CONTRIBUTION COURTE

Utilisation de traits fonctionnels pour caractériser l'adaptation de coronaria L. aux conditions agroécologiques du Sahara algérien en culture irriguée

B. Moussaouali, B. Hamdi Aïssa

Le sulla, légumineuse fourragère, présente des traits fonctionnels et agronomiques intéressants en milieu semi-aride où le manque de fourrages est important. Son introduction, en culture irriguée, dans les systèmes de production de zones arides d'Algérie montre ses capacités d'adaptation.

RÉSUMÉ

Les traits fonctionnels du sulla ont été suivis au cours d'un cycle dans deux sites contrastés: un site où il pousse spontanément (El Tart) et un site d'introduction, irrigué, en zone saharienne (Ghardaïa). La biomasse fourragère sèche était supérieure à Ghardaïa mais avec une très forte variabilité. Le rapport feuilles/tiges en poids frais et le nombre d'inflorescences par plante étaient significativement plus élevés en zone saharienne. La surface foliaire spécifique, trait fonctionnel qui prouve le mieux les capacités d'adaptation d'une plante, était très proche dans les 2 sites (14,738 m2/kg à Ghardaïa et 16,709 m2/kg à El Tart).

SUMMARY

Characterising the functional response of Sulla coronaria L. to agroeco/ogical conditions in the Aigerian Sahara

Sulla coronaria, known toceüy as sulla, is a forage legume whose functional and agronomie features could be advantageous in semi-arid habitats, where forage is lacking. We grew sulla at 2 study sites in Algeria to examine its functional responsiveness. More specificaJ/y, we studied the 's functional traits over the course of a crop cycle at a control site (El Tart, where sulla grows naturaJ/y) and at an experimental site (Ghardaïa, where sulla was planted and irrigated). Forage dry mass was higher but dramaticaJ/y more variable at Ghardaïa. The leaf/stem fresh mass ratio and the number of inflorescences per plant were significantly higher at Ghardaïa. However, specifie leaf area (SLA) was very similar for the 2 sites; SLA is a trait that reffects plant functional responsiveness.

a production fourragère en Algérie est limitée par les bétail (ovin, camelin ou caprin) ; pour améliorer cette situa- conditions climatiques: les précipitations irrégulières tion, plusieurs travaux de recherche ont été menés Let insuffisantes rendent cette culture aléatoire et notamment sur le sulla ces dernières années. difficile. La surface fourragère représente environ Sulla coronaria (L.) Medik. (Fabacées), communé- 33 millions d'hectares répartis entre les prairies naturelles, ment appelé sulla, appartient au genre lequel les pacages et les parcours, la jachère et les cultures compte près de 300 espèces (YINMAO et al., 2013). C'est une fourragères, lesquelles ne représentent que 1,6 % du total légumineuse de croissance hivernale, vivace, généralement (NEDJRAOUI, 2003). Les cultures fourragères pratiquées sont bisannuelle, originaire des pays du bassin méditerranéen très peu intensives et faiblement diversifiées. (SULAS et al., 2000). Elle est également connue sous les Les zones arides et hyperarides sont marquées par le noms de sainfoin d'Espagne, sainfoin cultivé ... (FOSTER, grave manque de fourrages destinés à l'alimentation du 2006; ISSOLAH et YAHIAOUI, 2008).

AUTEURS

Université de Ouargla, Faculté des sciences de la nature et de la vie, Laboratoire de biogéochimie des milieux désertiques, Ouargla 30000 (Algérie) ; [email protected]

MOTS CLÉS: Algérie, composition fonctionnelle, facteur climat, fourrage, irrigation, légumineuse, rapport feuille/tige, ressource fourragère, sulla, Sulla coronaria, surface foliaire, zone méditerranéenne, zone semi-aride.

KEY-WORDS : Algeria, climatic factor, forage, forage resource, functional composition, irrigation, legume, mediterranean zone, semi- arid region, specifie leaf area, sulla, Sulla coronaria.

RÉFÉRENCE DE L'ARTICLE: Moussaouali B., Hamdi Aïssa B. (2017) : "Utilisation de traits fonctionnels pour caractériser l'adaptation de Sulla coronaria L. aux conditions agroécologiques du Sahara algérien en culture irriguée», Fourrages, 232, 341-345.

