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N° 2714 L‘ACTION 0 60e année du 7 au 0 20 décembre 2006 Prix : 39 (20 F) FRANÇAISE 0 paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris œ Téléphone : 01-40-39-92-06 œ Fax : 01-40-26-31-63 œ Site Internet : www.actionfrancaise.net Tout ce qui est national est nôtre

Notre dossier LA SUISSE ET LES SUISSES par Michel FROMENTOUX Des élections Guy C. MENUSIER Entretien avec Jean VALLET pages 7 à 10

L'ESSENTIEL Pages 2 et 4 POLITIQUE FRANÇAISE – La désindustrialisation de la France par Henri LETIGRE et Henri FOUQUEREAU pour rien – La prévention de la délinquance 2007Le message de Pierre PUJO (p. 3) ou l’Etat pyromane par Aristide LEUCATE Page 5 POLITIQUE ÉTRANGÈRE BENOÍT XVI EN TURQUIE e récent voyage de Les choses ne se passent pas tou- – L’évolution de l’OTAN : Benoît XVI en Turquie jours ainsi en Turquie avec les vigilance ! Ldoit être compris comme Un démenti au minorités syriaques... par Pascal NARI l‘expression d‘un refus du —choc – Madagascar : la poudrière des civilisations“. L‘Église catholique va à la rencontre de Le pape par Renaud DOURGES "choc des civilisations" ces seules réalités concrètes que et le muphti – Liban : vers une nouvelle sont les nations ; elle n‘attise pas le pape ne s‘oppose pas, c‘est à valeurs. En quoi ces paroles peu- guerre civile ? le conflit entre ces impéria- la reconnaissance au sein de vent-elles apporter de l‘eau au Renouant avec le goût de son par Élie HATEM lismes idéologiques que sont l‘Europe d‘hommes de toutes moulin de ceux qui, comme par prédécesseur pour les actions Pages 6 et 11 devenus le libéralisme démo- religions : « En Europe, lit-on exemple le président Chirac, se spectaculaires, il est allé, pour cratique et l‘islamisme terroris- dans la déclaration commune permettent de dire que l‘Europe montrer son « estime » envers la HISTOIRE te. Elle Œuvre pour la paix. avec le patriarche orthodoxe hérite autant de l‘islam que du religion musulmane, jusqu‘à se – Mermoz, un Français Venant, a-t-il dit, « sur cette Bartholomée, tout en demeu- christianisme ? déchausser pour entrer dans la par le général (c.r.) terre, point de rencontre et rant ouverts aux autres reli- Le souverain pontife a dit Mosquée bleue aux six minarets Jacques le GROIGNEC carrefour des religions et des gions et à leur contribution à plusieurs fois que les minorités et 250 fenêtres, et à « se cultures, charnière entre l‘Asie la culture, nous devons unir religieuses doivent être proté- recueillir et méditer » (dit le – Dagobert à l’endroit et l‘Europe », a-t-il fait cam- nos efforts pour préserver les gées, ajoutant que « l‘Église ne porte-parole du Saint-Siège) aux par Michel FROMENTOUX pagne pour que le pays ottoman racines, les traditions et les veut rien imposer à personne, côtés du Grand Muphti qui priait Pages 12 et 13 entre dans l‘Union européenne ? valeurs chrétiennes ». l‘égli- [mais] demande simplement de en direction de La Mecque. Bien ARTS ET LETTRES Les journalistes ont, dans cette se Saint-Georges du Phanar, il a pouvoir vivre librement pour que les deux hommes n‘aient pas affaire, pris un peu vite leurs même exhorté à donner une révéler Celui qu‘elle ne peut récité de prière commune, le – Portraits publics, désirs pour des réalités. Ce à quoi « nouvelle vitalité » à ces pas cacher, le Christ Jésus ». geste a douloureusement surpris portraits privés les catholiques traditionalistes par Monique BEAUMONT en attente du Mottu proprio qui – Les Vignerons doit rendre à la Tradition sa de l’impossible JUGE IRRESPONSABLE place dans l‘Église... Toutefois, rien de ce que le pape a dit ou fait par Pierre LAFARGE I Paul Kagamé, actuel président du Rwanda, a- çais, ont reçu l’ordre de fermer leurs portes dans pendant ce voyage ne laisse sup- – De la beauté t-il trempé dans l’attentat qui, en 1994, a coûté les soixante-douze heures. poser qu‘il ait mis le christianis- avant toutes choses la vie aux présidents burundais et rwandais qui Du beau travail, M. Bruguière, et qui va ser- me et l‘islam sur le même plan ! par Anne BERNET voyageaient dans le même avion ? Cela est vir le rayonnement de la France en Afrique cen- Espérons qu‘au moins cette controversé. Néanmoins le juge Jean-Louis Bru- trale ! Mais que fait donc M. Douste-Blazy ? Que extrême marque de sympathie Page 14 guière a cru devoir lancer contre lui et neuf de fait M. Chirac ? Il était de leur devoir d’empêcher pour l‘islam aura d‘heureuses LES GRANDS TEXTES ses proches des poursuites sur la foi de certains un juge parisien de compromettre les relations répercutions sur le sort des chré- POLITIQUES témoignages. diplomatiques de la France avec le Rwanda où tiens d‘Orient. – La souveraineté La réaction n’a pas traîné. Le 24 novembre, notre présence culturelle est importante. La fa- et le Politique le Rwanda a annoncé la rupture de ses relations meuse “indépendance des magistrats” doit s’ar- Michel FROMENTOUX diplomatiques avec la France. L’ambassadeur rêter là où des intérêts nationaux sont en cause, par Aristide LEUCATE Dominique Decherf a quitté Kigali dès le lende- et il appartient aux dirigeants politiques de veiller E Page 16 main. Toutes les institutions françaises au à ce que ceux-ci ne soient pas compromis par M 01093 - 2714 - F: 3,00 ACTION FRANÇAISE Rwanda, y compris l’École internationale fran- des juges irresponsables ! – Le banquet du 3 décembre çaise Saint-Exupéry et le Centre culturel fran- Pierre PUJO 3:HIKLKJ=XUXUUU:?c@r@b@e@k; LA DÉSINDUSTRIALISATION DE LA FRANCE

ne entreprise créée en 1885, dans les filets de ces capitalistes leader mondial des pôles Une catastrophe organisée cannibales. Ud’alternateur pour automo- 300 employés sont au tapis, le biles, qui équipait une voiture sur savoir-faire a disparu. (Nous le re- trois dans le monde, a été totale- en difficulté, les banques ne vou- par valeurs mobilières partent pour les trouverons certainement exploité ment rayée de la carte par un groupe lant plus suivre. Henri FOUQUEREAU États-Unis, ils débauchent les inté- dans d’autres lieux exotiques). américain financé par un ou plu- La famille dépose le bilan en no- rimaires, ils vendent un immeuble Qui nous protège des gangsters sieurs fonds de pension. vembre 2003. Le Tribunal de Com- Aussitôt sortent d’un chapeau que la société possédait à Paris (1 qui prolifèrent sous le ciel mondia- merce juge que l’affaire est saine, des postes de direction. Les nou- million d’euros), ils vendent une qua- liste ? Henri Fouquereau, elle cherche des repreneurs. Entre veaux dirigeants touchent 766 000 rantaine de maisons d’ouvriers, et Il est temps, grand temps de pro- secrétaire général une société hollandaise connue et euros/an + 753 000 euros de frais une partie du stock (2 000 tonnes téger notre industrie et le reste bien du Forum un mystérieux groupe américain qui de management. Une équipe de d’acier), même l’argent réservé au évidemment. L’État-nation doit re- se présente comme cabinet conseil, consultants arrive des USA. Coût : comité d’entreprise pour le Noël des prendre les rênes, le politique doit pour la France, spécialisé en organisation indus- 460 000 euros + 1000 euros par enfants disparaît (45 000 euros). être en mesure de mettre un terme donne un exemple trielle, qui promet de garder tout le jour et par consultant. Tout cet argent part dans des hol- à ce gâchis, au lieu de perdre son flagrant de la monde, d’embaucher 80 intérimaires, Dans le même temps, pour les dings qui achètent une usine dans temps à mettre les directives de désindustrialisation d’injecter 3 millions d’euros dans l’af- ouvriers qui touchent par mois ce le Michigan, prennent une part dans Bruxelles en conformité avec nos de notre pays dans faire et qui présente une lettre du que touche un consultant chaque une société mexicaine. lois, c’est à dire à détruire nos Cabinet américain très connu, Ernst jour, les primes sont intégrées au Les employés exercent leur droit propres lois, il serait mieux dans son l'indifférence et Young, garantissant cette société, salaire “car cela se fait comme cela d’alerte, un Cabinet d’experts dé- rôle de contrôler le pouvoir et de lui de nos gouvernants. le Tribunal de Commerce, sans au- aux USA”. Un climat social tendu livre un rapport accablant... Le nou- intimer l’ordre de nous protéger de cune recherche sur ce groupe, lui s’installe, les décisions prises par la veau directeur de la société dépose ce cannibalisme destructeur de la Un chiffre d’affaires en aug- vend l’affaire. nouvelle direction sont mal accep- le bilan en catimini. France et des autres nations occi- mentation, mais une entreprise res- tées, les ouvriers se posent et po- dentales. tée familiale, qui ne peut financer sent des questions. Les défauts de I son propre développement. Ses 300 employés qualité atteignent des niveaux in- Cannibalisme grands clients Valéo, l’Américain au tapis quiétants, tout était vendu au prix Vistéon, profitent de la situation et que réclamaient les clients. (jusqu’à Ce groupe, “Catalina” pour ne Gaz de France-Suez demandent de plus en plus de re- Or, lors de la signature des actes, 30 % au-dessous du prix de revient) pas le citer, vise deux autres en- mises. Ne sachant pas dire non, le fond spéculatif qui devait financer Les Américains n’ont toujours treprises en France. Espérons que Le gâchis l’entreprise, toujours en augmenta- l’affaire a disparu des documents. pas mis un centime dans l’affaire, l’enquête ouverte par le Parquet tion de chiffre d’affaires, se trouve Qu’importe, l’affaire est conclue. mais 1,5 million d’euros placés en empêchera qu’elles ne tombent En février 2006, Dominique de Villepin présentait le projet de fusion entre Gaz de France Acte II et Suez comme relevant du “patriotisme économique”. Il es années soixante-dix furent sidérurgie... Site par en règle a com- tendu, prendre en compte tous les fallait parer ainsi à la menace marquées par le premier acte après site, toute la Henri LETIGRE mencé à l’aube du postes détruits en aval et en amont d’une O.P.A. de la firme ita- Lde la désindustrialisation de France industrielle XXIe siècle. de ces industries qui, à la différence lienne ENEL sur Suez et consti- la France. Après trois siècles de dé- a pâti de l’absence d’anticipation de Chaque semaine charrie son cor- des services, alimentent une im- tuer “un géant de l’énergie” en veloppement, les inconséquences Bruxelles qui, depuis 1950 et Jean tège d’annonces de fermetures portante sous-traitance elle-même mesure de défendre les inté- d’un libéralisme ravageur ont ruiné Monnet, disposait de la compétence d’usines victimes de délocalisations. créatrice d’emplois. rêts français en matière d’ap- en trois décennies les principales pour gérer l’acier et le charbon. La Désormais, toutes les régions et provisionnement de gaz sur un entreprises industrielles. Depuis Ciotat, La Seyne-sur-Mer, la Lor- tous les secteurs sont concernés . marché en pleine mutation. Colbert, les grandes manufactures raine, Le Creusot, le Nord-Pas-de- Le 24 novembre 2006, Thom- Recrudescence Sarkozy et l’U.M.P. ont permettaient à la France de rayon- Calais, etc. ont alimenté la chro- son a annoncé que la moitié des du chômage traîné les pieds au cours des ner mondialement, mais l’ouverture nique des faillites d’usines, de mines, effectifs de sa filiale de Genlis en mois suivants pour adopter la de nos frontières aux vents du libre- Bourgogne allait disparaître (la fa- Progressivement les techniques privatisation de Gaz de France échange entraîna leur effacement L'écart entre la brication des têtes de lecture de de communication et de transport nécessaire pour permettre progressif face aux assauts des réalité économique DVD est transférée depuis deux ans ont aboli les handicaps écono- l’opération. Ils ont réussi ainsi quatre dragons. subie et à Taïwan). Aucun des candidats à miques que représentaient les dis- à faire reporter en septembre Cette première vague a la "peopolisation" la présidence ne réagit, aucun mou- tances. Une chemise expédiée de le vote du Parlement. Voici concerné le “haut” du secteur : les du débat vement politique dit “de gouverne- Shangaï pour Le Havre n’occa- maintenant que le Conseil chantiers navals, les houillères, la ment” ne propose une solution d’en- sionne à la grande surface qui la constitutionnel, tout en ac- républicain semble, qui consisterait simplement mettra en vente que 2,5 centimes ceptant le principe de la fusion, n'a jamais été aussi à rendre à la France sa souverain- de charges de fret. Sans quota, demande que celle-ci se fasse manifeste. neté en matière douanière, comme sans taxe, sans préférence natio- au plus tôt le 1er juillet 2007. aux États-Unis ou en Suisse, nale et avec un euro fort, très rares Seulement, entre temps, l’élec- de cales sèches et autres laminoirs lorsque les dirigeants constatent sont les entreprises qui peuvent ré- tion présidentielle aura eu lieu, et hauts fourneaux qui faisaient la que la concurrence est trop forte sister à la déferlante. avec le risque de donner le 10, rue Croix-des-Petits-Champs, gloire du génie industriel français. pour leur propre industrie. Après trois mois, la diminution pouvoir à la gauche, laquelle 75001 Paris Tél. : 01-40-39-92-06 • Fax : 01-40-26-31-63 Les grandes délocalisations venaient du chômage, provoqué par de nom- est hostile à la fusion. Résul- I.S.S.N. 1166-3286 de commencer, même si la pensée breux départs en retraite, ne se tat : celle-ci est sur le point unique libéralo-socialiste n’osait pas confirme pas. Les délocalisations d’être enterrée. • Directeur : Pierre Pujo reconnaître que le terme désignait alimentent une nouvelle source de Ainsi un projet présenté • Secrétaire de rédaction : Michel Fromentoux bien la cause de notre malheur éco- chômage que le “papy boom” ne d’intérêt national aura-t-il • Politique : Georges Ferrière, nomique. En vingt ans la France fut parvient pas à compenser. Le dis- échoué en raison des ambi- Yves Lenormand bouleversée. cours de négation des consé- tions électorales des uns et de • Politique étrangère : Pascal Nari quences de la construction d’une l’esprit partisan des autres. • Chronique militaire : Bernard Guillerez Europe sans frontières ni limites Sarkozy ne voulait pas que Vil- • Économie : Henri Letigre, Dépeçage géographiques et d’une mondiali- lepin remporte un succès avec Serge Marceau. en règle sation ouverte à tous les vents de cette opération et les socia- • Enseignement, famille : l’importation ne peut plus tenir. À listes faisaient de l’obstruction Michel Fromentoux, chef de rubrique Après avoir enlevé le “haut”, la République enlève “le bas”, • Sciences et société : Le “haut” de l’industrie ayant quelques mois de la présidentielle, systématique. disparu, la petite musique socialo- le comble pour un régime fondé l’écart entre la réalité économique Quant au Conseil consti- Guillaume Chatizel, par des sans-culottes ! • Outre-mer : Pierre Pujo libérale a continué pour nous an- subie par la population et la “peo- tutionnel, il a pris sa décision • Médecine : Jean-Pierre Dickès noncer que la France conservait un Un rapport de l’INSEE publié en polisation” du débat républicain n’a de fixer la réalisation de la fu- • Livres : René Pillorget, Anne Bernet, avenir industriel, mais dans un nou- mars dernier a pourtant mis en évi- jamais été aussi manifeste. sion au 1er juillet 2007 parce Pierre Lafarge, Philippe Aleyrac, veau créneau économique : la mi- dence l’ampleur du drame vécu par Le mois de novembre 2006 a que cette date est celle qui Romaric d’Amico croindustrie. Les exemples de réus- nos derniers bassins industriels, vu Aubade, dans la région Poitou- est prévue par un accord eu- • Arts-lettres-spectacles : Léon Camus, sites locales se multiplièrent pour comme celui du Vigan depuis la Charente, puis Well au Vigan dans ropéen sur la libération de Renaud Dourges, Monique Beaumont • Cinéma : Alain Waelkens prouver que dans les secteurs de confirmation, le 29 novembre de- les Cévennes, annoncer le trans- l’énergie. Argumentation spé- • Combat des idées : Pierre Carvin, l’informatique, de l’aéronautique, de vant le comité d’entreprise de l’usine fert de la production des sous-vê- cieuse. Les membres de cette Jean-Philippe Chauvin l’automobile, du spatial, de l’arme- Well, du départ de sa dernière in- tements et autres collants en Asie instance, faussement appe- • Art de vivre : Pierre Chaumeil ment et même dans le textile haut dustrie alors que les soieries étaient pour le bas de gamme et en Afrique lés les ”Sages”, montrent • Chroniques : Jean-Baptiste Morvan, de gamme, la France gardait des implantées dans cette vallée céve- (Tunisie ou île Maurice) pour le haut une fois de plus qu’ils font François Leger positions compétitives et toute sa nole depuis le XVIIe siècle. de gamme. Après avoir enlevé le passer les règlements euro- • Rédacteur graphiste : Grégoire Dubost place dans le concert de la mon- En 2005, l’INSEE a déploré la “haut”, la République enlève le péens avant la loi française • Photos : François Tabary dialisation. disparation nette de 80 000 em- “bas”, le comble pour un régime et l’intérêt national.. Abonnements, publicité, promotion : Aujourd’hui, le refrain va devoir plois industriels en douze mois. Un fondé par des sans-culottes ! P.P. Monique Lainé changer. L’acte II de ce dépeçage chiffre qui ne peut pas, bien en- I

