Découvrir le patrimoine bâti

L’Extrême-Sud

CRDP de Corse Sommaire

Circuit pédagogique n°1 Les premiers noyaux d’habitation ...... p. 05

Circuit pédagogique n°2 Bonifacio : une ville génoise en Corse ...... p. 11

Circuit pédagogique n°3 L’extrême sud : une région à contrôler et à défendre ...... p. 23

Circuit pédagogique n°4 Bonifacio et le Piale ...... p. 31

Nous remercions vivement pour leurs conseils, la documentation et les photographies mises à notre disposition :

La Direction Régionale des Affaires Culturelles de Corse Service régional de l’archéologie et Conservation régionale des monuments historiques ; les Archives départementales de la Corse-du-Sud ;

et particulièrement Messieurs Joseph Cesari, Franck Leandri, Michel Tercé, Pascal Tramoni

Dans la même collection

l’Alta Rocca ; Sartenais-Valinco ; Taravo ; ; Prunelli-Gravona ; Sevi-Sorru-Cruzzini-Cinarca

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L’Extrême-Sud

Ouvrage publié avec le concours du Conseil général de la Corse-du-Sud

Auteurs

PhiliPPe ColombAni Professeur d’Histoire-Géographie Lycée Lætitia Bonaparte - Ajaccio

AlAin GAuthier Professeur agrégé de Sciences de la Vie et de la Terre Docteur en géologie

MARIE-LAURE MARQUELET Doctorante en archéologie à l’Université de Corse

SERVICES CULTURE ÉDITIONS RESSOURCES POUR L’ÉDUCATION NATIONALE CRDP de CORSE

Édité par le Centre Régional de Documentation Pédagogique Vasculacciu : vue aérienne de la nécropole. Circuit pédagogique 1 Les premiers noyaux d’habitation

L’extrême sud de l’île présente l’avantage de pouvoir bénéficier de deux façades maritimes, côté est : la mer Tyrrhénienne ; côté ouest : la mer Méditerranée. Dès lors, on imagine que l’homme, depuis la Préhistoire, a su exploiter un tel potentiel, notamment pour son alimentation et dans le choix de son implantation.

Une occUpation l’un des premiers scientifiques à C’est en fait le commandant s’intéresser aux sites sous abri tels d’artillerie Charles Ferton, basé à ancienne que ceux de la Fiumara et du Bonifacio qui, peu après va Bonnet-de-prêtre, alors jugés trop révéler toute la richesse Si Bonifacio est connue pour sa modestes et délaissés au profit des archéologique du causse cité médiévale, il ne faut pas sites mégalithiques. À sa mort, ses bonifacien. Ses initiatives jettent oublier qu'elle est aussi un haut collections ont malheureusement les bases de la recherche lieu de la Préhistoire corse. Et la été éparpillées à travers différents préhistorique dans cette région. Dame de Bonifacio, forte de ses musées d’Europe, et ses travaux En 1898, il évoque déjà la vallée neuf millénaires, peut se ranger n’ont, pour l’essentiel, pas été de la Sennola comme une zone légitimement aux côtés de Charles publiés. Le plus dommageable, riche en vestiges préhistoriques, Quint et du Roy d’Aragon parmi c’est que F. Major, accompagné de vallée qui révéla une soixantaine les figures emblématiques de la son ami Emile Passemard, a mis d’années plus tard deux ville. Sa découverte en 1972 est au jour un matériel exceptionnel sépultures datant du Mésolithique un marqueur décisif pour qu’il est aujourd’hui impossible et du Néolithique ancien. Il fait l’archéologie préhistorique d’étudier et de dater convena- également référence à la vallée régionale. La fouille de son blement. Il s’agit, entre autres, Saint-Julien et au secteur de la gisement, Araguina-Sennola, a été d’une tablette de calcaire de type fontaine du Longone, qui donna si soigneusement menée qu’elle a anthropomorphe et d’une tablette l’occasion à F. de Lanfranchi de été à l’origine de toute une série rectangulaire d’argile cuite après dégager dans les années 1980 de travaux d’études, plaçant la gravure, ramassées sur le site du deux sites Mésolithiques : région bonifacienne au cœur des Bonnet-de-prêtre. Ce manque de Longone et Monte Leone. centres d’intérêts de grands rigueur est explicable par le Le travail minutieux et l’approche chercheurs internationaux. contexte de l’époque. L’archéo- méthodique de Charles Ferton Paradoxalement, si la région a fait logie était une science nouvelle et donnent à ses publications un l’objet de nombreuses découvertes les méthodes de fouille n’étaient caractère scientifique enrichissant et qu’elle demeure l’une des zones pas ce qu’elles sont devenues. pour le préhistorien. À n’en pas les plus riches en stations Les études stratigraphiques douter, il a été un précurseur pour préhistoriques, peu de gisements n’étaient jamais finement faire de l’archéologie une science ont pu bénéficier de fouilles dites réalisées, la fouille se faisait pluridisciplinaire. Alors que de modernes. grossièrement à la pelle et à la son temps, on se contentait de Forsyth Major, paléontologue pioche et le tamisage des l’étude de « belles pièces », lui au anglais de la fin du XIXe siècle, est sédiments n’existait pas. contraire s’est intéressé au

-8000 -7000 -6000 -5000 -4000 -3000 -2000 -1000 0 Mésolithique Néolithique Cuivre Bronze Fer Dame de Bonifacio Fondation d’Aléria M É G A L I T H I S M E -565 contexte et à l’environnement du bergers ou encore des site. Il est notamment le premier « marchands » pratiquant le troc à avoir supposé que l’obsidienne des roches sardes que sont le silex ramassée en Corse provenait du et l’obsidienne, si recherchées Monte Arci situé près d’Oristano pour leur qualité de taille. en Sardaigne. Ses réflexions sur Mais cet abri est surtout connu un éventuel commerce entre la pour avoir livré une magnifique e Corse et la Sardaigne sont sépulture datant du VIII mil- toujours d’actualité. lénaire. Le site se trouve sur un Néanmoins, il faudra attendre la terrain calcaire, roche mise au jour de la Dame de sédimentaire qui, étant exempte Bonifacio dans les années 1970 de toute acidité, a permis une pour que les préhistoriens se bonne conservation des éléments tournent à nouveau vers le de flore, de faune et des ossements territoire de Bonifacio. humains. Le squelette découvert était La Dame de Bonifacio. allongé sur le dos, la tête tournée Vestiges et pratiqUes volontairement vers la droite, les Elle serait d’ailleurs morte des fUnéraires bras placés le long du corps et les suites d’une ostéite mandibulaire. pieds joints. Il s’agit d’une femme Bien qu’aucune offrande n’ait été âgée de 35 ans et mesurant retrouvée à ses côtés, certains LA DAME DE BONIFACIO : 1,54 m, ce qui semble être la taille indices évoquent un rituel Le site d’Araguina-Sennola est moyenne pour cette époque. De funéraire. Son corps était fortuitement découvert en 1966 à nouvelles datations au carbone 14 recouvert d’ocre rouge, à l’occasion de travaux de ont donné une fourchette chrono- l’exception des pieds. Roche terrassement. Il s’agit d’un grand logique allant de 7923 à 7105 ans argileuse de couleur jaune, orange abri sous auvent, propice à avant J.-C. Le corps a été enseveli ou rouge, l’ocre présente de l’implantation humaine grâce à sous le sable. Celui-ci ayant grandes qualités pour la son orientation nord-ouest qui comblé l’espace entre les conservation, empêchant la putré- protège des intempéries et des différents os, les empêchant ainsi faction. Mais elle est surtout vents dominants de la région. de se disloquer, les ossements connue, et encore utilisée de nos À la fois proche de la mer et placé étaient toujours en connexion jours par certaines peuplades, au départ des principaux axes de anatomique, c’est-à-dire parfai- pour sa forte valeur spirituelle, pénétration vers l’intérieur de tement en place. pour sa symbolique du sang et l’île, il occupe une position D’après l’analyse anthropologique donc de la vie. La mise au jour de territoriale stratégique qui n’a pas réalisée par Henri Duday, cette cette sépulture permet de échappée à l’homme préhis- femme, que l’on appelle com- supposer que les hommes torique. En effet, les fouilles munément « La Dame de préhistoriques pratiquaient une entreprises sous la direction de F. Bonifacio », était physiquement forme de solidarité, une personne de Lanfranchi et de M. C. Weiss handicapée. Elle souffrait d’une invalide n’ayant pas pour autant ont mis en évidence une dysmorphie congénitale, de été délaissée par sa communauté. occupation humaine depuis le troubles de la croissance et de Au contraire, on retrouve une Prénéolithique, c’est-à-dire nombreuses lésions infectieuses. société ayant des préoccupations depuis le premier peuplement de Plus précisément, elle était spirituelles liées à l’enseve- l’île, jusqu’au Moyen Âge. Il partiellement paralysée du bras lissement des défunts. s’agissait sans doute, d’après gauche, se déplaçait avec Non loin de Bonifacio, deux l’étude des vestiges, de groupes beaucoup de difficultés et avait autres sites témoignent, à travers encore nomades, des pêcheurs, des du mal à mâcher ses aliments. des architectures funéraires

- 6- originales, de la pensée religieuse conservation des coffres rende reproduisaient une dualité Père- des hommes préhistoriques : les difficile leur distinction avec des Mère traversant les lieux et les coffres mégalithiques de Vascu- arases de dolmens. Les coffres époques : « au temps où ces lacciu et de Tivulaghju. sont le plus souvent regroupés et bancale furent construits, la terre associés à d’autres structures était une femme et le ciel un VASCULACCIU - TIVULAGHJU telles que cercles de pierres et homme, et lorsqu’il pleuvait, c’est Les coffres, appelés bancali en pierres dressées, mais également que le ciel et la terre s’aimaient » corse, sont l’une des mani- placés à proximité immédiate de (Les coffres mégalithiques de la festations du mégalithisme dans zones d’habitation. Il y aurait région de Porto-Vecchio, p. 530). l’île, aux côtés des menhirs, des donc eu cohabitation entre le Plus prosaïquement, l’une de ces statues-menhirs et des dolmens. monde des morts et celui des légendes voulait que ces coffres Grâce à de récents travaux de vivants. aient renfermé des lingots d’or et recherche et de nouvelles Vasculacciu et Tivulaghju sont les que leur découverte ait permis la analyses, la datation de ces plus vastes et les plus ancien- construction de Bonifacio, ou structures a pu être repoussée au nement connus des sites à coffres encore que cet or ait été utilisé par les Templiers pour l’édifi- Néolithique moyen (Ve millénaire en Corse. Ils occupent une av. J.-C.). Il s’agit de tombes dont position surélevée, au sommet cation de l’église Saint- e la structure est enterrée, fermée d’une butte, près de , et sont Dominique au XIII siècle. De sur quatre côtés et le plus souvent depuis longtemps imprégnés de telles légendes ont d’ailleurs incluse dans un tumulus délimité superstitions et de croyances conduit pendant des années les par un péristalithe, sorte de magico-religieuses, en particulier chercheurs de trésors à violer et parement circulaire fait de Tivulaghju qui était surnommé à vider le contenu des coffres, pierres. À la différence des « campo guardato », et pour cela avant que J. Liégeois n’en entre- dolmens, qui comportent une interdit de cultures. Ils furent prenne les premières opérations ouverture sur un côté, l’ouverte de l’objet de plusieurs légendes. de fouilles archéologiques au la sépulture se fait par le dessus. Roger Grosjean tendait à y voir début des années 1960. Malheureusement, il arrive la survivance d’anciennes Grâce aux travaux menés il y a souvent que le mauvais état de croyances où le ciel et la terre quelques années par P. Tramoni, de nouvelles données ont pu être collectées. Le site de Tivulaghju comprend deux coffres majeurs appelés A et B, distants d’une centaine de mètres l’un de l’autre. Le coffre A présente une chambre funéraire d’une profondeur importante et d’une superficie de 6.4 m², à laquelle est associé un menhir brisé en trois fragments. Le coffre B, aujourd’hui détruit, est accompagné d’un double péristalithe, dont les parements, destinés à soutenir le tumulus, mesurent respectivement 10 et 13 m de diamètre, pouvant être interprété comme un dispositif de Tivulaghju, le coffre A. signalisation spectaculaire. La chambre offre une superficie

