d’analyse plus significatives et économiques »362.

Il convient d’effectuer un premier codage axial mettant en relation les caractéristiques identifiées de l’ensemble 1 et leur évolution identifiée dans l’ensemble 2. Il est question de démontrer que les caractéristiques identifiées évoluent plus ou moins en corrélation, autrement dit de démontrer l’existence d’une relation entre le niveau de développement d’une caractéristique X avec le

360 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p133. 361 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 157. 362 MILES et HUBERMAN (2003), ibid. p 133. 205

niveau de développement des autres caractéristiques. Ainsi, le niveau de développement concordant de l’ensemble des caractéristiques identifiées configure un stade de développement des clubs sportifs, en d’autres termes une classe, une catégorie. Par exemple : un club de stade 3 sera constitué en société, aura un personnel salarié composé d’un nombre minimal de personnes, aura un budget d’environ plusieurs centaines de milliers d’euros, une organisation décentralisée, des produits dérivés de diverses natures, etc. Le Schéma n°8 éclaircit cette mise en relation des caractéristiques ainsi que son résultat.

Schéma n°8 – La mise en relation des caractéristiques et des résultats

Caractéristiques ressortant du terrain LIAISON

Caractéristique 1.1 (N) Caractéristique 1.2 (N) = lien 1

lien 1 Caractéristique 1.3 (N) = lien 2

lien 2 Caractéristique 2.1 (N) = lien 3

lien 3 Caractéristique 2.2 (N) = lien 4 lien 4 Etc. = Profil du « club-type » de stade 1

Caractéristiques ressortant du terrain LIAISON

Caractéristique 1.1 (N+1) Caractéristique 1.2 (N+1) = lien 1

lien 1 Caractéristique 1.3 (N+1) = lien 2

lien 2 Caractéristique 2.1 (N+1) = lien 3

lien 3 Caractéristique 2.2 (N+1) = lien 4

stade 2 lien 4 Etc. = Profil du « club-type » de

À la fin de ce codage, nous serons en mesure de déterminer les différents stades de développement des clubs sportifs. La deuxième question concerne les changements de dimension. Selon le stade de développement dans lequel se situe le club sportif, il est intéressant de déceler l’événement qui conduit les 206 clubs sportifs à un changement de dimension radical uniquement. Autrement dit, seuls les événements provoquant une véritable révolution, c’est- à-dire ayant une influence sur le niveau de développement, seront dignes d’intérêt. Un outil permettant d’anticiper un changement de dimension radical par la prise de connaissance du type d’événement déclencheur pourra être choisi. Rappelons que nous cherchons un outil pour les clubs sportifs permettant de les prémunir de ce type de changements de dimension qui peuvent s’avérer fatals pour ces organisations (Schéma n°9).

Schéma n°9 – L’analyse des changements de dimension

Club sportif de stade 1 Club sportif de stade 2 Club sportif de stade 3

Caractéristique 1.1 (N) Caractéristique 1.1 (N+1) Caractéristique 1.1 (N+2)

Evènement A Evènement B

= changement radical = changement progressif

Caractéristique 1.2 (N) Caractéristique 1.2 (N+1) Caractéristique 1.2 (N+2)

Evènement C Evènement D

progressif progressif = changement = changement

Caractéristique 2.1 (N) Caractéristique 2.1 (N+1) Caractéristique 2.1 (N+2)

Evènement E Evènement F

= changement progressif = changement radical

Evènements aboutissant à un changement de dimension Evènements

Evènement A Ex : Promotion à la division Outil d’anticipation supérieure

Evènement F Ex : ouverture du capital

207

En somme, il s’agit de déterminer en premier lieu les caractéristiques qui sont représentatives de l’état d’un club sportif (Schéma n°5) puis de déceler les étapes d’évolution pour chacune d’elles (Schéma n°6). Ensuite, il s’agit de trouver les liaisons entre les caractéristiques par rapport à leur niveau de développement. Nous dresserons une grille de lecture dans laquelle nous serons en mesure d’identifier les différentes classes existantes de clubs sportifs en fonction du niveau de développement des caractéristiques représentatives (Schéma n°8). Parallèlement, nous tenterons de comprendre la manière par laquelle se déroule le passage d’un stade à un autre. Les changements de dimensions considérés comme radicaux seront différenciés de ceux considérés comme progressifs (Schéma n°7). Cette analyse aura pour but d’identifier les événements qui ont conduit à des changements de dimensions radicaux (Schéma n°9). Ces différentes analyses ont pour intérêt de construire un cadre propre aux organisations sportives ainsi qu’un outil de recherche d’amélioration de la gestion des clubs sportifs.

3.2.4. La validation des résultats

Une fois dégagés les résultats relatifs aux codages, la question que se pose le chercheur est de savoir si ces derniers sont fondés. Autrement dit, quel est « l’enracinement théorique » de la recherche. Pour l’évaluer STRAUSS et CORBIN [2004] définissent plusieurs critères. Ils s’interrogent sur le point de savoir si des concepts ont été générés et s’ils ont été systématiquement reliés, sur la densité conceptuelle des catégories et sur les conditions de leur intégration théorique. Il convient postérieurement de savoir si le processus a été pris en considération. Enfin, la dernière étape consiste à s’interroger sur le caractère significatif des résultats et sur le degré de véracité accordée par des groupes sociaux et professionnels pertinents363. Dans ce processus de validation, l’étape qui nous intéresse particulièrement ici est la recherche de la variation, c’est-à- dire la constance des résultats selon les situations spécifiques. En effet, la Grounded Theory accorde une place importante à la recherche de contre- exemples. Il est difficile de réfuter une théorie émanant de données tant elle

363 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 313-315. 208 est intimement dépendante des informations. Autrement dit, le contre-exemple existe, mais il ne réfute pas toujours en toute rigueur la théorie dégagée. A. MBENGUE et VANDANGEON-DERUMEZ [2003] admettent cette idée selon laquelle un cas contraire « n’infirme pas systématiquement l’hypothèse initiale ». L’absence de preuves contraires n’est pas synonyme de confirmation. On rejoint l’analyse popperienne des sciences sociales, selon laquelle s’il est toujours possible de démontrer les « erreurs » d’une théorie, il est impossible d’en démontrer la validité absolue. Ainsi, plutôt que de parler d’invalidation par le biais de contre-exemples, il est question de complément par les contre- exemples. La recherche qualitative suggère toujours l’analyse des cas contraires. Il faut parfois amender le modèle à la suite d’un cas spécifique, plutôt que d’essayer de le faire rentrer coûte que coûte dans le moule de sa représentation.

Cette recherche des cas contraires, dans la méthodologie de la théorie enracinée, ne contient aucune règle divulguant la nature du procédé, le nombre de cas contraires ou encore le temps nécessaire à cette tâche. Ainsi, il est difficile d’affirmer le moment où nous pouvons déclarer obtenir satisfaction364. MILES et HUBERMAN [2003] révèlent trois types d’exemples en mesure de donner de bons résultats : l’exemple dit « typique ou représentatif », l’exemple « contraire ou invalidant » ou encore l’exemple considéré comme « exceptionnel ou surprenant ». Le deuxième indique à la fois les limites des conclusions et le point de variation optimale, alors que le troisième aide à qualifier les résultats et à spécifier les variations ou contingences dans les configurations observées. Au- delà de ces conseils méthodologiques, la seule véritable règle dans la validation des résultats prévue par la théorie enracinée est le principe de « saturation théorique » qui s’énonce ainsi : une catégorie n’est saturée que lorsque les données récoltées ne donnent plus d’informations nouvelles. « Cela signifie jusqu’à ce que (a) il n’y a plus de données nouvelles ou pertinentes qui semblent émerger par rapport à une catégorie, (b) la catégorie est solidement développée en fonction de ses propriétés et de ses dimensions tout en démontrant de la

364 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p489. 209 variation et (c) les relations parmi les catégories sont fortement établies et validées »365.

En résumé, la prise en compte opportune de la complexité de la réalité par le biais des positionnements qu’offre la méthodologie de la « théorie enracinée » conduit à considérer que notre recherche ne prétend pas atteindre cette saturation, malgré les nombreux cas analysés. Toutefois, nous pensons avoir obtenu au moins une ébauche de modèle suffisamment développée pour contribuer à une amélioration de la compréhension et de la gestion des clubs sportifs. Notre modèle n’a pas rencontré le besoin de bouleversements ou remaniements à la suite des derniers cas que nous avons analysés. Il sera cependant nécessaire et judicieux d’engager de nouvelles recherches permettant d’affiner nos résultats.

3.2.5. La confrontation avec la rigueur scientifique

Plusieurs procédures sont susceptibles de valider scientifiquement le schéma. STRAUSS et CORBIN [2004]366 proposent de reprendre les données brutes afin de les intégrer dans le modèle, en vue de confirmer si le schème théorique est représentatif et capable d’expliquer la plupart des cas. Il est possible aussi, dans un second temps, d’expliquer le scénario généralisé aux personnes interviewées, afin de percevoir la qualité des correspondances entre leur expérience et le schéma ainsi construit par nos soins. Il convient de relativiser leurs critiques dans la mesure où le scénario a vocation à simplifier la réalité, par une procédure d’abstraction qui la rend plus généralisable et plus lisible, indépendamment des scories ou des cas spécifiques des équations personnelles. Toute théorie conduit à une réduction des données brutes afin de comprendre les grandes lignes de force d’un phénomène social. Il n’en reste pas moins que l’histoire doit être comprise et admise par les personnes de l’échantillon qualitatif. Pour la validation de nos résultats, il faut aussi parallèlement faire appel aux règles de la science pour les confronter à notre

365 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p252. 366 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p252. 210 recherche. Quatre critères sont susceptibles de définir le degré de rigueur des analyses scientifiques : 1. la validité interne ; 2. la validité externe ; 3. la reproductibilité ; 4. L’objectivité.

Ces critères ne sont qu’imparfaitement satisfaits dans les recherches de type qualitatif, car « il n’existe pas de canons, de règles de décision, d’algorithmes, ou même d’heuristique reconnue en recherche qualitative permettant d’indiquer si les conclusions sont valables et les procédures solides »367. Cette affirmation justifie les raisons pour lesquelles MILES et HUBERMAN [2003] s’attachent à « l’établissement de canons reconnus dans l’analyse des données qualitatives, dans le sens de règles de base acceptées par tous pour établir des conclusions et en vérifier la solidité »368. Ils donnent plusieurs critères disponibles pour donner plus de rigueur aux recherches qualitatives, nommément la « représentativité », la « réactivité », la « fiabilité » et la « réplicabilité ». Cette analyse est globalement partagée par STRAUSS et CORBIN [2004] qui avancent plutôt les termes de « signification », de « compatibilité de la théorie avec l’observation », de « cohérence », de « généralisation », de « reproductibilité », de « précision » ou encore de « vérification ». Ils insistent cependant sur les études à engager sur la signification profonde de chacun de ces termes dans leur capacité à accroître la rigueur des recherches qualitatives en butte avec la « complexité des phénomènes sociaux »369. En l’occurrence, plutôt que de considérer la « reproductibilité » de manière ordinaire dans la mesure où il est difficile de répliquer les conditions originales de recueil des données ou de contrôler les variables influentes, ils s’attachent à considérer la qualité d’une recherche de ce type sur la base d’explications théoriques similaires ou proches avec la mise en œuvre d’une méthodologie semblable de recueils des données et de procédures

367 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 471. 368 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p 13. 369 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 308. 211 d’abstraction ou de synthèse similaires. Pour HUBERMAN et MILES [2003], la qualité des recherches qualitatives suppose la description de ses propres procédures en vue de leur reconstitution, leur corroboration avec d’autres données et la mise en place d’une analyse secondaire370. De manière plus pragmatique, STRAUSS et CORBIN [2004] insistent sur les notions de « puissance explicative », sur la « capacité prédictive »371. Or, la théorie substantive n’a pas la même puissance explicative qu’une théorie plus générale, mais son mérite « réside dans sa capacité de parler spécifiquement de populations dont elle dérive et auxquelles elle s’applique en retour »372. Ces analyses méthodologiques ne cachent pas la recherche de l’authenticité et de la véracité des résultats. Dans ce contexte, il est nécessaire de rapprocher ses méthodes de celles qui prévalent dans la démarche scientifique, en vue de réduire les marges d’erreur et d’obtenir un accord général sur le potentiel scientifique des résultats. Cinq qualités sont alors recherchées373 : l’objectivité fondée sur la confirmation, la fidélité basée sur la vérification par audit, la validité interne qui fait référence à la cohérence et à la crédibilité, la validité externe qui permet le transfert et l’intégration et enfin la validité pragmatique qui suggère des prescriptions et prépare les actions.

1. L’objectivité suppose une attitude fondée sur la neutralité du chercheur qui doit être accompagnée d’une identification explicite des biais inévitables. Pour BAUMARD et IBERT [2003]374 « cette interprétation ne doit pas être celle du chercheur mais celles des individus qui sont étudiés ». À chaque prise de notes, il est nécessaire de prendre du recul par rapport au terrain, afin d’éviter toute précipitation dans les conclusions. Toutes les idées qui naissent pendant ou à l’issue de l’entretien doivent être considérées comme des conclusions provisoires, des étapes dans la réflexion et non pas sa fin. Il convient de prendre du temps pour relier toutes les informations disponibles souvent non

370 MILES et HUBERMAN (2003), ibid. p 510. 371 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 309. 372 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid. p 310. 373 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 502. 374 BAUMARD P. et IBERT J., in THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p95. 212

convergentes. C’est souvent par les exceptions que la recherche avance. Il convient de se méfier des idées brillantes qui conduisent inéluctablement vers la casuistique qui ne se prête jamais, par définition, aux confirmations générales. Pour un sportif de haut niveau qui s’engage dans cette étude, la grande difficulté réside dans le rejet des idées reçues. Être averti des dangers de partialité ne guérit pas toujours du mal, mais il permet au moins d’engager des procédures qui réduisent ses effets éventuels, car il est difficile de s’immerger dans un terrain sans avoir une idée de ce que l’on recherche. « Les analystes, aussi bien que les enquêtés, apportent à l’enquête des préjugés, des croyances et des présupposés. Il ne s’agit pas nécessairement d’une critique négative ; après tout, les personnes sont les produits de leur culture, des époques dans lesquelles elles vivent, de leur genre, de leurs expériences et de leur formation. Ce qui est important, c’est de reconnaître la situation ou les préjugés, les présupposés ou les croyances, qu’ils soient les nôtres ou ceux des enquêtés, se mêlent à l’analyse »375. Or, se rendre libre par rapport aux préjugés est très difficile, car ils sont trop souvent inconscients et ils s’inscrivent dans notre culture. Il convient donc de les mettre en évidence et de les dépasser, au moins le temps de l’analyse. Le modèle à l’étude est fondé sur des études de terrain, ce qui réduit les biais « comportementaux » et les divergences relatives à l’interprétation des informations fournies par les composantes de l’échantillon qualitatif, eu égard aux actions-réactions des face-à-face, quarante fois renouvelés, entre des personnes aux cultures et préjugés différents mis plusieurs fois en concurrence avec ceux relatifs à l’équation personnelle de l’analyste.

2. La fidélité des résultats et le caractère « auditable » de la procédure sont revendiqués376. Il s’agit d’un contrôle de la qualité des procédures, en vue de volonté de développer une démarche scientifique. Pour MORSE

375 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p.128. 376 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p. 503. 213

[1994]377, le chercheur doit être pointilleux et vigilant dans toutes les étapes de l’analyse, quelle que soit la longueur du processus. Il faut ne pas donner de significations trop hâtives aux données recueillies et de suivre méticuleusement, étape par étape, la procédure agréée au départ, sur la base des connaissances méthodologiques disponibles, en vue d’aboutir à des conclusions d’analyses effectuées dans des conditions et des modalités similaires. Dans ce contexte, il est aussi nécessaire de se préoccuper de la fiabilité. Son évaluation « consiste à établir et vérifier que les différentes opérations d’une recherche pourront être répétées avec le même résultat par des chercheurs différents et/ou à des moments différents »378. Les écarts importants entre les contenus d’information des analystes doivent conduire à une remise en cause, soit des modalités d’exécution de l’analyse, soit des conclusions elles-mêmes.

3. La validité interne des analyses qualitatives est souvent fondée sur la notion subjective de la crédibilité379. La question du sens réel des résultats obtenus doit être posée. Peut-on considérer que le rejet des conclusions par les personnes interrogées n’implique pas des études complémentaires adaptées en vue de maintenir un niveau de crédibilité scientifique suffisant ? Le tableau final offre-t-il un caractère authentique ou s’inscrit-il délibérément ou involontairement dans des conclusions aux explications alambiquées ? S’interroger sur la validité interne consiste à « évaluer la véracité des liens établis par le chercheur dans son analyse »380. Pour faire ce type d’étude, il convient de mettre en examen les méthodes de recherche appliquées pour le recueil et l’analyse de données et de valider les conclusions sur la base d’une réflexion rationnelle complémentaire, fondée sur des tests complémentaires. La ré-analyse de toute la procédure permet d’évaluer, sous un angle critique, la pertinence

377 MORSE J. M. (1994), « Designing funded qualitative research”, in Handbook of qualitative research, Denzin et Lincoln Eds,Thousands Oaks: London: New Delhi : Sage publications, p 219-236. 378 DRUCKER-GODARD C., ELHINGER S., GRENIER C., dans THIETART R.-A. et coll. (2003 ), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p275. 379 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 504. 380 DRUCKER-GODARD C., ELHINGER S., GRENIER C., dans THIETART R.-A. et coll. (2003 ), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p 273. 214

des résultats. Il s’agit aussi de croiser les informations provenant de sources différentes, notamment dans le cadre de la « triangulation » mise en place. D’autres opérations nous ont aidé à satisfaire cet objectif comme la « logique itérative » que nous recommande la méthode de la « théorie enracinée ». Notre expérience au fil des sites observés nous a permis de mieux canaliser et synthétiser nos interviews et de dénicher les sites sur lesquels il convenait de se rendre pour valider nos analyses provisoires.

4. La validité externe « d’une recherche examine les possibilités et les conditions de généralisation et de réappropriation des résultats d’une recherche »381. Elle permet éventuellement de transférer les conclusions de l’analyse à d’autres contextes et de s’interroger sur leur généralisation. Il existe, selon FIRESTONE382, trois niveaux de généralisation qui portent sur : le passage de l’échantillon à la population mère (de peu d’utilité pour les études qualitatives), l’analyse (liée à la théorie) et le transfert d’un cas à un autre cas ». La recherche de contre-exemples constitue une solution recommandée par la « Théorie enracinée », ce qui nous a conduit à rencontrer un panels très hétérogènes de clubs sportifs en termes de structures et même de niveaux de compétition. Par exemple, des clubs de rugby de Fédérale 1 ont été concernés de manière à comprendre leur situation particulière, fondée sur un semi professionnalisme ambitieux qui n’attend que la montée en division supérieure pour devenir un club professionnel à part entière. Le club de Grenoble (FCG), interviewé comme club de Fédérale, est depuis en Division 2 après une montée en catégorie supérieure qui a conduit à une restructuration et à une professionnalisation accrue. Cette prise en considération des exemples différents constitue une caractéristique de recherche qui contribue à la validation externe. Une autre possibilité est la confrontation avec la littérature existante. Ainsi, chaque fois qu’il a été possible de faire référence aux études engagées sur le même thème, qu’elles soient assujetties au sport ou/et à la gestion d’entreprise, nous les avons utilisées, soit en faveur, soit en défaveur de nos résultats.

381 DRUCKER-GODARD C., ELHINGER S., GRENIER C., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p 280. 382 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p. 505. 215

5. L’utilisation et l’application des résultats aux fins de prescriptions se présentent comme les fondements essentiels de la « validité pragmatique ». La réaction des décideurs et des utilisateurs de l’information vis-à-vis du rapport du chercheur constitue un test fondamental de la crédibilité d’une réflexion théorique fondée sur les méthodes qualitatives. La première question est donc de savoir si les membres de l’échantillon qualitatif reconnaissent et acceptent les étapes et les catégories définies par l’analyse globalisée. La confrontation du modèle avec l’idée qu’ils se font de leur niveau de développement en fonction de chaque caractéristique retenue est un facteur de validation « sociale » non négligeable. À la fin de l’analyse, chaque membre s’est positionné sur la grille de lecture sans connaître le classement déjà réalisé. Lorsque les résultats de l’étude correspondent au sentiment d’appartenance des membres de l’échantillon à une catégorie, le modèle présente un intérêt certain et peut être appliqué, ce qui lui confère une certaine « validité pragmatique ». Notre méthodologie a conduit à utiliser systématiquement cette procédure. Il convient cependant de révéler que les résultats ont pu correspondre presque parfaitement, à l’exception de clubs qui avaient évolué de manière forte, du fait de la montée dans la division supérieure notamment, juste après la réalisation de l’interview.

Il est intéressant, en utilisant les méthodes qualitatives, de rechercher l’efficacité de l’information fournie par l’étude. HUBERMAN et MILES [2003] donnent ainsi treize tactiques à suivre réparties dans trois objectifs : les premières visent à « garantir la qualité intrinsèque des données », les deuxièmes contrôlent « les résultats en les contrastant de diverses manières » et, enfin, les troisièmes « adoptent une approche critique, exigeante vis-à-vis des explications émergentes »383. Nous les énumérons par groupe. Les premières sont au nombre de 4 avec : 1. Le contrôle de la représentativité. Il faut « partir du principe que vous établissez un échantillonnage sélectif et que vous tirez des inférences d’un échantillon de cas insuffisants ou non représentatifs » ;

383 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p. 473. 216

2. Le contrôle des effets du chercheur (« effets du chercheur sur le site/ effet du site sur le chercheur ») ; 3. La triangulation. « La stratégie consiste à faire corroborer les résultats en ayant recours à plusieurs sources de données » ; 4. La pondération des données, selon le critère de la qualité des données (données sûres / données incertaines) 384.

La deuxième catégorie qui vise à contrôler les résultats contient 4 autres tactiques qui consistent à : 1. vérifier la signification des cas atypiques par la recherche des cas atypiques et le travail sur leur signification pour comprendre l’origine du caractère atypique. Parfois, l’exception confirme la règle ; 2. utiliser les cas extrêmes, pour en comprendre le sens et établir des comparaisons ; 3. traquer les faits surprenants, c’est-à-dire l’événement qui s’est produit hors du champ normal d’attente ; 4. rechercher les preuves contraires385.

Enfin, le troisième et dernier ensemble est constitué des tactiques destinées à : 1. réaliser des tests si-alors. Ils consistent à faire des « hypothèses tests », du type si P apparaît, alors Q s’impose ou se réalise. C’est le principe de la relation attendue ; 2. écarter des relations fallacieuses ; 3. reproduire un résultat. Dans ce contexte, les configurations émergentes d’un site doivent être testées sur d’autres ; 4. vérifier les explications rivales. Un seul point de vue ne suffit pas, il s’agit plutôt de choisir le plus cohérent, le plus en phase avec la situation actuelle ; 5. Solliciter les réactions des informateurs. Les informateurs locaux sont susceptibles de fonctionner comme un jury, évaluant seuls et/ou collectivement les principaux résultats d’une étude386.

384 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p. 476-484. 385 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 486 –489. 217

Ces recommandations ont été systématiquement suivies, afin d’éviter les biais auxquels l’application de la méthode qualitative nous expose.

La méthodologie suivie s’est inspirée de la « Grounded Theory » et de chercheurs reconnus en matière de recherche qualitative. Cette méthodologie des traitements de données fait donc l’objet de codages divers pour aboutir à une théorisation propre aux organisations sportives eu égard au critère principal de la gestion des entreprises. Nous procédons par l’établissement d’un modèle sous forme de classification. L’application des stades de développement est supposée nous conduire à une classification (qui suppose le regroupement de concepts, selon les similarités et les différences387) qui constitue la base des fondements théoriques ainsi dévoilés. La théorie met en évidence un ensemble bien développé de catégories (« concepts qui dérivent des données et qui représentent des phénomènes »388), systématiquement et étroitement liées par des énoncés de relations pour former un cadre général capable d’expliquer un phénomène pertinent. Ainsi, la conceptualisation constitue la première étape de la construction d’une théorie389. Notre classification par le canal des stades de développement est supposée produire une véritable théorie, même si selon la théorie enracinée cette dernière n’est que « substantive ».

3.2.6. Un complément statistique

Notre recherche, de nature qualitative, peut être complétée par une étude statistique sommaire. La difficulté a consisté à « quantifier » les données qualitatives. Il s’est agit de construire un tableau des estimations des stades de développement de chaque caractéristique au sein de chacun des clubs. Les correspondances qualitatives des caractéristiques permettent de définir grossièrement le stade de développement éventuel de chaque club. Sur cette base, des corrélations ont été cherchées entre le stade de développement et les principales caractéristiques, en vue de vérifier la qualité des classements opérés. Cela permet de constater l’équilibre du développement d’un club et de mettre en

386 MILES et HUBERMAN (2003), ibid., p 490-498. 387 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 94. 388 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p 148. 389 STRAUSS et CORBIN (2004), ibid., p 135. 218

évidence leurs déficiences ou leurs atouts, eu égard à leur propre stade de développement. Dans cette perspective, cette analyse statistique permet : - de faire une estimation du niveau de développement des clubs dans leur ensemble ; - de mettre en exergue la pertinence et le niveau de signification des caractéristiques retenues ; - de construire des tableaux et des graphiques mettant en évidence la qualité des liens entre les caractéristiques des clubs sportifs. Elle souligne les divergences par rapport à la norme établie par le modèle.

Cette analyse statistique est intéressante en vue de confirmer dans le détail les résultats obtenus. Eu égard au niveau de développement, elle met en évidence les divergences, les caractéristiques anormales et la simultanéité des valeurs des caractéristiques.

Conclusion de la deuxième partie

Nous avons choisi d’adapter les Modèles de métamorphose aux clubs sportifs en vue de créer un nouveau cadre théorique qui leur soit adapté. Cet outil devrait permettre de mieux comprendre sur le plan managérial, les clubs sportifs en les situant dans une grille de lecture. Il est censé aussi améliorer leur gestion en s’intéressant à leur façon d’évoluer. Ces deux objectifs vont de pair. Selon GRENIER et JOSSERAND [2003]390, deux approches sont appliquées pour étudier un même objet en management : l’étude du contenu et l’étude du processus. Le processus se définit comme l’étude de l’évolution d’une variable dans le temps alors que le contenu révèle de quoi se compose l’objet étudié. Ces deux analyses sont souvent nécessaires pour développer la connaissance d’un objet d’étude particulier. « La limite entre processus et contenu est souvent difficile à repérer, car les deux analyses se complètent. Il est souvent tout aussi difficile d’étudier un contenu sans prendre en compte sa structuration dans le temps que d’étudier un processus sans savoir de quoi il est composé »391. Il est alors essentiel de connaître précisément les états 1 et 2 pour que le chercheur

390 GRENIER C. et JOSSERAND E. , dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2., 586 p., p 104-134. 391 GRENIER C. et JOSSERAND E. , dans THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p 131. 219 puisse mettre en évidence le cheminement normal entre l’un et l’autre. L’analyse du contenu développe la connaissance sur ces états. Selon F. ALLARD-POESI, C. DRUCKER-GODARD ET S. EHLINGER [2003], les analyses de contenu « reposent sur le postulat que la répétition d’éléments de discours (mots, expressions ou significations similaires) révèlent les centres d’intérêt et les préoccupations des acteurs »392 et fait appel à des questions ouvertes. Notre recherche s’intéresse à la fois au contenu et au processus. Elle a, en effet, les deux objectifs suivants : - proposer un cadre spécifique aux clubs sportifs permettant une conceptualisation propre à leur gestion en vue d’une plus grande rigueur d’information de celle-ci ; - comprendre l’évolution des clubs sportifs pour anticiper les moments où il devient nécessaire de se transformer et de passer au stade suivant. Il s’agit d’un instrument d’anticipation et de préconisation. Il permet de découvrir le moment normal de chaque changement de dimension.

Nous avons choisi de suivre une approche qualitative réalisée sur un panel hétérogène de plusieurs sites répartis dans cinq disciplines sportives majeures que sont le basket-ball, le football, le handball, le hockey sur glace et le rugby. Nous espérons trouver à la fois des similitudes et des différences pour être en mesure de déterminer une classification des clubs sportifs.

En somme, pour schématiser la ligne directrice de notre réflexion, nous proposons le schéma ci-dessous (Schéma n°10).

392 ALLARD-POESI F., DRUCKER-GODARD C., EHLINGER S., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p 459. 220

Schéma n°10 – Mode opératoire de la méthode d’analyse

Caractéristique Evolutions Caractéristiques A 1 2 Etc. A B Caractéristique Evolutions C B 1 2 Etc.

Caractéristique Evolutions C 1 2 Etc.

Caractéristiques Etape 1 Etape 2 Etape 3 A B C = Modèles de Métamorphose appliqués aux clubs sportifs

Caractéristiques Etape 1 Etape 2 Etape 3 A = Changement de dimension progressif

B = Changement de dimension radical C

Identification des événements aboutissant à ce résultat

= Outil innovant d’amélioration de la gestion des clubs sportifs

221

PARTIE III : Adaptation des MDM aux clubs sportifs

222

L’objet de cette partie consiste à exprimer, par les codages que nous avons réalisés, les résultats qui émergent de nos données issues du terrain. Un premier codage ouvert permet de faire ressortir les caractéristiques les plus significatives pour expliquer le niveau de développement des clubs (chapitre 1). Par la suite, le niveau de chacune de ces caractéristiques au sein de chaque club de l’échantillon est mis en évidence, avant de regrouper les clubs selon le niveau de leurs caractéristiques (chapitre 2.1). Il sera alors possible de révéler la manière dont ces caractéristiques évoluent (chapitre 2.2). Ces premiers regroupements serviront de base en vue de mettre en place le modèle définitif, confectionné sous forme de tableau à partir des MDM. Ces premiers résultats seront confortés par une analyse statistique adaptée (chapitre 3). Enfin, ce modèle peut être utilisé en vue d’améliorer la gestion des clubs, en identifiant leurs changements de dimension (Chapitre 4.1) ainsi que les catalyseurs qui les conduisent (Chapitre 4.2).

Toutes les informations issues de notre analyse ont fait l’objet d’un traitement minutieux qui a pris plusieurs mois à temps plein. Il s’agissait d’effectuer des regroupements et recoupements des « phrases-témoins » et de déterminer un vocabulaire commun et représentatif d’une caractéristique. Une fois ces caractéristiques identifiées, les « phrases-témoins » issues de nos entretiens ont été regroupées sur la base des 28 sites de l’échantillon et de chacune des caractéristiques retenues. Il s’agit de mettre en évidence un vocabulaire commun ou proche et des analogies entre les clubs sportifs. La recherche consiste clairement à « photocopier des extraits d’entrevues, à les découper, à les coller sur fiches afin de rassembler ceux qui expriment une similitude thématique, à élaborer un système de codes (couleurs, signes divers) pour créer des repères visuels »393. Chaque discipline sportive, par exemple, a fait l’objet d’un code couleur. Ainsi, c’est ligne par ligne que nous avons cherché à dégager une signification des termes utilisés par nos interlocuteurs. Pour mener à bien cette classification des données, il faut procédé avec méthode et ordre. Conscient qu’en recherche qualitative, l’analyse des données débute en même temps que la collecte394, une première analyse manuelle a été effectuée,

393 SAVOIE-ZAJC L. (2000), « L’analyse de données qualitatives : Pratiques traditionnelle et assistée par le logiciel NUD-IST », Recherches qualitatives, Vol. 21, p. 99-123, p 102. 394 COFFEY, A. et ATKINSON P. (1996), « Making sense of qualitative data », Thousand Oaks, CA : Sage, 216 p. 223 en l’absence d’un logiciel de traitement de données. Ces premières études ont semblé suffisamment denses pour suivre une formation au logiciel NUD.IST (Non-numerical Unstructured Data Indexing Searching and Theorizing). Celui-ci tire sa légitimité dans l’aide qu’il apporte dans la mise en évidence des liens entre les différents thèmes retenus, dans le développement de classifications et dans la recherche de sens par la formulation de propositions. « Comme le souligne TESCH [1989], l’analyse assistée par ordinateur peut réduire le temps d’analyse, supprimer beaucoup de tâches fastidieuses, rendre les procédures plus systémiques et explicites, assurer un travail plus exhaustif et détaillé, il autorise également la flexibilité et la révision des procédures d’analyse »395. Ce logiciel se justifie d’autant plus qu’il a été développé selon la logique de la théorie enracinée396. Néanmoins NUD.IST n’est pas en mesure d’interpréter les données. SAVOIE-ZAJC L. (2000) affirme en effet que « ce sont les qualités d’intuition, de créativité, de capacité de synthèse de conceptualisation du chercheur qui s’expriment alors, car, à partir de l’ensemble du matériel d’analyse structuré conceptuellement, celui-ci tente de dégager un sens des catégories émergentes, une théorie enracinée (STRAUSS et CORBIN, 1990) »397.

Il convient d’ajouter que certaines caractéristiques étant proches les unes des autres et pourtant différentes, certains passages ont été réutilisés plusieurs fois dans la mesure où ils pouvaient expliquer deux idées différentes. Par exemple, lorsque les clubs énuméraient l’effectif du personnel permanent, l’identification des postes permettait à la fois de mettre en exergue le type d’ « organisation », mais aussi la « taille » de l’effectif. Chaque fois qu’une « phrase-témoin » manquait de significativité, un complément d’information officiel lui était adjoint, issu du club, de sa fédération ou de sa ligue. Toute information présentée par le site officiel du club ou les instances fédérales ont fait l’objet de vérifications minutieuses. Après chaque entretien, les dirigeants sportifs ont été interrogés sur les autres sources d’informations disponibles et fiables. La connaissance des adresses mail de nos

395 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p88. 396 SAVOIE-ZAJC L. (2000), « L’analyse de données qualitatives : Pratiques traditionnelle et assistée par le logiciel NUD-IST », Recherches qualitatives, Vol. 21, p. 99-123, p 104. 397 SAVOIE-ZAJC L. (2000), « L’analyse de données qualitatives : Pratiques traditionnelle et assistée par le logiciel NUD-IST », Recherches qualitatives, Vol. 21, p. 99-123, p 103. 224 interlocuteurs a permis de les contacter facilement pour obtenir de plus amples informations lorsque cela était nécessaire.

1. Les caractéristiques représentatives des clubs

En analysant la diversité des clubs sportifs, au regard entre autres de leurs ressources financières, de leur médiatisation ou encore de leur notoriété, nous pouvons observer que les clubs de football sont les plus développés dans leurs structures, suivis de près respectivement et par ordre par les clubs de rugby, de basket-ball, de handball et de hockey sur glace. Pour détailler cette observation, nous avons choisi de nous intéresser particulièrement à plusieurs structures des clubs, concernant notamment le secteur administratif, les relations avec l’environnement ou encore le domaine de la compétition sportive. Nous avons déterminé les éléments significatifs pour expliquer la variété des structures économiques des clubs, leur processus de professionnalisation, leurs activités commerciales, leur degré de popularité, leurs orientations stratégiques, leur organisation fonctionnelle ou encore la composition de leur actionnariat. Rappelons que, dans une première étape, une étude poussée avait été engagée dans un club. Nous avons rencontré plusieurs fois ses dirigeants, à des périodes différentes étalées sur une année entière. Cette première recherche nous a permis de déceler les caractéristiques représentatives des clubs sportifs dans leur approche du management de leur entité. Nous avons poursuivi nos investigations dans d’autres clubs qui nous ont permis petit à petit de compléter notre modèle. Les caractéristiques n’ont pas toujours été faciles à dénommer, mais elles ont été repérées et identifiées, dans le cadre de leur caractère significatif, eu égard aux modalités de management des clubs sportifs. Le choix du club de référence était important. Il fallait bien le connaître et disposer de la confiance des responsables. Le club des « Brûleurs de Loups » de Grenoble nous a paru répondre à ces deux critères, d’une part, parce que nous y avions été joueur en « section mineur » et en « Elite » et, d’autre part, parce que nous avions déjà engagé, lors d’une étude antérieure, une enquête de satisfaction sur ce club populaire. Nous n’avons cependant jamais intégré l’équipe administrative elle-même, ce qui nous a permis de ne pas être indûment 225 influencé par une entité économique sportive en très forte évolution. Cette connaissance de l’intérieur qui était la nôtre, constituait une base intéressante de référence, dans la mesure où elle nous permettait de discerner dans le dialogue la part du subjectif et celle de la réalité de la gestion quotidienne du club. Il est à noter que nous avions quitté le club au moment même où une nouvelle structure administrative et une nouvelle installation sportive (la patinoire du Pôle Sud de Grenoble) allaient se mettre en place. Néanmoins, pour avoir été adhérent au club pendant près de 20 ans, nous avons toujours été informé par les membres en place de son évolution, aussi bien par le Président que par les membres du Conseil de surveillance (lorsque celui-ci a été créé). Les dirigeants, avec lesquels nous entretenons des rapports cordiaux, n’ont pas cherché à dissimuler des informations qui auraient pu porter atteinte à la réalité des résultats de notre thèse. Par chance, les différents interlocuteurs auxquels nous avons eu affaire, notamment le directeur général et le président, ont utilisé des arguments solides fondés sur des compétences managériales de haut niveau. Ils nous ont accordé leur confiance et ils nous ont fourni des réponses claires, sans équivoque, rarement sous le sceau du secret. Plus que la simple connaissance de leur club, ils étaient pourvus d’une connaissance étendue de la gestion des clubs sportifs dans de nombreuses disciplines. Le club étant en phase de professionnalisation au moment où les dirigeants l’ont repris, ils ont observé longuement les diverses procédures disponibles dans toutes les disciplines déjà ou en phase de professionnalisation. D’ailleurs, aujourd’hui, le club fait figure de modèle dans sa spécialité sportive, tant celui-ci a réussi sa transformation398. À la suite de cette étude, nous avons choisi de rencontrer très rapidement les clubs qui semblaient les mieux structurés. Nous avons souhaité connaître les structures de clubs les plus modernes. Nous avons eu le privilège de rencontrer notamment un grand nom en matière de gestion d’entreprise, mais aussi en matière de sport qui a bien voulu nous accorder une demi-journée pour répondre à nos questions. Ces rencontres ont été très enrichissantes de part et d’autre. Cette première étape de découverte nous a permis de comprendre, d’une part, le passage du club amateur vers le club élite (les Brûleurs de Loups de Grenoble en hockey sur glace), et de comprendre, d’autre part, les exigences et les spécificités d’un Club aux ambitions européennes (le club de Lille en football).

398 Au moment même de la rédaction, le club vient de remporter le titre de Champion de France de la discipline. 226

Lorsque nous avons fait allusion à la taille du Club, il a été question de « budget », de « personnels salariés », mais aussi de « personnels bénévoles ». Néanmoins, les premières réactions ont été de discerner le « domaine sportif » du « domaine administratif ». Nous avons choisi de nous intéresser aux inégalités des budgets, au nombre de personnes au sein de la structure administrative du club et notamment du ratio entre le nombre de salariés et les bénévoles. Un budget conséquent permet souvent de définir l’importance des structures potentielles d’un club, mais cette seule caractéristique n’est pas suffisamment significative de sa gestion. Il convient aussi de distinguer le personnel bénévole du personnel professionnel dans la mesure où une équipe sportive professionnelle nécessite un personnel permanent. Or, cette recherche de personnel permanent ne se calque pas complètement avec la notion de bénévolat. Ainsi, la caractéristique de la taille prend une signification intéressante dans notre recherche, si l’étude se focalise sur la professionnalisation et le nombre de membres au sein de la structure administrative.

Lorsque nous avons mentionné les organes de direction et de gestion, il a été question de « professionnalisation », de « création de postes », de « rémunérations » et de « relation entre les bénévoles et les salariés », mais aussi de « dirigeants sportifs » et de « dirigeants administratifs ». Nous nous intéresserons donc particulièrement à la gestion de personnel sportif et administratif, notamment dans son stade de professionnalisation, au regard des types de postes de travail existants. Nous nous pencherons aussi sur les statuts du personnel, sur le système de motivation et de rémunération du personnel mis en place, mais aussi sur des relations parfois conflictuelles susceptibles d’apparaître entre les salariés et les bénévoles. Ainsi, l’organisation des organes de direction et de gestion constitue une caractéristique significative pour justifier le niveau de développement d’un club, si l’ensemble de ces éléments sont pris en compte.

Ensuite, nous avons souhaité connaître l’influence du niveau de compétition par rapport au niveau de développement du club. Après discussion, le niveau de développement peut être qualifié trivialement de « haut », de « bon » et de « bas ». Nous avons essayé de tenir compte des différences qui 227 existaient notamment entre les notions de « bon » et de « haut » niveau. La première (« haut ») est proche du niveau « professionnel », mais elle n’en est pas moins différente, la deuxième (« bon ») est proche du niveau « amateur ». Cependant, cette distinction n’est pas toujours applicable à toutes les disciplines sportives. Quoi qu’il en soit il convient de s’intéresser au passage du « bon » au « haut » niveau, lequel implique un processus de création de nouvelles structures nécessaires soit à la gestion même du club, soit indiqué dans le cahier des charges d’une division sportive. Ainsi, tous les clubs qui montent en Ligue 1 doivent satisfaire des critères particuliers concernant leur stade, l’organisation administrative et l’encadrement sportif.

Par la suite, nous avons souhaité recueillir des informations relatives à l’activité du club. Lorsque nous avons abordé la question des « activités commerciales », il s’est avéré que seul « les produits dérivés » ont été présentés. Lorsque nous avons utilisé le terme de « production », il était question cette fois-ci de « billetterie », d’« abonnements », de « produits dérivés », de « formation » et même de « partenariat » et, plus étonnant, de « subventions ». Ainsi, une billetterie qui fonctionne permet de dévoiler notamment la qualité de la notoriété locale, l’importance de la stabilité des revenus directs et la fidélisation du public par la dimension du secteur des abonnements. La présence de produits dérivés démontre à la fois l’envergure du soutien du public et son influence sur le budget du club. Un club sportif ayant une structure stable et développée n’aura pas les mêmes priorités qu’un club ne trouvant pas de commanditaires. La distribution et la diversification des sources de revenus sont caractéristiques d’un certain niveau de structures professionnelles d’un club. La formation des sportifs est aussi importante à connaître dans la mesure où le mérite d’un club champion peut apparaître mitigé s’il n’a pas rempli sa fonction initiale de formateur à la pratique sportive. Cette éventualité peut atteindre profondément l’image et la légitimité d’un club pour l’ensemble de son environnement. Pour développer une aura, facteur important de réussite d’un club, il est important de donner une image positive en faisant valoir ce type de bonnes pratiques en matière de formation. Les fédérations et ligues nationales sont de plus en plus concernées par cette question. Elles tentent de perpétuer l’éthique du sport par l’obligation de formation faite à tous clubs professionnels : il est question de centres de formation ou de sport-études. 228

La mise en place de telles structures coûte cher et nécessite un certain niveau de structures professionnelles. Le niveau de formation a donc son importance dans l’explication du niveau de développement d’un club. Enfin, la composition du partenariat est importante tant par son nombre que par la nature des partenaires. Un fort partenariat basé sur 2 ou 3 entités ne démontre pas une forte stabilité. Il convient de s’intéresser au nombre de partenaires et au degré de dépendance du club. En outre, la nature du partenaire a son importance puisque le club démontre une certaine « faiblesse » lorsqu’il se dit dépendant des subventions. Il renforce sa situation s’il diminue la part des subventions au regard de la billetterie, aux produits dérivés et même au partenariat privé. L’investissement d’un partenaire privé n’est pas perçu comme un soutien financier, mais comme une véritable transaction, ce qui n’est pas toujours le cas des subventions octroyées par les pouvoirs publics. Il existe, de ce fait, une réelle recherche d’autofinancement. D’ailleurs, certains clubs ont la possibilité d’aller plus loin que la vente d’espaces publicitaires dans leur enceinte. Ils proposent notamment une prestation de service que l’on appelle communément « relation client » (Customer relationship) ou relations publiques selon les cas, qui consiste, entre autres, à la mise à disposition de loges, de places VIP et l’organisation de rencontres entre partenaires lors de réceptions organisées par le club. Cette prestation est représentative d’un certain niveau de structuration du club. Elle va de pair avec la qualité et l’envergure de l’enceinte. Un club qui jouit d’une enceinte de 10 000 places avec un taux de remplissage proche de 100% n’aura pas la même structure qu’un club disposant d’une salle de 1000 personnes avec un taux de remplissage identique. Enfin, la répartition de l’ensemble des ressources d’un club est intéressante à connaître en vue d’analyser son niveau de dépendance vis-à-vis de son environnement.

La notoriété du club constitue une autre caractéristique non négligeable. De notre analyse, il ressort plusieurs notions comme « la médiatisation », « les différences de retombées médiatiques selon les disciplines sportives », les notions de « public initié » et « public non-initié » et, une fois de plus, « le partenariat ». Le degré de popularité a son importance puisqu’il permet au club de se faire valoir auprès des investisseurs, d’avoir une politique de billetterie plus conquérante, de vendre ses produits dérivés comme témoignage payant de la fidélité d’un public. Ce degré de popularité est différent 229 selon les disciplines sportives. Seules quelques-unes sortent du lot, mais la masse des disciplines sportives est confinée dans une configuration dans laquelle la médiatisation est sommaire et la population intéressée trop ciblée. De ce fait, les investisseurs désireux de se faire connaître au niveau national n’ont d’autres choix que d’investir dans des disciplines phares. Dans ces sports, les inégalités existent aussi entre les clubs ayant obtenu des résultats sportifs ou disposant d’une certaine aura fondée sur leur histoire et d’autres clubs de bas de tableau, plus anonymes. Il convient donc de mesurer le degré de popularité des clubs dans le grand public, mais aussi auprès d’un public connaisseur. Certaines disciplines ou clubs sportifs ne vivent que de la passion d’une population initiée. Parallèlement, les partenaires seront de nature différente selon la notoriété du club et sa zone de chalandise.

La caractéristique concernant la communication est liée à la notoriété, puisque d’elle dépend aussi de l’intérêt de la population pour un club. Les systèmes de communication sont cependant multiples dans le secteur sportif. Les systèmes sont significatifs d’une structure d’un club dans la mesure où certains clubs pourront toucher une masse importante de gens à l’échelle nationale, voire internationale et que d’autres se contenteront de se faire connaître dans leur région. La télévision permet à certains clubs sportifs d’obtenir une manne financière considérable. Autrement dit, selon le système de communication présent, le niveau des structures mises en place est susceptible d’être identifié en partie. C’est pourquoi les moyens de communication d’un club constituent un indicateur intéressant de son niveau potentiel de structure.

Les orientations stratégiques sont aussi significatives du niveau de structure du club. Lorsque nous avons mentionné ce critère, de nombreux concepts sont apparus dans le langage de nos interlocuteurs, comme « la situation géographique », « l’implication dans la vie locale », « la recherche d’indépendance financière », « le stade », « la recherche de notoriété » ou encore « la transformation du spectacle sportif ». Un club réussissant à attirer une foule de non-initiés est parvenu à proposer un spectacle autre que celui qui attire le simple spectacle sportif. Dans cette configuration, le spectateur vient aussi pour le spectacle, le sensationnel, l’ambiance, la beauté du jeu, la fierté d’y participer ou la simple curiosité. Dans ce contexte, le club 230 oriente sa stratégie de manière bien différente de ceux qui cherchent d’abord à remplir leurs tribunes. Les orientations stratégiques peuvent témoigner de la qualité de la structuration du club. Rappelons que les premières orientations du club sont la formation à la discipline sportive, la performance sportive et la perpétuation du club. Plus tard, il peut s’agir d’amélioration du spectacle sportif ou d’implication dans la ville. Il s’agira, enfin, de créer une filiale à l’effigie du club pour la vente de produits dérivés.

Enfin, pour comprendre la structuration du club, il convient de se poser la question de son fonctionnement. Disposer d’un personnel permanent n’est pas une caractéristique qui, à elle seule, est en mesure de définir le développement d’un club. Il s’agit aussi de s’intéresser à la manière dont s’articulent les relations au sein du personnel. Lorsque nous avons abordé la question, il a été fait état du « style de management », de « la prise de décision », « de sectorisation » ou encore de « responsabilisation ». Ainsi, un club disposant d’un personnel permanent et qualifié aura plus tendance à prendre des décisions réfléchies, puisque collégiales, qu’un club dénué de tout personnel et vivant sur la seule force de travail d’un président passionné bénévole, aussi compétent soit-il. Nous pouvons penser que le travail à plusieurs donne souvent de meilleurs résultats. De plus, un club ayant déterminé de manière précise les tâches de chacun, notamment en sectorisant le club, sera mieux structuré qu’un club dans lequel n’importe quel membre intervient sur l’ensemble des domaines de l’organisation. De la même manière, il est différent de manager un bénévole (libre de son temps et de ses mouvements) qu’un salarié (qui doit respecter la discipline au travail). C’est pourquoi ces caractéristiques sont à prendre en compte pour démontrer un niveau de développement d’un club sportif.

Enfin, la composition de l’actionnariat est aujourd’hui un élément à considérer pour les clubs qui s’y sont engagés sous des formes diverses. Lorsque nous avons abordé cette caractéristique, il a été question du « statut de l’organisation » et de « la composition du capital ». Le club sportif à sa création a généralement constitué une organisation à statut associatif. Avec son développement, il est parfois conduit à constituer une société. En effet, une fois que certains seuils en matière de masse salariale et de recettes sont franchis, la loi prévoit le devoir de constitution d’une société (cf. partie I). Il est donc 231 intéressant de connaître le statut que choisit le club pour prendre en compte son degré de développement. De la même manière, la composition du capital a son importance. Il est intéressant aussi de connaître les raisons pour lesquelles les clubs ont choisi leur structuration actuelle, sur la base d’un Conseil d’administration ou d’un conseil de surveillance et d’un directoire. Ensuite, il s’agit de déterminer la répartition des parts et des droits de vote. Il arrive que l’apport d’un investisseur dans un club soit si conséquent que le club devient sa quasi-propriété. Dans ce cas, la politique dépend aussi d’un seul homme.

La définition d’un niveau de développement d’un club nécessite l’analyse de nombreuses caractéristiques qui sont souvent auto corrélées. Nous allons reprendre les informations recueillies pour chacune des caractéristiques au sein des différents sites visités, de manière à comprendre la diversité des situations.

2. Les résultats de l’enquête

Nous ferons émerger, dans un premier temps, les niveaux de développements découverts au sein de clubs de notre échantillon pour chacune des caractéristiques. Ensuite, nous reprendrons les évolutions que chaque club a rencontrées pour l’ensemble des caractéristiques.

2.1. Les catégories de clubs sportifs Dans cette partie, il s’agit de mettre en évidence les diverses classes des caractéristiques définies préalablement. Chaque club connaît des secrets, de nature différente selon le niveau de développement de la caractéristique étudiée. Nous essayerons à la fois de discerner les cas singuliers en les faisant remonter à la surface et de regrouper des clubs possédant des caractéristiques situées à des niveaux de développement semblables. Nous reprendrons ainsi chacune des disciplines en révélant les catégories potentielles à l’intérieur de chacune d’elles. Rappelons que nous nous sommes basé sur 28 clubs (présentés sous les dénominations allant de C1 à C28) de 5 disciplines sportives et que toute information qui pouvait nous être utile a été utilisée, si le besoin s’en faisait sentir. Nous allons distinguer les caractéristiques internes et externes.

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2.1.1. Les caractéristiques internes

Les caractéristiques internes font références aux critères de la taille, du niveau de compétition, du budget, de la répartition des ressources, des priorités de gestion, de l’organisation, du fonctionnement et de la gestion du personnel.