2 L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 SIGNES ÉDITORIAL DES TEMPS Réciprocité

Interrogé sur le droit de vote des étrangers aux élections locales, Ni- colas Sarkozy a indiqué qu’une telle DES ÉLECTIONS POUR RIEN évolution lui semblait possible à condition « d’avoir la réciprocité avec le pays d’origine ». L’idée n’est peut-être pas mauvaise. On Dimanche 3 décembre, le grand banquet des amis de l’Action française (voir page 16) pourrait envisager de construire des mosquées s’est ouvert par la lecture du message suivant de Pierre Pujo. « à condition d’avoir la réciprocité » dans les pays arabes. Et on pourrait envisager d’accueillir la Turquie dans l’Europe, Mes chers amis, Bien sûr, en dehors de Sarkozy et de “à condition d’avoir la réciprocité” C‘est un grand regret pour moi de ne Ségolène Royal, il y a Le Pen que les deux lorsque le Saint Père veut se rendre pouvoir participer à ce rendez-vous annuel premiers sont d‘accord pour éliminer de la en Turquie... des militants et amis de l‘Action française, compétition en exerçant des pressions sur chez qui se rejoignent la lucidité politique les élus pour que ceux-ci lui refusent leur Précaution et la volonté de mener l‘action la plus utile parrainage. Tous les moyens sont bons en pour le pays. Les suites d‘un accident mal- république pour se débarrasser des gêneurs. Les ostréiculteurs du Bassin encontreux m‘empêchent temporairement La Tour du Pin disait : « C‘est à fausser d’Arcachon ont cruellement expé- d‘être des vôtres, mais ma pensée est avec le baromètre de l‘opinion publique que rimenté les effets du fameux “prin- vous. s‘emploient tous ceux dont le pouvoir en cipe de précaution” poussé à ou- J‘éprouve une grande satisfaction en dépend ». trance. Pour deux décès jugés “sus- constatant que, malgré mon absence, la pa- Cependant Chirac n‘a pas renoncé à un pects”, leur production a été interdite rution du journal a été assurée ces deux troisième mandat et pourrait renvoyer dos à la vente au risque d’entraîner la derniers mois ainsi que la préparation du PAR à dos les prétendants en posant sa propre faillite de toute une filière. Et fina- banquet. Merci notamment à Michel Fro- candidature. Le suffrage universel est lement, leurs huîtres ont été mises mentoux, à Monique Lainé, à Thibaud PIERRE PUJO conservateur et pourrait accéder à ses vŒux. totalement hors de cause... Peut- Pierre et à tous ceux et celles qui leur ont Ce qui est sûr, c‘est que l‘élection pré- on espérer que le bon sens re- apporté leur collaboration. L‘ardeur et la sidentielle ne résoudra pas les grands pro- prenne ses droits ou faudra-t-il bien- cohésion qu‘ils ont manifestées sont un résignée à son effacement au sein d‘une blèmes de la France, que le locataire de tôt craindre d’autres excès ? Peut- signe de santé de l‘A.F. Europe supranationale. En vérité, ce n‘est l‘Élysée change ou non. On l‘a constaté en être voudront-ils demain interdire Et cela est heureux car l‘Action fran- pas la France qui est devenue trop petite 2002 : Chirac avait été réélu à une majo- la cueillette des champignons au çaise n‘a pas seulement pour objet d‘en- dans le monde actuel mais les petits hommes rité écrasante, une majorité pléthorique nom du fameux principe de pré- tretenir le souvenir glorieux d‘une histoire qui nous gouvernent dont l‘horizon se li- s‘installait à l‘Assemblée. La plus grande caution... plus que centenaire. Contrairement à ce que mite à leur circonscription électorale. partie des conseils généraux et régionaux soutiennent certains, l‘histoire de l‘Action La victoire du —non“ au référendum a était entre les mains des partis de droite. Abstinence française ne s‘écrit pas seulement au passé, signifié aussi le rejet par les Français de la Cependant nous n‘avons eu que des demi- elle continue à se vivre aujourd‘hui. Charles classe politique en place. Cela n‘empêche mesures et des semblants de réformes. Les Les ostréiculteurs ne sont pas Maurras n‘a jamais dit que l‘Action fran- pas les candidats des partis de gauche et de grands problèmes de la France sont de- les seules victimes de ces messieurs çaise devait s‘arrêter après sa mort. L‘Œuvre droite qui ont prôné le —oui“, de solliciter meurés : une Dette colossale, l‘insécurité, en blouse blanche qui prétendent de salut public qu‘il avait fondée avec ses leurs suffrages aux élections présidentielle une immigration clandestine démesurée, veiller sur la bonne santé des Fran- compagnons devait se poursuivre. Il en avait et législatives de l‘an prochain. Et, pour sé- l‘étatisme, le délabrement de l‘enseigne- çais. Les vignerons crèvent eux formulé la doctrine. Les conclusions aux- duire les électeurs, ils annoncent une rup- ment, la France ouverte à tous les vents de aussi d’un hygiénisme exacerbé qui quelles il était parvenu conservent toute ture, un changement radical. la mondialisation. veut nous mettre au régime sec. leur valeur pour la France de maintenant. Le dernier épisode en date de Les données fondamentales de la politique cette croisade contre le vin est si- française n‘ont pas changé. La France de- La “rupture Position gné par le Pr Didier Houssin, di- meure la France, la république la répu- tranquille” de l’Action française recteur général de la Santé, qui blique, et la république c‘est la lutte in- prône ouvertement l’abstinence : il cessante des factions pour le pouvoir ainsi Nicolas Sarkozy a fait de la —rupture“ l‘Action française, nous n‘attendons estime que, pour atteindre les ob- que les débordements de la démagogie pour son thème de campagne. Pour ne pas effa- rien de l‘élection présidentielle. Nous ne jectifs de la loi de santé publique racoler les électeurs au détriment des inté- roucher les gens, il parle même de —rup- sommes pas un parti. Nous ne faisons pas d’août 2004, qui prévoit de dimi- rêts du pays. ture tranquille“. En fait de —rupture“, il a de calculs sur les chances respectives des nuer la consommation annuelle L‘actualité de la pensée d‘Action fran- participé à tous les gouvernements depuis divers candidats. Nous ne cherchons pas à moyenne d’alcool par habitant de çaise, vous la trouverez démontrée dans 2002. Il est dévoré par une ambition folle. racoler les électeurs par des discours flat- 20 %, il faudra viser « l’augmen- l‘ouvrage collectif que nous venons de pu- Il veut libérer l‘économie du carcan éta- teurs. Nous n‘avons que le souci de la tation du nombre d’abstinents et blier : le Trésor de l‘Action française. C‘est tiste, —karchériser“ les banlieues turbulentes. France. la réduction de la consommation un trésor que vous avez le droit et le de- Les élus U.M.P. se blottissent contre lui Alors notre tâche est claire : au milieu des petits et moyens buveurs, voir de dilapider largement en faisant lire dans l‘espoir de conserver ainsi leurs sièges des manŒuvres et des intrigues des candi- les plus nombreux ». Bel exemple l‘ouvrage autour de vous. Il incite ses lec- et leurs prébendes. Son libéralisme à tout dats, être les gardiens vigilants de l‘intérêt de politique de santé publique : plu- teurs à revisiter l‘Œuvre de nos maîtres et crin ne laisse pas d‘être inquiétant et l‘on national en toutes circonstances ; recher- tôt que de soigner les alcooliques, à y trouver des leçons pour notre temps. n‘a pas oublié qu‘en septembre dernier à cher l‘alliance de tous ceux qui se soucient on préfèrera “faire du chiffre” en ter- Aujourd‘hui nous ne saurions nous New York, il s‘est permis de critiquer l‘« ar- comme nous de défendre le travail fran- rorisant les buveurs du dimanche... contenter de répéter ce que disaient nos rogance » de la diplomatie française face çais, de défendre la langue française, d‘exer- maîtres. Il nous faut appliquer la méthode aux Américains. cer la pression maximale sur les candidats Bipolaire qu‘ils nous ont enseignée aux données po- En face de lui se présente Ségolène et sur le gouvernement pour empêcher litiques actuelles. Il nous faut pratiquer Royal dont la candidature à la présidence le pire. Jean d’Ormesson était-il en hi- l‘empirisme organisateur pour la compré- de la République paraît insolite. Pourtant, En, second lieu, il nous revient de rap- bernation en 2002 ? Il explique en hension des problèmes de la France et du depuis le Moyen-‰ge, il est arrivé souvent peler la vérité politique de la France, à sa- tous cas dans Le Figaro que la vie monde. que le gouvernement de la France soit as- voir la monarchie. Notre pays ne retrou- politique française se résume à suré par une femme et le bilan des régentes vera son équilibre que par le retour de la “deux camps” et qu’il faut donc vo- a comporté parfois des aspects positifs. Cela monarchie capétienne dans le cadre d‘ins- ter dès le premier tour pour le can- La nation française dit, les régences étaient des périodes pen- titutions modernes. La monarchie n‘a pas didat le plus à même de faire ga- avant tout dant lesquelles le Roi était absent. Les fac- cessé d‘évoluer au cours des siècles. Elle gner son camp. L’académicien tions relevaient la tête et la France tombait saurait s‘adapter à la France d‘aujourd‘hui. semble donc ignorer que les “deux Avant tout, à l‘Action française, nous provisoirement en république. Nous ne nous laissons pas séduire par camps” en question ont recueilli le sommes préoccupés de sauvegarder la na- Ségolène Royal a trouvé un bon slogan l‘enjoleuse Ségolène. Le vrai —royalisme“, 21 avril 2002 moins de 37 % des tion française dans son identité et dans sa pour s‘assurer une clientèle. Elle s‘adresse c‘est l‘Action française qui le représente ! suffrages exprimés et qu’ils ont re- souveraineté. Elle est le fruit de plusieurs aux « gens qui souffrent », tout comme On dit que l‘élection présidentielle est la cueilli l’adhésion, si l’on n’oublie pas dizaines de générations. Elle représente un François Mitterrand avait adopté le slogan rencontre d‘un homme et d‘un peuple. Il y les abstentionnistes et les non-ins- immense patrimoine spirituel autant que de la « France tranquille ». Elle prétend a beaucoup mieux : la rencontre d‘un crits, de moins du quart des Fran- matériel. Elle est la garante du maintien de s‘occuper des problèmes concrets des Fran- peuple et d‘une dynastie. C‘est ce qui s‘est çais en âge de voter. Il faudra que nos libertés et de nos traditions. Contrai- çais à l‘encontre des discours idéologiques produit il y a plus de mille ans. La Maison l’académicien apprenne à compter : rement à ce que pensent les fausses élites des politiciens socialistes. C‘est très habile. de France, dont le chef est Mgr le Comte 75 % des Français ne veulent plus qui tiennent, à droite et à gauche, le haut Mais, serait-elle élue qu‘elle devrait appli- de Paris, est toujours là pour reprendre sa de ces deux camps ! du pavé, la France n‘a pas fait son temps quer le programme du Parti socialiste et tâche multiséculaire au service du pays. et la masse des Français œ on l‘a constaté que les politiciens socialistes réclameraient Guillaume CHATIZEL au référendum de l‘an dernier – n‘est pas leur part de places et d‘honneurs. I

L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 3 CHRONIQUE JUDICIAIRE LE CRÉNEAU

La prévention de la délinquance Un clivage obsolète tionalisme, il assimile à une dis- Comment prôner la diversité crimination raciale le sentiment na- quand la seule langue de travail G CHRISTIAN BROSIO donne une tional et la préférence nationale. Il des institutions européennes, n’est analyse attentive de la “droite insai- est une imposture. » plus, dans les faits, qu’un vague ou l’État pyromane sissable” à travers ses avatars suc- Deux lois, la loi Pleven de 1972 anglais technocratique incompré- cessifs depuis 200 ans dans le SPEC- et la loi Gayssot de 1990 permettent hensible au commun des mortels ans le par sont pas et alors TACLE DU MONDE (novembre de poursuivre judiciairement toute pro- (et à la plupart des députés euro- cadre de Aristide LEUCATE la création d’un 2006). Il observe en conclusion qu’il vocation « à la discrimination, à la péens), quand les administrations Dcette chro- fichier informa- devient souvent difficile de distinguer haine, à la violence à l’égard d’une françaises sont contraintes de tra- nique, les lecteurs de L’Action tique de ce type n’est absolument la droite de la gauche : personne ou d’un groupe de per- vailler en ce sabir aux fins de “co- Française 2000 ont été habitués à pas justifiée. « D’un point de vue strictement sonnes en raison de leur origine, ordination européenne” pour se voir critiquer la politique du gou- factuel, il est aisé de constater que, de leur appartenance ou de la non- plier à l’américanophonie obstinée vernement, spécialement en matiè- face aux grands enjeux et aux appartenance à une ethnie, UNE de la Commission ? Comment pro- re de justice. Nous souhaiterions Le vrai grandes crises du siècle passé, le NATION, une race ou une religion mouvoir le français, quand des ser- pourtant délivrer à ce dernier délinquant, clivage droite-gauche ne tient pas. déterminée ». Toute discrimination vices publics entiers, jusqu’à la dé- beaucoup plus de satisfecit que de c’est l’État En effet, l’antisémitisme, l’antipar- entre Français et étrangers est ainsi fense nationale, ne travaillent plus condamnations, tant nous savons lementarisme, Munïch, le pacifisme, interdite au nom de l’antiracisme. Ces qu’en anglais, ou que d’autres, tels combien l’intérêt national doit pri- Un des autres volets de ce pro- le bellicisme, les ébauches de fas- deux lois scélérates devront être abro- l’A.N.P.E., se croient tenus de ser- mer sur toute autre considération. jet de loi porte sur la répression des cisme de Vichy, la Collaboration, gées un jour ou l’autre. vir leurs administrés dans les mineurs délinquants récidivistes. la Résistance et, plus tard, au dé- “langues d’origine”, témoignant Miroirs Ce qui frappe L’ordonnance du 2 février 1945 pré- but de la guerre froide, l ‘anticom- d’un étrange renoncement à la ma- citée, adoptée en son temps par le munisme, la construction euro- aux alouettes trice naturelle de l’intégration d’emblée gouvernement provisoire de la péenne puis, pendant la guerre qu’est le français ? » est l’impression République française dirigé par le d’Algérie, la cause de l’Algérie fran- G NICOLAS BEYTOUT estime dans Il suffit d’avoir inscrit dans l’article de colmatage des général De Gaulle, bien que demeu- çaise où l’O.A.S. ne fut ni de droite, l’éditorial du FIGARO (18/19/11/06) 2 de la Constitution que « la langue fuites qui affectent rant le texte de référence en la ni de gauche, mais à la fois de que les illusions entretenues par Sé- de la République est le français », l’actuelle matière, a été maintes fois rema- droite et de gauche. » golène Royal vont s’évanouir : la place de notre langue dans le monde niée, révisée, au point qu’il ne reste Sur les thèmes essentiels qui tou- « Alors on comprendra que sa dépend pour beaucoup de la volonté ordonnance plus grand chose du texte originel. chent à l’avenir de la nation le clivage “nouvelle façon de faire de la po- et de l’action de nos responsables po- du 2 février 1945 droite/gauche est devenu obsolète. litique” n’est qu’une manière d’em- litiques. Il n’y a pas de fatalité. relative à l’enfance C’est le République qui l’entretient ar- piler les déclarations d’intention. délinquante. tificiellement.. Alors on s’avisera que la “politique Saddam Hussein par la preuve” n’est qu’une épi- parle La foi se perd neuse version des trop fameuses Malheureusement, le gouver- expériences de la gauche. Ainsi G BALKANS INFOS (décembre nement donne des bâtons pour se G PATRICK JARREAU, s’appuyant celle qui nous fit attendre 1983 pour 2006) publie des extraits d’une lettre faire battre et nous ne nous privons sur une analyse du “Centre d’étude apporter la preuve que les dérives au peuple irakien de Saddam Hus- pas de stigmatiser son action de la vie politique française”, constate budgétaires de 1981 nous paraly- sein diffusée par son avocat peu après lorsque, précisément, elle nous dans le MONDE (15/11/06) qu’« à seraient durablement, ou celle qui, sa condamnation à mort en octobre parait contraire au bien commun. cinq mois du premier tour de l’élec- au bout de deux ou trois ans, nous dernier. Elle ne manque pas d’élé- C’est notre mission de salut public tion présidentielle française, la apporta la preuve que les dérives vation de pensée et témoigne d’un et il est donc salutaire que nous confiance en ceux qui dirigent ou sociales de 1997, les 35 heures, esprit d’union nationale qui mérite Claude Goasguen l’exercions. aspirent à diriger le pays est au lesteraient pour longtemps les en- d’être souligné. Évoquant les Irakiens « Les délinquants de 1945 ne sont pas les mêmes plus bas ». Depuis le référendum treprises de notre pays, une fois qui ont collaboré avec « l’envahis- que ceux de 2006 » du 29 mai 2005, ni le gouvernement, que la magie et les mots auront fini seur », il écrit : « Je vous demande Criminalisation ni l’opposition de gauche, ni la dé- de faire illusion, le vide de son pro- de garder ouverte la porte du par- des internés La raison systématiquement centralisation ne sont parvenus à res- gramme économique et social ap- don ainsi que celle de la tolérance d’office invoquée par les gouvernants (de taurer le crédit des hommes politiques. paraîtra... » C’est bien possible, mais pour celui qui s’est égaré s’il ma- droite comme de gauche) à la veille Dans l’espoir de se faire entendre, « les programmes des autres candidats nifeste le désir d’être bien guidé. L’Assemblée nationale est en de retoucher le texte tient à son les candidats promettent tous le de droite ou de gauche, pour être par- Rappelez-vous que vous avez un train de débattre du projet de loi obsolescence, car il n’appréhen- changement des hommes, des fois plus précis, ne sont guère plus devoir de le sauver de lui-même et relatif à la prévention de la délin- derait pas les nouvelles formes de actes, des méthodes, voire des ins- consistants ! Ce sont des miroirs pour de lui indiquer le bon chemin. Lais- quance, déposé et discuté pour la délinquance. Lors d’une émission titutions ». De Nicolas Sarkozy à Sé- attraper les alouettes, pardon les élec- sez la porte du pardon ouverte pour première fois devant le Sénat le 28 vespérale relativement tardive, golène Royal en passant par Fran- teurs. tout un chacun jusqu’au jour de la juin 2006. Il n’est pas possible d’en Claude Goasguen, député pro- çois Bayrou et Jean-Marie Le Pen libération qui ne saurait tarder si présenter intégralement le texte Sarkozy, a pu déclarer candidement « c’est à qui parviendra à exprimer La francophonie Dieu le veut. » mais l’on peut néanmoins en faire que « les délinquants de 1945 ne le mieux le sentiment populaire, s’effrite Saddam Hussein évoque encore ressortir l’orientation générale. sont pas les mêmes que ceux de dont personne ne doute qu’il soit le « grand Irak des Arabes, des Ce qui frappe d’emblée est l’im- 2006 » ! De tels propos dans la négatif, frustré, vindicatif ». G PAUL-MARIE COÛTEAUX sou- Kurdes et des minorités, sectes re- pression très nette de colmatage, bouche du législateur laissent pan- [...] « Ce que les uns et les ligne dans son journal L’INDÉPEN- ligieuses ou autres. Nous étions ça et là, des fuites qui affectent l’ac- tois. autres ont à vaincre n’est plus seu- DANCE (novembre 2006) la dé- fiers d’être une grande nation ». tuelle ordonnance du 2 février 1945 Non ! Monsieur le député ce ne lement le camp adverse, comme faillance de nos dirigeants dans la dé- On retrouve là l’objectif du parti Baas relative à l’enfance délinquante. sont pas les délinquants qui ont ce fut souvent le cas. Ils ont un en- fense de la langue française et son de faire de l’Irak une nation par-delà Par ailleurs, on peut se changé ! Des viols, des vols, des nemi commun, qui n’est autre que rayonnement : « ... aussi utile soit- les aspirations ethniques ou reli- demander ce que viennent y faire assassinats, toujours il y en eut et la perte de foi dans la démocratie. elle, la francophonie risque de ne gieuses. des dispositions concernant l’hos- toujours, hélas, il y en aura. Ce qui Cette marée-la, qu’ils n’ont pas su plus être un jour qu’une épous- L’ancien dictateur revient sur le pitalisation d’office de personnes a changé c’est la société. Mais empêcher de croître, sauront-ils la touflante esbroufe, dès lors que thème du pardon : « Vous devez être présentant des troubles psy- pourquoi celle-ci s’est-elle à ce point faire refluer ? » Pas sûr du tout. les gouvernements français aban- magnanimes, et ne pas verser le chiques et dont l’internement est si négativement transformée ? Les politiciens sont englués dans le donnent toute législation linguis- sang de vos fils et frères, mettez rendu nécessaire pour des motifs Parce que l’État a progressivement système, lequel leur rapporte tant de tique (accusée d’entraver le grand le vengeance de côté, y compris d’ordre public. À juste titre quali- reculé, abandonnant ses respon- places et d’honneurs. marché unique européen), laissent celle des fils de Saddam Hussein. fiées de « malades » dans le pro- sabilités aux travailleurs sociaux, s’installer l’illettrisme de masse, Souvenez-vous des récits de nos jet de loi, ces personnes ne sont aux collectivités territoriales et… à Deux lois sacrifient l’enseignement des prophètes miséricordieux, Mo- pas toutes des criminels, et si elles Bruxelles. scélérates lettres classiques, ou de la simple hammed et Jésus, le fils de Marie, le sont, les spécialistes en crimi- Pendant près de quarante ans lecture, tout occupés à promou- qui ont pardonné à ceux qui les in- nologie savent bien qu’elles doi- de laxisme et de gabegie, l’autori- G LA REVUE PERMANENCES pu- voir, à l’âge où la langue maternelle sultaient... » vent être traitées médicalement té de l’État n’a cessé de se rédui- blie dans son numéro de novembre est loin d’être acquise, un “anglais On n’est pas habitué à considé- tant leur responsabilité purement re comme peau de chagrin par la 2006 un substantiel dossier sur le de communication internationale” rer Saddam Hussein sous cet aspect. pénale est judiciairement atté- faute des gouvernements anarcho- thème La France n’est pas raciste. qui entraîne la France sur la pente Il a imposé à son peuple un régime nuée, voire écartée. De surcroît, socialo-libéraux qui se sont succé- Martin Hardy y dénonce particulière- dangereuse de la diglossie. Com- dur et impitoyable, sans doute né- ce qui paraît sérieusement contes- dé à la tête du pays. À présent, la ment l’antiracisme comme « une ma- ment en appeler à la “résistance cessaire pour maintenir la paix civile. table est l’institution d’un traitement maison France brûle (au sens chine de guerre contre la France ». linguistique” tandis qu’un nombre Il a fait sensiblement moins de vic- national de données à caractère propre comme au sens figuré) et, Citant la revue Itinéraires il écrit que croissant d’enseignements sont times que les Américains depuis 2003, personnel, placé sous l’autorité du parce qu’on trouve que la lance à son but « n’est pas de combattre dispensés dans nos universités ou sans parler de l’effroyable gâchis po- ministre chargé de la santé, des- incendie est devenue surannée, on le racisme qui est politiquement in- grandes écoles en anglo-américain, litique dont le président Bush s’est tiné à améliorer le suivi et l’ins- lui préfère le seau d’eau ! Ainsi l’É- existant et psychologiquement fort qu’étudiants, professeurs et cher- rendu coupable et dont le monde n’a truction des mesures d’hospitali- tat joue-t-il les pompiers de fortune, modeste : il est de traiter en ra- cheurs sont contraints au bilin- pas fini de payer les conséquences... sation d’office. Car, de deux alors qu’il se comporte comme un cistes des gens qui ne le sont pas. guisme (ce que réussit à éviter par (Balkans Infos, CAP 8, B.P. 391, choses, l’une : soit les malades pyromane, donc comme un… délin- Il est devenu ainsi une technique exemple un pays comme le Japon, 75869 Paris cedex 18) internés d’office par les maires quant ! d’assassinat juridique, moral et po- dont la langue n’a pourtant nulle sont des criminels, soit ils ne le I litique. Il assimile au racisme le na- vocation internationale) ? Jacques CEPOY