- 7- un peu moins grande avec environ 4 m², mais le volume du coffre reste tout de même conséquent. De récentes prospections archéologiques ont mis en évidence la présence d’un important établissement de plein air à proximité de cette nécropole. Les vestiges ramassés évoquent la taille de l’obsidienne, le travail de la céramique et les travaux de meunerie. Pour P. Tramoni, ces deux installations seraient contemporaines dans le sens où elles auraient été fréquentées au cours du Néolithique moyen. Il est étonnant de remarquer que l’on retrouve la même configu- ration sur le site tout proche de Vasculacciu. Là aussi, la nécropole est Vasculacciu, coffre D. juxtaposée à un vaste habitat de associés, laissent penser que nous totalement arénisés, c’est-à-dire, plein air. Elle est composée de 8 à sommes en présence de tombes vierges de tout gros blocs. On 10 sépultures mégalithiques destinées à des personnages suppose de ce fait que les associées à des cercles de pierres importants, idée renforcée par la préhistoriques ont été contraints et des pierres dressées. découverte de six belles grandes de rechercher de grandes dalles Le coffre nommé A par les haches polies, mobilier de dans les proches environs et de archéologues est considéré comme prestige, sur le site de Vasculacciu. les tracter sur des centaines de le monument principal du site Ces sites nous offrent un mètres, voire plusieurs kilomètres. tant il est imposant. Sa chambre témoignage des préoccupations Cette parfaite maîtrise de funéraire a une surface interne de religieuses, ou du moins des l’environnement se retrouve à 6,5 m² et une profondeur croyances en l’au-delà, des l’âge du bronze avec l’édification supérieure à 2 m, soit un volume populations du Néolithique des villages fortifiés nombreux de plus de 13 m3. Son tumulus est moyen. Malheureusement, il est dans la région. encore bien visible. En revanche, aujourd’hui impossible d’en c’est le coffre D qui présente la retrouver précisément les rites, L’occUpation chambre funéraire la mieux même si l’on peut supposer une défensiVe conservée, avec ses quatre parois organisation complexe au regard intactes formées de dalles de l’aménagement de ces monolithiques de dimensions très sépultures. LE CASTEDDU DE TAPPA : régulières. Cette chambre est D’ailleurs, ces nécropoles Le casteddu de Tappa situé sur la également incluse dans un mégalithiques ne peuvent être que commune de illustre tumulus de 6 m de diamètre, la manifestation d’une com- parfaitement ce phénomène structuré par 14 monolithes. munauté soudée, sûrement architectural défini par hiérarchisée et possédant une l’aménagement de structures À Tivulaghju et Vasculacciu, les parfaite connaissance du fortifiées, parfois dites « turri- matériaux utilisés, la taille des territoire. Les sépultures ont été formes », à partir de chaos monuments ou les dispositifs aménagées sur des terrains granitiques. Considéré comme

- 8- l’un des premiers villages de LE CASTEDDU DE TORRE : site de Tappa, cette torra ne Corse, il occupe une petite butte Signalons encore la présence d’un possède pas de cella mais surplombant une plaine favorable casteddu au-dessus du hameau de seulement un couloir étroit avec aux mises en culture. Le site Torre non loin du village de La niches et diverticules. Les vestiges s’organise en trois secteurs bien Trinité, en bordure du golfe de archéologiques mis au jour ont définis et semble avoir bénéficié Porto-Vecchio. Etudié par permis d’identifier une occu- d’une longue occupation par R. Grosjean en 1958, il présente pation au Bronze moyen, puis de l’homme, depuis le Néolithique l’ensemble des caractéristiques de façon plus occasionnelle aux moyen jusqu’à l’âge du bronze. ce type de monument, à savoir : époques romaines et médiévales. Une enceinte sur la partie est une enceinte fortifiée, une torra La construction de ce type de évoque des préoccupations bâtie sur un chaos rocheux et des casteddu correspond au moment défensives à mettre très traces d’habitations tout autour. où l’économie est essentiellement certainement en relation avec la La torra est soigneusement structurée par l’élevage et constitution de réserves construite en assises horizontales l’agriculture et quand se alimentaires. faites de gros blocs et son entrée développe la métallurgie. Au nord, les archéologues ont est matérialisée par un Les communautés commencent identifié les restes d’un édifice magnifique linteau en surplomb, fortement à se hiérarchiser et ruiné qu’ils supposent être une visible encore aujourd’hui. débute alors la transition de la torra. Au sud, se tient une autre En revanche, contrairement au Préhistoire vers l’Histoire. torra relativement bien conservée mais dont il manque la partie La présence romaine supérieure. De plan circulaire, elle mesure 11 m de diamètre et présente un aménagement très PIANTARELLA complexe composé de niches et de Afin de lutter contre l’emprise couloirs secondaires. Un escalier croissante des Carthaginois en étroit aménagé dans l’épaisseur Méditerranée, les Romains con- du mur permettait d’accéder à quièrent la Corse en 259 av. J.-C. l’étage. Au centre, la pièce Dès lors, ils s’installent et principale est de dimensions étendent leur influence à partir notables avec 4.5 m de diamètre. des ports qu’ils aménagent le long De cette cella, au plan circulaire, des côtes. Il est évident que l’île s’ouvrent trois grandes niches, présente de nombreux avantages dont deux se prolongent par des dans leur politique d’hégémonie. couloirs menant à des sorties D’une part, elle offre une position dérobées. Bien qu’il soit difficile géographique hautement straté- de donner avec précision une gique permettant le contrôle des destination à ce type de voies maritimes en mer monument, la présence de Thyrrhénienne. plusieurs foyers épars suppose la réalisation d’activités domes- D’autre part, elle renferme tiques. Au pied de cette torra, se d’abondantes richesses naturelles trouvait un village s’étendant sur comme le bois, nécessaire à la environ 1000 m². Plusieurs arases construction des navires de de maisons y ont été repérées de guerre, mais également la cire, part et d’autre d’un axe central, l’huile, le vin et le sel, essentiel à et l’une d’entre elles présentait en la bonne santé de l’homme et à la son centre deux foyers circulaires. Monument de Torre, le couloir. conservation des aliments.

- 9- générale, les thermes romains sont composés de quatre parties essentielles : un vestiaire (apody- terium), une salle froide (frigida- rium) pour les bains froids, une salle tiède (tepi- darium) où les baigneurs sont parfois enduits d’huile et de parfums et une étuve (caldarium). Ici, on retrouve cette distribution des pièces avec un frigidarium dallé, un tepidarium, Piantarella, vue aérienne et maquette de l’établissement romain. un caldarium et un unctarium Sur une propriété privée, le site ne se visite pas. (salle de massage) pavé de mosaïques à éléments noirs et Il faut toutefois attendre le Le site se composait d’un blancs. L’alimentation en eau se Ier siècle après J.-C. pour que la ensemble de bâtiments formant faisait probablement par la force paix s’installe durablement dans un établissement complexe et de de l’homme ou encore la traction l’île. Rome parvient alors à structures thermales, d’un intérêt animale, et le chauffage par imposer son modèle économique majeur pour la connaissance de hypocauste, c’est-à-dire par le basé sur l’échange monétaire, l’histoire romaine dans l’île. sous-sol. ainsi que son art de vivre. C’est L’établissement s’étend sur Ce type d’établissement reflète dans ce contexte qu’apparaît 3600 m² et ses bâtiments occupent l’art de vivre à la romaine, qui l’établissement de Piantarella, le pourtour d’une immense cour inclue le souci d’une bonne situé au niveau du détroit de intérieure de 1800 m². Au sud, les hygiène. Rappelons que les Bonifacio, près de l’étang de archéologues ont identifié un thermes publics peuvent égale- Sperone. Occupé depuis la entrepôt de plusieurs salles, ment jouer le rôle de lieux de première moitié du I e r siècle destinées au stockage du sel ; à socialisation et parfois de centre ap. J.-C. jusqu’au début du l’ouest, un atelier de teinturerie, d’affaires. IVe siècle, il fait partie des rares et au nord, des structures faisant Ainsi, tout au long de la période établissements datant de cette penser à des magasins, voire des impériale, Rome diffuse son mode époque à avoir bénéficié de locaux administratifs. de vie en Corse : sa vision fouilles archéologiques en Corse. L’établissement était surélevé politico-religieuse du monde, sa Malheureusement, les pillages d’un étage dédié au logement des vaisselle, ses techniques de successifs ont rendu son étude personnes. L’ensemble de ces construction (utilisation du lacunaire et sa compréhension structures présentent un mode de mortier connu sous le nom de particulièrement difficile. Néan- construction soignée, avec un « béton romain », de la brique ou moins, il a été possible de lier cet appareil architectural en opus de la tuile). Toutefois, la mise au établissement à l’exploitation du reticulatum et opus mixtum jour d’objets indigènes témoigne sel dans l’étang de Sperone, vittatum rarement établi en de relations maintenues avec aménagé en marais salant, et à Corse. l’intérieur de l’île et permet de l’extraction du granite dans l’île Au sud-ouest du site se tenait le supposer une bonne intégration voisine de Cavallo. complexe thermal. En règle des colons romains. - 10 - Circuit pédagogique 2 Bonifacio : une ville génoise en corse

En 1187, les Génois, sur un audacieux coup de main, s’emparent du site de Bonifacio jusqu’alors tenu par leurs rivaux Pisans, qui y avaient installé une petite agglomération fortifiée. Consciente de l’importance stratégique de cette conquête, Gênes décide de renforcer son implantation et de créer à Bonifacio une ville permettant de contrôler le détroit corso-sarde et de disposer d’un point d’appui solide dans l’île.

La fondation de La coLonie

La colonie est fondée en 1195, par l’envoi de familles venues de Gênes et de son territoire ligure. Afin de rendre l’opération attractive, les colons bénéficient d’importantes exemptions fiscales et d’institutions spécifiques qui les placent directement sous l’autorité et la protection de la Commune de Gênes. À partir de la fin du XIIIe siècle, Bonifacio est gouvernée par un podestat nommé par Gênes pour un an. Ce podestat est toujours un Les falaises de Bonifacio. Génois, souvent issu de puissantes familles, comme les Doria. Il des murailles, pour y résider, ou Bonifacio est donc conçue, dès dispose du pouvoir exécutif et dans le modeste territoire l’origine, comme une extension en judiciaire et doit assurer la bonifacien, pour y cultiver. En Corse du Dominio génois dans un gestion, et surtout la défense, de échange, ils sont tenus à des but commercial et surtout la colonie. Il est assisté des obligations envers la ville, comme stratégique. L’identité génoise et Anziani qui représentent la assurer sa défense et participer à la fonction militaire sont les deux population de Bonifacio. ses finances. Gênes applique ici à éléments fondateurs qui déter- Outre leurs exemptions fiscales, Bonifacio un modèle de création minent la structure de la ville et les colons, que l’on désigne sous de ville nouvelle qu’elle utilise son originalité architecturale. le terme de « burgenses » (c’est- fréquemment dans son Dominio, Il serait extrêmement hasardeux à-dire habitants permanents de la comme lors de la fondation de de reconstituer le Bonifacio pisan ville bénéficiant de ses statuts), Portovenere ou de Lerici au en l’absence de fouilles archéo- reçoivent des terres : à l’intérieur XIIe siècle. logiques d’envergure et d’études

