Quaternaire, 23, (4), 2012, p. 339-353

RÉINTERPRÉTATION DES FORMATIONS SUPERFICIELLES PLÉISTOCÈNES DU BASSIN D’ (HAUTES TERRES CENTRALES DE )

n

Reine RAZAFIMAHEFA RASOANIMANANA1, Gérard NICOUD2, Michel MIETTON3 & André PAILLET2

RÉSUMÉ

Sur les hautes terres malgaches, le bassin d’Antsirabe, d’origine tectonique, présente un socle cristallin faillé, bordé à l’ouest par des édifices volcaniques récents (). Le bassin sédimentaire présente deux surfaces planes, étagées et légèrement inclinées vers le sud, qui ont été considérées jusqu’alors comme témoignant chacune d’un remplissage lacustre. Les séries strati- graphiques reconnues présentent, sur le socle ou ses altérites, deux corps sédimentaires remarquables. A la base, sur une dizaine de mètres d’épaisseur, une série fluvio-palustre de plaine d’inondation, où sables, limons et graviers alternent avec des niveaux tourbeux décimétriques, au nombre maximum reconnu de sept sur une même verticale. Au-dessus, une couverture de cinérites, fine au sud-est et plus grossière au nord-ouest, atteint généralement vingt mètres d’épaisseur. Les datations 14C obtenues placent les alluvions fluvio- palustres entre 35 000 BP et 14 400 BP. La série volcanique explosive majeure est donc plus récente que 14 400 BP. Elle aurait duré 6 000 ans. La vitesse moyenne de dissection de ces matériaux tendres peut être relativement bien cernée. Le comblement du bassin d’Antsirabe n’est donc pas d’origine lacustre, de tels sédiments n’ayant été reconnus que ponctuellement à la base de la série, le long de la faille du Mandray. Le remplissage du bassin d’Antsirabe constitue de ce fait une archive sédimentaire remarquable correspondant aux stades isotopiques 2 et 3 d’une plus grande fiabilité que les sédiments de lacs de cratère proches.

Mots-clés : plaine alluviale, tourbe, pyroclastites, stades isotopiques 2 et 3, bassin tectonique, Antsirabe, Madagascar

ABSTRACT

REINTERPRETATION OF SUPERFICIAL PLEISTOCENE FORMATIONS OF ANTSIRABE BASIN, CENTRAL HIGHLANDS OF MADAGASCAR The Antsirabe basin in the Central Highlands of Madagascar is of tectonic origin and consists of a faulted basement bounded on the west by recent volcanic edifices (Vakinankaratra). The sedimentary basin presents two stepped planar surfaces that dip slightly to the south. Until recently, both surfaces were thought to have been formed by the upper depositional surface of two different levels of lacustrine sediments. Stratigraphic series in the basin show two distinctive sedimentary units overlying the basement bedrock or its regolith cover. The lower unit consists of a 10 m-thick, fluvio-palustrine floodplain series in which sands, silts and gravels alternate with ~ 0.1 m-thick peat horizons. Seven peat horizons have been recognized in a single vertical section. This lower unit is overlain by a series of vitreous tephra, finer in the southeast and coarser to the northwest that generally reaches a thickness of about 20 meters. 14C dates show that the fluvio-palustrine alluvial sediments were deposited between 35,000 BP and 14,400 BP, thereby indicating that these tephra are more recent than 14,400 BP. The volcanic episode that produced these tephra lasted approximately 6,000 years. Relatively accurate estimates can be made of the mean dissection speed of these soft deposits. These findings indicate that the Antsirabe basin was not filled by lacustrine deposits, because such sediments vha e been found only intermittently at the base of the series, along the Mandray fault. Consequently, the Antsirabe basin deposits form a remarkable sedimentary archive, corresponding to isotope stages 2 and 3, much more reliable than the archive provided by sediments in nearby crater lakes.