Fourrages (2017) 232, 341-345 www.afpf-asso.org 341 B. Moussaouali et B. Hamdi Aissa

Différentes études ont confirmé que Sulla coronaria Le sol de la parcelle d'étude est squelettique, à domi- est une plante diploïde préférentiellement allogame (nom- nante sableuse; avec des taux de 4%, 16% et 80% bre chromosomique: 2n = 16). Il est auto-compatible et respectivement pour l'argile, le limon et le sable. Le pH auto-fertile (LOUATI-NAMOUCHIet al., 2000), pollinisé princi- (eau) est de l'ordre de 8,27. Le sol est dépourvu de toute palement par l'abeille (Apis mellifera) (MONTERO-CASTANOet sorte de matière organique; la teneur en azote et le rapport VILÀ,2017). A l'état spontané, le sulla est largement distri- CIN sont extrêmement faibles. bué dans le monde (DE KONINGet al., 2010; RANJBAR, La semence de sulla utilisée a été collectée dans la 2010 ; FITOURIet al., 2012) ; il pousse sur des sols argtlo- région d'El Tarf (nord-est algérien) ; un test de germination limoneux bien drainés et même calcaires, et protège les sols a été effectué au laboratoire (80% de réussite). montagneux en pente (BOUAJILAet al., 2013). Cette espèce a été introduite en Nouvelle-Zélande dans les années 1950 Le semis a été réalisé dans la zone d'étude saharienne pour la production fourragère (DE KONINGet al., 2010; le 24 décembre 2012 sur des plaques à alvéoles, puis les ISSOLAHet al., 2012). En Afrique du Nord, la culture du levés sont transplantés en plein champ, en lignes, sulla est assez limitée. Sur le plan de la création variétale, sur une parcelle de 9 m-, avec un écartement interlignes de quelques initiatives ont eu lieu en Tunisie et ont conduit à 45 cm, au stade 2e feuille simple (29 janvier 2013). la création de 'Bikra 21' en 2005 et 'Chatra' en 2009 (BEN Lirrigation a été faite par submersion tous les 2 jours RAYANA,2014; ZOGHLAMIKHELILet ai., 2016). durant les premiers mois, et quotidienne lors des jours Lobjectif du présent travail est d'étudier la possibilité chauds. La quantité totale d'eau apportée durant tout le d'adaptation du sulla dans une zone hyperaride où il n'a cycle est de 700 mm. jamais été observé ni cultivé, en comparant sa culture Parallèlement, un semis a été réalisé dans la zone dans ces conditions avec sa culture menée dans un autre d'origine (El Tarf), à la même période de l'année et avec le site correspondant à son milieu d'origine, pour envisager même itinéraire technique. son utilisation comme fourrage vert pour le cheptel local de Dans les deux sites, un ensemble de paramètres fonc- la région d'étude. tionnels (traits fonctionnels) a été relevé pour évaluer l'adaptation du sulla en zone saharienne: ,hauteur de la 1. Matériel et méthodes végétation; biomasse fourragère sèche (kg MS/ha) ; rapport feuilles sur tiges (en matière fraîche) ; surface foliaire spé- Le site expérimental de cette étude est situé dans la cifique (SLA: Specifie Leaj Area) ; teneur en matière sèche région du M'Zab appartenant à la wilaya de Ghardaïa foliaire (LDMC: Leaj Dry Matter Content) ; nombre d'inflo- (600 km au sud de la capitale Alger (Algérie),figure 1). dans rescences total par plante; nombre de fleurs par un étage bioclimatique hyperaride (saharien). La période inflorescence. sèche couvre toute l'année: les précipitations moyennes La hauteur de la plante a été suivie le long du cycle à annuelles sont de l'ordre de 50 mm (entre 13 et 68 mm) partir du 26 février 2013, à raison d'une mesure tous les généralement réparties sur une période moyenne de 15jours 10jours. Pour les autres paramètres, les mesures ont été par an. Les températures moyennes annuelles sont très éle- effectuées au stade pleine floraison, après arrachage des vées; les maximas peuvent atteindre 50°C et les minimas plants (le 5 mai 2013 pour le site de Ghardaïa et le 10juin sont de 2 à 3°C (en décembre et/ou janvier), provoquant de 2013 pour le site d'El Tarf). La biomasse fourragère sèche fortes amplitudes thermiques journalières et annuelles. a été déterminée après séchage des plantes à l'étuve (à 70°C pendant 48 h) et pesage à l'aide d'une balance de précision. Le rapport feuilles sur tiges est calculé en divisant le poids frais des feuilles par celui des tiges. La surface foliaire spécifique est un indicateur du taux de croissance relative et de la disponibilité des nutriments (GONDARDet al., 2003) : cinq feuilles complètes et saines sont choisies au hasard, numérotées et photographiées par un appareil photo numérique pour calculer la surface de chaque feuille séparément à l'aide du logiciel ImageJ. Ces feuilles sont ensuite mises dans des sachets en papier pour le séchage à l'étuve et obtention de leur poids sec. Le calcul de la SLA (m2!kg MS) utilise la formule suivante (FORT, 2010; PÉREz-HARGUINDEGUYet al., 2013) : .--K Ghardaïa SLA = Surface de la feuille / Masse sèche de cette feuille