800 900 1000 1100 1200 1300 1400 1500 1600 1700 1800 Fondation Gênes s’empare Bataille Siège aragonais Siège franco-turc Caserne Traité de de Bonifacio de la ville de Méloria 1420 1533 génoise Versailles 1187 1284 1732 1768 marches qui doivent compenser sur la rue par des arcades où sont les dénivellations. Entre les rues, installés les commerces. Le fond les espaces à bâtir sont lotis en de la maison est occupé par les parcelles étroites (4 à 5 mètres de espaces de fabrication et de large sur 10 à 20 mètres de long) stockage des marchandises, ou par qui conditionnent l’aspect des une écurie (la stalla d’asi). Le maisons bonifaciennes. premier étage est privatif, on y accède par un escalier intérieur La ViLLe médiéVaLe souvent très raide qui était à l’origine en bois (fréquemment du genévrier), reconstruit plus Au XVI e siècle, Monseigneur Giustiniani, dans sa Description récemment en pierre. L’intérieur du logis s’organise en longueur Bonifacio, détail de façade. de la Corse, note que « les maisons autour de la « salla », la pièce La façade fait apparaître des éléments re- de Bonifacio sont construites à principale. Les autres étages sont présentatifs de l’architecture génoise mé- l’ancienne mode de Gênes. ». La aussi des espaces privés reprenant diévale : polychromie et arcature sur cité Ligure avait en effet déve- la structure du premier. modillons. loppé au Moyen Âge un style architectural spécifique qu’elle a documentaires poussées. En l’état, Dans les maisons de notables, la exporté dans tous ses comptoirs on peut supposer que l’agglo- façade dispose d’éléments ou colonies, depuis la Mer Noire mération pisane se trouvait décoratifs, le plus fréquent étant jusqu’à Bonifacio. Cette archi- autour de l’actuel Torrione et une arcature sur modillons située tecture, facilement identifiable, utilisait comme port l’anse de la au-dessus des voûtes et qui devait affirmer la présence de Carotola. marque la séparation entre les Gênes sur toutes les rives de la Lorsque les Génois reprennent le espaces public et privé. Les Méditerranée. site, ils privilégient l’urbanisation fenêtres du premier étage (il piano d’un plateau de 3,5 hectares qui nobile) bénéficient d’une attention UNE ARCHITECTURE SOUS s’étend entre le ravin de la particulière, par leur taille ou leur INFLUENCE Carotola et l’à-pic des falaises qui décoration. Dans certains cas, la Bonifacio, « fille de Gênes », ne dominent la marine. Ils appli- façade est rythmée par une déroge pas à la règle et conserve quent à leur colonie les règles alternance de dalles larges et de nombreuses traces de cet d’urbanisme en usage à Gênes. Le étroites, ou de blocs blancs et urbanisme médiéval génois. plan de Bonifacio s’organise noirs (les bandes lombardes), à Contrairement à une idée reçue, autour d’une rue principale, la l’imitation des palais génois. Le la maison bonifacienne des « platea longa », actuelle rue matériau de construction privi- époques médiévale et moderne est Longue, qui traverse tout l’espace légié est évidemment le calcaire basse et dépasse rarement les urbanisé. À cette rue principale local, solide et facile à travailler. deux étages. Le rez-de-chaussée s’ajoutent trois autres rues Certaines façades sont aussi est un espace public qui s’ouvre parallèles. Ces « grands axes » ornées de linteaux sculptés (leur largeur varie entre 4 et 5 mètres) sont reliés entre eux par des rues plus petites que les Génois dénomment vicoli ou carrugi. Sur cette base, la ville est organisée selon un plan à damier Linteau de la qui doit toutefois s’adapter à de maison fortes contraintes topographiques, Cataccioli, dite ce qui explique l’irrégularité du « de Charles tracé des rues et la présence de Quint ». - 12 - figurant les armoiries Ainsi, au XVI e siècle, Mgr familiales. Giustiniani se lamente sur les Il est probable qu’à effets combinés de la peste de l’origine, les maisons 1528 et des attaques des corsaires bonifaciennes aient turcs qui ont vidé la ville : celle- été organisées, sur le ci ne compte plus « que » 700 modèle génois, en habitants, alors qu’elle en aurait « contrade », c'est-à- compté, selon lui, jusqu’à 5000 ! dire en quartiers Plus raisonnablement, on estime familiaux disposant que la ville médiévale devait avoir chacun de leurs une population de 2 à 3000 propres infrastruc- habitants. On sait qu’en 1765, la tures. Plusieurs mai- population de la ville est sons ont leur propre remontée à 2200 habitants, Bonifacio, détail de façades. Les gouttières sur arc-boutant silo, enterré sous le répartis dans 300 immeubles, pour relient encore entre elles les maisons de la vieille ville. rez-de-chaussée, ou une surface de 3,5 hectares restée leur citerne, alimentée inchangée depuis le Moyen Âge. par les eaux pluviales recueillies dans des LE CŒUR DE LA VILLE gouttières sur arc- Comme à Gênes, les espaces boutant, dont de ouverts sont rares. La seule place nombreuses subsis- publique de la ville s’organise tent encore. Comme à entre la loggia de l’église Sainte- Gênes, ces quartiers Marie et le Palazzo pubblico où familiaux disposaient loge le podestat. de minuscules « pla- La « loggia comunis » constitue ces » privées qui ont le cœur de la vie urbaine : les subsisté dans l’ur- burgenses s’y retrouvent pour y banisme actuel. régler les affaires publiques ou Cette structure du privées ; le podestat y fait ses bâti, qui privilégie des proclamations ou y rend la maisons étroites et justice ; les notaires y officient ; La « loggia comunis » devant l’église Ste-Marie Majeure. profondes dans les- le curé piévan de Sainte-Marie y quelles chaque étage accueille les fidèles. Acces- peut être occupé par soirement, c’est aussi sous la une famille, explique loggia que se trouve la citerne la surprenante densité communale d’une capacité de de population de 653 m3. Bonifacio sur un espace aussi réduit.

Le Palazzo pubblico. Siège du pouvoir génois à Bonifacio, il accueillait le logement du podestat, des bureaux, une prison et une salle de torture. On retrouve sur sa façade les élé- ments caractéristiques des maisons de notables. Au Moyen Âge, c’était un bâ- timent bas à 2 étages ; il fut réaménagé après le siège de 1553.

- 13 - L’église, de style roman, a été maintes fois remaniée au cours des siècles, ce qui complique son analyse architec- turale. C’est un édifice à trois nefs, orienté à l’est, construit en calcaire local. Ses seules décorations sont la rosace, qui surmonte le toit de la loggia et la petite corniche à arcature sur modillons, dominée par une croix qui souligne le sommet du bâtiment. L’intérieur de l’église, régulièrement réaménagé, constitue une sorte de condensé architectural de l’histoire de la ville, et il faut Eglise St-Jean Baptiste, détail d’un réem- souhaiter qu’une étude en ploi médiéval. règle nous permette un Les petits oratoires urbains, de fondation jour de mieux la médiévale, comme Ste-Croix, St-Jean-Bap- connaître. Les piliers ont tiste ou, à la marine, St-Erasme, ont été été ornés de moulures en reconstruits aux XVIIIe et XIXe siècles. stuc au XIXe siècle ; les autels déclinent les styles Actuellement enserrée dans les baroques de la période étroites ruelles et dominée par les génoise, entre XVII e et hautes maisons, l’église Sainte- XVIIIe siècle ; on y trouve Marie émergeait largement du Clocher de l’église Ste-Marie M., détail. aussi, entre autres, un bâti médiéval et constituait un sarcophage de marbre blanc bâtiment imposant à l’échelle de L’église Sainte-Marie-Majeure, datable du III e siècle et un la ville, que signalent toutes les improprement surnommée tabernacle offert par un pieux gravures anciennes. « cathédrale », apparaît quant à mécène en 1465. elle dans la documentation dès L’église est flanquée d’un LES IMPÉRATIFS DE L'URBANISATION 1238. Au Moyen Âge, Bonifacio et campanile d’une hauteur de L’extrême promiscuité de la ville son territoire constituaient une 25 mètres, là encore probablement génoise s’explique par la topo- piève, placée sous l’autorité de construit en plusieurs étapes. graphie mais aussi par les l’évêque d’Ajaccio. Mais, en 1516, Les étages supérieurs s’ornent impératifs de défense. Ceux-ci les Bonifaciens obtinrent le d’éléments gothiques qui rap- interdisent de construire des privilège d’être placés directement pellent les églises de style maisons trop élevées qui sous l’autorité de l’archevêque de aragonais construites en dépasseraient des murailles et Gênes, le curé piévan devenant Sardaigne au XIVe siècle. s’exposeraient aux tirs adverses. archiprêtre de la paroisse de Aux angles, on retrouve les De même, les statuts de la ville Sainte-Marie. symboles des quatre évangélistes. prohibent de construire le long - 14 - la montée du Rastello. Sa caractéristique la plus remarquable est la présence d’entrepôts utilisant les grottes creusées dans la falaise. Ces grottes aménagées font l’objet d’un contrôle pointilleux, afin d’éviter qu’un ennemi ne s’y abrite en cas d’attaque de la ville.

LE QUARTIER DES COUVENTS Il peut paraître surprenant que la ville haute soit contenue dans un espace aussi réduit, alors qu’à l’ouest de la Carotola s’étend l’autre partie du plateau, actuellement occupée par le quartier militaire (désaffecté) et le cimetière marin. Mais, dès le Moyen Âge, cette partie du site La ville génoise, vue aérienne. est affectée à un rôle spécifique Les habitations se concentrent à l’est du plateau, autour de l’église Ste-Marie. qui limite son urbanisation : on y des murailles, afin de ménager un Jusqu’au XIXe siècle, celle-ci est trouve de nombreux édifices « boulevard » permettant aux un quartier peu développé qui religieux qui se répartissent défenseurs de se rendre s’organise entre le port, l’oratoire autour d’un bois d’où émergent facilement d’un bout à l’autre du Saint-Erasme et une série de des moulins à vent, l’ensemble circuit fortifié, ou de construire fortifications qui protègent l’accès étant ceinturé par les inévitables des appentis qui encombrent les à la haute ville, depuis la mer, par fortifications. rues. Il faut donc attendre le XIXe siècle pour que, les impératifs militaires ayant évolués, les Bonifaciens soient autorisés à surélever leurs maisons, donnant à la ville son aspect actuel. La ville s’est également dotée, au cours des siècles, d’impres- sionnantes infrastructures qui devaient assurer le ravitaillement de la population en cas de siège : ainsi les silos enterrés sous la place d’arme et la place de la Manichella qui pouvaient contenir 5000 hectolitres de blé, la citerne de la loggia, ou l’escalier dit « du roi d’Aragon » dont nous reparlerons. Au-delà de Plan terrier de la Corse, rouleau n°39, détail © Archives départementales de la la muraille, point de faubourg, si Corse-du-Sud. ce n’est la très modeste « marine ». À la fin du XVIIIe siècle, le bois et les couvents sont encore visibles à l’ouest du plateau.