Keywords: alluvial plain, peat, pyroclastic deposits, isotope stages 2 and 3, tectonic basin, Antsirabe, Madagascar

FINTINA

Eto afovoan-tanin’i Madagasikara, ny lemak’Antsirabe dia mampiseho rafibatomazava (socle cristallin) voahary avy amin’ny haifiharivohontany (tectonique), voafaritr’ireo volkano avy ao andrefana nipoaka vao haingana tao Vakinankaratra. Ahitana velarana mari-tantana roa, miantanantohatra sady mihilana kely mianantsimo izay noheverina hatramin’izay fa vavolombelon’ny fanotofana atsanga ny farihy iray. Vainga roa an’atsanga miavaka no asehon’ireo andiana haisoson-nofontany (stratigraphie) hita tao amin’io lemaka io. Aty amin’ny farany ambany, eo amin’ny ampolo metatra eo ny hatevina dia ahitana andian’atsanga entin-drenirano mandeha izay ahitana fasika, tany dilatra, ary vatokely mifanelanelana amin’ny fompotra (tourbe), mirefy amin’ny desimetatra, izay

1 Université d’, Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Département de Géographie, Domaine universitaire d’Ankatso, BP 907, Antananarivo, MADAGASCAR. Courriel : [email protected] 2 Université de Savoie, EDYTEM CNRS, UMR 5204, F-73376 LE BOURGET DU LAC. Courriels : [email protected], [email protected] 3 Université de Lyon 3 Jean Moulin, UMR 5600 EVS – CRGA, 18 rue Chevreul, F-69362 LYON cedex 7. Courriel : [email protected]

Manuscrit reçu le 21/03/2012, accepté le 03/10/2012

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miisa eo amin’ny fito farafahabetsany eo amin’ny mijidina iray. Eo ambonin’ireo no ahitana vongan-davenona volkano, mandrakotra manify ao atsimo fa mihavaventy kosa ao avaratra andrefana ary mahatratra roapolo metatra amin’ny ankapobeny ny hateviny. Niforona teo anelanelan’ny 35 000 BP sy 14 400 (dimy arivo sy telo alina taona BP sy efajato sy efatra arivo sy iray alina taona BP) ireo atsangan-drenirano sy honahona araka ny famerana marikandro 14C. Nipoaka tao aorian’ ny 14 400 BP izany ireo andiana volkano ary naharitra teo amin’ny 6 000 taona izany fipoahana izany. Azo atao ny mamaritra ny hafainganana ankapobeny ny fisamatsamahan’ireo akora malemy ireo. Tsy avy amin’ny atsanga nanototra farihy izany ny fanotofana ny lemak’Antsirabe satria io karazan’atsanga io dia tsy hita raha tsy tamin’ny toerana iray, eo ambanin’ireo andiany ireo ary manaraka ny vakitongoan’i Mandray (faille). Azo antoka fa tahirin’atsanga manana ny maha izy azy ary mifanandrify amin’ny vanim-potoana amin’ny miratoerana 2 sy 3 (stades isotopiques 2 et3) ary azo itokiana kokoa noho ireo atsanga ao amin’ireo farihim-bava’ny volkano (lac de cratère) manakaiky azy.

Teny iditra : lemaka, fompotra, vanimpotoana amin’ny miratoerana 2 sy 3, lemaka avy amin’ny haifiharivohontany (bassin tecto- nique), Antsirabe, Madagasikara

1 - PROBLÉMATIQUE surfaces principales a fait que Lenoble (Lenoble, 1938 ; Lenoble et al., 1949) a attribué un âge différent à deux Reprenant et développant les principaux résultats de niveaux de dépôts « lacustres » (lacustre ancien, lacustre Razafimahefa (2010), le présent article a pour objectif de récent), sans mention des barrages et exutoires. Depuis mettre en lumière l’influence du remplissage détritique une vingtaine d’années, des études globales paléo- sur la géomorphologie du bassin d’Antsirabe, au sein des environnementales ont été conduites sur des sédiments Hautes Terres Centrales de Madagascar (fig. 1a et 1b). carottés dans des lacs de cratère proches. Le lac Tritri- Jusqu’à ce jour et sans étude spécifique des successions vakely, à l’ouest immédiat du bassin d’Antsirabe, sert stratigraphiques, le bassin d’Antsirabe a toujours été ainsi de référence pour cette vaste région, notamment à qualifié de « lacustre » à partir de constats simples, rela- partir des travaux de Burney (1987), Gasse et al. (1994), tifs à la planéité des surfaces topographiques, à la texture Gasse & Van Campo (1998 ; 2001). Des études palyno- fine des sédiments et à leur disposition en minces couches logiques, des datations 14C et des mises en relation avec subhorizontales. Sur ces hautes terres malgaches, le d’autres carottages méridionaux, marins et glaciaires, ont vieux socle cristallin fortement métamorphisé et fracturé fixé un premier cadre chrono-climatique régional s’éten- a été affecté par une tectonique d’extension plio-quater- dant sur 150 000 ans, plus particulièrement détaillé sur naire, qui a favorisé une importante activité volcanique les 40 000 dernières années Dans la présente étude, ce et la création de fossés tectoniques orientés NNE-SSO sont les sédiments de comblement des fossés tectoniques suivant des paléo-failles majeures. Ce sont ces grabens autour d’Antsirabe qui ont été examinés et tout particu- qui contiennent les sédiments détritiques meubles lièrement les niveaux de tourbe superposés, plus facile- disposés en grandes surfaces planes et incisées, parfois ment datables. Il est aujourd’hui possible de reconstituer sur plusieurs dizaines de mètres, par la et et de préciser l’évolution paléo-dynamique du bassin ses affluents. Une différenciation altitudinale entre deux d’Antsirabe.