4 L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 POLITIQUE ÉTRANGÈRE

L'ÉVOLUTION DE L'OTAN Vers une nouvelle Vigilance ! guerre civile au Liban ?

e sommet par écrasé ses villes e Liban risque-t-il de retour- par semble des Libanais contre ce parti des chefs Pascal NARI et infrastructures ner à la guerre civile alors qu’il Élie HATEM et, par delà, contre les Chiites. Ld’État et de sous les bombes Lvient d’en sortir depuis L’échec de cette stratégie a gouvernement des pays membres afin de briser sa volonté de résis- quelques années ? Les Libanais, mouvement pour la libération du conduit les ennemis du Liban à de l’Organisation du Traité de l’At- tance contre la politique américaine, dans leur majorité, ainsi que les sud, en le transformant d’une pure chercher d’autres moyens pour par- lantique Nord (OTAN), qui vient de voilà que, sept ans plus tard, cette amis du pays du Cèdre, s’emploient en un mouvement de résis- venir à cette fin. C’est ainsi que les se tenir à Riga, consacre l’évolu- même OTAN veut la faire intégrer à lui faire éviter ce calvaire. Mais tance nationale. Tel était l’objectif attentats et les assassinats de po- tion de cet appareil créé naguère son dispositif militaro-politique ! les manipulations et les manigances de l’armée israélienne qui s’était litiques se multiplient pour faire en- pour faire face à la menace sovié- L’OTAN est actuellement pré- retirée du Liban en 2000, en im- dosser à la Syrie, supposée sou- tique sur le “monde libre”. sente en Afghanistan où ses forces Après putant ce retrait aux actes militaires tenir le Hezbollah, la responsabi- tentent de relayer – soulager diront la libanisation et de résistance du Hezbollah. De- lité de ces actes et pour parvenir à Washington certains – la présence militaire amé- de l’Irak,on tente puis cette date, ce mouvement a semer de nouveau la zizanie entre voudrait ricaine qui rencontre de plus en l’irakisation recueilli la sympathie d’un bon ces deux pays dont le destin s’est plus de résistance. nombre de Libanais, de toutes trouvé lié depuis le mandat fran- transformer l'OTAN du Liban. en une sorte Cette extension, souhaitée voire confessions confondues et a rallié çais. Faut-il rappeler que la Syrie exigée par Washington, est déjà la quasi-totalité de la communauté a été longtemps entraînée dans la de gendarme bien engagée, de manière discrète de ses ennemis se multiplient pour chiite qui représente près de 40 % guerre du Liban, qu’elle a totale- planétaire. et sans que les peuples concernés semer la zizanie entre les diffé- des Libanais. ment été manipulée, jusqu’à obte- et leurs parlements l’aient décidé rentes communautés. Cela s’insère nir un “mandat” des États-Unis et Instaurée le 4 avril 1949 dans (tel est le fonctionnement des dé- dans une politique de déstabilisa- de ses alliés pour occuper ce pays le climat de la Guerre froide pour mocraties d’aujourd’hui, où les tion générale du Proche et du manu militari et lui imposer un ré- couvrir la zone Europe et Atlan- peuples sont de plus en plus ex- Moyen Orient, dans l’objectif de l’ef- gime qui lui fut longtemps inféodé. tique, cette organisation a été com- clus au profit des “grands intérêts”) ; friter en micro-États confessionnels La Syrie qui a quitté militaire- plétée ou prolongée par d’autres est-elle souhaitable ? et théocratiques. ment le pays du Cèdre et dont le afin de créer une chaîne de pro- Après la libanisation de l’Irak, régime est de plus en plus fragi- tection contre la menace sovié- on tente l’irakisation du Liban, au- lisé, qui est pointée du doigt et ac- tique : le CENTO qui englobait la Réserves trement dit le soulèvement des com- cusée d’avoir assassiné l’ancien Turquie, également membre de françaises munautés les unes contre les Premier ministre libanais Rafiq Ha- l’OTAN, l’Iran et le Pakistan, et autres, en particulier et dans un riri, a-t-elle intérêt à commettre des l’OTASE pour la zone Asie-Paci- Faudrait-il intervenir massive- premier temps, les différentes com- actes condamnables par l’opinion fique. Ces deux organisations ment en Afghanistan où les forces munautés contre les chiites pour Pierre Gemayel publique de la communauté inter- n’existent plus aujourd’hui. actuelles sont nettement insuffi- qu’en un deuxième temps nais- nationale ? Depuis l’effondrement de santes, en Irak et ailleurs, pour sent des hostilités entre druzes, En imputant la responsabilité L’assassinat de Pierre Ge- l’Union soviétique, l’OTAN cherchait protéger des intérêts (notamment sunnites et chrétiens. de la dernière opération militaire au mayel, dernier en date dans cette une nouvelle vocation, un nouveau pétroliers) qui ne sont pas ceux Ainsi, l’intervention israélienne Hezbollah (l’enlèvement de deux série, à la mémoire de qui nous rôle. On se souvient que la France des pays et des peuples membres de l’été dernier avait pour objectif soldats israéliens par ce mouve- rendons hommage ainsi qu’à sa avait quitté l’armée intégrée et le de l’OTAN ? Les forces du Pacte de soulever la majorité des com- ment en a été le casus belli) mais famille et à son père, l’ancien pré- commandement militaire de l’or- atlantique, contrôlées et com- munautés libanaises contre le Hez- aussi et surtout en détruisant l’en- sident Amine Gemayel, ami de l’Ac- ganisation sous De Gaulle, sage mandées par Washington, de- bollah qui doit, en réalité, son poids semble de l’infrastructure du pays tion française, réveillera-t-il les décision pour permettre à Paris de vraient-elles se transformer en politique et militaire à Israël. Ce du Cèdre, Israël espérait obtenir consciences ? garder la disposition de ses forces “force d’intervention rapide” pla- dernier avait légitimé la lutte de ce un soulèvement général de l’en- I armées et sauvegarder son indé- nétaire ? pendance militaire, surtout en rai- Jusqu’à présent,Paris a été la son de ses engagements envers seule capitale importante des pays Madagascar : la poudrière les pays de notre ex-Empire. Mais membres à exprimer des réserves elle était restée adhérente à part sur le processus. On ne pourrait e 18 novembre dernier une par nana a refusé de reporter la date entière du Traité, et tenue, donc, que l’approuver. L’affaire est trop tentative de coup d’État a eu Renaud DOURGES du scrutin alors que plusieurs de par son engagement fondamental grave et la tendance actuelle, hé- Llieu à Madagascar et la presse ses opposants n’ont pas eu le de solidarité en cas de menace ex- las, trop lourde pour que cela française s’est peu intéressée à cet événement. temps d’éditer leurs bulletins de vote. térieure. puisse être traité en catimini et les Pourtant les liens entre la Grande Ile et la France Sous la présidence des quatre opinions publiques tenues dans ont survécu à l’indépendance. Dix huit mille fran- successeurs du général De Gaulle, l’ignorance presque totale. çais vivent à Madagascar et les Malgaches, popu- Misère et corruption la France a réintégré progressive- Le sommet de Riga a traité du lation calme et ne faisant pas parler d’elle, résidant ment l’OTAN et ses organismes. sujet. Dans la presse on a prati- en métropole est sensiblement du même nombre. Depuis les événements du 18 novembre, le La disparition de la menace com- quement escamoté le fond du pro- La raison du putsh avorté du général Andriana- président a clairement menacé ses adversaires muniste imposait une transforma- blème en ne parlant que de fidisoa, appelé familièrement Fidy, est due au refus ainsi que la presse malgache. Un journal indé- tion de l’organisation et de ses obli- quelques aspects secondaires, du gouvernement actuel de le laisser participer aux pendant, La Tribune de Madagascar, n’est plus gations. Les pays de l’ex-bloc so- voire anecdotiques, comme le pe- élections présidentielles prévues théoriquement le distribué dans les avions de la compagnie natio- viétique y ont fait leur entrée, surtout tit-déjeuner pris ensemble par tel 11 décembre. La date sera- t-elle respectée ? Nul nale. On se souvient que Chirac avait soutenu l’an- pour se protéger contre la menace ou tel ou du dîner d’anniversaire ne peut le dire puisque les onze concurrents s’op- cien président socialiste Ratiskara battu par Ra- russe qu’ils n’ont pas encore ou- de Jacques Chirac. posant au président Ravalomanana, candidat à sa valomanana, candidat des États-Unis. bliée. L’adhésion des pays com- Une vigilance permanente et propre succession, se sont mis en grève de scru- Madagascar, pendant ce temps, s’enfonce dans posant l’Union soviétique, l’Ukraine, un sérieux débat national s’impo- tin pour protester contre l’organisation de l’élection. la misère et la corruption et l’on peut craindre, quel la Géorgie, l’Azerbaïdjan même, sent sur ce sujet où il va de l’inté- Dès le mois d’octobre, un opposant à l’actuel que soit le résultat du scrutin, des débordements est problématique et irrite Moscou rêt du pays et de l’indépendance gouvernement résidant à l’étranger voulant dépo- qui accéléreront la déstabilisation de cet ancien au point de constituer un des points de sa diplomatie et de ses forces ser sa candidature s’est vu refuser l’entrée sur le joyau de l’Empire français. Les semaines à venir de tension entre la Russie du pré- militaires. territoire malgache. En dépit des demandes des sont à suivre avec une grande attention. sident Poutine et les pays de I autres candidats à la présidence, Ravalomana- I l’Ouest, particulièrement les États- Unis et l’administration Bush.

G DANS LE NUMÉRO d’octobre Le même numéro de la Ga- Extension 2006 de la GAZETTE DE LA “LA GUERRE POUR L’EAU” zette publie un article de Denis MAISON ROYALE DE FRANCE, les Israéliens, les Turcs et leurs aux métaux précieux et aux About décrivant la place de Jusqu’où doit et peut aller Mgr le Comte de Paris attire l’at- voisins syriens et irakiens, tout épices, on ne pourra jamais se l’Iran dans la géopolitique de l’OTAN ? Washington voudrait la tention sur La guerre pour l’eau. comme entre l’Égypte, l’Éthiopie priver d’eau. » la région et un entretien de transformer en une sorte de gen- Il écrit : « Les divers conflits au et le Soudan. Plus loin, le Prince évoque Pierre Lafarge avec le chef de darme planétaire. Elle est interve- Moyen-Orient sont exacerbés par Les véritables enjeux du troi- le projet d’aqueduc égyptien la Maison royale du Monténé- nue contre la Serbie pour soutenir un enjeu vital dans cette région sième millénaire ne sont, en ef- amenant l’eau du Nil vers Is- gro, le prince Nicolas Pétro- l’Albanie qui entretenait – le mot aride : l’eau. La répartition des fet, plus la détention d’énergie raël et Gaza : « Il devrait non vitch-Niégosch. (La Gazette de est faible – les séparatistes du Ko- eaux de surface comme celle des fossile qui tendra à s’épuiser pour seulement être fortement soutenu la Maison royale de France, 74 sovo avec l’encouragement ouvert eaux souterraines est devenue disparaître mais bien “l’or bleu”, par les instances internationales, rue des Cévennes, 75015 Paris) de Washington. source de tension entre Israël et sa possession, son exploitation dont la France, mais recevoir toute Après que ses forces armées la Palestine, mais également entre et sa distribution. Contrairement l’aide qu’il mérite. » Jacques CEPOY eurent frappé durement la Serbie,

L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 5 HISTOIRE

ermoz, l’Archange, de- Face aux menaces intérieures, meure dans l’imagerie po- Mermoz rallie le mouvement des Mpulaire, un pilote presti- Croix-de-Feu dont le lieutenant-co- gieux dont la beauté virile avait Mermoz, un Français lonel François de La Rocque a pris conquis de nombreux cœurs. Ce la tête en 1931. En février 1934, il qui est juste, mais un peu court. adhère à la Ligue des volontaires Tel est l’état d’âme de l’homme par le ciel déjà se faisait pâle Mer- nationaux. Mais en juin 1936, les Jean Mermoz, qui sait que sa vie reste entre les le général de corps aérien (CR) moz me serra le bras et si fort Ligues nationales, dont les Croix- né en 1901, mains de Celui dont le poète de Jacques LE GROIGNEC que je sentis ses ongles. “Tu de-Feu sont dissoutes par le Front l’air évoquait le règne : vois, c’est l’heure où à Dakar...”. populaire. Le Parti social français disparut le 7 marades. Dans une lettre du 11 C’était l’heure où les mécanos (P.S.F.) est alors créé, dès juillet décembre 1936 « Je me suis évadé de la novembre 1935, adressée à Cou- se frottent les yeux et retirent 1936, par La Rocque qui en confie dans sombre prison du monde zinet, il écrit : « Je me suis sé- les housses d’hélice, où le pi- la vice-présidence à Mermoz. l'Atlantique-Sud, Guidé par le soleil, paré de Gilberte depuis trois lote va consulter la météo, où Ses amis lui ont proposé un il y a je me suis élevé jusqu’au mois [...] Pour conserver mon la Terre n’est plus peuplée que poste de choix qui l’éloignerait des tumulte joyeux ménage il faudrait que je rompe de camarades [...] Déjà l’un pré- risques de la Ligne, et dans lequel soixante-dix ans. Des nuages déchirés avec ma vie hasardeuse ou que parait la fête pour d’autres, déjà il pourrait apporter la mesure de de lumière... je vive dans l’équivoque de l’un tendait la nappe d’un fes- son expérience et de ses qualités Saint-Exupéry, dans ses Car- Alors, dans le silence constants replâtrages. Je ne tin dont nous ne serions point humaines. Appuyées par sa mère, nets (I, 28), évoque « les invi- exaltant de mon cœur, peux plus [...] Gilberte est une les convives. D’autres cour- ces démarches sont vaines. Au soir sibles trésors et, dans le cas de je me suis avancé du 5 décembre 1936, alors que l’on Mermoz, ce luxe intérieur ». Dau- Vers les hauts lieux fête, quatre jours à l’avance, son rat, figure de proue de l’Aéropos- inexplorés de l’espace. trente-cinquième anniversaire, il tale, cite, à son tour (Le Figaro, 13 J’ai tendu la main et j’ai répond « Le devoir m’appelle au- décembre 1936), « la lumineuse touché la face de Dieu » (2). près de mes camarades, je ne vie intérieure » de celui qui « à les abandonnerai pas. Au lever coups d’épaule puissants, écarte du jour, je pars pour Dakar ; ma les difficultés, les vainc. Sa pen- Fabuleuse décision est irrévocable. » sée, son âme sortent fortifiées aventure des sacrifices ». L’âme ! Le grand mot ! C’était Le père Walther, curé de Saint- Le Ciel celui de Mermoz, adolescent, qui Louis du Sénégal, rapporte que le fut son désir... en Auvergne, en 1917, s’isolait sur 11 mai 1930, à la veille de sa tra- la montagne « dans l’Infini de la versée de l’Atlantique sud, Mer- Dakar, sa dernière escale. Le Nature, dans l’Infini de mon moz était venu prier à l’église ; 7 décembre 1936, à sept heures, âme » (Icare : Mermoz, t. 3). Et qu’il lui avait parlé de l’inquiétude il déjauge la Croix du Sud ; desti- plus tard, en Syrie, où sa vie de de sa mère ; qu’il lui avait de- nation Natal. Tous les quarts pilote militaire le conduira, les ho- mandé de prier pour son succès d’heure, Cruveilher, le radio, trans- rizons illimités du désert firent naître et d’entendre sa confession (Icare met le classique T.V.B. Mais, à 10 en lui ces sentiments mystiques : Mermoz). h 47, parvient un ultime message qu’exprimait Charles de Foucauld Son raid Dakar-Natal consti- qui marque la frontière de l’au-delà : depuis l’ermitage de l’Asekrem où tue le dernier maillon de la Ligne « Jean Mermoz Coupons moteur arrière il sera assassiné : « On ne peut France-Espagne-Maroc-Afrique 1901-1936 droit ». le voir sans penser à Dieu ; j’ai occidentale-Amérique du Sud. Il « Mermoz, écrira Saint-Exu- peine à détourner mes yeux de couronne la fabuleuse aventure péry, s’était retranché derrière cette vue admirable dont la de l’Aéropostale dont Pierre- enfant que j’ai adorée [...] À raient leur risque. “Ici, quelle son ouvrage, pareil au mois- beauté et l’impression d’Infini Georges Latécoère avait été le vingt-trois ans, une enfant re- saleté”, acheva Mermoz. ». sonneur qui, ayant lié sa gerbe, rapprochent tant du Créa- promoteur, et Didier Daurat le chef fait sa vie. Moi, je ne referai pas Car celui qui n’a jamais cessé couche dans son champ ». teur » (1). hors pair qui rendra hommage aux la mienne. Elle m’appartient de lutter contre les éléments – au Sa tombe marine porte l’épi- Il écrit, relate Joseph Kessel navigants – pilotes, navigateurs, d’ailleurs si peu... » prix de dix-huit accidents graves – taphe que le poète écrivit pour dans son Mermoz, à sa mère, Man- radios, mécaniciens – lorsqu’il évo- est aussi un combattant politique. Icare : gaby, qui sera le grand amour de quera les « cent-vingt et une ba- Il avoue : « Je hais la politique. Il mourut, poursuivant sa vie : « Ma petite maman [...] lises que le sacrifice des nôtres Combattant Et j’en fais, tant pis et tant mieux, une haute aventure. je suis en parfaite harmonie avec a édifiées depuis les bords de politique je prends mes responsabilités. Le Ciel fut son désir, la Mer cette immense solitude. Il me la Garonne jusqu’au rivage du Le jugement seul de mes amis sa sépulture. semble par moments que j’ai Pacifique » (cité par Icare). Il confirme ainsi sa volonté de compte... » (Icare : Mermoz). Il Est-il plus beau dessein, changé. Dans quel sens ? Je ne L’épopée de l’Aéropostale poursuivre la mission à laquelle il dénonce « les contingences ou plus riche tom- pourrais encore le dire. » Un jour, s’inscrit ainsi parmi les phases de a consacré sa vie de pionnier. d’une politique pourrie et dé- beau ? (4). il le dira : « J’aurais pu aussi bien la conquête de l’Air par « une es- « Amitiés mortes, notre seul faillante qui ne donne que des être méhariste ou mission- pèce zoologique qui tend d’elle- soutien » confie-t-il (3). Car ce exemples d’avilissement, de pau- I naire. » Psichari ou Foucauld... même à faire varier sur domaine serait trahir la mémoire de ses ca- vreté morale et d’action sans ré- Il a écrit à ses grands-parents : d’existence », écrit Paul Valéry marades disparus et renier le sens sultat » (Icare : Mermoz). Il ac- (1) Cité par René Pottier dans « Dieu régit nos destinées ; il dans L’Européen (Pléiade). Pour et la portée de leur sacrifice s’il cuse « les communistes qui Charles de Foucauld, le prédestiné faut savoir se résigner sans Mermoz, cette conquête est l’apa- abandonnait l’ouvrage entrepris poussent ce pauvre et triste (Nouvelles Éditions Latines). courber la tête et continuer tou- nage « toute l’aviation française en commun. Blum dans les reins [...] Tous les (2) John Gillespie : Haut Vol, traduit jours plus avant vers l’avenir » » écrit-il dans Mes vols. C’est aussi Ses pensées ne quittent plus jours, défilés communistes avec de l’anglais par Edmond Petit dans (Icare). L’harmonie entre l’humain une victoire contre la concurrence les horizons qu’ils découvraient drapeaux rouges [...] On chante Le ciel et ses poètes. et le divin, il la résume : « Dieu, étrangère, notamment allemande. ensemble. « Je me souviens, plus l’Internationale que la Mar- (3) Cité par Benard Marck : Jean Mer- c’est la simplicité, la liberté, la Le 23 août 1930, il a épousé écrit Saint-Exupéry dans Terre des seillaise. Les drapeaux tricolores moz, défricheur du ciel. (Éd. de l’Ar- bonté, la beauté et le courage. à Paris, en l’église Saint-François- Hommes, je me souviens d’une sont arrachés des fenêtres [...] chipel, p. 346. C’est l’oubli de soi-même, c’est Xavier, une très jeune femme, Gil- nuit de Paris où Mermoz et moi Les usines, sans cesse réoc- (4) Philippe Desportes (1546-1606) : le bonheur de l’évasion, du sa- berte Chazotte, laquelle reste ob- [...] nous sommes retrouvés au cupées ou soviétisées, n’ont Sonnet pour Icare, cité par Georges crifice. C’est l’amour sans me- sédée par l’événement fatal dont seuil d’un bar, écœurés d’avoir plus aucune rendement .[...] Le Pompidou dans son Anthologie de sure. C’est ce que je sens il peut être victime après tant d’ac- tant parlé, d’avoir tant bu, d’être danger extérieur est plus grave la poésie française, Livre de poche, lorsque je vole ». cidents et comme tant de ses ca- inutilement si las. Mais comme encore » (Lettre à Couzinet). p. 101).