- 15 - ont fait l’objet d’un soin particulier mettant en valeur la qualité de la taille des blocs de calcaire. De chaque côté du portail, des fenêtres trilobées éclairaient les travées. L’intérieur de l’église révèle son aspect gothique par l’utilisation des croisées d’ogives dans la nef et les travées. Comme pour Sainte-Marie, la décoration intérieure rappelle toute la richesse de l’histoire de la ville : chasses processionnaires baro- ques, dalles funéraires et inscriptions médiévales, ainsi que de nombreuses peintures, dont un tableau des Mystères du Rosaire qui a pour particularité de Église St-Dominique. représenter, aux pieds de la Vierge, plusieurs portraits de Partant de la Carotola vers L’église constituait le cœur d’un notables bonifaciens et une vue l’ouest, on trouvait l’église San couvent dominicain aujourd’hui de la ville à la fin du XVIe siècle. Giacomo, l’église et le couvent disparu. Édifiée à partir de la fin San Domenico, de nombreuses du XIII e siècle, dans un style chapelles comme Santa Croce, réutilisant des éléments d’archi- San Giovanni Battista, Santa tecture gothique, elle reste, par Maddalena ou San Bartolomeo son aspect extérieur sobre et peu (leurs noms ont été conservés par élevé, proche des églises romanes. les confréries de la ville) et à Toutefois, l’utilisation d’éléments l’extrémité du plateau, le couvent de style gothique, rarissime pour Saint-François. Beaucoup de ces la Corse, révèle la modernité et édifices religieux ont actuel- l’ouverture vers extérieur de la lement disparu ou ont été colonie de Bonifacio, qui importe considérablement modifiés par dans l’île les modes architec- l’utilisation qu’en a faite l’Armée turales alors en vogue sur le – celle-ci en ayant la propriété continent. Elle est ornée d’un depuis le XVIIIe siècle. Quatre sont clocher octogonal sur base carrée, encore en élévation. Saint-Jacques couronné de merlons et percé de et Sainte-Marie-Madeleine ont été baies géminées. tellement modifiés qu’ils ne sont Le portail principal, dont le quasiment plus identifiables, et portail latéral nord reprend le Saint-François, bien que style, est décoré de colonnettes récemment restauré, a été en formant un arc brisé et sur- grande partie réaménagé. Seule montées d’un fronton triangulaire l’église Saint-Dominique offre orné d’une croix et du labrarum encore des traits d’architecture (l’Agneau de Dieu portant un remarquables, qui peuvent servir étendard), lui-même dominé par de base à une analyse. une rosace. Les chaînages d’angles Église St-Dominique (intérieur). - 16 - Tous ces bâtiments religieux répartis sur le plateau étaient Des couvents hors les murs. séparés entre eux par un vaste Il faut rajouter aux couvents de la ville haute, deux édifices hors les bois d’arbustes, lentisques, myrtes murs, tous deux de fondation franciscaine, qui marquaient le territoire ou romarins (il bosco), attesté dès de Bonifacio : le couvent Saint-Julien et l’ermitage de la Trinité. Ces le Moyen Âge, et qui constituait deux édifices, bien connus des Bonifaciens, sont attestés dès le Moyen une réserve stratégique de bois en Âge, mais ont été depuis reconstruits ou réaménagés. cas de siège. Il servait alors pour La façade de l’ermitage de la Trinité date de 1912, mais elle orne un e le chauffage et la cuisine, mais bâtiment attesté dès le XIII siècle, peut-être construit sur des bases aussi pour réparer ou renforcer plus anciennes. Le bâtiment, situé sur le territoire de la piève de les murailles, par des palissades Bonifacio, constitue rapidement un pèlerinage apprécié des Bonifaciens. ou des pieux. Il était donc Le rocher qui le domine sert même de point de repère pour les marins, e strictement interdit d’y couper du ce qui peut expliquer son succès auprès des gens de mer. Au XIII siècle, bois sans autorisation. Le bosco, les Franciscains reprennent le site, à l’origine occupé par un ermitage largement entamé lors du passage de moines bénédictins, rattaché à l’abbaye de l’île de Monte Cristo des troupes françaises de (comme de nombreuses chapelles situées dans le nord de la Sardaigne). l’expédition de Sardaigne, en Orientée à l’est, la chapelle franciscaine reprend une architecture sur 1793, disparut progressivement au croisées d’ogives, encore visibles, à l’entrée actuelle du bâtiment. L’église a été profondément remaniée et probablement réorientée vers XIXe siècle. l’ouest au XVIIe siècle, avant d’être entourée, au XIXe siècle, de bâtiments e De ce bois émergeaient les conventuels et d’être redécorée au début du XX . L’intérieur abrite des clochers des églises et des moulins statues de dévotion, des dalles funéraires et de nombreux ex-voto qui à vent, dont certains sont encore témoignent de la ferveur séculaire des pèlerins. L’ermitage de la Trinité, en élévation, servant de repères malgré son ancienneté et sa renommée a été peu étudié, au-delà de aux marins. Depuis la mer, l’analyse stylistique. Une étude historique et archéologique poussée Bonifacio se localisait par son permettrait de mieux connaître le site et son évolution. fanale, une tour récemment restaurée où l’on allumait un feu qui marquait l’entrée du port, mais aussi par son « Torrione », énorme tour blanche qui daterait du temps des Pisans et aurait constié la première pièce du puissant système de fortifications qui fit la force et la fierté de la ville.

Une pLace à défendre

La tradition, plus que les sources historiques, veut que le Torrione ait été la tour élevée par les Pisans pour protéger leur colonie. Situé côté sud, face à la mer, mais dominant aussi au nord le ravin de la Carotola où se trouvait le port, il aurait servi à la fois de vigie et de donjon. Vestiges des moulins de Bonifacio. - 17 - falaises, elle ne peut être attaquée directement qu’en deux points : la porte, située à l’est, vers la terre, et l’anse de la Carotola, qui font donc l’objet d’une attention particulière. La seule porte donnant accès à la ville était située approxi- mativement à l’emplacement de l’actuelle « Porte de Gênes ». À l’imitation des portes de la muraille de Gênes, elle était flanquée de deux tours et dominée par la grosse tour de l’Étendard, qu’a remplacé le bastion du même nom. La porte était perpétuellement gardée et fermée chaque nuit. L’anse de la Carotola était quant à elle protégée par un premier mur au niveau de la mer, doublé au Bonifacio, vue aérienne. La ville génoise s’est développée à l’est du Torrione qui protégeait sommet du ravin par l’alignement la première colonie pisane. des maisons. Lorsque les Génois prirent au roi d’Aragon, et parfois La Torricella. Bonifacio, ils s’installèrent à l’est dénommé « scala e porta del du plateau, mais auraient soccorso », est attesté au conservé cette structure défensive XVIe siècle ; il était anciennement désormais décentrée par rapport fortifié et barré par des obstacles. à la ville et séparant la zone Le Torrione traverse, intact, urbanisée du quartier des l’histoire de Bonifacio jusqu’en couvents et du bosco. On sait 1901, date à laquelle il est rasé néanmoins que la tour est par l’armée parce qu’il constituait progressivement entourée d’une un point de repère facile pour muraille pourvue de tourelles aligner le tir d’éventuelles d’angle constituant une batteries ennemies. Il a été fortification urbaine appelée reconstruit à l’identique en 1985, « casteletto », peut-être en grâce aux plans levés par le Génie référence à l’énorme château du militaire. même nom qui dominait la ville Entre le XIIIe et le XVIe siècle, le de Gênes. Il devient alors une système défensif se concentre sur vigie et un monument symbole de la protection de la ville et du la ville. Au pied du Torrione est goulet. Les parties nord et est des creusé, dans la falaise sud, un falaises sont pourvues de escalier qui permet de rejoindre murailles rythmées par des tours, la mer et surtout une source d’eau comme la tour carrée dite douce qui alimente la ville « Toricella » qui a conservé son autrement que par les citernes. aspect médiéval. La ville étant Cet escalier, faussement attribué naturellement protégée par ses - 18 - LA CITADELLE MODERNE construits aux environs de la ville Ce système défensif résiste pour surveiller l’accès depuis la victorieusement au siège de 1420, terre : le fort de Campo Roma- mené pourtant par mer et par nello, sur l’emplacement d’une terre, avec un appui d'artillerie, tour médiévale, actuellement par les troupes du roi Alphonse V détruit, et le fort de l’Absinthe au d’Aragon. En revanche, il est nord-est de la marine. Redoutable durement éprouvé par le siège système qui dissuade de toute franco-turc de 1553, qui lui fait nouvelle attaque et ne subit subir un bombardement massif. aucune modification notable Les assaillants ne parviennent jusqu’au XVIIIe siècle. toutefois pas à passer les remparts, Cependant, la première caserne et c’est faute de secours extérieurs destinée à accueillir la garnison que la ville finit par se rendre. qui était jusqu’ici logée en ville, Les ingénieurs génois tirent les chez l’habitant, n'est construite leçons de cet échec et réorganisent qu'en 1732. Cette innovation entièrement le système de défense d’importance est confirmée et en l’adaptant aux nécessités de la amplifiée avec l’arrivée des guerre moderne. À partir des Français (la caserne génoise ne années 1560 et pendant un siècle, représentant qu'environ un tiers un vaste chantier conduit à des bâtiments actuels). donner aux fortifications leur aspect actuel. La pièce maîtresse LES AMÉNAGEMENTS FRANÇAIS en est l’imposant Bastion de Dès la fin du XVIIIe siècle, l’armée l’Étendard, le plus haut de , française agrandit la caserne qui englobe l’ancienne tour. La porte génoise. existante et rachète les édifices Suffisamment haut pour battre les religieux qui sont progres- plateaux de Campo Romanello à construction en 1588 ; le pont sivement transformés en l’est et de Pian di capella au nord, actuel datant du XIXe siècle). Les bâtiments utilitaires, comme San où les assaillants Aragonais et défenses de la montée du Rastello Giacomo dont les absides Turcs avaient installé leur sont renforcées (rastello signifie accueillent des fours à pain. artillerie, il protège à la fois la « herse ») tandis que la marine est L’ancien quartier des couvents marine, la Carotola et la porte. fortifiée et protégée par deux devient donc, jusqu’à la fin du Cette dernière fait l’objet de tours : celle du môle, récemment XXe siècle, le quartier militaire. nouveaux aménagements : elle est reconstruite, et celle de la « Porte En 1815, suite à une émeute de la intégrée dans un bastion à oreille de la marine », détruite à la fin population, favorable au retour de et dispose d’un pont-levis (dont du XIXe siècle. Aucune des voies Napoléon, l’armée décide de une inscription rappelle la d’accès à la ville haute n’est construire un mur fortifié négligée : la Carotola est protégée séparant la ville du domaine par le bastion Saint-Nicolas et militaire. Il faut toutefois attendre par une double ligne de murailles 1848 pour qu’il soit réellement barrant le ravin ; les tours de la édifié. Ce mur a finalement été muraille nord sont modifiées pour détruit en 1984, rétablissant disposer d’une artillerie capable l’accès libre entre les deux parties. d’empêcher des navires de tra- On retrouve encore dans le côté verser le goulet et d’atteindre la nord de l’église San Giacomo des marine pour y débarquer. Deux meurtrières qui s’intégraient à petits forts sont également cette enceinte. Bastion de l’Étendard. - 19 - La Porte de France.

En 1854, pour rendre la ville plus « de Saint-Antoine » installée au- Ce dispositif, qui s’intègre à un accessible aux convois militaires delà du couvent Saint-François, vaste système de défense de la et aux charrois d’artillerie toutes deux dotées de canons de région, est encore modernisé au moderne, l’armée fait percer dans 190 mm portant à 12 km. cours du XXe siècle. Ayant sans le rempart nord la Porte de France D’autres ouvrages sont creusés doute dissuadé l'Italie d'attaquer, qui permet, encore aujourd’hui, dans la falaise, des deux côtés du il est désarmé à la demande de l’accès des voitures à la haute goulet, pour accueillir des canons cette dernière en 1941 et ne sera ville. Pour capter l’eau douce, elle à tir rapide et de puissants jamais remis en fonction. fait aussi, creuser l’impresionnant projecteurs qui désignaient les En 1962, le quartier militaire puits Saint-Barthélémy, profond cibles aux batteries côtières. Une accueille la Légion rapatriée de soixante mètres. base de bateaux torpilleurs est d’Algérie et reste occupé par installée sur la marine en 1895, à l’armée jusqu’à la fin des années À la fin du XIXe siècle, les consi- l’emplacement de l’actuelle 1990. Cédé à la région et à la ville, dérations stratégiques imposent capitainerie. Enfin, en 1910, une sans plan préalable de réamé- de nouveaux réaménagements des nouvelle caserne dite « caserne nagement, le quartier est défenses, comme la mise en place française » est construite face à actuellement abandonné. Les de nouvelles batteries, associées à la caserne génoise pour accueillir anciens bâtiments militaires se des abris bétonnés, notamment la les nouveaux effectifs, l’ensemble dégradent rapidement, mettant en "batterie n°2", située près du des bâtiments constituant la péril une partie du patrimoine Torrione et la "batterie n°6", dite caserne Montlaur. bâti bonifacien.