47°00'E vers Antananarivo Cône vvolcaniqueolcanique A a A b T R T R R A Localitéé pr principaleincipale R A K A K A A N Cours dd’eau A N Bassin-vversantt a Antananarivo Sous bassin-bassin-vversant n S Seuil N Ivohibe o Antsirabe Ivohibe 2035 m 0 5 km d a n 1700 m A a

A

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T ona A a R s A A t mp Amberobe R K M A Tritrivakelyritrivakely N a . eta K 1628 m A o a y h v a n Ambano i f N C N n o Tritrivakely r ona I a a p A Tsarafara K o a o 1620 m Lac m d 1850 m n m A b S mp N o a n a V Andranobe t t I Mahabatry m r a . i Lac o e K l o F n 1863 m a B Andranobe C a A Ambohitsoa Amboniloha h m e BetafoBetafo r V 19°50'S a A M è S . i Aérodrome ement de B . Antsirabe e v R r Antsifotra Amboniloha R i

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ANTSIRABE ay a o o o

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1573 m Andraikiba n

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1740 m o h a Andraikiba a

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L L L L

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Ivohitra LLacac TTritrivritiva S . . . . FarF orokoka(S) Mandray . 1649 m m R R o Lac TTritrivritiva l a Mahatady N h ement du Ma a Tritriva 1430 m S rp NanondrNanondranana (S)

a . Vinaninkarena C Cône volcanique Esc Point coté Cônes volcaniques Vohibe LacLocalité principale LAocalitutre localité principaleé vers 0 5 km Fig. 1 : Localisation de la zone étudiée (a) et du réseau hydrographique dans le bassin d’Antsirabe (b). Fig. 1: Study area in Madagascar (a) and drainage pattern in Antsirabe basin (b).