250km ALGERIE La teneur en matière sèche foliaire (mg MS/g) est un trait reflétant il la capacité de stockage en matière orga- nique au sein de la feuille et ii) généralement la durée de vie FIGURE 1 : Localisation des deux lieux d'essais (El Tart des feuilles (CHALMANDRIER,2008). Les 5 feuilles utilisées et Ghardaïa). précédemment pour la SLA (et leurs masses fraîche et FIGURE 1: Study site locations (El Tart and Ghardaïa). sèche) ont été utilisées (CORNELISSENet al., 2003) pour

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déterminer la LDMC (mglg) selon la formule suivante (moyenne de 2446,6 kg Mô/ha), La valeur moyenne enre- (HODGSONet al., 2011 ; PÉREZ-HARGUINDEGUYet al., 2013) : gistrée à Ghardaïa est plus élevée que celle d'El Tarf (figure 2) mais l'analyse de la variance n'a révélé aucune dif- LDMC= Masse sèche de la feuille/ Masse fraîche de la feuille férence significative entre les deux sites. Il faut noter que, Toutes les données obtenues ont subi des analyses vu la taille réduite de l'essai et l'absence de répétition, il est statistiques appropriées par le logiciel MINITAB (ver- difficile d'évaluer une production à l'hectare; les chiffres sion 16). Le test de Tukey au seuil de 5% est utilisé pour mentionnés ci-dessus sont donc indicatifs et à considérer comparer les moyennes des variables étudiées afin de de façon relative. La droite de Henry (figure 2) confirme que déterminer les groupes homogènes. les valeurs résiduelles sont réparties normalement dans les deux sites (elles suivent une loi normale). 2. Résultats et discussion Selon quelques auteurs, la production en biomasse sèche de sulla est influencée par les conditions environne- mentales, l'année du cycle (1re ou 2e année). le mode de • Hauteur de la végétation conduite et la variété utilisée (BORREANIet al., 2000 ; SULAS et al., 2000). A l'arrachage des plants, la hauteur finale varie, pour SULASet al. (1999) ont trouvé des valeurs moyennes la culture de Ghardaïa, de 17,9 cm à 125,8 cm avec une moyenne de 75 cm. Concernant l'essai d'El Tarf, la hauteur de 840 et 2970 kg MS/ha pour les deux variétés utilisées (Sparacla et Grimaldi). Ces valeurs sont proches de nos finale varie de 51 cm à 114 cm (moyenne de 88,39 cm). La résultats. Selon les auteurs, cette variabilité revient essen- différence entre les moyennes des deux essais est de tiellement à la précocité et à l'origine des variétés utilisées. 14,34 %, ce qui est très faible. Le coefficient de corrélation entre la biomasse sèche et A Ghardaïa, nous avons remarqué que tous les plants la hauteur de la plante est de 0,677 : lorsque la hauteur de prennent une forme architecturale dite plagiotrope. Ce la plante augmente, la biomasse sèche augmente également. phénomène a une explication fonctionnelle: c'est une forme d'adaptation aux conditions climatiques extrêmes du nou- veau milieu; la plante a adopté une forme rampante pour • Rapport feuilles sur tiges bénéficier de l'humidité et des températures fraîches à la Les valeurs du rapport feuilles/tiges sont nettement surface du sol (un peu plus haut, les températures com- plus importantes pour l'essai de Ghardaïa (1,28 en mencent à augmenter). BEN JEDDI (2005) a signalé la moyenne) que pour l'essai d'El Tarf (0,814) ; le premier présence d'une population qui n'a pas dépassé les 32 cm à rapport représente 1,6 fois le deuxième. Un rapport supé- Tunis (climat semi-aride). ISSOLAHet YAHIAOUI(2008) ont rieur à 1 signifie que les plantes ont investi plus pour la obtenu des hauteurs moyennes des 20 populations algé- production de feuillage, ce qui est recherché pour un four- riennes d'origines différentes cultivées à Alger (climat rage destiné à l'alimentation en vert et assure un fourrage subhumide) qui varient de 12,5 à 47,75 cm. de qualité. Ce rapport est d'autant plus important qu'il intervient sur la dtgestibtlité du fourrage, laquelle dépend • Biomasse fourragère sèche toujours de la masse foliaire (BENJEDDI,2005). AImEL- GUERFI(2002) a enregistré des rapports feuilles/tiges, mais La production de biomasse sèche du sulla des deux en poids sec, de 17 populations étudiées du sulla variant de sites (Ghardaïa et El Tarf) a montré une variabilité impor- 0,44 à 1,32. Par ailleurs, il faut noter que le rapport tante entre les plants (figure 2). Les valeurs varient à feuilles/tiges de l'essai de Ghardaïa est très fluctuant, Ghardaïa de 154,8 à 6718,2 kg MS/ha (moyenne de 3392,2 kg MS/ha) et à El Tarf, de 941,7 à 5104,9 kg MS/ha Poids des feuilles (g, matière fraîche)