2.1.1.1. Le critère de la taille La taille d’un club peut être révélateur de sa structuration et de son importance, notamment lorsque celui-ci est encore régi en statut associatif. Les adhésions démontrent un certain savoir-faire. Cependant, lorsque le club décide de passer en société pour la gestion de son équipe professionnelle qui constitue son principal vecteur de communication, cette valeur perd de sa représentativité puisqu’elle ne prend en compte que l’équipe Senior fanion. Or, les effectifs sont bien différents d’une discipline à l’autre. En outre, la taille d’un club peut varier sans cesse, notamment lorsqu’il est question de l’utilisation quotidienne de bénévoles. En effet, le bénévole n’aura pas le même sentiment s’il quitte un club au regard de celui d’un salarié : l’un perd la sensation d’appartenance à un groupe social, l’autre perd son salaire et, parfois, son statut social. Ainsi, un bénévole aura moins d’intérêt à rester dans cette entité s’il n’y trouve pas son compte. Il existe donc une certaine volatilité des personnels informels et parfois des formes de prévarication. Lorsque l’on parle de taille, il convient donc plus de parler des salariés administratifs ou des bénévoles impliqués dans la gestion du club que de bénévoles qui donnent « un coup de main » ou encore de pratiquants obligés d’être « au four et au moulin ». En effet, prendre en compte dans le comptage du nombre de salariés sportifs d’un club de rugby par rapport à celui d’un club de handball n’a que peu de signification au regard des effectifs des équipes : l’une possèdera près de 40 joueurs professionnels (avec au moins 15 joueurs de champ), l’autre d’une quinzaine (avec 6 joueurs de champ). Ainsi, lorsque le critère de la taille est concerné, il est question essentiellement de la structure de gestion dite « administrative » notamment de ses salariés ou des bénévoles aux postes de dirigeants. Plus précisément, le niveau de professionnalisation du domaine administratif est intéressant. Il met en exergue le personnel en charge du fonctionnement du club, en déterminant le nombre de personnes salariées et leur situation contractuelle (salariés à temps plein, à mi-temps ou encore bénévoles parfois défrayés) dans le cadre de la 233 gestion de l’entité économique elle-même, indépendamment du secteur sportif stricto sensu. Les résultats sont donc les suivants : 1. Au sein du personnel administratif, 1 seul club n’est constitué que de bénévoles (C28) ; un autre, C6, a deux bénévoles qui perçoivent une petite rétribution pour leur travail qui n’est pas suffisante pour les faire vivre.

2. 14 clubs ont 3 à 6 salariés administratifs composés d’emplois à temps plein, à mi-temps, jeunes, précaires, en alternance. C’est le cas pour C2, C4, C7, C8, C9, C11, C12, C15, C17, C18, C19, C20, C24 et C25. Il est intéressant de noter que certains clubs emploient ainsi à ces fonctions certains joueurs du club, en vue de les défrayer ou de leur offrir une formation professionnelle.

3. 8 clubs ont entre 8 et 10 personnes, dirigeants ou simplement administratifs salariés, tous (à l’exception de 2 clubs) à temps plein : il s’agit de C1, C3, C5, C14, C16, C21, C22 et C26.

4. Enfin, 4 clubs comptent plus de 10 salariés dirigeants et administratifs (C10, C13, C23, C27). Deux d’entre eux (C13 et C23) en ont plus de 30.

Les clubs d’une même discipline se situent généralement dans les mêmes catégories, mais ce n’est pas toujours le cas. Nous distinguons ainsi plusieurs catégories : les clubs composés uniquement de bénévoles, les clubs au personnel administratif professionnalisé avec des emplois précaires, généralement à mi- temps, et les clubs au personnel administratif professionnel avec des tailles plus ou moins importantes allant de 10 à plus de 30 salariés à temps plein. Les clubs comptant le plus grand nombre de personnes salariées n’ont pas atteint ce nombre dès leur création. Ils ont embauché petit à petit du personnel de manière à être en phase avec leurs besoins du moment. À un moment de leur vie, ils ont atteint le seuil des 10 avant d’arriver à celui des 30 salariés. Il s’agit donc d’une « employabilité » progressive, fondée sur les progrès sportifs et économiques du club ou de la discipline sportive.

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Tableau n°11 - Récapitulatif des tailles par clubs

Dirigeants C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 1 à 4 X X bénévoles 3 à 6 X X X X X X X X X X X X X X salariés 10 salariés 8-10 X X X X X X X X salariés + de 10 X X X X salariés

2.1.1.2. Le critère du niveau de compétition Au sein de notre échantillon, il est possible de distinguer 3 catégories de clubs sportifs selon leur niveau de compétition : 1. 23 clubs sont au plus haut niveau de leur discipline. Certains sont considérés comme les locomotives de leur discipline sportive du fait de leurs résultats sportifs ou de leur importance économique nationale ou locale. Leur notoriété est souvent fondée sur un passé glorieux en termes sportifs, soit par leurs résultats sportifs, soit par leurs performances sportives. Les résultats sportifs expriment le palmarès d’un club, son accession à un ou plusieurs titres ou trophées. De ce fait, les clubs qui ont gagné des compétitions importantes appartiennent à l’histoire du sport et ils constituent souvent des piliers incontournables de la discipline. La performance sportive se différencie des résultats proprement dits, en ce sens que, compte tenu de leurs moyens, certains clubs se maintiennent dans l’élite sans pour autant pouvoir espérer remporter un titre. Ainsi, certains clubs peu fortunés n’en sont pas moins soutenus par une ferveur populaire qui ne peut pour autant s’exprimer dans l’ordre des résultats économiques et sportifs. Or, les résultats sportifs constituent souvent le facteur principal pour attirer l’intérêt du public et des investisseurs. Au regard de leur budget, certains clubs ont peu de chance d’obtenir des résultats sportifs, mais ils ont la possibilité de réaliser des « performances sportives » en défrayant la chronique et en s’imposant face à des équipes au budget autrement plus conséquent. L’intérêt de la Coupe de France en football est accru depuis que nombre de clubs amateurs ont réussi à s’imposer face à de grosses écuries. Il est souvent question de métaphores celle du « Petit Poucet contre l’ogre » ou celle de « David et Goliath ». Ces victoires permettent à certaines équipes de conserver une attraction et de susciter même un engouement populaire. De façon identique, un club à petit budget atteignant les hautes sphères de la 235

discipline et réussissant à s’y maintenir, à l’instar d’un club longtemps jugé trop petit comme l’AJ Auxerre en Ligue 1 de football, aura encore et toujours le soutien de sa ville, de sa région et des supporters qui connaissent le prix de la formation et apprécient le travail artisanal.

2. Ensuite, 3 clubs sont inscrits dans la division inférieure (C10, C19, C26), mais ils appartiennent à la Ligue Professionnelle de leur discipline. À ce titre, ils sont professionnels. L’un d’entre eux a d’ailleurs atteint la division élite au cours de notre analyse.

3. Enfin, 2 autres clubs ne faisant pas partie des deux premières divisions ont été rencontrés (C6 et C11). L’un d’entre eux a cependant accédé à la Ligue professionnelle au cours de notre analyse. Il convient de préciser que la discipline sportive dans laquelle évoluent ces clubs, en « équivalent » division 3, est composée d’une masse importante de pratiquants dans l’hexagone. Dans ces conditions, appartenir à ce niveau de compétition (parmi les cent meilleurs clubs de France) est considéré, pour nombre de connaisseurs, comme une performance sportive intéressante, impliquant des moyens financiers supérieurs à ceux des clubs « élite » d’autres disciplines moins populaires.

Nous apercevons donc différents niveaux de compétition. Il est possible de distinguer les clubs selon trois catégories : le rang commun, le rang élevé et le rang supérieur. Le rang supérieur ne concerne que les clubs professionnels ou, le cas échéant, ceux qui appartiennent à la première division de leur discipline si le professionnalisme n’est pas reconnu. Rappelons que, dans le système français qui fonctionne sur un système de « promotion-relégation », il faut passer par toutes les divisions avant de rejoindre le haut niveau et, donc, le professionnalisme. Chaque club de rang supérieur a franchi les étapes pour atteindre le haut niveau.

Tableau n° 12 - Récapitulatif des niveaux de compétition par clubs

Rang C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 commun X X élevé X X X supérieur X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X 236

2.1.1.3. Le budget Les budgets sont différents selon les disciplines sportives, en raison de l’attractivité, notamment médiatique, de celles-ci. Cependant, il existe aussi une forte hétérogénéité entre les clubs sportifs d’une même discipline eu égard à leur niveau de compétition, à leurs résultats sportifs, au tissu économique ou aux soutiens publics et privés. Deux clubs d’un même championnat disposeront des budgets bien différents pour diverses raisons. Les budgets peuvent connaître une évolution importante d’une saison à l’autre, mais ils restent souvent dans une certaine fourchette de stabilité pour la majorité des équipes (Annexe 1). S’ils sont différents, chacun d’eux peut s’apparenter aux budgets de clubs d’autres disciplines, par un « effet d’imitation ». Aujourd’hui, les sommes offertes aux joueurs de rugby de l’hémisphère sud sont, pour une grande part, inspirées de la publicité faite sur les revenus des dieux du ballon rond, mais à un niveau encore bien inférieur, selon une démarche de type homothétique. Si aucune discipline, excepté le rugby, ne peut rivaliser avec les budgets des clubs de football de Ligue 1, certaines sont composées de clubs aux budgets proches. Voici un premier classement révélateur : 1. En 2005-2006, 3 clubs (C13, C23, C27) dégageaient un budget largement supérieur aux autres, de 17 à 38 millions d’euros. 2 clubs sont des clubs de football de Ligue 1, le dernier étant un club de rugby du TOP 14.

2. Ensuite, les budgets de 8 clubs (C1, C3, C5, C10, C14, C21, C22 et C26) se situaient entre 5 et 10 millions d’euros : 5 étaient des clubs de rugby du Top 14, 2 étaient des clubs de basket-ball de Pro A et 1 était un club de football.

3. Un autre groupe se dégage, composé d’un club de handball de division 1 et de 2 clubs de rugby de Pro D2, avec des budgets compris entre 3.5 et 4.5 millions d’euros : C15, C16 et C19.

4. Apparaît ensuite la tranche la plus importante à savoir les clubs disposant d’un budget compris entre 1.2 et 2.3 millions d’euros. Ils sont au nombre de 12 parmi lesquels 4 clubs de hockey sur glace, 4 clubs de handball, 3 clubs de basket-ball auxquels s’ajoute 1 club de rugby de Fédérale 1 : C2, C4, C7, C8, C9, C11, C12, C17, C18, C20, C24 et C25. 237

5. Enfin, 2 clubs n’atteignent pas la barre du million d’euros et évoluent l’un en élite du championnat de hockey sur glace, l’autre en fédérale 1 de rugby (C6 et C28).

Certains clubs que nous avons rencontrés ont été promus depuis, d’autres ont participé aux ligues européennes, ce qui leur a permis de développer leur budget de manière substantielle. Les autres sont plus stables. Ainsi, au regard de ces chiffres, nous pouvons constater que l’hétérogénéité est forte selon les clubs et les disciplines, mais que certains clubs ont peu à envier à d’autres provenant de disciplines plus renommées. Nous pouvons affirmer que si le potentiel de développement n’est pas le même pour toutes les disciplines sportives, certains clubs peuvent faire valoir une situation budgétaire tout aussi

importante que d’autres clubs des disciplines phares. Leur force financière est alors tout aussi conséquente. Chaque club aux budgets conséquents n’est pas passé d’un budget de moins d’1 million à 38 millions d’euros d’une saison à l’autre. Notons néanmoins que la participation du club C13 (Ligue 1) à une coupe européenne lui a permis de doubler quasiment son budget entre deux saisons en raison des droits télévisuels importants de cette compétition.

Tableau n°13 - Récapitulatif des budgets par clubs

Budget C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 17 à 38 millions X X X d’euros 5 et 10 millions X X X X X X X X d’euros 3.5 et 4.5 millions X X X d’euros 1.2 et 2.3 millions X X X X X X X X X X X X d’euros Moins d’1 million X X d’euros

2.1.1.4. La répartition des ressources Les ressources développées par les clubs sportifs sont de plus en plus diversifiées. Au départ, les subventions étaient les seuls véritables fonds sur lesquels le club pouvait compter avec les adhésions au club. Désormais, le club peut s’appuyer sur des recettes de billetterie, de partenariat, des droits télévisuels, des produits dérivés, des prestations de services à leurs partenaires, la restauration pendant les matchs, etc. Néanmoins, tous les clubs ne jouissent pas des mêmes possibilités tant en termes de diversification qu’en termes de répartition. Aujourd’hui, près de 60% du budget en moyenne 238 des clubs de football de Ligue 1 proviennent des droits télévisuels et la question se pose de savoir s’il est encore justifié de subventionner les clubs sportifs professionnels. Parallèlement, en plus de leurs adhésions, la grande majorité des clubs sont financés par les subventions des collectivités publiques. Il existe donc de forts déséquilibres de ressources. Un club développant d’importantes recettes liées directement à son activité de spectacle constitue une situation plus stable qu’un club ne vivant que de subventions dans la mesure où le soutien financier est renégocié à chaque début de saison, avec tous les problèmes de trésorerie afférents. Plus la répartition des recettes du club est orientée sur ses ressources propres au détriment des soutiens financiers, plus le club se stabilise et s’inscrit dans l’économie de marché. Il doit gagner en indépendance sur les soutiens financiers quels qu’ils soient. 1. La première catégorie est bien singulière puisqu’elle regroupe les clubs ayant comme principale ressource les droits télévisuels. Seul le football (3 clubs de notre échantillon : C10, C13 et C23) peut disposer de ce type de clubs sportifs. Les droits télévisuels d’un de ces clubs atteignent près des 70% de son budget. Sa participation aux ligues européennes n’y est pas pour rien. Rappelons que les droits TV sont répartis pour l’ensemble des clubs sur un système méritocratique prenant en compte notamment les diffusions, les résultats sportifs ou encore la formation399. Les droits TV d’un autre atteignent les 3/5 de son budget et le dernier près de la moitié. La deuxième ressource de ce type de club est souvent le partenariat ou la billetterie.

2. La deuxième catégorie est composée de clubs disposant d’une part importante de ses ressources liée au partenariat, soit près de 50 % de ses ressources. Plus encore, la part concernant la billetterie et les abonnements est importante et se positionne avant les subventions. 3 clubs sont dans cette situation. 2 clubs de rugby et 1 club de basket-ball. Ce sont trois clubs phares de leur discipline. Deux d’entre eux, C22 et C27, ont

399 Ligue 1 : trois critères sont utilisés : 50% sont distribués égalitairement (critère de solidarité), 30% suivant le classement sportif des clubs (un critère sur 5 ans révolus et un sur la saison en cours) et 20% suivant le nombre de diffusions TV (un critère sur 5 ans révolus et un sur la saison en cours).

Ligue 2 : trois critères sont utilisés : En 2005-2006 : 80-85% sont distribués égalitairement (critère de solidarité), 5% suivant le classement sportif des clubs sur la saison (critère de classement), 5% suivant la qualité de la formation (classement des centres de formation sur la saison écoulée). Ajoutons à cela 6-7% pour l’aide à la relégation. 239

développé une véritable économie avec leurs produits dérivés et brasserie puisqu’ils atteignent pour C27, la même part que la billetterie (autour des 20%), et pour C22 une part plus importante avec ce type d’activité (30%). C21 développe près du tiers de ses ressources en billetterie, mais il est une exception dans sa discipline sportive. Pour les 3 clubs, les droits TV correspondent à 10% de leurs ressources. Pour les deux clubs de rugby, la ligue a décidé que les droits de télévision seraient fixes entre 2001 et 2007 et la redistribution égalitaire. La ligue de rugby affirme que les recettes de match et le partenariat sont en sensible augmentation dans l’ensemble des clubs. Toutefois, les clubs qui jouent le « haut du tableau » bénéficient généralement de plus de produits et charges exceptionnels provenant du mécénat, mais aussi d'effets de reclassements, notamment pour les participations à des phases finales (recettes supplémentaires et primes joueurs pour objectifs sportifs notamment).

3. Une troisième famille se dégage concernant les clubs disposant d’une part importante de leurs ressources liée au partenariat, mais ayant des subventions et une billetterie sensiblement proches. Les subventions constituent une ressource non négligeable pour ces clubs. Elle se situe généralement autour des 10-15% des ressources, mais plus de 20% pour l’un d’entre eux. Le partenariat atteint toujours près de la moitié des ressources, soit environ 45%. Nous retrouvons 1 club de basket-ball (C14) et 5 clubs de rugby : C3, C5, C14, C15 et C26. C14 dispose d’une subvention importante en raison d’un manque de notoriété de sa discipline.

4. Certains clubs jouissent d’un partenariat important qui constitue une part importante de leurs ressources qui est accompagnée, comme second poste de recettes, par les subventions. La subvention devient nécessaire au regard des autres ressources développées. Le soutien financier reste de plus en plus nécessaire. Nous retrouvons au sein de cette catégorie 2 clubs de rugby, 1 club de basket-ball, 1 club de handball, 1 club de hockey sur glace. C19, au regard de la notoriété de sa discipline et de son isolement en termes de concurrents sportifs, dispose d’un soutien important de partenaires, mais la taille de sa localité l’oblige à demander des soutiens financiers. Cependant, il se prévaut de vivre essentiellement sur ses vrais revenus plutôt que par des 240

subsides ou à crédit. Lorsque nous avons rencontré son dirigeant, C1 évoluait dans une division qui ne faisait pas partie de la ligue professionnelle. Il constituait un cas singulier dans son championnat dans la mesure où son sponsoring était important. Néanmoins, les subventions étaient proches des 30%. L’année d’avant sa rétrogradation400, il évoluait dans la plus haute division, son partenariat était sensiblement le même en termes de poids, soit plus de la moitié de ses recettes, mais ses subventions atteignaient seulement 10%. Aujourd’hui, remonté en 2ème division, son sponsoring doit être toujours important, mais le poids de ses subventions est en réduction en pourcentage de ses recettes. C24 a réussi à créer la sensation autour de lui avec ses résultats sportifs, mais son tissu économique relatif suppose une aide importante des subventions à hauteur de 35% de ses ressources. Deux autres clubs constituent des cas singuliers : l’un, C20, parce qu’il dépend fortement du partenariat (60%) et, notamment, d’un commanditaire, mais aussi des subventions (34%) ; l’autre, C17, parce que son parrainage atteint 50% et ses subventions 20% alors que l’ensemble des autres clubs de sa discipline inverse les tendances. À noter que C20 est dans la même configuration comparativement aux autres clubs de sa discipline.

5. La famille suivante comprend des clubs (un club de rugby et 2 clubs de basket-ball) partageant l’essentiel de leurs ressources entre le partenariat et les subventions. Pour les trois clubs à savoir C4, C6 et C8, ces deux postes avoisinent les 80% du budget.

6. Enfin, pour tous les clubs restants, C2, C7, C9, C12, C16, C18, C25, C28 et la principale ressource provient des subventions. Leur autonomie est faible, même si les budgets ne sont pas négligeables. Leur discipline n’ayant pas le même attrait ou la même médiatisation que d’autres, ils peinent à trouver des commanditaires. Certains clubs considèrent, cependant, les municipalités comme de vrais partenaires dans la mesure où ils constituent un vecteur de communication important pour la localité. C9 et C28 sont principalement dépendants des subventions qui atteignent respectivement plus de 80% et près de 70% des ressources. Néanmoins, C28 a développé son partenariat qui

400 Le club a été rétrogradé, après avoir déposé le bilan, de deux divisions. 241

atteignait 10% il y a peu pour atteindre désormais 30% des ressources. Pour C7 et C16, les subventions atteignent 60% environ, mais leur partenariat reste important (respectivement 22.5% et 32%) notamment C7 qui affirme atteindre très prochainement le seuil de 45% au détriment des subventions. C18 est moins dépendant que les clubs précédents des subventions lesquelles atteignent 46% avec un partenariat évalué à 37% des ressources. Enfin, trois clubs, C2, C12 et C25, ferment la marche avec des subventions importantes de l’ordre de 50% et avec un partenariat proche de 30%. C12 se distingue tout de même en ayant une billetterie représentant 30% du budget. (Ajoutons que les clubs en statut associatif peuvent aussi générer une part substantive des recettes par le biais de leurs adhésions au club).

Les clubs de handball et de hockey sur glace dépendent encore beaucoup des subventions, mais les partenaires sont de plus en plus importants. Le basket-ball, mis à part les grands clubs de la discipline, semble partager l’essentiel des ressources entre partenariat et subventions, les clubs de rugby misent de plus en plus sur le partenariat et la billetterie, mais ils devraient s’appuyer dans le futur sur un soutien important des droits TV, alors que les clubs de football, seuls au monde, sont très dépendants des droits TV. Le football se distingue aussi par les indemnités de transferts qui aujourd’hui peuvent constituer une ressource importante. Pour les autres disciplines sportives, il n’existe pas (ou peu) d’opérations de transfert. Les contrats supérieurs à 1 an sont rares, en hockey sur glace notamment.

Tableau N°14 - Récapitulatif de la répartition des ressources par clubs

Répartition C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 ressources Droits TV X X X Partenariat puis X X X billetterie puis subventions Partenariat puis X X X X X X subventions et billetterie Partenariat puis X X X X X subventions Subventions et X X X partenariat Subventions X X X X X X X X

242

2.1.1.5. Les priorités de gestion Le but fondamental d’un club est de réduire sa dépendance à l’égard des résultats sportifs conjoncturels. Cet objectif paraît partiellement utopique dans la mesure où un club se doit d’accomplir des performances, ce qui est la raison même de son existence. Néanmoins, aujourd’hui, la vie d’un club ne se limite pas uniquement à l’accomplissement de résultats sportifs, c’est un divertissement, un concept de vie, une fierté locale et même une structure fédératrice. Ainsi, la recherche d’indépendance d’un club vis-à-vis des résultats sportifs n’est pas une démarche vaine dans la mesure où il peut conserver le soutien indispensable de l’ensemble de son environnement quels que soient les résultats bruts proprement dits. Il s’agit donc de pérenniser les structures, indépendamment des périodes de « crises sportives et de créer une demande indépendante des résultats, ce qui suppose l’organisation d’un vrai spectacle total, l’identification des spectateurs et parrains au club ou la création d’une marque aux qualités commerciales reconnues. Ainsi, les « marques » Real de Madrid et Manchester United peuvent se permettre aujourd’hui quelques performances insuffisantes dans le court et moyen terme, à condition cependant de ne pas dépasser les bornes de la contre-performance quasi institutionnalisée. Cependant, la priorité de gestion de la grande masse des clubs n’est pas de devenir une marque, mais d’offrir les moyens au secteur sportif d’obtenir de bons résultats, en vue d’assurer la pérennité. Il est donc intéressant de mettre en évidence les ambitions des clubs eu égard à leur situation globale au moment où nous les avons rencontrés. 1. La première catégorie comprend les clubs ayant déjà obtenu un soutien important du fait de leur histoire, de leurs résultats sportifs ou de leur concept. Ces organisations sportives sont toutes bien structurées et elles cherchent à consolider leur image pour devenir une marque à part entière. Il n’est question que des clubs de rugby et de football. C13 est de notoriété nationale, voire internationale, pour le grand public notamment par le canal de bons résultats sportifs ces dernières années et de la médiatisation de sa discipline sportive. À ces résultats, ajoutons une recherche d’implication des partenaires dans ses projets (tournés vers la formation) et la construction d’un stade polyvalent avec un financement en partie privé dans l’optique d’une amélioration et d’une diversification du spectacle. Dans ces conditions, le club semble en mesure de devenir une marque à part entière. La prochaine 243

étape suppose le développement de ses activités commerciales, avec des franchises ou autres en vue d’accroître son rayonnement, mais cette étape n’est pas encore à l’ordre du jour. C23 a obtenu de bons résultats sportifs, il est de notoriété nationale, avec une ouverture à l’international, auprès du grand public. Il cherche à lisser son image en jouant sur l’image de sa région dont il se dit représentant. Son récent stade lui permet de proposer un spectacle total, même s’il ne lui permettra pas, à son grand regret, d’en faire un lieu de vie. La prochaine étape sera la filialisation, mais les dirigeants n’en éprouvent pas le besoin pour le moment. Il en est de même pour C1, C22 et C27 qui ont obtenu de bons résultats sportifs, même si C1 et C22 sont toujours à la recherche d’un titre. Ils dégagent, cependant, une véritable « aura » auprès du grand public, notamment C27. Ces clubs font partie des principaux représentants de leur discipline. Ils comptent s’impliquer dans la vie locale avec de plus en plus de présence au quotidien. Leur structure administrative est entièrement professionnelle et C22, avec son nouveau stade, compte améliorer ses relations clients, notamment avec la création de nouvelles loges. C1 veut, lui améliorer sa politique d’abonnements. C3 se différencie quelque peu puisque ses résultats sportifs ne sont pas élogieux en dépit d’un glorieux passé. Le soutien de son public et de ses partenaires est cependant remarquable, entretenu par une politique fondée sur un véritable concept de vie. Son histoire, l’engouement autour de lui, la médiatisation de sa discipline font de lui un club fiable. Il ne lui manque que les résultats sportifs.

2. Une deuxième famille se dégage constituée de clubs « sans marque spécifique », qui possèdent des structures administratives efficaces, plus ou moins professionnelles. La notoriété et/ou le tissu économique de ces clubs leur permettent de concevoir un avenir proche intéressant, malgré des difficultés en termes de résultats sportifs pour certains d’entre eux. Il est déjà question de transformer le spectacle sportif en un véritable lieu de vie. Cette famille est composée de 4 clubs de rugby, 2 clubs de basket-ball, un club de handball et un club de football : C5, C10, C11, C14, C15, C16, C21 et C26. Deux clubs, C5 et C15, ont des similarités dans la mesure où leur tissu économique ne leur permet pas de se développer comme ils l’entendraient. C5 a un historique plus fourni que C15, même si ce dernier a, 244 jadis, remporté un titre de champion de France. Ils se présentent comme les emblèmes de leur localité et comme un vrai lieu d’animation. Les résultats sportifs impressionnants de C5 lui permettent d’espérer la construction, par le biais de financements privés, d’un nouveau stade pour l’amélioration du spectacle, des relations-clients, mais aussi pour la transformation du spectacle sportif en une animation permanente dans l’optique de constituer un lieu de vie de qualité. La vraie différence entre les deux clubs provient des ambitions sportives de chacun, puisque l’un vise le titre, l’autre le maintien, en raison de la qualité déséquilibrée de leurs joueurs et de leur budget. De ce constat, les relations avec l’environnement sont quelque peu différentes. C11 et C26 ont eux aussi des ressemblances dans la mesure où leur présentation n’est plus à faire, notamment pour un public initié au fait de leur histoire, et qu’ils n’évoluent pas dans la plus haute division. Leur passé les désignaient comme des piliers de leur sport au niveau national, mais leurs déboires financiers les ont conduits à la rétrogradation. Il n’empêche que leur aura est toujours présente. C11, lorsque nous l’avons rencontré, ne faisait pas partie de la ligue professionnelle, mais sa structuration par rapport aux autres clubs de son championnat nous amenait à penser qu’il devrait remonter en division professionnelle, chose qu’il a réalisé dans la saison suivante. C26 est descendu d’une division après avoir été promu précédemment, mais il est depuis en pleine reconstruction avec l’aide exemplaire de son environnement territorial. Il a la prétention d’améliorer le spectacle offert, voire de créer un nouveau lieu de vie grâce à l’aménagement et l’agrandissement de leur stade une fois la promotion dans la division de l’élite obtenue. Deux autres clubs ont des similitudes particulières puisqu’il évoluent dans la même discipline et constituent des « piliers » de celle-ci sur le plan national (C14 et C21). Ils cherchent le titre, ils disposent d’enceintes importantes par rapport à la majorité des équipes du championnat, ils proposent plus qu’un spectacle sportif, ils font beaucoup de relations-clients et ils reçoivent une forte demande d’implication au sein de la vie locale. Ils devraient participer à la prochaine échéance proposée par leur ligue avec la construction d’une « Nouvelle Ligue » basée aussi sur des critères de structures des clubs. C14 a même l’ambition de créer un nouveau stade pour transformer le simple spectacle en un lieu de vie et améliorer les relations- 245

clients par la mise à disposition de loges. C16 est proche de ces deux clubs, mais son enceinte et la notoriété de sa discipline lui font défaut. Il est le représentant de sa discipline, notamment par sa structuration jugée exemplaire et, surtout, la qualité de ses résultats sportifs. Enfin, C10 a réussi à atteindre un niveau de compétition de qualité, bien qu’en deuxième division, dans une discipline importante, mais sa notoriété est faible dans la mesure où son existence est récente. Il ne crée par de ferveur, car il n’a pas d’histoire et l’aura qui naît des « campagnes sportives glorieuses ». Néanmoins, ses prochaines structures et les ambitions sportives de ses récents repreneurs lui donnent une part importante et croissante dans la vie de la ville qui dispose d’un tissu économique en développement. Sa priorité est aujourd’hui de rejoindre le niveau le compétition sportive le plus haut pour avoir la possibilité d’atteindre ses ambitions économiques et sociales. Il se propose de créer une ferveur locale autour de son concept et de l’équipe « élite ».

3. La troisième classe est constituée de clubs qui ne jouent pas toujours les titres, mais qui figurent dans les compétitions au plus haut niveau. Leur organisation administrative est de plus en plus structurée, mais elle nécessite, selon eux, une consolidation notamment par la poursuite de leur professionnalisation. Pour certains clubs, le tissu économique dans lequel ils sont situés ne leur permet pas d’avoir d’autres prétentions que le maintien au haut niveau. Cependant, paradoxalement, le soutien local est décuplé. Il est alors plus questions de performances que de résultats sportifs. Ces clubs (C4, C19 et C24) constituent une véritable animation pour leur localité, en faisant notamment venir sur place les équipes prestigieuses du championnat de France. Si la professionnalisation est une priorité, C24 et C4 souhaitent respectivement agrandir la salle et changer de salle. Ils espèrent améliorer leurs relations-clients en proposant des loges notamment. C24 souhaiterait, au regard de quelques performances sportives importantes et du soutien de sa localité, développer ses produits dérivés. Les deux clubs ne sont pas véritablement dans une recherche de transformation du spectacle dans l’immédiat. Enfin, C19 est un cas pour le moins particulier dans la mesure où, malgré la taille de sa localité, il a réussi à se hisser en ligue professionnelle. Pour lui, il n’est question essentiellement que de résultats sportifs pour 246 survivre. Il souhaite stabiliser son équipe sportive, en poursuivant notamment ses efforts de professionnalisation de l’équipe sportive, au détriment de l’élargissement de la structure administrative. Il souhaite gravir les quelques échelons qui le séparent de ses homologues du championnat en proposant un spectacle de plus en plus complet, un centre de formation, des relations- clients améliorées. Son développement est édifiant depuis ces cinq dernières années et son implication dans la vie locale porte ses fruits puisque son tissu économique semble lui accorder beaucoup d’intérêt. C8 et C18 ont un tissu économique plus favorable dans la mesure où ils sont des clubs de grandes agglomérations. Ils aspirent au maintien au plus haut niveau et consolider leur organisation administrative dans la mesure où leur professionnalisation est encore récente. Ils s’évertuent, l’un et l’autre dans leur discipline respective, à remplir les critères de structuration : C8 pour participer à la nouvelle ligue, C18 se lançant dans une stratégie de co-branding, d’amélioration des relations-clients et du spectacle sportif. Les cinq derniers clubs sont des abonnés du haut de tableau et ils constituent des acteurs incontournables de leur discipline sportive. Ils possèdent des enceintes récentes ou de qualité, au-dessus de la moyenne de leur discipline respective, sauf C7 qui attend son nouveau complexe dans un avenir proche. Ils veulent accélérer le processus de professionnalisation administratif et rechercher sans cesse l’amélioration du spectacle. C7 a d’ailleurs souhaité une nouvelle salle pour cet objectif. Il veut aller plus loin encore puisqu’il veut en faire un lieu de vie et améliorer les relations-clients. Malgré le manque de notoriété de sa discipline, le peu de concurrence de clubs à haut niveau dans sa région font de lui le représentant de la ville. C9 jouit d’une structuration singulière puisqu’il fait partie d’un club omnisports qui l’aide beaucoup dans sa gestion quotidienne, mais sa structuration administrative est encore pauvre. Sa priorité est de structurer et de professionnaliser l’organisation administrative, mais aussi l’équipe sportive qui compte un nombre important de pluriactifs en son sein. C2, C12 et C25 sont très proches puisqu’ils font partie des clubs les plus structurés de leur discipline en raison d’enceintes récentes ou de qualité. Leurs résultats sportifs sont importants, mais le manque de notoriété de la discipline ne leur permet pas de s’émanciper comme ils le souhaiteraient. Ils veulent consolider leurs structures qui fleuraient encore un peu 247

l’amateurisme. C2 a compris l’intérêt de passer en société. Ces clubs constituent de vrais représentants pour leur localité en raison d’une concurrence très faible de clubs sportifs au plus haut niveau. Sur le plan de la gestion de ces clubs, tout est susceptible d’être amélioré : les abonnements, le spectacle, les produits dérivés, la communication, la médiatisation, l’implication dans la vie locale ou la formation. Leur structuration n’en est pas moins satisfaisante provisoirement, en raison d’un tissu économique favorable.

4. Enfin, 4 clubs ferment la marche au niveau du caractère professionnel de l’organisation. Il s’agit de 2 clubs de hockey sur glace, 1 club de handball et 1 club de rugby : C6, C17, C20 et C28. Tous ne sont pas à la recherche d’une meilleure organisation administrative et financière du club. Ce n’est plus le cas de C17, qui est passé en société, mais qui souhaite changer à nouveau son statut pour un autre plus adapté. Il s’appuie énormément sur la qualité de vie de sa localité pour approcher des joueurs compétents. Il a réussi à franchir 3 divisions en 5 ans, il veut se pérenniser financièrement avec des sponsors stables pour ne pas avoir à connaître les déboires financiers rencontrés dans le passé. Sa structure est encore gérée par de nombreux bénévoles, mais ses résultats sportifs lui permettent d’obtenir le soutien de l’ensemble de son environnement. C28 est conscient de la voie étroite dans laquelle il se trouve et affirme ne pas avoir le tissu économique suffisant pour devenir véritablement professionnel. Il semble être dépendant de l’évolution de l’ensemble de la discipline en termes de notoriété. Sans médiatisation de la discipline, le club n’est pas en mesure de développer une structure professionnelle, malgré de bonnes et régulières performances sportives. C6 n’évoluant pas dans une division professionnelle ne possède pas une structure professionnalisée. Sa nouvelle direction souhaite néanmoins atteindre les divisions professionnelles, synonyme de notoriété et de soutien local important. Avant tout, son projet de structuration repose sur quatre axes : étendre son marché, élargir la médiatisation régionale, améliorer le niveau des abonnements et posséder de nouvelles structures à la fois pour la formation à la pratique, mais aussi dans ses relations avec les partenaires. Enfin, C20 est un cas bien singulier dans la mesure où son seul objectif véritable est du domaine sportif, à savoir simultanément l’obtention de 248

résultats et la stabilisation de l’équipe. Néanmoins, il convient d’ajouter que le club est sous l’égide d’un mécène important dont l’entreprise s’implique directement dans la gestion du club. A part C20, ces clubs comptent encore dans leur rang des joueurs pluri-actifs. Cette situation est suffisamment importante pour en faire état.

Tableau N°15 - Récapitulatif des priorités de gestion par clubs

Priorité de gestion C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Pérennité de la X X X X X X marque Transformation du X X X X X X X X spectacle en lieu de vie Poursuite de X X X X X X X X X X professionnalisation Recherche X X X X structuration et professionnalisation

2.1.1.6. L’organisation La professionnalisation semble être la tendance générale suivie par les clubs. Si les sportifs sont souvent les premiers à être professionnalisés, de plus en plus, les clubs ont compris le besoin de posséder un personnel permanent. Il devient nécessaire de professionnaliser les structures de gestion, ce qui induit à la fois une structuration de type professionnel, même si le personnel est encore partiellement bénévole, mais aussi la rémunération des dirigeants administratifs. Quels sont les postes dans l’organisation d’un club qui supposent un niveau de compétence et de disponibilité difficilement accessibles par le bénévolat ? Un club au départ est en statut associatif et il comprend un président, un trésorier, un entraîneur et un secrétaire. Lorsqu’il passe en société, il existe toujours un président (mais différent de l’association), un directeur général (DG) ou un directeur administratif et financier (DAF) et des employés (secrétaires, responsable communication, comptable, par exemple). Les structures des clubs sont à la fois différentes et proches. En effet, les hiérarchies et les métiers se ressemblent alors que le fonctionnement et les dénominations sont hétérogènes et peu codifiées. 1. Le premier groupe est composé de clubs possédant un personnel administratif important et permanent. Ils sont nombreux aujourd’hui et tous les domaines sont touchés par la professionnalisation : la comptabilité, le secteur sportif, la direction générale, le secrétariat, le secteur commercial, 249

l’intendance ou la communication. C10, C13 et C23 disposent d’une structure professionnelle permanente importante.

2. La deuxième catégorie est constituée de clubs relativement bien fournis en personnel salarié. Ils sont souvent organisés de la manière suivante : un Président, un DG et/ou un DAF, un comptable, un poste commercial et souvent un secrétaire. Ils sont parfois accompagnés d’autres salariés, mais la dénomination des postes ou les priorités de postes sont plus variables : responsable billetterie, responsable communication, intendant, responsable sécurité, responsable entretien, responsable boutique, responsable sportif ou directeur de formation. C27 par exemple compte 3 commerciaux pour son activité tournée vers un fort partenariat, mais aussi un responsable de l’entretien dans la mesure où il est propriétaire des locaux sportifs. L’entretien du terrain est généralement la tâche des collectivités. Les postes sont, cependant, bien déterminés et classifiés, même si le DG peut aussi être le DAF du club et inversement. Il arrive que les clubs distinguent les deux postes. Les commerciaux, par exemple, sont de plus en plus spécialisés : l’un s’occupera du partenariat, un autre des relations clients avec la vente de loges, un troisième responsable pourra s’occuper de la billetterie/abonnement. Ces clubs possèdent environ un personnel de 10 à 15 salariés à temps plein. Nous tenons compte dans notre recensement du coordinateur sportif qui est souvent le lien entre la formation sportive et les dirigeants, car il participe aussi aux tâches administratives. Certains clubs considèrent le gérant de la boutique de produits dérivés comme un membre du personnel. La boutique peut constituer l’objet d’un partenariat avec un tiers, être la fonction d’un salarié ou encore faire l’objet d’un contrat de sous- traitance avec une régie marketing. C14 est particulier dans la mesure où la plupart des salariés de l’entreprise actionnaire principal du club sont fortement liés à l’activité de la SASP. L’entreprise est composée de près de 65 personnes. C1, C3, C5, C14, C16, C21, C22, C26 et C27 constituent cette famille de clubs sportifs. 6 d’entre eux sont des clubs de rugby, 2 de basket- ball et 1 de handball.

3. La troisième classe comprend des clubs sportifs disposant d’un personnel réduit. Nous retrouvons toujours un DAF et/ou un DG en dessous du 250

président. Il peut ensuite être question, rarement ensemble, d’un secrétaire, d’un comptable, d’un commercial, d’un responsable communication, d’un responsable billetterie ou encore d’un coordinateur sportif selon les besoins du club sportif. Quels qu’ils soient, les membres de la structure administrative sont au nombre de 4 à 7 personnes. C4, C12 et C24 comptent 5 personnes et se tournent vers les commerciaux. C7 compte 7 personnes plutôt orientées vers le domaine sportif. C15 compte 4 personnes employées, mais le secteur administratif est géré par quatre bénévoles retraités, mais expérimentés, qui sont à des postes importants dans le club. C’est un « effet d’aubaine ». Enfin, lorsque nous avons rencontré C11, le club venait d’être rétrogradé, sa structure avait tenu le choc, malgré quelques bouleversements. Le club évoluant en division amateur était néanmoins mieux organisé que ses homologues du championnat avec 4 salariés dont 2 à mi-temps. Sa remontée en ligue professionnelle lui a permis d’embaucher 5 salariés à temps plein. Le club s’est tourné vers les commerciaux, compte tenu d’un partenariat important. Ainsi, l’existence de ces postes dépend du choix des dirigeants par rapport à leur besoin, mais aussi à leurs activités. Un DG qui a développé un réseau important de partenaires et constitue un acteur indispensable à son bon fonctionnement n’aura pas le besoin de déléguer l’activité partenariat. Il se tournera davantage vers l’administratif, notamment le secrétariat, dans la mesure où il n’aura pas le temps de s’occuper de ce type d’activité. Un DG peut choisir d’embaucher un deuxième coordinateur sportif dans la mesure où la formation constitue un élément déterminant de la politique du club.

4. La quatrième famille regroupe des clubs qui se professionnalisent, mais qui utilisent toujours des bénévoles aux postes clés de sa gestion. Ces clubs disposent généralement de 2 à 3 salariés, accompagnés par des bénévoles dont il est difficile d’arrêter un chiffre précis. Nous rencontrons au sein de ces structures un Président, un DG et un DAF, souvent accompagné d’un ou deux autres salariés, souvent sur des postes précaires, selon les besoins. C’est le cas de C8 qui s’est lancé dans un objectif de structuration de l’équipe dirigeante depuis sa montée récente dans la plus haute division. Son processus de développement produit de bons résultats. Au moment de notre visite, il avait 3 salariés, il en possède 4 désormais et il externalise le marketing à une régie professionnelle. Ce club est aussi aidé par son club 251

omnisports. C19 vivote depuis longtemps puisqu’il ne fonctionne qu’avec une poignée de passionnés. 5 personnes dont 1 bénévole le composent. Le club souhaite, cependant, renforcer ces structures et franchir le fossé qui existe entre lui et les clubs concurrents de son championnat. C2 et C25 combinent les emplois à temps plein et les emplois précaires. Leur fonctionnement est encore un peu amateur, mais leur professionnalisation se poursuit doucement mais sûrement. C9 dispose d’une structure composée d’un DG, lequel est le principal acteur du club. Il s’est cependant entouré de trois salariés, en vue de réaliser progressivement la professionnalisation de sa cellule administrative.

5. Enfin, une dernière série de clubs rassemble des organisations « amateur », faite surtout de bénévoles. C20 est dirigé par un seul DAF, accompagné d’une secrétaire et d’un comptable, tous les deux issus de l’entreprise du commanditaire principal, mais aussi d’une régie de commercialisation externe. C6 a doublé son effectif depuis qu’il est passé dans la division supérieure, même si celle-ci n’est pas encore professionnelle. Il a été réorganisé à la suite d’une crise financière importante et d’une rétrogradation. Aujourd’hui, tous les membres (huit personnes) sont bénévoles, excepté deux d’entre eux qui reçoivent des rétributions précaires. Ce club fonctionne sur la base de commissions dont chaque bénévole est dirigeant de l’une d’entre elles. Le fonctionnement est plutôt professionnalisé. Il en est de même pour C28 qui est soutenu, néanmoins, par de nombreux bénévoles. C17 possède une secrétaire à temps plein et 3 commerciaux à mi-temps, des pluri-actifs qui s’avèrent être aussi des joueurs de l’équipe senior. Enfin, C18 dispose d’un DG salarié et d’un responsable de la communication. Un coordinateur sportif participe parfois à la gestion administrative. La structure administrative maximum propre à l’activité sportive des clubs, sans compter ses filiales, tourne autour de 40 salariés401.

401 L’Olympique Lyonnais est assurément le club aujourd’hui le plus développé en France. Il est le seul à ce jour à être entré en bourse. Ses 6 titres de champions de France et ses résultats sportifs en Ligue des Champions ont créé la sensation ces dernières années permettant à son président de monter un véritable empire. Il compte désormais changer de stade et construire un OL Land tout autour comprenant des hôtels, restaurants, centre commercial, centre de loisirs, etc. En 2007, juste avant de rencontrer l’AS Roma en 1/8ème de finale de la Ligue des champions, le groupe OL c’est 207 salariés dont : SASP : 36 ; OL Organisation : 20 ; Association Olympique lyonnais : 45 ; OL Images : 17 ; OL Merchandising : 41 ; OL Voyages : 8 ; OL Groupe : 33 ; M2A : 7. 252

Tableau N°16 - Récapitulatif du type d’organisation par clubs

Organisation C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Personnel X X X permanent exclusivement Personnel X X X X X X X X X important et disparate Personnel X X X X X X professionnel réduit Personnel X X X X X professionnel et amateur Amateur bénévole X X X X X

2.1.1.7. Le fonctionnement Plus qu’une simple structure, la professionnalisation implique une modification du mode de fonctionnement du club. Au départ, le club n’était composé que de quelques bénévoles et le fonctionnement manquait souvent de formalisation. Autrement dit, le club faisait avec les moyens du bord, sans rechercher la mise en place d’une structure optimale jugée trop onéreuse. Le président était omniscient et omniprésent. La structuration d’un club permet au président de se décharger de certaines responsabilités dans la mesure où le personnel devient de plus en plus présent dans les bureaux. Il est question de déléguer les responsabilités subalternes. Néanmoins, la délégation peut revêtir des formes différentes pour plusieurs raisons. Lorsque la réforme structurelle itérative a atteint un certain niveau de développement, les responsables de club considèrent généralement soit que le bénévolat ne répond plus aux besoins de ce type de structures, sauf pour des tâches annexes, soit qu’il faut le maintenir comme règle de gestion afin de ne pas subir une contestation au sein de la direction du club. Dans ces conditions, le processus de délégation ne sera pas le même selon les choix de structures faits. Pour nombre de clubs, il est souvent question de compétences dans l’accomplissement des tâches de gestion. Dans ce contexte, un professionnel semble plus efficace qu’un bénévole, car il est choisi pour ses compétences et qu’il est disponible dans le cadre des heures de travail habituelles. En comparaison, le bénévole n’est pas forcément qualifié pour le travail qui lui est assigné, il reste parfois disponible pour combler l’absence de personnel. Ainsi, plus le club se développe, plus il a besoin de compétences, ce qui suppose la mise en place de la professionnalisation de sa gestion. De plus, transformer une activité bénévole en un métier permet à son bénéficiaire de

253 s’investir entièrement dans les tâches qui lui sont assignées. Le temps régulier investi dans son travail permet au professionnel de répondre de manière efficace, sous la contrainte de la discipline des salariés, aux nécessités d’une bonne gestion régulière du club. Ce n’est pas toujours le cas d’un bénévole qui a déjà accompli un travail salarié dans la journée et fait donc des heures supplémentaires non rémunérées. Le fonctionnement peut donc être très différent si le travail est réalisé par un personnel qualifié et permanent. Il n’empêche qu’un bénévole peut proposer de grandes compétences, mais sans obligation de résultats autre que sa propre conscience ou son attachement au club. Quelle que soit la nature de l’intervenant, une autre composante joue dans le fonctionnement du club concernant la nature individuelle ou collective de la prise de décision. En outre, la compétence des hommes entre en jeu dans la mise en place des structures, notamment dans l’organisation des mécanismes de coordination. Il s’agit de déterminer les moyens mis en place pour agir collectivement : réunions, reporting, outils spécifiques,… De la même manière, il est nécessaire de définir le type de communication interne dans ses fonctions verticales et/ou horizontales. Il est donc fondamental de mettre en évidence le degré de délégation de chacun des clubs, mais aussi de dévoiler la nature des intervenants ainsi que les différents systèmes de coordination mis en place. 1. La première catégorie rassemble les clubs aux structures décentralisées par unités de travail, avec recherche de coordination. La délégation est importante et les unités sont généralement composées d’au moins un responsable professionnel. Des mécanismes de coordination sont introduits comme des réunions hebdomadaires ou des outils de reporting. 10 clubs (C1, C10, C11, C12, C13, C14, C16, C22, C23 et C27), soit 3 clubs de football, 1 club de hockey sur glace, 4 clubs de rugby, 1 club de basket-ball et 1 club de handball, composent cette famille. Ils témoignent d’une prise de conscience de la nécessité de structurer les clubs. Il est vrai que les « investisseurs » et les partenaires exigent de plus en plus une attitude professionnelle des clubs, en vue d’accroître leur soutien. Le dirigeant de C13 déclare s’entourer de collaborateurs « qui vont être performants là où vous n’êtes pas bon ». Il fait confiance à ses salariés et il les considère comme des spécialistes dans chacun de leur domaine de compétence. Il organise des réunions toutes les semaines pour discuter d’un 254 sujet préalablement déterminé. Il fonctionne par projet dans lequel l’équipe sportive comme l’équipe administrative sont concernées. L’ensemble de la structure suit la même ligne directrice et une recherche de cohérence entre les activités des joueurs et celles de l’administration est systématiquement mise en place en vue d’atteindre les objectifs du projet. Le dirigeant de C23 différencie trois unités de production. Elles concernent les domaines sportifs, administratifs et commerciaux. Une réunion bimensuelle a pour objet de réfléchir à la stratégie du club et à son application. Si la délégation est importante, notre interlocuteur dit tout « chapeauter » et il doit être au courant de tout. Le responsable de C27 parle de « management participatif » dans la mesure où le travail est collectif, la communication horizontale et verticale et que les unités de travail sont plutôt libres dans leurs prises de décision. Néanmoins, le président en cas de « non approbation collective » prend la décision finale. Ce système est expérimenté chez C14 et C22. Ce dernier organise aussi l’existence de réunions mensuelles, mais il avoue ne pas avoir de communication de type horizontal. Au sein de C1, certains responsables de secteurs sont salariés d’autres sont encore bénévoles, ce qui est une organisation très singulière. Pourtant, le niveau d’exigence dans la qualité du travail produit est le même. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire de « coacher les bénévoles », même si la délégation est de plus en plus importante. Chaque responsable du secteur effectue un reporting pendant « la réunion trimestrielle du comité de direction ». Le club C1 a mis en place un outil de reporting spécifique au club, conformément à ce qui se fait dans une entreprise. Il est question d’un véritable « calque » à la gestion du club. Pour C10, C12 et C16, le responsable d’une structure est souvent considéré comme la personne la plus compétente dans son métier. Ainsi, les membres de la structure administrative se rangent à l’argumentation du spécialiste. Pour C12, il existe une validation des décisions lorsqu’il est question de financement par le manager général qui se dit aussi « un conseil averti ». Il y a donc une véritable recherche d’adhésion collective, notamment lors des synthèses hebdomadaires de groupe. Les décisions sont prises après avis des subordonnés. Quant à C16, le dirigeant chapeaute tout « in fine » bien que la délégation soit importante. Enfin, C11 se distingue puisque le club est en reconstruction. Les réunions ne sont pas régulières, les frontières entre 255

les métiers, bien qu’ils soient bien déterminés, sont encore floues dans la mesure où l’entraide est nécessaire et il manque une véritable activité de management de l’ensemble de la structure, faute d’un responsable attitré à la direction. Néanmoins, les décisions sont de plus en plus collégiales et analytiques.