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2 - CONTEXTES GÉOGRAPHIQUE La mise en place du fossé d’effondrement d’Antsi- ET GÉOLOGIQUE rabe est incontestablement liée à la tectonique, ancienne et récente. La première phase majeure est attribuée à Le bassin d’Antsirabe offre des paysages contrastés la période mio-pliocène avec la création des bassins de entre de remarquables escarpements de faille, rectilignes Sambaina et d’Antanifotsy au nord de la région étudiée, et à fort commandement, et des zones planes, toutefois accompagnant l’édification du complexe volcanique de fréquemment disséquées par les cours d’eau : l’Ankaratra. Ces deux bassins sont caractérisés par d’épais – au nord et à l’ouest, les hauts bassins versants s’ap- remplissages limono-sableux et argileux à lignite, d’âge puient sur les massifs volcaniques de l’Ankaratra et du mio-pliocène. Il faut souligner qu’une telle succession, Vakinankaratra, culminant à plus de 2 300 m d’altitude masquée par une couverture de cendres, a été relevée (Battistini, 1964). Des cônes volcaniques de type strom- dans les données d’un sondage (minoterie d’Andranoma- bolien, comme l’Ivohitra, dominent la partie ouest du nelatra) au centre-nord du bassin d’Antsirabe. De même, bassin d’une centaine de mètres ; à Andraina, des silts et argiles laminés analogues ont été – à l’est, la limite est déterminée par le grand escarpe- retrouvés, encore accrochés sur le flanc ouest de l’échine ment de faille rectiligne de Betampona affectant le socle cristalline de Mahabatry, à plusieurs dizaines de mètres au-dessus du lit de la rivière Sahalombo (fig. 3). Ces sédi- cristallin ; ments reliques, probablement pliocènes dans le bassin – au centre, l’escarpement du Mandray, parallèle au d’Antsirabe, témoignent du fait que celui-ci a été affecté précédent, s’étend sur une vingtaine de kilomètres. par la tectonique mio-pliocène. A cette dernière peuvent Les reliefs plans du bassin d’Antsirabe sont spec- se rattacher des coulées basaltiques le long de l’escarpe- taculaires dans le paysage avec « leur horizontalité ment de Betampona, à l’est d’Antsirabe (16,9 ± 0,4 Ma, presque parfaite de Vinaninkarena au sud à Sambaina au B7249-2) et à Vinaninkarena au sud-ouest (3,7 à 3,9 Ma). nord » selon une surface d’accumulation de sédiments C’est durant le Pléistocène supérieur que se produisent « lacustres » (Lenoble et al., 1949), une surface d’apla- les affaissements longitudinaux subméridiens de Betam- nissement selon Mottet (1980). pona et du Mandray qui ont entraîné la formation des Le bassin d’Antsirabe est ici considéré comme le semi-grabens de la Manandona et de la Sahatsio et, bassin hydrologique de la rivière Manandona, à écoule- à un degré moindre, de la Sahalombo avec la faille de ment méridien, dont l’exutoire est fixé à la confluence Mahabatry. Cette tectonique se poursuit, au moins à avec la rivière Sahalombo, près de la localité de Vohibe, à l’est, comme en témoignent les indices relevés dans les 1 350 m d’altitude (fig. 1b). Ce bassin a une superficiede cendres le long de l’escarpement de Betampona (Ambe- 991 km2, dont 155 km2 pour le sous-bassin de la Sahatsio robe) et avec la subsidence à l’aval de ce compartiment au centre et 233 km2 pour celui de la Sahalombo à l’ouest. de la Manandona. Le profil longitudinal des cours d’eau est caractérisé par Entre ces deux phases tectoniques majeures, l’altéra- des ruptures de pente marquées sur des seuils rocheux : tion et la pénéplanation des Hautes Terres d’Antsirabe se celui de Faroroka-Mahitady, qui ferme le haut bassin de sont poursuivies, induisant une épaisseur plurimétrique la Manandona, et celui de Nanondranana au sud de Vina- d’altérites sur le socle cristallin mais aussi sur des coulées ninkarena. Ces sous-bassins ont une forme très allongée de basaltes miocènes. Aucune trace (terrasse, alluvions en relation avec la structure géologique. sablo-graveleuses, chenal) d’un réseau hydrographique Le socle cristallin malgache étudié entre autres par significatif anté-pléistocène supérieur n’a été relevée. Besairie (1971), Petit (1998), Collins et al. (2003) et Les formations superficielles sont, jusqu’à ce jour, Collins (2006) comprendrait cinq ensembles tectoniques considérées comme « lacustres » (Bertrand & Joleau, dont le bloc d’Antananarivo dans lequel s’inscrit le 1924 ; Lenoble, 1938 ; Lenoble et al., 1949 ; Battistini, bassin d’Antsirabe. A la fin de l’ère tertiaire (Pliocène 1964) au vu de la morphologie plane, de dépôts de particulièrement), une tectonique d’extension a accéléré pyroclastites stratifiés horizontalement et de niveaux de l’activité volcanique, édifiant les imposants massifs de tourbes considérés comme lacustres (fig. 2). Le modèle l’Ankaratra et du Vakinankaratra. Celle-ci s’est pour- de Lenoble et al. (1949), repris par Besairie (1971) puis suivie durant le Quaternaire jusqu’à l’Holocène. Elle s’est encore récemment par la dernière carte géologique Antsi- accompagnée de la formation de fossés d’effondrement, rabe-Antanifotsy (Ministère de la Géologie et des Mines, en semi-grabens, orientés nord-sud, effondrés à l’est le 2005), propose deux ensembles lacustres : le premier, long de failles majeures (Betampona, Mandray) (fig. 2). « lacustre moyen N », le plus élevé en altitude se situe Chacun des compartiments est drainé par une rivière, dans le compartiment de la Manandona à l’est (1600- la Manandona à l’est, la Sahatsio au centre, avec son 1570 m) et plus localement à l’extrémité septentrionale affluent de rive gauche l’Amoronarivo, et la Sahalombo du compartiment de la Sahatsio ; le second, « lacustre à l’ouest (fig. 1b). Une fracturation transverse, conjuguée supérieur P », en contrebas, est contenu dans le compar- à la méridienne, d’orientation NNO-SSE circonscrit les timent d’Antsirabe (1550-1450 m). L’interprétation ne fossés et ferme les bassins versants vers le sud par les fait aucune référence à des barrages lacustres successifs, seuils précités de Faroroka-Mahitady au sud de l’escar- ni à l’organisation sédimentaire des dépôts. Depuis lors, pement du Mandray pour le compartiment oriental, et de aucun chercheur n’a remis en cause ce schéma. Avant les Nanondranana pour la Sahatsio et la Sahalombo. travaux d’A. Lenoble, seul Perrier de la Bathie (1926),