Les choix de Sarkozy montré plus préoccupé du sort d’Israël que de l’in- — Grand Prix à titre français : le Conseil consti- Jeudi 30 novembre, lors de sa longue émission de tégrité du Liban à préserver. Voilà qui augure mal s’il tutionnel pour sa complaisance dans l’affaire des bre- trois heures sur France 2 ( À vous de juger), Nicolas devait l’an prochain entrer à l’Élysée. vets (déposés uniquement en anglais) et deux affaires Sarkozy a évoqué rapidement la politique extérieure antérieures : la loi Toubon censurée par le Conseil de la France. Il a dit que sur le bureau du prochain constitutionnel en 1994, puis la loi Murcef sur le C.O.B. président de la République, il y aurait des dossiers Les carpettes de l’année validée en 2002. importants et il a cité : l’Iran, la “sécurité d’Israël”, — Prix à titre étranger décerné à Ernest-Antoine le sort des Palestiniens, le Darfour. Au Proche-Orient, Le 22 novembre, l’Académie de la Carpette an- Seillère, qui, prenant la parole en mars dernier à il y a aussi un pays en grand danger avec lequel la glaise, présidée par Philippe de Saint-Robert, qui, de- Bruxelles au nom des patrons européens, s’était ex- France a des liens multiséculaires : le Liban, mais puis plusieurs années, mène une action vigilante pour primé en anglais, ce qui avait provoqué la sortie de Sarkozy n’en a cure. le respect de la langue française, s’est réunie au res- Jacques Chirac qui représentait la France. Déjà, en juillet cette année, lorsque l’aviation is- taurant le Grenadier, gare d’Austerlitz pour décerner raélienne pilonnait le Liban, le même Sarkozy s’était ses deux prix pour l’année 2006 : P.P.

6 L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 DOSSIER LA SUISSE ET LES SUISSES LE SANG Entre tradition VERSÉ ENSEMBLE et démocratie I Nous allons effectuer cette semaine un petit tour a Suisse est une démocra- torien William Rappard a pu écrire blié un ouvrage collectif pour faire chez nos voisins helvètes. par tie, et même une que le point sur l’identité helvétique. Il Ce peuple discret, dans ses « démo- Guy C. MENUSIER « le terme de confédération, splendides paysages al- Lcratie témoin » selon l’ex- que l’on maintint [dans la consti- vaut la peine d’y revenir afin de pestres et lacustres, et à pression d’André Siegfried ; une croyances religieuses, si diffé- tution de 1848], fut une conces- saisir une particularité fortement l’abri de ses libertés ances- fédération de vingt-six républiques, rentes qu’elles puissent être ; sion faite par la logique à la tra- teintée de républicanisme. trales, ne fait guère parler soit vingt cantons et six demi-can- c’est encore la haute culture, et dition ». La Suisse est donc un Un des auteurs de cette bro- de lui. C’est un signe assu- tons (par exemple, les demi-can- cette vieille civilisation euro- État fédéral. chure rappelle d’abord quels fu- rément plus de sagesse tons de Bâle-Ville et de Bâle-Cam- péenne issue du christianisme, Dans La Suisse ou l’histoire rent les prolégomènes révolution- que de désintérêt pour les pagne), qui possèdent chacun un qui est en somme partout égale d’un peuple heureux (3), l’écrivain naires : « À une époque où les affaires de ce monde... gouvernement et un parlement, en elle-même » (2). d’origine neuchâteloise Denis de nations étaient conduites d’une ainsi que leur propre constitution Reynold a une conception éle- Rougemont (1906-1985) observe manière autocratique, où les ar- À vrai dire la Suisse, répu- que chapeaute la constitution fé- vée, un brin esthétisante, de l’école qu’ainsi « le tour est joué, non mées étaient puissantes, où les blicaine — disons même dérale, laquelle s’impose à tous. d’Action française. Mais la dis- dans les mots et les concepts, moyens de transport se sont parce que républicaine — tinction qu’il établit entre politique mais dans les faits. Car l’union mécanisés, où l’industrialisation nous conforte dans les et culture paraît aujourd’hui artifi- est réelle et les autonomies le se généralisait et finalement où idées de nos maîtres. Ceux- Les traités de cielle. Au demeurant, les « enne- sont aussi ». l’économie mondiale allait en se ci nous ont appris que les Westphalie en 1648, mis communs » qu’il évoque en Un gouvernement, un parle- consolidant, la Confédération a meilleures institutions pour à bien des égards, ce début de XXe siècle sont déjà ment, une constitution pour chaque très vite ressenti le besoin d’une par fondent plus dans la place ; ils tiennent les com- canton, mais à usage domestique. administration et d’un gouver- Michel FROMENTOUX l'identité helvétique mandes et s’emploient à détruire C’est là où perce l’idée, pour ne nement plus forts, d’un marché que la constitution ce que Reynold appelle « notre pas dire la marotte, fédéraliste d’un intérieur ouvert et unifié ainsi trésor commun ». Rougemont qui croit au principe que d’une politique économique un peuple sont celles qu’il de 1848. de subsidiarité : « La réussite de étrangère adéquate et centrali- tire de son histoire. Ainsi . Ce qui a conduit des cantons suisses où le La rupture cette solution, la stabilité et la sée » « la ma- jeu “démocratique” n’altère Avant de pénétrer plus à fond paix qu’elle a values à deux dou- jorité des cantons novateurs » pas le sens du bien com- dans cette singularité institution- de 1848 zaines de petits États dès le jour à briser la résistance des cantons mun et de la tradition. Une nelle, observons que la Suisse, où ils l’ont acceptée, pourraient « conservateurs » (guerre du monarchie en Suisse serait égalitaire en droit et révérant le Si, en Suisse, le jacobinisme donner à réfléchir aux Euro- Sonderbund en 1847). une révolution, et il serait suffrage universel, ne présente a reste contenu, limité à des cercles péens d’aujourd’hui ». Que voilà D’où il s’ensuit, cent cinquante vain de vouloir copier le priori qu’un faible attrait pour un velléitaires, la constitution fédérale un destin fascinant pour un pays ans après, un vibrant plaidoyer en système suisse dans un esprit peu ou prou nourri de la pen- de 1848, inspirée des idées révo- comme la France : devenir une faveur de la république, « com- pays comme la France où sée maurrassienne et convaincu lutionnaires de l’époque, n’en a sorte de canton dans une Europe munauté politique qui est née la république, fruit d’une de la supériorité du régime mo- pas moins balayé l’union protec- fédérale ! de la volonté du citoyen et qui idéologie ignorant la nature narchique, du moins pour ce qui est animée par son sens civique. du pays, n’a jamais bien concerne la France. Pourtant, cer- Dans cette communauté poli- fonctionné et ne fonction- taines idées du Martégal se sont tique, les élections des citoyens nera jamais bien. parfaitement accordées à quelques et les charges qu’ils exercent principes helvétiques comme la sont institutionnalisées. L’atti- Autre raison de nous inté- décentralisation, l’autonomie des tude servile est aussi éloignée resser à ces cantons cantons (les provinces en France) du Suisse que les institutions d’outre-Jura : l’Action fran- et l’autonomie communale. et les allures monarchiques ». çaise y a toujours compté On le voit, ici est décrit un sys- des amis. Nous rencontre- tème globalisant ; on ne parle pas rons ainsi Gonzague de Influence des Suisses, mais du Suisse Reynold et Marcel Régamey comme d’un être abstrait. Une telle (à qui notre correspondant de l’A.F. en Suisse Guy C. Menusier rhétorique ferait froid dans le dos a rendu hommage dans L’Action française a même si la réalité helvétique n’était infi- L’AF 2000 du 25 août exercé une notable influence in- niment plus complexe. En effet, si 2005). Nous penserons tellectuelle en Suisse romande, 1848 a profondément marqué la aussi à la Ligue vaudoise et principalement dans le canton de société et modifié les pratiques po- à son président actuel Oli- Vaud, par le truchement de Mar- litiques, cette date ne représente vier Delacrétaz, dont nous cel Regamey et de la Ligue vau- pas, dans l’imaginaire collectif, la avons souvent loué le réa- doise (1), et dans le canton de référence suprême. lisme traditionnel si voisin Neuchâtel autour d’Eddy Bauer et de celui de Maurras (1). de René Braichet. Dans le canton de Fribourg, bilingue et marqué Aux origines Et puis, si la France d’au- d¹une forte tradition catholique, jourd’hui manque à tous l’écrivain et historien Gonzague de Pour preuve : la fête nationale ses devoirs, nous ne pou- Reynold (1880-1970), un des fon- du 1er août, qui rappelle l’origine vons oublier les éminents dateurs de La Voie latine, s’est lui de la Confédération avec l’alliance services que rendirent au aussi imprégné de . conclue en 1291 par les petits pays long de l’Histoire à notre Intervenant au troisième congrès de Schwytz, Uri et Unterwald, in- pays les régiments de l’A.F. en décembre 1910, il a quiets de la politique hégémonique suisses, et plus particuliè- bien résumé la nature de cette in- des Habsbourg. À cette première rement les Gardes qui se Gonzague de Reynold (1880-1970) fluence en terre romande : Ligue se joindront au cours des sacrifièrent le 10 août 1792 Un trésor commun siècles, et non sans conflits, pour le service du roi Louis « Ce qui m’intéresse dans XVI face à une foule avide votre mouvement, ce n’est pas trice des États cantonaux attachés Activisme d’autres États souverains unis par de carnage. le côté politique, ce ne sont pas aux valeurs traditionnelles. L’ar- idéologique un lien confédéral. À noter la créa- vos revendications politiques : ticle 3 de cette constitution précise tion en 1979 du canton du Jura, Il appartient à l’Action fran- tout cela ne nous regarde pas, que « les cantons sont souve- Les constitutionnalistes suisses formé de trois districts franco- çaise et à ses amis de ré- nous autres étrangers. [...] Mais rains en tant que leur souverai- et nombre de leurs exégètes n’ont phones qui se sont séparés du clamer que justice soit ren- c’est autre chose, d’un ordre neté n’est pas limitée par la jamais pu résister à la tentation du canton de Berne. due à ces hommes qui por- plus élevé, plus général : des constitution fédérale, et comme messianisme démocratique et, tout Mais la grande date que tèrent au plus haut point le idées, une certaine conception tels ils exercent tous les droits à leur autosatisfaction, ont vu dans connaissent tous les Français est sens de l’honneur et de la de la vie, un état d¹esprit, une qui ne sont pas délégués au la Suisse la matrice d’une Europe incontestablement 1515, Marignan. fidélité, unissant leur sang doctrine. [...] Nous avons des pouvoir fédéral ». idéale. Cet activisme idéologique Les Confédérés, qui jusqu’alors à celui des plus illustres ennemis communs : ce sont les Par pouvoir fédéral, il faut en- s’est exprimé avec une vigueur s’étaient forgé une réputation de défenseurs des lys. idées jacobines, la Révolution, tendre pouvoir central. Or, par le particulière en 1998, année du 150e farouches guerriers, sont sévère- I les anarchies de toute sorte. Et jeu des législations successives et anniversaire de l’État fédéral. ment défaits par les troupes de contre ces ennemis communs, des révisions constitutionnelles, À cette occasion, l’institut Liber- François Ier revenues en Lom- (1) Olivier Delacrétaz : Le goût nous avons un trésor commun un renforcement des prérogatives tas, d’obédience libérale-radicale bardie. C’est la fin d’une épopée. du bien commun. Cahiers de à défendre : ce sont nos natio- du centre s’est opéré aux dépens (la droite modérée d’aujourd’hui, Les Ligues helvétiques re- la Renaissance vaudoise. nalités, nos traditions, nos des cantons. C’est pourquoi l’his- le progressisme de 1848), a pu- noncent à toute ambition ter-

L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 7 DOSSIER LA SUISSE ET LES SUISSES

dans les pays de l’Est ont aug- menté de 78 % en deux ans. L'Europe, Notre industrie chimique voit, elle aussi, ses exportations augmenter de façon spectacu- laire dans ces pays. En res- tourment helvétique pectant nos engagements à l’égard des pays de l’Est, nous développerons l’emploi en ritoriale, s’engagent dans la peine s’étaient-ils pronon- par être mise à contribution pour une Suisse ». voie de la neutralité et, l’an- cés par référendum sur l’im- Guy C. MENUSIER somme estimée à 200 millions Cette approche purement née suivante à Fribourg, signent Àmigration et le droit d’asile d’euros. Sans parler d’une inévi- comptable ne reste pas sans écho le traité de paix perpétuelle avec (AF 2000 du 5 octobre), les l’asile. Ils ont été sèchement désa- table adaptation de l’accord, déjà dans un pays où l’on a le culte de la France. Par ce traité, qui sera Suisses se rendaient à nouveau voués par le peuple. Cette fois, conclu, sur la libre circulation des la performance économique et où respecté durant près de trois aux urnes le 26 novembre. Ils de- c’est à l’initiative d’un petit parti personnes. Autant dire que nombre le chômage s’établit aux alentours siècles, la France reconnaissait vaient dire s’ils acceptaient ou re- d’extrême droite, les Démocrates de Suisses jugent sans aménité de 3 %, de quoi épater un Fran- l’appartenance du Tessin à la suisses, et surtout de l’U.D.C. blo- cette Europe supranationale dont çais. Il n’empêche, pour tâcher de Confédération mais obtenait en Nombre de Suisses chérienne qu’a été lancé le réfé- la logique et la finalité leur de- convaincre les hésitants, les par- échange le droit de lever des jugent sans aménité rendum contre une participation fi- meurent étrangères. tisans du “milliard de la cohésion” troupes en Suisse, droit qu’elle nancière considérée comme une Ce n’est pas que les Suisses ont insisté sur le fait que la Confé- exerça sans discontinuer jusqu’à cette Europe capitulation de Berne face au soient foncièrement “antieuro- dération en garderait la maîtrise, la Révolution. supranationale « chantage » de Bruxelles. péens”. Ils ont au contraire le sen- qu’elle choisirait, financerait et di- De cette situation, la Suisse dont la logique timent d’avoir été des précurseurs rigerait des projets « en toute li- saura tirer parti durant la guerre et la finalité en matière de fédéralisme. Mais berté et sans passer par de Trente Ans, d’abord en restant leur demeurent Ce n’est pas fini ils constatent que l’Union euro- Bruxelles ». C’est dire si les en dehors du conflit, puis en po- étrangères. péenne cède à un bureaucratisme Suisses, quelles que soient leurs sant définitivement les bases de Déconcertée par la mentalité envahissant et réglemente à tout convictions, tiennent en piètre es- sa neutralité. Elle décidait alors de helvétique, qui tranche dans le va, sans égard pour le principe de time l’Europe de Bruxelles. se doter d’une armée fédérale de fusaient une loi concernant la co- concert européen, la Commission subsidiarité tant vanté jadis par les 35.000 hommes ayant une fonc- opération avec les dix États ré- de Bruxelles, souvent gaffeuse à tenants d’une Europe mythique. I tion dissuasive, comme on ne di- cemment entrés dans l’Union eu- force d’arrogance, a évité toute sait pas encore à l’époque. Enfin, ropéenne, auxquels s’ajouteraient provocation verbale durant la cam- son indépendance fut reconnue des « pays autrefois commu- pagne référendaire. Une discré- Une approche par toutes les puissances euro- nistes, de l’Est et de la Com- tion temporaire et purement tac- comptable péennes signataires des traités de munauté des États indépen- tique. L’affaire est d’autant plus UN PETIT “OUI” Westphalie en 1648. Des traités dants ». Cette loi devant servir délicate que la même commission La campagne référendaire au- qui, à bien des égards, fondent de base légale pour débloquer en a, entre-temps, recommandé aux tour du « milliard de la cohé- POUR plus l’identité helvétique que la faveur de ces pays un milliard de États membres de l’U.E. d’accueillir sion » (en jargon fédéral) a tou- constitution de 1848. francs suisses (environ 620 mil- dès le 1er janvier prochain la Bul- tefois montré qu’une bonne par- UN MILLIARD Si l’indépendance de la Suisse lions d’euros) à verser sur dix ans. garie et la Roumanie, dont l’ad- tie des citoyens suisses consentait ne résista pas à la tourmente ré- Cette contribution helvétique à la hésion n’était prévue que dans un à une coopération poussée avec Les citoyens suisses ont volutionnaire et à ses avatars bo- « réduction des disparités so- an. Bien que pris de court, les l’U.E. Ce secteur de l’opinion est approuvé à 53 % des votants napartistes, la Confédération fut ciales et économiques » a été Vingt-cinq n’ont pas soulevé d’ob- surtout sensible aux arguments le “milliard de la cohésion” en rétablie dans ses droits au congrès promise en 2004 par le Conseil fé- jection dirimante. Il faudra donc économiques mettant en avant les faveur des nouveaux pays de Vienne. Par la suite, deux déral dans le cadre des marchan- bientôt parler de l’Europe des perspectives de retour sur inves- membres de l’Union euro- guerres mondiales n’altérèrent pas dages avec l’Union européenne. Vingt-sept. tissement. Comme, par exemple, péenne. Tous les cantons ro- sensiblement la neutralité du pays Lors des votations de sep- À Berne, on a rapidement fait cette élue libérale de Genève, Mar- mands ont majoritairement dit ni n’entamèrent son intégrité ter- tembre, ce sont les partis de les comptes. L’adhésion de la Bul- tine Brunschwig Graf, qui appelait “oui”, avec toutefois des dif- ritoriale. gauche qui contestaient les lois garie et de la Roumanie signifie les statistiques à la rescousse : « férences sensibles : si les Vau- restrictives sur l’immigration et que la Suisse pourrait à nouveau Les ventes de montres suisses dois suivent le Conseil fédéral à 61,4 %, les Valaisans ne sont Un pays sur que 51,5 % à donner un avis son quant-à-soi favorable. Les plus fortes résistances En filigrane de ce qui précède, se sont exprimées dans les on distingue au cours des derniers cantons alémaniques de siècles la permanence d’un ti- Suisse centrale et orientale, raillement suisse entre deux ainsi que dans le canton italo- conceptions du rapport au monde, phone du Tessin (62,9 % de et d’abord au voisinage européen, “non”). entre la préservation de valeurs En résumé, un petit “oui”, ancestrales et le messianisme ex- mais quand même un ac- périmental. La Suisse ou l’Europe ? quiescement global. La Com- La mondialisation des échanges, mission européenne va donc dont s’accommode assez bien remiser les mesures de rétor- l’économie helvétique à l’excep- sion qu’elle avait préparées en tion du secteur agricole très pro- cas de victoire des opposants. tégé, a rendu moins lancinante Et les négociations bilatérales, cette problématique. La Suisse se quasi permanentes depuis des satisfait des accords bilatéraux années, vont pouvoir reprendre conclus avec l’Union européenne dans un climat moins lourd de et n’envisage pas d’adhésion à menace et de suspicion. moyen terme. Une attitude distante Parmi les dossiers en sus- qui a pour effet d’exaspérer pens figurent notamment la quelques commissaires du Machin suppression des obstacles bruxellois. techniques au commerce, la D’où, en retour, le succès élec- participation des chercheurs toral remporté il y a trois ans par suisses aux programmes com- les eurosceptiques de l’U.D.C. et GUERRE ET PAIX AU XVIe SIÈCLE munautaires, l¹ouverture de l’arrivée au gouvernement de discussions sectorielles dans Christoph Blocher. Les élections Dans La Suisse ou l’histoire d’un peuple heu- hommage à la bravoure des Suisses, reconnue par les domaines de l¹agriculture fédérales de l’an prochain per- reux, Denis de Rougemont rappelle qu’aux François Ier, paraît-il. Pourtant, indemniser l’en- et de l¹électricité. En outre, mettront de vérifier s’il s’agissait termes du traité de Fribourg (1516), les Suisses nemi, surtout battu, devrait à première vue choquer Bruxelles a toujours en ligne d’une manifestation d¹humeur ou reçoivent de la France 400 000 couronnes, « l’esprit moderne. Car nos idées de la guerre, de de mire certains régimes fis- d¹une tendance lourde. en rachat du traité de Dijon, et 300 000 couronnes l’armée et de l’ennemi ne sont plus celles du XVIe caux cantonaux. I d’indemnité pour la campagne de Marignan, sans siècle ». Bref, “l’Europe” n’a pas fini compter les pensions accordées aux Ligues rhé- Ces lignes ont été écrites il y a plus de qua- de tourmenter les Helvètes, (1) L’AF 2000 du 25 août 2005. tiques, aux alliés et aux pays sujets ». Et l’écri- rante ans. Aujourd’hui, à l’élégance du geste cette étrange peuplade qui fait (2) Cité par Yves Chiron dans La vie vain suisse ajoute ce commentaire : « Ces dis- royal, « l’esprit moderne » semble préférer le ver- tache au cœur du continent. de Maurras, Éd. Perrin, 1991. positions surprenantes ne me paraissent pas avoir biage indigne d’une repentance formelle. (3) Dans la collection Poche Suisse surpris outre mesure nos historiens. Ils y voient un I G. C. M. de L’Àge d’Homme.