- 20 - Le cimetière marin de Bonifacio. La création d’un cimetière communal à Bonifacio correspond à l’obligation légale, imposée par l’administration française, de faire construire des cimetières fermés et isolés du reste des habitations, afin d’améliorer les conditions d’hygiène et de limiter les épidémies, particulièrement en ville. Précédemment, les défunts étaient enterrés en terre consacrée, à l’intérieur ou autour des églises, dans des sépultures individuelles ou collectives. Le couvent Saint-François de Bonifacio, qui jouxte le cimetière, abrite encore des restes d’arca (fosse commune) et de dalles funéraires, dont la plus ancienne est celle de l’évêque d’Ajaccio, Raffaele Spinola, datée de 1457. Dès le XVIIIe siècle, les administrateurs français dénoncent ces pratiques qui rendent ces bâtiments infréquentables, particulièrement en été, du fait des émanations dues à la chaleur. Malgré une longue résistance des populations, attachées à leurs usages, la construction des cimetières commence au début du XIXe siècle. Le cimetière communal Saint-François est ouvert en 1823, sur les terrains du couvent franciscain, loin de la ville et de la caserne (le cimetière du Canicciu à Ajaccio, répondant à la même obligation, est ouvert en 1833). Agrandi après l’épidémie de choléra qui frappe Bonifacio en 1854, le cimetière prend progressivement sa physionomie actuelle, avec la construction de tombeaux monumentaux par lesquels les familles affichent, post-mortem, leur réussite sociale. Le plus ancien répertorié est celui de la famille Aïcardi, édifié en 1866 ; l’un des plus spectaculaires est celui de la famille Quilici, édifié en 1884-1885 par l’architecte Pierre Mangin et le sculpteur Gabriel Vital-Dubray. Ces tombeaux reprennent les styles alors en vogue sur le continent (italien ou français) : néo-classique pour les Quilici, néo-gothiques ou orientalisant. En 1891 est décidée la construction d’un monument, unique en Corse, honorant les morts des guerres de Crimée (1855) et de 1870. Peut-être le naufrage de La Sémillante (1855) avait-il sensibilisé les Bonifaciens à ces guerres du Second Empire ? L’œuvre est un ossuaire, surmonté d’une croix rappelant un calvaire, et ornée d’une statue en marbre de la Vierge et de plaques rappelant le nom des soldats. Elle est construite en granite extrait des carrières de la Trinité, qui servit aussi à l’édification du portail ouest du cimetière. Le portail s’orne d’un beau fronton sur colonnes, qui décorait précédemment la porte principale de l’église Sainte-Marie. Installé à l’église en 1879, il fut déplacé au cimetière en 1987. Avec son plan quadrillé, son monument aux morts, ses tombeaux monumentaux, son carré militaire, le cimetière de Bonifacio évoque une petite cité funéraire où l’on peut lire l’histoire et les distinctions sociales de la cité des vivants. Son surnom lui vient, faut-il le préciser, de sa localisation et non des marins qui y sont, parmi tous les autres Bonifaciens, enterrés.

- 21 - San Quilico de Montilati. La chapelle, qui mesure 7,45 m. sur 3,10 m, est orientée à l’est et se termine par une abside en cul-de-four, éclairée par une étroite fenêtre meurtrière, la seule de l’édifice. Elle est construite en quadri de granite, soigneusement taillés dont l’alternance compose le décor des façades. La porte est surmontée d’un arc en plein-cintre. L’originalité de la chapelle est d’être couverte par une voûte de pierre et non par l’habituelle charpente en bois. Les toits sont faits de petites dalles de granite (e teghje). Circuit pédagogique 3 L’extrême-sud : une région à contrôler et à défendre

Avant de connaître un développement rapide grâce au tourisme, les plaines littorales du sud de l’île, depuis la plaine de Figari (a pian da Frettu) à l’ouest, jusqu’au golfe de Porto-Vecchio et Solenzara à l’est, ont longtemps souffert de leur mauvaise réputation de région insalubre et déserte. Néanmoins, l’Extrême-Sud fut toujours considéré comme une zone stratégique que les pouvoirs successifs ont cherché à mettre en valeur et à contrôler, marquant le paysage d’un patrimoine bâti spécifique à la région.

Le terroir médiéVaL céréalières capables de ravitailler que construisaient des maîtres- Dès le Moyen Âge, les seigneurs cette métropole qui est, au Moyen maçons itinérants, souvent venus corses quadrillent le territoire Âge, l’une des plus peuplée d’Italie et imitant les modèles d’un réseau de châteaux, depuis d’Occident. La tentative de continentaux. Probablement disparu, mais qui rappelle Sapardonica reste sans lendemain édifiée au XIIe siècle, cette chapelle qu’avant le XVe siècle, les plaines et Giovanni della se est liée au hameau de Montilati, littorales sont des espaces peuplés lamente, au XV e siècle, de lui-même dominé par le château et aménagés qui font l’objet de l’abandon d’un terroir aussi de Montalto, dont subsistent toutes les convoitises. Un acte de fertile que le Pian da Fretto, qu’il quelques ruines facilement 1336 signale que le seigneur explique par la légende du accessibles par un sentier Arrigo de Litala (Tallano) dispose Moscone, dont le souffle aménagé. L’ensemble offre un d’un château à Ceccia (ses arases méphitique aurait empoisonné résumé de la structure d’un sont visibles sur les murs l’air du lieu. terroir médiéval, fait de petits préhistoriques), et Giovanni della Les vestiges de nombreuses hameaux dispersés, auxquels sont Grossa situe la légende églises médiévales attestent associés des lieux de culte, le tout d’Orsolamano autour du château également de la vitalité des sous le contrôle du seigneur, qui de Montilati. Quant aux Génois, communautés qui habitaient la dispose à la fois de la propriété ils tentent une implantation plaine entre le XIIe et le XVe siècle. des terres et de l’autorité coloniale à Sapardonica, près de La région située entre Figari et judiciaire. Figari, en 1257. Sari di Porto-Vecchio en compte Les caractéristiques architec- Cette fondation coloniale hors de au moins trente-quatre. Celle de turales de San Quilico se Bonifacio est la première tentative San Quilico de Montilati retrouvent, à plus grande échelle, de colonisation agraire menée par (commune de Figari), encore dans les ruines de l’église piévane Gênes dans la région. La ville de entière et récemment restaurée, San Giovanni Battista de Figari, Gênes, qui ne dispose que d’un offre un bel exemple de ces qui constituait le cœur du terroir modeste territoire continental (le chapelles qui bornaient les médiéval. La circonscription Dominio), doit très tôt chercher terroirs médiévaux. Il s’agit d’un administrative et religieuse de des zones de production édifice modeste mais très soigné base de la Corse médiévale étant

1400 1500 1600 1700 1800 1900 1950 Office de Mort de Citadelle de Traité de “Les fortins Maginot“ Saint Georges Rinuccio della Porto Vecchio Versailles 1930-1935 1453 Rocca 1511 1540-1600 1768 la piève, celle-ci était la seule En 1581, les troupes génoises protégeant tout le golfe. église où l’on pouvait pratiquer rasent les modestes fondations de À partir de 1571, la construction des baptêmes - d’où son vocable l’éphémère « Vintimiglia la des tours est coordonnée par le - et servait aussi de lieu de nuova » (le nom faisait référence « Magistrato delle Seminiere e réunion à la communauté pour les à la ville d’origine du groupe de delle fabriche delle torri » qui affaires civiles ou judiciaires. colons ligures arrivés en 1578), de détermine les sites de crainte qu’elles ne servent de base construction en fonction des tentatiVes génoises aux Turcs. nécessités stratégiques et des Libres de leurs mouvements, ces requêtes des communautés de coLonisation derniers attaquent sans difficulté locales. Au début du XVIe siècle, l’Office les villages de l’intérieur. En 1584, Porto-Vecchio, refondée, bénéficie de Saint-Georges, après avoir Conca et sont dévastés par de la mise en place de ce réseau soumis les seigneurs della Rocca une troupe de cinq cents pirates cohérent. Toutefois, les ambitions et confisqué leurs terres, reprend venus de Porto-Vecchio. Le projet concernant la jeune cité ont été le projet de développement de ville fortifiée est donc relancé revues à la baisse : le rôle de agraire et cherche à mettre en et, en 1589, un nouveau groupe colonie agraire a été minoré au valeur la côte est, entre Porto- de colons réoccupe le site. Cette profit d’un rôle stratégique de Vecchio et Solenzara. refondation s’intègre dans une verrou défensif. Pour diminuer les Mais la soumission des seigneurs politique plus ambitieuse de la coûts, Gênes confie la mise en correspond aux premiers raids république de Gênes, dont le but valeur à des privés, comme le menés par les « Turcs » sur les est de protéger les côtes par un Génois Filippo da Passano, qui côtes corses. Le danger venant réseau cohérent de tours de guet reçoit la région en fief, ou Antonio maintenant de l’extérieur, l’Office et de villes fortifiées. Blemosto, d’origine bastiaise, qui se voit dans l’obligation de s’engage à construire six tours protéger les terres qu’il veut faire UN RÉSEAU DE FORTIFICATIONS entre 1589 et 1591. Ces tours, fructifier, doù la tentative de Le réseau des tours qui veillent construites sur des fonds privés, fondation d’une colonie agraire sur les côtes, les caps et les golfes, sont mal documentées. Toujours fortifiée sur le site de Porto- a été long à s’organiser de façon est-il qu’au début du XVIIe siècle, Vecchio, dont l’objectif est triple : cohérente, particulièrement dans les Commissaires du Sindicato chasser les corsaires qui se le sud, région pourtant très chargés de contrôler les défenses servent de l’excellent golfe de exposée à la piraterie. Ce de l’île font acte d’un système Porto-Vecchio, pour mener leurs paradoxe s’explique par un cercle défensif complet pour Porto- opérations en toute impunité ; vicieux provoqué par la faible Vecchio et sa région. assurer la protection des colons population locale et la grande Le golfe et la ville sont protégés qui doivent mettre en valeur les dangerosité de ces plaines, du fait par trois tours : San Benedetto plaines littorales ; disposer d’une de la malaria et des corsaires. Ces (ou Cala Rossa), San Ciprianu et base portuaire fortifiée qui deux facteurs empêchent tout la Chiappa. Le système est arrêterait les raids dévastateurs projet d’envergure puisque la complété, au nord du golfe, par que les Turcs mènent vers les main d’œuvre refuse de venir les tours de Pinarellu et Fautea et villages de l’intérieur. travailler ou est décimée, à au sud par celles de la Sponsaglia Entre 1539 et 1581, plusieurs l’image des malheureux colons et Sant’Amanza. Cette dernière, tentatives d’installations d’une ligures de Porto-Vecchio. À édifiée en 1620 est l’ultime tour colonie agricole ont lieu mais l’inverse, la région d’Ajaccio construite en Corse, mais fut échouent, du fait de la malaria, bénéficie de la présence de la ville minée par les Turcs, ce qui de la menace des barbaresques et fortifiée qui constitue une zone explique les pans de muraille de l’hostilité des populations sûre et d’un climat plus sain, ce dispersés aux alentours. La locales, dépossédées de leurs qui lui permet de se doter plupart de ces tours sont ruinées terres par l’entreprise coloniale. rapidement d’un réseau défensif ou perdues dans le maquis.