250 . Biomasse sèche (kg/ha) "

7000 200 • 6000 •• 150 y' •• 5000 • •• • • 4000 100 " • • • Droite d'ajustement : 3000 • ." • 50 • Poids des feuilles = 40.73 + 0.724 Poids des tiges 2000 • \ S : 40,7987 ; R2 = 59.2% ; R2 (ajusté) = 58.1 % 1000 o • OL------__----~ o 50 100 150 200 250 300 Essai de Ghardaïa Essai d'EI- Tarf Poids des tiges (g de matière fraîche)

FIGURE 2 : Boites à moustaches de la biomasse sèche FIGURE 3 : Relation entre le poids des feuilles et le du sulla dans les 2 essais. poids des tiges de sulla à Ghardaïa.

FIGURE 2 : Box-and-whisker plots of sulla dry mass at FIGURE 3: Relationship between the fresh mass of the 2 study sites. sulla leaves and stems at Ghardaïa.

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puisqu'il varie de 0,589 à 3,855 ; alors que celui de la cohérent avec la stratégie écologique (effet d'adaptation au zone d'origine ne varie que de 0,513 à 1,283. Lanalyse de changement du milieu) que reflète ce trait foliaire qui est, la variance entre les deux sites a révélé une différence comme le SLA, en lien avec l'acquisition et le stockage des significative pour ce paramètre (p = 0,032). nutriments. Létude de corrélation qui concerne l'essai de Ghardaïa Létude de corrélation entre SLAet LDMCpour le sulla montre que le poids des feuilles et le poids des tiges sont de Ghardaïa (figure 4) indique une relation décroissante corrélés positivement (r = 0,770 ; P = 0,000 ; figure 3). entre ces deux traits et non significative (p = 0,064) avec un coefficient de corrélation négatif (r = -0,157). Selon PÉREZ- HARGUINDEGUYet al. (2013), Les plantes à fort SLA • Surface foliaire spécifique possèdent un faible LDMCet inversement. La SLAreprésente la surface d'interception lumineuse Par ailleurs, on constate figure 4 que la plupart des par unité de masse sèche foliaire. En zone saharienne, à points sont concentrés dans le champ ISLAfaible - LDMC Ghardaïa, la SLA a varié signtftcattvement (p < 0,05) de faible] ; à Ghardaïa, les plantes ont donc une croissance 8,614 m2!kg MS à 28,52 m2!kg MS (moyenne de ralentie produisant de petites feuilles accumulant des nutri- 14,738 m2!kg MS). Alors que pour la zone d'El Tarf, elle a ments avec une faible longévité, selon les interprétations de varié de 9,621 à 24,929 m2!kg (moyenne de 16,709 m2!kg). CHALMANDR(2008)IER . Lanalyse de la variance a révélé une différence significative entre les 2 sites (p = 0,033 < 0,05) confirmant l'effet du • Nombre d'inflorescences totales milieu entre les 2 essais. par plante Les SLA enregistrées à El Tarf sont élevées par rap- port à celles enregistrées à Ghardaïa. Une grande partie de En zone hyperaride, le nombre moyen d'inflores- la variation pourrait être expliquée par la variation de la 'cences par plante est de 288,6, alors qu'en zone d'origine, teneur en eau des feuilles. Ce paramètre nous informe sur il est de 66,9 soit une augmentation très hautement signi- la stratégie écologique de ces plantes (HODGSONet al., ficative (p < 0,001) de 331,4%. 20 Il) ; le sulla aurait donc adopté un fonctionnement ABDELGUERFI(2002) a enregistré un nombre moyen adaptatif dans la nouvelle zone (site de Ghardaïa). d'inflorescences totales de 232,2 lors d'une étude effectuée sur 17 populations algériennes, une valeur proche de celles • Teneur en matière sèche foliaire obtenues à Ghardaïa. Selon BULLITTAet al. (2000), la varia- tion de ce paramètre s'explique essentiellement par le Lanalyse de la variance de la teneur de la feuille en régime d'irrigation (débit et fréquence) et par quelques per- matière sèche (LDMC)entre les deux sites a révélé une dif- turbations (température et humidité). férence significative pour ce paramètre (p = 0,046). La Du point de vue fonctionnel, la production d'un nom- teneur de la feuille en matière sèche a varié significati- bre important d'inflorescences par une espèce donnée dans vement (p < 0,05) entre 172,86 mg/g à Ghardaïa et une zone d'introduction peut s'expliquer: la plante dépense 182,24 mg/g à El Tarf. Les valeurs fortes de LDMC signi- son énergie à la production de la semence qui assurera sa fient que les feuilles accumulent des nutriments et continuité les années suivantes. constituent d'important pools de stockage pour une durée de vie élevée, car une teneur en matière sèche élevée • Nombre de fleurs par inflorescence confère une meilleure résistance mécanique aux dégra- dations par la sécheresse (CHALMANDRI200ER,8). Cela est C'est un trait de régénération qui, comme le précé- dent, garantit la continuité de l'espèce dans l'espace et dans