8 L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 DOSSIER

I Une célébration privée a LA SUISSE ET LES SUISSES eu lieu le 18 novembre 2005 aux Invalides, en présence L'A.F. REÇOIT de M. Samuel Schmid, pré- sident de la Confédération EAN HRISTOPHE Helvétique, à la mémoire des J -C VALLET Gardes suisses morts as- sassinés sans défense les 10 Pour l'honneur des Suisses août, 2 et 3 septembre 1792. Les Français ont alors pu dé- couvrir avec stupeur que le sacrifiésen 1792 service des Suisses en L’alliance avec la France oc- bonnet phrygien — s’assied tran- construire à cet endroit un mau- « reposent en ce lieu », c’est France n’avait jamais été re- cupe dans l’histoire du Service quillement, serre des mains (Le solée de réconciliation nationale, en effet là qu’elle devrait se trou- connu. étranger une place prépondérante. Roi te touche, Dieu te guérit...), la Chapelle Expiatoire. ver. Et nulle part ailleurs ! Je passe sur les réciprocités de la parle, interroge, et finit incroya- France et de la Suisse. blement par emporter l’adhésion Avec près de cent traités éta- de son peuple ébahi par tant d’hu- Une plaque Le sang blis entre la France et la Suisse, milité, de simplicité et de détermi- à la cave des Suisses c’est dire la richesse amicale de nation. nos deux peuples. Pour de nom- La vengeance se prépare en A.F. 2000. — Par rapport à cette A.F. 2000. — Des Gardes suisses breuses familles suisses, le Ser- ce 10 août : Danton décide d’ar- dramatique page d’Histoire, ont-ils été inhumés en d’autres vice étranger devient alors une ins- mer la foule et ce sont des milliers comment jugez-vous le geste du lieux de Paris ? titution. d’hommes et de femmes qui as- Président suisse ? J.-C. V. — D’aucuns m’ont rétor- De 1496 où Charles VIII insti- saillent le Palais des Tuileries. Un J.-C. V. — Le Président de la qué, c’est vrai, que les corps de tue la compagnie des “Cent coup de feu d’origine indéterminé Confédération a assisté, à la suite certains Gardes suisses ont été suisses”, gardes du corps du Roi, donne lieu à un premier assaut. d’un entretien avec son homo- aussi inhumés dans les cata- à 1616 où Louis XIII crée le Régi- Les Gardes suisses, au service de logue français, le président combes parisiennes ainsi qu’à Jean-Christophe Vallet, vi- ment des Gardes suisses il s’agit l’État français, réussissent à endi- Jacques Chirac, le 18 novembre Montmartre. Je ne le nie pas. J’ap- ticulteur, ancien élève de l’É- d’une alliance exceptionnelle qui guer l’attaque prévue. 2006 au musée des Invalides à précie même ce complément d’in- cole des Sciences Politiques, se noue entre la France et la C’est alors que Louis XVI, pen- Paris, à une cérémonie à la mé- formation. Raison de plus pour leur père d’une nombreuse fa- Suisse, un cas unique de parte- sant épargner le sang, leur donne moire de ces Gardes suisses rendre justice ! Effectivement, 29 nariat, une association qu’il serait l’ordre de cesser le feu. Un ordre morts en 1792, au cours de la- d’entre eux étaient déjà tombés mille, passionné d’histoire et juste et digne de célébrer. de paix écrit qui ouvre toute grande quelle fut dévoilée une plaque, sous les balles le 14 juillet 1789 de généalogie, a pris l’heu- Un mot extraordinaire retrace la porte de la guerre... offerte par une fondation suisse, lors de la prise de la Bastille ! 29 reuse initiative d’une pétition cette histoire : Louvois s’adresse la Fondation 1792, à la mémoire morts pour 7 prisonniers libérés ! pour qu’une plaque soit ap- à Louis XIV : « Avec tout ce que de ceux qui furent massacrés Il s’est même trouvé un jour- posée à la Chapelle Expia- lui ont coûté les Suisses votre La fureur alors qu’ils étaient désarmés. naliste suisse pour contester, au- toire à Paris, sur le lieu où Majesté aurait pu paver d’or une de Marat Quelle émotion de savoir près des autorités françaises, le furent inhumés les héroïques route de Versailles à Bâle ! » et qu’une cérémonie avait eu lieu nombre de Gardes sauvagement défenseurs du roi Louis XVI la riposte du lieutenant général gri- Dès lors, la foule en folie, ap- pour célébrer la mémoire des assassinés aux Tuileries. Mais lors lors de l’attaque du palais des son Pierre de Stuppa : « Mais prenant l’ordre royal, remonte à Gardes massacrés bien sûr ! d’une conférence donnée le 16 Tuileries par une populace avec tout le sang que les l’assaut des Tuileries. Le combat Mais aussi quels regrets ! Re- septembre dernier à Thiberville en manipulée. France, à la suite du discours de l’attaché militaire de l’ambassade Nous ne saurions trop en- de Suisse en France, le général courager nos lecteurs à si- Dousse, devant un public averti, gner, si ce n’est déjà fait, cette dont j’étais, ce journaliste a bien pétition dont nous donnons reconnu qu’il y avait peut-être jus- le texte en page 10. qu’à 1000 Suisses présents le 10 M.F. août… N’étant plus devant les au- torités du gouvernement français L’ACTION FRANÇAISE 2000. — il a même proposé qu’une plaque Peut-on estimer ce qu’ont re- à leur mémoire soit apposée sur présenté les Gardes suisses les murs de la future reconstruc- dans l’armée de la France ? tion des Tuileries ! À cet endroit JEAN-CHRISTOPHE VALLET. où « personne ne devrait pas- — Les Gardes suisses repré- ser avec indifférence, car pas un sentent un tiers de l’armée fran- pouce de cette terre qui n’ait été çaise pendant quatre siècles, soit arrosée du sang de Suisses » a un million d’hommes avec près écrit Paul de La Vallière. de 400 généraux, 41 lieutenants A.F. 2000. — Au-delà de cette généraux, 63 maréchaux et 80 question de chiffre, reste que brigadiers. Bien que leurs noms l’attitude du gouvernement fran- ne figurent pas dans la liste offi- çais est révoltante... cielle des maréchaux de France, J.-C. V. — En effet, car la véritable il semble que trois Suisses au- Le massacre des Suisses aux Tuileries question n’est pas dans le nombre raient pu accéder à la dignité su- exact de morts, tués ce jour-là ou prême. Suisses ont versé au service de inégal se traduit par l’assassinat grets que les Français n’aient rien quelque temps plus tard en prison. 500.000 soldats suisses au votre majesté on aurait pu rem- et le massacre de centaines de su de cette visite.... Qu’ils n’aient Les Gardes suisses morts en service de la France ne reverront plir un canal allant de Bâle à Ver- personnes, dont un grand nombre rien su de cette plaque... Que France, chacun le sait, ne sont ni jamais leur pays. sailles ». de Gardes suisses. D’autres qui rien n’ait été fait pour opérer un 300, ni 600, ils sont 500.000 ! Le 500e anniversaire de la seront faits prisonniers à ce mo- travail de mémoire et pour, à cette Je dois dire qu’en apprenant toutes Garde suisse pontificale a donné ment seront massacrés un mois occasion, rappeler les liens par- ces choses, j’ai été particulière- lieu à diverses célébrations et per- Le 10 août 1792 plus tard lors des tristes et néan- fois douloureux mais si forts qui ment choqué que cette démarche mis d’éclairer le service de nom- moins célèbres journées de sep- unissent nos deux peuples... d’un pays voisin, grand ami de la breux Suisses dans les armées A.F. 2000. — Ces quatre siècles tembre 1792 où la foule envahit A.F. 2000. — Qu’est donc de- France, ne soit pas mieux reçue étrangères. d’unité de sang entre la France un certain nombre de prisons pour venue la plaque en question ? par notre gouvernement et notre et la Suisse ont hélas connu le en massacrer les prisonniers, sur- J.-C. V. — Ce que j’en ai appris administration. Pourquoi cet affront funeste épisode du 10 août tout les Suisses : « il est temps a encore aggravé mon émotion. fait à la Suisse qui, à plus d’un Une richesse 1792... de se porter en armes dans les Car, loin d’être apposée en un titre, est un partenaire extraordi- amicale J.-C. V. — Ce jour-là, le roi prisons, d’en arracher les endroit où elle serait visible par naire de l’Europe et de la France ? Louis XVI, qui réside avec sa fa- traîtres, particulièrement les of- tous, elle s’empoussière actuel- Un partenaire sans doute plus A.F. 2000. — À quand remonte mille au palais des Tuileries est ficiers suisses et de les passer lement dans les caves des Inva- proche de la France que certains l’alliance des Suisses avec la défendu par environ 1100 Suisses au fil de l’épée » conseillait Ma- lides… pays à qui l’on passe tout ! France ? et quelques Gardes nationaux. rat, un des chefs révolutionnaires. Pourquoi ce silence ? Pour- Je pose la question : n’était- J.-C. V. — Un premier traité d’al- Mais Danton, l’homme clef du mo- Une partie de ces Gardes quoi cette “discrétion” ? Pour- ce pas à la France d’effectuer cette liance est signé en 1453 avec ment, veut en découdre avec le massacrés en août et septembre quoi cette plaque est-elle aux In- reconnaissance ? Charles VII puis renouvelé et com- système royal. 1792 seront “inhumés” au cime- valides ? Pourquoi n’a-t-elle pas plété jusqu’en… 1830, date à la- Contre toute attente, quelques tière de la Madeleine à Paris. À été apposée à la Chapelle Ex- quelle Louis-Philippe ne veut pas semaines auparavant, le 20 juin cet endroit, ils seront rejoints par piatoire qui semble être le lieu le Une pétition reconduire les traités d’alliance 1792, le Palais des Tuileries est le roi Louis XVI, la reine Marie- plus à même, le plus représen- avec la Suisse et institue alors la déjà assailli par le “peuple”. Le Roi, Antoinette, mais également au fil tatif, le plus symbolique pour cé- A.F. 2000. — C’est donc pour ré- Légion Étrangère avec le même bien qu’humilié, ridiculisé — on lui des épurations par de nombreux lébrer le souvenir des Suisses ? parer cet affront que vous “logo” : Honneur et Fidélité ! fait boire du vin, on le coiffe du révolutionnaires… Louis XVIII fera Comme le dit le texte même : avez lancé une pétition

L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 9 DOSSIER LA SUISSE ET LES SUISSES

sident de la Fondation 1792. Je me réjouis également de cette pre- Pour l'honneur des Suisses mière démarche. Toutefois à titre personnel, au nom des signataires et au nom de l’Histoire, je continue de regretter sacrifiés en 1792 que ces morts n’aient été honorés que lors d’une célébration privée.

pour que la plaque soit ap- posée à la Chapelle expia- Une association toire ? culturelle J.-C. V. — En effet, car depuis lors, je m’élève et je proteste solennel- A.F. 2000. — Envisagez-vous lement pour que le sacrifice de ces d’autres actions ? Gardes suisses désarmés soit à J.-C. V. — Je ne puis me satis- jamais reconnu par mon pays. faire de cette solution qui ne don- Si Lucerne a su honorer leur mé- nerait pas aux victimes des mas- moire en érigeant un monument, sacres d’août et septembre 1792 le monument du lion, dont l’histo- un digne mémorial. Au moins un rien Jules Michelet a pu dire que lieu où le passant serait interpellé « c’est une gloire unique d’avoir et invité à se souvenir. fait le monument naturel d’un Je ne suis pas un incondition- peuple », pourquoi la France qui nel de la repentance, mais je crois a des plaques à tous les coins de simplement utile de dire la vérité rue n’honorerait point la mémoire sur certains événements de notre des Suisses ? histoire nationale même lorsqu’ils Je m’inquiète du tri effectué ne cadrent pas avec certaines dans les célébrations, du tri ef- images d’Épinal d’une histoire of- fectué dans les commémorations, ficielle volontiers simplificatrice. du tri ainsi effectué parmi les morts J’ai donc décidé désormais de tombés au service de mon pays. créer une association culturelle à Je ne puis oublier ces hommes la mémoire des serviteurs suisses désarmés, assassinés par une Le monument du Lion de Lucène, qui ont si longtemps lutté à nos foule en folie, submergée par ses en l’honneur des Gardes suisses sacrifiés le 10 août 1792 côtés, sur tant de champs de ba- plus bas instincts qui les dépouille, tailles, de ces soldats républicains les éventre, les dissèque, les servi mon pays loyalement, fidè- et vous-même), des enseignants, mais je peux vous dire qu’au fur et bien souvent protestants au ser- émascule, les humilie, jusque dans lement durant des siècles. notamment de nombreux histo- et à mesure de mon combat cul- vice d’une France réputée catho- J’ai alors décidé, pour rendre riens et juristes, des militaires d’ac- turel, j’ai pris contact avec de nom- lique. hommage à ces hommes, et pour tive et de réserve, des anciens de breuses autorités. La mairie de Lu- Cette association portera l’af- que la plaque qui célèbre leur mé- la Garde suisse pontificale et de cerne naturellement ; la Fonda- faire, s’il le faut, devant la Com- moire soit apposée en un lieu nombreux descendants des fa- tion pour l’histoire des Suisses munauté européenne. adapté et visible de tous, de lan- milles de Gardes suisses. J’en ou- dans le monde ; le commandant cer une pétition à laquelle L’A.F. blie certainement. de la Garde suisse pontificale, et Propos recueillis 2000 a fait écho le 1er décembre La pétition fait le tour du monde l’ambassade de Suisse en France. par Michel FROMENTOUX 2005 et le 2 mars 2006. et je m’en réjouis ; la presse écrite Mais aussi la Nonciature aposto- et certaines radios s’en mêlent pe- lique. J’ai averti également le maire tit à petit. La pétition au fil du temps de Paris, celui du 8e arrondisse- Déjà devient crédible. Le sujet pas- ment de Paris où se trouve la Cha- 1450 signatures sionne. J’ai surpris les autorités pelle Expiatoire, lieu du charnier, dont certaines suivent avec bien- le général Bresse, directeur du mu- A.F. 2000. — Les signatures veillance mon action. Chaque jour sée des Invalides, et le directeur semblent abonder... des mails et des courriers arrivent des Affaires culturelles d’Île-de- Marat À ce jour nous sommes pour soutenir cette action ; il faut France. Le massacreur de septembre J.-C. V. — plus de 1450 signataires parmi les- continuer. L’ambassadeur de Suisse en la mort. Les témoignages de quels les écrivains et historiens Cette situation est révélatrice France se réjouit de la cérémonie l’époque sont accablants, révol- Jean Raspail, Francois Bluche, de ce que la France a du mal avec de remise de la plaque qui s’est tants : et bien des historiens ont Ghisain de Diesbach, Florence de son histoire, qu’elle n’assume pas tenue aux Invalides en présence volontairement tronqué les hor- Baudus, Michel Déon, de l’Aca- son passé et qu’elle préfère ca- des autorités suisses et françaises. reurs que ces hommes ont subies. démie française, Jean-Christian cher ses erreurs. Il choisit avec le gouvernement Je déplore ces exactions com- Petitfils, Hervé Pinoteau, Jean Sé- A.F. 2000. — Quel accueil vous français de souligner le caractère mises sur ces hommes sans dé- villia, Lady Antonia Fraser, Rey- réservent les autorités ? “privé” de l’opération. Je reconnais fense, fidèles seulement à leur ser- nald Secher. On y trouve des élus, J.-C. V. — Je me dois d’observer là la tradition d’humanité et la neu- Danton ment, et dont les ancêtres avaient des journalistes (dont Pierre Pujo à ce sujet une certaine réserve, tralité de la Suisse. Comme le pré- En finir avec la monarchie... Pétition pour la reconnaissance du sacrifice des Gardes suisses

e 10 août 1792, le roi Louis XVI est avec sa famille C’est une simple goutte de sang, puisque la Ré- et se sont sacrifiés pour rester fidèles au palais des Tuileries, défendu par 1.100 Gardes volution française fera entre 600.000 et 800.000 vic- à leur serment Lsuisses et quelques-uns des Gardes nationaux et times. Mais l’heure de toutes les repentances, du dé- lors des journées des 10 août, gendarmes restés fidèles au Roi. Danton, qui veut en bat sur la colonisation au refus de célébrer le bicen- 2 et 3 septembre 1792 découdre avec ce monarque qui refuse de signer cer- tenaire de la victoire d’Austerlitz, est peut-être aussi Sont tombés en combattant avec vaillance tains décrets, mobilise environ 17.000 hommes et les en- celle d’assumer entièrement notre passé. et reposent en ce lieu : voie aux Tuileries. En témoignage de reconnaissance et d’amitié au 26 officiers, environ 760 soldats Alors que les Gardes suisses viennent de surmonter peuple suisse, les signataires demandent que la plaque Ont survécu grâce à l’habileté de leurs amis victorieusement le premier assaut, Louis XVI leur donne à la mémoire des Gardes suisses, dévoilée en France 16 officiers, environ 350 soldats » l’ordre de cesser le feu et de regagner leur caserne à par le président de la Confédération Helvétique, M. Courbevoie. En chemin, ils sont massacrés, assassinés Samuel SCHMID, le 18 novembre 2005, actuellement soit transférée à la Chapelle Expiatoire, construite sur par les assaillants du palais, puis atrocement mutilés par conservée aux Invalides et portant l’inscription sui- le lieu du charnier qui recueillit leurs dépouilles et y une foule en folie. vante : soit fixée, signe visible du devoir de mémoire de notre 630 Gardes meurent ainsi, et 156 sont faits prison- pays. niers. Sans défense,ils seront à leur tour assassinés puis « INVICTIS PAX-PER VITAM FORTES, I mutilés dans leur prison lors des massacres du 2 sep- SUB INIQUA MORTE FIDELE » tembre 1792. Leurs corps seront jetés dans un vaste À la loyauté et au courage des Suisses * Les signatures sont à envoyer à : “Pétition Gardes charnier, à l’endroit où Louis XVIII fit construire la Cha- En l’honneur de tous ceux Suisses” Cidex 62, 21250 Corberon pelle Expiatoire. qui ont vaillamment combattu ou par mail à : [email protected]