- 24 - Les tours génoises. Les tours édifiées entre le milieu du XVIe et le début du XVIIe siècle constituent un réseau défensif qui répond à un double but : prévenir les populations des attaques turques venues de la mer et permettre la mise en valeur des plaines littorales. Elles servent aussi de point de repère pour les marins et de lieu de collecte des droits d’ancrage et des taxes douanières. Les tours sont conçues comme des vigies, dont l’objectif n’est pas de résister à un siège prolongé, mais plutôt de prévenir et de permettre l’intervention des troupes plus nombreuses venues des villes fortifiées comme Bonifacio ou de petits forts comme Tizzano. Chaque tour communique avec les autres par des signaux visuels (feux) ou sonores (canon, conque marine). Elles disposent d’une petite garnison de torregiani, généralement un officier et deux ou trois soldats, recrutés dans la population locale. Leur armement se compose de pièces d’artillerie légère et d’armes individuelles, aptes à protéger la tour mais pas à attaquer. Les tours, qu’elles soient rondes ou carrées sont généralement construites sur le même plan. Ce sont des édifices faits de blocs de granit liés et enduits à la chaux, d’une dizaine de mètres de haut. La base accueille une citerne au-dessus de laquelle se trouve l’étage d’habitation où vivent les torregiani. L’entrée se fait par une porte surélevée, située au dessus du cordon qui court sur toute la circonférence Tour dite « de Figari », Pianottoli-Caldarello. du bâtiment. On y accédait par un escalier amovible que l’on retirait en cas d’attaque. La pièce principale d’habitation est voûtée et pavée. Elle disposait de placards, construits dans l’épaisseur du mur, et parfois d’un four ou d’une cheminée, éléments rares dans les maisons corses de l’époque. Dans certaines tours, les hommes bénéficiaient d’un second étage. Un escalier intérieur, souvent protégé par une guérite en pierre (la guardiola) permet d’accéder à la terrasse qui dispose de mâchicoulis permettant de tirer au pied de la tour. À et Figari, ce dispositif a été simplifié par l’utilisation alternée de créneaux et de bretèches, dont une qui protège la porte d’entrée.

- 25 - tour de pinarellu, sainte-lucie de Porto-Vecchio. On relèvera la présence de modifications éventuelles par ainsi que la citerne), Stazona (ou plusieurs tours carrées dans la rapport au système actuel. Il Bastion San Giorgio), Spinola (ou région de Porto-Vecchio, comme semble que les fortifications Bastion de France car au XVIIIe Pinarellu, San Ciprianu ou San actuelles aient largement réutilisé siècle, des troupes françaises y Benedettu. Ce choix architectural le premier circuit fortifié mis en seront stationnées), Bastardo (ou ne marque en rien une ancienneté place dans les années 1540 et dont Bastion de la Porte). par rapport aux tours rondes, la « destruction » de 1581 doit Chaque bastion dispose d’une mais s’explique peut-être par une être relativisée, les guastatori ou « oreille » qui permet de tirer sur volonté des maîtres d'ouvrage de “sapeurs”, ayant dû araser les les assaillants se présentant au réduire les coûts. murs mais conserver les pied des murs. Les angles étaient La pièce maîtresse de ce nouveau fondations. dotés d’échauguettes, dont dispositif est la citadelle de Porto- La ville, construite sur son éperon certaines subsistent encore. Vecchio dont les murailles sont rocheux, est protégée par une Contrairement à Bonifacio, où elle relevées après 1589. Toutefois, enceinte bastionnée, dotée de est intégrée à un bastion, la porte aucune étude n’ayant été faite sur quatre bastions : Fontana (ou est, à Porto-Vecchio, située au ces fortifications, il est difficile bastion Sant’Antone), Passano (ou milieu de la courtine sud-est, d’en connaître la date précise Bastion du Palais car le protégée par une bretèche d’édification et surtout les palazzo publico y etait adossé, (l’actuelle « Porte génoise »).

- 26 - Vecchio sont ainsi construites sur le modèle des maisons villageoises et ne reprennent pas le modèle d’urbanisme génois que l’on trouve à Bonifacio. Le faible effectif de la population explique la modestie des structures, tant militaires que civiles. Au sud-ouest de Porto-Vecchio, la puissante citadelle de Bonifacio reste donc le point fort de la présence génoise dans le sud de l’île. C’est elle qui fait la jonction entre le réseau de tours de la côte est et celles de la côte ouest. Trois tours se succèdent, depuis Bonifacio vers le nord-est : Pianottoli (dite, tour de Figari), l’Olmeto (sans lien avec le village du Valinco) et Roccapina. Ces tours protègent bien sûr les accès depuis les criques du littoral vers l’arrière-pays, mais servent aussi à la défense des flottilles de Porto-Vecchio, intérieur du bastion de France. L’ensemble se présente comme une fortification très classique, capable de repousser des razzias ponctuelles, mais incapable de résister à un siège en règle mené par une armée moderne. Par sa structure, Porto-Vecchio rappelle , qui répond aux mêmes objectifs, mais se trouve bien en deçà, tant par les moyens engagés que par les raffinements polior- cétiques, c’est-à-dire relatifs aux techniques de siège des places fortes, de citadelles comme Bonifacio ou Calvi. En 1787, après l’arrivée des Français, Porto-Vecchio compte 411 habitants, avec 198 résidents à l’intérieur des murs. La plupart sont originaires des villages environnants, en particulier . Les maisons de Porto- Porto-Vecchio, échauguette du bastion de France. - 27 - 1870, la détérioration des rapports entre la France et l’Italie redonne à l’Extrême-Sud de la Corse une importance stratégique qui impose la mise en place de nouvelles structures défensives.

de noUVeaUx enjeUx stratégiqUes Du fait de sa situation géogra- phique, la ville de Bonifacio redevient, comme au temps de Gênes, le pivot de la défense face à l’Italie et doit pouvoir répondre aux batteries installées par les Italiens à la Maddalena, de l’autre côté du détroit. Les défenses de la citadelle sont ainsi modernisées et surtout renforcées par de puissantes batteries installées hors les murs. La plus importante se trouve à Bocca di Valle, près du sémaphore de Pertusato, au sud de la ville. Construite au sommet de la falaise, sur l’à-pic, elle compte quatre pièces lourdes de 240 mm, et quatre canons de 95 mm, mais les ingénieurs ont utilisé la falaise calcaire comme une énorme casemate puisqu’ils y ont creusé, outre les habituelles galeries qui abritaient les munitions, un emplacement destiné à un projecteur et à sa centrale électrique, installés en contrebas Porto-Vecchio, des canons. L’accès aux batteries la Porte génoise. par la terre est protégé par un réduit fortifié qui, bien corailleurs, très actives dans la L’arrivée des Français et la qu’abandonné et dégradé, reste région, qui les ont longtemps disparition de la piraterie encore impressionnant. réclamées à la république de barbaresque pendant le XIXe siècle Passée la première guerre Gênes. La tour d’Olmeto a fait rend ce système de défense, hérité mondiale, pendant laquelle l’Italie l’objet d’une restauration récente, de Gênes, désuet. Les tours sont, se range au côté de la France, la qui restitue l’aspect original des pour la plupart, vendues ou menace renaît avec les prétentions tours, blanchies à la chaux et transférées à l’administration des irrédentistes de Mussolini, qui donc visibles de très loin. Ponts et chaussées. Mais, après rêve de reconquérir la Corse. - 28 - niveaux : un niveau de combat où se trouvaient les armes et les filtres destinés à purifier l’air en cas d’attaque au gaz, et un niveau inférieur où se trouvaient les lits et les sanitaires. Les principales casemates surveillaient les plages de Ventilegne, Balista, Capo Bianco, Santa Manza, Rondinara et Santa Giulia. Quatre casemates ont aussi été installées vers Porto- Vecchio. Trois autres surveillaient les accès routiers : deux à Spinella, vers Porto-Vecchio et une à Catarello, vers Sartène. Enfin, l’accès aux batteries de Bocca di Valle était protégé par une ligne d’abris et de casemates que l’on aperçoit encore, aux bonifacio, plateforme de tir de la batterie de bocca di Valle. environs de Pertusato. Entre ces positions principales, s’échelon- L’armée décide donc de renforcer Il est donc décidé de construire, naient des ouvrages plus une nouvelle fois les défenses de dans tout l’Extrême-Sud, des modestes : nids de mitrailleuses, l’Extrême-Sud pour s’adapter aux lignes fortifiées composées de positions de combat aménagées, évolutions techniques apparues casemates et d’abris enterrés, abris, barbelés qui devaient durant la Grande Guerre. Bocca aptes à bloquer la progression de empêcher tout mouvement en di valle reçoit de nouvelles pièces l’ennemi. Ce nouveau réseau est dehors des axes routiers. ayant une portée de 16 km et se construit entre 1932 et 1934 et Ce système fortifié eut un effet voit renforcée par une nouvelle utilise des modèles de bâtiments dissuasif. La commission batterie installée sur la crête de identiques à ceux installés sur la d’armistice italienne jugea donc Pertusato, l’ensemble étant ligne Maginot (édifiée entre 1930 bon d’en réclamer le déman- protégé par des batteries anti- et 1939), d’où leur surnom de tèlement en 1941. Depuis, aériennes. Ce luxe de précautions « fortins Maginot ». l’ensemble de ces fortifications s’explique par la construction, à Les casemates sont protégées par subsiste, désarmé mais entier, le côté des batteries de Bocca di des murs de béton d’un mètre et plus souvent oublié dans le Valle, d’un poste de comman- demi d’épaisseur, d’où émerge une maquis et lentement dégradé par dement, protégé par d’impression- coupole blindée, armée de le temps ou les actes de nantes plaques de blindage, qui mitrailleuses jumelées ou de vandalisme. Ces casemates doit, en cas d’attaque, coordonner canons. Cette partie visible est constituent le témoignage le plus l’ensemble du dispositif. entourée de fossés et de barbelés récent d’un très ancien processus Mais la proximité des côtes dont beaucoup sont encore en historique par lequel les pouvoirs italiennes impose aussi de se place sous le maquis Mais successifs cherchèrent à contrôler prémunir contre toute tentative l’essentiel du bâtiment se trouve cette région, lui donnant du même de débarquement sur les plages. sous terre, réparti sur deux coup une partie de son originalité. - 29 - Les salines de Porto-Vecchio Pendant la période génoise, la production de sel était interdite en Corse, car la République disposait du monopole de l’importation depuis les salines d’Hyères ou de Trapani qu’elle contrôlait. La gabelle du sel, qui taxait la vente de sel importé, constituait une importante source de revenus pour l’Etat génois. Les salines médiévales, comme celles de Spérone ou de Saint-Florent furent donc détruites et restèrent interdites jusqu’à l’arrivée des Français, en 1768. La France tenta, sans succès, de relancer les anciennes salines et ce fut en 1795, sous le royaume anglo-corse, que Jean- Paul de Roccaserra, un riche notable de Porto-Vecchio, obtint du roi d’Angleterre Georges III, l’autorisation d’ouvrir une saline près de sa ville. Après un départ prometteur, sous le Ier Empire, où elles produisent jusqu’à 10000 quintaux métriques de sel, les salines de Porto-Vecchio marquent le pas, par manque d’investissements d’envergure. En 1830, elles ne produisent que 3000 quintaux, alors que la consommation annuelle est de 30 000 quintaux pour toute la Corse. Incapable de résister à la concurrence extérieure et à la contrebande, les salines ne produisent plus que 700 tonnes de sel en 1938 et n’auront plus qu’une activité résiduelle jusqu’à leur fermeture. Malgré leur vaste surface au sol (38 hectares), les salines sont essetiellement constituées par les bassins, ou tables de concentration, où se dépose le sel. On ne compte à Porto-Vecchio que peu bâtiments, le principal étant le grenier à sel, un long édifice construit en granite et pourvu d’une rampe d’accès qui permet d’y charrier le sel et de le conditionner pour le commercialiser.