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Sambaina

R A T R A K A N A

N2

710

Ivohibe

Tritrivakely

N2 A R T N2 A Ambano R Amberobe A 700 K N A Andraina I N Faille de Betampona K R. Sahalombo P V A P Amboniloha R. Sahatsio N 2 R. Manandona

Antsirabe Andraikiba Ivohitra

690

R. Fitamafy Fitamafy R. R.

P Faille de Mandray

Faroroka

N Vinaninkarena Mahitady Nanondranana 680 0 10 km vers Vohibe

W E Antanety BETEMPONA 1800 m Amboniloha MANDRAY Fitamaty riv. 1700 Sahalombo riv. Sahatsio riv. Manandona riv. 1600 Antsirabe 2 1500 P N 1400

Alluvions récentes Volcanisme indi érencié Faille Tracé de la coupe Lacustre supérieur (P) Socle selon Lenoble et al. (1949)

Lacustre moyen (N2) Principaux sommets ou cônes volcaniques

Fig. 2 : Les données géologiques antérieures : coupe d’après Lenoble et al. (1949), modifiée d’après la carte de Besairie (1963). Fig. 2: Former geological data: cross-section based on Lenoble et al. (1949), modified after the map of Besairie (1963).

dans une note critique relative aux écrits de Bertrand tête de bassins versants, sédiments lacustres caractéris- & Joleau (1924), avait décrit les sédiments de la région tiques et d’extension limitée, alluvions fluviatiles, hori- d’Antsirabe comme étant essentiellement des matériaux zons tourbeux palustres et une puissante série de cendres de projection des grands volcans trachytiques de l’Anka- volcaniques. ratra déposés dans des marécages ; ces dépôts ne pouvant pour lui être lacustres. Il décrit principalement les coulées boueuses intégrant cendres, brèches trachytiques, ponces 3 - MÉTHODES rhyolitiques comblant les hautes vallées de la Sahatsio et de la Sahalombo. Pour Mottet (1980), les sédiments sont Un travail de terrain important a été réalisé pendant définis comme « volcano-fluvio-lacustres ». plusieurs années, privilégiant la reconnaissance, dans les Le travail présenté ici met en évidence plusieurs forma- vallées et les ravins, d’affleurements et de coupes erti-v tions sédimentaires bien identifiées : coulées de lahars en cales non affectées par du colluvionnement ou diverses

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Sambaina

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710

7 Ivohibe

Toavala

Tritrivakely R. Sahalombo Sahalombo R. R. 5 9

A

R. Sahatsio R. Sahatsio R. Sahatsio R. Sahatsio R T Antsiaronjy A Andranomanelatra R Ambano 6 ASahalombo-Pont Amberobe K Ambohimiary 700 N A Mahabatry Tsarafora I N Ambohitsoa Andraina Faille de Betampona K x A 9 V Antsirabe Nord 4 1 Amboniloha Antoka R. Amoronariva 8 Antsirabe Est 8 Lohasarivo R. Manandona Andraikiba Antsirabe Ivohitra Antanifotsy Moratsiazo

Antsirabe Sud 690 R. Fitamafy R. 7 Fitamafy R.

Faille de Mandray 5 Faroroka 3 2 Vinaninkarena Amparihimborona N Mahitady NanondrananaNanondranana 680 0 10 km vers Vohibe

Alluvions récentes Pliocène Faille

Cendres volcaniques Volcanisme indiérencié Rivière Paléolac de Mandray Cristallin Localité alt. 1485 m Limite septentrionale d’extension des alluvions uviatiles et palustres x Aérodrome

1, 2, etc. Numéro des coupes Localisation des coupes naturelles étudiées Faroroka Seuil rocheux Localisation des forages étudiés

Fig. 3 : Les formations superficielles pléistocènes du bassin d’Antsirabe. Localisation des coupes et forages étudiés. Fig. 3: The superficial Pleistocene formations of the Antsirabe basin. Location of studied sections and cores.