10 L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 HISTOIRE

t si l’on reparlait des Mé- sainte Fare... Autour de ces mai- rovingiens ? On a coutume sons de prière et de labeur, vin- Ede considérer les rois de rent s’installer des ouvriers agri- France de la première race coles, des artisans, des familles. comme des princes débauchés, Dagobert à l'endroit Des bourgades s’assemblèrent. cruels, égorgeurs... Il est vrai qu’à « Quand nos rois, écrit Gobry, l’époque les hommes, même chré- la chance d’hériter de son père par saint, il allait être un ancêtre de fondaient ou protégeaient les tiens, étaient encore barbares, (mort en 629) d’un royaume uni- Michel FROMENTOUX Charlemagne. abbayes, ils ignoraient que, bien que, toujours en guerre, l’on vi- fié – tous les concurrents ayant souvent, ils créaient de nou- vait partout dangereusement et été occis –, installé dans la paix royales, et son principal conseiller, velles villes ». Ainsi se dessinait que mourir était pour un prince de et même dans une certaine pros- voire parfois son ambassadeur. Le fondateur déjà le paysage français. sang royal un sort plus enviable périté économique. Il avait bien un Grand bienfaiteur des monas- de Saint-Denis Dagobert décéda en 639. Il qu’être tondu. En outre, le sys- demi-frère cadet, Charibert (610- tères, il finit ses jours comme n’avait régné sur le Regnum Fran- tème de succession était si aber- 632), mais plutôt simple d’esprit, grand orateur dans son siège On le voit : Dagobert, roi cy- corum que dix ans, mais cela lui rant que tout frère ou neveu était d’intelligence mesurée, de volonté épiscopal de Noyon. Sa popula- nique et dévergondé (comme avait suffi à imprimer la marque un être de trop et que donc les médiocre, celui-ci n’en demandait rité augmenta encore après sa presque tous ses prédécesseurs) d’une volonté, dirait-on, presque exterminer était même devenu pas trop et eut l’élégance de mou- mort grâce notamment à la bio- vivait au milieu de bien des odeurs nationale. La suite, n’étant que mé- une condition de l’unité du rir jeune. graphie que rédigea de lui son de sainteté. « Il gardait la foi rovingienne, fut hélas moins royaume hérité de Clovis ! Dagobert devint donc assez ami intime saint Ouen. chrétienne, explique Ivan Gobry, brillante... La déchéance des rois Avec Ivan Gobry, nous avons vite roi du Regnum Francorum, qui lui inspira la source d’un de nouveaux désunis fit naître la déjà rencontré Clotaire 1er, fils de c’est-à-dire en fait seul roi de sage gouvernement de son légende ridicule des “rois fai- Clovis et Clotaire II (petit-fils du quatre royaumes (Austrasie à royaume et un soutien néants”. En trois générations, de précédent), dans leurs raffine- l’ouest, Neustrie au centre, Bour- convaincu aux forces spiri- Clovis II (634-657), fils de Dago- ments à la fois d’ignominie et de gogne, Aquitaine) chacun jaloux tuelles de la population. » C’est bert à Chilpéric III (743-755), ces fine intelligence. Avec Dagobert de ses prérogatives. Passons sur ainsi qu’il œuvra pour un prodi- rois furent très jeunes absorbés 1er, le même auteur nous repose tout un embrouillamini géogra- gieux développement de la vie mo- par les maires du palais, parfois un peu des horreurs des prédé- phique et généalogique dans le- nastique. Sa dévotion à saint De- avides et cruels, mais dont cer- cesseurs, et surtout, même par- quel Ivan Gobry évolue avec au- nis, éveillée dès l’enfance, le tains, après avoir fait tondre et en- fois, nous édifie. tant de précision que de virtuosité. poussa à vouloir édifier un mo- fermé au monastère ces fantômes Très vite Dagobert s’affirma éner- nastère à l’emplacement du tom- royaux trop guidés par leurs ca- gique et patient, ardent et perspi- beau du saint martyr et de ses prices surent reprendre en mains Grand chef cace à la fois. compagnons Rustique et Éleu- ce qui allait devenir la France. Ainsi d’État On comprend que, dans les thère. Il y établit la “louange per- Pépin d’Herstal, petit-fils de saint conditions de son règne, il ait fallu Il faut aussi se souvenir de Pé- pétuelle”, un office liturgique per- Arnoul et de Pépin de Landen, en- Disons tout de suite que nous au jeune roi montrer d’exception- pin de Landen (†640), grand let- manent. Émerveillé par le succès gendra Charles Martel, père de sommes très loin du roi débile qui nelles qualités pour s’entourer tré, d’une des plus grandes familles de cette pieuse entreprise, il choi- Pépin le Bref, qui offrit à la chré- ne savait pas bien mettre sa cou- d’hommes capables de le servir et d’Austrasie, maire du palais d’Aus- sit ce lieu pour y être inhumé de tienté Charlemagne. L’histoire de ronne ou sa culotte dans la chan- de le conseiller, tout en ayant trasie, puis de Paris. Deux de ses préférence à Saint-Germain-des- Dagobert, au sein d’une dynastie son populaire anti-royaliste qui date comme lui le souci de l’unité et de filles furent portées sur les autels : Prés où dormaient ses ancêtres. aussi tempêtueuse, prouve que de la veille de 1789 et dont l’au- la continuité de la dynastie. sainte Gertrude et sainte Beggha, C’est ainsi que Saint-Denis devint même dans les périodes obscures, teur, ne pouvant citer nommément L’histoire a retenu surtout le cette dernière ayant pour petit-fils pour les siècles à venir la nécro- des éléments d’espérance restent Louis XVI, se rabattit sur ce pauvre nom du gaulois d’Aquitaine, le Charles Martel. pole des rois de France. sous-jacents. Merci à Ivan Gobry Dagobert dont il ne savait stricte- grand saint Éloi (588-660) qui fut Saint Arnoul (†641), évêque de C’est un peu partout en France de nous l’avoir montré. ment rien, sans doute pour agen- un maître en orfèvrerie, avant Metz, ancien précepteur de Da- que Dagobert fonda des monas- I cer ses rimes... d’être fait par le roi Clotaire maître gobert, et bientôt son conseiller, tères. Une floraison de saints alla Le vrai, fils de Clotaire II et de des monnaies royales, puis par reste aussi un nom illustre. Par l’un de pair : saint Eustaise, sant Va- * Ivan Gobry : Dagobert 1er. Éd. Pyg- la bonne Gertrude, né en 604, eut Dagobert le gardien des finances de ses deux fils, dont l’un fut un léry, saint Léobard, saint Romaric, malion, 223 p., 20 euros. Militaires et saints our nombre d’esprits, il existe une “guerre juste” a été défi- par 2003), qu’il cite l’un et combattants sans uniformes, des résis- sorte d’incompatibilité entre le mé- nie par saint Augustin au René PILLORGET l’autre élogieusement. tants de la J.O.C. et de l’Action française tier militaire et la sainteté, voire la IVe et par saint Thomas Il va sans dire que M. morts en déportation. Enfin le cas de l’abbé P e vie chrétienne. En effet, le Décalogue or- d’Aquin au XIII siècle. Dans chaque pays Corvisier a opéré un tri parmi certains saints Franz Stock, aumônier militaire allemand, donne : « tu ne tueras point ». Or l’An- belligérant, les clergés des États en des temps très anciens, dont les biogra- qui prit le risque, pendant l’occupation, de cien Testament contient de nombreux ré- guerre, notamment en 1914-1918, ont ac- phies ont été manifestement déformées transmettre à leurs familles, les messages cits de guerre, dont il exalte les héros. cordé « l’idée de guerre juste » aux sen- au cours des âges, et éliminé ceux dont de condamnés à mort. D’autre part, lorsque le chrétien approche timents nationaux. l’authenticité était vraiment douteuse. Il a de la Sainte Table et dit « Domine, non Tels sont les grands faits que rappelle, tenu le plus grand compte de la béatifica- sum dignus », il reprend une formule qui dans la première partie de son livre Les tion, simple autorisation donnée à un ...au paysage fut prononcée par un centurion, donc un Saints militaires, M. André Corvisier, pro- évêque, à une région ou à une société re- français officier de l’armée romaine, à propos du- fesseur en Sorbonne, spécialiste d’histoire ligieuse d’honorer d’un culte public limité, quel Jésus déclare : « En vérité, je vous militaire de classe internationale. un serviteur de Dieu appelé “bienheureux”, Dans la troisième partie du livre, le culte le dis : chez personne, en Israël, je n’ai acte qui n’engage pas l’Église universelle. des saints militaires est présenté sous tous trouvé pareille foi » (Matthieu, 8, 10). Il l’a distinguée soigneusement de la ca- ses aspects. Ils ont, en effet, profondément L’histoire nous apprend également que Du calendrier... nonisation, décision prise par le pape dans marqué le paysage français. Des cartes d’autres officiers romains convertis ont re- le cadre de son infaillibilité : 256 canoni- montrent la forte proportion des paroisses fusé de sacrifier aux idoles, de prêter à la Établir une liste aussi complète que sations plus rigoureuses avec l’institution portant leurs noms : en particulier saint Mi- déesse Rome un serment contraire à leur possible des saints militaires pouvait sem- en 1588 de la Sacrée congrégation des chel, saint Martin, saint Maurice, saint Louis. foi, et accepté le martyre. Au XIXe siècle, bler une tâche à laquelle n’aurait pas suffi Rites. Il a montré également les différences Ils tiennent une place importante dans les au Japon, des militaires convertis au chris- la vie d’un chercheur. Fort heureusement, existant en matière de canonisation entre lettres et l’iconographie de notre pays. tianisme ont eu un comportement sem- il existait des entreprises de recensements Église catholique et Églises orthodoxes L’ouvrage de M. Corvisier comporte blable, et l’ont payé de leur vie. En outre, de tous les saints, des Acta, publiés par orientales. aussi en annexe : seize reproductions le « tu ne tueras point » du Décalogue la Société des Bollandistes, du nom de Corvisier a également soigneusement d’œuvres d’art caractéristiques, un corpus doit être compris dans le sens « tu ne Jean Bolland, jésuite originaire du Lim- distingué les martyrs, dont Jeanne d’Arc des saints militaires, arrêté à 1991 et leur commettras pas de meurtres ». Le sol- bourg, (70 volumes, parus de 1646 à 1940), (dont il existe un étonnant éloge par Wins- litanie ; enfin, une importante bibliogra- dat envoyé au combat est amené à por- par les Bénédictins de Paris (13 volumes, ton Churchill), ceux de l’extrême-Orient et phie. ter atteinte à la vie de ceux qui lui sont publiés entre 1935 et 1939) et de Ram- de l’Ouganda ; les confesseurs de la Foi, Cette étude rigoureuse n’exclut pas, opposés. sgate (traduction française de 1991) en- ainsi saint Martin de Tours, saint Louis, chez l’auteur, le talent littéraire, les por- Avec les invasions barbares, l’Église fin, source essentielle, les six volumes de Ignace de Loyala. Et enfin « les militaires traits étant aussi sobres qu’évocateurs ; il s’est trouvée « installée, malgré elle, l’abbé Profillet, Les saints militaires, mar- édifiants » des époques proches de la faut admirer avec quelle maîtrise a été dans la guerre ». Il a fallu défendre le tyrologe, vies et notices (Paris, 1890). nôtre : Ernest Psichari, le Père de Fou- traité un sujet dont la complexité et l’am- peuple chrétien. Les croisades, elles- M. Corvisier a eu aussi recours à de cauld, le général de Sonis, qui ne peut être pleur sont évidentes et qui permet de me- mêmes, ont été considérées comme une nombreux ouvrages solidement fondés, béatifié parce que, en 1861, il fit traduire surer la richesse du patrimoine de la ca- guerre défensive. En outre, malgré les ef- parmi lesquels ceux de François-Marie Al- en Conseil de guerre, condamner à mort tholicité. forts des évêques et leurs tentatives d’ar- goud, 1600 jeunes saints, jeunes témoins et fusiller des Arabes qui avaient assas- I bitrage, des guerres entre chrétiens ont (Paris, La Cité vivante, 1940), et d’Anne siné une trentaine de colons... éclaté. Bien souvent de part et d’autre, Bernet Les chrétiens dans l’empire romain, Se référant au livre de François-Marie * André Corvisier : Les Saints militaires. (Éd. on se croyait dans son bon droit. La des persécutions à la conversion (Paris, Algoud, M. Corvisier évoque le cas des Honoré Champion 2006. 348 pages).

L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 11 ARTS-LETTRES-SPECTACLES CINÉMA JOURNÉE DE LECTURE LES FILMS Portraits publics, DE DÉCEMBRE portraits privés Les Vignerons G CASINO ROYALE. – James 1770-1830 de l’impossible Bond Begins ! Son nom est Craig, Daniel Craig. Acteur d’ori- epuis que Nicéphore dèle. Pour illustrer cet exemple, ébastien par ces vignerons de gine britannique, il a été choisi Niepce inventa en 1826 la précisément, le ciel soit loué, j’aper- Lapaque a Pierre LAFARGE l’impossible ont su pour succéder à Sean Connery, Dphotographie d’abord sur çois mes préférences ; le cheval Squatre pas- faire ressurgir des George Lazenby, Roger Moore, plaques de verre, puis sur papier, et l’Écossais Raeburn. Je pique sions : la littérature, le Brésil, le flacons dans lesquels le terroir et Tymothy Dalton et Pierce Bros- nos arrière-grands-parents et des deux. Inspiré des portraits de rugby et les vins naturels. Il peut les cépages s’expriment librement. nan dans la peau et le smoking grands-parents ont aimé se “faire Van Dick, voici (1809) Le major vous asséner avec la même du célèbre Agent 007, alias tirer le portrait” par des Nadar au William Clunes en pied, auprès de conviction et la même précision James Bond, agent et espion petit pied, le plus souvent. Tout l’imposante croupe de son alezan. une dissertation sur le mérite com- La Théorie au service secret de Sa Majesté d’abord, notables, bourgeois avec Le peintre réalise par des effets paré des grands arrières français de l’impossible britannique dont le double 0 si- leurs épouses, puis, avec leurs en- de “flou” la fusion, à l’arrière-plan, ou un cours sur la méthode de vi- gnifie qu’il est autorisé à tuer fants, bien raides et tirés à quatre avec le paysage. Nous sommes nification de Jules Chauvet… Cri- Après bien des rencontres et et qu’il l’a déjà fait Dans Casino épingles, sans l’ombre d’un sou- dans la clairière auprès du cava- tique au Figaro littéraire il livre éga- des dégustations, Sébastien La- Royale, première des aventures rire : le petit oiseau va sortir. Tous lier et de sa monture. lement une chronique œnologique paque a élaboré sa « théorie du de 007 imaginée par Ian Fleming s’en sont allés, dans de gros al- hebdomadaire à L’Opinion indé- 1 % », qu’il expose dans sa pré- (et dont une adaptation lou- bums de cuir à tranches d’or, jau- pendante de Toulouse. face (un titre emprunté à un ex- foque avait été réalisée en 1967), nir, dormir... rêver, peut-être ? Grâce et naturel cellent roman noir de son ami Fré- notre agent (le moins) secret, déric H. Fajardie) : « c’est dans pour déjouer les plans machia- Louis XVI Même impression de paix rus- ce “pour cent” que s’est réfu- véliques du Chiffre, Mads Mik- par Antoine-François Callet tique dans les portraits jumelés de giée la variété des vins français, kelsen, tout-puissant banquier Sir John Clerk et Lady Penicuik. leur infinie complexité. » Si ces privé du terrorisme internatio- Peu à peu, le style anglais tend à 1 % de vignerons salvateurs re- nal, et ruiner celui-ci, va devoir s’imposer et à adoucir le portrait présentent environ 500 produc- jouer une partie de poker ser- français à la manière de David, teurs, le guide Lapaque nous en rée et à haut risque dans un sa- Ingres ou Prud’hon. Delacroix y présente près d’une centaine, dans lon privé du Casino Royale, au réussira à merveille dans le por- toutes les régions excepté celle de Montenegro. Le Chiffre étant un trait exposé de son ami L.A. Bordeaux, qui, livrée à la dictature mauvais perdant, inutile de Schwiter (1826). de Parker, a été volontairement vous dire que rien ne se pas- Je ne salue que de loin le buste écartée. Alors que les grands crus sera comme prévu et qu’il va y de Condorcet bien qu’il soit dû au français connaissent une envolée avoir du dégât collatéral... Exit ciseau de Houdon, en revanche, des prix, il faut signaler que la plu- les nuées de James Bond Girls l’autoportrait de Pigalle (1776) me part de ces bouteilles demeurent choisies plus pour leurs com- retient : c’est une terre cuite pati- Après son essai consacré au très accessibles financièrement. pétences mammaires qu’intel- La photographie a-t-elle voulu née et le vieux sculpteur s’est re- remarquable viticulteur du Beau- À ces notices rédigées avec lectuelles ainsi que la suren- remplacer l’art du peintre, cet in- présenté en chemise de travail, jolais qu’est Marcel Lapierre, cer- talent et fourmillant d’anecdotes chère de gadgets qui commen- time échange du modèle et de l’ar- lassé, au moment de l’achèvement tains critiques progressistes ont eu historiques et littéraires, l’auteur a çaient à frôler le ridicule. Sous tiste ? Certes non, et le premier du mausolée du maréchal de Saxe. beau jeu de le traiter d’intégriste eu l’excellente idée d’adjoindre une la direction de Martin Campbell, portrait “moderne” ne serait-il pas Il est criant de vérité. Cette même du vin naturel. Or Lapaque sait collection de bonnes adresses, ce 21e James Bond effectue un l’œuvre de Michel-Ange : le Dieu année, à la demande des gens de bien que la vraie tradition est cri- caves ou bistrots, où il est possible retour aux sources des romans de gloire tendant le doigt à Adam Lettres européens, il avait exécuté, tique. En véritable amoureux du de dénicher et déguster les cuvées de Fleming, à savoir : un tueur au plafond de la Sixtine ? Qui fut – en toute décence – un Voltaire bon vin, il s’est passionné pour le sélectionnées. Ce petit guide se froid, implacable, qui saigne, le modèle ? “IL” est ressemblant. nu, à l’antique, et déjà âgé de cin- travail quasi-artisanal des pro- révélera vite indispensable à tout sue et marque les coups. Le À Paris, ces semaines-ci et jus- quante-huit ans. priétaires récoltants qui ont choisi amateur de vin. tout servi par des cascades qu’en janvier prochain, nous de respecter la vraie nature du vin, I époustouflantes et un Daniel sommes conviés à un véritable fes- sans l’amender de produits plus Craig d’une froideur impeccable, tin. Grâce à une étroite collabora- Henri V ou moins chimiques et de sucres * Sébastien Lapaque : Le Petit La- à peine plus souriant qu’une tion internationale, les galeries na- à sept ans divers. À l’heure de la rentabilité paque des vins de copains, 192 p., tête de mort et au regard gla- tionales du Grand Palais offrent à et de la standardisation du goût, 16 euros. cial à la Poutine. Un grand di- notre admiration un choix de cent Prêté par la Comédie française, vertissement qui redonne vie et quarante toiles et sculptures, mises un autre marbre me fait signe : force à une légende du cinéma. en scène par Hubert Le Gall avec celui de Jean de Rotrou, jeune dra- LIVRES REÇUS un grand discernement. Le Louvre maturge précurseur de Corneille, G Parmi les autres sorties : est mis à forte contribution mais campé, celui-là, par J.J. Caffieri. GJacques Viret : QUI SUIS-JE ? philosophie politique. Éd. Pardès, — Le petit monde de Bahador, aussi les musées de Bordeaux, On apprend que, pour son travail, WAGNER. — Un petit livre bien 128 pages, très illustrées, 12 eu- film d’animation d’origine ira- Lille, Dijon, Le Mans.. la Tate et le sculpteur bénéficia d’une entrée documenté et intelligemment illus- ros. nienne composé de trois courts- National Gallery de Londres et, es- à vie au théâtre. Heureux temps tré sur le grand musicien : sa vie, métrages (dessin animé en 3D, sentiellement, le Gugenheim de que celui-là ! On appréciera le bel son univers dramatique et musi- G Éric SABLÉ : QUI SUIS-JE UN- pâte à modeler et marionnettes) New York. auto-portrait de Joshua Reynolds cal, ses dix œuvres maîtresses, GERN. — Lors de la révolution dont les héros sont un héris- Comme il se doit, ce sont les (1780) posant, devant un rideau son “message” sont analysés avec bolchevique, un baron balte, des- son téméraire qui guide ses chefs d’État qui accueillent le vi- cramoisi, sous l’ombre de son bé- précision. L’auteur veut nous cendant des chevaliers teuto- frères et sœurs dans une forêt siteur : un très beau George Wa- ret noir. Comment ne pas admirer convaincre que Richard Wagner niques, combattit avec les armées mystérieuse, deux bons- shington, de Gilbert Stuart (vers une œuvre du baron Gérard (1805) ne fut ni antisémiste ni raciste. Il blanches à la tête de la Division hommes qui apprennent à 1800), à la mise austère et sobre, Theresia Cabarrus, ex-Madame fut pire : il puisa son inspiration asiatique de cavalerie. Il rêva de construire ensemble et une rideau de damas rouge et colonne Tallien, couronnée d’anémones et dans les vieux mystères germa- reconstituer l’empire de Gengis- communauté de souris tyran- dorique obligent. Face à lui un dans toute sa beauté. niques et nordiques sur lesquels Khan et d’étendre la Mongolie jus- nisée par un roi cruel : un ré- Louis XVI, en costume de sacre Au détour d’une salle, une il voulait appuyer une régénéra- qu’au Tibet. Dur pour lui-même et gal pour les moins de 7 ans. d’A.-François Callet, exécuté, dé- émouvante surprise nous est ré- tion de la société : le romantisme pour les autres, il n’eut qu’une pas- — La Flûte enchantée, de Mo- tail poignant, en 1789, présente servée : la statue en bronze de allemand dans ce qu’il a de plus sion, la guerre. Éd Pardès, 128 zart magnifiquement mis en un roi débonnaire et serein, avec Henri Dieudonné de Bourbon en trouble et de plus barbare. Au to- pages, 12 euros. images par un Kenneth Branagh à ses pieds la couronne et la main cuirassier de la Garde royale tal, une bien belle musique, à qui “ouvre” ainsi les portes de de justice. (1827) ; le duc de Bordeaux a alors condition de ne pas y chercher une Jacques CÉPOY l’opéra au grand public mais En revanche, Goya s’amuse sept ans. On ne saurait, non plus, risque de “décevoir” les pu- assez méchamment avec le roi quitter le Grand Palais sans sa- ristes. Ferdinand III (1815), tout petit, luer Monsieur Henri, sur fond de PRIX HUGUES CAPET 2006 — Eragon, film d’héroïc-fantasy perdu dans son manteau rouge et drapeau blanc, peint, à la demande tendance Seigneur des An- dont il accentue encore le phy- du roi Louis-Philippe, par René- Le Prix Hugues Capet 2006 Décerné sous l'égide de l'As- neaux de Stefen Fangmeier, sique ingrat. Narcisse Guérin, en 1817. On ne a été décerné à Éric Woerth, an- sociation Unité capétienne prési- adapté d’une trilogie roma- Très subtilement, le scéno- sera pas surpris d’apprendre qu’il cien ministre et maire de Chan- dée par Jacques-Henri Auclair,ce nesque pour ados et mettant en graphe nous guide vers des por- nous vient du Musée d’histoire de tilly, député de l'Oise. Le jury, pré- prix récompense chaque année un scène à grand renfort d’effets traits où bientôt s’affirmera da- Cholet. sidé par SAR la princesse Béa- ouvrage écrit « sur un roi de spéciaux un jeune “élu” aux vantage la personnalité des mo- Monique BEAUMONT trice de Bourbon des Deux Siciles, France, une reine de France, un prises avec des dragons, des dèles. Sous l’influence des Anglais, l'a récompensé pour son livre prince capétien, l'un de leurs magiciens, des elfes et des Reynolds, Gainsborough le peintre * Portraits publics, Portraits privés consacré au duc d'Aumale dans aïeuls, de leurs conjoints, de créatures maléfiques. va quitter l’atelier ; c’est, en fond, 1770-1830. Galeries nationales du lequel il retrace L'étonnant des- leurs descendants, ou sur l' un un bois, un village, un vallon ; la Grand Palais. 3 avenue du général tin d'un prince collectionneur (édi- des grands serviteurs du Alain WAELKENS grâce et le naturel d’une aimable Eisenhower, Paris VIIIe. Tél. : 01 44 tions l'Archipel). royaume ». campagne servira de cadre au mo- 13 17 17. Jusqu’au 8 janvier 2007.