- 30 - Circuit pédagogique 4 Bonifacio et le Piale Si la vieille ville, en partie en surplomb sur la mer, et les formidables bastions de la citadelle sont connus de tous, la campagne bonifacienne (le Piale) offre un autre témoignage, plus discret sans doute, mais tout aussi original, de l’influence du sous-sol sur l’architecture, ici vernaculaire. Peu connu des visiteurs d’un jour, ces témoignages du dur labeur des agriculteurs méritent pourtant d’être redécouverts.

géoLogie sommaire dU caUsse Bonifacien Îlot calcaire de 25 km² au sein d’une mer de granite, le causse bonifacien ponctue de façon originale l’extrême sud de la Corse et le territoire le plus méridional de la France métropolitaine. Le visiteur le moins averti de la géologie insulaire constate, quelques kilomètres avant d'arriver à Bonifacio, qu’il pénètre dans un monde géologique le calcaire différent, tant il est vrai que le et passage des teintes beiges et le Piale de rousses des granites aux teintes bonifacio. blanchâtres des calcaires est net et brutal. de son extraordinaire potentiel marneux en creux. Au-dessus des L’affleurement calcaire serait défensif. C’est donc avant tout à marnes, des calcaires bioclastiques toutefois banal sans son sa constitution et à son histoire (c’est-à-dire contenant des débris extraordinaire mariage avec la mer géologique que la région de d’organismes vivants fossiles), à et sans la brutale interruption, Bonifacio doit son originalité, son débit en plaquettes et à stra- côté mer, des couches sub- peuplement précoce et, plus tard, tification oblique, forment horizontales par des falaises son succès touristique. l’essentiel des falaises sur battues par les vagues. Ainsi, le Les roches qui forment le plateau lesquelles la ville de Bonifacio a tracé du port est celui d'une ria sont essentiellement des calcaires été édifiée. formée lorsque l'embouchure de et des formations gréseuses (sable Le fait que la partie supérieure du l'ancienne vallée fluviale, creusée cimenté). massif calcaire bonifacien se à une période où le niveau de la La zone calcaire est d’âge Miocène, débite en petites dalles de mer était plus bas, a été envahie c'est-à-dire du tertiaire supérieur. quelques centimètres d’épaisseur par cette dernière. Très tôt, les Les dépôts miocènes se pour- pour quelques décimètres de habitants de l’île ou les puissances suivent ensuite par des alternances longueur est à l'origine d'un très navales du moment ont pris de calcaires construits de grès à grand nombre de constructions du conscience de l’intérêt du site et ciment calcaire et par un niveau Piale.

Traité de Arrêtés Miot Première guerre 1750 1800 1801 1850 1900 mondiale 1950 Versailles 1914-1918 1768 1ER EMPIRE MONARCHIE DE JUILLET SECOND EMPIRE IIIe RÉPUBLIQUE 1804-1815 1830-1848 1852-1870 1870-1940 Les UtiLisations dU ou les Trulli de la Calabre fréquemment l’utilisation de bois caLcaire sédimentaire. Ils portent ainsi de genévrier. On rencontre aussi témoignage que le matériau souvent dans la partie circulaire La nécessité d’épierrer les champs, impose la forme, sinon la fonction. du mur de petites logettes qui mais aussi un microclimat Même si les baracun peuvent pouvaient permettre de placer des particulièrement ventilé, se différer par le diamètre, la objets à une certaine distance du traduisent par des constructions hauteur, l’utilisation ou non d’un sol. spécifiques qui utilisent avec linteau calcaire, etc., il est pos- Ce schéma général peut bonheur ces dalles de calcaire. sible de définir un baracun type. néanmoins connaître quelques Celui-ci est constitué d’un mur variations. Si l’assise est en LES BARACUN bas circulaire percé d’une seule général circulaire, les formes Les baracun sont de petites ouverture, en général sans porte. carrées, voire rectangulaires constructions en pierres sèches, en De ce mur, qui peut avoir existent, mais la partie supérieure général de forme circulaire. Leur plusieurs décimètres d’épaisseur, est toujours conique. nombre exact n’est pas connu part une voûte en encorbellement Le mur inférieur peut avoir une mais il est bien supérieur à la qui donne naissance à un toit très forte épaisseur et dans centaine. Beaucoup sont conique. Pour ce faire, on monte certains cas, il semble avoir été aujourd’hui en mauvais état, en pierres sèches une rangée de construit en deux temps, le mur partiellement effondrés ou même dalles qui débordent vers extérieur paraissant destiné à réduits à l’état de tas de pierre. l’intérieur du cercle, puis une renforcer en le doublant le mur Répartis sur tout le Piale, aussi seconde rangée, etc., jusqu’à ce initial. bien à l’est qu’à l’ouest de la ville, que les dalles se rejoignent et se Dans quelques cas, le granite est ils sont souvent cachés au milieu bloquent entre elles. Les dalles utilisé, essentiellement pour le du maquis arboré qui a pris sont légèrement inclinées vers mur de base. Il s’agit alors de possession des anciennes terres l’extérieur et cela afin de constructions situées à la péri- cultivées. Les baracun bonifaciens permettre aux précipitations de phérie du Piale, à proximité des ont un air de famille avec les s’écouler. affleurements granitiques. bories de la Provence calcaire, La difficulté de trouver des Quelques constructions échappent auxquelles l’Institut Géogra- pierres calcaires pouvant faire à ce plan général et se traduisent phique National les a assimilés, office de linteau nécessite par de véritables œuvres d’art avec escaliers dans les murs, ouvertures, cheminées.

Si la plupart des baracun se trouvent au cœur des anciennes parcelles, toutefois, certains sont implantés contre les murs de séparation et quelques-uns sont même incorporés aux murs. On ne connait pas l’époque à laquelle les baracun ont été construits et il y a sans doute assez longtemps que l’on n’en n’a plus édifié. Ils ne sont toutefois probablement pas extrêmement vieux et dateraient des XVIIIe ou XIXe siècles. Un baracun type de la région de Bonifacio. - 32 - L’étude attentive du plan terrier de l’île, réalisé à la fin du XVIIIe siècle, montre l’existence de certains d’entre eux, identifiables à de petits rectangles noirs sur le plan, mais le nombre cartographié est alors très inférieur à celui que l’on peut constater aujourd’hui.

LES MURS DE DÉLIMITATION Les murs quadrillent par endroit la campagne bonifacienne où ils servaient à délimiter et à clôturer les jardins, les oliveraies et autres champs. Ils bordent également les anciens chemins qu’ils dominent parfois de plusieurs mètres. Certains sont admirablement bien construits. Composés de plusieurs assises de pierre sèche à la base, Bonifacio, mur en pierre sèche. parfois réunis en boutisse, ils s’amincissent progressivement culier, composé de vers le haut et se terminent par « pavés à la génoise ». Ce une rangée sommitale de pierres dallage, lorsqu’il per- un peu plus grandes qui coiffent siste, est constitué par le mur. des dalles calcaires Les ouvertures dans les murs sont posées verticalement et souvent soignées et bien transversalement, de appareillées. Parfois des pierres part et d’autre d’une en relief sont percées d’un trou dalle centrale, souvent dans lequel venait pivoter le un peu plus épaisse, montant en bois d’un portail. posée elle aussi La qualité et l’homogénéité des verticalement, mais lon- dalles superposées, le soin mis gitudinalement. Lorsque dans l’empilement et l’alternance la pente du chemin était des dalles, a évité l’apparition des importante, de larges fentes « en coup de sabre » et a marches permettaient permis aux murs de défier le aux animaux de franchir temps. Hélas, la largeur des le dénivelé (marches en chemins qu’ils encadrent n’est pas pas d’âne). vraiment compatible avec la circulation automobile et ils LES MURS COUPE-VENT ET servent encore trop souvent de AUTRES carrière pour récupérer à moindre À l’est du Piale, on frais les dalles calcaires. observe parfois, au Entre ces murs, on trouve parfois milieu d’un champ, des des chemins au dallage parti- murs en arc de cercle Chemin pavé « à la génoise ». - 33 - Saint-Julien au fond de la vallée de même nom. Cette source abondante aurait servi, si l’on en croit la légende, à Ulysse pour refaire sa provision d’eau. À l’aval des sources ou des bassins, les canaux d’arrosage (i Maschetti) peuvent localement être de construction particu- lièrement soignée, comme par exemple dans le secteur de Saint- Julien.

Un exemple de rivillin, avec un baracun de base carrée en arrière plan. orientés vers l’est. Il s’agit des LESAMÉNAGEMENTSENRAPPORT tramizzi destinés à abriter les AVEC L’EAU cultures des vents dominants. Bonifacio présente un double On observe aussi des murs handicap vis-à-vis de l’eau douce. beaucoup plus épais formant de Il s’agit d’une des zones les moins véritables massifs en bordure ou arrosées de Corse et le calcaire même au milieu d’une parcelle. fissuré du Piale se laisse Ces murs paraissent avoir été facilement traverser par l’eau de essentiellement construits en vue pluie qui s’infiltre alors profon- Canal d’arrosage dans le secteur d’épierrer la parcelle. Ils intègrent dément. de Saint-Julien. parfois une cavité aménagée en De fait, les sources sont rares sur abri (a cella), des escaliers formés le plateau. Elles n’en sont que de marches volantes ou réalisés plus recherchées et sont Les constrUctions en dans l'épaisseur même du mur. soigneusement captées. L’eau est Il est également possible de alors utilisée en cascade : source, zone granitiqUe trouver des murs circulaires suivie d’un abreuvoir pour les édifiés autour des oliviers. animaux, puis d’un bassin pour Le territoire de la commune de Appelés rivillin, leur fonction est l’arrosage, lui-même en relation Bonifacio se développe bien au- sans doute de retenir la terre et avec de nombreuses rigoles. delà du causse calcaire sur le l’eau autour de l’arbre, peut-être Citons la source de Corcone, de substratum granitique, à l’ouest également de protéger les arbres Saint-Jean, ou la source des jusqu’au golfe de Ventilegne et au contre la dent des animaux. trygons située près du couvent nord jusqu’au-delà de l’étang de - 34 - LES ORII Beaucoup plus originaux sont par contre les tafoni ou autres cavités qui ont subi des aménagements : les orii. Ce sont des ouvrages que l’on rencontre surtout dans le sud grani- tique, au-dessous d’une ligne allant de Sartene à Porto- Vecchio. La date de leur édification n’est pas connue, mais, comme les baracun, elle n’est pas très ancienne, proba- Oriu de Serragia. blement dans le courant du XVIIIe ou du XIXe siècle. Balistru et de la baie de Run- La cavité initiale peut être dinara. La zone est actuellement constituée d’un bloc en surplomb peu habitée et il y a peu de traces ou d’un empilement de blocs, d’un d’une occupation antérieure, si l’on ou plusieurs tafoni ou d’une boule excepte quelques modestes tafonisée. Oriu de Cani. bergeries. On distinguera les abris sous Il faut s’éloigner davantage et roche des orii. Les premiers sont pénétrer sur le territoire de Porto- souvent fermés par un mur de diversité qui ne masque cepen- Vecchio, sur celui de Figari ou de pierres utilisées à l’état brut. Dans dant pas les traits communs. Leur Piannotoli-Caldarello pour ren- les seconds, la fermeture est plus fonction reste en partie mys- contrer les premières agglo- soignée, parfois obturée à la térieuse : servaient-ils d’abris mérations humaines conséquentes. chaux ou à la terra rossa. temporaires pour des agriculteurs Situées en général sur, ou à Il peut s’agir d’un orifice carré ou loin de leur communauté, d’abris proximité des chaos rocheux, les rectangulaire, à un mètre environ de bergers en hiver, ou de greniers maisons traditionnelles ne du sol, dans lequel il faut se de stockage ? présentent pas de caractéristiques faufiler pour pénétrer dans la Ils représentent en tout cas un qui les distinguent au sein de la cavité ou, plus rarement, d’une superbe exemple de l’adaptation Corse granitique. porte. Mais le linteau de l’orifice, humaine à son environnement et On y retrouve toujours les mêmes les encadrements latéraux et le un véritable exemple d’ethno- attributs : murs en mœllons de support inférieur sont en général géologie. À ce titre, les orii de la granite calés par des éclats de soigneusement taillés, ou à tout le Corse-du-Sud mériteraient d’être pierre et/ou par de la terra rossa ; moins bien dégrossis, même si le répertoriés dans une étude aussi linteaux et pied de porte bois de genévrier peut être utilisé. exhaustive que possible. monolithes ; supports de balcon et Bien entendu, les orii épousant la testimoni en attente sur les côtés forme de la cavité à obturer, ils pour un éventuel agrandissement. présentent donc une certaine - 35 - Les carrières de San Baïnzu, de Lavezzi et de Cavallu Le monument aux morts de Bonifacio, colonne de granite extraite de l’archipel des Lavezzi, attire notre attention sur l’utilisation de ce matériel par les habitants de la région bonifacienne. Les carrières jadis exploitées sont localisées au sud de l’île de Cavallu, en plusieurs points sur l’île Lavezzu et sur l’îlot de San Baïnzu, où a eu lieu la plus forte activité extractive. En l’état actuel de nos connaissances, les carrières de San Baïnzu – Cavallu paraissent avoir été exploitées à deux périodes : à l’époque romaine et dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Cette deuxième exploitation, en rapport avec l’édification du phare des îles Lavezzi, a entraîné la destruction de nombreux vestiges romains dont on connait l’existence par des récits du début du XIXe siècle. Il ne semble pas y avoir eu d’exploitation des carrières entre ces deux périodes mais des recherches complémentaires peuvent éventuellement modifier ce point de vue. C’est donc aux Romains que l’on doit la première exploitation du granite dans l’îlot de San Baïnzu. De nombreux vestiges (traces d’habitation, sculpture), datés par les archéologues du IIe au IVe siècle, sont visibles sur Cavallu. Par ailleurs, plusieurs descriptions de la première moitié du XIXe siècle nous permettent de nous faire une idée précise de l’état de la carrière de San Baïnzu à l’époque. Gueymard écrit ainsi en 1824 : « C’est ici que l’on trouve la colonne ébauchée par les romains : elle a 8,78 m de longueur, 1,24 m de diamètre inférieur et 1 m de diamètre supérieur. Cette colonne est à 9 m du lieu qu’elle occupait dans la carrière. Près de là, on voit une espèce de meule de moulin (…). Partout, on voit des traces d’une ancienne exploitation, des fragments et de longues masses cylindriques auxquelles il manquerait quelque chose en longueur et en épaisseur pour faire des colonnes (…). On distingue aussi parfaitement bien la route que l’on faisait suivre à une colonne avant de l’embarquer ; elle est au nord de la carrière. Une pierre verticale servait à amarrer les bâtiments et on voit de la façon la plus distincte, la partie rongée par le câble sur le côté opposé à la mer (…). En un mot, ces ateliers sont dans un état de conservation parfaite et comme les rainures pour l’abattage sont nettes, il semble que ces chantiers sont encore habités par des Romains que l’on vient surprendre avant l’heure de leur travail ; on ne peut se défendre de cette douce illusion ». Il n’en va plus de même depuis la construction du phare de l’île Lavezzu, de 1872 à 1874, décidée après le naufrage de La Sémillante. L’entrepreneur « sans se préoccuper de la valeur de ce souvenir archéologique (…) reprit sans hésitation, à 2000 ans d’intervalle, l’exploitation de la carrière antique au point même où les ouvriers romains l’avaient abandonnée. Chapiteaux, fûts, colonnes se transformèrent en bâtiments du phare et bientôt du chantier souvenir émouvant de la grandeur romaine, il ne restera plus que la description que nous venons de publier… », écrit Clavel en 1924. Quant à la colonne, point de départ de ce paragraphe, seul vestige important ayant échappé aux constructeurs du phare, elle a été transportée en novembre 1932 à Bonifacio, pour servir de monument commémoratif aux victimes de la guerre de 1914-1918.