2. Une deuxième catégorie regroupe des clubs aux structures encore centralisées, mais avec des postes structurels bien déterminés et des

mécanismes de coordination organisés. Elle comprend 4 clubs de rugby et 1 club de basket-ball. C3 affirme ne pas beaucoup déléguer, même si la plupart de ses collaborateurs sont des professionnels, car le club est engagé dans un processus complexe de construction. Néanmoins, il organise des réunions mensuelles de son personnel. C5 est dirigé d’une main de fer par un président emblématique et si les réflexions sont collégiales, la délégation et les mécanismes de coordination sont minimes. Les réunions ne sont pas officielles et les personnels ne connaissent que les grandes lignes de l’action de leurs collègues. C21 est lui aussi présidé par un personnage emblématique qui avoue centraliser toutes les décisions, celles-ci n’étant pas forcément collégiales, sauf au niveau sportif. Il organise des réunions tous les 15 jours. C15 et C26 connaissent aussi un régime d’autocratie, leurs responsables prenant une importance considérable dans la gestion du club, l’un parce qu’il est en place depuis longtemps et qu’il se présente comme l’âme du club, l’autre pour ses « frasques », notamment sur le marché des transferts.

3. La troisième classe de clubs rassemble des structures centralisées avec un début de spécialisation des membres de la structure administrative : C2, C4, C6, C7, C18, C19, C20, C24 et C25. Par exemple, C24 a un contrôle de gestion qui se fait par commission. Autrement dit, chacun gère son budget. Cependant, tout est contrôlé par le DG, au même titre que la communication interne. La coordination est verticale, mais pas horizontale, même si des réunions sont mises en place officiellement afin que chaque commission puisse soumettre des propositions. Les décisions stratégiques sont prises par un comité de pilotage composé de 9 membres. C4 affirme qu’un véritable processus de décentralisation est en cours et que les tâches de chacun sont de plus en plus indiquées. C7 développe la délégation de 256

pouvoir depuis la création de véritables postes de travail bien définis. Aujourd’hui, il considère même que les responsables de chaque secteur sont considérés comme des spécialistes, ce qui amène leurs collègues à se ranger à leurs argumentations dans leur domaine de compétence. C9 s’inscrit dans un processus de structuration qui conduit à déléguer les responsabilités, notamment concernant la question de l’organisation des matchs. C’est d’ailleurs la volonté profonde du DG d’éviter la dépendance du club au « bon vouloir » d’une seule personne. Il propose de véritables réunions pour former son équipe à la gestion du club. Enfin, C2, C6, C18, C19 et C25 disposent de responsables d’activités de gestion, à la fois bénévoles et salariés, à forte délégation, même si, « in fine », tout est chapeauté par un responsable. Les décisions deviennent de plus en plus collégiales et C2 en particulier organise des réunions hebdomadaires réservées au secteur sportif. En outre, au sein de C19, les tâches de chacun ne sont pas toujours explicitement déterminées. Chaque membre participe comme il peut à la vie du club. Les décisions stratégiques sont souvent prises par un comité directeur regroupant les 20 grands actionnaires du club.

4. Enfin, une dernière classe comprend les clubs (C8, C9, C17, C28 voire C20) ayant une structure informelle et centralisée. Autrement dit, la délégation est minime et les prises de décisions ne sont pas souvent concertées. Le manager est omniscient. Aucune réunion n’est vraiment formalisée. Les échanges relatifs à la stratégie sont peu fréquents et la prise de décisions est complètement centralisée. Le club vivote avec des moyens limités. C20, cas particulier, dispose d’un seul véritable poste administratif au sein du club, les autres secteurs étant gérés par des salariés provenant d’une entreprise qui est aussi son principal actionnaire. La communication est informelle et aucun reporting n’existe.

257

Tableau N°17 - Récapitulatif du fonctionnement par clubs

Fonctionnement C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Structure X X X X X X X X X X décentralisée par unités de travail, avec recherche de coordination. structures X X X X X centralisées, postes structurels déterminés, mécanismes de coordination Structure centralisée, X X X X X X X X début de spécialisation dans la structure administrative X Structure informelle X X X X X et centralisée

2.1.1.8. La gestion du personnel Au regard des différences importantes des budgets des clubs, il n’est pas illogique d’observer les mêmes inégalités concernant les salaires. La masse salariale pour un club professionnel constitue le nerf de la guerre. Le processus normal est le suivant : les résultats sportifs s’obtiennent en construisant une équipe de qualité ; or, l’embauche de joueurs compétents s’obtient fréquemment sur la base du « plus offrant ». Ce n’est pas toujours le cas, le cœur et la raison prennent parfois de l’importance dans les choix effectués par le sportif. La gestion du personnel a une influence déterminante sur l’état financier et sportif d’un club. Si certains clubs sont en mesure de rémunérer correctement leurs joueurs, d’autres n’ont pas cette possibilité. Ces inégalités de salaires sont particulièrement significatives selon les disciplines sportives. Certaines d’entre elles comptent exclusivement des sportifs salariés à temps plein, quand d’autres comptent encore des semi-professionnels, pluriactifs et autres amateurs « défrayés »402. Plusieurs observations peuvent être faites. Premièrement, le secteur du sport professionnel est caractérisé par un nombre important de Contrat à Durée Déterminée (CDD), notamment dans le secteur sportif regroupant les entraîneurs et les sportifs. La structure administrative, par contre, a le droit de disposer de Contrats à Durée Indéterminé (CDI), mais la grande majorité des clubs n’a pas toujours cette possibilité. Les clubs possédant un budget conséquent (supérieur à 1.5 million d’euros) sont généralement en mesure de proposer ce type de contrats. Ces emplois permanents sont d’ailleurs recommandés pour ce type d’organisations professionnelles. La répartition des salariés dans le monde du spectacle sportif est la suivante : 50% des salariés

402 Nombre de sportifs s’investissent dans la gestion des clubs sportifs pour donner un coup de main au bureau et obtiennent alors une « petite rétribution » pour leurs services rendus. 258 sont des sportifs, 15% sont liés à l’encadrement technique et médical (entraîneurs, préparateurs, médecins et kinésithérapeutes) et 35% proviennent des services administratifs et commerciaux. En rugby, les clubs du TOP 14 et de PRO D2 peuvent recourir à deux types de contrats concernant les sportifs : le contrat professionnel ou les contrats pluriactifs. Le contrat de travail du joueur « professionnel » suppose que celui-ci en fait sa profession exclusive. A défaut, le contrat est un contrat de travail de joueur « pluriactif » (il ne bénéficie pas de prestations de l’assurance chômage par exemple). Tous les contrats ne peuvent être supérieur à cinq saisons sportives403. Les avantages annexes ne peuvent représenter plus de 33% de la rémunération fixe totale404. Chaque club professionnel ne pourra disposer dans son effectif que d’un maximum de 33 joueurs, sous contrat professionnel ou pluriactif405. Est prohibé la conclusion de toute convention par laquelle le club membre de la LNR (Ligue Nationale de Rugby) transfèrerait ses droits à indemnités à une personne morale ou physique tierce. Les clubs professionnels ne peuvent se prévaloir de l’existence d’une valeur patrimoniale résultant de la fixation d’indemnités auxquelles ils peuvent prétendre en cas de mutation d’un ou plusieurs de leurs joueurs406. Enfin, la masse salariale brute (joueurs et entraîneurs) est limitée au maximum à 55% des recettes (hors charges patronales)407. Le tableau suivant (Tableau N°18) révèle les rémunérations minimales fixées par la Ligue Nationale de Rugby.

Tableau N°18 - Rémunérations minimales des joueurs et entraîneurs selon la LNR

Rémunération brute 1ère division 2ème division annuelle en euros professionnelle professionnelle Joueur professionnel 28500 14250 exclusif ou pluriactif à temps complet Joueur sous contrat espoir 14250 à temps complet Entraîneur à temps 42000 30000 complet (convention collective du rugby professionnel : Annexe p 1)

403 P 23 de la convention collective du rugby professionnel. 404 P 32 de la convention collective du rugby professionnel. 405 P 40 : Statuts et règlements généraux de la Ligue Nationale de Rugby (2005-2006) 406 p 53 : Statuts et règlements généraux de la Ligue Nationale de Rugby (2005-2006) (Article 53) 407 p 65 : Statuts et règlements généraux de la Ligue Nationale de Rugby (2005-2006) (Annexe 1) 259

Pour l’année 2007, le salaire moyen mensuel brut d’un joueur de football de Ligue 1 s’élève à 24.200€ net par mois, après impôt et sans tenir compte des primes de résultat. Ce chiffre a augmenté de 40% en deux ans408. En 2006, d’après leurs dirigeants respectifs, au sein du club de Rennes ce montant moyen s’élevait à 20.000€, 13.000€ pour Guingamp et 8.500 € pour Lorient et Brest. Selon, le président de l’équipe de football de Guingamp et vice-président de la Fédération française de Football, Noël Le Graët, les joueurs gagneraient moitié moins sans les droits de télévision. En ligue 2, le salaire moyen est de 8 360 € par mois. Concernant le basket-ball, la DNCCG estime que les salaires et traitements constituent en moyenne 41% des charges d’un club de PRO A. Pour la saison 2005-2006, la Convention Collective a fixé le salaire minimal brut mensuel à 2 500 € pour un contrat de 12 mois en Pro A et 1 666 € brut mensuel pour un contrat de 12 mois en PRO B. Il existe de fortes inégalités de salaires puisqu’ils s’étendent de 1.250 € brut mensuel à 24.230 € brut mensuel en PRO A409 et de 1.075 € brut mensuel à 8.644 € brut mensuel pour la PRO B. Pour les joueurs professionnels, le salaire brut mensuel moyen en PRO A de la saison dernière était de 7.908 € et en PRO B de 3.665 €. De plus, pour la PRO B, la Convention Collective donne l’opportunité aux joueurs d’être à mi-temps en vue de favoriser leur reconversion. Selon l’Observatoire UFF Sport Conseil des revenus et de l’épargne des sportifs professionnels, un sportif professionnel peut se constituer, avec une carrière moyenne, sur la base des salaires (hors primes) de la saison 2006/2007, le patrimoine défini dans le tableau n°19410.

408 http://www.liberation.fr/actualite/sports/235683.FR.php 409 Aujourd’hui, on parle de 400.000 euros pour Gregan, l’emblématique capitaine de l’équipe des Wallabies, après la rémunération de 300.000 euros pour 8 matchs du non moins emblématique « All Black » Umaga. 410 Les salaires sont exprimés en brut contractuel hors primes de résultats et hors avantages en nature (sauf pour le basketteur pour lequel le loyer est payé par le club). La durée de carrière moyenne est estimée à 7 ans. 260

Tableau N°19 – Patrimoine estimé en fonction des revenus des sportifs professionnels

FOOTBALLEUR DE L1 BASKETTEUR DE PRO A

Brut mensuel 40 759 € Brut mensuel 7 908 € Net mensuel 35 953 € Net mensuel 6 350 € Impôts annuels 141 228 € Impôts annuels 8 639 € Net après impôts 290 208 € Net après impôts 67 562 € Train de vie 72 000 € Train de vie 30 000 € Epargne annuelle 218 208 € Epargne annuelle 37 562 € Patrimoine fin de carrière 1 900 000 € Patrimoine fin de carrière 330 000 €

RUGBYMAN TOP 14 HANDBALLEUR DE D1 Brut mensuel 8 750 € Brut mensuel 3 121 € Net mensuel 6 913 € Net mensuel 2 341 € Impôts annuels 10 848 € Impôts annuels 535 € Net après impôts 72 466 € Net après impôts 27 554 € Train de vie 36 000 € Train de vie 18 000 € Epargne annuelle 36 466 € Epargne annuelle 9 554 € Patrimoine fin de carrière 320 000 € Patrimoine fin de carrière 83 000 €

Au regard de ces chiffres, la gestion de personnel peut s’avérer très différente d’une discipline à une autre. Nous n’avons pas évoqué le hockey sur glace qui constitue sans nul doute la discipline qui connaît les salaires les plus bas. De plus, si le secteur sportif est ici représenté, aucune référence n’est faite concernant la structure administrative. Néanmoins ces quelques chiffres nous permettent d’évaluer les inégalités de revenus qui apparaissent selon les disciplines sportives. 1. La première catégorie de clubs comprend les organisations composées exclusivement de professionnels dans le secteur sportif, mais aussi

au sein de la direction administrative (C1, C3, C5, C10, C13, C14, C15, C21, C22, C23, C26 et C27). Il existe, pour la plupart, de véritables intéressements liés aux résultats sportifs et économiques. C13 impliquent à la fois son équipe administrative et son équipe sportive dans un projet commun. Ainsi, les joueurs ne jouent plus seulement pour leur salaire, mais aussi pour le développement du club. Il existe un véritable partage de la réussite. Les salaires des sportifs par rapport à la discipline sont dans la gamme des salaires, moyens mais la prime aux résultats est importante. Elle est fixée de manière à être accessible pour l’ensemble de groupe et non pas individuellement. Le club a fait le choix de payer ses joueurs en fonction des résultats sportifs. 261

C23 compte 27 professionnels qui gagnent environ 20.000€ brut par mois en moyenne. Néanmoins, le club, huitième budget de sa discipline, avoue ne pas avoir la possibilité de faire signer un seul joueur évoluant dans un des clubs importants de la discipline, les salaires étant trop importants. Tous les contrats comprennent une prime d’objectif en fonction du classement en fin de championnat. La prime pour une victoire en championnat s’élève à environ 1.000 € et 500 € pour un match nul. C27 fixe une prime collective en fonction du résultat du groupe. Au niveau de la formation-emploi, C1 propose des emplois aux jeunes comme aux professionnels de manière à leur définir un projet professionnel et un accompagnement social. Les postes au sein de la structure administrative sont considérés comme des métiers encore nouveaux, qu’il n’est pas facile de bien définir. C10 révèle que la création du centre de formation (qui nécessite deux ans de professionnalisme) lui a permis de conserver ses jeunes joueurs, en ayant la possibilité de leur proposer des contrats. Il constitue un élément important dans la structuration du club, même s’il entraîne parallèlement des dépenses supplémentaires comme la rémunération d’entraîneurs, de kinésithérapeutes ou encore de personnels administratifs. Ainsi, de 14 ans jusqu’à 19 ans, les joueurs sont sous convention. Si C14 compte exclusivement des professionnels au sein de la structure administrative, il affirme avoir encore besoin des bénévoles, notamment pour l'organisation des matchs. C21 compte 37 salariés (25 sportifs et 12 administratifs) et il externalise le secteur commercial à un cabinet payé en honoraires, ce qui s’avèrent moins coûteux et plus rémunérateur pour le club. Selon lui, l’action conjointe du bénévolat et du salariat ne peut pas fonctionner. Le choix d’une structure professionnelle s’impose donc d’elle-même.

2. La deuxième classe regroupe les clubs ayant une gestion du personnel complexe, qui établit une différence importante entre le secteur sportif et le secteur administratif. Il s’agit de C4, C7, C8, C16, C18, C20 et C24. Quel que soit le secteur, les salaires sont plus que suffisants pour vivre. Les joueurs ont régulièrement des primes sur leurs résultats sportifs alors que les responsables administratifs et de gestion n’ont 262

généralement droit qu’à leur salaire fixe. Pour C4, seuls les sportifs et les commerciaux du club ont des intéressements liés aux résultats sportifs. Cependant, la professionnalisation du secteur administratif est entreprise et se posera peut-être à terme la question des rémunérations « variables ». Pour C8, la prochaine étape en gestion de personnel sera la mise en place prochaine d’un plan d’intéressement en faveur du secteur administratif. Il évoque, cependant, trois niveaux de rémunération au sein de ce secteur : un peu plus que le SMIC (secrétaire), le responsable administratif qui n’est pas cadre mais qualifié et le directeur général qui obtient un bon salaire proche de 3800 euros, ce qui constitue le salaire moyen pour cette profession dans la discipline.

3. La dernière catégorie est composée de clubs ayant des statuts salariaux et salaires très inégaux puisqu’ils comprennent encore beaucoup

de joueurs amateurs, pluriactifs et semi-professionnels (C2, C6, C9, C11, C12, C17, C19, C25 et C28). C9 est composé de nombreux joueurs pluri-actifs qui travaillent souvent pour la municipalité. Il est organisé selon le statut de la SEMSL et il fait partie d’un club omnisports. Les sportifs comme les administratifs n’ont pas de primes. La raison invoquée est bizarrement comptable : la comptabilité est civile alors que le club fonctionne selon le rythme de la saison sportive. C12 comprend 17 joueurs rémunérés recevant un salaire minimal de 22000 euros/an, les 5 autres étant semi-professionnels. Il a dû professionnaliser son secteur sportif pour pouvoir structurer son club. C17 comprend 12 professionnels et 9 semi-professionnels qui jouissent d’un système de récompenses individualisées. La professionnalisation du secteur administratif est partielle puisque trois des joueurs travaillent à mi-temps pour la communication du club. Ainsi, si un système de primes est mis en place, il concerne aussi la secrétaire par rapport aux résultats du sponsoring. C28 dispose d’un système de primes et de récompenses formalisées dans les contrats des joueurs. Ce système est d’ailleurs essentiel au regard de la structure salariale du club puisqu’il est composé de 10 pluriactifs, 8 amateurs indemnisés, 4 professionnels qui gagnent environ 2000 euros/mois. La structure administrative ne compte que des bénévoles, excepté le trésorier, ancien joueur du club, qui est embauché depuis 20 263

ans et 2 joueurs en CDI qui s’occupent de la formation des mineurs. Le club n’exprime pas le besoin d’embaucher un manager général dans la mesure où il n’existe pas de Ligue Professionnelle dans sa discipline. De plus, son tissu économique ne lui permet pas d’être professionnel. C11 et C6 sont composés exclusivement de pluri-actifs dans la mesure où leur niveau de compétition ne leur permet pas de disposer d’un budget conséquent. Néanmoins, C11, au passé glorieux, ayant été promu la saison après notre rencontre, connaît désormais une structure salariale professionnalisée. C19, composée essentiellement de pluriactifs, constitue une singularité dans le championnat puisqu’il évolue dans une division professionnelle. Ses dirigeants sont conscients que le fonctionnement se rapproche plus d’une équipe de division inférieure de niveau amateur. La totalité des dirigeants de C6 sont bénévoles.

Nous ajouterons que nombre de clubs ont fait état de l’importance de l’impact de l’homme sur la structuration du club. Ceci explique la professionnalisation et les salaires octroyés à certains dirigeants sportifs dont la compétence est jugée essentielle dans la construction du club. C27 a aussi parlé de « l’amour pour le club » de l’équipe dirigeante.

Tableau N°20 - Récapitulatif de la gestion du personnel par clubs

Gestion du personnel C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Personnel sportif et X X X X X X X X X X X X administratif professionnels différence entre X X X X X X X secteur sportif et secteur administratif Statuts salariaux X X X X X X X X X inégaux entre joueurs amateurs, pluriactifs et semi- professionnels

2.1.2. Les caractéristiques externes

Les caractéristiques externes font référence à la gouvernance, à la production, à la communication, au marché et au partenariat.

2.1.2.1. La gouvernance La gouvernance peut être analysée sur la base des statuts du club, de son capital et de la composition de celui-ci. 264

Les statuts

La majorité des clubs rencontrés était organisée sous une forme sociétaire. Cependant, certains ont conservé leur statut associatif. Pour des raisons diverses, les clubs ont choisi des formes juridiques d’organisation particulières qui leur convenaient à une période donnée. Rappelons que les clubs professionnels ont le choix entre trois possibilités : l’EURSL, la SASP et la SAOS. Ajoutons que tous les clubs ayant choisi la forme SEM avant 1999 ont le droit de la conserver même si sa création, après cette même date, n’est plus possible. 1. Nous avons rencontré 13 clubs organisés en SASP, choix de nombreux clubs de football et de rugby dans la mesure où elle semble la forme la plus aboutie. Ainsi 8 clubs de rugby ont choisi cette forme, 3 clubs de football, 1 club de hockey sur glace et 1 club de basket-ball (C1, C3, C5, C10, C12, C13, C14, C15, C19, C22, C23, C26 et C27).

2. 4 clubs ont choisi de passer en SAOS. L’un d’eux est un club de hockey sur glace, un autre un club de basket-ball, les deux derniers sont des clubs de handball (C7, C20, C24 et C25). Ajoutons que l’un de ces deux derniers clubs (C20) a choisi, au moment où nous l’avons rencontré, de passer en SASP pour la saison d’après.

3. Ensuite, 2 clubs ont décidé de conserver la forme « SEM ». Il s’agit d’un club de basket-ball et d’un club de handball (C9 et C21). Il convient de préciser que ces deux clubs faisaient partie des premiers clubs de leur discipline à se convertir en société. L’un d’entre eux a prévu pour l’année 2008 de passer en SASP.

4. 1 club, C17, se singularise par son choix puisqu’il a choisi de constituer une EURSL. Il s’agit d’un club de hockey sur glace.

5. Enfin, 8 clubs au moment où nous les avons rencontrés étaient encore en association : C2, C4, C6, C8, C11, C16, C18 et C28. Néanmoins, le paysage a beaucoup évolué. 3 clubs sont passés en SASP la saison suivante (C4, C8, C11), 2 d’entre eux sont des clubs de basket-ball. Le dernier étant promu en Ligue professionnelle de rugby a choisi de passer 265

en société au regard du dépassement des seuils législatifs concernant la masse salariale et le niveau des recettes, comme la loi le lui obligeait. Il a choisi la SASP, car elle permet de rémunérer les dirigeants. De cette manière, le club peut obtenir une implication totale des dirigeants qui deviennent permanents. 1 club de handball a choisi de se transformer en EURSL la saison après notre visite (C16). Enfin, 4 clubs sont encore en association, à savoir 1 club de rugby, 1 club de handball et 2 clubs de hockey sur glace. L’un des deux clubs de hockey sur glace a, cependant, la ferme intention de passer en société dans un avenir proche.

Autrement dit, nombre de clubs évoluant dans des championnats de niveau élevé ont choisi de passer en société. En tenant compte des évolutions, aujourd’hui, 24 clubs sur 28 sont en société, 18 clubs ont choisi la SASP, soit près de 60% des clubs visités.

Tableau N°21 - Récapitulatif des statuts des clubs

Statut C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Association X X X X X X X X SEMSL X X EURSL X SAOS X X X X SASP X X X X X X X X X X X X X

La répartition du capital

Les clubs ont été fondés sur des bases associatives. Les rapports entre l’association et l’organisation sociétaire du club élite ne vont pas sans conflit. Le club de Ligue 1 de Nice en connaît les contraintes. Il est souvent difficile de faire admettre la séparation entre l’association qui s’occupe des équipes de la section « mineur », autrement dit la formation des jeunes, et la société en charge de l’équipe des professionnels. Lorsque les seuils sont dépassés ou même lorsque l’activité et la notoriété de l’équipe Senior - équipe représentative et vitrine du club puisqu’elle constitue l’aboutissement d’une carrière de sportif - prennent une certaine importance, l’association fait le choix de constituer une société en vue de mieux répondre à l’ensemble de son environnement. Ainsi, fréquemment, l’association est considérée comme le support à la mise en place de la société, ce qui induit une implication substantielle dans celle-ci. La SAOS qui constituait, avant la loi de 1999 organisant la S.A.S.P., la société la plus aboutie imposait 266 d’ailleurs une minorité de blocage pour l’association. Il est énoncé que « l’association-support » doit détenir au moins le tiers du capital social et des droits de vote de la S.A.O.S. Les parts sont hétérogènes en fonction des clubs. Fréquemment, à la mise en place d’une société, l’association détient un pouvoir considérable, mais celui-ci s’efface progressivement au bénéfice des investisseurs privés. Notre échantillon produit les résultats suivants : 1. 10 clubs ont une configuration similaire. 7 clubs ont un actionnaire majoritaire privé (C5, C10, C13, C14, C20, C22 et C23), 2 autres ont 2 actionnaires majoritaires privés (C15 et C26), 1 club a un actionnaire principal (C4). Il y a 3 clubs de football, 4 de rugby, 2 de basket-ball et 1 de handball. Tous sont en SASP. Au sein de l’un d’entre eux, C26, l’association conserve près de 49% des parts, un autre, C5, comprend 4 actionnaires seulement. Le dirigeant de ce dernier club affirme que cette situation permet une meilleure gestion, car l’actionnaire majoritaire est plus libre de ses choix. Il parle de révolution au sein du club. Le passé avait proposé un actionnariat plus éclaté et avait montré ses limites. Un autre club, C22, témoigne de certaines spécificités. Il a connu des conflits internes entre actionnaires en raison de l’ouverture du capital. Le club s’est alors restructuré. Un holding, composé d’une dizaine d’actionnaires, détient désormais la majorité du capital. Un autre club, C14, a un actionnaire principal qui est une personne morale. L’entreprise qui est actionnaire majoritaire est aussi directement intégrée dans la gestion de la SASP. Enfin, un des clubs (C4) ne possède pas un actionnaire majoritaire, mais l’un de ses actionnaires, autre que l’association, dispose de 25 à 30% du capital. Les autres actionnaires sont au nombre de 25 à 30 et ont une part identique. L’association n’a pas la minorité de blocage. 9 clubs sportifs ont choisi un conseil d’administration, 1 a choisi le Conseil de surveillance et le directoire.

2. 5 clubs ont l’association comme actionnaire majoritaire (C1, C7, C11, C16, C17 et C24). 2 autres clubs ont l’association comme actionnaire principal (C25 et C27). Tous ces clubs (3 clubs de rugby, 2 clubs de handball, 2 clubs de hockey sur glace, 1 club de basket-ball) disent être accompagnés d’une multiplicité d’actionnaires ou professent cette volonté d’ouverture. 267

Pour l’un d’entre eux, C27, l’association est le principal actionnaire, mais elle est accompagnée d’un autre actionnaire qui est une personne morale proche du club à hauteur du tiers du capital de la société, le solde étant réservé aux investisseurs privés. Un autre club, C1, a son association largement majoritaire, mais elle est composée aussi de près de 600 actionnaires privés. Dans ce contexte, le club est désiré comme n’étant pas « la chose » d’un seul homme. C11 vient de créer une société en charge de la gestion du secteur professionnel. Son association est encore largement majoritaire, mais sa volonté ultime est d’ouvrir rapidement le capital. Cette stratégie est d’ailleurs obligatoire au regard des exigences de sa ligue en termes de fonds propres. Les clubs de la discipline doivent constituer en 3 ans des fonds propres représentant au moins 10% du budget annuel. Ainsi, l’ambition du club est d’être le club de tous et, donc, de personne en particulier au regard de son passé tumultueux. La préservation de ces principes est recherchée par le canal des augmentations de capital. Dans le club C24, si l’association est majoritaire, la part la plus élevée détenue par les actionnaires atteint seulement 3%. C6 a choisi une SAOS pour garder la garantie à l’association que les dirigeants et actionnaires n’allaient pas forcément gagner de l’argent directement par le club. L’association est alors majoritaire. Cependant elle devrait, à l’avenir, descendre petit à petit à 33%. Sa volonté est de ne pas avoir un seul actionnaire. Enfin, dans C16, l’association détiendra le capital par le canal d’une société de communication qui gèrera le club sportif. Le choix du club sur la forme de société s’est fait en raison de la volonté de ses membres de garder un esprit associatif, considéré comme un gage de stabilité. Pour C17, la situation est proche dans la mesure où le club a choisi de se former en EURSL dont l’unique associé est l’association. Pour l’un d’entre eux (C27), le choix d’un conseil de surveillance et d’un directoire s’est fait logiquement, puisqu’il permet d’impliquer 18 personnes à la place de 9 pour le conseil d’administration. Pour le club, c’était donc un moyen d’intégrer ou de conserver plus de personnes en son sein. Ainsi, l’ensemble des membres de la société précédente a pu entrer dans la nouvelle. Un autre club (C6) a choisi une formule plus autonome que celle de la direction autocratique. Ce n’est pas une seule personne qui va s’occuper de tout. Ainsi, 2 clubs ont opté 268

pour un Conseil d’administration, 2 autres s’organisent autour d’un conseil de surveillance avec un directoire.

3. 2 clubs ont des situations singulières. Un club a pour actionnaire majoritaire la municipalité (C9). Concernant l’autre club, C21, l’association possède 25% du capital, tout comme la ville, le reste étant réservée à une multiplicité d’investisseurs privés. C9 affirme que la forme de société SEM lui permet d’avoir une garantie financière intéressante, compte tenu du fait que les municipalités sont majoritaires, mais les orientations choisies répondent à une stratégie municipale démocratique. Les 2 clubs sportifs ont choisi de former un conseil d’administration.

4. 4 clubs affirment avoir un actionnariat diversifié à savoir C3, C8, C12 et C19. Ils ont au moins 25 actionnaires. Le groupe est composé de 2 clubs de rugby, 1 club de basket-ball et 1 club de hockey sur glace. L’un d’entre eux (C3) est composé d’actionnaires ayant investi la même somme dans le capital, à l’exception d’un seul. En 7 ans, il a ouvert 3 fois le capital, il devrait atteindre 75 actionnaires. Cette parité dans l’investissement répond, selon le club, à un projet auquel tous participent de la même manière avec un maximum de convivialité entre les actionnaires. Cette multiplicité d’actionnaires, ne dépendant pas d’un seul gros mécène, offre à la fois plus de sécurité et plus d’implication de chacun. L’importance de son capital le place dans ce domaine dans les meilleurs clubs de sa discipline. Le club C8, dont la construction de la société est nouvelle, affirme avoir choisi une SASP plutôt qu’une SAOS pour des raisons de recueil de capital. En effet, l’investissement en capital étant fort, la SAOS ne pouvait répondre à leur demande dans la mesure où la minorité de blocage demande à l’association de détenir 33% des parts. Or, cette dernière n’avait pas les reins assez solides. Néanmoins, le club n’a pas l’ambition de reverser des dividendes et de rémunérer les dirigeants. Le club ne veut pas de mainmise sur le club et souhaite, au contraire, une multiplicité d’actionnaires. Enfin, le club C12 a débuté avec une dizaine d’actionnaires et en compte aujourd’hui 25. Cette évolution est due au fait que les actionnaires se sont associés à un projet de manière symbolique et pas forcément avec un objectif de rentabilité. Ils sont 269

venus pour combler un déficit financier, comme de vrais supporters. Aucun des actionnaires n’est majoritaire et n’a les pleins pouvoirs. Les 4 clubs ont préféré la formule conseil de surveillance et directoire. Le club C8 a fait ce choix, car les investisseurs privés n’ont pas le temps de s’investir dans sa gestion. En effet, le conseil de surveillance ne fait que surveiller les comptes et les résultats à un moment donné. La participation à un Conseil d’administration suppose un investissement important dans la gestion du club.

5. Enfin, les 4 derniers clubs sont encore en association, à savoir C2, C6, C18 et C28, mais l’un d’entre eux, C2 a le projet de se transformer très prochainement en société.

Sauf cas de faillite ou résultats sportifs catastrophiques, il est extrêmement rare que des clubs organisés en société se transforment en association. Il ressort donc diverses formules. Il semblerait que certains clubs soient dépendants d’un actionnaire et que d’autres souhaitent conserver un actionnariat diversifié dans l’optique de garder l’image du « club du peuple ». D’autres clubs n’ont pas choisi, soit parce qu’ils ont été contraints d’accepter l’investissement d’actionnaires pour combler les déficits, soit parce que l’association a une minorité de blocage ou qu’elle constitue l’investisseur majoritaire compte tenu de la nouveauté de la société. Une tendance semble se dessiner : plus les actionnaires sont diversifiés et plus les sociétés choisissent la formule « allemande » qui consiste à mettre en place un modèle dualiste sous la forme d’un conseil de surveillance et un directoire. La raison principale réside dans l’implication des personnes dans le club, tant en nombre qu’en termes de temps. Plusieurs catégories se dégagent, à savoir l’actionnaire qui a la mainmise sur le club, l’association qui veut conserver la direction du club ou encore la multiplicité des actionnaires.

Tableau N°22 - Récapitulatif du capital des clubs

Capital C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Actionnaire majoritaire X X X X X X X X X X privé Association majoritaire X X X X X X X X Municipalité importante X X Actionnaires diversifiés X X X X Pas d’actionnaire X X X X

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2.1.2.2. La production Il s’agit premièrement de définir ce que nous entendons par production lorsqu’il est question d’un club sportif. Nous partons du principe que le club sportif a pour vocation, au départ, de former à la pratique d’une activité sportive. Néanmoins, l’engouement sociétal pour le sport a dénaturé l’activité du club dans la mesure où ce dernier peut aussi faire de cette pratique un spectacle (Annexe 4). Si la formation à la pratique sportive ne fait nul doute dans l’activité d’un club, en revanche il convient de se poser la question de savoir la manière dont est perçue la compétition sportive proposée par le club : est-ce un spectacle ou non ? Ensuite, comment est perçu le spectacle : est-ce un spectacle sportif d’initiés ou peut-on le considérer comme un spectacle à part entière ? Le premier attire les fervents amateurs d’une discipline sportive ou d’un club. Le second attire une population plus large dans la mesure où le spectacle intéresse aussi un public citoyen. Est-il possible de retirer des recettes de cette pratique et sous quelles conditions ? Ainsi, certains clubs au statut associatif préfèrent parler de PAF (Participation aux frais) que de billets d’entrée qui les contraignent à payer une taxe. L’activité globale d’un club peut donc être de différente nature. Est-il question d’une « pseudo - société de spectacle » ou d’un club associatif voué à la formation des jeunes uniquement ? Est-il question des deux ? Nous avons tenté de faire cette distinction en démontrant les différents niveaux que peuvent revêtir les activités de formation et de spectacle au sein des clubs sportifs. Lorsqu’il est question de spectacle, il convient d’analyser les structures des clubs et le taux de remplissage du spectacle lui-même. Un club ayant un stade d’une capacité de 200 personnes ne proposera pas forcément un spectacle ouvert à tout le monde, même si la compétition sportive peut s’avérer d’un grand intérêt potentiel, ou un spectacle de même nature qu’un club jouissant d’un stade de 30.000 personnes. Parallèlement, le public a son importance dans la création de spectacle, puisqu’un club ayant un stade de dimensions similaires à un autre mais atteignant un taux de remplissage de près de 100% offrira un spectacle différent de son homologue au taux de remplissage de 25%. Les audiences sont des facteurs importants dans l’obtention de partenaires financiers qui cherchent à favoriser l’assimilation du spectacle à leur image, notamment en achetant des encarts publicitaires. Il est aussi important d’être vu lors des matchs. Nous nous intéresserons donc aussi à l’existence de « Customer relationship » au sein des clubs qui 271 démontrent un niveau de demande suffisamment important pour que le club ait la volonté de créer cette activité. Ainsi, il est question de savoir si les clubs rencontrés disposent de loges ou de lieux destinés à l’accueil de partenaires. L’objectif est de différencier le « spectacle sportif » du « spectacle total ». Il semblerait que nombre de disciplines ont choisi de transformer le spectacle sportif en spectacle total. Par exemple, il est prévu pour 2008-2009, que les 14 clubs de basket-ball qui pourront participer à la Superligue seront choisis parmi les dix premiers au classement, les quatre restants étant sélectionnés sur la base de la qualité de leurs structures et de leur potentiel économiques. Cette structuration implique la création d’une société, un budget minimal de 3 millions d’euros, 50% des ressources provenant de ressources autres que des soutiens financiers, la disposition d’un palais des sports à 5000 personnes et un accès VIP. Dans la production, cinq critères ont été analysés : la rencontre sportive, la billetterie, les abonnements, la formation et les produits dérivés.

La rencontre sportive

1. La première catégorie de clubs est composée de clubs ayant transformé leur compétition sportive en un spectacle à part entière. Ils jouissent de structures importantes et font des relations publiques avec les commanditaires et les collectivités. Nos interlocuteurs considèrent le club dans lequel il travaille comme une société de spectacle. Cette catégorie comprend 2 clubs de football, 6 clubs de rugby et 2 clubs de basket-ball. Si certains d’entre eux connaissent des difficultés avec leurs structures, elles cherchent cependant à disposer d’un outil adéquat pour la fourniture d’un spectacle total. Plusieurs clubs projettent d’agrandir leurs structures pour mieux répondre à la demande. C22 se propose de passer de 13 000 à 16 000 places en termes de billetterie. C26 jouit d’un vieux stade qui constitue cependant un endroit mythique pour la discipline, qu’il souhaite faire passer de 14 000 places à 25 000 places. Enfin, C1 a aussi le souhait d’agrandir son stade. D’autres ont déjà effectué des travaux tout au long des saisons, notamment C27 (qui est même propriétaire) et C14. Certains clubs projettent de changer de stade. Ainsi, C13 souhaite une salle polyvalente moderne (chauffage, couverture, etc.) pour tout spectacle financé sur ses propres fonds. C5 qui, pourtant, possède un 272 stade de 9000 places projette d’avoir aussi un nouveau stade financé par des fonds privés. C14, qui a pourtant engagé des travaux dans son enceinte, espère obtenir l’acceptation d’un nouvel outil avec l’aide de fonds privés. 2 autres clubs disposent d’une structure récente ou rénovée. C23 considère, cependant, que le réceptacle de son spectacle n’est pas adapté entièrement à sa demande dans la mesure où l’enceinte ne peut être agrandie et ne constitue pas un lieu de vie pour la population locale. C21 a à disposition un stade de 8000 places depuis une dizaine d’années maintenant. Enfin, C3 se distingue des autres puisqu’il préfère annoncer qu’il propose un « concept » basé sur des valeurs identitaires, sur le soutien du public et sur sa culture régionale plutôt que sur l’organisation d’un spectacle. Les capacités des stades s’étalent d’environ 5 650 places à près de 32 000. L’écart est important, mais pour l’un il s’agit d’une salle, pour l’autre il s’agit d’un stade. De ce fait, le spectacle est tout aussi important. Le taux de remplissage atteint au moins les 70% de moyenne. Toutes ces organisations ont un club de supporters et tous ont la volonté d’améliorer le spectacle. Certains gestionnaires des stades (C5, C13, C14, C23, C26 et C27) projettent d’en faire de véritables lieux de vie, avec un accueil adapté avant les matchs, après les matchs, hors matchs par la création notamment de brasseries et de boutiques. Ainsi, tous proposent diverses prestations pour améliorer la réception des spectateurs aux matchs à l’intérieur comme à l’extérieur de la rencontre sportive, avec la création, par exemple, d’une garderie (C5, C14, C27), d’un KOP de petits supporters (C3, C27), de matchs de galas (tous), de buvettes (tous), de bodegas ou chapiteaux ou salles, de bandas, de pom-pom girls, d’écrans géants, de jeux pendant les pauses, de danseurs, de speaker (DJ). Certains s’appuient sur la réputation des joueurs (C26) ou leur provenance (C13), notamment lorsqu’ils sont des produits du club, et d’autres disent rechercher un accord direct avec les clubs de supporters pour améliorer le spectacle (C3 et C5). L’un d’entre eux, C3, leur fournit des drapeaux aux couleurs du club. Tous font des relations publiques. Cette activité est plus ou moins importante selon les clubs, mais tous ont compris l’intérêt de son 273

développement. Certains clubs éprouvent des difficultés au regard notamment de la vétusté de leur stade (C13). D’autres ne possèdent pas de loges (C3 et C5). Quelques-uns en font leur priorité et veulent l’améliorer. Ainsi, C22 passera de 17 à 40 loges, C5 proposera des loges dans son nouveau stade. C27 complexifie son offre en faisant construire une nouvelle salle de 2500 m² en plus d’un salon de 800 m² et en proposant 28 loges. C14 a rénové, il y a peu de temps, les tribunes des partenaires et les loges. C3 fonde partiellement sa politique sur cette activité et possède un club de partenaires de plus de 400 membres. C’est son fonds de commerce. Enfin, C21 déclare ne faire de relations publiques qu’au niveau régional, mais il possède tout de même des loges pouvant accueillir près de 450 personnes.

2. La deuxième catégorie de clubs transforme le spectacle sportif en spectacle total. Néanmoins, leur niveau de compétition ou encore le manque d’animations autour de la rencontre sportive ne leur permet d’atteindre principalement qu’une population d’initiés au sport, voire à la discipline sportive. Proposer le spectacle à un public plus large est encore un objectif difficile à atteindre. Le spectacle est avant tout sportif même s’il intéresse un public large. 3 clubs sortent du lot, à savoir 2 clubs de rugby et 1 club de football : C10, C11 et C15. 2 d’entre eux ont un taux de remplissage faible l’un à 47%, l’autre à 37% environ (C10 et C11), le troisième atteint au contraire près de 87% (C15) mais la capacité du stade est bien plus petite. Les stades atteignent entre 9200 et 12 000 places. C10 a l’ambition de rénover son stade pour en faire un espace de vie et du grand spectacle, C11 est sur le point de recevoir un stade Hi Tech (loges, restaurant, 430m² de boutiques, 20 000 places, stade fermé et couvert). Quant à C15, au regard du tissu démographique et economico-social qui l’entoure, son stade est un lieu d’animation important pour la ville. Tous ces clubs disent ne pas proposer un spectacle entier compte tenu du manque d’animations, d’un stade peu approprié ou d’une demande insuffisante. Ils cherchent à s’investir dans les relations publiques, mais les loges sont soit mal adaptées (C10 et C11), soit inexistantes (C15). Ils justifient cette situation par le besoin de ne pas créer de distorsions entre les partenaires). Ils proposent aussi diverses 274

prestations pour les partenaires, notamment les soirées à thèmes, la création d’un club entreprises (C10), les chapiteaux et bodegas comme C15 (qui accueille 650 partenaires pour dîner après les matchs) et C11.

3. Une autre catégorie comprend les clubs ne proposant qu’un spectacle sportif dans la mesure où la popularité de leur discipline ou du club lui- même et les structures mal adaptées ne leur permettent pas de toucher le grand public. 2 clubs de rugby, 2 clubs de basket-ball, 5 clubs de handball et 3 clubs de hockey sur glace font partie de cette catégorie. Les stades disposent de 1200 à 6000 places. Les taux de remplissage sont très variables selon les clubs et pour diverses raisons. C19 possède le stade le plus important, mais son taux de remplissage n’atteint que 53%. Il n’est pas considéré comme un pilier dans sa discipline, bien que les résultats obtenus sont plutôt flatteurs, malgré un tissu démographique, économique et social ne l’ouvrant guère à l’émergence d’une aura auprès du public. Il en est de même pour C6 qui n’évolue certes pas au plus haut niveau, mais qui attire tout de même près de 3000 personnes par match. Ensuite, d’autres clubs se ressemblent compte tenu de leur projet et de l’engouement dont ils font l’objet : C4 a un taux de remplissage proche de 100%, tout comme C7 et C16. Pour ces deux derniers, ces résultats s’expliquent du fait de la petite capacité de leur structure, respectivement 3000 et 1200 places, et par l’engouement qui les entoure au regard de leurs résultats sportifs. C4 qui possède une salle privée de 2400 places constitue une véritable animation pour la ville, compte tenu de la taille de celle-ci. C4 et C7 ont projeté de remplacer la structure par un autre plus complète : C7 passera à 4600 places dès 2008 et C4 malgré un agrandissement il y a quelques bénéficiera d’un palais des sports de 4000 à 5000 places dès 2009. C16 avoue aussi que sa structure devient obsolète, mais son utilisation est gratuite. Enfin, d’autres clubs ont un taux de remplissage moins important (entre 70% et 90%) et des structures de capacités moyennes (2500 à 3300 places) : C2, C9, C12, C24 et C25. C2 et C12 disposent d’une enceinte récente. C12 veut encore agrandir son enceinte, comme C24 sous forme de projet. Les relations publiques sont plus difficiles, car il n’existe 275

pas de loges dans la plupart des cas (notamment C4), excepté pour C12 qui les a remplacées par un endroit VIP. C24 a prévu dans son projet de stade de développer les loges pour les relations publiques. Enfin C8 et C18 se distinguent, car ils possèdent un stade de 4000 et 4500 places que les deux clubs ne parviennent à remplir qu’à moitié. Avec C18, il s’agit pourtant de la deuxième plus grande affluence de sa discipline sportive. Cette catégorie de clubs s’intéresse aussi aux relations publiques. Certains d’entre eux disposent de loges pour les partenaires comme C16 et C18. C16 affirme avoir un outil de qualité. C18 (qui possède 15 loges) a créé récemment un nouvel espace pour accueillir plusieurs centaines de personnes avant et après les matchs pour développer l’activité. Certains clubs mettent en avant la création de clubs house (C6 et C19), de bodegas (C19) pour les repas après les matchs ou même de « club de partenaires » qui se rassemblent pour échanger et se rencontrer (C24). D’autres avouent faire très peu de relations publiques (C7 et C8). Cependant, dans son projet de stade, C7 a prévu de donner plus d’importance à ce type de prestations. Il compte faire de son stade un lieu de vie, un lieu d’animation. Enfin, 4 clubs, dont C12 et C18, ont fait état de leur volonté de créer le spectacle dans le spectacle à savoir, la participation de pom-pom girls (C2, C9), d’une mascotte (C9), de DJ ou d’un annonceur (C12). De petits spectacles pendant les poses, la mise à disposition de produits d’animation (C12), la présence d’écrans géant (C2) provoquent aussi des « effets d’attraction » pour les spectateurs. C12 et C18 affichent leur ambition de donner satisfaction de tous les types de clients, qu’il soit initiés ou non à la discipline pendant que d’autres, C7 (compte tenu des contraintes de son enceinte) et C8, avouent proposer un spectacle basique. C12 fait état aussi de matchs de galas. Enfin, C19 s’est offert un nouvel éclairage de manière à programmer le match en soirée et à obtenir ainsi de meilleures audiences pour répondre aux plages de disponibilité des spectateurs potentiels.

4. Enfin, le dernier groupe est composé de clubs sportifs proposant plus une rencontre sportive qu’un véritable spectacle, tant l’ensemble des « facteurs d’attraction » évoqués précédemment ne sont pas réunis pour 276

la création de spectacle. Le spectacle est limité. 2 clubs de hockey sur glace et 1 club de handball sont dans cette situation. 2 d’entre eux, C17 et C28, possèdent de petites enceintes (1300 et 1500 personnes) et ont un taux de remplissage moyen. Notons, cependant, que C17 est une destination touristique et qu’il est, de ce fait, sujet à la saisonnalité. Ainsi, ses taux de remplissage oscillent entre 60 et 95% selon les saisons. Cette condition a amené le club à proposer beaucoup de matchs de galas en période faste, dans la mesure où le spectacle sportif constitue une animation locale importante. La qualité de visionnage de l’enceinte sportive est considérée comme médiocre et les animations sont très basiques. Le dernier club, C20, a un comportement singulier puisque la plupart des places sont des invitations. Il y a donc peu de recettes. L’enceinte est importante puisqu’elle compte près de 4000 places, mais son taux de remplissage est médiocre (environ 50%). L’objectif pour le club est d’attirer les spectateurs pour créer l’ambiance, même s’il ne recherche pas à améliorer ou à créer du spectacle hors la vision de la compétition elle-même. Le club est financé par un investisseur passionné qui est un véritable mécène. Enfin, pour les 3 clubs, les relations publiques sont quasiment inexistantes.

Ainsi, de notre échantillon, il ressort trois manières de concevoir le spectacle : un spectacle total, un spectacle sportif avant tout et une animation sportive qui peut faire l’objet indirect d’un spectacle.

Tableau N°23 - Récapitulatif du type de spectacle proposé par clubs

Rencontre C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 sportive Spectacle total X X X X X X X X X X Spectacle en X X X transformation Spectacle sportif X X X X X X X X X X X X Compétition X X X sportive

La billetterie

Généralement, la billetterie des clubs est située directement au siège ou au stade, le soir des matchs. Certains clubs au regard de la forte demande ont 277 mis en place un réseau de distribution plus ou moins développé permettant aux spectateurs de réserver leur place bien à l’avance. Internet est une solution de plus en plus courante, mais les points de vente traditionnels subsistent. Les abonnements constituent une solution pour garantir une certaine audience pendant les matchs. Voici les groupes de clubs qui se dégagent : 1. Une première catégorie est composée de clubs pour lesquels il est facile techniquement de se procurer des places en raison de leur

notoriété et du réseau de distribution qu’ils ont autour d’eux. Cependant, la demande est si importante que les places s’avèrent rapidement écoulées. Ainsi, 5 clubs sont dans cette situation, à savoir 2 clubs de football et 3 clubs de rugby. Tous, à savoir C3, C13, C23, C26 et C27, sont connectés au réseau Ticketnet, Francebillet ou ont une billetterie en ligne sur leur site. Ils vendent en GMS, dans leur boutique, aux guichets souvent au niveau régional, mais le réseau peut s’étendre au niveau national. Pour C26, plus de la moitié des spectateurs sont des abonnés. Le taux de remplissage est important pour ces différents clubs.

2. Une deuxième catégorie est composée de clubs connaissant un taux de remplissage serein et un réseau de distribution important, mais leur notoriété ou l’intérêt qu’il dégage en raison de leur discipline sportive ou du niveau de compétition ne leur permet pas d’être référencés au niveau national. Ces clubs utilisent une billetterie au siège et une autre en ligne, sur les réseaux France-billet et/ou Ticketnet, comme ceux de la première catégorie. Ils sont nombreux puisqu’on dénombre 3 clubs de rugby, 3 clubs de basket-ball, 3 clubs de handball, 1 club de hockey sur glace, 1 club de football, à savoir C1, C5, C7, C8, C10, C11, C12, C14, C16, C18 et C24. Parmi eux, C5 et C12 estiment que la billetterie informatique peut être considérée comme une réelle révolution dans le club. Pour d’autres, comme C7, C10, C11, C12, C14, C16, C18 et C24 et la billetterie constitue un enjeu principal dans leur stratégie. En effet, C10 n’atteint que 60% de taux de remplissage et, pourtant, il disposera bientôt d’un stade Hi-tech. C7 connaît un taux de remplissage important et se voit parfois dans l’obligation de déménager dans une salle plus grande pour accueillir les spectateurs. Il projette de construire une salle qui devrait multiplier par 4 le nombre de places et 278

constituer un outil d’animation de la ville du fait des services proposés. C24 a, quant à lui, proposé une vente en ligne qui a connu un franc succès puisqu’elle correspond au sixième des ventes en quelques mois. C14 parle de « stratégie de commercialisation de la billetterie » en essayant de proposer plus qu’un simple spectacle sportif. En effet, l’intérêt populaire de la discipline sportive dans laquelle le club évolue ne permet, selon le club, de remplir la salle qu’à 70% de sa capacité. Il s’efforce donc « d’aller chercher les 30% manquant » en proposant un spectacle complet. Il a d’ailleurs réussi à augmenter de 25% sa billetterie, malgré les mauvais résultats sportifs durant toute la saison. C12 emploie la même stratégie de transformation de spectacle, compte tenu du fort intérêt qu’il porte à sa billetterie. En effet, son taux de remplissage est important et il représente près du tiers de ses recettes. Ses résultats sportifs n’y sont pas pour rien puisqu’il atteint le carré final de sa discipline depuis plusieurs années consécutives. Le club C18 possède la deuxième audience de France dans sa discipline et il jouit d’une salle de qualité. Il convient ensuite d’amener quelques éléments de précision devant quelques cas singuliers comme C11 qui est un club ayant connu un dépôt de bilan. A sa relégation, la vente de billets ne s’effectuait plus qu’au stade. Désormais, avec sa promotion à la division supérieure, il a mis en place tout un réseau de billetterie performant. Quant à C1 qui possède le même type de réseaux de distribution et un taux de remplissage intéressant (70%), la moitié des spectateurs est constituée d’abonnés.

3. Une troisième catégorie apparaît avec des clubs n’ayant pas un réseau de distribution important, puisque le seul véritable moyen de se procurer des places est de venir au siège ou à la boutique. Un seul d’entre eux utilise son site Internet. Cette absence n’est pas significative économiquement puisque ces clubs connaissent un taux de remplissage important. Ce phénomène est d’autant plus fort que leur audience est constituée presque exclusivement d’abonnés. Leur audience est essentiellement régionale, mais ils connaissent un soutien populaire important. 2 clubs de rugby et un club de basket-ball composent cette catégorie à savoir C15, C21 et C22. Pour C15, 80% des billets sont des pré-ventes entre partenaires et abonnements et pour C22 les abonnés 279

constituent quasiment l’intégralité des places assises, les places à vendre étant uniquement debout.