LDMe(g/mg) le temps. Dans le site de Ghardaïa, le nombre de fleurs par 280,------, inflorescence varie de 16,4 à 49,2 alors qu'il varie de 34,6 .. à 84,0 à El Tarf. Uécart est significatif entre les deux 240 • •.• essais (une différence de 54%; p < 0,001). Nous supposons ,.•• .• que les températures excessives et continues des dernières 200 - semaines à Ghardaïa ont eu une influence négative, les . ·-",1:.,~...• . • Droite d'a'ustement : LDMe= 185,0- 0,8938SLA plantes réagissant fonctionnellement à cet état en réduisant 160 ~.".: • ~..\> • ce nombre pour accomplir leurs cycles. ••~ T.•• 120 . •..1 . Conclusion o 10 20 30 40 50 60 SLA(m2/kg) Globalement, la présente étude vise à valoriser les FIGURE 4 : Relation entre surface foliaire (SLA) et légumineuses locales en vue de fournir des solutions au teneur en matière sèche des feuilles de sulla (LDMC) à Ghardaïa. déficit fourrager chronique des zones du sud algérien. Les résultats préliminaires obtenus indiquent que Sulla coro- FIGURE 4: Relationship between sulla specifie leaf area (SLA) and leaf dry matter content (LDMC). naria (L.) Medik. présente une large aptitude adaptative dans ces environnements défavorables, à condition qu'il

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soit irrigué. Les biomasses végétales sèches ont varié d'une FOSTERK. (2006) : "Sulla (Hedysarum coronarium L.}». Bulletin, 4690, façon non significative entre les deux régions d'étude (Ghar- Department of Agriculture and Food Western Australia, Perth. daïa et El Tarf). Les traits fonctionnels examinés dans cette GONDARD H., JAUFFRETS., ARONSONJ., LAVORELS. (2003) : "Plant étude (SLA et LDMC) ont prouvé l'adaptabilité du sulla functional types: a promising tool for management and dans ces conditions difficiles et extrêmes et sa plasticité restoration of degraded lands», Applied Vegetation Sei., 6, 223- dans une large gamme de conditions pédoclimatiques (alti- 234. tude, sécheresse, type du so1...). HODGSONJ.G., MONTSERRAT-MARTiG., CHARLESM., JONESG., WILSONP.,

Les premiers résultats obtenus encouragent à la mise SHIPLEYB. ET AL. (2011): «ls leaf dry matter content a better en culture et à la valorisation du sulla dans ces zones predictor of soil fertility than specifie leaf area?», Annals of hyperarides. Nous estimons qu'il est possible de le cultiver Botany, 108, 1337-1345. avec irrigation à l'une des 3 périodes de l'année (en ISSOLAHR, YAHIAOUIS. (2008) : «Phenological variation within several automne, en hiver ou au printemps), pour compléter le Algerian populations of Sulla (Hedysarum coronarium L., calendrier fourrager et la diversité des espèces fourragères )», Options Méditerranéennes. Série A, Séminaires utilisées dans la région. Méditerranéens, n079, CIHEAM/FAO/ENMP/SPPF, 385-388. Accepté pour publication. le 27 novembre 2017 ISSOLAHR., TAHARA, DERBALN., ZIDOUNF., AIT MEZIANEM-Z., OUSSADIA. ET AL. (2012) : "Caractérisation écologique de l'habitat naturel du Sulla (Fabaceae) dans le nord-est de l'Algérie», Rev. Écol. (Terre Vie), 67, 295-304.

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