12 L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 ARTS - LETTRES - SPECTACLES

lassique cadeau de Noël, presse touchaient à l’œuvre d’art. le livre d’art prend toutes De la beauté Reisfield, son neveu et héritier, a Cles formes, touche à tous sélectionné les plus beaux, qui les domaines ou presque, et peut contribuèrent à la naissance d’un rester dans une gamme de prix mythe hollywoodien. raisonnable. avant toutes choses les grandes monographies artis- par de la sagesse », comme est Cuisine Peinture tiques, pourvu de les bien choi- Anne BERNET sous-titré Jardins zen, adapté par sir, sont toujours appréciées. 2006 Joe Earle d’un classique médié- L’art culinaire est ingrat puis- J’avais signalé l’an dernier Les ayant marqué le quatre centième envie dévorante de retourner la val japonais, le Sakuteiki (De la qu’il réclame, pour être apprécié, classiques de l’Art, adaptés d’une anniversaire de la naissance de voir de plus près, avec des yeux création des jardins), du seigneur la destruction de l’œuvre et que collection italienne, qui, pour une Rembrandt, nombreux ont été les neufs et enfin compétents. Tachibana no Toshitsuna. Les no- tout est toujours à recommencer. somme modique, mettait à la por- ouvrages consacrés au maître hol- tions évoquées dans ces pages Il a cependant l’avantage de pou- tée de tous les plus grands landais. Celui de Gary Schwartz ne sont pas toujours accessibles voir se transmettre et une grande peintres, leur biographie et l’es- compte parmi les plus beaux, et Architecture à nos mentalités, et l’idée que pla- recette, susceptible d’entrer dans sentiel de leur œuvre, dans une parmi les plus complets. cer tel ou tel élément à tel point le domaine public à force d’être présentation soignée et une édi- Certes, et l’auteur le dit d’em- S’il est parfois difficile d’ap- cardinal pourrait amener sur votre plus ou moins bien copiée, pos- tion de qualité. Ces volumes ren- blée, son propos n’est pas de choi- préhender sans aide un tableau famille le malheur ou le bonheur sède, à sa façon, sa part d’éter- dent facile et bon marché la consti- sir la facilité. Éminent spécialiste, ou une statue, un monument peut prête pour nous à sourire ; elles nité. Et, comme tous les arts, ce- tution d’une bibliothèque artistique, Schwartz est plus intéressé par s’avérer plus hermétique encore. sont cependant exprimées avec lui des fourneaux évolue avec le qu’il s’agisse de se faire plaisir, des questions de détails, qui vont Telle est l’opinion de Francesca beaucoup de poésie et le résul- temps. ou d’initier ses proches, en parti- du prix de vente des toiles de l’ar- Prina et d’Elena Demartini, coau- tat de ces savantes compositions, Ce que démontre Cuisine de culier les adolescents, à l’histoire tiste de son vivant au mécénat, teurs d’une Petite encyclopédie dans leur sereine beauté et leur famille chez les Troisgros, signé de la peinture. de la thématique à la technique, de l’architecture, de l’art roman étrange dépouillement, sont d’un Pierre et Michel Troisgros, qui re- que par les vues d’ensemble et au XXIe siècle. Sans s’arrêter, ce charme universel, même si nous trace l’aventure d’un restaurant les aspects humains. Il le dit sans que j’aurais tendance à déplorer, n’en perçons pas toutes les im- modestement ouvert en 1930 fard, Rembrandt fut un homme sur l’Antiquité, et avec une prédi- plications. face à la gare de Roanne pour assez déplaisant à fréquenter ; lection, justifiable mais qui confine nourrir les voyageurs de com- aussi est-ce à ses yeux le peintre au chauvinisme, pour les archi- merce et destiné à devenir l’une seul qui mérite intérêt. Mais, en tectes italiens, le livre propose, de des premières tables de France. ce domaine, l’auteur est intaris- manière assez technique, un vaste Sans doute est-il vain de rêver sable, plein de verve, passionnant panorama chronologique de l’art de réussir chez soi les plats d’un et les Pays-Bas du XVIIe siècle de bâtir dans le monde occiden- chef triplement étoilé, mais l’in- n’ont pas de secret pour lui. tal. Les édifices religieux l’em- telligence de l’album est d’avoir Stéphane Guégan publie portent, et de loin, sur les construc- sélectionné des recettes d’une Ingres érotique, qui, sous ce titre, tions civiles, jusqu’aux plus pres- simplicité de bon aloi et d’un coût se révèle innocent, sinon à mettre tigieuses. Le choix des acceptable. On y trouve des œufs absolument entre toutes les monuments retenus peut sembler à la bourguignonne, de la po- mains. L’on y découvre, ce n’est subjectif, voire injuste ; au moins chouse, du steak à la fondue La série s’est enrichie d’assez pas une surprise, que Jean-Do- a-t-il le mérite d’attirer l’attention d’échalote, du saumon à l’oseille, nombreux titres, couvrant toutes minique Ingres a beaucoup aimé sur des lieux dont on parle rare- de subtils grillons de ris de veau, les périodes, les écoles, les pays, les femmes, et qu’elles le lui ont ment, voire jamais. L’iconogra- des flans de queues d’écrevisses, et l’idéal serait de les posséder bien rendu, d’où, outre ses toiles phie, là encore, est de premier ou des pavés au chocolat à la tous. Parmi les derniers parus, un officielles dont la sensualité, choix. Lesquelles demeurent évi- feuille d’or, dignes des jours de Piero della Francesca, d’Oreste même dissimulée sous le prétexte dentes pour les sujets de l’em- fêtes, toujours expliqués avec del Buono, un peu technique mais des turqueries, demeure palpable, pire du Soleil levant, car, comme soin. la révolution apportée à l’art oc- une série de dessins et de cro- Musique l’exprime Michiko Rico Nosé dans cidental imposait certaines expli- quis, remontant pour la plupart à ses Jardins japonais contempo- I cations sur la géométrie et la pers- sa prime jeunesse, que les Restons dans la vulgarisation rains, ses compatriotes, à la dif- pective ; un très remarquable Ca- bonnes mœurs interdisaient d’ex- intelligente avec l’Introduction à férence des nôtres, n’estiment * Oreste del Buono : Piero della ravage de Renato Guttoso, dont poser au public ; ce dont Ingres, l’histoire de la musique, de Fran- pas que la très réelle modernité Francesca ; Renato Guttoso : Ca- il ne faut surtout pas vous priver d’ailleurs, se gardait. À l’heure de çois Sarhan, dont le titre résume de leur pays doive d’obligation ravage ; Sylvie Béguin : Titien ; Mi- ; un excellent Titien, de Sylvie Bé- la pornographie affichée à tous le propos puisqu’il s’agit de pré- passer par une rupture méprisante guel Angel Asturias : Vélasquez ; guin ; un Vélasquez de qualité, les coins de rues, les polisson- senter, des hymnes ambrosiennes avec ses traditions. Créés pour Giovanni Arpino : Rembrandt ; Mar- de Miguel Angel Asturias ; un très neries du XIXe ne feront plus rou- de la fin du IVe siècle à nos jours, des entreprises ou des particu- cello Venturi : Manet ; Les clas- bon Rembrandt, de Giovanni Ar- gir personne… un panorama complet et très liers richissimes, souvent sur des siques de l’Art, Flammarion, 192 pino, et un splendide Manet, de simple de l’évolution musicale en espaces minuscules, ces cours, p. et 100 illustrations, 10 euros Marcello Venturi. . L’on y trouve aussi bien ces terrasses, en ville, en pleine (65, 59 F). Dans le même ordre d’idée, Sculpture des définitions de « la relation campagne ou au bord du Paci- * Gabriele Crepaldi : Petite ency- un peu plus chère, la Petite en- cratylique » ou de l’échelle dia- fique, sont tantôt un étonnant sur- clopédie de l’impressionnisme, So- cyclopédie de l’impressionnisme, Si les livres consacrés à la tonique que des chronologies, des gissement de la nature, voire de lar. 426 p., 600 illustrations, 22 eu- de Gabriele Crepaldi, mérite peinture sont pléthore, il en est notices biographiques des princi- la forêt, au cœur de la maison, ros (144, 31 F). nombre d’éloges. C’est un travail moins à traiter de la sculpture. paux compositeurs, une histoire tantôt son évocation étrangement * Gary Schwartz : Rembrandt, Flam- original et quasi-exhaustif, qui re- On le regrettera à en juger par le des styles ou l’évolution des ins- minimaliste, réduite à un arbre, marion, 380 p., 65 euros (426,37F). situe le courant impressionniste passionnant et magnifique Rodin truments. Il est probable que mé- une plante, une pierre, mais pla- * Stéphane Guégan : Ingres éro- dans son époque, à la lumière de de Raphaël Masson et Véronique lomanes et musiciens ne s’en cés de façon à faire surgir l’image tique, Flammarion, 95 p., 25 euros toutes les influences qu’il a pu su- Mattiussi. Ici, c’est l’homme, le- contenteraient point, mais le de la création tout entière. Là en- (163,98 F). bir, puis en examine tous les ava- quel, il est vrai se confond avec simple curieux en fera un précieux core, même si le fond de la pen- * Raphaël Masson et Véronique tars. Si les artistes français se l’artiste, qui tient la première place. outil de référence, et l’enfant qui sée reste impénétrable, le résul- Mattiussi : Rodin, Flammarion. 250 taillent la part du lion, des cha- Héritier de paysans normands et manifeste quelque don pour le vio- tat éblouit. p., 49 euros (321,41 F). pitres d’un grand intérêt traitent lorrains, Rodin avait appris d’eux lon, la guitare ou le piano y trou- * Francesca Prina et Elena De- de leurs disciples italiens, scan- l’amour du travail et une exigence vera de quoi jeter les bases de sa martini : Petite encyclopédie de dinaves, allemands, russes, amé- de perfection qui force le respect. propre culture artistique. Photographie l’architecture, Solar, 430 p., 35 eu- ricains, pour beaucoup très doués. La contrepartie de cette honnê- ros (229,58 F). Outre des notices par peintres, teté professionnelle étant qu’il Garbo, portraits d’une lé- * François Sarhan : Introduction à les œuvres sont rapprochées par n’était jamais content du résultat, Jardins gende, de Scott Reisfield et Ro- l’histoire de la musique, Flamma- thèmes : paysages de neige, lors même qu’il avait atteint la per- bert Dance, marie la photogra- rion. 185 p., 25 euros (163,98 F). spectacles, scènes de rues, ri- fection. Les tourments intimes du Si, partout dans le monde, un phie et le cinéma à travers les cli- * Joe Earle : Jardins zen, Flam- vières, etc., permettant un coup personnage, trop souvent cari- jardin se veut recréation du pa- chés, dont elle eut l’intelligence marion. 130 p., prix non commu- d’œil d’ensemble inédit et un éclai- caturé en satyre égoïste, appa- radis perdu, les Japonais y ajou- de se montrer singulièrement niqué. rage mutuel. L’iconographie de raissent ici sous un tout autre jour, tent une exigence de communion avare quand tous les comédiens * Michiko Rico Nosé : Jardins ja- l’ouvrage est presque surabon- et mettent en lumière la signifi- à l’harmonie de l’univers. Ailleurs, posaient à outrance, de la vedette ponais contemporains, Flamma- dante et propose des reproduc- cation profonde de ses plus belles le jardinier se soumet la nature ; suédoise. Greta Garbo avait hor- rion, 105 p., 40 euros (262, 38 F). tions de toiles peu connues. L’en- œuvres. Ainsi celles sculptées au au Japon, l’homme doit se plier à reur de l’attention médiatique et * Scott Reisfield et Robert Dance : semble procure un sentiment de temps de sa liaison passionnée l’esprit, aux esprits, du lieu, et s’acharnait à la fuir ; elle tenait à Garbo, portraits d’une légende, beauté, de plénitude et de bon- avec Camille Claudel, puis après construire autour de ce qui pré- conserver le contrôle de son Flammarion, 250 p., 45 euros heur auquel il est étrange que les une rupture dont la jeune femme, existe, serait-ce une simple pierre image, tant sur l’écran que dans (295,18 F). contemporains n’aient pas été et non Rodin, fut responsable. qu’il ne déplacera pas avec l’in- les magazines. Cette exigence * Pierre et Michel Troisgros : Cui- d’emblée plus sensibles… Quant à l’œuvre, elle est ana- souciance que nous y mettrions. réduisit sa filmographie, car elle sine de famille chez les Troisgros, Pour ceux qui auraient dé- lysée et photographiée avec tant Il ne s’agit plus d’horticulture, refusait le médiocre, et les clichés Flammarion, 200 p., 30 euros passé le stade de la vulgarisation, de passion que l’on éprouve une mais de philosophie, d’un « art qu’elle laissa paraître dans la (196,78 F).

L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 13 CHRONIQUE LES GRANDS TEXTES POLITIQUES Nos cousins La souveraineté de Montigny et le Politique