4. Enfin, une dernière catégorie apparaît et est constituée de clubs n’ayant pas de réseaux officiels pour leur billetterie, à savoir C2, C4, C6, C9, C17, C19, C20, C25 et C28. L’achat des billets s’effectue exclusivement au club, soit par téléphone, soit aux bureaux. Ce groupe est composé d’1 club de basket-ball, de 2 clubs de handball, de 2 clubs de rugby et de 4 clubs de hockey sur glace. Si la vente s’effectue directement au club, certains utilisent d’autres canaux comme C17 qui s’appuie sur un office du tourisme important, la localité étant une destination de vacances reconnue. Rappelons que sa billetterie est très fluctuante selon les saisons, passant de 60% à 95% selon les périodes. C20 a mis en place une politique de prix bas pour attirer les jeunes, ce qui lui permet d’avoir un taux de remplissage intéressant. C9 s’appuie sur sa ligue professionnelle pour vendre ses billets, laquelle propose des ventes en ligne. C1 ne vend plus qu’au siège du club puisque ses réseaux de distribution l’ont abandonné, faute d’audience. C25 connaît un taux de remplissage important malgré ce seul canal de distribution, tout comme C4 qui avoisine les 95%.

Tableau N°24 - Récapitulatif du type de billetterie par clubs

Billetterie C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Importante et X X X X X large Importante et X X X X X X X X X X X régionale Pas de réseaux X X X mais large Pas de réseau de X X X X X X X X X distribution

Les abonnements

Les abonnements constituent une forme de fidélisation de la « clientèle du club ». Ils lui permettent d’obtenir à la fois une garantie d’audience pendant les soirs de matchs et des revenus assurés dès le début de la saison (la plupart du temps). Un spectacle sans spectateurs perd de son intérêt. Il est donc intéressant d’analyser non seulement le nombre d’abonnements, mais aussi et surtout de connaître l’existence d’une politique engagée dans ce domaine par le club. Il est à noter que dans les grands clubs de football en Angleterre ou dans 280 les clubs de NBA aux Etats-Unis, il n’est pas rare que toutes les places disponibles soient réservées aux abonnés. 1. Le premier groupe est composé de clubs ayant mis en place une politique d’abonnements efficace. Pour C22, la part des abonnés atteint 80% des spectateurs et il compte atteindre le même taux malgré un agrandissement de sa structure de 3000 places. Les recettes en abonnements s’élève à 20% du budget. Pour C26, le taux d’abonnés par rapport au nombre de spectateurs atteint près de 70%. Pour d’autres la barre est moins haute, mais elle atteint tout de même la moitié des spectateurs pour C1, C3, C5, C11, C14, C25 et C27. Pour C15, 80% des billets sont des pré-ventes entre partenaires et abonnements et 7.5 % des recettes proviennent des abonnements. Pour C23, C19 et C13, la part des abonnés avoisine les 40%. Notons, cependant, que C23 a le plus grand nombre d’abonnements de notre échantillon, mais ce chiffre est dépendant de la capacité du stade. Enfin, C4 atteint le tiers de son audience avec les abonnements, mais il dispose d’une structure de capacité de spectateurs relativement faible, ce qui renforce le taux. Tous ces clubs ont l’ambition d’améliorer le nombre d’abonnements, à l’exception de C4, lequel dispose déjà d’un taux de remplissage de près de 100% sur l’année, compte tenu de la capacité de sa salle.

2. La deuxième catégorie de clubs souhaite développer ses abonnements, jugés insuffisants en nombre, même s’ils ne sont pas négligeables : C2, C6, C7, C10, C12, C16, C18, C21 et C24. Les parts des abonnements de C2 et C12 atteignent 25%. C16, C18 et C24 souhaitent développer leur politique d’abonnements, compte tenu de chiffres (18 à 19 % des spectateurs) jugés insuffisants. C7 compte multiplier les abonnements dans sa nouvelle enceinte. C10 est un cas particulier puisqu’il n’arrive pas à intéresser la population, bien qu’il soit présent dans le top 40 des clubs en France dans une discipline fortement médiatisée : 60% de taux de remplissage. De ce fait, il brade ses abonnements.

3. Une troisième famille représente les clubs qui ont peu d’abonnés. C8 et C9 ont un taux d’abonnés de 4 % par rapport à leur moyenne de spectateurs. C8 souhaite progresser dans ce domaine rapidement. C17 et C28 sont dans cette situation en raison de leur situation géographique. Ils sont dépendants des 281

saisons puisqu’ils constituent des destinations touristiques. Enfin, C20 ne propose pas d’abonnements à ses supporters.

Tableau N°25 - Récapitulatif des abonnements par clubs

Abonnements C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Important X X X X X X X X X X X X Important X X X X X X X X X X X mais à développer Faible X X X X X

La formation

La formation constitue l’activité de départ d’un club sportif au regard des valeurs que le sport transmet. Les pouvoirs publics ont avant tout octroyé des subventions aux clubs en vue de remplir une mission de service public. Ensuite, la nature de ces subventions a évolué puisque le club lui-même peut constituer un enjeu politique au sein d’une localité au regard de la place sentimentale qui lui est accordée par la population. Le club devient un véritable vecteur de communication et un élément fédérateur tant socialement qu’économiquement. La formation connaît une crise dans la mesure où sa réalisation est longue et ses résultats incertains, ce qui ne permet pas à court terme d’obtenir des résultats sportifs et de développer le soutien populaire. Nombre de clubs ont recruté ou acheté des joueurs de qualité laissant de côté la formation. Cette stratégie ne fait pas l’unanimité puisque le club est au départ une organisation formatrice. C’est pourquoi nombre de clubs se prévalent de former, de faire jouer des joueurs « pure souche » dans leurs équipes. Certains même proposent des centres de formations ou des sport-études, en vue de performances ultérieures, mais aussi pour lisser l’image du club et développer sa proximité avec la société. Aujourd’hui, certaines disciplines sportives incitent les clubs professionnels à construire un centre de formation pour perpétuer la performance nationale et conserver l’éthique du sport411. Il est intéressant de chercher à identifier l’importance de la formation au sein du club ainsi que les moyens mis en œuvre. 1. La première catégorie est composée de clubs pour lesquels la formation constitue un pilier important de leur politique et de leur stratégie et qui insistent sur la qualité de leur formation par les sport-études et les centres de formation. Elle comprend 1 club de football, 6 clubs de rugby, 1 club de

411 Il est obligatoire d’avoir un centre de formation dans les clubs du Top 14 (Rugby). Dans 2 ans, ce sera obligatoire pour les clubs de PRO D2. 282

handball et 3 clubs de hockey sur glace. Les clubs C1, C5, C6, C7, C11, C13, C19, C25, C27 et C28 ont d’importantes structures de centres de formation. Pour certains, plus qu’un pilier, la formation est l’âme même du club : C1, C5, C7, C13 (même s’il regrette ses structures), C19, C27 et C28. Le club C13 explique cette stratégie dans la mesure où il n’a pas les moyens de s’aligner sur le marché des transferts et que la participation de joueurs originaires est importante pour l’identité du club. C27 a été l’un des premiers à disposer d’un centre de formation dans sa discipline et il est considéré encore comme l’un des meilleurs dans ce domaine, même s’il ne constitue pas un centre de profits. C5 est considéré comme un grand club formateur et nombre de joueurs de l’équipe proviennent de la région (sur un rayon d’à peu près 200 kilomètres). C19 n’ayant pas l’aura d’un grand club, mais il est de plus en plus reconnu pour sa formation, résultat de sa politique clairement déclarée. Cependant, peu de joueurs formés au sein du club intègrent l’équipe professionnelle. C7 espère quant à lui obtenir de nouvelles recrues pour améliorer les résultats du club. Enfin, C28 n’a d’autres ambitions que de faire vivre la formation pour poursuivre dans le haut niveau, car ses structures ne lui permettent pas de s’aligner sur le marché des transferts. En outre, C11 a connu des déboires récents, mais son centre de formation a été important dans la remontée du club. Bien que n’évoluant pas au plus haut niveau, C6 se targue d’avoir une école de formation tout aussi importante que celle de ses homologues de division supérieure. Il compte d’ailleurs créer un véritable centre de formation agréé, au regard de l’importance que revêt son école de formation dans la vie communautaire. D’autres clubs (C3, C12, C25, C27 et C28) soutiennent la formation dans la mesure où ils s’attachent à faire participer leurs jeunes recrues dans l’équipe senior. Enfin, C1 propose des emplois aux jeunes et à leurs professionnels, accompagné d’un projet professionnel et un accompagnement social, alors que C12 a mis en place un centre de formation aux métiers que sa discipline réclame. Le club compte les embaucher dans l’avenir.

2. La deuxième famille de clubs contient des clubs ayant mentionné un intérêt pour la formation, mais celle-ci ne constitue pas une priorité d’après les témoignages de nos interlocuteurs. 2 clubs de football, 1 club de handball, 3 clubs de basket-ball, 3 clubs de handball, 1 club de hockey sur glace, 1 club 283

de rugby sont répertoriés dans cette famille. 5 clubs (C4, C16, C20, C21 et C23) ont mentionné l’existence d’un centre de formation, mais ils ne se sont pas attardés sur la question lorsqu’il était question de stratégie. Cependant, C21 a considéré le poste du directeur de centre de formation comme un des postes importants au sein du club. Quatre autres clubs se sont arrêtés un instant sur la formation pour diverses raisons. C10 a obtenu, il y a peu, un centre de formation agréé dans la mesure où il fallait attendre 2 années de professionnalisme pour que celui- ci soit reconnu officiellement. Le centre donnera la possibilité de garder contractuellement leurs joueurs et de mieux structurer le club même, malgré son coût important, notamment en termes de salaires. En effet, à partir de 14 ans jusqu’à 19 ans, les joueurs sont sous convention et il devient nécessaire de rémunérer le staff du centre. C14 a évoqué sa stratégie communautaire qui consiste à regrouper la pratique de rue à celle qui existe sur les terrains. Le club a créé des « académies » pour entremêler les deux styles de pratique en proposant des compétitions, des rencontres de manière à montrer son intérêt pour la communauté, mais aussi pour recruter puis former les jeunes recrues. Aussi, du fait de son choix de structure C9 a la possibilité de proposer un contrat pluri-actif aux joueurs embauchés par la municipalité. De cette manière, il y a véritablement un échange de bons procédés entre l’association et le groupe professionnel, puisque le club a la possibilité de conserver ses joueurs. Enfin, C15 estime sortir, depuis la création de son centre de formation (1999), environ 2 à 3 joueurs par an, mais son centre est une source de dépenses importantes, aux résultats aléatoires en France. Pour finir, C2 est reconnu comme un club laissant de la place à ses jeunes joueurs dans l’équipe première.

3. Le troisième groupe est constitué de clubs, disposant d’un centre de formation pour certains ou de structures peu développés pour d’autres, qui n’ont accordé qu’une faible place à la formation dans les interviews qu’ils nous ont accordées. Dans ce cas, la formation n’est pas considérée comme un élément prioritaire, malgré les investissements de certains clubs. Ils sont au nombre de 7 (C3, C8, C17, C18, C22, C24 et C26) parmi lesquels nous retrouvons 3 clubs de rugby, 2 clubs de basket-ball, 1 club de handball et 1 club de hockey sur glace. 284

Cette étude met en évidence des conceptions différentes dans la politique de formation des clubs : soit elle est mise de côté au profit d’autres objectifs prioritaires, soit elle est obligatoire au regard de la situation du club ou de la législation. Dans ce cas, elle est encadrée et très formalisée, avec des structures appropriées.

Tableau N°26 - Récapitulatif de l’intérêt pour le formation par clubs

Formation C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Pilier stratégique X X X X X X X X X X X Important mais X X X X X X X X X X pas une priorité minime X X X X X X X

Les produits dérivés

Outre le spectacle sportif et la formation, les clubs ont compris l’intérêt de créer de la richesse par d’autres moyens. Beaucoup se sont intéressés à leur image et ont tenté d’en tirer avantage en la commercialisant par l’intermédiaire de produits à l’effigie du club (« produits dérivés »). Pour certains clubs, ces derniers peuvent constituer une manne importante dans leur chiffre d’affaires. Ces produits prennent diverses formes et leur gamme est plus ou moins large. En effet, bien qu’uniques, car aux couleurs du club, ils n’ont pas toujours le même succès ou le même intérêt pour les « clients » potentiels. Ils peuvent s’avérer ringards, inesthétiques ou de mauvaise qualité. De ce fait, l’engouement n’étant pas le même pour tous les clubs, il convient de s’y intéresser. Nous avons recueilli des informations concernant leur distribution ainsi que l’envergure et le type de gamme. 1. Produits dérivés importants (gamme pas uniquement sportive) La première catégorie est composée de clubs ayant une large gamme de produits dérivés. Leur diversification est si importante qu’aujourd’hui, il est question d’une véritable marque. Ce phénomène va de pair avec la notoriété du club, elle-même dépendante de la notoriété de la discipline sportive. Ainsi, ces « marques de club » sont surtout présentes dans les disciplines sportives les plus exposées médiatiquement et les plus populaires. 5 clubs de rugby et 2 clubs de football apparaissent dans cette catégorie (C1, C3, C13, C22, C23, C26 et C27). Ils possèdent pour la plupart 2 boutiques, dont souvent l’une est ouverte en permanence, l’autre le soir des matchs, une boutique en ligne ou encore de 285 multiples points de ventes souvent régionaux sous forme de « corners » en grandes surfaces spécialisées (GSS) ou grandes et moyennes surfaces (GMS). 5 d’entre eux disposent soit d’un restaurant soit d’une brasserie. Pour le club C13, il est question de développer encore la marque hors du champ de son activité sportive. Selon lui, cet objectif passe par des résultats sportifs et la formation de ses joueurs. L’établissement d’une marque de ce type entre dans sa stratégie de projet, la marque renforce la structure. L’achat massif du maillot du club est une forme de reconnaissance. Deux boutiques sont mises à disposition: une au stade et une autre au centre ville. Le club a créé une ligne de vêtements avec le concours d’une marque bien connue dans le sport. Le club C27 a fondé une collection de vêtements avec un équipementier mondialement connu ; il possède deux boutiques, une au stade de 150m² et une autre de près de 600m² au centre ville, ainsi qu’une brasserie sur le lieu des rencontres. Il vend aussi par le canal de son site internet. Il compte près de 2000 références. Le club C23 ne dégage pas un grand intérêt pour les produits dérivés mais sa structure, ses résultats sportifs et sa notoriété l’amènent à disposer d’une gamme suffisamment importante pour faire état d’une marque. Néanmoins, ses recettes ne constituent que 2% du chiffre d’affaires. Le club a choisi de sous- traiter cette activité. Il possède une boutique et un restaurant fournissant des redevances (« royalties »). Le club C22 dispose d’une boutique au stade de 200 mètres carrés et une autre au centre-ville de 100 mètres carrés. D’abord cédées sous le statut du franchisage (avec le paiement de royalties), le club gère dorénavant ses deux boutiques et il projette d’en ouvrir une autre de 300 mètres carrés dans la mesure où le club a atteint un chiffre d’affaires 4 à 5 fois supérieur à ce qu’il attendait et que la part des produits dérivés explique aujourd’hui près de 30% de ses ressources globales. Le club a développé un lien identitaire fort au sein de sa région. Il projette aussi de mettre en place la vente en ligne. Il compte près de 200 références et détient enfin une brasserie au stade. Le club C1 a créé sa propre marque, qu’il décline sous des formes autres que sportives, notamment sur les produits de grande consommation (café, vin, textile…). Il possède en outre une brasserie et vend à l’international, ce qui constitue cependant une faible part de son chiffre d’affaires. Il a l’ambition d’atteindre près de 10% de son chiffre d’affaires par la vente des produits 286 dérivés. Il dispose d’une boutique en ligne et de nombreux points de ventes dans et autour de la localité, sous formes de « corners » dans des GSS et GMS. Le club C3 a concédé à une marque connue nationalement, mais surtout régionalement, le droit de créer des produits à l’effigie du club. La marque a développé une ligne « ville » au-delà de la ligne sportive. La distribution s’effectue par des « corners » dans des GMS et GSS, par une boutique au centre ville et en ligne sur le site Internet. Il possède aussi une brasserie. Son équipementier va développer une ligne sport avec une réplique du maillot sur l’ensemble du territoire. Le club C26 possède deux magasins, l’un ouvert en permanence, l’autre les jours de matchs au stade. Il dispose aussi d’une boutique sur Internet. La venue de stars du rugby en son sein a permis de multiplier les ventes de produits dérivés. Il a développé une gamme avec un équipementier mondialement reconnu. Il compte cependant devenir une marque solide qui dépasse le stade « d’équipementier associé à un stade » à celle d’une « marque à part entière » compte tenu de son aura dans le rugby, et cela malgré des résultats sportifs insuffisants depuis quelques années. Il n’évolue d’ailleurs plus à ce jour dans les hautes sphères de la discipline. Il possède désormais un restaurant.

2. Divers produits dérivés ne constituant pas une marque La deuxième catégorie de clubs est composée de clubs ayant une gamme importante de produits dérivés, à la fois sportive et non-sportive, sans pour autant que l’ensemble constitue une marque. Leurs produits sont essentiellement liés à leur discipline sportive et vendus localement en majorité. Cette catégorie comprend 4 clubs de rugby, 1 club de football et 1 club de basket-ball. Chacun essaye de tirer des ressources de cette activité, mais elle ne constitue pas un secteur très important au niveau du chiffre d’affaires. L’un d’eux, C15, possède deux boutiques (une permanente et une au stade le soir des matchs) et une marque qu’il a créée, deux autres (C5 et C19) ont une seule boutique ouverte en permanence, C5 laissant d’ailleurs la responsabilité de la vente à un groupe spécialisé en échange de royalties. C10 (en collaboration avec un équipementier connu) et C14 ont une boutique qui ne fonctionne que les soirs de matchs. Enfin, C11 n’a pas encore de boutique « sédentaire », mais il dispose des stands pendant les matchs. 287

Certains clubs, C5, C10 et C14, utilisent aussi des « corners » dans les GMS et GSS de proximité. Tous vendent par correspondance et même, pour C5, C10, C11 et C15, directement en ligne. Enfin, C5 et C11 possèdent une brasserie. C11 constitue un cas particulier pour lequel il convient de préciser certains éléments. Le club, au moment où nous l’avons rencontré, avait déposé le bilan depuis un an, l’empêchant d’exploiter le nom du club pour vendre ses produits dérivés. Cependant, l’expérience du plus haut niveau leur permettait de rebondir rapidement en cas de remontée. Le club a d’ailleurs été promu, ce qui lui permet d’être aujourd’hui classé dans cette catégorie avec le développement d’une gamme importante de produits dérivés. Ses structures dans ce secteur sont en pleine reconstruction.

3. Produits dérivés sportifs importants Cette catégorie est constituée de 3 clubs, à savoir 2 clubs de handball et 1 club de basket-ball. La gamme de leurs produits dérivés est large, mais exclusivement sportive. Ils sortent petit à petit des produits dérivés sportifs et proposent une gamme plus diversifiée, avec plusieurs canaux de distribution. C7 et C21 utilisent la vente en ligne sur leur site Internet, alors que C18 projette de le faire rapidement en raison du succès de ses produits. Ce succès est dû à une stratégie de « co-branding » avec un équipementier très connu, mais aussi au changement récent de logo et de charte graphique. Le club est passé d’un « logo institutionnel » à un logo commercial. Il est dans une démarche de création de gamme, même si ses produits ne s’expriment que dans le secteur du sport. Deux d’entre eux (C7 et C21) ont une boutique permanente en centre-ville et une boutique le soir des matchs. C7 possède aussi des « corners » au sein en GSS et son équipementier reconnu dans le monde sportif lui permet de référencer le « répliqua » de leur maillot dans 6 magasins en France. Il développe parallèlement une gamme de plus en plus complète de vêtements de sport. C21 a une gamme plus que sportive désormais, mais la vente de produits dérivés ne constitue pas encore une activité importante. Il détient aussi un restaurant.

4. Produits dérivés très peu développés Une dernière catégorie se dégage avec 12 clubs dont 3 clubs de basket- ball, 3 clubs de handball, 1 club de rugby et les 5 clubs de hockey sur glace. Chacun d’eux a développé une gamme de produits dérivés, mais ces productions 288

n’ont que très peu d’importance sur leur chiffre d’affaires. En outre, elles sont marginales et uniquement sportives. 1 seul club, C4, dispose d’une boutique permanente mais sa création est récente. Pour le club, c’est une innovation importante. La vente de produits dérivés du club ne se fait cependant qu'à la boutique, bien qu’il existe une ambition de créer une gamme plus que sportive, notamment dans le secteur de l’enfant. Deux autres clubs, C8 et C9, vendent leurs produits directement au siège, mais ils ne possèdent pas de boutique à proprement parler. Huit clubs (C2, C9, C12, C16, C17, C24, C25 et C28) vendent la majorité de leurs produits dérivés dans un « corner » ou une boutique à l’intérieur de leur structure sportive le soir des matchs. C9 se différencie quelque peu puisque les corners ne sont installés que lors des matchs importants. C24, C12 et C16 vendent aussi par le biais de leur site Internet. Ils s’appuient sur un réseau de GSS locales par l’intermédiaire de « corners », ce qui est aussi le cas de C17. Pour la majorité d’entre eux, cette activité représente peu dans les recettes, mais, pour d’autres, elle est en plein développement. Ainsi, C12 ayant plus que doublé ses ventes par rapport à ses prévisions, souhaite développer son activité, mais sa clientèle ne lui permet guère de vendre des produits autres que ceux liés au domaine sportif, ce qui l’a conduit à réduire sa gamme en faveur des produits hautement rentables. Un changement de logo a fait partie de sa stratégie. Il possède, en outre, un bar dans son enceinte, ce qu’il considère comme une « révolution ». Enfin, deux clubs ont cessé l’activité des produits dérivés, l’un, C6, parce que la gestion de cette activité était floue et litigieuse, l’autre, C20, parce qu’il n’en vend pas. Néanmoins, le premier compte développer cette activité une fois que celle-ci sera mieux structurée et encadrée. Enfin, C16 vient récemment d’ouvrir une brasserie.

Tableau N°27 - Récapitulatif des types de produits dérivés par clubs

Produits dérivés C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Marque X X X X X X X Importants et X X X X X X diversifié Sportifs et X X X importants Peu importants X X X X X X X X X X X X

2.1.2.3. La communication La communication d’un club, véritable acteur public, est très importante. Néanmoins, la notoriété des clubs peut être bien différente. La communication 289 permet de renseigner sur le club et de se créer une réputation, mais elle dépend aussi de la notoriété. Autrement dit, la communication des clubs ne se maîtrise pas entièrement. La puissance communicative peut dépendre des résultats sportifs du club, de sa valeur identitaire, mais aussi de la discipline sportive elle-même. Certaines disciplines sportives rencontrent un franc succès auprès des populations au détriment d’autres sports souvent délaissés. L’instrument le plus significatif est la télévision puisqu’elle peut toucher une masse importante de téléspectateurs. Néanmoins, toutes les disciplines n’ont pas la possibilité d’être diffusées. Certaines trouvent le moyen d’être diffusées par les chaînes satellites, locales ou à thèmes. Les deux grandes disciplines diffusés sont le football et le rugby412. Les trois autres sports trouvent des créneaux de temps à autre entre les chaînes locales, à thèmes, ou les journaux sportifs télévisés, mais ils sont très rarement présentées sur les chaînes nationales. Il est arrivé que certaines disciplines soient diffusées sur le réseau national par l’intermédiaire de leur équipe de France lors de compétitions internationales (Jeux Olympiques, Championnats du monde ou Championnats d’Europe) ou grâce aux performances exceptionnelles d’une équipe ayant obtenu des résultats sportifs en compétition internationale. Cependant, la comparaison avec les retransmissions du football, mais aussi du rugby, leur est très défavorable en France. Ainsi, pour communiquer tous les clubs n’ont pas les mêmes possibilités et les finances sont bien différentes. Il convient de s’interroger sur la palette de communication des clubs sportifs. 1. La première catégorie englobent les clubs ayant la possibilité d’être diffusés à la télévision sur un réseau national. Ainsi, les clubs de football et les clubs de rugby de haut niveau sont les seuls à pouvoir prétendre à ce type de médiatisation sur la durée. Il convient cependant de relativiser cette première analyse, puisque certains clubs, au regard de leur notoriété ou de leurs résultats sportifs, n’ont pas la priorité sur les « directs » ou les rediffusions413.

412 Les « droits TV » ont fait suffisamment parler d’eux concernant le football et les 600 millions d’euros par saison de la chaîne CANAL+. La chaîne a acheté les droits de retransmissions du football mais aussi les droits de retransmission du Championnat de France de Rugby pour compléter son offre. France 2 diffuse au moins un match d’une équipe française à chaque journée de la coupe d’Europe ainsi que l’Equipe de France lors du tournoi des six nations. La Pro D2 profite de cet engouement puisque France 3 grâce à ses antennes régionales, diffuse les chocs régionaux. C’était le cas pour le match Béziers-RCT pour les régions PACA et le Languedoc- Roussillon. Enfin, TF1 a acquis l’exclusivité des droits TV de la coupe du monde 2007. 413 La chaîne de télévision choisit les matchs qu’elle compte diffuser. Ainsi, pendant la saison 2006-2007 au soir de la vingtième journée, l'Olympique de Marseille (OM) avait connu 16 retransmissions, l'Olympique Lyonnais 14 (OL), le Racing club de Lens 11 (RCL), Le Lille Olympique Sporting Club (LOSC) 9, le Paris Saint-Germain (PSG) ne compte que 6 diffusions (en raison certainement de ses résultats sportifs à la peine) et le Football Club Sochaux-Monbéliard (FC Sochaux) avec 4 diffusions. 290

Par contre, nombre d’entre eux ont la possibilité d’être vus à la télévision régulièrement lors d’émissions consacrées au championnat de la discipline. Avant d’obtenir ce type de médiatisation, l’ensemble de ces clubs disposait d’une palette large d’instruments de communication : radios, presse (régionale et nationale, pour certains, internationale), site Internet ou presse électronique. Certains clubs (notamment de football) de notre échantillon ont pu participer aux compétitions européennes leur permettant aussi d’obtenir d’autres recettes conséquentes. Au sein de cette catégorie, nous pouvons inscrire C1, C3, C5, C10, C11, C13, C15, C19, C22, C23, C26 et C27. Néanmoins, certains clubs comme C10, C11, C15, C19 et C26 disent cibler leur communication exclusivement au niveau régional, compte tenu du fait qu’il ne font pas partie de la division élite ou de l’insuffisance de leur aura au plan national. C10 compte beaucoup sur son Site Internet et sur son magazine, C15 insiste sur le relationnel avant tout, alors que C11 et C19 utilisent plutôt la presse régionale. C26 dispose, quant à lui, d’une aura considérable qui lui permet quotidiennement de faire « la une » dans les médias locaux. Ensuite, compte tenu des résultats sportifs depuis quelques années, 5 clubs (C5, C13, C22, C23 et C27) peuvent prétendre être choisis en priorité concernant les diffusions. C13, dans le cadre des accords entre sa Ligue et les clubs de la discipline, a la possibilité de voir diffuser ses matchs en différé. Le club s’est associé à une chaîne de télévision locale pour proposer à ses supporters la rediffusion des rencontres, via le câble ou Internet. C5, C22 et C27 disent ne pas avoir encore une notoriété télévisuelle suffisante, mais ils avancent petit à petit dans cette voie. Ils sont très présents dans la presse nationale. Enfin, C1 et C3 sont diffusés en raison de leur notoriété dans leur discipline, notamment en raison de leur histoire et leur régularité au plus haut niveau.

2. La deuxième famille est constituée de clubs dont les rencontres sportives sont parfois télévisées sur des chaînes spécialisées du satellite. Ils sont cependant reconnus d’abord parce que leur discipline sportive développe un intérêt populaire croissant, ensuite, parce qu’ils sont les « têtes de pont » de celle-ci. De ce fait, lorsqu’il est question de leur championnat, ces équipes sont souvent mises en avant par les médias régionaux et nationaux, 291

notamment la presse et Internet. Deux disciplines sportives, le handball et le basket-ball, entrent dans cette catégorie. Cette famille de clubs rassemble C7, C14, C16 et C21. C14 a connu des préoccupations concernant son public au regard de ses choix stratégiques. Une partie de ses spectateurs a eu du mal à accepter son passage à la professionnalisation. Il n’empêche qu’aujourd’hui ses résultats antérieurs et son aura lui ont permis de remonter dans les cœurs de ses supporters au regard de son taux de remplissage. C21, compte tenu de sa régularité en termes de résultats sportifs depuis quelques années et de son aura (notamment en raison de son président de toujours), se découvre un petite notoriété visuelle. C16 estime qu’il est encore rare d’être diffusé, mais ses résultats sportifs font de lui le club le plus médiatisé et reconnu dans sa discipline. Enfin, C7 considère que sa discipline sportive n’est pas très médiatique, mais que le club jouit malgré tout d’un bon suivi localement, tant télévisuellement que par la presse ou les radios.

3. Une troisième série se dégage avec les clubs dont la notoriété n’est pas encore avérée ou qui évoluent dans une discipline peu médiatisée. Du fait de leur participation au haut-niveau, tous ces clubs sont connus médiatiquement et sont suivis par les habitants de la localité. Ils fonctionnent avec une communication formalisée et ils utilisent une palette aussi large que possible : les panneaux d’affichage, les radios et la presse locale, régionale et quelquefois nationale, le site Internet, le bouche-à-oreille, un magazine, etc. Tout est bon pour se faire connaître. Les diffusions à la télévision sont rares. Nous retrouvons 3 clubs de basket-ball, 3 clubs de handball, 3 clubs de hockey sur glace : C2, C4, C8, C9, C12, C18, C20, C24 et C25. C9 et C20 sont parmi les clubs les plus médiatisés et ils font partie des clubs qui se sont maintenus au plus haut niveau de leur discipline. L’un d’eux (C20) prétend avoir été diffusé 18 fois sur une chaîne sportive européenne câblée reconnue. C2, C12 et C25 évoluent dans une discipline peu médiatisée, même si elle prend de l’importance. Néanmoins, étant considérés comme les représentants de leur discipline au regard de leur histoire et de leurs résultats sportifs, il est souvent question d’un des trois clubs lorsqu’il est question de la discipline. Pour C12, la communication est importante localement puisqu’il a souvent été le seul club à avoir évolué au plus haut niveau au sein de sa localité au regard des cinq disciplines sur 292

lesquelles notre étude se focalise. Il compte une vingtaine de supports alors qu’il n’en avait que deux il y a quelques années. Son site Internet est le moyen de communication le plus important et compte 30 000 visiteurs/mois. Les matchs du club sont même diffusés sur la chaîne locale. Sa nouvelle enceinte a joué un rôle essentiel dans cette communication. Enfin C24, possède le quatorzième budget de sa discipline et ses résultats sportifs n’étaient pas extraordinaires. Il n’empêche que la saison 2006-2007 leur permet de connaître une notoriété tant au niveau national que régional. Le club est de plus le seul club de haut niveau de sa région.

4. Enfin, le quatrième groupe réunit les clubs (C6, C17 et C28) possédant un système de communication peu formalisé, dans une discipline peu médiatisée. Leur histoire sportive ne leur permet pas d’avoir une réputation suffisante. Néanmoins, C17 est en haut de tableau cette saison et il commence à se faire un nom. Il est de plus en plus médiatisé notamment dans sa région. Il fait figure de « Petit Poucet » qui défie les grands clubs.

Tableau N°28 - Récapitulatif de la communication par clubs

Communication C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 TV réseau national X X X X X X X X X X X X TV pas réseau X X X X national Complète et X X X X X X X X X formalisée Peu formalisé X X X

2.1.2.4. Le marché La médiatisation et les mécanismes de communication mis en place permettent au club de s’approprier un marché. Lorsque nous parlons de marché, il est question des ventes de billets, de produits dérivés, de la médiatisation. Les disciplines sportives sont loin de partager l’ensemble de la médiatisation et, notamment, les heures de diffusion. En France, le football est roi. Médiatiquement, il est encore loin devant le rugby, lui-même suivi par le basket-ball, puis le handball et, enfin, le hockey sur glace. Les clubs de basket- ball, de handball ou, pire, de hockey sur glace ne sont pas facilement identifiables du grand public. Cependant, une population d’initiés à la discipline connaît les clubs phares. À cela ajoutons que les différentes cultures européennes existantes conduisent à développer de forts déséquilibres dans le soutien des disciplines sportives. Ainsi, si le hockey sur glace ne connaît pas une 293 forte notoriété en France, cette discipline est très importante dans des pays comme la Suisse, la Finlande, la Suède, la Russie, l’Allemagne, sans parler de la Ligue américaine mondialement connue avec la NHL (laquelle est de plus en plus médiatisée par Canal +). Si les clubs participent aux ligues européennes, ils sont parfois reconnus au-delà de nos frontières et peu reconnus en France. Le rugby en est un bon exemple. Il convient donc de différencier le public initié du public non-initié.

Public non-initié

1. La première catégorie compte peu de clubs dans la mesure où ils font partie uniquement d’une voire deux disciplines : le football et le rugby. Trois clubs se dégagent : C13, C23 et C27. Ils ont tous connu les ligues européennes et leurs résultats les ont élevés au rang de clubs vedettes en France. C27 est aussi une pointure au niveau européen et C13 commence à se faire connaître à cette échelle. Leur notoriété est nationale et même internationale.

2. La deuxième catégorie de clubs est composée de clubs à notoriété surtout régionale, voire nationale. C1, C3, C5, C10, C11, C14, C16, C21, C22 et C26 composent cette catégorie. 6 sont des clubs de rugby. 2 n’évoluent pas dans le Top 14 mais leur historique leur permet de conserver une certaine notoriété. Deux clubs de basket-ball sont incontournables dans leurs disciplines, notamment en raison de participation régulière aux ligues européennes et à leurs nombreux titres. Un club de football a réussi depuis quelques années à se maintenir dans la ligue professionnelle, mais son pauvre historique sportif ne lui permet pas d’avoir une forte notoriété et un fort soutien populaire. Enfin, un club de handball est reconnu pour ses résultats extraordinaires en championnat de France, mais aussi en ligue européenne. Il est d’ailleurs la « figure de proue » de sa discipline en France.

3. Le troisième groupe comprend des clubs à forte notoriété locale, voire régionale. Ils sont reconnus au sein de la ville. Certains d’entre eux (C4, C7, C15, C19 et C24) connaissent un soutien considérable. C25 malgré sa faible exposition et une concurrence de clubs à bon niveau évoluant dans d’autres disciplines dans sa ville est connu pour ses résultats sportifs depuis de nombreuses années. C12 se voit dorénavant concurrencé par deux clubs 294

professionnels, même si ces derniers ne sont pas encore dans la plus haute division.

4. Les clubs connus au seul niveau local. Ces clubs subissent un manque certain de médiatisation de la discipline (C2, C8, C9, C17, C18, C20 et C28), ou des résultats sportifs insuffisants (C6, C8, C18, C28) ou une concurrence accrue d’autres clubs sur le même territoire (C2, C8, C9, C20). Il peut s’agir aussi du niveau de compétition comme C6 qui n’évolue pas en ligue professionnelle.

Tableau N°29 - Récapitulatif de la notoriété envers le public non-initié par clubs

Public non-initié C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 National voire X X X international Régional voire X X X X X X X X X X national Locale voire X X X X X X X régional local X X X X X X X X

Public initié

Dans la mesure où près de 85% des clubs de notre échantillon évoluent dans la division reine et 3 des 5 clubs ne faisant pas partie de cette division sont des clubs professionnels de football et de rugby, autrement dit des disciplines médiatisées, le « public initié à la discipline » connaît a fortiori l’ensemble des clubs. Nous y ajoutons aussi sous ce terme, le « public initié au sport » et non à la seule discipline, de manière à mieux identifier les déséquilibres. 1. Une première catégorie concerne les clubs de disciplines médiatisées auxquelles tout public sportif ne peut échapper mais aussi de clubs aux résultats sportifs marquants de disciplines moins médiatisées. Ils sont tous connus nationalement, voire internationalement. Nous retrouvons 4 clubs de rugby, 2 clubs de football mais aussi deux clubs basket-ball et 3 de handball : C5, C7, C13, C14, C16, C20, C21, C22, C23, C26 et C27. De cette liste, seul C26 n’est pas dans la division reine, mais son histoire, son stade, ses recrutements faramineux414 ainsi que les personnalités qui le dirigent font de lui un club à forte notoriété. C20 jouit de la notoriété de sa ville et de la régularité de ses bons résultats sportifs. Le nom du club omnisports dont il

414 Le club a recruté l’un des meilleurs joueurs du monde alors qu’il n’évolue pas dans la division reine. 295

faisait partie auparavant lui a permis aussi de développer une notoriété, grâce notamment au prestige du club de football. Tous ces clubs ont développé une aura qui leur permet de toucher un marché des plus larges.

2. Les clubs connus régionalement, mais aussi nationalement, n’ont parfois qu’un marché régional. Quatre clubs de rugby en font partie, ainsi qu’un club de football. La notoriété de leur discipline leur permet d’être médiatisé, ce qui est le cas de C10 dont les résultats ne sont pas suffisants pour être reconnu nationalement. C1 profite aussi de la médiatisation, mais aussi et surtout de ses résultats sportifs réguliers et sa longévité au plus haut niveau. Néanmoins son marché est aujourd’hui exclusivement régional dans la mesure où le club subsiste à l’ombre d’autres grands clubs. C3 et C11 bénéficient de l’engouement qui règne autour d’eux malgré des résultats sportifs moyens, mais aussi de leur ancienneté dans leur parcours sportif. C11 retrouve un peu de ses « ors » passés, mais son passage au niveau inférieur et son dépôt de bilan lui ont porté préjudice. C3 a mal anticipé le virage du professionnalisme et son retour à l’élite est resté douloureux, avec un soutien national très réduit. Il en est de même pour C15 qui vit à l’ombre d’un club important de la discipline et au sein d’un tissu économique peu propice.

3. Le troisième groupe comprend des clubs à audience locale, mais à vocation régionale ou nationale. Certains clubs jouissent de leur présence dans les compétitions de haut niveau (C2, C8, C9, C12, C18, C19, C24 et C25) ou d’un tissu économique favorable (C2, C8, C12, C18 et C25). C19 a un marché plutôt local compte tenu de son tissu économique et C2, C12 et C25 peinent en raison de leur manque de médiatisation, même si leurs résultats sportifs permettent de toucher un public large régionalement.

4. Enfin, une quatrième famille se dégage, celle des clubs (C4, C6, C17 et C28) qui n’ont qu’un marché local compte tenu de leurs résultats sportifs, de leur historique et de la médiatisation de leur discipline. C6 peut appartenir à cette catégorie puisque ses résultats sportifs et la division dans laquelle il évolue ne lui permettent pas de toucher un public important.

296

Tableau N°30 - Récapitulatif de la notoriété envers le public initié par clubs

Public initié C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 National voire X X X X X X X X X X X international Régional voire X X X X X national Local voire X X X X X X X X régional et même national Marché local X X X X

2.1.2.5. Le partenariat La médiatisation est un travail de longue haleine. Elle est fonction de la discipline sportive, mais aussi des résultats sportifs du club. L’intérêt d’une population pour un club permet à celui-ci de développer des richesses relatives à la billetterie par la présence d’un public lors des rencontres sportives, mais aussi par la vente de produits à l’effigie du club. Elle favorise aussi l’obtention de soutiens financiers, notamment lors de l’ouverture du capital lorsque le club est constitué en société. Elle permet au club de devenir un véritable vecteur de communication. Précédemment, nous avons pris en compte la mise à disposition d’installations relatives aux relations publiques comme un élément de structuration significatif pour un club. Obtenir la possibilité de développer une telle activité démontre à la fois un certain intérêt pour le club, mais aussi un développement structurel avancé. De nombreux clubs tentent de développer cette activité dans la mesure où elle peut constituer la source d’une manne financière importante. Conquérir des partenaires est depuis toujours une occupation prioritaire pour les clubs sportifs, car elle est souvent synonyme de survie. La réussite de cette action est fonction de l’aura ou de la médiatisation du club, avec une forte disparité de demande selon les clubs. Certaines disciplines sportives n’ont d’autres solutions que d’accepter toutes les propositions, tandis que d’autres peuvent se permettre de choisir. La puissance financière des partenaires est aussi hétérogène, passant d’un niveau de petit commerce local à celui de firme multinationale. 1. Les clubs sportifs ayant un partenariat dense, diversifié et de prestige comptent à la fois sur les entreprises locales, mais aussi sur des partenaires d’envergure nationale, voire internationale. Neuf clubs de notre échantillon appartiennent à cette catégorie (C1, C3, C5, C10, C13, C22, C23, C26 et C27). C13 considère que les collectivités locales doivent investir 297

principalement dans le partenariat. C1 souhaite conserver son autonomie avec le choix d’une densité importante de commanditaires, qui va de pair avec la nature de son tissu économique territorial. C3 compte plus de 400 partenaires et une stratégie orientée autour du partenariat. C26 est un club au soutien populaire et à la fidélité partenariale et subventionnelle insolite malgré ses résultats sportifs insuffisants. Enfin, C5 et C10, soutenus tous les deux par un gros sponsor, comptent de nombreux partenariats complémentaires. C5 jouit, en effet, d’un soutien local très important et C10 bénéficie de la forte médiatisation de la discipline sportive.

2. La deuxième famille comprend des clubs en lien avec de nombreux sponsors, souvent régionaux bien que quelquefois nationaux. C15 et C11 obtiennent respectivement près de 75 % et de 50 % de leur budget grâce aux partenariats et ils ont un commanditaire privé de grande importance. Enfin, C14, C16 et C21 jouissent de leur notoriété dans leurs disciplines respectives pour attirer nombre d’entreprises partenaires dans leurs projets de développement (250 partenaires par exemple pour C14, 45% du budget pour C21). La majorité de leurs partenaires sont régionaux, mais certains à l’envergure plus importante ont beaucoup misé sur eux. L’un d’entre eux s’est même lancé dans une stratégie de co-branding (C14).

3. Le troisième groupe de clubs ayant une notoriété fondée sur leur participation à des compétitions de haut niveau (C4, C8, C18, C19 et C24), sur leurs résultats sportifs (C2, C7, C12 et C25) ou encore sur la médiatisation importante de leur discipline (C19) sont soutenus par de nombreux sponsors, mais essentiellement locaux. C19 compte 200 partenaires et il revendique une réelle dynamique avec sa localité. Nombre des présidents ou dirigeants concernés sont des grands noms de la réussite économique de la localité et, de ce fait, le club se prévaut de vivre sur de vrais revenus plutôt que sur des subsides ou à crédit. C24 est en lien avec plus de 75 partenaires (qui ont créé une forte convivialité au sein du club-entreprise) dont trois gros partenaires de bonne renommée. C4 (soutenu aussi par un gros sponsor) et C8 ont rassemblé plus de 150 partenaires et la grande majorité est de la région. C7 souhaite développer une politique de partenariat qui a déjà une grande importance dans son budget, en multipliant ses partenaires mais aussi 298

en intensifiant ses relations avec deux gros partenaires. C12 et C18 comptent plus d’une cinquantaine de sponsors pour la plupart locaux. Le sponsoring de C18 s’élève à 25% du chiffre d’affaires, ce qui, pour la discipline, est une bonne performance. Quant à C18, il a la volonté de se lancer dans une stratégie de co-branding avec une marque sportive de renommée mondiale. Enfin, deux clubs (C2 et C25) s’ajoutent à cette catégorie. C2 a lui aussi de bonnes performances pour la discipline en matière de sponsoring, grâce notamment à la participation d’un sponsor de taille régionale important.

4. Enfin, d’autres clubs n’ont pas tous les mêmes possibilités au regard de leur tissu économique, de la notoriété de leur discipline ou de leur niveau de compétition. C17 ne dispose que d’une quinzaine de sponsors et C28 une dizaine. Ils jouissent, cependant, de l’image de leur ville, deux destinations touristiques, dont l’une est très réputée. Leurs partenaires sont souvent issus de la localité. C17 développe 50% de son budget en partenariat, ce qui est singulier au regard de ses homologues dans la discipline. C28 évoluant dans la même discipline atteint tout de même 30%. C9 connaît des difficultés dans la recherche de partenaires dans la mesure où sa discipline n’est pas beaucoup médiatisée, mais aussi parce qu’il est entouré de nombreux clubs plus glorieux et plus célèbres. Il dispose tout de même d’une vingtaine de sponsors locaux essentiellement, mais leur nom est connu au niveau national. Le niveau de compétition de C6 ne lui permet pas de développer une notoriété importante, mais la popularité de sa discipline lui a permis d’atteindre en partenariat 40% de son budget. La priorité de son projet est de développer cette activité. Enfin, C20 est très singulier puisque ses partenaires se résument à un gros sponsor principal et l’apport des collectivités qui, à eux deux, financent plus des deux-tiers du budget du club.

Tableau N°31 - Récapitulatif de la composition du partenariat par clubs

Partenariat C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Dense, diversifié X X X X X X X X X et de prestige Dense, régional X X X X X voire national Important et local X X X X X X X X X Local et minime X X X X X

Ainsi s’achève la deuxième étape de notre étude. Nous avons repris l’ensemble des 20 caractéristiques représentatives pour déterminer le niveau 299 de développement d’un club sportif. Nous avons situé les 28 clubs de notre échantillon par rapport à chacune d’entre elles de manière à identifier les diverses formes qu’elles pouvaient revêtir. Nous avons exprimé, dans une certaine mesure, par ordre décroissant leurs différents degrés de développement en classifiant les clubs par catégorie. Du fait des autocorrélations, il a semblé parfois que les critères se répétaient et l’ensemble de la lecture peut paraître fastidieuse. Pour synthétiser l’ensemble de nos résultats, nous avons donc construits des tableaux pour chaque indicateur. Un tableau général reprend l’ensemble des caractéristiques des clubs (Tableau n°32 ). Avant de mettre en relation ces caractéristiques les unes avec les autres pour construire nos niveaux de développement, il convient désormais de comprendre la manière dont les caractéristiques ont évolué pour chacun des clubs. Il s’agit d’expliquer pour chaque caractéristique comment ces clubs sont passés d’un niveau de développement à l’autre. Nous allons nous intéresser désormais aux successions de phases.

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Tableau N° 32 - Récapitulatif complet par club

C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 1 à 4 bénévoles X X 3 à 6 salariés X X X X X X X X X X X X X X Dirigeants 10 salariés 8-10 salariés X X X X X X X X + de 10 salariés X X X X commun X X Rang élevé X X X supérieur X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X X Budget 17 à 38 millions X X X d’euros 5 et 10 millions X X X X X X X X d’euros 3.5 et 4.5 millions X X X d’euros 1.2 et 2.3 millions X X X X X X X X X X X X d’euros Moins d’1 million X X d’euros Répartition Droits TV X X X ressources Partenariat puis X X X billetterie puis subventions Partenariat puis X X X X X X subventions et billetterie Partenariat puis X X X X X subventions Subventions et X X X partenariat Subventions X X X X X X X X Priorité de Pérennité de la X X X X X X gestion marque Transformation du X X X X X X X X spectacle en lieu de vie Poursuite de X X X X X X X X X X profession nalisation Recherche X X X X structuration et profession nalisation Organisation Personnel permanent X X X exclusivement Personnel important X X X X X X X X X et disparate Personnel X X X X X X professionnel réduit Personnel X X X X X professionnel et amateur Amateur bénévole X X X X X Fonction- Structure X X X X X X X X X X nement décentralisée par unités de travail, avec recherche de coordination. structures X X X X X centralisées, postes structurels déterminés, mécanismes de coordination Structure centralisée, X X X X X X X X début de spécialisation dans la structure X administrative Structure informelle X X X X X et centralisée Gestion du Personnel sportif et X X X X X X X X X X X X personnel administratif professionnels différence entre X X X X X X X secteur sportif et secteur administratif salaires inégaux carde X X X X X X X X X joueurs amateurs, pluriactifs et semi- professionnels

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Suite tableau 32 :

C1 C2 C3 C4 C5 C6 C7 C8 C9 C10 C11 C12 C13 C14 C15 C16 C17 C18 C19 C20 C21 C22 C23 C24 C25 C26 C27 C28 Statut association X X X X X X X X SEMSL X X EURSL X SAOS X X X X SASP X X X X X X X X X X X X X Capital Actionnaire X X X X X X X X X X majoritaire privé Association X X X X X X X X majoritaire Municipalité X X importante Actionnaires X X X X diversifiés Pas d’actionnaire X X X X Rencontre Spectacle total X X X X X X X X X X sportive Spectacle en X X X transformation Spectacle sportif X X X X X X X X X X X X Compétition X X X sportive Billetterie Importante et large X X X X X Importante et X X X X X X X X X X X régionale Pas de réseaux X X X mais large Pas de réseau de X X X X X X X X X distribution Abonnements Important X X X X X X X X X X X X Important mais à X X X X X X X X X X X développer Faible X X X X X Formation Pilier stratégique X X X X X X X X X X X Important mais pas X X X X X X X X X X une priorité minime X X X X X X X Produits dérivés Marque X X X X X X X Importants et X X X X X X diversifié Sportifs et X X X importants Peu importants X X X X X X X X X X X X Communication TV réseau national X X X X X X X X X X X X TV pas réseau X X X X national Complète et X X X X X X X X X formalisée Peu formalisé X X X Public non-initié National voire X X X international Régional voire X X X X X X X X X X national Locale voire X X X X X X X régional local X X X X X X X X Public initié National voire X X X X X X X X X X X international Régional voire X X X X X national Local voire régional X X X X X X X X et même national local X X X X Partenariat Dense, diversifié et X X X X X X X X X de prestige Dense, régional X X X X X voire national Important et local X X X X X X X X X Local et minime X X X X X

2.2. Les successions de phases des clubs Pour chacune des caractéristiques, il s’agit de comprendre leur évolution. Nous devons déterminer les étapes par lesquelles elles sont passées avant de fixer définitivement les niveaux de développement. Il convient de faire l’historique des clubs sur la foi de la mémoire et des documents de nos interlocuteurs, pour identifier le développement des clubs sportifs. Cette procédure permet d’identifier dès le départ les étapes que chaque caractéristique 302 rencontre pour arriver au plus haut niveau de son propre développement. Dans ce contexte, nous faisons l’hypothèse selon laquelle les clubs les plus évolués sont des exemples pour tous les autres clubs en termes de management. Elle est sans doute discutable d’un point de vue éthique ou même sportif, elle est plausible sur le plan managérial. En effet, les clubs les mieux organisés et les plus riches appliquent les techniques modernes du management, ce qui suppose des compétences spécifiques, des délégations de pouvoir, des coordinations et une recherche constante de rentabilité. Nous analysons chaque club dans son ensemble, en partant du principe que les clubs de football de Ligue 1 tracent une voie que les autres clubs des disciplines sportives concurrentes souhaitent imiter, même si un niveau de développement comparable n’est pas encore à considérer dans un avenir proche. Néanmoins, les clubs auront la possibilité de se situer par rapport l’existant répertorié au sein d’autres clubs de notre société actuelle. La question est de savoir et de repérer l’évolution des caractéristiques dans les entreprises à niveaux de développement hétérogènes.