- 36 - GLOSSAIRE

Abside : pièce saillante du corps du Créneau : entaille rectangulaire dans Parapet : mur plein formant garde- bâtiment auquel elle se rattache, et un parapet. corps ayant, dans l’architecture qui présente son propre volume. En militaire, fonction de protection. Corse, les absides romanes sont Cupule : terme utilisé en archéologie généralement voûtées en cul de four pour désigner un creux circulaire fait Piève : circonscription administrative (en forme de quart de sphère). par l'homme à la surface d'une dalle et religieuse, instaurée avec la ou d'un rocher. domination pisane, qui subdivise un Arc de décharge : il permet diocèse. Sur le plan religieux, elle est l’allégement de la pression imposée Echauguette : ouvrage en surplomb remplacée par la paroisse ; sur le au linteau, en la répartissant sur un contenant une pièce pour le guet. plan administratif, elle l’est par le arc, souvent formé de claveaux, qui canton, en 1790. Par extension, la repousse sur les côtés. Encorbellement : surplomb allongé désigne l’église principale du porté par une suite de supports territoire, qui possède l’exclusivité de Arcature : suite de petites baies libres (corbeaux, consoles, etc.). la fonction baptismale. couvertes d’un arc. Lorsque celles-ci sont adossées à un mur plein, comme Fronton : couronnement d’un édifice Pilastre : membre vertical formé par dans les édifices romans de Corse, ou d’une partie d’édifice consistant une faible saillie rectangulaire d’un on parle « d’arcature aveugle ». en une corniche moulurée triangulaire mur et ayant les caractéristiques d’un ou courbée. support (pilier ou colonne). Il est Archère : meurtrière, ou baie ouverte généralement muni d’une base et d’un dans un mur pour le tir à couvert, Linteau : bloc de pierre, pièce de chapiteau. dont les fentes s’évasent souvent aux bois ou de métal, couvrant une baie extrémités. et recevant la charge des parties Plein-cintre : courbure en demi- situées au-dessus pour la reporter sur cercle. Appareil : type de taille et d’agen- les deux points d’appui. cement de pierres ou de briques dans Taffoni : cavités rocheuses de petites la construction d’un mur ou d’un Mâchicoulis : élément de défense en dimensions formées par l’érosion, élément de mur. encorbellement et présentant une utilisées comme abris au Néolithique, ouverture pour faire tomber des ou plus tard comme sépultures. Bastion : dans les fortifications de projectiles sur les assaillants à la base l’époque moderne, ouvrage bas et du mur. Torra : nom donné à une série de pentagonal faisant avant-corps sur une monuments en pierre de forme enceinte. Modillon : petit support, parfois, circulaire mesurant 10 à 15 m de placé sous une corniche, ou à la diamètre. Casteddu ou castellu : terme géné- retombée d’une arcature, à vocation rique désignant en Corse une décorative. fortification depuis la préhistoire jusqu’au Moyen Âge. Office de Saint-Georges : institution financière à laquelle la République Chaînage d’angle : système d’appa- de Gênes délégua la gestion de la reillage des pierres à l’angle d’un mur Corse de 1453 à 1562. pour éviter sa dislocation.

- 37 - ORIENTATIONS BIBLIOGRAPHIQIES Amalberti (F.) et alii, Porto-Vecchio, tempi fà, Porto-Vecchio, 1992. Bonifay (E.) et alii, Préhistoire de la Corse, CRDP de Corse, 1990. Camps (G.), Préhistoire d’une île : les origines de la Corse, coll. les Hespérides, éd. Errance, p. 199-203, 1988. Cancellieri (J.A), Bonifacio au Moyen Âge, CRDP de Corse, 1997. Cancellieri (J.A), « Bonifacio au Moyen Âge : aspects de la vie économique et sociale, XIIIe-XVe siècles, », Le mémorial des Corses, t.1, p. 346- 375, 1981. Canonici (F.), San Franzé de Bonifacio, éd. JPB, 1999. Canonici (F.), Bonifacio à travers ses rues et ses places, éd. A Stamperia, 2004. Collectif, Corse antique, coord. scientifique par J. Cesari, Éditions du patrimoine, 2010. Colombani (Ph.), « Le siège de Bonifacio par le roi d’Aragon en 1420 », Actes des Xe Journées universitaires d’Histoire maritime de Bonifacio, 9, 10 février 2008, sous la dir. de M. Vergé-Franceschi, p. 12-28., éd. Alain Piazzola, 2009. Gauthier (A.), Des roches, des paysages et des hommes. Géologie de la Corse, éd. Albiana, 2006. Gauthier (A.), Graziani (A.M.), Paccosi (J.F.), Sel et salines de Corse, éd. Alain Piazzola, Ajaccio, 2000. Graziani (A.M.), « Les ouvrages de défense en Corse contre les Turcs (1530-1650) », La guerre de course en Méditerranée (1515-1830) : les journées universitaires de la ville de Bonifacio, sous la dir. de M. Vergé-Franceschi et A.M. Graziani, p.72-158, éd. Alain Piazzola-Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2000. Graziani (A.M), Défendre la Corse, des tours génoises aux fortins Maginot, Archives Départementales de la Corse du Sud, 2002. Marquelet (M. L.), La préhistoire du massif calcaire de Bonifacio, mémoire de Maîtrise, sous la direction de M. C. Weiss, Université de Corse, 2001. Lasure (C.), Répétant (D.), Cabanes en pierre sèche de France, Edisud, 2004. Maestroni (F.), Bonifacio dans l’Histoire du Christianisme, éd. Siciliano réed. 2010. Petti Balbi (G.), « Bonifacio au XIVe siècle », Cahiers n° 89, 1980. Salone (A.M), « Les tours de défense dans le sud de la Corse et autour du golfe de Porto-Vecchio », Cahiers Corsica 138, 139, 140, 1991. Serafino (A.), Morrachini-Mazel (G.), Milleliri (P.), « Les monuments et œuvre d’art de la Corse : Bonifacio », Cahiers Corsica 93-94-95-96, Bastia, 1981. Serpentini (A.L), Bonifacio, une ville génoise aux temps modernes, éd. La Marge, 1995. Tercé (M.), « Mille ans de fortifications bonifaciennes », Stantari n°21, p. 18-26, mai-juillet 2010. Tramoni (P.) et alii, « Vasculacciu : une grande nécropole mégalithique du sud de la Corse », in Études corses n°56, p. 1-28. Juillet 2003. Tramoni (P.), « Le site de Tivulaghju (Porto-Vecchio, Corse-du-Sud) et les coffres mégalithiques du sud de la Corse, nouvelles données », in Bulletin de la Société Préhistorique Française, tome 102, n°2, p. 245-274, avril-juin 2007.

CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES J.-F. Paccosi/CRDP de Corse - P. Tramoni / INRAP, p.4 et 8 - M.-C. Weiss, p. 6 - J. Liégeois, droits réservés, p. 7 - F. Leandri / SRA - DRAC de Corse, couverture (g), p. 9 - M. Harnéquaux, p. 25 - Maynard Owen Williams / National Geographic Magazine, p. 30 - A. Gauthier, couverture (d), p. 31 à 36.

ADRESSES UTILES Archives départementales de la Corse-du-Sud, rue François Pietri, 20090, Ajaccio. CAUE 2A (Conseil d’architecture d’urbanisme et d’environnement de la Corse-du-Sud) 30 cours Napoléon, 20000 Ajaccio. Tél. : 04 95 21 19 48. Chef de projet : Mathieu Harnéquaux Conception réalisation maquette : Évelyne Leca Photographe : Jean-François Paccosi Cartes et illustrations : Jean Delmotte

Imprimé en France © CNDP-CRDP de Corse - 2010 Dépôt légal : octobre 2010 Éditeur nº 86 620 Directeur de la publication : JEAN-FRANÇOIS CUBELLS Nº ISBN : 978 2 86 620 255 2 Achevé d’imprimer sur les presses de l’imprimerie Louis Jean - 05000 - GAP L’EXTRÊME-SUD regroupe les cantons de Bonifacio, Porto-Vecchio et Figari. Les vestiges préhistoriques et antiques de la microrégion en font l’une des premières de l’île à être habitée. Cet intérêt est renouvelé au Moyen Âge, lorsque les Pisans, puis les Génois, fondent l’exceptionnelle cité de Bonifacio. Sans prétendre à un inventaire complet, chacun des circuits qui composent l’ouvrage tente de faire ressortir un aspect particulièrement remarquable de son patrimoine bâti. Celui-ci porte ainsi les marques de l’importance stratégique de l’Extrême- Sud aux yeux des pouvoirs successifs, ou devient témoin de l’influence que la géologie d’un territoire peut avoir sur son architecture.

Réf. : 200 B 9992

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