n soir de par Proust lui- politique) que « ce qui fait son éviter que le fonctionnement du « Est souverain celui qui voyage, même, dans une essence, c’est le fait qu’il prend marché commun ne soit affecté Jean-Baptiste MORVAN décide de la situation ex- alors que préface donnée la décision politique ». Ce fai- par les mesures qu’un État U ceptionnelle. Seule cette dé- déjà la lumière baissait, j’ai en- à un livre de Morand, a revendi- sant, on a pu dire que Schmitt, à membre peut être appelé à trevu, à un carrefour planté de qué sa parenté, et même sa fi- finition peut satisfaire à la la suite de Thomas Hobbes (« vo- prendre en cas de troubles in- grands arbres, une pancarte rou- liation, avec Maurras, Daudet et notion de souveraineté en luntas non veritas facit legem » : térieurs graves affectant l’ordre tière indiquant la direction de Bainville. Et si quelque esprit pré- tant que notion limite. […] Par c’est la volonté du souverain et public ». Toutefois, « ces me- “Montigny”. Ma mémoire, de sumé réaliste se gaussait de nos situation exceptionnelle, il non la vérité de ses édits qui fait sures ne doivent pas altérer les moins en moins fidèle, ne me songeries, nous pourrions ré- faut entendre ici une notion la loi), avait théorisé le décision- conditions de la concurrence permet point de préciser de quel pondre en appliquant à nos générale de la théorie de l’É- nisme politique. dans le marché commun » (!) Montigny il s’agissait : il y en a convictions profondes, étrangères tat, et non quelque urgence C’est toute « l’irréductibilité (article 296) Question laissée à la pléthore en Normandie, dans aux seuls soucis d’un matéria- proclamée ou quelque état du politique » qui était ainsi po- sagacité du lecteur : l’Etat fran- l’Yonne, en Yvelines, en Cham- lisme politique, la phrase de sée. Mais la genèse du décision- çais est-il encore souverain et le de siège. […] Tout ordre (Ord- pagne, en Eure-et-Loir : une l’évangile sur ceux « qui ont nisme schmitien est également à serait-il a fortiori en situation ex- nung) repose sur une déci- page entière de mon guide tou- choisi la meilleure part ». rechercher chez Jean Bodin, l’au- ceptionnelle ? ristique ! Mais je ne tiens guère sion […] Même l’ordre juri- teur des Six livres de la Répu- à trouver quelque précision : un dique repose, à l’instar de blique, que nous avons eu l’occa- secret pour moi s’attache à ce Une quatrième tout ordre, sur une décision sion de présenter dans ces co- Souveraineté toponyme, le souvenir d’une dimension et non sur une norme. » lonnes. Réitérant avec le phrase entendue jadis en de l’esprit Carl SCHMITT jurisconsulte français la question À l’inverse mais en complé- quelque réunion amicale ou re- Théologie politique de savoir « jusqu’à quel point le mentarité des juristes positivistes pas de famille : “... Nos cousins Parmi tous les devoirs qui (1922 et 1969) souverain est-il tenu par les (à l’instar de l’autrichien Hans Kel- de Montigny”. nous incombent, il y a celui de lois ? », Schmitt considère avec sen) Schmitt affirme la soumission Gallimard, Paris, 1988 rappeler à nos compatriotes et Bodin que le souverain doit s’af- du Droit au Politique. Comment ne contemporains l’existence d’une franchir des lois, non pas arbitrai- pas reconnaître le « politique Certaines sorte de “géométrie non eucli- « Le concept d’État pré- rement, mais parce que cela est d’abord » de ? présences dienne”, d’une méthode appuyée suppose le concept commandé par une impérieuse né- Par extension, l’on doit considérer sont comme sur une quatrième dimension de de politique. » cessité. Passant au-dessus des que tout est soumis au Politique, des trésors l’esprit. Nous devons chaque jour Carl SCHMITT lois convenues en période nor- donc au souverain. Mais Schmitt de France, retrouver nos itinéraires, avec les La notion de politique (1932), male, le souverain se voit contraint va plus loin. Il n’y aurait, en effet, poches remplies de cailloux Flammarion, Paris, 1992 d’appliquer la seule et unique loi : qu’un intérêt purement théorique des pièces blancs du Petit Poucet;... « l’autoconservation » de l’É- à présupposer le Politique, sans indispensables La ressouvenance des “cou- tat, c’est-à-dire, de l’ordre politique. déterminer au fond se qui fait son sur l'échiquier sins de Montigny” me suggère héologie politique est resté Rien de vraiment nouveau sous le essence. Affirmer la primauté du de la Patrie. aussi la nécessité d’une sorte de célèbre pour la première soleil, si l’on garde en mémoire ce Politique, ce n’est rien moins que jeu de “signes de piste”, et de re- Tphrase de l’œuvre, repro- vieil adage du droit romain : « sa- le définir, donc se définir soi-même cours à des “mots de passe” fa- duite dans l’extrait ci-dessus. Par lus populi suprema lex esto » par rapport aux autres. Il me plaît de penser que les miliers aux soldats du temps ja- cette sorte d’axiome, le juriste et (le salut du peuple est dans la loi Schmitt met ainsi en lumière “cousins de Montigny”, évoqués dis. Ce soir s’imposent à moi les politologue allemand, Carl Schmitt suprême). On pourrait dire aussi une dimension du Politique fort sans doute un jour des années noms de Perseigne et de Se- (1888-1985) donnait à voir ce que que « nécessité fait loi ». peu connue jusqu’alors : l’altérité. trente par une voix inconnue mais nonches. Pourquoi ? Ces deux Julien Freund, dans un ouvrage La situation d’exception décrite dont l’intonation me reste fami- forêts me furent naguère, en di- non moins fameux, avait analysé plus haut devient alors le moteur lière, étaient aussi pour moi des verses occasions, moins fami- comme « l’essence du poli- de cette altérité puisqu’il s’agira parents un peu lointains. “Mon- lières qu’Écouves et Andaines ; tique ». pour le souverain de désigner tigny” est devenu un de ces ta- plus proches de nos itinéraires Le rapprochement intellectuel l’agresseur extérieur ou intérieur lismans assez semblables à la coutumiers des mois d’été. Pré- de Schmitt avec le fondateur de (l’ennemi, chez Schmitt) tout en madeleine de Marcel Proust : cisément peut-être, un plus grand l’Action française, Charles Maur- se déterminant par rapport à l’al- nous ne saurions renoncer aux éloignement vers Bellême et La ras, s’il a été brillamment mais lié (l’ami selon Schmitt). L’ennemi présences des cousins mysté- Ferté-Vidame, crée un impératif succinctement esquissé par Pierre est celui qui veut annihiler l’ordre rieux, ni aux silhouettes de clo- de recherche symbolique plus Lafarge dans un numéro de la re- politique. Est donc souverain ce- chers et de donjons d’un Monti- exigeant ; ou bien encore une vue Les Epées, n’en demeure pas lui qui est capable de décider po- gny incertain : ce sont là des tré- relative proximité avec quelques moins, aujourd’hui, relativement litiquement en vue de mettre fin à sors de France, des pièces sanctuaires, comme La Chapelle risqué. Même si les deux hommes la tentative de renversement ou, indispensables sur l’échiquier de Montligeon dédiée aux âmes du ne se sont jamais rencontrés, à tout le moins, de bouleversement la Patrie. Purgatoire. Schmitt fréquentait néanmoins de l’ordre politique. Il nous semble même que le Il me semble que toutes les Maurras par sa lecture de l’Ac- Partant, Schmitt craignait, à flou mémorial qui enveloppe ces feuilles des arbres de Senonches tion française. Une étude de l’in- Carl Schmit (1888-1985) juste titre, que le libéralisme lieux et ces personnages est l’an- abritent les présences d’âmes fluence que le premier aurait re- conduise à l’homogénéité des so- tidote à une conception rudi- autrefois connues, attentives ou çue du second, impossible à li- Pour Schmitt, « le cas d’ex- ciétés politiques. L’exemple ar- mentaire, mécanisée et inhospi- dolentes, à moins que ces fron- vrer dans le format de cette ception révèle avec la plus chétypique de la construction eu- talière de notre pays. Chacun de daisons ne recèlent d’innom- chronique, mériterait assurément grande clarté l’essence de l’au- ropéenne témoigne de la pres- nous possède, dans le domaine brables et salutaires “Ave Maria”. d’être menée. torité de l’État. C’est là que la cience de Schmitt. Il est patent, en de ses tendresses intimes, un Il est long, mais il nous est bien Il est incontestable que Schmitt décision se sépare de la norme effet, que l’Union européenne, par Combray : et nous tenons à ran- cher, le pèlerinage où nous nous et Maurras ont, chacun de leur juridique et (pour le formuler pa- son uniformité institutionnalisée, a ger ces certitudes paradoxales engageons à la suite des “Cou- côté, avec les références cultu- radoxalement) là l’autorité dé- sonné le glas du Politique, les États au nombre de nos multiples “ac- sins de Montigny”... relles et historiques qui étaient les montre que, pour créer le droit, membres étant soumis à la volonté tions françaises”. I leurs, développé une critique sem- il n’est nul besoin d’être dans univoque des organes suprana- blable de la démocratie libérale et son bon droit ». tionaux. Le système onusien tend, du parlementarisme. On ne re- Pour illustrer ces propos, ima- de semblable façon, à gommer TARIF DES ABONNEMENTS tiendra, ici, que les définitions de ginons un instant que pour un mo- toute volonté d’exclusion. (paraît les 1er et 3e jeudis de chaque mois) la souveraineté et du Politique, no- tif quelconque, le président de la D’une manière générale, on tions essentielles de la doctrine République française soit obligé peut observer que le Droit, la Mo- 1. Premier abonnement 5. Abonnement de soutien France (un an) ...... 76 9 (un an) ...... 150 9 schmitienne et qui, quoi qu’on en de recourir à l’article 16 de notre rale ou l’Économie supplantent in- 2. Premier abonnement 6. Étudiants, ecclésiastiques, dise, ont profondément renouvelé Constitution et, en application d’ice- sidieusement mais nettement le 9 9 Étranger (un an) ...... 85 chômeurs (un an) ...... 45 la science politique du XXè siècle. lui, de rétablir les frontières de notre Politique, sous prétexte d’obso- 3. Abonnement ordinaire (un an) . 125 9 7. Outre-mer (un an)...... 135 9 4. Abonnement de six mois ...... 70 9 8. Étranger (un an) ...... 150 9 pays, notamment parce « l’inté- lescence du conflit politique. Le grité de son territoire » est me- désenchantement de nos conci- BULLETIN D’ABONNEMENT Dernière nacée. Il violerait immanquable- toyens pour la chose publique est Nom ...... Prénom ...... instance ment les traités constitutifs de une manifestation de cette asep- Adresse ...... l’Union européenne. Aux termes sie idéologique. Mais, comme le ...... Tél...... Dans sa Théorie de la consti- de l’article 297 du traité de Rome, soulignait Julien Freund, le Poli- Ville ...... Code postal...... tution (1928), Carl Schmitt préci- les États membres doivent obli- tique est un fait humain et naturel Entourez le numéro correspondant à votre abonnement sait, à propos de l’État (donc du gatoirement se consulter ( !) « en qui ne pourra jamais disparaître. Bulletin à retourner à L’Action Française 2000 souverain, l’État n’étant qu’une vue de prendre en commun les 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – C.C.P. Paris 1 248 85 A forme d’organisation de la société dispositions nécessaires pour Aristide LEUCATE

14 L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 L’ACTION FRANÇAISE EN MOUVEMENT

CENTRE ROYALISTE D’ACTION FRANÇAISE

INSTITUT D‘ACTION FRANÇAISE LE MONDE ET LA VILLE Directeur Michel FROMENTOUX 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris - Tél : 01 40 39 92 14 - [email protected] C.R.A.F. Cassociation.R. Adéclar.éeF. DÉCÈS Mercredi 13 décembre 2006 10 , rue Croi x-des- Peti ts -Champ s, 3e séance du cycle 2006-2007 7 5001 Paris G Nous avons appris avec peine le dé- TÉL : 01-40-13-14-10 – FAX : 01-40-13-14-11 Dans la ligne du mouvement fondé cès de Laurent de LASSUS SAINT GE- par Pierre JUHEL NIÈS survenu le 1er novembre 2006. RIRE AVEC NOS ÉCRIVAINS CLASSIQUES DIRECTOIRE Ses obsèques ont eu lieu en l’église PRÉSIDENT : Pierre PUJO VICE-PRÉSIDENT : Saint-Ferdinand des Ternes à Paris le par Alain Lanavère Stéphane BLANCHONNET 6 novembre. CHARGÉS DE MISSION Il était l’un des petits-fils du lieute- maître de conférences en littérature française à Paris-IV Sorbonne, FORMATION : Pierre LAFARGE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DES ÉTUDIANTS : nant-colonel François de Lassus de professeur à l'Institut universitaire Saint-Pie X Thibaud PIERRE Saint Geniès, président de la Ligue d’Ac- ADMINISTRATION : à 20 h 30 précises Mlle de BENQUE d’AGUT tion française, mort pour la France en Brasserie Le François-Coppée, premier étage - 1, boulevard du Montparnasse, 75006 Paris (métro Duroc) juin 1940. COTISATION ANNUELLE : Nous prions son épouse, la baronne MEMBRES ACTIFS (32 '), Laurent de Lassus Saint Geniès et ses ÉTUDIANTS, LYCÉENS, CHÔMEURS (16 '), quatre enfants d’agréer nos profondes BIENFAITEURS (150 ') condoléances. Vous cherchez un livre de Maurras, Daudet, Bainville, etc. ? G Nous avons appris avec peine le dé- Vous voulez offrir un objet fleurdelysé, porter une cravate aux couleurs de l’AF ? cès de Mme Joseph MAISONNEUVE Offrir des chocolats ou des objets divers pour Noël ? CONFÉRENCES née Marie Kunczé, survenu le 22 no- ÉTUDIANTES vembre 2006. Elle était âgée de 87 ans. VENEZ À NOTRE VENTE DE NOËL Ses obsèques ont été célébrées au Vendredi 8 décembre cimetière de Rongy (Belgique) le 25 no- (stands variés, bar) Débat autour du film Servir vembre. Samedi 9 décembre de 14 heures à 19 heures d'Hélie de Saint-Marc Elle était la veuve de notre ami très Vendredi 15 décembre fidèle du Nord, Joseph Maisonneuve. Dimanche 10 décembre de 10 heures à 19 heures Où va la politique étrangère Nous prions ses nombreux enfants, pe- tits-enfants et arrière-petits-enfants, en Dans les locaux de l’Action française américaine ? par Sébastien de Kererro particulier le père Jean-Paul Maison- 10, rue Croix-des-Petits-Champs - 75001 Paris neuve, d’agréer l’expression de notre M° Palais Royal (Tél.: 01 40 39 92 06) Vendredi 22 décembre vive sympathie avec l’assurance de nos Permanence prières pour le repos de l’âme de la dé- Vendredi 29 décembre funte. Permanence INFORMATION VIENT DE PARAÎTRE Les conférences étudiantes ont lieu chaque vendredi à 19 h 15 aux locaux de l’AF. G Le WHO’S WHO des Français LE TRÉSOR DE L’ACTION FRANÇAISE d’Afrique du Nord vient d’être publié. Il propose 2 500 biographies, tous do- Sous la direction de Pierre PUJO maines confondus, des personnalités françaises nées en Algérie, au Maroc Avec Sarah BLANCHONNET, Stéphane BLANCHONNET, Grégoire DUBOST, Michel FROMENTOUX, et en Tunisie. Vincent GAILLÈRE, Pierre LAFARGE, Aristide LEUCATE, Alain RAISON, Francis VENANT On peut se le procurer par courrier (16, rue Camille Pelletan, 92300 Le- Depuis sa fondation en 1899, l'école d'Action française a produit un nombre considérable d'ouvrages vallois-Perret) par téléphone (01 41 27 de critique historique, politique, littéraire, qui, ensemble, constituent un trésor. Ils contiennent une 28 30), par fax (01 41 27 28 40), par abondante matière de réflexions qui permettent de comprendre non seulement l'histoire du XXe siècle internet (site : www.whoswho.fr, émail mais aussi les événements que nous vivons aujourd'hui. : [email protected]) au prix de Trente et un de ces ouvrages ont été sélectionnés pour faire l'objet d'articles publiés dans L'Action 138,39 euros H.T. (au lieu de 187,67 Française 2000 en 2004 et 2005. Ont été privilégiés ceux qui permettent d'approfondir la pensée euros à paraître). politique de l'Action française en soulignant leur actualité.

G Notre confrère RIVAROL organise À travers les études rassemblées dans ce recueil, le lecteur se familiarisera avec , son annuel POT DE L’AMITIÉ le sa- Augustin Cochin, Léon Daudet, Pierre Gaxotte, Pierre Lasserre, Charles Maurras, Léon de medi 9 décembre 2006 de 14 h 30 à Montesquiou, , le marquis de Roux, , découvrant ainsi l'originalité de la 19 h 30 à l’Espace Dubail, 18, passage pensée d'AF. Dubail, 75010 Paris (angle 54, bd de Magenta) Entrée : 10 euros par per- sonne, 15 euros par couple. Éditions de l’Âge d’homme, 138 pages, 20 euros. Disponible à nos bureaux, 22,11 euros franco (chèque à l’ordre de la PRIEP).

NOTRE SOUSCRIPTION POUR L’A.F.

I Un de nos amis, de la Sarthe nous Chevigny, 20 ; Mlle Alice Rieber, 30 ; écrit : « Merci à toute la rédaction Yves Demas, 50 ; Me Laure Fournier, pour la lecture roborative du journal. » 100 ; Mlle Denise Charavel, 50 ; Joël me « Votre journal m'aide à vivre » M Vladimir Volkoff, ne pouvant Derré, 20 ; Paul Peter, 20 ; Pierre participer à notre Banquet annuel, Montaubric de Blainville, 20 ; nous fait part de ses regrets : « Ainsi, L’A.F. se situe en dehors de la lutte euros qui nous sont indispensables. Jacques le Groignec, 15,24 ; Mme Quête au Banquet : 2 583. je manquerai l’occasion de vous dire des factions et de leur logomachie. Nous comptons sur tous. Yvonne Peyrerol, 15,24 ; Mlle Annie Don pour absence au Banquet combien votre journal m’aide à vivre, Elle ne cultive pas des honneurs. Paul, 15,24 ; Vincent Claret-Tournier, (première liste) : “Don de Buxy” à respirer, au-dessus de vos pages, Elle n’a pas d’esprit partisan. Elle Pierre PUJO 15 ; Raymond Sultra, 17,78 ; (déjà cité et comptabilisé ), 500 ; un air un peu moins vicié ! » Merci ne se livre pas à la chasse aux élec- Joseph Lajudie, 20 ;Julien Thévet Pierre Pujo, 50 ; Me Gérard de aux auteurs de ces témoignages qui teurs. Elle s’occupe de l’essentiel : N.B. – Prière d’adresser les verse- (2 mois), 50 .Pierre Bonnefont, Gubernatis, 300 ; Jacques montrent que notre combat est ap- défendre les vérités qui, par delà les ments à Mme Geneviève Castelluc- 22,87 ; Bentégeat, 200 ; “Un vieil précié de ceux qui, dans la confu- vicissitudes passagères, permet- cio, A.F. 2000, 10 rue Croix-des-Pe- Mme Françoise Bedel-Giroud, Auvergnat”, 100 ; M. Lafosse, 100 ; sion électoraliste actuelle, cherchent tront un jour un véritable redresse- tits-Champs, 75001 Paris. 30,49 ; Henri Morfin, 32.; Louis Petit, Mme Françoise Devylerre, 50 ; Mlle à retrouver la voie de l’intérêt na- ment de la France. 30,49 ; Mme Tatiana de Prittwitz, Simone Degisors-Terrisse, 20. tional et la défense des vraies va- Merci à nos amis, qui, à l’occa- 45,73 ; Jacques Bentégeat, 53,36. leurs. sion du Banquet, ont contribué à Liste n° 19 Légion des “Mille” : anonyme, Total de cette liste : 4 659,37 9 Cette position de l’A.F. a été ma- faire avancer notre souscription Virements réguliers : M. 152,45 ; P.A.A., 250. Listes précédentes : 25 859,43 9 nifestée avec éclat lors de notre Ban- pour le journal. Cependant, nous Derville, 7,62 ; Jean-Michel de Love, Jacques Lamonerie, 100 ; Total : 30 518,80 9 quet, soulignant notre originalité. n’avons pas encore atteint les 55.000 7,62 ; Mme Bellegarde, 15,24 ; Gal Christian Jousse, 50 ; François de Total en francs : 200 190,20 F

L’Action Française 2000 n° 2714 – du 7 au 20 décembre 2006 15 L’AF EN MOUVEMENT Le grand banquet des Amis de l’Action française

Les convives étaient plus page 3), Michel Fromentoux a Paul-Marie Coûteaux, Jean- nombreux que les années accueilli les participants et Philippe Chauvin, Thibaut précédentes au Grand Banquet animé cette belle rencontre à Pierre. Puis ce dernier a réuni des amis de l’Action française laquelle participait S.A.I. la les jeunes autour du micro qui s’est déroulé ce dimanche princesse Vinh Thuy. S.A.R. le pour une fervente Royale 3 décembre dans le Palais de prince Sixte-Henri de Bourbon tout spécialement dédiée à la Mutualité dans une joyeuse Parme, avait eu un empêche- Pierre Pujo. ambiance. ment de dernière . Nous reviendrons dans En l’absence de Pierre Pujo Dès le dessert, se sont notre prochain numéro sur qui achève de se remettre des succédé les propos incisifs et cet événement, notamment suites d’une fâcheuse chute, percutants de Gérard Baudin, sur les temps forts des dis- mais qui avait envoyé un Houchang Nahavandi, du cours entendus. vigoureux message (voir colonel Barriot, Élie Hatem, I Photo Arnaud Danloux

Michel Fromentoux S.A.I. la princesse Vinh Thuy accueillait les convives a fort apprécié les interventions et présentait les orateurs de nos orateurs. Arnaud Danloux Photo Photo Arnaud Danloux

Paul-Marie Coûteaux : Houchang Nahavandi : être et parler français Réveiller l’Occident

À la fin du repas, les jeunes ont pris d’assaut l’estrade pour entonner avec Thibaud Pierre le chant de la Royale.

Le colloque des deux Instituts

a salle de l’Institut universi- sangniériste qui entend, au nom C’est ce qu’ont tour à tour dé- taire Saint-Pie X était trop pe- d’une démocratie chrétienne tou- montré Philippe Prévost, Michel Ltite ce samedi 2 décembre jours en devenir et de moins en Fromentoux, Hugues Petit, Pierre pour accueillir l’assistance accou- moins chrétienne..., déifier la vo- Pujo (qui avait envoyé son texte), rue à l’appel de cet Institut et de lonté de l’homme. Ce débat es- l’abbé Bruno Schaeffer, Godeleine l’Institut d’Action française qui or- sentiel à l’aube du XXe siècle ex- Lafargue-Dickès, Gérard Frémiot, ganisaient conjointement un col- plique tous les drames politiques l’abbé Christian Thouvenot. loque dans le cadre du centenaire et sociaux vécus depuis lors... I de l’un des livres fondamentaux de Charles Maurras : Le dilemme Une vue partielle de l’assistance de Marc Sangnier. Nous reviendrons sur cet évé- nement de haute tenue intellec- tuelle qui a permis de mieux constater l’abîme entre d’une part le réalisme maurrassien ancré dans l’expérience et l’observation Photo Tony Kunter positive des réalités naturelles que les croyants savent créées par L’abbé Christian Thouvenot, recteur de l’Institut universitaire Saint-Pie X, Dieu et d’autre part l’angélisme Photo Tony Kunter et Michel Fromentoux, directeur de l’Institut d’Action française

Édité par PRIEP S.A. au capital de 59 880 euros œ 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris œ Imprimerie RPN œ 93150 Le Blanc-Mesnil Numéro de commission paritaire 0407K86761 œ Directeur de la publication : Pierre Pujo