2.2.1. Historique des clubs de l’échantillon

De manière à identifier rapidement les évolutions des caractéristiques nous avons souhaité dresser un tableau synthétique et récapitulatif de l’historique de chaque club (Tableau N°33). Nous nous sommes intéressé particulièrement aux 20 dernières années autrement dit de 1990 à aujourd’hui, qui constitue une période faste de la marchandisation du sport.

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Tableau N°33 - Les historiques des clubs sportifs

Dates Avant 1990 91 92 93 94 95 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 clés C1 Création 1908 Coupe de Finaliste Proche du 1 DG Demi-finaliste Demi-finaliste Ouverture 2 titres France Europe dépôt de Europe France, du capital France Elite bilan Nouveau (200 en 82 et 88, président actionnaires) 3 finales C2 Création 1967 Déficit Changement Nouvelle Vice- champion Titre France Dépôt de Vice- Titre 1 DG 1982 financier de nom enceinte France Elite Elite bilan Champion France Elite accession Dépôt de Redressement France Elite Elite bilan judiciaire C3 Création 1904 Descente Nouveau SAOS Ouverture du Maintien au Ouverture 90 ans de Division président 1 DG + 2 capital Accession à plus haut du capital haut niveau 2 pro personnes Elite niveau 3 titres bons France, 4 résultats finales, 2 sportifs coupes de France C4 Création 1930 Relégation Accession Accession 1 Nouvelle Accession Ouverture 1 directeur SASP Vainqueur Division 4 Division 3 Division communication, enceinte Elite capital, sportif Division 3 en 2 Ligue 1 commercial, Création Livre Blanc 1976 Pro, Nouveau boutique de la 1 DG président discipline : projet de constitution d’une Superligue C5 Création 1906 Arrivée ½ finale Nouveau Coupe d’Europe SAOS ½ finale SASP avec Directeur Déficit ½ finale ½ finale DG France président (apparition France, actionnaire commercial financier, France France, (Budget salariés) finaliste majoritaire, Billetterie proche de la 1 directeur doublé) Europe, Boutique informatisée rétrogradation. sportif Responsable financier C6 Création 1942 Déficit Accession à Reprise des financier, Division au produits Changement dessus dérivés intégrale toujours équipe amateur administrative, Nouveau président

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Suite tableau N°33

Dates Avant 91 92 93 94 95 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 clés 1990 C7 Création Redevient Accession Nouveau Vice- Vice- Vice- Titre France SAOS Vice- Finaliste coupe Vice- 1983 un club Division président Champion Champion Champion Elite Vice- Champion France, Champion omnisports Elite 1 DAF, France Elite France Elite France Elite Champion France 1 responsable France 1 Création 1 France Elite, Elite, communication Elite, directeur centre de responsable Coupe de la ¼ finaliste 1 sportif formation centre de Ligue, Coupe responsable 1 1commercial formation Finaliste Europe, billetterie secrétaire Coupe 1 DG France C8 Accession à Accession 1 DAF SASP division 2 à Division pro, Elite, Club sort du 1 Club secrétaire omnisports comptable C9 Création SEMSL Déficit Vice- Coupe de Vice- 1 assistant 1964 financier Champion la Ligue, champion commercial 1984 de France Finale France Finale Coupe accession Elite, coupe de Ligue, Division 1, Coupe de France, Vice champion 1988 Titre France 1 DG (5 de France, France, salarié ¼ final Europe 1989 demi- dans le finaliste club) Europe, 1988 ½ finale Europe C10 SEMSL Projet Accession 1 Nouveau SASP 20 salariés Division nouvelle Division 2 responsable président Ouverture 4 : Fusion enceinte pro financier, 1 1 régie du capital 2 clubs 2 intendant publicitaire (12 Budget : commerciaux Création salariés) 1 million 1 comptable centre de €, (7 salariés) formation 4 salariés C11 Création ½ Vice- ½ finale ½ finale SAOS Relégation SASP Relégation Accession 1892 finale Champion France France actionnaire Division 2 Accession pour raisons Division 2 1 titre France de France majoritaire, pro Elite financières France Elite gros 1 entraîneur 1 DG dépôt bilan Elite, 1 fois sponsor Déficit 1 directeur Division 3 finaliste, financier sportif 1 Coupe de 1 assistante France, 3 commerciale, fois Billetterie finaliste informatisée 305

Suite tableau N°33

Dates Avant 1990 91 92 93 94 95 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 clés C12 Création 1963 Titre Coupe Titre Rétrogradation SAOS Nouvelle SASP 1 1 Coupe de 2 Titres France de France pour raisons Nouveau enceinte communication commercial la Ligue France Elite Elite France Elite financières président Titre France 2 salariés Division 3 1 DG C13 Création 1944 Déficit Relégation Ouverture SASP 3ème de Ouverture Nouvel Vice – 3ème de 5 Coupes de financier Division 2 capital Accession division capital, actionnaire Champion Division France Nouveau Division Elite, Nouveau majoritaire, France Elite 2 titres président Elite, Nouveau président Vainqueur champions de Nouveau président Coupe France Elite président Europe 1973 : SEM (Intertoto) 1978 : Remontée Division 1 C14 Création 1948 Création Vice- Vice- SAOS Vice- Vice- Titre SASP Demi- ¼ de 15 Titres SEM champion champion Vice-champion champion champion de France, Vice-champion finale finale France de de France, de France, de France, Coupe de de France, France France 8 finales, France ½ finale 1 régie France, Co-branding France, 1 comptable 4 Coupes de Europe commerciale ouverture avec une Ouverture 4 France, 2 capital, marque, capital. commerciaux finales Nouveau Chiffre Actionnaire président d’affaire majoritaire multiplié par 1 DAF 3 C15 Création 1903 Association à SAOS, ¼ finaliste SASP Création Accession 1 Titre France statut Accession Coupe Europe Relégation marque Division renforcés, Division Division 2 Elite Création Elite, pro, centre de Nouvelle Nouveau formation salle pour président, accueillir partenaires C16 Création 1982 Accession Titre Titre Titre France Titre Vice- Titre Titre Europe, Titre France Titre Titre Division France France Elite France champion de France Titre France Elite, France France Elite, Elite, Elite, Elite France Elite, Elite Elite, Coupe de Elite Elite, 1 DAF Finale 1/16 1 Coupe de Coupe de Coupe de France, Coupe de Coupe de petite finale secrétaire France, France, France 2 France, France Coupe Coupe 1 DG ¼ final ¼ final communicat. Coupe de EUSRL Europe Europe Coupe coupe SARL pour la Ligue, 1 Europe Europe comm entraîneur 1 1 comm. communicat. 1 marketing 306

Suite tableau N°33

C17 Création 1963 Accession Grand Accession Accession Site Accession EUSRL Division 4 Ecran Division 3 Division 2 Internet Elite 4 Arrivée d’un salariés DG dont 3 à bénévole mi- temps C18 Création 1960 Titre Titre Vice - Accession Nouveau 1 DG 1 2 titres France France France Champion Division président secrétaire 2 coupes de Elite Elite de France Elite France Elite, Coupe France Nouvelle enceinte, Dépôt de bilan Relégation en Division 2 C19 Création 1908 Nouveau 2 nouveaux Titre Accession SASP 1980 : années président présidents France Division 2 difficiles, et 2 Division 4 pro descente en 3ème nouveaux division vice- présidents C20 création 1941 SAOS Vice- Sort du Arrivée Vice- SASP Accession champion club d’un champion Finale Division de France omnisports mécène de France Coupe Elite Elite Finale important Elite, de Ligue Coupe de Finale France Coupe de Ligue, Création centre de formation C21 Création : 1931, Titre Vice- Demi- Titre Titre Titre Titre Vice- Titre Titre 1973 : Division France Champion finaliste France France France France Champion France France Elite, Elite France Coupe Elite Elite Elite Elite, France Elite, Elite, Déménagement Elite Europe Finale Elite, Coupe de Finale vers une ville Vice- Coupe de Coupe France Coupe plus grande, Champion France France France SEMLS France 2 titres France, 1 Elite finale Vainqueur Coupe Europe

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Suite tableau N°33

Dates Avant 91 92 93 94 95 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 clés 1990 C22 Création Coupe Vice- SAOS Nouveau ¼ finale SASP, Vice- Vice-champion ¼ final 1902 de champion de président, Europe Ouverture champion de France Europe, 6 Titres France France Elite ¼ finale du capital, d’Europe Elite, ½ final France, 6 Europe 1 DG 1 DAF Stade rénové France, finales, 2 boutiques 2 Coupes permanentes de France, 4 finales C23 Création Proche de Nouvel Nouveau ½ finale 1901, la actionnaire président, Coupe 2 coupes de relégation majoritaire, Nouvel France, France, Nouvel entraîneur, Nouveau 1982 entraîneur, 1 manager président accession Nouveau sportif Division président Elite

C24 Création Relégation SAOS Accession Création Billetterie 6 salariés 1954 Division 2 3 personnes Division système de informatisée Accession pro Elite commissions Division Elite 1989 C25 Titre Titre France Titre Titre Vice- Titre SAOS Titre Coupe France Coupe de France Elite France France Champion France Vice- France Victoires en France Elite Elite Elite France Elite Elite champion Elite poule Finale France, européenne petite Coupe Coupe France d’Europe 1DG C26 2 Titres Titre Création Déficit Sauvé de la SAOS Relégation Accession Relégation France Elite France boutique financier relégation sur pour raison Division Elite Division 2 2 coupes de Elite important tapis vert financière en pro, France Division 2 pro SASP, Nouvel actionnaire majoritaire

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Suite et fin tableau N°33

Dates Avant 1990 91 92 93 94 95 96 97 98 99 2000 01 02 03 04 05 06 clés C27 Création Comptabilité Coupe Titre Titre France Titre Titre France SAOS Titre France Titre Billetterie Titre Vice-champion Titre SASP 1907 Seul véritable de France Elite, Europe, Elite, Coupe de Elite, France informatisée Europe d’Europe Europe Création 1981 : 3 pole structuré France Elite Coupe de Titre Stade France Ouverture de Elite Nouvelle autre permanents France, France rénové 1 secrétariat, brasserie boutique, boutique Stade privé, 1 Fin du club Elite 1 DAF 1 comptable, Nouvelle salle Création du secrétaire omnisports. 1 service pour accueillir Centre de partenariat, partenaires formation, 1 service 10 titres billetterie France 5 Coupes de France C28 Création Vice- Vice- Titre Titre France D2 1931 Champion Champion France Accession Coupe de de France de France D2 D2 Division Elite France 1977 D2

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Pour reprendre l’historique des clubs, plusieurs critères significatifs ont été mis en exergue, principalement les résultats sportifs, l’embauche d’un personnel salarié, l’ouverture du capital, la création d’une boutique, le changement de statut et la nouvelle enceinte sportive. Lorsque le terme « Elite » est utilisé, il est question du niveau national le plus élevé de compétition. Le terme « Titre » désigne le fait d’être classé premier dans la compétition annuelle concernée. Le terme « Coupe » indique la victoire d’une compétition par élimination directe. « Europe » désigne les compétitions européennes. Cet historique permet de comprendre l’évolution de ces clubs, leurs victoires, leurs défaites, leur relégation. Il met en évidence les effets cliquets et l’importance de certaines caractéristiques dans le développement des clubs. Il sera utile aussi pour mettre en relation les évolutions des clubs sportifs avec leurs caractéristiques.

2.2.2. Les caractéristiques aux évolutions aléatoires : le niveau de compétition et le budget

Il est difficile de déterminer la « traçabilité » de certaines caractéristiques. Sur le critère de la taille, il est probablement inadéquat de considérer qu’un club a besoin d’embaucher un nombre déterminé de personnes à un moment donné de son développement. Par contre, il est possible d’observer que l’effectif grossit au fur et à mesure que le club atteint un niveau de compétition élevé, une notoriété élargie ou des relations de plus en plus fréquentes avec son environnement. De la même manière, le niveau de compétition d’un club n’évolue pas de manière déterministe. Néanmoins, un club appartenant au stade de développement managérial le plus développé évoluera avec certitude au plus haut niveau de sa discipline. Le club aura franchi l’ensemble des divisions pour atteindre la division suprême, sauf s’il a fait partie du premier championnat dès la création de la discipline. Cependant, l’évolution économique de son sport l’aura conduit à évoluer dans sa gestion quotidienne du fait de la concurrence avec les autres sports concernant les ressources disponibles auprès des médias ou des partenaires. Le budget évolue selon des paramètres qu’il est difficile a priori de maîtriser puisqu’il peut dépendre de l’environnement d’un club, de la promotion à la division supérieure, de la discipline sportive dans laquelle évolue le club ou de l’apparition d’un soutien financier impromptu. Il est impossible d’affirmer que, entre le stade 1 et le stade 2, un club passe d’un budget de X milliers d’euros à Y milliers d’euros. De manière générale, aucune tendance ne peut être émise, sauf 310 si le règlement de la Ligue fixe un chiffre d’affaires particulier pour accéder à l’élite professionnelle.

2.2.3. L’évolution de la gouvernance des clubs

Concernant les statuts, il est possible de montrer la progression « managériale » d’un club avec le passage du statut associatif à celui de société. Nombre de clubs évoluant dans des championnats de niveau élevé ont choisi de passer en société. En tenant compte des évolutions, aujourd’hui, 24 clubs sur 28 sont constitués en société, dont 18 d’entre eux ont choisi la SASP (soit près de 60 % des clubs). Tous les clubs évoluant au plus haut niveau de leur discipline, en basket-ball, au rugby et au football, autrement dit, les disciplines les plus médiatiques et soutenues, sont en société, notamment en SASP (11 sur 13). Avant de franchir les seuils législatifs, les clubs choisissent de passer en société pour diverses raisons, notamment la recherche du gain de crédibilité nécessaire en termes d’image auprès de leurs partenaires. On peut constater que la tendance des clubs est de s’organiser en société de type SASP, aussi bien pour les clubs à statut initialement associatif que pour ceux qui étaient déjà organisés dans d’autres formes de sociétés. La forme juridique SASP semble mieux répondre aux attentes des clubs sportifs. Il s’agit d’un mouvement intéressant qui témoigne de la « professionnalisation » progressive des sports et de la contestation du bénévolat par la rémunération de plus en plus étendue et importante des dirigeants de clubs. Au niveau du capital, il semblerait que l’association soit souvent majoritaire à la création de l’entreprise, mais son pouvoir s’amenuise progressivement au bénéfice des investisseurs privés au fil du développement du club. Aussi, plus le club devient médiatique et important, plus il est sous l’égide d’un actionnaire privé majoritaire qui joue le rôle de mécène. Avant cela, le club multiplie ses actionnaires, avant d’attirer progressivement des actionnaires de plus en plus prestigieux tout au long de sa vie. De la même manière, les clubs ont tendance, au début, à choisir un conseil de surveillance et un directoire, mais il s’organise progressivement sous la direction d’un conseil d’administration.

2.2.4. L’évolution de la production

Au niveau de la production, il semblerait que le club propose initialement une formation à la pratique sportive, à laquelle s’ajoute la compétition sportive. 311

Cette compétition sportive fait l’objet d’une transformation conséquente au fur et à mesure que le club obtient des résultats sportifs, un soutien populaire significatif et une forte audience lors des rencontres sportives. Pour conserver le soutien populaire et son audience, facteurs de ressources économiques, le club transforme la rencontre sportive en un spectacle sportif, lequel intéresse une population nouvelle de personnes non-initiées à la discipline elle-même. Le Spectacle est parsemé « d’événements dans l’événement », fondés sur la recherche d’effets d’attraction sur de nouveaux publics, concernés par l’ambiance, la beauté et la recherche de passions et d’émotions. Le spectacle devient total et plus uniquement sportif. Se pose la question de l’agrandissement ou de changement de stade, afin d’en faire un lieu de vie et d’animation pour la localité. La transformation de la rencontre sportive à un spectacle induit de nouvelles politiques commerciales comme la création de loges et la pratique de relations clients. En effet, lorsqu’un club a transformé ses simples matchs en un spectacle, il est capable d’attirer une audience significative qui favorise l’émergence de nombreuses convoitises provenant de l’environnement économique du club.

Si le club transforme les rencontres sportives en spectacle, il doit devenir en tant que tel un élément d’identification et de rassemblement de la population, ce qui conduit à une recrudescence de l’audience et l’émergence des clubs de « fans » qui élargissent et parfois structurent la billetterie et l’importance des produits dérivés du club. La billetterie, initialement locale, peut devenir nationale. Au début, les billets sont distribués par l’intermédiaire d’un seul canal de distribution, mais ensuite plusieurs « points de vente » sont proposés. La diversification de la population et des canaux de distribution se fait alors de plus en plus intense, selon le niveau de développement. La billetterie concerne aussi les abonnements. Ainsi, la mise en place d’une politique d’abonnements est significative d’un niveau de développement avancé, dans la mesure où une clientèle a été fidélisée, au moins sur une année pleine. Plusieurs niveaux de développement de cette « fidélisation » existent, au regard de la part des abonnés par rapport au nombre de spectateurs par match. Plus le club se développe et plus la part des abonnés semble s’élever. Il arrive parfois que les seules places proposées à la vente unitaire de billet soient des places de catégories très « populaires ». 312

Les produits dérivés connaissent une tendance proche de la billetterie. Plus le club se développe, plus il diversifie et plus il développe sa gamme de produits. Leur évolution commence initialement dans le cadre du sportif, puis petit à petit le club devient une marque à part entière et il propose une largeur et une profondeur de gamme importante. Il est de moins ne moins question d’une gamme uniquement sportive.

Concernant la formation, il est difficile de dire qu’elle suit un cours logique. Son importance dépend de la politique et de la situation économique du club. Néanmoins, elle a une place prioritaire à la création du club et semble devenir de moins en moins importante au fil de son développement. Les clubs les plus puissants économiquement d’un championnat ne privilégient que rarement la formation des joueurs, car celle-ci reste aléatoire au regard de l’impératif de résultats sportifs immédiats. Or, leur puissance économique leur permet d’attirer les joueurs vedettes avec des salaires alléchants. Les clubs moins nantis se cantonnent à la formation puisqu’ils n’ont pas les moyens de s’aligner sur les salaires proposés par les grandes écuries. Quel que soit le niveau de développement, la tendance des clubs est la même pour tous. Un club au stade 4 pourra être dans l’obligation de miser sur sa formation dans la mesure où il ne peut s’aligner financièrement sur les possibilités de ses concurrents. De la même manière, un club de stade 2 pourra acheter les meilleurs joueurs. Il convient d’ajouter qu’un club qui veut obtenir des résultats sportifs à court terme aura tendance à ne pas miser sur la formation, mais plutôt sur l’achat de joueurs talentueux. Néanmoins, à long terme, la formation permet de structurer le club, car elle est supposée coûter moins cher que l’achat de joueur, à condition qu’au moins un jeune joueur rejoigne l’équipe fanion chaque année. Les bases se solidifient. Enfin, si un club devient professionnel la législation veut désormais que les clubs formalisent et encadrent la formation. Autrement dit, d’un système de formation officieux les clubs passent aujourd’hui à un système de formation officiel.

2.2.5. Les évolutions de la communication

La communication évolue de manière logique. Le club passe d’un système peu formalisé et sommaire à un véritable système utilisant un panel de moyens très développés. D’abord, le club communique par la réalisation d’affiche 313 et Internet, puis il est cité dans la presse régionale et les radios nationales. Progressivement, le club devient de notoriété nationale et il dispose d’une présence régulière dans les médias nationaux. La retransmission télévisée est très importante en matière de retombées économiques. La probabilité qu’un club de hockey sur glace soit télévisé à une heure de grande audience pour un match de championnat est faible, car la discipline ne s’est pas encore imposée, malgré un nombre de spectateurs en progression. Seule la finale « en play off » du championnat est retransmise sur Sport+, à 20H00415. Ainsi, les possibilités de communication sont très différentes selon la discipline sportive. Seul le football, loin de devant tout de même, et le rugby peuvent faire valoir une notoriété télévisuelle. D’autres disciplines auront la possibilité d’être diffusées par le canal de journaux sportifs, de chaînes spécialisées ou de chaînes locales. Si des inégalités existent entre disciplines, tous les clubs n’ont pas la même notoriété à l’intérieur même d’un championnat. Les clubs-vedettes font souvent la richesse du championnat.

2.2.6. L’évolution en termes de marché

Il existe fort logiquement un lien entre la médiatisation et le marché des clubs. Certains clubs de disciplines peu reconnues ne peuvent prétendre toucher le public au niveau national. De même, un club n’évoluant pas à un niveau de compétition élevé ne pourra véritablement avoir un impact au niveau national. Pourtant, dans le microcosme du handball, qui ne connaît pas Montpellier neuf fois champion de France depuis 1997 et une fois champion d’Europe, ou dans le microcosme du rugby, le Stade Toulousain, six fois champion de France depuis 1994 et trois fois champion d’Europe depuis 1996 ou encore dans celui du basket-ball avec l’Elan Béarnais (Pau-Orthez), six fois champion de France depuis 1995. Pour tout initié de la discipline, ces clubs sont des références au niveau national et même international. La force d’un club est de transformer sa réputation en audience et de toucher aussi un public de non-initiés. Ses résultats sportifs pourront lui permettre d’être reconnu, mais ils ne suffisent pas. Qui connaît l’équipe de Rethel en Rollerhockey, 4 fois champion de France depuis 2003, 4 fois vainqueur de la Coupe de France depuis 2002 et 3 fois champion d’Europe depuis 2003 ? Certaines disciplines sportives ne sont pas facilement

415 Pour information, le club des Brûleurs de Loups de Grenoble qui fait partie de notre échantillon s’est imposé lors de cette finale au moment même où nous achevons la rédaction de notre travail. 314 identifiables du grand public. Si les résultats sportifs permettent d’atteindre une masse importante d’initiés, ils ne concernent pas le grand public. La médiatisation est l’élément décisif de la valeur commerciale d’un club. Il est donc nécessaire de faire partie d’une discipline médiatisée et d’obtenir des résultats sportifs pour avoir la chance d’être connu du grand public au niveau national. Si les résultats sportifs ne permettent pas à certaines disciplines d’être connues nationalement par une population de non-initiés, ils peuvent, cependant, sensibiliser une localité à leurs exploits. Ainsi, après les « initiés à la discipline », l’étape suivante est de toucher les « initiés au sport » qui seront plus à même de reconnaître la performance sportive que les « non-initiés ». L’aura d’un club peut être local, notamment dans les villes qui n’ont pas d’autres résultats sportifs probants. C’est ainsi que Bourges est une ville connue pour la qualité de son basket féminin. Lorsqu’il est question de marché, il faut aussi faire référence au partenariat. Le club développe une image à laquelle certaines entreprises adhèrent par pure passion, mais aussi pour bénéficier d’un effet d’assimilation de son prestige et de son aura. Ainsi, le club aura un partenariat différent selon les stades de son développement. Au départ, il jouit au mieux du soutien de commanditaires constitués exclusivement d’entreprises locales. Les commanditaires sont parfois en lien avec l’activité du club. Avec les résultats, le club multiplie ses partenaires, ceux-ci sont de plus en plus prestigieux, de taille régionale, mais plus toujours en liens avec les activités sportives. Enfin, de grosses entreprises s’immiscent dans le groupe et tentent de mettre la main sur « la poule aux œufs d’or », soit par passion, soit par intérêt politique, soit par convoitise. Il est alors question parfois de mécénat.

2.2.7. L’évolution de la répartition des ressources

Ainsi, la production du club lui permet d’obtenir des ressources nouvelles par rapport à son audience, ses produits dérivés, son image, sa notoriété et même sa formation parfois. La répartition des ressources évolue, conduisant généralement à une autonomie accrue du club à l’égard des pouvoirs publics et parfois des mécènes. Dans une première étape, le club fonctionne grâce à des soutiens financiers provenant exclusivement des pouvoirs publics, puis le partenariat et la billetterie apparaissent et prennent une place de plus en plus importante. Ensuite, le partenariat privé dépasse le niveau des subventions alors 315 que la billetterie s’approprie une part proche de celles-ci dans les recettes. Le partenariat représente ensuite la part essentielle des ressources du club et la billetterie ainsi que les produits dérivés supplantent les subventions qui, même croissantes, n’en sont pas moins des ressources secondaires. Enfin, les droits télévisuels apparaissent et deviennent immédiatement la part essentielle des ressources. C’est le cas du football et pour le rugby, le basket-ball est encore très loin de ce schéma. Obtenir des droits TV signifie généralement qu’il y a une demande des chaînes de télévision pour diffuser l’image du club. Dans ce contexte, le rapport de force a changé. Si la plupart des disciplines sportives cherchent à être davantage télévisées, le football vend son image aux chaînes de télévision et peut même se permettre de négocier avec elle plusieurs lots bien identifiés, selon la règle de l’appel d’offre.

2.2.8. L’évolution des priorités de gestion

Les priorités de gestion sont différentes selon les clubs. La recherche d’indépendance des clubs est un objectif difficile à atteindre, mais elle peut permettre au club de pallier de mauvais résultats sportifs à court et moyen terme. Néanmoins, les clubs ayant cette possibilité ont souvent mis en place une structure développée. Ainsi, au départ, la priorité de gestion d’un club passe par la formation et la performance sportive. Ensuite, il cherche à consolider ses bases notamment sportives, puis administratives. Il est question de professionnalisation des joueurs et de personnels permanents au sein du club. Il s’agit aussi de suivre les obligations de structuration imposées par la Ligue ou la fédération. Cette structuration n’enlève en rien l’importance de bons résultats sportifs. Il faut atteindre le haut niveau et réussir à structurer le club pour s’y maintenir. Plusieurs voies apparaissent et se rejoignent en fonction du tissu économique des clubs et la médiatisation de la discipline : soit le club devient l’icône d’une localité, bien que le tissu économique ne lui permette pas d’obtenir des ressources importantes, soit il reste dans l’ombre d’autres clubs évoluant dans des disciplines phares, tout en jouissant de ressources financières importantes au regard de son potentiel économico-social. L’important est de se structurer, de se professionnaliser, de développer une image locale positive et de se maintenir dans le plus haut niveau. Il est question de résultats ou de performance sportive selon les cas. L’étape suivante consiste à devenir un acteur incontournable du tissu économique, un représentant de la ville et un lieu de vie 316 et d’animation. Enfin, le club peut avoir pour ambition finale de devenir une véritable marque à laquelle la population s’intéresse en dehors de tout résultat sportif. Cette évolution suit le chemin d’une recherche d’autonomie.

2.2.9. Les évolutions du dispositif interne des clubs

Au niveau de l’organisation, le club se structure autour d’un président, d’un trésorier, d’une secrétaire et d’un entraîneur. La tendance suit un processus de professionnalisation des dirigeants. Quatre pôles sont mis en place : les relations extérieures, la comptabilité, le sportif, l’administratif. Un poste directeur général est souvent le plus vite créé. Il s’occupe en particulier de la vie interne du club, qu’il organise en recrutant un personnel qui se spécialise de plus en plus autour de lui. Les postes se professionnalisent, car la structure nécessite un personnel permanent et les tâches sont de plus en plus déterminées et urgentes au regard des impératifs économiques. Le président s’attache à la gestion « politique » en particulier, le directeur général à la structuration interne du club, l’entraîneur au domaine sportif et un responsable joue un rôle de gestionnaire du secteur financier et comptable, une sorte de garde-fou. L’effectif devient de plus en plus conséquent autour de ces quatre domaines, selon les besoins et les finances du club. Il est évident que le fonctionnement du club sera différent selon la nature du personnel et l’effectif du club. Le rapport avec un salarié n’est pas tout à fait le même que celui entretenu avec un bénévole, aussi compétent soit-il. L’un peut perdre son statut social, l’autre son groupe social. Ainsi, plus le club évolue, plus le fonctionnement de club sera complexe au regard de quatre caractéristiques principales que sont la prise de décision, la coordination, la délégation et la détermination des tâches. Le club sera au départ géré par un président omnipotent qui n’a pas de tâches précises et claires, puisqu’il s’occupe de tout. Ses subordonnés mettent « la main à la pâte » dès qu’ils le peuvent, en fonction de la demande de l’autocrate. Néanmoins, le domaine sportif est souvent laissé à la charge de l’entraîneur. Puis, les postes vont progressivement se spécialiser, malgré une prise de décision toujours centralisée, en dépit des efforts de délégation et de coordination entre les membres. Ensuite, une véritable spécialisation des tâches apparaît, avec une déconcentration du pouvoir émergente et une recherche de coordination systématique entre le dirigeant et ses subordonnés. La prise de décision est encore très centralisée concernant les 317 orientations stratégiques et politiques du club. Enfin, de véritable unités semi- autonomes, spécialisées dans certains domaines de gestion, sont mises en place autour du manager qui délègue l’ensemble des activités de gestion quotidienne à ses unités. Une coordination entre les différentes unités de la structure du club est mise en place.

Pour finir, la gestion du personnel évolue simplement en relation avec le niveau de développement du club. Plus le club se développe, plus il est question de professionnalisation. Au départ, celle-ci est essentiellement sportive, puis elle devient administrative. L’emploi passe de précaire à des situations mieux rémunérées, notamment dans le domaine sportif. Les sportifs sont défrayés, pluriactifs, semi-professionnels au départ, puis aux salaires suffisamment importants pour les considérer comme des professionnels. Leurs salaires dépendent souvent de leur niveau de jeu, mais aussi du budget du club. Rappelons que la masse salariale constitue le nerf de guerre des clubs sportifs professionnels. Parallèlement, le secteur administratif peut proposer des salaires bien au-dessus de la moyenne nationale. Selon la politique du club, la part variable du salaire est souvent proposée aux seuls sportifs, mais cette tendance commence à être inversée pour s’adresser aussi au développement à la structure administrative.

Conclusion

Nous avons essayé de comprendre comment évoluait chacune des caractéristiques des clubs que nous avions déterminées au préalable. Le club dans sa globalité peut passer d’une structure informelle et associative de notoriété faible à un club à forte notoriété, structuré et professionnel. Le développement du club sportif conduit à l’apparenter de plus en plus à une entreprise traditionnelle, même s’il s’agit encore d’une organisation spécifique. Le schéma ci-dessous (Schéma n°11) permet de d’illustrer l’évolution des clubs sportifs. À la suite de ces différents codages, il convient désormais de dévoiler les modèles de métamorphoses appliqués aux clubs.

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Schéma n°11 – Interprétation du schéma de GREINER [1972] à l’évolution des clubs sportifs

Phase 1 Phase 2 Phase 3 Phase 4 Phase 5

Club à

forte notoriété Croissance par création d’une marque

Croissance par médiatisation télévisuelle

Croissance par transformation du spectacle

Croissance par professionnalisation

Croissance par Club promotion à une méconnu division élevée

Club associatif Club professionnel

Source : GREINER [1972], Schéma n°2

Pour GREINER [1972], chaque croissance est précédée d’une « crise »416. Dans le modèle appliqué aux clubs sportifs, cette hypothèse est inadéquate. Rappelons que le changement peut être dû à un besoin, une opportunité ou un souhait. La croissance dépend de l’aptitude aux clubs d’atteindre certaines

416 Cf : « PARTIE II, 2.1.2 les facteurs de changements » et « PARTIE II, 1.2.3 « les successions de phases ». 319 propriétés ou qualités spécifiques. Ainsi, un club de division inférieure ne peut qu’exceptionnellement accéder au professionnalisme, et seulement selon des modalités qui s’apparentent plus au mécénat. De la même manière, un club constitué en société et disputant un titre dans un championnat de football par exemple subit des contraintes économiques importantes qui le conduisent au stade ultime de développement. En première analyse des indicateurs importants ont pu être mis en avant : - la promotion sportive ; - la professionnalisation ; - le développement du spectacle sportif ; - la médiatisation télévisuelle ; - la création d’une marque.

3. Les MDM appliqués aux clubs sportifs

Les MDM appliqués aux clubs permettent de mettre en évidence les stades de développement. A partir de l’analyse des caractéristiques présentée précédemment, après avoir rappeler les principes et le mode de fonctionnement du modèle, il s’agit de présenter les changements de dimension des clubs perçus par leurs dirigeants et de déterminer les éléments catalyseurs fondamentaux qui fournissent des informations essentielles pour les dirigeants en vue de mettre en place une stratégie adaptée à un développement harmonisé de leur club.

3.1. Le modèle Nous avons choisi de présenter notre modèle sous la forme d’un tableau. Nous suivons les conseils de MILES et HUBERMAN [2003] qui affirment qu’« il vaut mieux présenter les cadres conceptuels graphiquement plutôt que sous forme de texte »417. Ce tableau constituera, en premier lieu, une grille de lecture à partir de laquelle les clubs sportifs auront la possibilité de se situer par

417 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 48. 320 rapport à l’ensemble des clubs existants. De la même manière, tout acteur lié au secteur sportif pourra estimer la « valeur » d’un club par une lecture rapide de la grille.

Le tableau (Tableau n°34) reprend l’ensemble des caractéristiques que nous avons identifiées. Il est composé de cinq colonnes dont chacune représente un niveau de développement du club. Nous avons estimé que l’évolution des clubs pouvait rencontrer cinq niveaux de développement auxquelles nous nous sommes efforcé de donner un nom. « Bien qu’il n’existe pas de règles strictes permettant de déterminer le « vrai » ou le « bon » nombre de classes, le chercheur dispose tout de même de plusieurs critères et techniques lui permettant de faire des choix (Hardy, 1994 ; Molière, 1986 ; Ohsumi, 1998) »418. Nous avons eu recours à « des études antérieures sur le sujet », « aux fondements théoriques » et « au bon sens » préconisés par DONADA C. et MBENGUE A. [2003], pour justifier les classes établies, les interpréter et les nommer »419. Néanmoins, « le choix final reste sous la seule responsabilité du chercheur ». Les auteurs poursuivent en insistant sur le fait qu’il est nécessaire de « s’assurer que la classification possède une validité interne et externe suffisante »420 pour valider les classes obtenues. STRAUSS et CORBIN [2004] complètent en révélant que le nom qui représente les données « peut être choisi par l’analyste suite à l’image ou au sens que les objets lui évoquent lors de l’examen comparatif et en fonction du contexte, ou le nom peut reprendre les propres mots des personnes interrogés »421. Néanmoins, il convient de relativiser notre modèle comme l’exprime HUBERMAN et MILES [2003] qui affirment que « les codes thématiques sont des intuitions » 422 qui peuvent s’avérer juste pour certaines seulement. A la suite de STRAUSS et CORBIN [2004], la recherche de théorisation des « formulations et des implications qui mènent à « l’activité de recherche » entraînent une prise de décisions et des

418 DONADA C. et MBENGUE A., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), « Méthodes de recherche en management », [ouvrage coordonné sous la direction de] - Paris : Dunod, Edition N° 2, 586 p., p383. 419 DONADA C. et MBENGUE A., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p 384-385. 420 DONADA C. et MBENGUE A., dans THIETART R.-A. et coll. (2003), ibid., p 385. 421 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 149. 422 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p 139. 321 actions par rapport à plusieurs questions – quoi, quand, où, comment, qui, et ainsi de suite- tout au long du processus de recherche »423. Il est donc normal de prendre des décisions. MILES et HUBERMAN [2003] poursuivent en expliquant que plus qu’une prise de décisions, il est nécessaire d’avoir « une réflexion métaphorique, des représentations figuratives, voire des associations libres »424.

Le traitement des données a fait l’objet de recoupements minutieux et logiques au regard des premiers regroupements. Il s’agit de préciser les catégories en tenant compte du niveau de développement de chacune des caractéristiques pour l’ensemble des clubs. Des frontières « qualitatives » devaient donc être déterminées de manière à délimiter chacun des stades de développement. Pour déterminer l’appartenance d’un club à un stade de développement, il est nécessaire qu’il réponde à un certain nombre de caractéristiques. Cependant les réponses apportées par chaque club ne sont pas homogènes. Dans une première analyse, il est possible de considérer qu’un club se situe au stade 1 lorsqu’une grande majorité de ses caractéristiques se situent au bas de l’échelle. A contrario, un club qui aurait une grande majorité se situant au stade n est supposé appartenir à ce stade de développement. Cependant, cette première étape d’analyse n’est pas suffisante. En effet, certaines caractéristiques importantes peuvent promouvoir un club à un stade plus élevé, compte tenu de l’évolution du club et de l’importance de la dite caractéristique. Il est très difficile de pondérer ces critères, mais il est rare qu’une caractéristique soit au plus haut niveau alors qu’une autre se situe au niveau le plus bas. Il convient donc de préciser itérativement l’appartenance des clubs au stade de développement. Il est à noter que la confection des stades a été fondée sur une réflexion approfondie, souvent confirmée par les discussions engagées avec nos interlocuteurs. Une étude plus minutieuse nous a conduit à confirmer cette première analyse même si, dans certains cas, certaines équipes en forte évolution peuvent se situer entre deux stades. Cependant, aucun remaniement

423 STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p43. 424 MILES et HUBERMAN (2003), « Analyse des données qualitatives », traduction de la 2e édition américaine par Martine Hlady Rispal, révision scientifique de Jean-Jacques Bonniol, 2ème Edition. – Bruxelles, Paris : De Boeck, Méthodes en sciences humaines, 626 p., p19. 322 majeur n’a été nécessaire. Les tableaux n° 32 et n°33 ont été quasiment gardés à l’identique, à quelques termes près. Par ailleurs, les stades de développement sont composés de clubs sensiblement proches malgré l’apparence de leurs spécificités. L’analyse statistique vérifie les différents stades de développement dégagés par le modèle.

Nous avons essayé de trouver un lien avec la synthèse de GODENER [1996]425 de manière à identifier des similarités dans le développement des clubs et celui des entreprises. Rappelons que cette synthèse des modèles de métamorphoses a été bâtie en rassemblant des travaux réalisés par des chercheurs sur des entreprises de types « industriels » et de « secteurs traditionnels »426. Néanmoins, d’autres chercheurs ont effectués des recherches sur des « entreprises de haute technologie »427 ou encore des « organismes publics »428. GODENER identifie aussi cinq stades de développement qui sont les suivants (Annexe 5) : - Stade 1 : l’entreprise à la structure informelle ; - Stade 2 : l’entreprise à la structure formelle et centralisée ; - Stade 3 : l’entreprise à la structure formelle et décentralisée ; - Stade 4 : l’entreprise à la structure formelle, décentralisée avec des mécanismes de coordination : - Stade 5 : l’entreprise à la structure formelle, décentralisée avec des mécanismes de coordination et collaboration.

Ces stades établis par GODENER [1996] ont servi de base à notre étude. Compte tenu des spécificités des clubs sportifs, les caractéristiques ont été différentes. Cependant, l’analyse des stades de développement reste proche dans sa présentation et ses résultats.

425 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 75- 76. 426 GODENER A. (1996), ibid., p55. 427 KAZANJIAN R. K.(1984, 1988) et KAZANJIAN et DRAZIN R. (1990) cité par GODENER A. (1996), ibid., p55. 428 QUINN R.E. et CAMERON K. (1983), « Organizational life cycles and shifting criteria of effectiveness : some preliminary evidence », Management Science, Janvier, vol. 29, N°1, p 33-51. 323

Tableau N°34 – Les MDM appliqués aux clubs sportifs

Stade 1 Stade 2 Stade 3 Stade 4 Stade 5

Club associatif à Club Club professionnel à Clubs professionnel à Club à l’assise structure informelle professionnalisé à la l’activité diversifiée forte notoriété économique structure formelle et confortable centralisée («club-patrimoine»)

TAILLE 1 à 4 dirigeants 1 à 5 dirigeants Au moins 1 administratif 15 à 30 administratifs Plus de 30 salariés administratifs administratifs salariés salarié dans chaque pôle salariés environ (dans la administratifs (dans la bénévoles + possibilité (Joueurs employés à (administratif, société uniquement), de société uniquement) de joueurs employés à mi-temps, emplois comptable, relations moins en moins de mi temps + bénévoles précaires…) + extérieures, sportif) bénévoles bénévoles 10 salariés environ (dans la société uniquement ). Souvent beaucoup de bénévoles autour

BUDGET Inférieur à 1,5 million De 1,5 à 2,5 millions De 2,5 à 8 millions Supérieur à 8 ,5 millions Supérieur à 60 millions d’euros. d’euros + permet d’euros + permet d’euros + d’euros permet de Budget ne permettant professionnalisation de professionnalisation des professionnalisation des s’offrir les grands pas de salarier la quasi-totalité des joueurs et des dirigeants et des spécialistes dirigeants l’ensemble des sportifs sportifs + dirigeants + club devient joueurs + club devient et les joueurs les plus et le personnel à professionnalisation du un lieu de business un lieu de grand talentueux + business temps plein personnel administratif business aussi important que le (temps plein + mi- domaine sportif. temps+ défraiement) NIVEAU DE Tous niveaux Niveau de compétition Haut niveau et/ou professionnel uniquement COMPETITION professionnel ou de haut niveau GOUVERNANCE Statut Association en Société en majorité + Clubs transformés en société (tendance à la SASP) majorité ou société Association parfois professionnalisée 324

Capital Pas d’actionnaire 1 à 2 actionnaires privés Club pénétrant ou (association) ou Association encore souvent majoritaire ou majoritaires+ rarement proche du marché rarement société avec parfois multiplicité d’actionnaires avec des association majoritaire. boursier association majoritaire parts réparties de manière homogène Parfois multiplicité d’actionnaires en complément MARCHE Public Notoriété insignifiante Notoriété locale parfois Notoriété régionale Notoriété nationale Notoriété non-initié ou exclusivement régionale parfois nationale parfois internationale internationale : locale rang de clubs vedettes Club ayant confirmé en France. sportivement en ligue européenne + rang de club patrimoine

Public initié Notoriété locale Notoriété régionale (surtout) et nationale Notoriété nationale Notoriété internationale (surtout), régionale et parfois internationale (surtout) et parfois nationale internationale PARTENARIAT Partenariat local Partenariat à majorité Partenariat important Partenariat dense, diversifié et de prestige : d’envergure restreinte locale, rarement surtout régional, parfois entreprises locales, d’envergure nationale, national et prestigieux national, parfois voire internationale. prestigieux REPARTITION DES RESSOURCES 1er : Subventions 1er : Partenariat privé 1er : Partenariat privé : 1er : Droits TV ou 1er : Droits TV (encore importante) et subvention proche part importante (près de partenariat 2ème : partenariat privé 2ème : partenariat 2ème : billetterie la moitié des ressources) 2ème : billetterie et billetterie et parfois 3ème : adhésions ou 3ème : produits dérivés 2ème : billetterie et 3ème : produits dérivés produits dérivés billetterie subventions. (+ opérations de 3ème : produits dérivés transferts sportifs)

325

PRODUCTION Rencontre Production de Spectacle sportif avant Clubs ayant transformé (ou presque) la Spectacles et services sportive compétition sportive et tout + Affluence compétition sportive en un spectacle total + complets + lieu de vie parfois spectacle moyenne (3500 enceinte considérable + taux de remplissage d’une localité sportif spectateurs max. ²)+ souvent important + relations publiques Prémices de relations (loges,…) + multiplicité de services annexes publiques (loges…) + (garderie,…) + tendent à devenir un lieu de vie tendent à transformer local le spectacle en spectacle total

Billetterie 1 seul canal de Canaux de distribution importants : siège, site Multiples canaux de Multiple canaux distribution : au siège Internet du club, boutique parfois, sites Internet distribution au niveau internationaux + Tour ou au guichet spécialisés parfois, réseau de distributeurs local. national operator : billet pour match à l’étranger

Abonnements politique Politique Politique d’abonnements efficace : 40% au moins de leurs spectateurs d’abonnements d’abonnements sont des abonnés et parfois près de 80% inexistante ou peu existante mais jugée importante insuffisante (moins de 20%).

Produits dérivés produits dérivés inexistants ou peu développés gamme importante, gamme large, profonde Marque à part entière et liés au sport uniquement + vente en gamme sportive et non- et diversifiée = marque + Canaux de majorité par des « corners » ou boutique à sportive mais à majorité plus uniquement distribution nationaux l’intérieur de la structure sportive le soir des sportive + vente locale sportive + canaux de et produits présent à matchs, parfois GSS et GMS de proximité, site surtout + canaux de distribution importants : l’étranger + Filiale Internet du club parfois distribution importants : plusieurs boutiques, boutique, corner GMS et Vente en ligne, corners GSS de proximité, vente en GSS (national) et en ligne, VPC GMS (régional), VPC + 1 restaurant / brasserie formation Formation souvent le Pilier souvent peut constituer un pilier important de la peut rester un pilier pilier + formation important encore + politique du club + Centre de formation agréé important mais peu informelle à la pratique formation plus formelle fréquent + Centre de sportive formation agréé 326

COMMUNICATION Système de Système de De plus en plus Moyens de Moyens de communication communication plus importante et diverse : communication complet communication complet informel : formel, palette large: Presse nationale, radios + retransmission + Médiatisation Communication site Internet, presse nationales, site Internet, régulière des matchs+ continuelle nationale et personnelle : régionale, parfois presse électronique + journaux sportifs+ internationale + Affiche, site Internet, nationale, médias télédiffusion sur le médiatisation parfois médiatisation parfois parfois presse locale radiophoniques, réseau satellite et internationale lors des heures de (très ponctuelle) panneaux d’affichage, parfois national, grande écoute le bouche-à-oreille, retransmissions lors des magazine, dossier journaux sportifs ou sur projet, etc. les chaînes locales.

PRIORITE DE GESTION Rechercher des Rechercher des Rechercher et parfois Conforter l’historique Conforter l’historique résultats sportifs, résultats sportifs ou conforter les résultats sportif et aura nationale sportif et aura parfois atteindre le conforter performances sportifs + développer + pérennité + nationale + pérennité plus haut niveau + sportives + conforter son aura au niveau consolider son image + soutien populaire structuration du club + son aura au niveau national + projet pour devenir une national + développer Professionnalisation et local + développement d’améliorer l’enceinte et marque à part entière + la marque (parfois stabilisation des d’activités annexes à spectacle parfois pour recherche à développer filialisation) + agrandir sportifs + recherche de la rencontre sportive devenir un lieu de vie. activités commerciales lieu de vie notoriété et (produits dérivés,…) + et devenir une lieu de médiatisation améliorer le spectacle vie (nouvelle enceinte,…) + recherche de professionnalisation + recherche de médiatisation

327

ORGANISATION Personnel administratif Personnel administratif Personnel administratif personnel administratif Personnel administratif maigre, peu formalisé réduit professionnel relativement important important et important et et majoritairement aux postes dirigeants, pour la plupart salarié. permanent, permanent bénévole, souvent pas parfois encore Contient un DG et/ou un professionnalisation professionnalisation de responsable attitré bénévoles. Un DG ou DAF, un comptable, un dans tous les secteurs dans tous les secteurs, à une tâche précise un DAF au moins et poste commercial et un parfois création de quelques postes autour secrétaire + multitudes responsables de filiales selon les besoins du de postes autour. club

FONCTIONNEMENT Structure informelle et Structure centralisée Structure décentralisée Structure décentralisée par unités de travail, centralisée + avec recherche de ou encore centralisée avec recherche de coordination + délégation délégation minime et spécialisation des mais avec des postes importante + au moins 1 poste professionnel les prises de décisions membres de la structurels bien dans chaque unité peu concertées + le structure déterminés et avec une manager est administrative + recherche de omniscient. coordination verticale coordination + mais pas horizontale + délégation variable mais délégation se se développe développe PERSONNEL Sportifs pluriactifs, Différenciation du Professionnalisation Projet collectif Sportif défrayés et parfois secteur sportif et du intégrale des joueurs + Professionnalisation intégrale des joueurs +

professionnels + secteur administratif + formalisation du système formalisation du système de récompenses +

salaires corrects à système de primes sur de récompenses + Primes en fonction du résultat du groupe+

insuffisants + primes résultats sportifs + Primes en fonction du salaires importants et inégaux de matchs mises en Salaires résultat du groupe place fréquemment majoritairement bons, mais aussi pluriactifs ou semi-professionnels

Professionnalisation intégrale des dirigeants Administratif Administratif encore Salaires dirigeants Professionnalisation administratifs + formalisation du système de souvent bénévoles ou bons mais salaires souvent importante des récompenses + système de primes et embauches de joueurs subordonnés moyens dirigeants administratifs avantages bénévolat + Primes aux au sein du secteur voire précaire + + formalisation du professionnels selon le profit + salaires administratif + salaire souvent pas de primes système de récompenses importants moyen à faible selon le profit 328

EXEMPLES DE Clubs de hockey sur Clubs de hockey sur Clubs de Rugby de haut Clubs de football de Clubs de prestige de CLUBS glace de haut niveau, glace de haut niveau, niveau, clubs de Basket- haut niveau, clubs de football (OM, OL, Club de rugby de clubs de handball de ball de haut niveau rugby populaires de PSG…) Fédérale 1, haut niveau, club de populaires, club de haut niveau rugby de PRO D2, club football de Ligue 2 de basket-ball de haut niveau et de bon niveau Nous ne tenons compte que de la société gérante du club professionnel. Les centre de formations, les filiales du club ou encore l’association ne sont pas pris ne compte. Le taux de remplissage peut être important. VPC : Vente par correspondance.

329

3.2. Explication du modèle Si le modèle est plutôt simple et pratique, il convient cependant de l’expliciter. Une première remarque peut être faite concernant sa fiabilité. Rappelons que le modèle aussi précis soit-il ne révèle qu’une tendance d’évolution. Ainsi, certains clubs pourraient s’identifier à plusieurs stades. L’évolution n’est pas si déterministe que le modèle veut bien le laisser croire. Ensuite, il existe des écarts que certains clubs pourraient trouver importants au sein d’un même stade. Ces observations amènent à dire que nous avons fixé nos frontières à partir d’indicateurs jugés significatifs, dont les évolutions semblaient suffisamment proches pour être intégrés dans la même catégorie. Ainsi, si certains clubs semblent être différents en surface, notamment en termes d’image, ils sont très proches en profondeur, et réciproquement. Pour être le plus représentatif possible, il convient de trouver un club dans lequel l’ensemble de ses caractéristiques sont comprises dans le même stade de développement. Ajoutons qu’en proposant cette analyse synthétique, nous sommes conscient de l’existence de nombreuses exceptions, notamment en raison des différences culturelles et de développement entre les disciplines sportives. Nous pensons, cependant, que globalement le management des clubs suit ces stades de développement, selon des formes qui ne supposent pas nécessairement la linéarité. Les évolutions des clubs se réalisent souvent par « petites touches » et innovations mineures. Certes, certains clubs subissent de véritables « révolutions culturelles » conduisant au professionnalisme, mais, dans ces conditions, les caractéristiques ne sont plus toujours en « phase », au même niveau de développement, conduisant ainsi à des formes de déséquilibres dans la gestion du club, à défaut de repères sur l’homogénéité des structures. Ainsi, le club de Toulon, en Division professionnelle 2 de rugby, dispose avec son Président d’un mécène riche et dispendieux, mais les structures sportives ne sont pas encore à la hauteur des investissements engagés. Dans ces conditions, le projet connaît quelques difficultés de réalisation susceptibles de remettre en cause son succès. Au fond, l’analyse des « stades de développement » est fondamentale pour étudier les requis et les pré-requis des opérations de professionnalisation des clubs sportifs. Généralement, l’évolution ressemble plutôt à une compilation et à une intensification des activités, alors même qu’une 330 profonde transformation des modalités de « management » s’avère nécessaire. La professionnalisation récente et le manque d’expérience et de recul des clubs face à la marchandisation du sport les conduisent souvent à rester dans le cadre, pourtant désuet et inadapté, dans lequel ils ont toujours existé. Plus tard, il sera possible de connaître peut être d’autres possibilités pour évoluer. Aujourd’hui, l’évolution du club ressemble plus à une évolution de type « marches d’escalier » (cf : Schéma n°12) que d’évolutions indépendantes et ex nihilo. Les clubs ne font que rénover leurs structures, ils ne les remplacent pas.