instabilités. L’ensemble du bassin a été parcouru pour Sahatsio (Antsirabe-nord et Vinaninkarena). Parallè- dresser une cartographie précise des grands corps sédi- lement à une analyse classique des publications anté- mentaires reconnus. Des coupes de référence ont été rieures, une recherche documentaire plus délicate mais dressées dans l’ensemble des trois sous-bassins versants précieuse des données de forages industriels anciens de la Manandona, de la Sahatsio et de la Sahalombo (minoterie d’Andranomanelatra, usine cotonnière d’Ant- qui constituent, d’est en ouest, le bassin d’Antsirabe. sirabe, établissement thermal) a accompagné le travail L’analyse stratigraphique a été replacée dans un réfé- de terrain. Les cartes topographiques disponibles de rentiel altimétrique absolu par nivellement classique, 1956, à l’échelle 1/100 000e, étant de peu d’utilité, on a concernant les sites majeurs de la seule vallée de la eu recours aux photographies aériennes au 1/50 000e de

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1991, 1/25 000e de 1965, aux images satellitaires SPOT et – des horizons sableux et graveleux, surtout Quickbird de très haute résolution, du moins sur – des niveaux tourbeux entre 23,2 et 22,5 m, vers certains secteurs. Le travail de laboratoire s’est appuyé 22,1 m, 21 m, entre 20,6 et 20,1 m, 19,2 et 18,7 m, 18 et sur un recours systématique aux datations de tourbes (21) 16,5 m, 14,1 et 13 m de profondeur, et de basaltes (3), les premières réalisées respectivement – enfin, au-dessus de 13 m, une puissante formation au Centre Des RadioCarbone (CDRC) de Lyon (datation litée d’argile jaunâtre à rouille, de sables argileux, de notée Ly) et à Poznan (POZ) par la méthode classique et cendres blanchâtres et de fragments de roches volca- Groningue (GrA) par accélérateur, et pour les secondes, niques (trachytes). relatives aux basaltes, au laboratoire de H. Bellon à l’Uni- Cette même succession, quoique moins complète en versité de Brest (méthode K/Ar). L’âge radiocarbone niveaux de tourbes superposés, a été relevée par forages renseigné ici est un âge conventionnel. Les âges calibrés dans la ville d’Antsirabe (établissement thermal, usine sont disponibles pour les trois datations les plus récentes. cotonnière, usine de céramique…). L’organisation verti- Des colonnes lithostratigraphiques précises ont été levées, cale de ces dépôts est interprétée comme le résultat de des coupes à l’échelle réalisées et une carte paléogéogra- deux dynamiques sédimentaires : phique du bassin établie, après reprise approfondie du cadre géologique des formations superficielles (fig. 3). 4 0 cm 4 - RÉSULTATS

Les trois semi-grabens constituant le bassin d’effon- 152 cm drement d’Antsirabe présentent tous une même série lithostratigraphique, plus ou moins complète suivant le compartiment. La localisation des coupes décrites se Alternance de lits trouve en figure 3. centimétriques à décimétriques d’argile, de limons et de 4.1 - LES SUCCESSIONS LITHOSTRATIGRA- cailloux très altérés, couleur de blanc PHIQUES à rouille 4.1.1 - Le compartiment central de la Sahatsio Couverture de pyroclastites cendres, De forme très allongée, méridienne, aligné à l’est le argiles et limons long de la faille du Mandray, il est drainé en son centre par la rivière Sahatsio. Celle-ci reçoit, en rive gauche au niveau d’Antsirabe, la rivière Amoronarivo et en rive tourbe droite, à Vinaninkarena, la rivière Sahalombo ainsi que la petite rivière Lavarano qui prend sa source au sud de 1303 cm limons, sables, Tourbe datée graviers et galets la ville d’Antsirabe. Le substratum rocheux est constitué 15060 +/- 100 ans BP du socle migmatitique largement présent au sud et à l’est

et par des coulées basaltiques au nord et à l’ouest. L’en- granite caissement des rivières sur plusieurs dizaines de mètres 1653 cm permet de nombreuses observations géologiques complé- tées par les données des forages anciens réalisés autour 1803 cm 1867 cm du site hydrothermal et des zones d’activités industrielles 1 m d’Antsirabe. Des niveaux tourbeux superposés très 2013 cm présents permettent là d’établir une chronologie à haute Tourbe datée - 22750 +/- 110 ans BP résolution du remplissage sédimentaire.