Schéma n°12 - Type d’évolution des clubs sportifs

Stade 5

Stade 4

Stade 3

Stade 2

Stade 1

Les clubs sportifs tentent de se renforcer au fil des saisons et ils démontrent parfois une certaine stabilité. Ce modèle ne permet pas de démontrer qu’un club est plus à l’abri qu’un autre de résultats sportifs décevants, car les clubs vivent constamment avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Il permet cependant de donner les différentes évolutions mises en place par des clubs dans le but de pallier une crise sportive relative. Si les clubs de certains stades disposent de structures solides et stables, il n’empêche qu’au 331 haut niveau, seuls les clubs du stade 5 sont véritablement dans une situation de pérennité proche de celle des grands groupes économiques internationaux.

Cette analyse sous forme de tableau répond aussi à une tendance actuelle d’essayer de regrouper les clubs par catégories. De nombreuses ligues sportives proposent dans leur dossier statistique ce type d’analyse à la fin de chaque saison. Généralement, les clubs sont regroupés selon leurs budgets429. Notre classement comporte plus d’éléments de gestion, il met en évidence la recherche d’homogénéité des structures disponibles en fonction des stades de développement. Il n’en reste pas moins vrai que le budget constitue une caractéristique essentielle. Ainsi, constatation intéressante, presque tous les clubs de notre échantillon, dont le budget dépasse 2,5 millions d’euros, sont organisés en sociétés. Cependant, d’autres clubs au budget inférieur ont aussi choisi cette forme juridique, et un club de notre échantillon au budget supérieur à 3 millions d’euros a conservé ses structures associatives qui ont cependant été abandonnées au cours de la saison 2006-2007. Il est utile de constater qu’au- delà d’un certain budget, soit par besoin ou par opportunité, les clubs se constituent en société pour répondre au mieux à la demande et pour répondre à leurs obligations.

Au fond, les stades de développement tels que nous les avons présentés fournissent des informations sur l’évolution « normale » des clubs vers le management d’entreprise. Mais les exceptions peuvent aussi confirmer la règle dans certains cas précis et rares. Parfois, le raisonnement permet de comprendre la spécificité d’un club. La faible importance, par exemple, des réseaux de distribution de C21, C22 et C15 s’explique par la part importante des abonnements. Il y a donc un « effet de substitution » entre la qualité de la demande d’abonnements au détriment des structures de distribution des billets match après match.

Aussi, nous avons retenu 5 stades de développement vers la professionnalisation, sans indiquer le « niveau zéro » qui est celui du stade

429 Dans le rapport d’information n° 336, de 2003-2004, M. Yvon Collin, au nom de la délégation du Sénat pour la planification intitulé « Quels arbitrages pour le football professionnel ? Les problèmes liés au développement économique du football professionnel », a proposé une classification des clubs. Nous avons pu, de ce fait, savoir comment étaient structurés les clubs les plus développés. 332 purement bénévole et de sa création. Néanmoins, la participation à un championnat de haut niveau supposera la mise en place de structures spécifiques qui sont susceptibles de varier en fonction des différences de potentiel des disciplines sportives. Dans certains cas, le sport est tellement confidentiel, même s’il dispose d’un potentiel populaire non négligeable, que son organisation est encore inférieure au stade 1. C’est le cas du Roller hockey, malgré d’excellents résultats internationaux. Ce sport se situe à un niveau infra stade 1, mais il commence à se structurer, avec l’existence d’une équipe pré-professionnelle à Rethel. Il pourrait exister aussi un stade 6, mais il ne semble pas encore disponible en France. Les franchises américaines ou encore nos homologues du football anglais (Manchester United ou Chelsea), italiens (Milan AC ou la Juventus de Turin), allemands (Bayern de Munich) ou espagnols (Real Madrid ou Barcelone) ont des niveaux de structures complètement professionnalisés, dont la gestion s’apparente à celle des grands groupes économiques multinationaux, avec l’importance du rôle des actionnaires.

Nous avons fait le choix au regard de notre premier codage de différencier le sportif de l’administratif, mais il convient de noter qu’ils évoluent souvent l’un avec l’autre.

Enfin, la caractéristique « Système de contrôle » n’a pas été retenue, car elle n’a pas produit de résultats fiables. Autrement dit, l’évolution des « systèmes de contrôle » des clubs français aujourd’hui ne semble répondre à aucune règle précise. De nombreux clubs s’efforcent de créer un véritable suivi de leurs affaires économiques et financières tout au long de leur vie. C’est certainement pour cette raison que la plupart des ligues et même des fédérations insistent sur le contrôle de gestion en imposant des règles strictes notamment par le biais d’organismes spécialisés : DNCCG (basket-ball), DNCG (football), DNACG (Rugby), CNACG (handball), CNACG (hockey sur glace). Il est probable qu’une meilleure compréhension de l’évolution « professionnelle » des clubs et les efforts de contrôle des Ligues et Fédérations en réduise à terme le caractère aléatoire. De la même manière, la caractéristique concernant « les réflexions stratégiques » n’a pas produit de résultats probants. Au fond, le sujet n’est pas encore très significatif, faute d’un intérêt suffisant à court terme, face à la 333 pesanteur des résultats sportifs. A un certain niveau de développement, les clubs cherchent à lisser leur image au regard de leur environnement. Ils témoignent d’une prise de conscience collective, qui ne va pas sans une implication dans les causes sociales, environnementales et économiques, par le biais de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE), forme de déclinaison pour l'entreprise des concepts de développement durable.

3.3. L’appoint d’une analyse statistique adaptée À la suite de cette étude qualitative, une analyse statistique simple est intéressante en vue de confirmer ou d’infirmer les résultats. Elle a pour objectif de fournir des informations utilisables pour mettre en relief les tendances générales de corrélation entre les principales caractéristiques. L’application du logiciel « R permet de construire des tableaux de corrélations, ainsi que des graphiques en 3 dimensions. Pour engager cette étude statistique, il est nécessaire de préparer un tableau des caractéristiques de chaque club au regard de leur stade de développement (tableau N°35). De ce tableau, il est possible de : 1. définir plus précisément le stade de développement dans lequel chaque club se situe en établissant un classement par points ; 2. établir des relations entre les différentes caractéristiques et notamment la simultanéité de leur correspondance avec le même stade de développement ; 3. définir l’intensité chiffrée des corrélations entre les caractéristiques des clubs sportifs.

334

Tableau N°35 – Les stades de développement identifiés pour chaque caractéristique des clubs

Clubs Taille Budget Niveau de Gouvernance Marché Partenariat Répartition Communication Priorité Organisation Production Fonctionnement Personnel compétition des de Statut Capital Public Public ressources gestion Rencontre Billetterie Abonnements Produits Formation Sportif Administratif non- initié sportive dérivés initié C 1 3 3 4 4 3 3 4 3 3 3 3 3 3 3 4 4 4 4 4 4 C 2 2 2 2 1 2 2 3 2 2 1 1 2 2 1 2 1 2 2 2 2 C 3 3 3 3 4 3 3 4 4 3 3 3 3 3 3 4 4 3 3 4 4 C 4 2 2 2 2 4 2 3 2 2 2 2 2 2 1 3 2 3 2 3 2 C 5 3 3 4 4 4 3 4 3 3 3 3 3 3 3 4 3 4 3 4 4 C 6 1 1 1 1 1 1 2 1 2 2 1 1 1 1 2 1 2 2 1 1 C 7 3 2 3 2 2 3 4 2 2 2 2 3 2 2 2 3 4 2 3 2 C 8 2 2 2 2 2 2 3 2 2 2 2 2 2 2 1 2 2 1 3 2 C 9 2 2 3 2 2 2 4 1 1 2 1 2 2 1 1 1 3 1 2 2 C 10 4 4 3 3 4 3 3 4 4 3 3 4 2 3 3 3 3 3 5 5 C 11 2 3 3 2 3 3 4 3 3 2 2 3 2 2 4 3 3 4 3 3 C 12 2 2 2 2 2 2 3 2 2 2 2 2 3 2 2 1 2 3 2 2 C 13 5 4 4 4 4 4 4 4 4 5 4 4 4 4 4 4 4 4 5 5 C 14 3 3 3 3 4 3 5 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 4 4 4 C 15 2 3 3 4 4 3 3 3 3 3 2 2 2 2 5 3 3 3 3 4 C 16 3 3 3 2 2 3 5 3 1 3 2 3 3 2 2 2 3 4 3 3 C 17 1 1 1 2 1 1 2 2 3 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 1 C 18 2 1 2 1 1 2 3 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 C 19 1 3 3 2 2 2 3 3 3 2 1 1 2 1 3 3 3 3 3 3 C 20 2 2 2 2 4 2 3 1 3 2 1 1 1 1 1 1 3 1 2 2 C 21 3 3 3 3 3 3 5 3 4 3 3 3 3 2 3 3 3 3 4 4 C 22 3 4 4 4 4 3 4 4 3 3 4 4 4 1 5 4 3 4 5 5 C 23 4 4 4 4 4 4 4 4 4 5 4 4 4 4 4 3 4 4 5 5 C 24 2 2 3 2 2 2 3 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 3 2 C 25 2 2 2 2 2 2 3 2 2 2 2 2 2 1 2 1 2 2 2 2 C 26 3 3 3 4 4 3 4 4 3 3 3 3 4 4 5 4 3 3 3 3 C 27 4 4 4 4 4 4 5 4 3 4 5 4 4 4 4 5 4 4 5 5 C 28 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 1 1 1

335

Tableau N°36 – Le stade de développement des clubs

Clubs Totaux Stade Repères C13 84 4 C27 84 4 C23 82 4 C22 75 4 C10 69 3 C1 69 3 C26 69 3 C5 68 3

C3 67 3 20 caractéristiques : C14 66 3

C21 64 3 Stade 5 : 20 x 5 = 100 (90 < x < 100) C15 60 3

C11 57 3 Stade 4 : 20 x 4 = 80 (70 < x < 90) C16 55 3 C7 50 2 Stade 3 : 20 x 3 = 60 (50 < x < 70) C19 47 2 C4 45 2 Stade 2 : 20 x 2 = 40 (30 < x < 50) C24 43 2 C12 42 2 Stade 1 : 20 x 1 = 20 (10 < x < 30) C8 40 2 C25 39 2 C18 38 2 C9 37 2 C20 37 2 C2 36 2 C6 26 1 C17 26 1 C28 21 1

Au stade 1, 3 clubs ressortent : 2 de hockey sur glace et 1 de rugby ; 11 clubs appartiennent au stade 2 : 4 clubs de handball, 3 clubs de hockey sur glace, 3 clubs de basket-ball et 1 club de rugby ; 10 clubs composent le stade 3 : 6 clubs de rugby, 2 clubs de basket-ball, 1 club de football et 1 club de handball ; Enfin, le stade 4 contient les 4 derniers club : 2 clubs de football et 2 clubs de rugby. Nous pouvons observer que les clubs de hockey sur glace Elite ne dépassent pas le stade 2, que le handball et le basket-ball Elite sont proches et de situent entre le stade 2 et 3. Le basket-ball semble cependant encore en avance sur le handball. Enfin, les clubs de rugby Elite sont pour la plupart au niveau 3 mais certains atteignent le stade 4, autrement dit, le stade des clubs de football Elite (Annexe 2). Aucun des clubs de l’échantillon n’atteint le stade 5. 336

3.3.1. Exemples de corrélations significatives

Nous avons choisi plusieurs relations en fonction des analyses proposées par notre étude qualitative. Nous avons ainsi mis en évidence, d’une part, les relations entre le niveau d’organisation et le niveau de compétition et les relations entre un public initié et la formation assurée par les clubs, d’autre part. D’autres études pertinentes auraient aussi pu être engagées en application de la même méthode.

3.3.1.1. Les corrélations entre le Niveau d’organisation et le Niveau de compétition Les premières corrélations choisies concernent les caractéristiques qui développent apparemment des liens importants. La corrélation entre le niveau d’organisation et le niveau de compétition est de 0.8182019. Certes, les corrélations n’indiquent pas de relations de cause à effet, mais elles fournissent des indications intéressantes pour conforter (et non confirmer) une hypothèse.

Tableau N°37 - Les correspondances entre les stades de niveau de compétition et de niveau d’organisation

Niveau d'organisation STADE 1 2 3 4 1 3 0 0 0 Niveau de compétition 2 1 6 0 0 3 1 3 7 1 4 0 0 2 4

Ce tableau (Tableau n°37) permet d’observer une tendance, celle-ci étant mise en évidence par l’analyse de la diagonale. Celle-ci conforte l’idée d’une corrélation entre les niveaux de développement des deux caractéristiques. Ainsi, lorsque l’une d’entre elles se situe à un stade de développement donné, il existe une probabilité non négligeable pour que la seconde se situe à un stade similaire.

337

Tableau N°38 - Le niveau d’organisation par rapport au niveau de compétition

Niveau d'organisation STADE 1 2 3 4 %

1 100 0 0 0 100 Niveau de compétition 2 14 86 0 0 100 3 8.5 25 58 8.5 100 4 0 0 33 67 100

Interprétation (n°38) 1. Lorsque le niveau de compétition est au Stade 1, 100 % des clubs ont un niveau d’organisation de stade 1. 2. Lorsque le niveau de compétition est au stade 2, 86 % des clubs ont un niveau d’organisation de Stade 2 et 14% des clubs ont un niveau d’organisation de Stade 1 3. Lorsque le niveau de compétition est au stade 3, 8.5% ont un niveau de stade 4, 58 % des clubs ont un niveau d’organisation de stade 3, 25% des clubs ont un niveau d’organisation de stade 2 et 8.5 % ont un niveau de stade 1. 4. Lorsque le niveau de compétition est au stade 4, 67 % des clubs ont un niveau d’organisation de stade 4 et 33% ont un niveau de compétition de stade 3.

Conclusion Il existe une forte corrélation entre le niveau de compétition et le niveau d’organisation puisque les niveaux de développement du niveau d’organisation évoluent de manière similaire à ceux du niveau de compétition pour la plupart des clubs sportifs. Quand le niveau de compétition est à un stade donné, le niveau d’organisation a tendance à se situer régulièrement au même stade. Une tendance non rectiligne se dégage aussi. Plus on entre dans les stades de développement les plus élevés, plus la signification semble s’amoindrir puisque de 100% au stade 1 on passe à 67 % au stade 4 (même si au stade 3 le pourcentage atteint 58 %). Cette divergence est d’ailleurs assez logique. Le développement des clubs se déroule selon des mécanismes qui supposent des déséquilibres, lesquels conduisent à élever progressivement l’ensemble du niveau des caractéristiques.

338

Tableau N°39 - Le niveau de compétition par rapport au niveau d’organisation

Niveau d'organisation STADE 1 2 3 4

1 60 0 0 0 Niveau de compétition 2 20 67 0 0 3 20 33 78 20 4 0 0 22 80 % 100 100 100 100

Interprétation (n°39) 1. Lorsque le niveau d’organisation est au stade 1, 60% des clubs ont un niveau de compétition au stade 1, 20% au stade 2 et 20% au stade 3. 2. Lorsque le niveau d’organisation est au stade 2, 67% des clubs ont un niveau de compétition au stade 2 et 33% au stade 3. 3. Lorsque le niveau d’organisation est au stade 3, 78% des clubs ont un niveau de compétition au stade 3 et 22% au stade 4. 4. Lorsque le niveau d’organisation est au stade 4, 80% des clubs ont un niveau de compétition au stade 4 et 20% au stade 3. Conclusion Cette analyse est intéressante, car elle met en évidence l’importance du niveau d’organisation. Aux stades inférieurs de la compétition, celui-ci est souvent plus élevé que le niveau de compétition, car avec le système de relégation-promotion, il faut beaucoup investir dans l’organisation pour espérer passer à la division supérieure. Plus on entre dans les hauts stades de développement, plus le niveau de signification est élevé, notamment parce qu’il n’est pas possible de maintenir un club au plus haut niveau de l’élite sans une organisation de qualité. Les clubs dont le niveau d’organisation est inférieur à celui de leur niveau de compétition ont souvent de grandes difficultés à se maintenir dans l’élite.

3.3.1.2. Les corrélations entre le public initié et la formation Nous avons choisi de nous focaliser sur deux caractéristiques qui semblaient ne pas avoir directement de corrélation pour mieux comprendre leur évolution respective et leur apport dans le passage d’un stade de développement à un autre. La corrélation entre la formation et le public initié atteint globalement 0.6706982. Elle est significative, mais pas particulièrement satisfaisante. Le 339

Tableau n° 40 indique les correspondances entre les stades du public initié et ceux de la formation.

Tableau N°40 - Les correspondances entre les stades du public initié et les stades de la formation

Public initié STADE 1 2 3 4 5

1 0 1 0 0 0 Formation 2 1 1 6 0 0 3 0 0 5 5 3 4 0 0 0 5 1

Ce tableau (tableau n° 40) révèle une diagonale témoignant d’une certaine corrélation entre les deux caractéristiques. Néanmoins, si l’une d’elles (le public initié) est représentée dans l’ensemble des cinq stades de développement, l’autre (la formation) ne compte que 4 stades de développement. Malgré cette observation, la diagonale est plutôt régulière.

Tableau N°41 - Les stades du public initié par rapport aux stades de la formation

Public initié STADE 1 2 3 4 5 %

1 0 100 0 0 0 100 Formation 2 12.5 12.5 75 0 0 100 3 0 0 38 38 24 100 4 0 0 0 83 17 100

Interprétation (n°41) 1. Lorsque le niveau de formation est au stade 1, 100% des clubs sont au stade 2 du public initié. 2. Lorsque le niveau de formation est au stade 2, 75% des clubs sont au stade 3 du public initié, 12.5% au stade 2 et 12.5% au stade 1. 3. Lorsque le niveau de formation est au stade 3, 38% des clubs sont au stade 3 du public initié, 38% au stade 4 et 24% au stade 5. 4. Lorsque le niveau de formation est au stade 4, 83% des clubs sont au stade 4 du public initié et 17% au stade 5.

340

Conclusion Il existe une cohérence décalée entre les stades de formation et les stades du public initié. Régulièrement, le stade de la formation est souvent situé au niveau immédiatement inférieur de celui du stade du public initié ou à un stade similaire. Aux stades de développement élevés des clubs, la différence s’atténue.

Tableau N°42 - Les stades de la formation par rapport aux stades du public initié

Public initié STADE 1 2 3 4 5

1 0 50 0 0 0 Formation 2 100 50 55 0 0 3 0 0 45 50 75 4 0 0 0 50 25 % 100 100 100 100 100

Interprétation (n°42) 1. Lorsque le niveau du public initié est au stade 1, 100 % des clubs sont au stade 2 de la formation. 2. Lorsque le niveau du public initié est au stade 2, 50% des clubs sont au stade 2 de la formation et 50% au stade 1. 3. Lorsque le niveau du public initié est au stade 3, 55% des clubs sont au stade 3 de la formation et 45% au stade 2. 4. Lorsque le niveau du public initié est au stade 4, 50% des clubs sont au stade 4 de la formation et 50% au stade 3 5. Lorsque le niveau du public initié est au stade 5, 75% des clubs sont au stade 5 de la formation et 25% au stade 4.

Conclusion Si le niveau de formation évolue sensiblement dans le même sens que celui du public initié, il existe cependant des cas singuliers, notamment au niveau du stade 5, dans la mesure où aucun club de niveau de public initié identifié au stade 5 n’a de formation de stade 5. Autrement dit, la formation suit le public initié avec un temps de retard. Lorsque les clubs atteignent le niveau de développement ultime, si leur centre de formation est relativement bien développé, les clubs cherchent d’abord à se renforcer avec des joueurs « stars » 341 qui leur amène un public encore plus nombreux en termes d’abonnements, de billetterie ou de notoriété de marque.

3.3.2. Les corrélations entre les caractéristiques

L’analyse de l’ensemble des corrélations pour l’ensemble des caractéristiques est utile pour donner une indication concernant les relations entre elles. Le tableau n° 7 permet de comprendre l’intensité éventuelle des liens entre les caractéristiques. Nous avons établi un code couleur pour mettre en évidence de manière visuelle la qualité des corrélations. Certes, une bonne corrélation n’indique pas nécessairement une relation étroite entre deux caractéristique, elle peut être accidentelle. L’absence d’une bonne corrélation est sans doute l’expression d’une relation incertaine, voire inexistante. Dans une perspective poppérienne, l’absence d’une corrélation réfute l’hypothèse d’une relation entre les deux variables ; la présence d’une corrélation significative n’est qu’une information qui ne permet pas de rejeter l’hypothèse d’une relation entre les deux variables étudiées. C’est pourquoi toutes les corrélations doivent être discutées sur la base d’hypothèses précises ou d’explications rationnelles. 342

Tableau N°43 – Les corrélations entre les caractéristiques

"Tlle" "Bdgt" "NivCpt" "Stt" "Cptl" "PblcNI" "PblcI" "Prtnrt" "RepRess" "Comm" "PrioGest" "Orga" "RtreSport" "Bllttrie" "Abnment" "PtDeriv" "formt" "Fonctmt" "PersSp" "PersAd"

"Tlle" 1

"Bdgt" 0,8106097 1

"NivCpt" 0,7782896 0,8735388 1

"Stt" 0,7238108 0,8170195 0,8072109 1

"Cptl" 0,6859355 0,797565 0,6863869 0,791034 1

"PblcNI" 0,905949 0,8948434 0,8929385 0,7990931 0,7488622 1

"PblcI" 0,6928203 0,6819512 0,7673443 0,5772745 0,5431201 0,8037108 1

"Prtnrt" 0,7579837 0,8920864 0,7584826 0,8225646 0,6639314 0,8336725 0,6001675 1

"RepRess" 0,571336 0,6742173 0,5130749 0,6800727 0,6584981 0,6005618 0,329861 0,7040963 1

"Comm" 0,8709466 0,8277004 0,7887896 0,8049003 0,6933936 0,8828584 0,6355057 0,771385 0,6307007 1

"PrioGest" 0,8660789 0,8090875 0,7777618 0,819216 0,686787 0,8582772 0,6529815 0,8345807 0,6029345 0,8557281 1

"Orga" 0,9259259 0,8492102 0,8182019 0,7238108 0,6532719 0,905949 0,7313103 0,8301727 0,5290149 0,7968235 0,9000428 1

"RtreSport" 0,7896096 0,7856649 0,7990237 0,774001 0,6041679 0,8289065 0,7405291 0,8124142 0,4448448 0,8107804 0,876731 0,8281271 1

"Bllttrie" 0,816523 0,6621689 0,6646137 0,7320446 0,5712692 0,8039999 0,5596856 0,7473695 0,5629303 0,8133383 0,7977037 0,7470317 0,7446302 1

"Abnment" 0,5526735 0,7637845 0,7253841 0,8253132 0,723084 0,7331255 0,4859928 0,8345468 0,6164883 0,6715478 0,7175242 0,6660424 0,7168782 0,599197 1

"PtDeriv" 0,7087836 0,8029382 0,8136213 0,8263389 0,6522661 0,8273361 0,6405126 0,8709399 0,6162337 0,7246714 0,8336598 0,7704169 0,7531405 0,7372085 0,8371667 1

"formt" 0,7375767 0,7343942 0,8445134 0,6883945 0,6969445 0,8329303 0,6706982 0,564776 0,4439794 0,7446549 0,6461807 0,6914782 0,6163878 0,623986 0,6097788 0,7287699 1

"Fonctmt" 0,7096979 0,8000361 0,7465836 0,6780083 0,5918324 0,8208894 0,7024187 0,8045567 0,5047762 0,7560629 0,7814153 0,8110833 0,795807 0,6680554 0,7813836 0,7311006 0,612925 1

"PersSp" 0,8581647 0,917206 0,8587294 0,8238255 0,7529687 0,8724583 0,6688732 0,8789945 0,7204414 0,8236825 0,8913506 0,8888134 0,7695265 0,7064921 0,6969084 0,8415426 0,7084495 0,7391018 1

"PersAd" 0,8333333 0,9553615 0,8680923 0,8584732 0,7839263 0,8949008 0,6639528 0,893338 0,7300405 0,8616812 0,8660789 0,8611111 0,7799802 0,7035996 0,7864969 0,8320503 0,7260521 0,8110833 0,9424487 1 TOTAUX : 33 rouges 6 bleus 9 bleus 8 bleus 9 bleus 3 bleus 7 bleus 0 bleu 7 bleus 0 bleu 5 bleus 3 bleus 4 bleus 4 bleus 0 bleu 3 bleus 2 bleus 0 bleu 1 bleu 0 bleu 71 bleus 5 rouges 6 rouges 4 rouges 1 rouge 0 rouge 5 rouges 0 rouge 3 rouges 0 rouge 2 rouges 4 rouges 2 rouges 0 rouges 0 rouges 0 rouges 0 rouge 0 rouge 0 rouge 1 rouge 71 verts 6 verts 3 verts 4 verts 5 verts 10 verts 2 verts 10 verts 1 vert 7 verts 3 verts 2 verts 2 verts 3 verts 5 verts 2 verts 2 verts 3 verts 1 vert 0 vert 11 roses 2 roses 0 rose 1 rose 1 rose 2 roses 0 rose 1 rose 1 rose 2 roses 0 rose 0 rose 0 rose 0 rose 1 rose 0 rose 0 rose 0 rose 0 rose 0 rose 4 noirs

343

Interprétation (n°43) Sur les 190 cases comprenant un chiffre entre 0 et 0.99 : - 33 sont rouges, couleur qui indique une très forte corrélation 0.85 < A < 0.99 : Très forte corrélation. - 71 sont bleus, couleur qui indique une bonne corrélation comprise entre 0.75 < B < 0.85. - 71 sont verts, couleur qui indique une corrélation moyenne comprise entre 0.60 < C < 0.75. - 11 sont roses, couleur qui indique une corrélation passable comprise entre 0.50 < D < 0.60. - 4 sont noires, couleur qui indique une corrélation faible, inférieure à 0.50.

Résultats en pourcentages - 92% des corrélations se situent au-dessus de 0.60. Elles sont donc satisfaisantes. 75% des corrélations se situent entre 0.60 et 0.85, elles sont donc bonnes. - 55% des corrélations se situent au-dessus de 0.75, ce qui témoigne d’une bonne corrélation. - 17%, soit plus d’1/6ème, des corrélations sont très fortes. - 8% seulement des corrélations sont jugées peu fiables.

Le tableau suivant (Tableau N°44) permet d’identifier, par le moyen d’un classement, les caractéristiques des clubs qui connaissent le plus grand nombre de corrélations de type « très forte ».

344

Tableau N°44 – Classement par corrélations « très fortes »

Rouge Bleu Vert Rose Noirs Total 0.85 < A 0.75 < B < 0.60 < C 0.50 < D < E < corrélations < 0.99 0.85 < 0.75 0.60 0.50 Personnel sportif 9 6 4 0 0 19 Personnel administratif 8 5 6 0 0 19 Fonctionnement 7 6 6 0 0 19 Priorités de gestion 7 6 6 0 0 19 Budget 6 10 3 0 0 19 Taille 5 6 6 2 0 19 Public non-initié 5 8 4 2 0 19 Niveau de compétition 4 9 5 1 0 19 Communication 4 9 6 0 0 19 Capital 3 4 10 2 0 19 Organisation 3 11 4 0 1 19 Partenariat 3 7 5 3 1 19 Répartition des 2 4 9 2 2 19 ressources Statut 1 10 7 1 0 19 Abonnements 1 10 8 0 0 19 Produits dérivés 1 3 13 1 1 19 Public initié 0 2 12 3 2 19 Rencontre sportive 0 10 6 3 0 19 Billetterie 0 3 13 2 1 19 Formation 0 8 10 1 0 19

La caractéristique qui contient le plus grand nombre de corrélations « très fortes » avec les autres caractéristiques en termes de niveau de développement est le personnel sportif. Cette caractéristique est très significative pour expliquer le niveau de développement d’un club, ce qui n’est pas un résultat surprenant. On constate que le recrutement d’un personnel administratif, le fonctionnement, les priorités de gestion et le budget constituent des caractéristiques très significatives du niveau de développement des clubs. Par contre le public initié, la rencontre sportive, la billetterie ainsi que la formation ne disposent pas de fortes corrélations avec les stades de développement.

Le tableau ci-dessous met cette fois-ci en exergue, par le moyen d’un classement, les caractéristiques connaissant le plus de corrélations de types « fortes » :

345

Tableau N°45 – Classement par corrélations « fortes » Rouge Bleu Total rouge + 0.85 < A 0.75 < B bleu < 0.99 < 0.85 Budget 6 10 16 Personnel sportif 9 6 15 Organisation 3 11 14 Niveau de compétition 4 9 13 Communication 4 9 13 Public non-initié 5 8 13 Fonctionnement 7 6 13 Priorités de gestion 7 6 13 Personnel administratif 8 5 13 Statut 1 10 11 Abonnements 1 10 11 Taille 5 6 11 Rencontre sportive 0 10 10 Partenariat 3 7 10 Formation 0 8 08 Capital 3 4 07 Répartition des 2 4 06 ressources Produits dérivés 1 3 04 Billetterie 0 3 03 Public initié 0 2 02

L’organisation est la caractéristique qui développe le plus de corrélations « fortes ». Il est alors possible de se fier à cette caractéristique pour exprimer le stade de développement d’un club sportif même si elle offre moins de garantie au regard du niveau de corrélation que le personnel administratif. De manière plus générale, le budget est la caractéristique qui comprend de manière homogène le plus de corrélations fortes, puisque 16 sur 19 d’entre elles sont considérées comme « fortes au moins ». Cette caractéristique est très importante dans la définition du stade d’un club, au même titre que le personnel sportif. L’organisation, le fonctionnement, les priorités de gestion, le niveau de compétition, la communication, le public non-initié et le personnel administratif sont aussi des indicateurs fiables. Réciproquement, les corrélations des caractéristiques, comme la billetterie, le public initié ou encore les produits dérivés, ne sont pas suffisamment significatives pour déterminer de manière précise le niveau de développement d’un club. C’est une indication intéressante, qui mérite cependant d’être confirmée par l’analyse d’autres indicateurs susceptibles de mettre en évidence une ou des tares qui affaiblissent le club dans sa démarche en faveur d’un stade de développement élevé. En outre, pour 346 définir des stratégies de management, il est nécessaire de mettre en évidence l’ensemble des caractéristiques pour souligner les forces et les faiblesses instantanées d’un club au regard de sa viabilité économique.

Conclusion Si cette analyse des corrélations permet de compléter notre recherche qualitative en précisant l’importance de chaque caractéristique, il convient de préciser que l’ensemble des caractéristiques est à prendre en compte pour pouvoir déterminer précisément le stade de développement d’un club sportif. Chacune d’entre elles apporte sa contribution, avec des intensités différentes, dans l’identification du stade de développement d’un club. Chaque cas de clubs et un cas particulier auquel il est nécessaire de ne pas négliger toutes spécificités.

3.3.3. Les graphiques en trois dimensions

En vue de démontrer la tendance générale des clubs à développer de manière homogène l’ensemble de leurs caractéristiques, l’analyse graphique comprenant trois caractéristiques significatives peut s’avérer opportune. Ces graphiques ont été construits avec l’utilisation du logiciel « R ». Ils permettent de visualiser la qualité des corrélations entre trois caractéristiques significatives. Certains points peuvent refléter la situation de plusieurs clubs, aux caractéristiques identiques. Dans le souci d’être le plus clair possible nous avons ajouté les matricules des clubs lorsqu’ils étaient lisibles. Lorsqu’un club est identifié, il peut cacher des clubs aux qualités similaires. L’utilisation de ces graphiques a pour objectif principal de mettre en évidence les tendances, plutôt que l’identification d’un club en particulier. 347 Schéma n°13 - Taille / statut/ budget

C13

C10 C23

C7 C16 C24 C2 C22 C18

C26 C28 C17 C11 C19 C15

Taille, budget et statut fonctionnent de concert.

348 Schéma n°14 - Taille / statut/ budget (plan) C13

C10 C23

C7 C16 C22

C26 C2 C18 1

C15

C11 C19 C28

C17

349 Schéma n°15 - Taille / statut/ Capital

C13

C3

C10 C23 C27 C7 C21 C14 C2 C22 C18 C20

C11 C28

C17 C15 C19

Taille / statut/ Capital sont fortement liés.

350 Schéma n°16 - Niveau de compétition / Organisation / rencontre sportive

C5

C10 C13 C23 C27 C9 C19

C26 C20

C28 C12

Les 3 variables évoluent conjointement. Il est difficile d’avoir un niveau d’organisation élevée sans un niveau de compétition élevé. Certains clubs peuvent avoir un niveau de compétition élevé malgré un niveau d’organisation faible. On constate que C19 a un niveau d’organisation faible au regard de son niveau de compétition. Pour C26, l’équilibre est assuré.

351 Schéma n°17 - Budget / Organisation / Rencontre sportive

C27 C23 C13

C10

C11 C26

C12 C7

Les 3 variables sont corrélés mais il y a plusieurs cas atypiques : C15, C18. C19, C20.

C28

352 Schéma n°18 - Répartition ressources / Communication / Partenariat

C23 C10 C21

C19

C27

C2

C6

C9

353

Les deux schémas n°13 et n°14 mettent en évidence les relations des stades de développement des clubs sportifs sur la base de la taille, du statut et du budget. Le premier s’inscrit dans une démarche non linéaire, le second propose une présentation à partir d’un plan moyen. On peut constater que les relations sont relativement satisfaisantes. C13 manifeste un niveau de développement élevé, concernant notamment la taille, alors que C23 et C22, pourtant de niveau de budget et de statut équivalent, disposent de tailles inférieures. Dans le schéma n°13, C23 est situé sur la courbe, car les caractéristiques du club sont équilibrées au stade 4. Il en va de même pour C28 qui a un niveau de développement de degré 1 dans toutes les composantes représentées dans le graphique, au même titre que C24 pour un stade de développement de niveau 2. . En revanche, C17, C18 et C28 situés sur la partie gauche du graphique, sont dans une situation de développement sommaire. Le schéma n°15 relie la taille, le statut et le capital. Il ne modifie pas fondamentalement les résultats obtenus. On constate que C3 et C21 se situent sur la courbe principale du fait de l’homogénéité du stade de développement de leurs caractéristiques. C13 témoigne de sa force économique, au contraire de C17, C18 et C28. C19 met en évidence une structure de développement peu équilibrée avec un niveau de compétition d’un niveau bien plus élevé que les deux autres caractéristiques. C15 dispose d’un capital et d’un statut de bon niveau, alors que sa taille n’est pas en relation. Le schéma n° 16 relie les caractéristiques du niveau de compétition, de l’organisation et de la rencontre sportive. On constate que C9 dispose de caractéristiques hétérogènes, contrairement à C26 et C12. En revanche, C13, C23 et C27 ont une forte homogénéité de leurs caractéristiques de niveau 4. Le schéma n°17 relie le budget, l’organisation et la rencontre sportive. C13, C23 et C27 sont confortés dans leur niveau de développement homogène. On constate que C19 a un budget supérieur aux caractéristiques de l’organisation et à la rencontre sportive. C15 et C20, à un moindre degré, souffrent de la même hétérogénéité, alors que C18, avec un budget réduit dispose d’un critère d’organisation et de rencontre sportive d’un niveau supérieur. Enfin, le schéma N°18 relie la répartition des ressources, la communication et le partenariat. C13 tire toujours son épingle du jeu dans l’excellence. C17 a des caractéristiques déséquilibrées en termes de stades de développement, notamment en matière de communication (niveau 1), alors que 354

C9 a une communication plutôt supérieure (niveau 2). C16 témoigne d’une insuffisance dans la répartition de ses ressources (niveau 1) eu égard au niveau de développement des autres caractéristiques (niveau 3).

4. Utilisation du modèle

La réalisation de ce modèle consiste à proposer un nouveau cadre de conceptualisation aux clubs sportifs. L’identification des stades de développement des clubs sportifs est susceptible de proposer des solutions pour une meilleure gestion des clubs sportifs. Il s’agit d’analyser les changements de dimension afin de comprendre les raisons qui conduisent les clubs sportifs à accéder à un stade de développement supérieur par la contrainte. Il s’agit alors d’identifier les changements de dimension (4.1), puis de déceler les catalyseurs conduisant à ces évolutions (4.2).

4.1. Les changements de dimension perçus par les dirigeants La suite de notre analyse se propose de comprendre les divers changements de dimensions observés par nos interlocuteurs. Notre grille de lecture permet de comprendre les diverses formes revêtues par les clubs sportifs mais comme l’explique GODENER [1996]430, les modèles de métamorphose (MDM) n’indiquent pas précisément quand s’imposera un changement de dimension. En vue de proposer un outil de recherche à l’amélioration de la gestion des clubs sportifs, nous avons souhaité comprendre les raisons conduisant au passage d’un stade à un autre. Précisément, il s’agit d’être en mesure d’anticiper les moments où il devient nécessaire à un club de se transformer et de passer au stade suivant. Plus qu’un cadre d’analyse, il s’agit de construire un instrument d’anticipation et de préconisation au changement, de manière à éviter les situations de mutations floues ou les crises importantes au sein des clubs. Une des principales explications à la disparition des clubs pourrait provenir de leur mauvaise adaptation aux périodes de transition. Il semblerait qu’un club qui se professionnalise est obligé de passer

430 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 123. 355 d’un stade à un autre, sans pour autant être en mesure d’analyser tous les obstacles et les dangers qui se dressent devant la tâche entreprise. Or, un passage mal exécuté peut aboutir à un déclin de l’entreprise, voire à sa disparition.

4.1.1. Les résultats ressortant du terrain

Nous avons réalisé une étude lexicale pour déceler les changements de dimensions observés par nos interlocuteurs au sein de chacun de leur club. Nous avons défini les mots qui semblaient exprimer une véritable évolution, en vue de mesurer la perception des phases de transition des dirigeants de clubs. Rappelons qu’entre deux stades de développement qui s’apparentent à une croissance régulière, intervient une phase de transition structurelle qui constitue une période de transformation majeure et radicale. À l’issue de celle-ci, l’entreprise se révèle métamorphosée structurellement et en situation de réponse aux exigences du stade suivant. Ces phases interviennent lorsque le fonctionnement actuel de l’organisation affiche des dysfonctionnements importants au regard des nécessités de gestion du club. Arrivée à un certain seuil, l’organisation doit mettre en place des mécanismes pour passer au stade suivant en vue de produire une meilleure compréhension de son environnement et de ses conditions de croissance ou de survie. Ainsi, l’analyse lexicale a porté sur plusieurs mots parmi lesquels « révolution » ou « révolutionnaire », « changement important » ou « essentiel », « une dynamique », « un cap », « un tournant » ou « un virage », « une transformation », « grâce à », « radical », « majeur », « levier ». Chaque fois que ces mots ont été utilisés, nous avons repris la phrase émise par notre interlocuteur pour déceler s’il était véritablement question d’un changement de dimension. Au bout de cette analyse, les périodes qui ont été estimées comme des périodes d’évolution majeure par nos interlocuteurs sont finalement nombreuses. Nous les avons rassemblées pour former des catégories au nombre de 5 : 1. 22 cas de périodes d’ « après résultats sportifs positifs » 2. 17 cas de formalisation 3. 11 cas d’amélioration de la production 4. 13 cas de concours d’un tiers 5. 17 cas de médiatisation

356

4.1.1.1. La période « d’après résultats sportifs positifs » Les situations analysées ont été les suivantes : - Dix situations concernaient la montée au niveau professionnel ou au plus haut niveau, à l’exception d’un cas qui représentait, cependant, une montée dans la division supérieure, mais pas au plus haut niveau. - Huit phases étaient liées à l’obtention d’un titre dans les divisions « élite ». - Sept situations concernaient une grande performance sportive, comme la participation à une finale nationale ou à une épopée européenne sans réussite finale.

Montée d’une division : Les cas de C3, C4, C6, C8, C10, C11, C15, C17, C19 et C28 Les clubs ayant remporté un titre dans une division autre que l’Elite ont pu être promus à la division supérieure. Cette nouvelle situation leur a permis d’entrer, à l’exception d’un seul d’entre eux, dans le cercle fermé des clubs de haut niveau et de se structurer de manière importante. Pour C19 et C10, il a été question de la construction de nouveaux édifices, l’un avec un lieu de réception pour les sponsors (Club-house), un centre de formation et un terrain d’entraînement, l’autre avec la construction d’un nouveau stade. Pour C15, C11 et C8, cette promotion a été à l’origine de la constitution d’une société, notamment pour se mettre en règle avec les obligations de la Ligue (C8). Concernant C10 et C4, leur promotion les a poussés à embaucher du personnel professionnel. C10 a multiplié son personnel à temps plein par quatre en 5 ans et C4 a commencé à rémunérer véritablement son équipe sportive et a recruté des joueurs étrangers (américains). Concernant C6, le club a créé une commission de partenariat pour gérer le domaine commercial. C10 a pu, après 2 ans de professionnalisme créer un centre de formation agréé lui permettant de conserver ses joueurs par des contrats et structurer l’équipe à long terme. Quant à C11 et C3, le premier a développé une véritable marque (C3), l’autre a pu se relancer dans la vente de produits dérivés qui n’existaient plus en raison d’un dépôt de bilan. Enfin, la montée a été très bénéfique pour C10 puisque son capital qui a considérablement été augmenté a été ouvert plusieurs fois à des investisseurs privés, mais l’un d’entre eux détient désormais plus 95% des parts. Pour C17 qui a monté de 3 divisions en 5 ans, la phase principale de restructuration a été engagée lors de son passage dans la division « Elite ». 357

La restructuration : les cas de C2, C7, C12, C14, C16, C21, C25 et C27 Pour de nombreux clubs ayant remporté un titre important, il a été question d’une véritable restructuration à la suite de cette performance sportive. Cette structuration a pris plusieurs formes. Pour C21, le titre a été accompagné d’un déménagement du club afin de disposer d’une nouvelle salle de haute technologie. Pour C16, C14, C12 mais aussi et encore pour C21, il a été question d’une véritable formalisation de la structure de direction du club. Lorsque C16 parle en effet de professionnalisation, il entreprend une différenciation entre les professionnels et les amateurs et il obtient l’utilisation exclusive de la salle. C12 et C7 avaient souhaité créer une société, projet que seul C7 avait pu faire aboutir. Enfin, C27 et C16 ont réussi à obtenir un titre européen, ce qui a conduit C27 à se constituer comme une véritable marque et C16 à créer une société pour gérer l’image du club, tout en s’engageant dans un véritable processus de professionnalisation et de délégation dans les structures mêmes du club.

Performances sportives : Les cas de C5, C7, C9, C12, C13, C22 et C23 Pour certains clubs, les performances sportives obtenues sont suffisamment remarquables pour être à l’origine d’une période de développement majeur. Ainsi C22 a multiplié ses abonnements, C5 est devenu un lieu d’animation de la ville, C23 et C13 sont connus nationalement, voire internationalement, par le grand public entraînant une forte restructuration du club, C12 a rempli sa nouvelle enceinte et s’est professionnalisé et enfin C9, C7 et C1 ont connu aussi un processus de professionnalisation. En fin de compte, c’est une véritable image positive qu’ils ont ainsi obtenue, laquelle suppose un nouveau potentiel de « rentrées d’argent » et un engouement populaire qu’il convient de transformer en « réussite » économique, en vue de satisfaire les ambitions sportives du club. Chacun a su développer son aura.

Pour conclure, il semblerait que les résultats sportifs constituent une cause essentielle de la restructuration des clubs. Il existe, cependant, des exceptions, fondées sur de nouveaux projets économico-sportifs. Ainsi, malgré une descente en division inférieure fondée sur un dépôt de bilan, C26 a connu une nouvelle vague de structuration avec l’arrivée d’un investisseur important. D’un autre côté, C12 a pu participer à la Ligue européenne après avoir été considéré comme champion à la suite du dépôt de bilan du premier, mais aussi du second du 358 championnat. Les deux clubs ont été rétrogradés malgré des résultats sportifs très satisfaisants dans la mesure où ils n’étaient plus économiquement viables. La recherche de résultats sportifs ne structure donc pas toujours les clubs, elle les conduit à prendre des risques économiques qui les fragilisent et les amène à la faillite et, donc, à une restructuration.

4.1.1.2. Le processus de formalisation de l’activité Nous définissons la formalisation comme la détermination précise des postes et des tâches à accomplir, le passage du simple bénévolat au salariat, la transformation organisationnelle du club, l’évolution des circuits de communication internes et le développement d’un état d’esprit plus fonctionnel. Dans les 18 cas de formalisation, 3 catégories se dégagent : les restructurations (4), les créations de société (7) et enfin la mise en place d’un processus de professionnalisation (7).

Nouvelle structuration : Les cas de C6, C13, C10, et C24. C13 a mis en place ce qu’il appelle un projet moteur qui a pour objectif de mobiliser l’ensemble de l’organisation (sportive et administrative) pour la même cause. Depuis cette mise en place, le club a pu obtenir de bons résultats tant sportifs qu’économiques. La poursuite de ce projet est considérée comme une période majeure du club. C10 est un club qui a fait l’objet d’une restructuration singulière dans la mesure où il est né d’une fusion entre deux clubs en vue d’atteindre le plus haut niveau. Cette stratégie a fonctionné en termes de résultats sportifs avec la montée de deux divisions en cinq ans. C6, à la suite de soucis financiers, a choisi de se restructurer en créant plusieurs commissions dont deux ont été d’une importance vitale, à savoir la commission animation et la commission de sponsoring, qui ont permis de développer et de donner une autre dimension au partenariat. Il en de même pour C24 qui a choisi aussi de restructurer son organisation par un système de commissions et un comité de pilotage. Il en a résulté un changement radical des procédures et la détermination précise des tâches de chacun.

Création de société : Les cas de C5, C8, C11, C12, C15, C17 et C27 Pour certains clubs, la création d’une société a été considérée comme une période majeure de leur développement et de la professionnalisation du club. 359

Ainsi, une fois la société créée, C5 a embauché des salariés. C11 a choisi de créer une société (SASP) afin de salarier un président totalement impliqué dans la gestion du club (lequel avait subi de graves défaillances de gestion) et de disposer d’un personnel permanent. Enfin, Malgré une première tentative inaboutie, C12 juge avoir mis définitivement le pied dans l’ère de la professionnalisation. Pour C27, C15 et C11, il est question d’un véritable changement d’état d’esprit. La création de la société a permis de distinguer clairement le secteur professionnel de l’amateur. Il en est de même pour C12 qui, à sa deuxième tentative, a ressenti ce changement. Enfin, C8 estime que cette transformation est primordiale dans son ensemble, car elle constitue une base nécessaire à la restructuration du club.

La professionnalisation : Les cas de C3, C12, C14, C20, C21, C23 et C27 Pour d’autres clubs, la formalisation a pris la forme d’une professionnalisation de ses membres. Ils ont parié sur un personnel salarié, synonyme de compétences pour eux. Ce pari a été un élément déterminant de leur développement. Le processus de professionnalisation s’est avéré une période majeure pour C23, C21, C20, C14, C12 et C3 dans la mesure où la compétence des salariés a permis de répondre à un niveau d’exigence élevé comparable à celui des entreprises traditionnelles. Enfin, pour C27 et C14, la professionnalisation a consisté d’abord à structurer le club, l’un en faisant entrer directement une entreprise de communication au sein même de l’organisation (C14), l’autre en créant un secteur comptable formalisé.

La formalisation peut donc constituer un élément important dans le développement du club dans la mesure où les postes se créent au fur et à mesure des besoins exprimés, les statuts de l’organisation changent, une sectorisation s’établit et des systèmes de projets se mettent en place. En d’autres termes, ces éléments montrent une certaine tendance du club à ressembler dans sa forme, mais aussi dans son fonctionnement, à une entreprise, laissant de côté les caractéristiques informelles du bénévolat. Plusieurs contre-exemples existent cependant comme C28, C24, C19, C17, C15, C8, C7, C2 et C1, lesquels fonctionnent encore avec beaucoup de bénévoles. Certains clubs comme C28 et C15 n’ont pas trouvé d’intérêt à une professionnalisation poussée des personnels administratifs, le premier en raison 360 de son stade de développement, le second parce qu’il est aidé par des « retraités qualifiés et passionnés» aux postes de dirigeants. Enfin pour d’autres clubs (C24, C9, C7 et C4), la création d’une société n’a pas été identifiée comme une période charnière, elle a été perçue plutôt comme la continuation de la construction du club. Si pour C9 la décision était d’ordre politique, pour C4, la révolution n’a été effective que sur un plan philosophique, alors que pour C7 il s’agissait d’un simple problème d’organisation.

4.1.1.3. L’amélioration de la production : Extension majeure de locaux : Les cas de C2, C4, C6, C9, C12, C19 et C21. L’amélioration de la production a pu être obtenue par l’intermédiaire de constructions ou de rénovations d’édifices. C’est le cas de C19, C12 et C6 qui ont pu améliorer leur prestations leurs prestations concernant les relations publiques. La mise en place d’un nouvel éclairage dans le stade a permis à C19 de proposer des matchs en soirée, la construction d’un Club House, un lieu dédié à ses supporters (Espace Supporter et une boutique) et disposant d’une salle de réception pour accueillir les VIP. C6 a lui aussi pu développer des relations publiques en construisant un club house en vue de resserrer ses liens avec les partenaires et de devenir un lieu d’animation local. Enfin, grâce à sa nouvelle enceinte sportive, C12 propose désormais des loges et des prestations dînatoires. Ces relations publiques ont été très importantes pour améliorer l’intérêt des partenaires pour le club. Pour d’autres clubs, l’extension de locaux a permis de professionnaliser l’organisation tant en termes de salariés qu’en termes de fonctionnement. Ainsi, la taille et la qualité de l’enceinte, mais aussi les attentes de son environnement, ont obligé C12 à se comporter comme une organisation professionnelle et professionnalisée, à l’image d’une entreprise. Depuis la mise à disposition d’une enceinte sportive de qualité, C9 et C2 cherchent la pérennité et l’ancrage dans leurs localités. C12 et C4 estiment que, pour le premier, l’enceinte et, pour second, la création d’une boutique, leur a permis de se diversifier. C4 a désormais la volonté de créer une gamme débordant le cadre sportif. C12 a pu engager de nouvelles actions commerciales et politiques ce qui lui a permis de développer son budget et d’améliorer ses 361 résultats sportifs. C’est l’expression d’un « cercle vertueux »431, la réalisation de la corrélation entre le budget et les résultats sportifs. Enfin, C21 a connu un déménagement d’une ville à une autre ville voisine, lui donnant la possibilité de disposer d’un palais des sports 10 fois plus grand. Toutes les activités inhérentes au spectacle sportif ont pris une autre dimension.

Informatisation : Les cas de C5, C11, C12 et C27. L’amélioration de la production pour certains clubs a pu être obtenue par le moyen de l’informatisation. Si la vente de produits dérivés n’est pas encore très importante sur Internet, la vente de billets en ligne est devenue essentielle. Pour quatre clubs, il est question d’une véritable révolution tant l’impact de ce type d’outil a été important. C’est le cas de C27, C12 et C5 qui ont élargi et diversifié ainsi le potentiel de leur billetterie. Enfin pour C11 et C12, l’informatisation de la billetterie améliore le processus de professionnalisation, avec un meilleur service offert à son public et une information comptable immédiate permettant une meilleure réaction commerciale eu égard aux contraintes économiques. La population se propose de voir un spectacle.

Ainsi, l’amélioration de la production passe par la construction d’édifices plus fonctionnels ou leur agrandissement, par la création d’annexes propres au domaine commercial ou encore par l’amélioration du système de distribution comme Internet. Lorsque ces projets sont mis en place, ils peuvent constituer une évolution majeure dans le club. Cependant, dans notre échantillon, nous retrouvons quelques contre-exemples. Par exemple, malgré une enceinte récente, C23 regrette de ne pas avoir un stade techniquement assez évolué qui lui permette, en outre, de créer un lieu de vie pour la ville. Malgré un agrandissement récent, C14 a projeté de construire une nouvelle salle financée sur des fonds privés, notamment pour la construction de loges, car il juge la surface encore insuffisante eu égard à ses besoins. C16 a eu la possibilité de disposer seul de sa salle, mais celle-ci ne correspond plus parfaitement aux besoins du club. C4 a changé de salle, mais sa capacité ne suffit toujours pas puisque son taux de remplissage est proche encore des 100%. Il projette de construire une salle qui double la capacité. Quant à C2, si l’enceinte a permis de

431 Le club vient d’être champion de France, après avoir participé, chaque saison depuis 5 ans, au dernier carré final. 362 structurer le club, elle reste encore un outil insuffisant eu égard aux ambitions du club.

4.1.1.4. Le concours d’un tiers Pour certains clubs, l’investissement en temps ou en capitaux d’un nouveau Président a été considéré comme providentiel. Il fait parfois évoluer le club de manière significative, soit pour son management, pour ses compétences, pour sa notoriété mais surtout pour son investissement au niveau financier. Il convient de différencier deux catégorie, à savoir le concours d’une personne à la gestion quotidienne du club et l’ouverture du capital à une personne.

Le concours d’une personne à la gestion quotidienne du club : C5, C9, C10, C14, C15, C16, C18, C22, C27, C28, Pour de nombreux clubs, la contribution d’une personne intervient principalement dans la formalisation. Pour C27, C14 et C10, le Président a permis de changer la structure du club, de la professionnaliser et d’impliquer une régie publicitaire externe reconnue. Le club a pris une nouvelle dimension grâce à cette politique. Pour C22 et C16, le terme clé est le « projet ». Si pour C22 les projets sont au cœur de son organisation, pour C16 un projet de structuration des clubs de sa discipline à l’échelle nationale avec la Ligue a été engagé, en vue de mettre en place une « stratégie de marque d’entreprise ». Pour d’autres clubs, le Président, le DG ou même de simples dirigeants ont été à l’origine cette fois-ci d’une amélioration de la production. Ainsi, au sein de C15 (le président) et de C5 (le DG), l’action d’une personne a eu une influence déterminante dans l’entrée du club au sein du monde professionnel, notamment du fait de ses relations avec le tissu économique des partenaires potentiels. Enfin, C18 a fait intervenir deux personnes importantes dans le monde du spectacle lui permettant d’améliorer considérablement la prestation offerte le soir des matchs. Le club a pu toucher un public beaucoup plus large au point d’estimer que cette transformation est de nature « révolutionnaire », même si le mot est évidemment excessif, mais bien ressenti tel quel par nos interlocuteurs. Ensuite, certains clubs comme C14 et C9, après l’arrivée respective de leur président et de leur DG, ont obtenu rapidement des résultats sportifs satisfaisants. L’arrivée d’un président au sein de C22 a permis au club de conserver ses racines régionales profondes, grâce à l’ouverture significative du capital à un tiers qui 363 n’est autre qu’une holding dont il est majoritaire. Ainsi, il souhaite mettre à l’abri le club de toute convoitise provenant de l’extérieur qui chamboulerait la proximité que le club a développée avec son public et sa culture. Enfin, C28 est un cas singulier, puisque le concours d’un homme a permis par son activité principale d’attirer des sponsors de grande envergure, malgré le peu de notoriété du club et de sa discipline. De ce fait, le club est toujours compétitif dans son championnat, malgré un tissu économique peu favorable.

Ouverture significative du capital de l’entreprise à un tiers : C5, C7, C10, C13, C14, C20, C23, C26 Certains clubs ont eu la chance d’avoir ouvert leur capital à un tiers qui a eu une influence importante sur l’évolution du club. Pour certains, cette influence s’est avérée positive en termes de formalisation. C20 a une démarche plus professionnelle depuis qu’un mécène gère le club. Il en va de même pour C5 après une ouverture de capital qui a donné une part importante à un actionnaire principal qui propose une gestion plus « professionnelle » du club. C10 a intégré dans l’équipe dirigeante des membres de l’entreprise du mécène en vue de professionnaliser le club. Il fait appel ainsi à des spécialistes pour gérer le club. C26 est passé entre les mains d’un homme d’affaires fortuné qui n’hésite pas à investir tant de sa personne que sa fortune personnelle pour permettre au club de remonter dans la division Elite. Plus qu’une structuration, le club connaît un engouement décuplé, notamment depuis la venue de joueurs de classe mondiale. Le club crée la sensation et connaît un fort suivi médiatique au niveau national. Enfin, au sein de C14, l’actionnaire majoritaire fait intervenir directement son entreprise dans la gestion du club, dans une perspective plus professionnelle de la gestion d’un club aux résultats sportifs en nette amélioration. D’autres actionnaires majoritaires (C23 et C13) ont aussi, dès leur arrivée, beaucoup contribué à l’obtention de résultats sportifs intéressants. C13 est devenu un club phare de sa discipline depuis deux ou trois ans, C23 a pu remonter dans la division suprême et a vu ses soucis financiers réglés. Pour C7, l’intervention d’un de ses actionnaires qui n’est pas majoritaire lui a permis, cependant, d’acquérir une forte compétence managériale réputée, ce qui constitue, de fait, une garantie pour les collectivités locales. Le club le considère comme une véritable caution, dans la mesure où les rapports avec les pouvoirs publics sont facilités.

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Les compétences et la situation financière des hommes sont des éléments qui peuvent s’avérer déterminants. Ainsi, leur participation peut constituer un véritable tournant dans l’histoire du club. Néanmoins, leur venue n’est pas toujours providentielle. C22 a connu des conflits internes graves qui ont conduit à la démission de son président et à sa réélection deux mois plus tard. Le Président de C23, qui avait été notre interlocuteur, s’est vu remercier la saison suivante par l’actionnaire majoritaire. La discipline connaît un fort « turnover » des dirigeants administratifs et des entraîneurs. Enfin, la venue d’un mécène important au sein de C11 a entraîné de forts investissements qui se sont avérés mal gérés, entraînant une relégation pour raisons financières et même un dépôt de bilan.

4.1.1.5. La médiatisation Le discours de nos interlocuteurs a souvent abordé la question de la médiatisation du club qui est considérée comme un changement de dimension de la notoriété du club, notamment lorsqu’il est question de diffusion télévisuelle. La télévision a permis aux clubs de sortir de l’ombre et d’intéresser des partenaires importants. Cependant, seules quelques disciplines peuvent véritablement parler de changements de dimensions à partir du moment où une chaîne de télévision a fait le choix de retransmettre les matchs : le rugby, le football et, de manière plus relative, le basket-ball. Néanmoins, certains clubs de ces disciplines n’ont pas la même médiatisation, puisque seuls ceux de haut niveau sont diffusés (à l’exception du football qui diffuse parfois des matchs de la Ligue 2 et de la Coupe de France). Pour les clubs de Ligue 1, les redevances télévisuelles de retransmission constituent les ressources principales dans le budget des clubs professionnels. Ainsi, un changement de dimension a concerné C27, C26, C24 C23, C22, C21, C19, C15, C14, C13, C11, C10, C8, C5, C4, C3 et C1. Les autres clubs n’ont la possibilité d’être diffusés que de manière très ponctuelle, ce qui ne peut constituer pour eux qu’un « effet d’aubaine » et non pas un facteur de transformation profonde des structures financières du club.

4.1.2. Comparaison avec les résultats de Godener concernant les PME

Il est intéressant de faire une comparaison avec les résultats rencontrés au sein des entreprises. Dans son analyse sur les PME industrielles, GODENER 365

[1996], dans son analyse, avait décelé sept changements de dimension. Elle ajoute que les mêmes changements de dimension avaient été identifiés au sein d’autres recherches relatives à ce pan de littérature, ce que nous confirmons. GODENER [1996]432 s’est intéressée principalement à deux changements de dimensions, la formalisation et la délégation, mais elle a mis en évidence d’autres phases intéressantes : - le développement du système d’information de gestion ; - l’extension majeure de capacité ; - l’expansion géographique ; - la délégation ; - l’ouverture significative du capital de l’entreprise à un tiers ; - la diversification ; - la formalisation.

Le développement du système d’information de gestion433 Ce changement de dimensions n’est pas contenu dans les MDM, mais l’auteur l’identifie dans ses recherches. « Il s’agit de la mise en place ou le développement de l’informatique, l’adoption d’un système de G.P.A.O. (Gestion de Production Assistée par Ordinateur), le développement de fonctions administratives qui étaient encore simplifiées ou sous-traitées, l’instauration d’un système de comptabilité analytique ». « Le SIG est un système intégré homme- machine qui fournit les informations supportant les opérations, la gestion et les prises de décision dans une organisation sociale ». L’informatisation de la billetterie et des services de communication constitue des éléments significatifs du « développement du système d’information de gestion ».

L’extension majeure de capacité434 « Elle prend la forme d’une automatisation massive de l’équipement de production, de la substitution d’une chaîne de production à l’organisation

432 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p. 433 GODENER A. (1996), ibid., p271. 434 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 284. 366 artisanale initiale ou encore d’un passage d’une organisation fonctionnant 8 heures par jour à une organisation fonctionnant en 2 (voire en 3) x 8 heures par jour. Cela peut être aussi une extension importante de locaux voire un déménagement général ». « L’extension majeure de capacité » est assimilable au changement de dimension intitulé « amélioration de la production ». Il est alors question notamment d’extension majeure de locaux.

L’expansion géographique435 C’est « la transition d’un marché régional vers un marché national et/ou d’un marché national vers un marché international ». La médiatisation des clubs pourrait s’apparenter à « l’expansion géographique ». Il semble, en effet, difficile d’identifier un changement de dimension de type « expansion géographique » dans la mesure où les clubs sont dans l’impossibilité de maîtriser l’envergure de leur marché. La médiatisation favorise l’effet d’attraction d’une population potentielle de spectateurs plus large. Or, l’importance de celle-ci est majoritairement fonction des résultats sportifs du club, mais aussi du soutien médiatique de la discipline sportive. Autrement dit, un club de discipline peu médiatisée n’aura pas le soutien national par manque de notoriété empêchant une « expansion géographique ». Les résultats sportifs ne suffisent pas à la médiatisation, mais ils sont nécessaires. La notoriété peut survenir rapidement, comme pour le Montpellier Handball lorsqu’il a remporté le titre de champion d’Europe, même si la retransmission se faisait sur une chaîne satellite. Ajoutons que l’informatisation de la billetterie a permis à une population hors localité de bénéficier d’un billet d’entrée. L’expansion géographique peut commencer par ce système, même si elle n’est pas évidente dans la mesure où le soutien des clubs de disciplines peu médiatisées est souvent local.

La diversification436 « Toute adjonction d’au moins une activité supplémentaire à l’entreprise mono-activité ou tout développement important du nombre de références ».

435 GODENER A. (1996), ibid., p298. 436 GODENER A. (1996), ibid., p298. 367

La diversification des activités du club met en évidence les efforts des clubs pour développer une marque, les produits dérivés, les activités annexes ou l’importance des relations publiques.

La formalisation437 « Le processus de formalisation est le processus au cours duquel les rôles sont attribués, les membres passifs commencent à quitter la firme, les membres actifs s’engagent dans l’organisation et des procédures de standardisation se développent. Sont alors définis le rôle de chacun, les échanges nécessaires d’informations et les circuits retenus ». Ce changement de dimension a été identifié au sein des clubs sportifs.

La délégation438 Elle exprime les « transferts d’autorité de l’ensemble d’un niveau hiérarchique à un niveau subalterne. Un ou des individus se sont dessaisis, au profit de leurs subordonnés, de prérogatives qu’ils détenaient. Un changement de dimension de type « développement de la délégation » correspond à un transfert conséquent de tâches et des responsabilités, de l’ensemble d’un niveau hiérarchique à un niveau inférieur ». Pour les clubs, le changement de dimension relatif à la délégation est intégré dans celui de la formalisation, notamment lorsqu’il est question de professionnalisation.

Ouverture significative du capital de l’entreprise à un tiers

Aucune définition n’a été proposée, mais le titre à lui seul permet de comprendre aisément de quoi il s’agit. Ce changement de dimension a été identifié au sein des clubs sportifs. Pour conclure, nous pouvons observer que les changements de dimensions rencontrés au sein des clubs sportifs de notre échantillon sont proches de ceux rencontrés par les entreprises, même si quelques spécificités relatives à l’activité même d’un club apparaissent. Cette observation confirme dans un sens la proximité des clubs aux entreprises. Il est à noter que la médiatisation et la période « d’après résultats sportifs » sont des structures spécifiques aux clubs

437 GODENER A. (1996), ibid., p231. 438 GODENER A. (1996), ibid., p236. 368 sportifs. Si les clubs ont des particularités certains domaines et processus évoluent de la même manière que pour une entreprise traditionnelle.

4.2. Les éléments catalyseurs Au même titre que GODENER [1996], nous avons choisi de poursuivre nos recherches en vue de proposer un véritable outil de préconisation. En même temps, il s’agit de démontrer l’intérêt d’un tel modèle pour les clubs sportifs. Nous avons essayé de comprendre les raisons pour lesquelles ces changements de dimension, si importants à la survie des clubs sportifs, apparaissaient. Il s’agit d’identifier les éléments qui ont été à l’origine de ces changements de dimensions. GODENER [1996]439 reprend une citation de McPhee (1990) qui souligne un point commun entre les études sur le changement : « Dans beaucoup d’études, les périodes de transition sont créées par des événements. Les événements causent et provoquent ces périodes, et servent même de points de rupture ». Ainsi, nous pouvons penser qu’il existe un élément déclencheur qui produit un changement de dimension. Il s’agit clairement de déceler les événements ou les actions qui ont permis le développement de la professionnalisation, de la médiatisation, de l’informatisation de la billetterie, de l’extension majeure de locaux ou de l’ouverture significative du capital à un tiers.

Une première constatation s’impose. Pour bénéficier d’une période faste après des résultats sportifs, il convient d’obtenir un titre au plus haut niveau, de monter d’une division ou encore de réaliser une performance sportive exaltante et inattendue. La recherche de performances sportives étant la raison d’être d’un club sportif (associée à la formation dans certains cas), l’obtention de résultats sportifs constitue un élément « détonateur » pour l’investissement dans un club sportif. Le catalyseur à ce type de période de transition est facilement identifiable, il s’agit de la performance sportive.

Concernant la nouvelle structuration, elle est souvent initiée par l’implication nouvelle d’une personne au sein du club. Pour C13, son président est l’instigateur du système de projet ; pour C10, la fusion naît de la volonté de

439 GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 270. 369 deux personnes de relancer la discipline dans la localité ; pour C6, le système de commissions a été mis en place dès l’arrivée de son président actuel. Nous n’avons pas d’informations suffisamment fiables pour expliquer les raisons qui ont amené C24 à connaître ce changement de dimension. Nous pouvons cependant remarquer que les structurations perçues comme un changement de dimension sont souvent l’œuvre de personnes providentielles, même si les contre-exemples ne manquent pas. D’autres personnes ont favorisé soit une restructuration, mais celle-ci n’a pas été reconnue comme une période majeure de renouvellement (C1, C5, C14, C20, C22 et C27) ou soit une amélioration sensible de la production (C5, C7, C9, C15 et C28). Notons que l’arrivée d’un actionnaire n’a pas permis à C11 de rester en division « élite », du fait de graves erreurs de gestion le conduisant à une relégation pour causes financières. Dans ce cas, il en résulte plutôt une déstructuration du club du fait de la mauvaise gestion de l’apport financier.

La création d’une société intronise un changement volontaire de dimension. Ainsi, pour C8, C11 et C15, il s’agissait d’abord de se soumettre aux normes imposées par leur ligue respective à la suite de leur promotion à une division professionnelle. C12 et C17 se ressemblent dans la mesure où si les seuils les obligeant à se transformer en société n’avaient pas encore été atteints, ils devaient l’être rapidement dans un projet de développement normal du club. Enfin, pour C5 et C27, il était à la fois question du franchissement des seuils, mais aussi d’un besoin de professionnalisation volontaire par la constitution d’une société. Pour C1 et C27, il s’agissait aussi de créer une vraie rupture avec le monde associatif. Ainsi, au regard de ces résultats, nous pouvons observer que les catalyseurs conduisant à la création d’une société peuvent être l’œuvre de la volonté d’une personne, d’une nécessité législative au regard des seuils fixés sur la masse salariale et les recettes du club ou encore d’un besoin de professionnalisation dans le fonctionnement du club. Nous n’avons décelé aucun véritable contre-exemple qui pourrait déroger de ces affirmations. Pour les autres clubs, la création de société n’a pas été considérée comme un fait majeur, 370 même si la professionnalisation du fonctionnement était souhaitée. Pour eux, il est surtout question de stratégie d’image (C4, C7, C9 et C12440).

Pour les 7 clubs rencontrés qui perçoivent la professionnalisation comme un changement de dimension (C3, C12, C14, C20, C21, C23 et C27), celle-ci est unanimement perçue comme un niveau d’exigence dicté par leur environnement, en similitude avec les nécessités des entreprises. Cette situation conduit les clubs à embaucher un personnel à la fois permanent, d’implication quotidienne totale à ses missions de gestion, et professionnel, témoignant donc de compétences spécifiques attestées pour accomplir une tâche déterminée. L’organisation du club fait la place belle aux délégations et à la déconcentration du pouvoir, avec un niveau accru de responsabilité pour les employés. La recherche de contre-exemples sur les fondements de cette professionnalisation a abouti à l’identification de cas de construction d’une nouvelle enceinte (C12), la constitution de la société (C5 et C11) ou la politique du nouveau président (C14 et C20). Néanmoins, paradoxalement, pour C5, C11, C14 et C20, la professionnalisation n’est pas considérée comme une période majeure. Enfin, pour C1, C6, C8, C15, C18, C24 et C28 la professionnalisation n’a pas été mise en place pour répondre au niveau d’exigence de l’environnement. C6, C15 et C24 ont la chance de disposer de bénévoles qualifiées à la gestion du club. Pour C6, C24 et C28, l’estimation du temps accordé à la gestion du club peut se satisfaire d’un personnel non permanent. Pour C1, C8 et C18, la professionnalisation du personnel est recherchée, mais les moyens financiers sont insuffisants. Ces contre-exemples ne sont pas suffisamment contradictoires pour infirmer l’hypothèse selon laquelle le niveau d’exigence environnemental incite à la professionnalisation des clubs.

L’extension majeure de locaux provient de plusieurs raisons. Pour C6, C12 et C19, il s’agissait de disposer de lieux pour accueillir les partenaires du club de manière à accroître, mais aussi propager, leur intérêt pour le club. Concernant C2, C9 et C21, les résultats sportifs ont changé les relations avec leur environnement, les incitant à disposer d’une structure plus conforme à leurs

440 La première tentative de création d’une SAOS n’a pas abouti, mais elle a été considérée comme un changement de dimension intéressant. Paradoxalement, la seconde tentative réussie n’a pas été considérée comme un changement de dimension, mais plutôt comme l’expression d’une stratégie. 371 besoins. Les attentes de leurs partenaires ont nécessité un outil plus adapté. Pour C4, la raison est la même, sauf qu’il ne s’agit pas de partenaires, mais d’un public avide de produits dérivés imposant la construction d’une boutique. Quelles que soient les raisons explicatives d’une extension majeure des locaux, il s’agissait, dans la globalité, de répondre aux évolutions des attentes de leur environnement. Celles-ci peuvent être mises en évidence par un taux de remplissage important, une désertion du stade en raison d’une faible qualité de visionnage, une demande d’animation d’après match ou une demande de produits à l’effigie du club pour montrer son intérêt. Par contre, C4, C23 et C24 ont choisi de changer ou de rénover leur salle ou leurs loges pour faire face aux attentes de l’environnement, mais cette décision n’a pas été considérée comme un changement de dimension. Pour C23 ce nouvel outil n’est pas propice à l’organisation d’un nouveau lieu de vie. Pour C14, l’agrandissement de la salle pour les loges n’était pas encore suffisant. Ces contre-exemples ne permettent pas de réfuter notre idée selon laquelle les évolutions de l’environnement d’un club favorisent l’agrandissement ou le changement de sa salle ou de son stade, avec ses annexes commerciales.

Pour les quatre clubs (C5, C11, C12 et C27) concernés par l’informatisation de la billetterie, ce système de distribution est plus en phase avec le nombre de demandes de billets et la demande développée hors de la localité. Autrement dit, les évolutions des attentes de leur environnement impliquaient un système de distribution plus élaboré. Le processus de professionnalisation a été amélioré par l’informatisation des billets. Parallèlement, C1, C3, C7, C8, C14, C16 et C18 disent avoir informatisé aussi leur billetterie, afin de satisfaire leur environnement, sans pour autant ressentir un véritable changement de dimension. Il est, cependant, difficile d’établir le moment où ces évolutions interviennent. Mais ce sont bien pour ces mêmes raisons que la billetterie s’est informatisée. Cet investissement constitue un indicateur intéressant de la professionnalisation des clubs.

Concernant le concours d’une personne « décisive » dans la gestion quotidienne du club, il est difficile de comprendre ses motivations. Il s’agit souvent du président (C5, C10, C14, C15, C16, C22 et C27), du Directeur 372 général (C5441, C9 et C28), du vice-président pour C28 ou de dirigeants liés à l’animation (C18). Pour C10 et C14, les actionnaires majoritaires le sont pour des raisons qui feraient appel à la passion du sport, mais aussi à des investissements politiques et peut-être, à terme, indirectement financiers (constitution de réseaux pour ses propres affaires). C22 est fortement enraciné dans la culture locale, ce qui peut constituer une raison fondamentale de l’implication de l’actionnaire majoritaire par l’intermédiaire d’une association. Concernant C5, C16 et C27, la passion du sport ou du club semble essentielle dans l’implication de leur président dans la mesure où ils étaient présents en leur sein avant l’ascension économique et sportive. Il en va de même pour le DG de C9, qui est un ancien joueur au sein du club. Enfin, pour C15, C18 et C28, les informations n’étaient pas suffisantes pour identifier les raisons de leur venue. La recherche de contre-exemples est difficile elle aussi. Les venues d’un président mécène ou DG au sein de clubs comme C13, C18, C19, C23 et C26 n’ont pas été perçues comme un changement de dimension et ne semblent pas avoir d’autres explications que la passion. Pour C11, le DG est un joueur reconverti qui a dû faire face à un dépôt de bilan et un licenciement.

La situation est identique pour l’ouverture du capital. De nombreuses raisons peuvent pousser les actionnaires à s’impliquer dans le club, comme la notoriété ou la participation à des réseaux commerciaux ou politiques. Pour C20, le président est connu du monde sportif comme un mécène important pour nombre de clubs de diverses disciplines. Il se dit passionné. La notoriété de C5 et de son éternel président ne sont plus à faire et sa passion pour le club a souvent été démontrée. Concernant C26, le club est aujourd’hui sous le contrôle d’un homme d’affaire important qui se propose de relever le défi de faire remonter son club de toujours dans la plus haute division. Étant originaire de la localité, il dit s’être lancé dans l’aventure par pure passion. Pour C10, les intentions étaient claires, il s’agissait de choisir un club et de l’emmener dans les hautes sphères européennes pour la gloire du club, mais aussi du groupe. Pour C13, C14, C23 et C7 les raisons sont plus floues par manque d’informations. Une fois de plus, rien de prédit clairement la venue d’un mécène si ce n’est la convoitise par la notoriété du club, les résultats sportifs du club ou encore la passion pour le club.

441 2 personnes ont été importantes : le DG au début des années 90, le président au milieu des années 90. 373

Enfin, la médiatisation pour les 17 clubs concernés provient essentiellement de la demande du public pour la discipline sportive. Le football est depuis longtemps médiatisé, le rugby aussi. Les résultats sportifs au sein de ces disciplines sportives au niveau international ont renforcé leur médiatisation dans la mesure où elles ont réuni tout un peuple à leur cause. De ce fait, la demande s’est multipliée. Mais les résultats sportifs ne font pas tout, à l’exemple d’un hand-ball performant en France, qui n’arrive pas à « décoller » dans le paysage médiatique. Pour déceler quelques contre-exemples, il convient de déterminer les clubs qui ont pu être médiatisés sans demande expresse du public, ce qui semble dénué de sens. Si de nombreuses disciplines affirment ne pas être diffusées, malgré une demande accrue d’un certain public, la notoriété, le soutien populaire et les résultats sportifs constituent des éléments fondamentaux à la médiatisation des clubs et des disciplines.

Nous pouvons observer que les clubs sont très dépendants de leur environnement puisque, selon son évolution, il sera question de professionnalisation, de sites d’expression sportive et de spectacle, de constitution de sociétés adaptées, de médiatisation ou d’informatisation du système commercial. Au départ, la discipline, les résultats sportifs, le spectacle proposé ou encore l’aura du club constituent les éléments essentiels pour mobiliser l’environnement. Le spectacle et l’aura d’un club nécessitent l’obtention de résultats sportifs dignes d’intérêt. Il n’est pas difficile d’observer l’importance des résultats sportifs dans la structuration des clubs sportifs. Reste que, parallèlement, le tissu de population et de capacité économique d’une région et l’ambition des responsables ont aussi une influence dans les stades de développement économique des clubs. De cette observation, un autre élément important apparaît, celui de la compétence des hommes. Les clubs semblent, de plus en plus, dans la nécessité de créer de véritables postes rémunérés, d’organiser leurs activités comme des entreprises et même de devenir de véritables sociétés. Aujourd’hui, les métiers du sport sont souvent assimilés à des compétences nécessaires au sein des entreprises. Ce n’est pas toujours le cas, car il s’agit d’une activité spécifique qui attire des spectateurs et des « fans » qui modifient la donne singulière de la concurrence sur les marchés par une implication personnelle des gens comparable aux choix politiques, philosophiques ou même religieux. Il en 374 résulte que si les exigences du marché sont bien disponibles dans les choix des clubs, elles ne peuvent pas les représenter entièrement. Il semblerait que les clubs sportifs sont à un tournant de leur histoire dans la mesure où la formalisation des gestionnaires se formalisent. Un de nos interlocuteurs (C1) a mentionné la détermination de plus en plus précise de son métier mais aussi et surtout sa nouveauté. Il devient aujourd’hui essentiel de tenir compte de la nécessité de formation à la gestion des clubs sportifs.

Pour conclure, il est intéressant de reprendre le modèle de GREINER [1972], fondé sur la notion de « crise » lors du passage d’une étape de développement à une autre. Une crise de compétence peut survenir lors de la transition de l’amateurisme vers le professionnalisme. Une crise de financement (recherche de subventions, de partenaires, …) intervient souvent dans le deuxième stade du professionnalisme, celui qui implique un début de concurrence financière avec les adversaires. Le sport devient ensuite un spectacle et le club peut se heurter à une crise de marché. Il a besoin non seulement d’une diversification mais aussi d’un public plus large en vue d’une médiatisation dans laquelle il est lui-même en concurrence. Enfin, le passage au cinquième stade, même pour un club bien géré, pose le problème du poids des concurrents déjà bien installés et puissants. C’est la crise de l’accession à la puissance économique. Accéder à une Coupe Européenne contre le Real de Madrid, suppose des financements importants au risque d’être délesté, chaque année, de ses meilleurs joueurs (Schéma N° 19). 375

Schéma n° 19 – Les crises potentielles dans le passage des stades de développement

Phase 1 Phase 2 Phase 3 Phase 4 Phase 5 Club à forte notoriété Crise de Croissance par l’accession à la création de puissance marque économique

Croissance par

médiatisation Crise de télévisuelle marché

Croissance par

Crise de transformation financement du spectacle

Croissance par professionnalisation Crise de compétence

Club Croissance par méconnu promotion à une division élevée

Club associatif Club professionnel

Source inspirée de GREINER [1972], Schéma n°2.

376

CONCLUSION GENERALE

377

En conclusion, il est utile de considérer l’utilité et la validité du modèle et de ses apports, de mettre en évidence ses limites et d’indiquer les nouvelles orientations qui pourraient compléter et conforter ses résultats. Il s’agit d’abord de vérifier si la question posée en introduction a trouvé des éléments de réponse satisfaisants, avant de souligner, ensuite, les zones d’ombre qui subsistent dans l’application des méthodes managériales aux clubs sportifs. Enfin, de nouvelles perspectives de recherche, fondées sur les règles de bonne gestion des clubs sportifs au regard de leur niveau de développement, seront envisagées.

1. L’utilité du modèle

Notre recherche a été organisée autour de l’application d’une méthode d’analyse particulière appliquée des clubs sportifs. Il a été nécessaire de réfléchir à un cadre conceptuel renouvelé et de construire un outil opérationnel en vue d’améliorer la gestion des clubs sportifs.

1.1. Un cadre conceptuel renouvelé Notre recherche présente le fonctionnement des clubs sportifs, ainsi que leur évolution au regard de la marchandisation du sport. Il a pu être mis en évidence la tendance des « clubs sportifs fédérés et organisés en compétition » à se professionnaliser et à s’apparenter de plus en plus à de véritables entreprises, notamment par la mise en œuvre d’un véritable management stratégique. La gestion des clubs a parfois été calquée sur le modèle de l’entreprise mais, compte tenu des spécificités de cette activité économique, ce modèle ne s’applique qu’imparfaitement. La forte hétérogénéité des clubs empêche la construction d’un modèle de gestion omniscient adapté à l’ensemble des clubs sportifs. Il n’y a pas de réponse unique et incontestable à la question : « le club est- il une entreprise ? ». Pour mieux étudier leur gestion, un cadre d’analyse propre aux clubs sportifs a été construit. Étant donné la proximité des clubs avec l’entreprise, il a paru opportun d’utiliser les Modèles de métamorphoses, dont l’intérêt de leur application sur les clubs sportifs a été justifié sur la base de la synthèse proposée par A. GODENER. Une recherche qualitative sur 28 sites, réunissant 3 clubs de football, 10 clubs de rugby, 5 clubs de basket-ball, 5 clubs de handball et 5 clubs de hockey sur glace, dont 24 sont au plus haut niveau 378 national de leur discipline, a été engagée. Les dirigeants des clubs sportifs ont été interrogés sur l’historique du club et de ses évolutions tant sportives qu’économiques ou sociales. Il a été fait appel à leur mémoire et à leur capacité à assembler, en un temps très court, l’information utile. Sur la base des informations fournies par les dirigeants des clubs sportifs, la question de recherche centrale était la suivante :

« Au regard des évolutions différenciées des clubs vers la professionnalisation de leurs activités et de leur intégration dans l’économie de marché, est-il possible d’identifier des schémas généraux d’évolution qui leur soient applicables et de mettre en évidence des stades de développement aux caractéristiques homogènes, dont la connaissance peut s’avérer utile à leur gestion ? ».

La réponse à cette question conduit à deux interrogations complémentaires, qui prennent en compte la forte hétérogénéité « économique » des clubs sportifs : - Tous les clubs doivent-ils être gérés comme une entreprise ? - Les stades de développement témoignent-ils d’une différence de développement de la discipline sportive ou d’une différence de nature dans leur intégration dans l’économie de marché, au regard de la demande potentielle de spectacles sportifs ?

Par l’intermédiaire des principes d’analyse qualitative, notamment de la « théorie enracinée », plusieurs codages ont été définis pour répondre à cette question. Notre premier codage consistait à découvrir les caractéristiques représentatives et explicatives de l’état d’un club, ce qui constituait une série d’information essentielle pour définir son stade de développement. Ensuite, il s’agissait de comprendre les évolutions de chacune des caractéristiques et de mettre en corrélation l’ensemble des caractéristiques entre elles, en partant du principe qu’il existe normalement une relation entre le niveau de développement d’une caractéristique X avec le niveau de développement des autres caractéristiques. De cette manière, la réunion de plusieurs valeurs communes des caractéristiques de certains clubs est susceptible de situer ceux-ci 379 dans le même stade de développement. Ainsi, à la suite de cette première analyse, une grille de lecture a été construite permettant d’identifier les clubs en fonction de leur évolution vers la « marchandisation » et leur rapprochement avec les caractéristiques des entreprises. Il a été ainsi possible d’identifier des schémas généraux d’évolution au sein des clubs sportifs. Il existe une tendance d’évolution des clubs sportifs. D’une extrémité à l’autre de la grille de lecture mise en place, le club passe d’une structuration associative totalement informelle, centralisée et basée sur le bénévolat à une société sportive formelle, décentralisée et professionnalisée comparable à une vraie multinationale. L’analyse permet de démontrer la forte hétérogénéité existant entre les clubs sportifs, mais elle offre aussi un cadre conceptuel de gestion propre aux clubs sportifs. De plus, chaque catégorie de clubs fait l’objet d’une description précise du niveau de développement de ses caractéristiques. Cinq stades de développement, nécessitant des méthodes de gestion plus ou moins complexes, ont été identifiés sur la base de l’échantillon. Hormis la situation dans laquelle un club, comme toute entreprise, tombe en faillite, son problème principal dans le sport européen porte sur le processus de relégation et de promotion. En cas de relégation, la demande de spectacle sportif (billetterie ou retransmissions télévisées) diminue, avec des incidences économiques importantes. Dans la situation de la promotion, il s’agit de trouver, dans un délai bref, les financements supplémentaires pour faire face à un niveau compétition économique et sportive plus élevé. Il a pu être mis en évidence l’existence d’effets cliquets non négligeables dans la gestion des clubs.

1.2. Intérêt pratique Les modèles de métamorphose appliqués aux clubs sportifs sont en mesure d’apporter des informations intéressantes. Ils sont susceptibles de constituer : 1. un guide d’accompagnement ; 2. un indicateur de contrôle des dépenses excessives ; 3. un modèle adapté et utilisable par tous les clubs ; 4. un facteur d’identification ; 5. une information sur la valorisation des clubs ; 6. un dispositif de préparation à la décision ; 380

7. un outil favorisant l’amélioration de la gestion des clubs ; 8. un instrument d’anticipation.

1.2.1. Un guide d’accompagnement

Le développement d’un club n’est pas toujours le résultat d’une volonté affirmée. Il dépend parfois d’une obligation, législative ou économique, ou encore d’une opportunité. La création d’un spectacle apprécié, l’obtention de résultats sportifs, le développement d’un concept de vie sont autant de facteurs qui attirent les populations et, de ce fait, les médias, les partenaires ou les collectivités locales. Néanmoins, il est parfois difficile de prévoir l’engouement populaire pour un club à la suite d’un événement majeur, souvent sportif. Cet attachement peut s’avérer préjudiciable pour le club dans la mesure où il crée une demande à laquelle le club doit faire face, de gré ou de force. Il convient donc de préparer le club à l’évolution rapide de son environnement en anticipant, par exemple, l’agrandissement de son enceinte sportive, en proposant de nouveaux produits dérivés ou des loges ou en l’engageant dans un investissement à long terme dans la vie communautaire. C’est pourquoi l’anticipation est un élément essentiel à la survie d’un club dans la mesure où elle permet de faire fructifier les nouveaux soutiens financiers et les recettes dégagées, tout en limitant les risques d’une prise de conscience trop tardive de ses atouts ou de ses déficiences économiques, commerciales et financières. Ainsi, le manque de compétences du personnel administratif eu égard à l’évolution sportive ou économique du club peut être compensé si le club saisit correctement l’importance de cette caractéristique dans son développement. Comme pour toute entreprise, une demande non satisfaite peut aboutir à une situation de crise, parfois mortelle. Aucun club n’est à l’abri de l’échec ou du succès. Le modèle met en évidence les étapes que les clubs, dans leur grande majorité, traversent pour mener à bien leur développement. Il sert de « guide d’accompagnement » à tous clubs désireux ou contraints de se développer. Tous les clubs sont en mesure de connaître leurs faiblesses éventuelles au regard du stade de développement dans lequel ils se situent. En disposant d’informations intéressantes sur l’évolution des caractéristiques de l’étape suivante, le club est en mesure de rectifier ses choix sur la base d’informations attestées. Cet outil permet de comprendre l’importance de l’équilibre des structures du club pour lui donner les meilleures chances de pérennité. 381

1.2.2. Un indicateur de contrôle des dépenses excessives

Depuis près de vingt ans, les cas de faillites se sont multipliés tout autant que les réussites économiques et sportives. Tous les clubs sont tentés de se structurer rapidement au regard des performances sportives des concurrents d’un même championnat et même d’homologues évoluant dans d’autres disciplines plus en lumière. L’environnement d’un club est impatient et il n’offre que peu de temps à la réussite sportive. S’il est vrai que les résultats sportifs sont très importants dans la structuration d’un club, leur recherche « extrême » peut s’avérer délicate et, parfois, catastrophique. En effet, les performances s’obtiennent très souvent par le recrutement d’une équipe sportive compétitive, ce qui implique un fort investissement en hommes. S’octroyer les services d’un joueur de talent coûte cher en termes de salaire, de transfert ou de primes de résultats. Chaque opération est un « pari sur l’avenir ». Or, ne pas obtenir les victoires escomptées peut fragiliser les comptes du club. L’investissement engagé devient trop conséquent par rapport aux ressources financières recueillies, lesquelles sont souvent trop dépendantes des résultats sportifs. Plus encore, un club trop gourmand en matière de spectacle peut investir dans un équipement trop coûteux auquel il ne peut plus faire face en termes de remboursement. De même, un club ayant la volonté de professionnaliser sa gestion est susceptible d’embaucher un personnel permanent à des coûts élevés, dont l’efficacité est souvent réduite au regard du spectacle modeste offert par l’équipe. Le modèle fournit des informations de « précaution » en vue de réduire l’importance des erreurs de gestion provenant d’ambitions démesurées des dirigeants au regard du niveau de développement du club. Il endosse un rôle d’outil de canalisation des ambitions inadaptées, engageant les dirigeants de ne pas « brûler les étapes » fondamentales dans la structuration d’un club.

1.2.3. Un modèle adapté et utilisable par tous les clubs

La diversité des caractéristiques permet à tous les clubs sportifs de personnaliser leur projet de développement au regard de leur propre situation contextuelle. Ils peuvent adapter leur projet en fonction de leur tissu économique, du potentiel de développement de leur discipline sportive ou de leur personnel administratif. La mise en évidence des contre-exemples ajoute une information essentielle concernant la possibilité de situer la qualité de gestion en fonction de sa singularité voulue ou imposée. Par exemple, le club du CSBJ de Bourgoin- 382

Jallieu doit tenir compte de la forte concurrence de l’Olympique Lyonnais au regard de leur proximité, mais aussi d’un tissu économique d’une petite ville et d’un certain isolement en raison du phénomène de « régionalisation » du rugby, discipline fortement concentrée dans le Sud-Ouest de la France, ce qui l’éloigne de la ferveur qui accompagne les autres clubs de rugby. Le club doit combiner tous ces indicateurs et choisir son projet de développement en fonction de critères qui ne sont pas nécessairement ceux qui sont retenus par les clubs de sa catégorie.

1.2.4. Un facteur d’identification

La grille de lecture se propose d’identifier, de catégoriser et de nommer les différents types de clubs existants. Cette classification permet de situer économiquement le club en indiquant son stade de développement. Un club sportif de stade 1 n’a guère d’autre point commun avec un club de stade 5 que la compétition sportive et, pourtant, le terme « club sportif » est utilisé aussi bien pour l’un que pour l’autre. Désormais, par l’intermédiaire de ce classement, il sera question d’un « club de stade 5 » lorsque l’on fera référence à un club proche de l’Olympique Lyonnais en termes de niveau de développement (onzième club mondial en 2007 avec un chiffre d’affaires prévu de 200 millions d’euros). Un « club de stade 3 » représente un club proche du niveau de développement moyen du rugby en TOP 14. Un « club de stade 2 » indique le développement moyen du basket-ball en PRO A. Cette précision signifie la mise en place de mesures de gestion adaptées à la situation d’un club. Les comparaisons nécessaires à l’amélioration des clubs gagneraient certainement à être réalisées sur la base de leur niveau de développement, en vue d’améliorer la précision des préconisations et d’éviter les extrapolations inopportunes.

1.2.5. Une information sur la valorisation des clubs

Cette classification permet de fournir une information adaptée concernant la valorisation du club. Par exemple, un « club de stade 2 » aura la possibilité de faire-valoir un niveau de développement intéressant auprès des partenaires privés et publics, les renseignant ainsi sur son importance au sein d’une localité ou d’une région. Sa classification dans la jungle des clubs sportifs peut justifier un soutien financier adapté par rapport à ses homologues du championnat ou des clubs des autres disciplines sportives. 383

1.2.6. Un dispositif de préparation à la décision

Certains schémas d’évolution sont si proches d’un club à un autre qu’il est possible de les considérer comme des schémas généraux. De plus, la recherche réalisée sur les changements de dimension renforce cette idée, puisque leur identification démontre que l’ensemble des clubs sportifs a tendance à passer, pour des raisons semblables, d’un stade à un autre, selon une trajectoire commune, mais à des rythmes, il est vrai, différents. L’amélioration de la gestion des clubs passe à la fois par la compréhension du contenu, mais aussi du processus de changement des clubs sportifs. Dans ce contexte, le modèle constitue une contribution intéressante dans la recherche d’amélioration de la gestion des clubs sportifs. Les résultats de cette partie de recherche permettent de déceler des changements de dimension, proches de ceux des entreprises traditionnelles, malgré des spécificités en termes de vocabulaire. Il en a été identifié cinq : 1. la formalisation ; 2. les périodes de résultats sportifs positifs ; 3. l’amélioration de la production ; 4. le concours d’un tiers ; 5. la médiatisation.

Ces évolutions ont été de nombreuses fois révélées par les dirigeants de l’échantillon comme des éléments majeurs dans la structuration des clubs sportifs. Cette information permet de comprendre l’importance de ces périodes pour les clubs sportifs dans leur processus de structuration. De leur issue dépend le développement du club, et, parfois, de sa survie. Pour anticiper ces périodes, il est intéressant d’établir des liens avec des évènements antérieurs. Il s’agit de comprendre ce qui peut conduire à ces changements majeurs, afin de ne pas avoir à les subir et à éviter ainsi toute réaction d’urgence. Il a été difficile de mettre en évidence des catalyseurs précis et systématiques, à l’exception de l’obtention de résultats sportifs particuliers ou de la venue d’une personne providentielle. Ce ne sont pourtant pas les seuls catalyseurs. Il y a aussi : 1. la volonté d’une personne ; 2. la nécessité législative ; 3. le besoin de professionnalisation dans le fonctionnement ; 4. le niveau d’exigence dicté par l’environnement ; 384

5. la demande du public pour la discipline sportive.

Autrement dit, les changements de dimensions semblent provenir de l’évolution de la compétence des hommes dans l’organisation, mais aussi de la demande environnementale. Néanmoins, ces deux catalyseurs font souvent suite à des performances satisfaisantes dans le domaine sportif. La pérennité d’un club passe par la performance sportive qui génère des recettes nécessaires à la structuration du club, mais, réciproquement, les résultats sportifs sont facilités par une bonne structuration du club. C’est une combinaison des deux éléments. Il est évident, cependant, que la structuration des clubs ne peut être la même d’une discipline à une autre en raison des différences en termes de notoriété, de médiatisation et de soutien populaire. Ces résultats permettent de penser que cette recherche peut apporter des informations utiles en termes de gestion des clubs sportifs.

1.2.7. Un outil favorisant l’amélioration de la gestion des clubs

L’identification du club au sein d’une catégorie permet à tout chercheur, professionnel ou dirigeant de club de se positionner par rapport à une classe sur laquelle portera l’analyse, évitant toute extrapolation hâtive qui pourrait s’avérer peu judicieuse et permettant davantage de précisions dans les hypothèses de recherche relatives à l’amélioration de la gestion des clubs sportifs. Comme pour les entreprises, les consensus en matière de gestion pourraient être facilités, car ils permettent la mise en place de mesures innovantes personnalisées des clubs sportifs à chaque stade de développement.

1.2.8. Un instrument d’anticipation

L’identification d’éléments catalyseurs conduisant à un changement de dimension permet aux clubs d’anticiper la nécessité de passer à un autre stade avant l’apparition d’une crise fatale. Par l’intermédiaire de cet outil, les risques liés aux changements de dimension sont réduits par une préparation idoine, non dictée par l’urgence. 385

1.3. Intérêt théorique La recherche des stades de développement, mais aussi des changements de dimensions, constitue une approche scientifique originale. À la fin de sa recherche doctorale, A. GODENER [1996] propose de continuer son travail sur les PME industrielles en appliquant son modèle à d’autres types d’organisations. Nous avons continué ce chemin, en tenant compte de la spécificité des organisations sportives. D’un point de vue purement théorique, nous avons souligné l’importance des stades de développement dans l’application des techniques managériales. Si, parfois, les entreprises s’inscrivent dans des situations de marché de type oligopolistique (c’est le cas de l’Olympique Lyonnais ou de l’Olympique de Marseille), d’autres doivent répondre plus strictement à d’autres contraintes, selon des règles et des fonctionnements définis par des instances para-publiques comme les Fédérations. Les clubs sportifs de niveau 1 peuvent parfois être assimilées à des entreprises mixtes, tant le soutien des collectivités locales publiques est important. A la question posée « Les clubs sportifs sont-ils des entreprises ? », notre réponse est triple : - A l’instar du modèle américain, les clubs du sport européen de haut niveau s’inscrivent de plus en plus, notamment avec l’accès à la Bourse, dans une démarche d’entreprise, la recherche du profit compris. - Cependant, les situations des clubs sont très différents, en termes de médiatisation, d’organisation, de popularité ou de tissu économique adjacent. Dans ces conditions, de nombreux clubs s’inscrivent dans une fidélité territoriale qui les différencie des entreprises et engage les collectivités locales. Il est difficile alors de parler de délocalisation, ce que les franchises américaines permettent. - Enfin, si les clubs sportifs doivent appliquer les techniques managériales adaptées, ils représentent plus qu’une unité de production. Ils ont des supporters, des « fans », des partenaires, autant de facteurs dont la portée économique est inconnue sur le long terme des autres activités d’entreprise.

Concernant l’apport à la méthodologie des MDM, son application aux clubs sportifs produit des informations intéressantes. Il a été possible de démontrer leur 386 application dans un secteur économique particulier et hétérogène. Cette méthode pourrait être applicable à d’autres domaines, car elle se prête bien à la mise en évidence des singularités d’entités économiques particulières. Cette recherche permet de confirmer l’analyse de GODENER [1996] sur les principes des MDM, les changements de dimension et la recherche de leurs catalyseurs. Cette application devrait apporter un complément original à ce pan de littérature. La théorie possède plusieurs dimensions : « la généralité », « la parcimonie », « la précision de prédiction » et « la précision explicative »442. Ce n’est qu’une fois ces caractéristiques atteintes qu’il sera question d’une théorie générale. Il convient désormais de montrer les limites du modèle utilisé.

2. Les limites du modèle

Le modèle présente de nombreuses limites. Il est nécessaire de poursuivre l’étude auprès d’autres clubs sportifs dans la mesure où nous ne nous sommes intéressé qu’à cinq disciplines sportives (le football, le rugby, le basket-ball, le hand-ball et le hockey sur glace) et où notre échantillon de clubs au sein de chacune des disciplines était relativement restreint. Il ne permet pas de développer les éléments d’une théorie générale.

Pour certains auteurs443 des MDM, il faut que les différentes caractéristiques de la firme évoluent conjointement, mais ce déterminisme n’est pas reconnu par tous444. Les MDM ne représentent qu’une tendance d’évolution. Le schéma est simplificateur. Il se peut que, en surface, un club paraisse appartenir à un stade de développement bien déterminé, mais une analyse plus poussée peut infirmer cette hypothèse ou la préciser dans sa singularité. Il a parfois été choisi de focaliser la définition des stades sur la base d’une seule caractéristique de l’organisation, rejetant ainsi le raisonnement global. Pourtant, l’existence d’une simultanéité des évolutions des caractéristiques est un schéma intéressant et sans doute plus précis. Sur cette base, il s’est agi de décrire les différents stades de

442 HAGE J., Techniques and problems of theory Construction in Sociology, New York, John Wiley, 1972, p 34, cité par STRAUSS et CORBIN (2004), « Les fondements de la recherche qualitative : techniques et procédures de développement de la théorie enracinée » (traduit de l'anglais par Marc-Henry Soulet ; avec la collaboration de Stéphanie Emery, Kerralie Oeuvray et Chloé Saas. - Fribourg : Academic Press Fribourg, cop. 2004), 342 p., p 44-45. 443 Notamment STEINMETZ, MILLER et FRIESEN,BARC DE LA PERRIERE, Op. Cit.. 444 CHURCHILL et LEWIS (1983), « Les cinq stades de l’évolution d’une P.M.E.”, Harvard l’Expansion, p 51-63 ; KAZANJIAN R. K. (1984), « Operationalizing stage of growth : an empirical assessment of dominant problems », Frontiers of Entrepreneurship Research, p 144-158. 387 développement en vue de construire un cadre d’analyse des clubs sportifs témoignant de leur hétérogénéité. Les caractéristiques des clubs sportifs ne sont pas toutes au même stade de développement, ce qui remet partiellement en question le déterminisme du modèle de base (voir schéma n°20). A part quelques cas singuliers, nous avons pu nous rendre compte que si les caractéristiques n’évoluaient pas de manière toujours simultanée ou symétrique, elles étaient souvent proches les unes des autres en termes de développement.

Schéma n°20 - Tendance d’évolution des caractéristiques d’un club

Stade 1 Stade 2 Stade 3 Stade 4 Stade 5

Production

Stade 1 Stade2 Stade 3 Stade 4 Stade 5

Organisation

Stade1 Stade2 Stade3 Stade 4 Stade 5

Gouvernance

Stade 1 Stade 2 Stade 3 Stade4 Stade5

Etendue commerciale

Le caractère généralisateur de l’étude est un peu simpliste. Une étude à une échelle plus grande permettrait de confirmer ou d’infirmer le modèle. Les contraintes en termes de temps ne nous ont pas toujours permis de connaître l’opinion de tous les dirigeants de l’échantillon sur notre classement, même si, en fin d’entretien, pour les derniers sites visités, la question leur a été posée, sans indication particulière de notre part. Il s’agissait de savoir si le modèle en construction était lisible et suffisamment significatif pour les clubs rencontrés. Après un retour sur les résultats de notre modèle, dix clubs interrogés se sont situés eux-mêmes, sans exception, au stade de développement proposé par notre étude.

388

Le manque de représentation en termes de clubs interrogés au stade 5 de développement est regrettable. Si certaines caractéristiques des clubs de notre échantillon les plus développées ont atteint un niveau de développement de stade 5, aucun club rencontré ne fait partie du stade 5. Rencontrer ce type de clubs n’est pas chose aisée compte tenu de leurs sollicitations, de leur forte activité et de leur rareté. Nos tentatives n’ont pas pu aboutir, mais nous avons pu néanmoins obtenir des informations précises de personnes proches de l’Olympique lyonnais en football. Ces données, recueillies aussi dans les journaux et articles, nous ont servi de base pour définir le stade 5.

L’utilisation de la mémoire des dirigeants est une approche intéressante, puisqu’elle a permis de révéler, dans un minimum de temps, l’évolution des clubs sportifs. Néanmoins, cette méthode n’est pas exempte de biais. La mémoire des répondants peut être sélective, des informations ont pu être dissimulées consciemment ou inconsciemment et une véritable rationalisation a pu se faire avec le temps. Néanmoins, le temps permet aussi une prise de recul qui peut s’avérer importante dans la réflexion et la compréhension des évolutions, que la lecture de textes « historiques » ne peut rendre compte.