4.1.1.1 - La coupe d’Antsirabe nord (km 4) Alluvions fluvio-palustres 2250 cm C’est en rive droite de la rivière Sahatsio, à une centaine Tourbe datée - 34465 +/- 350 ans BP de mètres en amont du pont de la route reliant Antsirabe et Antananarivo (fig. 3), que la coupe est la plus complète et la plus spectaculaire, avec 25 m de hauteur, 7 niveaux 2516 cm de tourbes superposés, 38 horizons différents De la base

vers le sommet se succèdent en s’intercalant, sur un Socle altéré Coupe 1 substratum d’altérites rouge brique du socle gneissique (fig. 4, coupe 1) : Fig. 4 : Colonne lithostratigraphique d’Antsirabe-nord (km 4) (Coupe 1). – des horizons décimétriques argileux tachetés, jaune Fig. 4: Lithostratigraphic column for Antsirabe-north (km 4) à orange, (Section 1).

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– au-dessus du socle altéré et jusqu’à 13 m de profon- 0 cm deur, soit sur 12 m de puissance, un environnement de plaine alluviale d’inondation, avec une succession d’épi- Alternance de lits cendres, sodes de crues (sables, graviers) et de calmes (limons centimétriques à décimétriques d’argile argiles et limons argileux), colonisée par une végétation marécageuse et de limons très altérés, (7 épisodes successifs) ; couleur de blanc

– au-dessus de 13 m, en couverture, un environnement à rouille Couverture de volcanisme intense avec la couche décamétrique de de pyroclastites tourbe pyroclastites à cendres, lapilli et scories. 410 cm Sur ce site d’Antsirabe-nord (km 4), trois échantillons 460 cm de tourbe ont été datés (fig. 4, coupe 1) : argiles, limons – le niveau basal entre 23,2 et 22,5 m (MAD-SAH 560 cm Tourbe datée et sables 03), à l’altitude 1 495 m, est daté de 34 465 ± 350 BP - 25660 +/- 140 ans BP (Ly-13860), 640 cm – un niveau intermédiaire entre 20,6 et 20,1 m (MAD- SAH 11) a fourni un âge de 22 750 ± 110 BP (Ly-14363), Alluvions granite

– le niveau supérieur entre 14,1 et 13 m (MAD-SAH 820 cm fluvio-palustres 23) a donné un âge de 15 060 ± 100 BP (Ly-14366). 880 cm 1 m Tourbe datée - 29 640 +/- 385 BP 990 cm 4.1.1.2 - La coupe d’Amparihimborona (secteur de Vinaninkarena) Coupe 2 Cette coupe (fig. 5, coupe 2), qui n’atteint pas le subs- Fig. 5 : Colonne lithostratigraphique d’Amparihimborona tratum cristallin, se situe à l’extrémité méridionale du (Coupe 2). semi-graben, en rive droite de la Sahatsio, à 1 410 m Fig. 5: Lithostratigraphic column for Amparihimborona (Section 2). d’altitude, à proximité immédiate et en amont de la confluence Manandona-Sahatsio. D’une hauteur de dix 4.1.1.3 - Les coupes de Vinaninkarena-village mètres, elle montre, au-dessous de 4,10 m de profondeur, Elles se tiennent à l’ouest de la coupe précédente, en une alternance de lits argileux gris ou ocre et de quatre bordure de la RN7, à moins d’un kilomètre au nord du niveaux de tourbes noires. Cette succession correspond village de Vinaninkarena, à 1 428 m d’altitude (fig. 6, à l’environnement de plaine alluviale d’inondation. coupe 3). Le substratum gneissique est bien présent à faible Au-dessus, une série monotone et litée de cendres volca- profondeur, sous moins de quatre mètres de matériaux niques scelle la coupe. détritiques (fig. 6, profils 1 et 3). Il supporte une coulée Deux niveaux tourbeux ont été datés de 29 640 ± de basalte, d’épaisseur plurimétrique, bien conservée, 385 BP (Ly-13859) pour l’échantillon MAD-VIN 06 datée de 3,7 à 3,9 Ma (MAD-VIN 05) (fig. 6, profil 2). prélevé entre 9,3 et 8,8 m de profondeur et de 25 660 Des formations sablo-graveleuses plurimétriques, argilo- ± 140 BP (Ly-14365) pour l’échantillon MAD-VIN 13 limoneuses et riches en quartz, correspondent à un allu- prélevé à 5,6 m de profondeur. vionnement fluviatile déposé dans un chenal recoupant

N Pro l 1 Pro l 2 Pro l 3 S 0 cm 0 cm 0 cm

70 cm

160 cm

300 cm 300 cm 330 cm 305 cm Tourbe datée 400 cm - 14 410 +/- 90 BP 405 cm

540 cm 1 m 600 cm

cendres, tourbe limons, sables basalte granite argiles et limons et graviers

Coupe 3

Fig. 6 : Colonnes lithostratigraphiques de Vinaninkarena Village (Coupe 3). Fig. 6: Lithostratigraphic columns of Vinaninkarena Village (Section 3).