Si 28 clubs sportifs est un nombre conséquent de sites éloignés les uns des autres, nous avons fait le choix d’en rencontrer en moyenne cinq par discipline. Nous avons préféré toucher des clubs issus de plusieurs disciplines sportives, pour mettre en évidence une tendance générale des clubs dans leur ensemble. Toute discipline peut alors se comparer à une autre discipline au regard de l’évolution économique de leurs clubs respectifs. Notre étude s’avère une première étape dans la conceptualisation des stades de développement des clubs sportifs. Il aurait sans doute été utile, pour avoir une meilleure analyse des stades de développement des disciplines sportives, de doubler notre échantillon. Cependant, une telle démarche suppose aussi des coûts importants et beaucoup de temps non seulement en termes de déplacement, mais aussi de recherche de rendez- vous et d’appels en tout genre.

Enfin, l’analyse ne tient pas assez compte de l’importance de l’homme dans la structuration des clubs sportifs. Ainsi, si des éléments évitent aux clubs de disparaître ou de connaître des échecs importants, il n’empêche que nos résultats 389 permettent d’observer l’importance des dirigeants au sein de l’organisation. Leur comportement et leurs compétences ont un rôle essentiel dans les échecs et les réussites des clubs sportifs dans la mesure où le club est une organisation fortement liée à la force des relations avec son environnement.

3. Les prospectives de recherche

A un certain stade de développement, étant donné la proximité des clubs sportifs avec la gestion des entreprises, il serait intéressant de poursuivre l’analyse en engageant une étude comparative des clubs sportifs et des entreprises en termes de fonctionnement, d’organisation et de structuration. L’étude d’autres disciplines sportives, comme le volley-ball ou le football américain, pourraient apporter de nouveaux éléments intéressants en raison de la proximité incertaine des structurations des clubs de la discipline avec ceux des disciplines que nous avons étudiées. L’analyse des clubs de water-polo pour son côté populaire et son manque de médiatisation, de roller hockey pour sa nouveauté ou encore des sports individuels comme le judo ou le tennis lorsqu’ils sont pratiqués en clubs sont susceptibles de fournir des indications différentes, surtout dans les stades inférieurs de développement. L’arrivée des « personnes fortunées ou compétentes » au sein d’un club lui a souvent permis de faire un « bond » en matière de développement. Il est nécessaire d’employer des personnes spécialisées dans le management du sport. La formation des dirigeants, même encore au stade bénévole, devient un élément important dans la recherche de viabilité des clubs sportifs. Au regard de ces résultats, nous pouvons, a contrario, nous poser la question de savoir si une PME peut s’appuyer sur les pratiques mises en place au sein de clubs sportifs. Des entreprises sont devenues au fil du temps des acteurs impotants dans une localité et elles constituent la fierté de la ville au même titre que certains clubs sportifs. C’est le cas de Michelin à Clermont-Ferrand. Nous avons d’ailleurs pu remarquer les similarités de la culture sportive avec celle de l’entreprise, conduisant de nombreuses entreprises à adopter des styles de management de plus en plus inspirés de ceux d’un coach sportif. Dans une certaine mesure, nous avons pu constater que les clubs vont davantage développer leur image vers celle des marques. Le club peut ainsi 390 porter le nom d’une entreprise et d’une marque, comme l’Adecco-Asvel. Dans ces conditions, les collectivités locales et régionales perdent une partie de leur influence économique sur le club. Cependant, il est important pour les pouvoirs publics de s’inscrire dans l’histoire d’un club prestigieux, comme lieu de vie des citoyens. Dans ces conditions, ils vont devenir eux-mêmes de véritables sponsors pour les clubs les plus développés, mais sur une base compétitive avec les partenaires privés ou, plus modestement, de complément à leurs financements. Enfin, dans une logique économique dominante, il pourrait alors être question pour les grands clubs de transformer le championnat basé sur un système de promotion-relégation en un système de ligues fermées, à l’image des quatre grands sports américains (basket-ball, football américain, hockey sur glace et base-ball). Quelques dirigeants de l’échantillon ont mentionné l’éventualité de créer un championnat stabilisé dans lequel les clubs payeraient une redevance pour participer au championnat et dans lequel ils seraient certains de rester, malgré des résultats sportifs insuffisants. Avec l’appel au marché boursier, on se trouvera alors au stade 6 du développement, celui qui n’existe encore que dans le sport américain.

Du fait de leurs origines et des valeurs morales et éducatives qui lui ont été reconnues en France et plus généralement dans le monde, le club sportif ne sont toujours pas assimilés à celle des entreprises. Cependant, le sport est devenue une activité aux enjeux économiques importants. Il lui est désormais impossible de ne pas tenir compte des règles marchandes qui s’appliquent à l’ensemble des activités économiques. Les clubs ont une double fonction : ils remplissent un service public d’éducation et de santé collective et, en même temps, ils sont producteurs de profits, d’emplois et de croissance économique. Cette dualité d’objectifs (bien public ou bien privé) dans les clubs sportifs est vécue selon des degrés et des intensités divers. Les clubs les plus médiatisés s’ouvrent et précédent même parfois l’élargissement des valeurs marchandes dans une société acquise aux règles de la compétition et de la concurrence. D’autres clubs s’apparentent encore au statut amateur, soit par obligation (manque d’intérêt économique pour la discipline ou le club sportif), soit par conviction. Il en résulte des stades de développement très différents des clubs eu égard au critère de leur gestion. 391

Depuis deux décennies, le sport de haut niveau s’inscrit de plus en plus dans une logique marchande. C’est même, dans certains cas, une condition de survie. L’exemple de l’organisation du sport professionnel américain attire de nombreux investisseurs, mais l’organisation mondiale des sports autour des Fédérations internationales et du CIO constitue un frein à cette tentation. Cependant, les actions des clubs de niveau 4 et 5 sont de plus en plus achetées par les propriétaires qui possèdent eux-mêmes des clubs dans les grandes franchises américaines. Il est probable que, dans les années à venir, la question des ligues fermées sera remise à l’ordre du jour, avec le soutien des télévisions. Dans cette perspective, la gestion d’un club sera assimilée à celle d’une entreprise. Cependant, les pouvoirs publics commencent à s’interroger sur cette opportunité et plusieurs rapports font état de la volonté européenne notamment de maintenir au sport son caractère mixte, à la fois privé par ses enjeux économiques et public pour les valeurs singulières qu’il véhicule445. Le sport risque de devenir alors un « enjeu politique ».

445 ARNAUT J.L. (2005), Independent European Sport Review, Final Version, UK Presidency of the EU, October. www.independentsportview.com 392

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Table des tableaux et schémas

TABLEAUX Tableau N°1 – Schéma de l’évolution de l’organisation sportive : les différents états du système sportif...... 27 Tableau n°2 - La transformation d’un jeu en un spectacle marchand : l’exemple du football...... 58 Tableau n°3 – Clubs de football anglais rachetés par des fonds étrangers ...... 74 Tableau n°4 - Les particularités du secteur sportif en matière de gestion ...... 89 Tableau n°5 - Les instruments européens nécessaires à la reconnaissance de la spécificité économique du sport ...... 104 Tableau n°6 – Plafonds et planchers salariaux pour les joueurs de la NBA ...... 107 Tableau n°7 - Réponses aux questions posées ...... 113 Tableau n°8 - Exemple du Stade 1 : l’entreprise à la structure informelle ...... 136 Tableau n°9 - Tableau récapitulatif des caractéristiques des sports collectifs à l’étude ...... 159 Tableau n°10 - Les Terrains et nos interlocuteurs ...... 192 Tableau n°11 - Récapitulatif des tailles par clubs...... 234 Tableau n° 12 - Récapitulatif des niveaux de compétition par clubs.... 235 Tableau n°13 - Récapitulatif des budgets par clubs...... 237 Tableau N°14 - Récapitulatif de la répartition des ressources par clubs ...... 241 Tableau N°15 - Récapitulatif des priorités de gestion par clubs ...... 248 Tableau N°16 - Récapitulatif du type d’organisation par clubs ...... 252 Tableau N°17 - Récapitulatif du fonctionnement par clubs...... 257 Tableau N°18 - Rémunérations minimales des joueurs et entraîneurs selon la LNR ...... 258 Tableau N°19 – Patrimoine estimé en fonction des revenus des sportifs professionnels...... 260 Tableau N°20 - Récapitulatif de la gestion du personnel par clubs...... 263 Tableau N°21 - Récapitulatif des statuts des clubs...... 265 402

Tableau N°22 - Récapitulatif du capital des clubs...... 269 Tableau N°23 - Récapitulatif du type de spectacle proposé par clubs.. 276 Tableau N°24 - Récapitulatif du type de billetterie par clubs...... 279 Tableau N°25 - Récapitulatif des abonnements par clubs...... 281 Tableau N°26 - Récapitulatif de l’intérêt pour le formation par clubs.. 284 Tableau N°27 - Récapitulatif des types de produits dérivés par clubs . 288 Tableau N°28 - Récapitulatif de la communication par clubs...... 292 Tableau N°29 - Récapitulatif de la notoriété envers le public non-initié par clubs ...... 294 Tableau N°30 - Récapitulatif de la notoriété envers le public initié par clubs ...... 296 Tableau N°31 - Récapitulatif de la composition du partenariat par clubs ...... 298 Tableau N° 32 - Récapitulatif complet par club ...... 300 Tableau N°33 - Les historiques des clubs sportifs ...... 303 Tableau N°34 – Les MDM appliqués aux clubs sportifs ...... 323 Tableau N°35 – Les stades de développement identifiés pour chaque caractéristique des clubs...... 334 Tableau N°36 – Le stade de développement des clubs ...... 335 Tableau N°37 - Les correspondances entre les stades de niveau de compétition et de niveau d’organisation ...... 336 Tableau N°38 - Le niveau d’organisation par rapport au niveau de compétition ...... 337 Tableau N°39 - Le niveau de compétition par rapport au niveau d’organisation ...... 338 Tableau N°40 - Les correspondances entre les stades du public initié et les stades de la formation ...... 339 Tableau N°41 - Les stades du public initié par rapport aux stades de la formation ...... 339 Tableau N°42 - Les stades de la formation par rapport aux stades du public initié ...... 340 Tableau N°43 – Les corrélations entre les caractéristiques ...... 342 Tableau N°44 – Classement par corrélations « très fortes »...... 344 Tableau N°45 – Classement par corrélations « fortes » ...... 345

403

SCHEMAS

Schéma n°1 - Positionnement de la recherche ...... 17 Schéma n°2 - Evolution de la gestion des clubs sportifs « fédérés » ....65 Schéma n°3 – Démarche conduisant aux MDM ...... 148 Schéma n°4 - L’analyse de données qualitatives ...... 197 Schéma n°5 – Logique et mode opératoire de l’analyse ...... 201 Schéma n°6 - La deuxième étape du codage ...... 202 Schéma n°7 – La conception du changement par les clubs sportifs..... 203 Schéma n°8 – La mise en relation des caractéristiques et des résultats ...... 205 Schéma n°9 – L’analyse des changements de dimension ...... 206 Schéma n°10 – Mode opératoire de la méthode d’analyse...... 220 Schéma n°11 – Interprétation du schéma de GREINER [1972] à l’évolution des clubs sportifs...... 318 Schéma n°12 - Type d’évolution des clubs sportifs ...... 330 Schéma n°13 - Taille / statut/ budget…………………………………………..349 Schéma n°14 - Taille / statut/ budget (plan)………………………………...350 Schéma n°15 - Taille / statut/ Capital ……….…………………………………351 Schéma n°16 - Niveau de compétition/Organisation/rencontre sportive …………………………………………………………………………………………………352 Schéma n°17 - Budget / Organisation / Rencontre sportive…………….353 Schéma n°18 - Répartition ressources / Communication /………………354 Schéma n° 19 – Les crises potentielles dans le passage des stades de développement...... 375 Schéma n°20 - Tendance d’évolution des caractéristiques d’un club.. 387

ENCADRES

Encadré n°1 – Résumé de l’histoire des clubs sportifs ...... 49 Encadré n°2 – Résumé de la professionnalisation des clubs sportifs.....76 Encadré n°3 – Résumé de la partie I ...... 122 Encadré n°4 – Guide d’entretien pour l’utilisation des MDM ...... 177 404

ANNEXES

ANNEXE 1 - Budgets et statuts des clubs sportifs par discipline sportive...... 405 ANNEXE 2 - Les stades de développement des clubs de l’échantillon...... 415 ANNEXE 3 - Questionnaire sur « le club est-il une entreprise ? »...... 417 ANNEXE 4 - La production des clubs ...... 426 ANNEXE 5 - Le tableau synthétique des stades de développement présenté par GODENER [1996]...... 427

405

ANNEXE 1 - Budgets et statuts des clubs sportifs par discipline sportive

Le Football

Selon les chiffres de la DNCG, dès 2002, les clubs de football composant la Ligue Nationale de Football (LNF) n’étaient plus sous forme d’associations. En effet, la totalité des clubs de Ligue 1 et de Ligue 2 étaient en société : Auxerre (SAOS), Bastia (SAOS, Ligue 2 maintenant), Bordeaux (SASP), Guingamp (SAEMS, Ligue 2 maintenant), Lens (SASP), Lille (SASP), Lorient (SASP), Lyon (SASP), Marseille (SASP), Metz (SASP, Ligue 2 maintenant), Monaco (SASP), Montpellier (SASP, Ligue 2 maintenant), Nantes (SASP), Paris (SASP), Rennes (SASP), Sedan (SASP), Sochaux (SASP), Troyes (SASP),.

Ajaccio (SAEMS), Amiens (SAEMS), Beauvais (SAOS, Nationale maintenant), Caen (SASP), Châteauroux (SAOS), Créteil (SAOS), Grenoble (SAEMS, SASP maintenant), Gueugnon (SAOS), Istres (SAEMS), Laval (SAEMS, Nationale maintenant), Le Havre (SASP), Le Mans (SAOS, Ligue 1 maintenant), Martigues (SAEMS, Nationale maintenant), Nancy (SASP, Ligue 1 maintenant), Nice (SASP, Ligue 1 maintenant), Nîmes (SASP, Nationale maintenant), Niort (SAOS), Saint Etienne (SAOS, Ligue 1 maintenant), Strasbourg (SASP), Wasquehal (SAEMS, CFA 2 maintenant).

CA du 31 janvier 2003 : DNCG – Statistiques saison 2001-2002

- LIGUE 1

En 2006 – 2007, le paysage de la Ligue 1 est sensiblement le même (Chiffres de France Football)

les budgets de la Ligue 1 en 2006 – 2007 (Chiffres de France Football)

CLUBS STATUTS LORIENT : 20,5 millions d’euros SASP NANCY : 22 millions d’euros SASP SEDAN : 22 millions d’euros SASP LE MANS : 22,5 millions d’euros SASP VALENCIENNE : 22,5 millions d’euros SASP TROYES : 22,5 millions d’euros SASP NICE : 27 millions d’euros SASP

AUXERRE : 31,5 millions d’euros SAOS TOULOUSE : 34 millions d’euros SASP LILLE : 36 millions d’euros SASP RENNES : 38 millions d’euros SASP SOCHAUX : 40 millions d’euros SASP 406

SAINT-ETIENNE : 42,5 millions d’euros SASP

MONACO : 50 millions d’euros SASP NANTES : 50 millions d’euros SASP BORDEAUX : 55 millions d’euros SASP LENS : 60 millions d’euros SASP

PARIS : 70 millions d’euros SASP MARSEILLE : 75 millions d’euros SASP LYON : 110 millions d’euros SASP

Selon les chiffres ci-dessus donné par France football le budget moyen en Ligue 1 en 2006 est de 42.55 millions d’Euros.

Chiffres de la DNCG concernant la Ligue1 Saison 2004-2005

CLUBS STATUT MARSEILLE SASP MONACO SASP LYON Supérieur à 38 millions d’euros SASP PARIS ST-GERMAIN SASP LENS SASP

BORDEAUX SASP NANTES SASP RENNES Entre 31 et 38 millions d’euros SASP SOCHAUX SASP SAINT-ETIENNE SASP

NICE SASP STRASBOURG SASP TOULOUSE Entre 21 et 31 millions d’euros SASP AUXERRE SAOS LILLE SASP

AJACCIO EURSL BASTIA SAOS CAEN Inférieur à 20 millions d’euros SASP ISTRES SASP METZ SASP

Selon les chiffres de la DNCG ci-dessus le budget moyen en Ligue 1 pour la saison 2004- 2005 est de 34.8 millions d’euros.

407

- LIGUE 2

En 2004 – 2005, le paysage de la Ligue 2 a évolué puisque 10 équipes ne sont plus dans le tableau. Beaucoup ont choisi la SASP ou la SAOS.

Chiffres de la DNCG concernant la Ligue 2 saison 2004-2005

CLUBS STATUTS MONTPELLIER SASP NANCY SASP LE MANS Supérieur à 10.4 millions d’euros SASP GUINGAMP SASP SEDAN SASP

BREST SASP CHATEAUROUX SAOS LE HAVRE Entre 7.4 et 10.4 millions d’euros SASP TROYES SASP CRETEIL SAOS

GRENOBLE SASP ANGERS SASP CLERMONT Entre 6.5 et 7.4 millions d’euros SASP REIMS SASP AMIENS SASP

DIJON SASP GUEUGNON SAOS LAVAL Inférieur à 6.5 millions d’euros SAEMS LORIENT SASP NIORT SAOS Selon les chiffres de la DNCG ci-dessus le budget moyen en Ligue 2 pour la saison 2004- 2005 est de 8 millions d’euros.

Le Rugby

- Le TOP 14

Le budget moyen des clubs de rugby du Top 14 s’élève à 8.52 millions d’euros. Selon la LNR saison 2005-2006, le budget des clubs du Top 14 sont les suivants (sociétés sportives uniquement) :

408

Budgets du TOP 14 en 2005-2006 (LNR)

Clubs Statuts Narbonne : 6 millions d’euros SAOS Pau : 6.6 millions d’euros SASP Montpellier : 6.6 millions d’euros SAOS Bayonne : 6.6 millions d’euros SASP

Brive: 6.9 millions d’euros SASP Toulon : 7.2 millions d’euros SAOS (SASP mai 2005) Biarritz: 7.2 millions d’euros SASP Agen : 7.2 millions d’euros SASP Bourgoin : 7.8 millions d’euros SASP

Perpignan : 8.9 millions d’euros SASP Castres : 9.9 millions d’euros SASP Paris : 10.1 millions d’euros SASP Clermont : 11.1 millions d’euros SASP

Toulouse : 17.2 millions d’euros SASP

- La PRO D2

Le budget moyen des clubs de rugby de Pro D2 s’élève à 2.74 millions d’euros. Selon la LNR saison 2005-2006, le budget des clubs de PRO D2 sont les suivants (Sociétés sportives uniquement):

Budget des clubs de PRO D2 en 2005-2006 (LNR) Clubs Statuts Tyrosse : 1.2 millions d’euros EUSRL Auch : 1.6 millions d’euros SASP : 1.6 millions d’euros SAOS Aix en Provence : 1.8 millions d’euros SASP Bordeaux : 1.85 millions d’euros SASP

Mont de Marsan : 2.1 millions d’euros SAOS Colomiers : 2.4 millions d’euros SASP Métro : 2.55 millions d’euros SASP La rochelle : 2.75 millions d’euros SAOS Dax : 2.75 millions d’euros SASP Oyonnax : 2.8 millions d’euros SASP

Albi : 3.1 millions d’euros SASP : 3.5 millions d’euros SEM Lyon : 3.7 millions d’euros SASP Montauban : 4.4 millions d’euros SASP

Béziers : 5.7 millions d’euros SASP

409

Le Basket-ball

- La PRO A :

Selon les chiffres de la Ligue Nationale de basket-ball (LNB) qui a effectué une comparaison des budgets entre diverses disciplines en 2006, le budget moyen des clubs de football en Ligue 1 s’élève à 35.7 millions d’euros, les clubs de football de Ligue 2 à 6.7 millions d’euros, le rugby à 6.6 millions d’euros, le basket-ball à 3.3 millions d’euros, le hand-ball à 1.3 millions d’euros et le volley-ball à 0.9 millions d’euros.

Etude des clubs de basket-ball de PRO A saison 2005 –2006 (LNB):

CLUBS STATUTS Reims : 1.6 millions d’euros ASSOCIATION Etendard de Brest : 1.7 millions d’euros ASSOCIATION Rouen : 1.7 millions d’euros ASSOCIATION(Statuts renforcés) Bourg en Bresse : 1.9 millions d’euros ASSOCIATION (SASP en 2006)

Clermont : 2.3 millions d’euros ASSOCIATION (SASP en 2006) Le Havre : 2.3 millions d’euros ASSOCIATION Hyeres-Toulon : 2.5 millions d’euros SAOS

Nancy : 3 millions d’euros SASP Paris : 3.3 millions d’euros SASP Cholet Basket : 3.3 millions d’euros SAOS Elan chalonnais : 3.8 millions d’euros SEM

Dijon : 4 millions d’euros SAOS Le Mans : 4.299 millions d’euros SEM ASVEL : 4.8 millions d’euros SASP Strasbourg : 4.9 millions d’euros SEM

Elan Béarnais : 5.5 millions d’euros SEM (SASP en 2008)

Gravelines-Dunkerque : NC SEM Roanne : NC SAOS

Le budget moyen des clubs de basket-ball en Pro A pour la saison 2005-2006 s’élève à environ 3.18 millions d’euros. Les budgets vont de 1.6 à 5.5 millions d’euros : - 4 clubs entre 1.6 million et 1.9 million d’euros - 3 clubs entre 2.3 millions et 2.5 millions d’euros - 4 clubs entre 3 millions et 3.8 millions d’euros - 4 clubs entre 4 millions et 4.8 millions d’euros - 1 club à 5.5 millions d’euros Les 6 derniers clubs en association sont les 6 clubs ayant un budget évalué entre 1.6 millions d’euros et 2.3 millions d’euros. Autrement dit, 2/3 des clubs sont des sociétés. En 2006, 2 autres clubs deviennent des SASP : Clermont et Bourg.

410

Les budgets des clubs de basket-ball Pro A selon la DNCCG en 2006 – 2007 :

CLUBS STATUT Reims 1,7 m€ ASSOCIATION Besançon 2,1 m€ ASSOCIATION Bourg en Bresse 2,1 m€ SASP Paris 2,2 m€ SASP Clermont-Ferrand 2,2 m€ SASP Hyères-Toulon 2,2 m€ SAOS

Roanne 2,3 m€ SAOS Le Havre 2,4 m€ ASSOCIATION Orleans 2,5 m€ SAEMS Cholet 3,4 m€ SAOS

Nancy 3,5 m€ SASP Strasbourg 4 m€ SAEMS Chalon sur Saône 4,2 m€ SAEMS Gravelines-Dunkerque 4,2 m€ SAEMS Dijon 4,7, m€ SAOS

Lyon-Villeurbanne 5 m€ SASP Le Mans 5,5 m€ SAEMS Pau-Orthez 6,2 m€ SAEMS Le budget moyen des clubs de basket-ball en Pro A pour la saison 2006-2007 s’élève à 3.35 millions d’euros. Il ne reste plus que 3 associations. Les 2 clubs relégués sont des associations et avaient le plus petit budget quant aux 2 clubs promus en Pro A, l’un était en société l’autre en association. 2 clubs de Pro A se sont transformés en SASP (Clermont et Roanne).

- La PRO B :

En Pro B, en 2005-2006, 6/18 clubs ne sont pas des associations, autrement dit 1/3 des clubs sont des sociétés : - Mulhouse (SAOS), budget 1.2 million d’euros - Saint-Étienne (SASP), budget 1.4 million d’euros - Saint-Quentin (SASP), budget 1.4 million d’euros - Antibes (SASP), budget 1.5 million d’euros - Orléans (SEM), budget 1.5 million d’euros - Evreux (SEM), budget 1.6 million d’euros

Les budgets s’étendent de 0.7 millions d’euros à 1.6 millions d’euros. 8 clubs ont au moins 1.4 millions d’euros de budget. Dans ces 8 clubs, 5 sont des sociétés. Le budget moyen des clubs de basket-ball en Pro B pour la saison 2005-2006 s’élève à 1.26 million d’euros. 2 clubs sont en dessous de 1 million d’euros de budget. 8 clubs ont un budget entre 1 et 1.3 million d’euros (soit la moitié). 5 clubs ont un budget entre 1.4 et 1.5 million d’euros. 3 clubs ont un budget de 1.6 million d’euros. 411

Etude des clubs de basket-ball de PRO B saison 2005 –2006 :

CLUBS STATUTS AIX-MAURIENNE : 0.7 millions d’euros ASSOCIATION ANGERS : 0.9 millions d’euros ASSOCIATION

BOULAZAC : 1 million d’euros ASSOCIATION GOLBEY-EPINAL : 1 million d’euros ASSOCIATION QUIMPER : 1 million d’euros ASSOCIATION LEVALLOIS : 1.2 million d’euros ASSOCIATION MULHOUSE : 1.2 million d’euros SAOS NANTERRE : 1.2 million d’euros ASSOCIATION NANTES : 1.2 million d’euros ASSOCIATION CHARLEVILLE-MEZIERES : 1.3 million d’euros ASSOCIATION

SAINT-ÉTIENNE : 1.4 million d’euros SASP SAINT-QUENTIN : 1.4 million d’euros SASP BESANÇON : 1.4 million d’euros ASSOCIATION ANTIBES : 1.5 million d’euros SASP ORLEANS : 1.5 million d’euros SEM

CHALON-EN-CHAMPAGNE : 1.6 million d’euros ASSOCIATION EVREUX : 1.6 million d’euros SEM VICHY : 1.6 million d’euros ASSOCIATION

Les budgets des clubs de basket-ball Pro B selon la DNCCG en 2006 – 2007

CLUBS STATUTS AIX-MAURIENNE 0,7 million d’euros ASSOCIATION ANGERS 1 million d’euros ASSOCIATION QUIMPER 1,1 million d’euros ASSOCIATION POITIERS 1,1 million d’euros ASSOCIATION MULHOUSE 1,2 million d’euros SAOS

BOULAZAC 1,2 million d’euros ASSOCIATION NANTERRE 1,3 million d’euros ASSOCIATION NANTES 1,3 million d’euros ASSOCIATION SAINT ETIENNE 1,4 million d’euros SASP SAINT QUENTIN 1,4 million d’euros SASP

LEVALLOIS 1,5 million d’euros ASSOCIATION CHÂLONS EN CHAMPAGNE 1,5 million ASSOCIATION d’euros ASSOCIATION VICHY 1,5 million d’euros SAEMS EVREUX 1,6 million d’euros ASSOCIATION BREST 1,7 million d’euros ASSOCIATION ROUEN 1,7 million d’euros ASSOCIATION LIMOGES 1,8 million d’euros SASP ANTIBES 1,8 million d’euros 412

Le budget moyen des clubs de basket-ball en Pro B pour la saison 2006-2007 s’élève à 1.38 millions d’euros (plus que l’année d’avant). 5 clubs sont en société soit 1 de moins que la saison dernière en raison des relagations puisque les 2 clubs relégués sont des associations.

Le plus gros budget des clubs de basket-ball de Pro B atteint le plus petit budget des clubs de basket-ball de PRO A. Des clubs faisant partie de la Ligue Nationale de Basket-ball, la moitié sont des sociétés soit 18/36 : 12/18 en Pro A + 6/18 en PRO B.

Le Handball

Selon la ligue nationale de Handball (LNH) lors de la saison 2005 –2006. Le budget moyen par club de handball en division 1 est estimé à 1 671 809 euros. La masse salariale moyenne par club atteint 982 245 euros (soit plus de la moitié du budget : 56%). La part des subventions en moyenne par club atteint 61.78% (soit près de 3/5 du budget). La part du partenariat privé en moyenne par club atteint 24.92% (soit ¼ du budget) mais cette part connaît une augmentation régulière. 72.22% des joueurs sont des professionnels exclusifs et 20.37% sont considérés comme pluri- actifs, autrement dit les ¾ des joueurs ne sont plus dans des situation précaires et 90% touchent une rétribution du handball. Ce chiffres est en augmentation depuis 2004-2005. Le salaire mensuel moyen net d’un joueur de handball est de 2318.62 euros en 2005-2006. Le salaire mensuel maximum (prise en compte des 5 salaires les plus élevés) net s’élève à 10 677 euros en 2005-2006. Autrement dit, bientôt l’intégralité des clubs de handball seront obligés de passer en société puisqu’ils dépassent les seuils de 800 000 euros pour les rémunérations des sportifs et 1.2 millions de recettes de manifestations sportives.

Les budgets selon la LNH en 2005-2006 :

CLUBS STATUT Villefranche: 953 000 millions d’euros ASSOCIATION

Pontault-Combault: 1 096 000 millions d’euros ASSOCIATION Angers : 1 126 000 millions d’euros ASSOCIATION Istres : 1 267 000 millions d’euros ASSOCIATION Toulouse : 1 300 000 millions d’euros SASP Nîmes : 1 365 500 millions d’euros ASSOCIATION Sélestat : 1 366 000 millions d’euros ASSOCIATION (en projet)

Créteil : 1 583 000 millions d’euros SEM Tremblay : 1 621 321 millions d’euros ASSOCIATION Ivry : 1 708 000 millions d’euros ASSOCIATION (en projet) Chambéry: 1 982 000 millions d’euros SAOS

Paris : 2 013 000 millions d’euros SAOS (SASP 2006) Dunkerque: 2 240 000 millions d’euros ASSOCIATION (en projet)

Montpellier: 3 785 000 millions d’euros EUSRL (2007-2008) 413

Le Hockey sur glace

La nouvelle fédération n’ayant pas accepté de divulguer les chiffres nous avons pu obtenir des chiffres par le biais de recherches personnelles.

Le hockey sur glace (2006)

CLUBS STATUT Villard-de-lans : 0.53 millions d’euros ASSOCIATION Dijon : 0.6 millions d’euros ASSOCIATION Mont-blanc : ASSOCIATION Chamonix : ASSOCIATION Anglet : SASP Caen : ASSOCIATION Strasbourg : ASSOCIATION Epinal : ASSOCIATION Angers : 0.9 million d’euros ASSOCIATION Briançon : SEM Morzine : 1.27 millions d'euros ASSOCIATION Amiens : 1.6 millions d’euros ASSOCIATION Grenoble : 1.6 millions d’euros SASP Rouen : 1.9 millions d’euros SAOS

Les budgets seraient constituées à 45%, 60%, voire 80%, de subventions avec peu d'augmentation annuelle. Le Hockey français vit toujours pauvrement et de manière précaire. Durablement précaire. Les clubs sont souvent en association à statuts renforcé. Il entre la TVA (ou taxe) dans leur compte.

Informations complémentaires : ROUEN Pour la saison sportive 2006-2007, le concours financier apporté par « la Ville » est de 370.000 € au titre du fonctionnement de la « SAOS RHE 76 ». (Soit environ 20% du budget)

BRIANCON Subvention 600 000 € versée à la SEM des Diables Rouges.

ANGERS Budget : 900 000 euros. Augmentation de 100 000 euros par rapport à l’année précédente. 6ème budget de la Ligue Subvention de la ville : 590 000 euros (65% des ressources) Partenariats : confirmé avec de nombreuses entreprises pour dépendre de moins en moins des subventions régionales ou locales. Nouvelles ressources : création d'une boutique (matériel pour le hockey, articles pour les supporters). http://www.hockeyarchives.info/

414

Budget moyen des clubs par discipline

Le budget moyen des clubs par discipline :

Disciplines Budget moyen (Statuts + budgets au deux extrêmes)

Football Ligue 1 35.7 millions d’Euros (société, de 20.5 à 110)

Rugby Top 14 8.52 millions d’Euros (société, de 6 à 17.2)

Football Ligue 2 6.7 millions d’Euros (société, de – de 6.5 à + de 10)

Basket-ball Pro A 3.18 millions d’Euros (majorité société, 1/5 : association, de 1.6 à 5.5)

Rugby Pro D2 2.74 millions d’Euros (société) (De 1.2 à 4.4 (voire 5.7 : Béziers))

Handball Division 1 1.67 million d’Euros (majorité association, 1/3 : société, de 1 à 3.8)

Basket-ball Pro B 1.26 million d’Euros (majorité association, 1/3 : société, de 0.7 à 1.6)

Hockey ligue Magnus 1 million d’Euros* (majorité association, ¼  société, de 0.5 à 1.9)

* Estimation personnelle

Lorsque les clubs dépassent les 1.2 million de budget environ, nombreux choisissent de passer en société.

Autres budgets de clubs sportifs:  Chambéry rugby Fédérale 1 : 700 000 euros  Grenoble Rollerhockey Elite (anciennement N1): 100 000 euros

415

ANNEXE 2 - Les stades de développement des clubs de l’échantillon

1 Lille Football – Ligue 1 Stade 4 2 Rennes Football – Ligue 1 Stade 4 3 Grenoble Football – Ligue 2 Stade 3 4 Toulouse Rugby – Top 14 Stade 4 5 Perpignan Rugby – Top 14 Stade 4 6 Agen Rugby – Top 14 Stade 3 7 Bayonne Rugby – Top 14 Stade 3 8 Bourgoin Rugby – Top 14 Stade 3 9 Toulon Rugby – Top 14 (depuis en PRO D2) Stade 3 10 Montauban Rugby – Pro D2 (depuis en TOP 14) Stade 3 11 – Pro D2 Stade 2 12 Grenoble Rugby - Fédérale1 (depuis en Pro D2) Stade 3² 13 Chambéry Rugby - Fédérale1 Stade 1 14 Lyon-Villeurbanne Basket-ball – Pro A Stade 3 15 Pau-Orthez Basket-ball – Pro A Stade 3 16 Roanne Basket-ball – Pro A Stade 2 17 Bourg-en-Bresse Basket-ball – Pro A Stade 2 18 Clermont Basket-ball – Pro A Stade 2 19 Montpellier Handball - D1 Stade 3 20 Chambéry Handball - D1 Stade 2 21 Créteil Handball - D1 Stade 2 22 Nîmes Handball - D1 Stade 2 23 Paris Handball - D1 Stade 2 24 Grenoble Hockey sur glace – Ligue Magnus Stade 2 25 Rouen Hockey sur glace – Ligue Magnus Stade 2 26 Amiens Hockey sur glace – Ligue Magnus Stade 2 27 Morzine Hockey sur glace – Ligue Magnus Stade 1 28 Villard-de-Lans Hockey sur glace – Ligue Magnus Stade 1 Le MTG était sensiblement plus proche du stade 2 avant sa promotion à la 1ère division professionnelle(TOP 14) Le FCG était sensiblement plus proche du stade 2 avant sa promotion à la ligue professionnelle (PRO D2)

416

Les stades de développement des clubs de l’échantillon (suite)

Stade 1 Stade 2 Stade 3 Stade 4 Stade 5

Club associatif à Club Club professionnel à Club Club à l’assise structure professionnalisé à l’activité diversifiée professionnel à économique informelle la structure forte notoriété confortable formelle et centralisée

Villard-de-Lans Grenoble (hockey) Bourgoin (rugby) Rennes (foot) Lyon (foot)* (hockey) Rouen (hockey) Toulon (rugby) Lille (foot) Paris (foot)* Morzine (hockey) Amiens (hockey) Agen (rugby) Marseille (foot) Bayonne (rugby) Toulouse (rugby) * Chambéry (rugby) Chambéry (hand) Montauban (rugby) Perpignan (rugby) Nîmes (hand) Grenoble (rugby) Clubs Créteil (hand) sportifs Paris (hand) Pau-Orthez (basket) Lyon-Villeurbanne Roanne (basket) (basket) Clermont (basket) Bourg (basket) Montpellier (hand)

Oyonnax (rugby) Grenoble (foot)

Hockey = Hockey sur glace Hand = Handball Basket = Basketball Foot = Football * = Estimation (clubs étudiés par le biais d’informations non-issues de l’étude terrain)

417

ANNEXE 3 - Questionnaire sur « le club est-il une entreprise ? »

Faut-il gérer un club sportif professionnel comme une entreprise ?

33 questions au chevet du sport comme activité économique professionnelle ------

A priori, pouvez-vous répondre à la question « Faut-il gérer un club sportif professionnel comme une entreprise ? »

OUI NON Globalement oui Plutôt non

Pourquoi ?

Sur cette base, nous allons poser plusieurs questions qui mettent en évidence des exceptions. Celles-ci peuvent apparaître secondaires ou importantes dans la gestion d’un club sportif professionnel.

418

1) Le sport professionnel, en France, est contrôlé par des Fédérations. Celles-ci ont un pouvoir de délégation accordée par l’Etat. Est-ce que cette situation modifie les conditions de la concurrence pour les Clubs ?

OUI UN PEU PAS DU TOUT

Connaissez-vous, hors sport, une situation comparable dans d’autres secteurs d’activité ? Lequels ?

Commentaires (facultatif)

2) Pour le respect des lois du marché propres aux entreprises, faut-il supprimer, pour les clubs professionnels, la tutelle de la Fédération (et donc celle indirecte de l’Etat) ?

OUI NON NE SAIT PAS

Observations

3) Les Ligues de football ou de rugby vous semblent-elles défendre des « valeurs » plutôt économiques ou « sportives » ?

Plutôt économiques Plutôt sportives Sans préférence

Commentaires

4) Pensez-vous que cette activité économique « contrôlée » par un organisme « organisateur » s’apparente à certaines autres activités économiques particulières comme l’ordre des médecins par exemple ?

OUI NON Un peu différent Ne sait pas

Commentaires

419

5) Les ligues américaines sont des organismes privés, sans lien avec l’Etat. Pensez- vous que cette solution rapproche la gestion des Clubs de celle des entreprises ?

OUI NON Ne sait pas

6) La NBA (par exemple) est en situation de monopole pour le basket de haut niveau aux Etats-Unis. Elle a reçu le droit d’échapper à la législation américaine antitrust. Dans ces conditions s’agit-il toujours d’une activité économique normale ?

OUI NON Activité réglementée Ne sait pas

Dans ce contexte, considérez-vous les clubs comme des concurrents ou des alliés ?

7) Cette situation s’apparente-t-elle à celle des industries nationales d’armement qui bénéficient des mêmes conditions juridiques ?

OUI NON Un peu

Commentaires

8) Trouvez-vous normal que ces Ligues puissent négocier elles-mêmes les droits télévisés à la place des Clubs ?

OUI NON Ne sait pas

Pourquoi ? 420

9) Dans les sports professionnels américains, il existe un « salary cap ». S’agit-il d’une exception au droit du travail ?

OUI NON Ne sait pas

Observation : Faut-il l’appliquer en France ?

10) Dans les sports professionnels américains, il existe le système de « draft ». S’agit- il d’une exception au droit du travail ?

OUI NON Ne sait pas

Observation : Faut-il l’appliquer en France ?

11) Aux Etats-Unis, les « barrières à l’entrée » sont considérables pour l’instauration d’une nouvelle Ligue. Pensez-vous que ce monopole soit économiquement acceptable dans une économie de marché ?

OUI NON ça dépend Ne sait pas

Commentaires

12) Contrairement aux championnats européens, le système des « franchises » aux Etats-Unis permet aux Clubs de rester dans l’Elite, sans descente dans une catégorie inférieure. Ce faisant, il donne au contexte économique de rentabilité une priorité à long terme. Faut-il appliquer ce principe aux championnats européens, qui restent, au moins partiellement, dans une dynamique sportive ?

OUI NON ça dépend Ne sait pas

Pensez-vous judicieux de vous inspirer des pratiques marketing des Américains qui sont parvenus à transformer une rencontre sportive en un spectacle récurrent? 421

13) Connaissez-vous d’autres activités économiques où l’on puisse « vendre » le contrat d’un employé (joueur) lors d’un transfert ? Les clauses de non- concurrence des employés ont-elles les mêmes effets et se rachètent-elles ?

OUI NON Ne sait pas

Observations : Est-ce que cette situation n’est pas spécifique au seul sport ?

14) Les stades appartiennent souvent aux municipalités. Celles-ci doivent-elles les rendre disponibles et gratuits pour le sport professionnel ?

OUI NON Ne sait pas

Si oui, pourquoi ? Ne s’agit-il pas d’une subvention cachée qui modifie les conditions de la concurrence de cette activité ?

15) Peut-on apparenter le sport à une activité de spectacle souvent subventionnée ?

OUI NON Ne sait pas

Comment considérez-vous le service que vous proposez par l’organisation de rencontres sportives : - un spectacle - une activité à suspens - une activité d’animation locale économique et récréative - une activité commerciale - Autres

16) L’activité sportive professionnelle ne représente-t-elle pas plus qu’elle-même ? Autrement dit, a-t-elle des effets d’externalités sur d’autres activités qui justifient ses formes de soutien ou de tutelle de l’Etat et des municipalités ?

OUI Seulement une tradition NON Ne sait pas

422

17) La lutte antidopage concerne le sport. Dans ces conditions, faut-il l’appliquer à toutes les activités des entreprises ?

OUI NON Ne sait pas

Observation : Pourquoi le sport comme activité professionnelle serait la seule activité à être concernée ?

18) Le caractère récurrent du spectacle sportif ne conduit-il pas à des comportements de corruption, d’entente ou de coalitions ?

OUI NON Ne sait pas

Comment les éviter ?

19) En Europe, l’activité d’agent de joueurs implique une licence obtenue par un examen. S’agit-il d’une entorse au droit du travail ?

OUI NON Ne sait pas

Pourquoi ces diplômes ne sont pas obligatoires pour les gestionnaires d’un Club ?

20) Le sponsoring et le merchansising sont-ils spécifiques au sport ou aux activités de spectacle ?

OUI NON Ne sait pas

Autres exemples :

21) Peut-on appliquer aux Clubs sportifs les outils de management modernes des entreprises en situation de concurrence ?

OUI NON Ne sait pas

Commentaires 423

22) Le responsable d’un Club a-t-il les mêmes responsabilités civiles et pénales que le dirigeant non actionnaire d’une entreprise ?

OUI NON A peu près Ne sait pas

Est-il responsable sur ses deniers ?

23) L’incertitude du sport est-il un gage de sa popularité, mais aussi de ses difficultés de sa gestion ?

OUI NON NE sait pas

Pourquoi le championnat anglais de football est-il le plus apprécié alors que depuis dix ans les deux plus gros budgets Arsenal et Manchester se partagent les titres ?

24) Le processus de « starisation » ne va-t-il pas à l’encontre de l’incertitude du sport ?

OUI NON NE sait pas

Pensez-vous qu’une différenciation financière trop importante entre clubs nuise au bon fonctionnement des activités sportives professionnelles ?

25) La stratégie pour renforcer les liens identitaires qui unissent les clubs aux supporteurs est-elle comparable à celle menée en faveur des clients ?

OUI NON NE sait pas

Ne cherche-t-on pas un degré de fanatisme exacerbé, proche de celui du patriotisme échevelé ?

26) Faut-il que les Clubs soient cotés en Bourse ?

OUI NON Ne sait pas Selon les sports Pourquoi ? 424

27) La propriété d’un Club s’apparente-t-elle à celle d’une entreprise ?

OUI NON Ne sait pas Selon les statuts

La ville a-t-elle un droit de regard ? Les villes sont-elles en concurrence comme les franchises aux Etats-Unis ?

28) Quelles sont selon vous les variables qui donnent de la valeur à un spectacle sportif ? - L’incertitude du sport - La nature de la rencontre tels les matches de « gala » (derby, rivalité entre deux clubs, période dans la compétition, …) - La composante locale - La qualité du spectacle - Les conditions extra-sportives - La qualité de visionnage - autres

29) Le sport a-t-il des valeurs qui transcendent son expression purement économique : (faire un classement des trois premières priorités)

a. Valeurs humaines b. Performances c. Lutte contre l’oisiveté et la criminalité d. Recherche d’intérêts collectifs régionaux ou municipaux e. Spectacle qui attire les cadres et les entreprises f. Recherche d’une image positive de la ville g. Autres. Lequels ?

30) Pour le responsable d’un Club professionnel, quelle est la priorité ? (faire un classement des trois premières priorités)

a. La rentabilité maximale du Club b. La qualité de gestion du Club sur le long terme c. Sa réussite sportive d. Son image dans la ville e. Ses ambitions politiques f. Sa passion du sport g. La formation des jeunes h. Autres. Lesquels ? 425

31) Le sport représente-t-il plus que le sport, une culture et une recherche d’identité collective qui subliment d’autres activités économiques ? Ce qui justifierait son statut d’économie mixte.

OUI NON Ne sait pas

32) Quels sont les outils de la gestion des entreprises qui sont difficilement applicables aux activités sportives ?

33) Quels sont les instruments de management applicables au sport qui ne sont pas généralisables aux autres activités économiques ?

426

ANNEXE 4 - La production des clubs

Production : un groupement sportif peut être assimilé à un établissement d’enseignement, tel que l’article L. 145-2 du Code de commerce, dès lors qu’il existe une activité de formation de jeunes joueurs accessoire à la présentation du spectacle sportif. Mais la jurisprudence exige que l’activité d’enseignement soit principale446, de sorte que seuls pourraient bénéficier du régime légal les centres de formation des joueurs qui seraient gérés par une association autonome447. Les groupements sportifs de type association sportive peuvent-ils aussi être qualifiés de commerçant ? Premièrement la loi du 1er juillet 1901 n’interdit pas aux associations de faire des actes de commerce et de réaliser des bénéfices. Ensuite l’article L. 110-1 6ème du Code de commerce considère comme acte de commerce toute entreprise de spectacle public. On devrait donc pouvoir reconnaître, en application de l’article L. 121-1 du code de commerce, la qualité de commerçant au groupement sportif qui organise des spectacles sportifs à titre habituel. Une autre question, alors, se pose. Est-ce que l’activité civile des groupements sportifs est-elle principale et leur activité commerciale accessoire ? Premièrement, les associations vivent davantage de leurs ressources commerciales que de leurs ressources civiles. Ensuite il faut se poser la question de savoir quelle est la finalité des bénéfices. L’activité commerciale sera considérée comme accessoire si les ressources ont été affectées aux missions désintéressées que poursuit l’association448. Mais tel n’est pas le cas en matière de sport professionnel449. La qualité de commerçant devrait donc être reconnue à certaines associations sportives.

Si un club ne veut pas être assujetti à la TVA ou encore à la taxe de spectacle, il convient de ne pas vendre des places sous la dénomination de billets d’entrée mais de PAF (participation aux frais). De même les recettes de la buvette ne doivent pas dépasser un certains seuil (environ 2000 euros /an)

Bibliographie : - BUY Frédéric (2002), « L’organisation contractuelle du spectacle sportif », Préface de Jacques Mestre, Centre Droit du Sport, Presses Universitaires d’Aix – Marseille. - CDOS et DDJS (2005), « Guide du dirigeant sportif en Isère ».

446 V. Cass. Civ 3ème, 11 janvier 1989, Rev. Loyers 1989, P. 136 et les nombreuses décisions citées in Dict. perm. Droit du sport, « activité commerciale des associations sportives », n°42. 447 V. C. Gerschel, les groupements sportifs professionnels: aspects juridiques, préf. C. Gavalda, LGDJ, 1994, n°440. 448 V. Reims, 19 février 1980, préc. 449 V. D. Antoine, th. Préc. N° 277 et s. 427

ANNEXE 5 - Le tableau synthétique des stades de développement présenté par GODENER [1996]

Stade de développement 1 : Stade 2 : L’entreprise à la Stade 3 : l’entreprise décentralisée Stade 4 : la décentralisation Stade 5 : la collaboration L’entreprise à la structure formelle structure formelle et centralisée à l’activité diversifiée coordonnée ETENDUE COMMERCIALE Un seul produit (ou ligne de Développement de nouveaux Diversification croissante Grande entreprise diversifiée produits) et un seul marché produits par intégration verticale ou horizontale, en utilisant la même technologie

Marché local, parfois régional. Part Elargissement de la clientèle, le Marché international de marché négligeable. marché devient régional Marché national avec ouverture sur l’exportation Positionnement sur une niche . un seul canal de distribution Un seul canal de distribution Multiples canaux de distribution PRODUCTION Développement de la capacité de Acquisition de nouvelles unités production et des locaux productives. Location de nouveaux locaux. RECHERCHE Mise au point du produit et du Recherche appliquée par équipe de Développement d’une cellule de Equipe et laboratoire de recherche processus de production recherche et/ou sous-traitance recherche ACTIONNARIAT Actionnariat familial Actionnariat qui reste familial mais Actionnariat en voie de diversification. L’ancien propriétaire qui se diversifie devient minoritaire

ATTENTION PARTICULIERE La production et la vente La rentabilité. Coordination et Développement du marché. Consolidation de l’organisation ; Résolution de problèmes et DU MANAGEMENT motivation des subordonnés Consolider les atouts financiers. exploitation maximale des innovation Priorité à l’efficacité technique et à ressources la motivation des subordonnés REFLEXIONS STRATEGIQUES Recherche d’un positionnement de Segmentation de la clientèle niche. Comportement pro-actif et prise de risques. Très forte innovation ORGANISATION Structure Structure informelle Fonctionnelle et centralisée Décentralisée par unité Décentralisée avec recherche de Unités semi-autonomes rapportant Direction solitaire géographique ou par division synergies, et développement de la à la maison-mère. Décentralisation coordination par centres de profit. Structures souvent matricielles

Management Pas d’activités de management Management directif, management Management par délégation Mise en place de coordination des Management participatif par objectif divisions

Système de prise de décision Décisions prises selon les intuitions Décisions qui deviennent plus Décisions prises après avis des du dirigeant analytiques et plus collégiales subordonnés. Recherche d’adhésion

428

Stade de développement 1 : Stade 2 : L’entreprise à la Stade 3 : l’entreprise décentralisée Stade 4 : la décentralisation Stade 5 : la collaboration L’entreprise à la structure formelle structure formelle et centralisée à l’activité diversifiée coordonnée

Système de contrôle Contrôle par les résultats sur le Suivi de coûts standards et de Contrôle de gestion organisé par Contrôle des réalisations et suivis Suivi des réalisations en temps réel marché budgets centres de profit, avec comptes de plans. Arrivée d’un responsable avec allègement du système de rendus d’activité. Veille par comptabilité, contrôle de gestion, contrôle et développement d’un rapport à l’environnement finance contrôle social

Mise en place de normes et Objectifs établis sur 3 ou 5 ans. Systèmes de planification et procédures prévisions très formalisés

Communication Informelle et fréquente Mise en place d’un système Peu de communications de la direction vers les unités d’information et de communication plus formel

Développement de la gestion de production Organisation de la production Cadre ou contremaître sous haute surveillance

Organisation de la fonction Rôle du patron aidé de VRP Cadre avec le développement de Développement de la cellule Développement du marketing commerciale multicartes relations formalisées avec la commerciale pour affiner les production prévisions

GESTION DU PERSONNEL Gestion individuelle, au coup par Dialogue et négociation avec les Démultiplication de la fonction gestion du personnel avec coup par le dirigeant instances de concertation négociation, formation, animation. Formalisation du système de récompenses

Système de récompense mis en Formalisation de primes Récompense par partage du profit : Primes collectives en fonction du place individuelles stocks options, … résultat du groupe

Source : GODENER A. (1996), « La survenue des seuils organisationnels dans les petites et moyennes entreprises industrielles en croissance », Thèse de doctorat ès sciences de gestion, Université Pierre Mendés France – Grenoble II – Ecole Supérieure des Affaires, 364 p., p 75 – 76 : Tableau 3 : Les stades de développement – synthèse des modèles de métamorphose.