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pour partie la coulée basaltique et encaissé dans le socle sableux à graviers et cailloux décimétriques correspon- gneissique. Un niveau de tourbe (MAD-VIN 12), logé dant à un dépôt de pyroclastites grossières. Il recouvre dans un abri sous-roche de basalte, a fourni un âge de une alternance de niveaux décimétriques sableux à grave- 14 410 ± 90 BP (Ly-14364). Une couche plurimétrique leux et argileux. Un horizon tourbeux se tient entre 5,1 et de cendres est mal conservée sur un petit plateau en cours 4,2 m de profondeur. Il a fourni un âge de 32 820 ± 210 de dissection à l’ouest de la coupe. BP (Ly-5967 GrA). Cet ensemble repose sur des altérites rouges d’un socle cristallin proche. 4.1.1.4 - Les coupes septentrionales le long de la A l’aval, de part et d’autre du village d’Antoka, sur Sahatsio plusieurs kilomètres à l’amont du seuil rocheux d’An- Dans le secteur d’Ambano, autour du pont d’Ant- tanifotsy, se développent, sous une couverture plurimé- siaronjy, près du village d’Atsimombary, vers 1 525 m trique de pyroclastites claires, des silts et des argiles d’altitude, une coupe révèle, sur trois mètres de hauteur, gris, compacts sur plus de cinq mètres d’épaisseur. Ils une alternance de sables, graviers et galets d’origine présentent une succession de lamines millimétriques fluvio-torrentielle, dans lesquels s’intercalent deux à centimétriques, successivement claires et grises. Ce niveaux de tourbes (fig. 3). Ceux-ci ont fourni des âges dépôt correspond à une sédimentation lacustre distale. de 23 210 ± 170 BP (POZ-26127) pour l’échantillon Celle-ci s’appuie en biseau, à l’est, sur le substratum MAD-ANTSIARONJY 35 prélevé entre 2,7 et 2,4 m cristallin proche. de profondeur et de 19 010 ± 130 BP (POZ-26131) pour Ainsi, l’aval du petit bassin versant de l’Amoronarivo l’échantillon MAD-ANTSIARONJY 34 prélevé entre montre le comblement partiel d’une dépression lacustre 1,6 et 1,5 m de profondeur. Une couverture de pyro- longue de près de six kilomètres, avec des sédiments clastites grossières, à matrice limoneuse, se développe grossiers fluviatiles à l’amont et des sédiments fins latéralement au cours d’eau. laminés à l’aval. D’origine tectonique, en lien avec un Plus en aval, à l’ouest du village d’Ambohimiary, à rejeu d’une faille transverse au niveau du seuil d’Anta- 1 540 m d’altitude, un horizon tourbeux repose sur le nifotsy, ce lac du Mandray atteignait la cote 1485 et une substratum migmatitique très altéré, à trois mètres de tranche d’eau d’au moins dix mètres. Son comblement profondeur. Il est recouvert par des lits décimétriques de n’a pas été complet car si la chape de pyroclastites repose cendres de couleur orangée, gris clair à blanchâtre. sur les alluvions fluviatiles et palustres au nord, elle s’ap- puie au sud directement sur les sédiments fins lacustres. 4.1.1.5 - Les coupes sur l’affluent de la Sahatsio, l’Amoronarivo 4.1.1.6 - Bilan des acquis dans le compartiment de la Des coupes moins puissantes ont été relevées tout au Sahatsio long de l’Amoronarivo (fig. 7, coupe 4). A l’amont, à Trois corps sédimentaires sont ainsi bien caractérisés proximité d’Ambohitsoa, vers 1 490 m d’altitude, sous dans le semi-graben de la Sahatsio (fig. 8, coupe 5) : 1,70 m d’alluvions torrentielles à gros blocs et galets dans – à la base, reposant sur un socle principalement cris- une matrice sableuse, s’établit un horizon beige argilo- tallin, des alluvions fluviatiles à palustres permettent

S N

1700

1600 Seuil d’Antanifotsy Lohazarivo Antoka Ambohitsoa Amoronarivo riv. 1500 T ? m

Amoronarivo Riv.

0 5 km Cendres volcaniques T Tourbe Altérites Fluviatile et palustre Basalte, trachyte

Lacustre distal Cristallin

Coupe 4

Fig. 7 : Coupe longitudinale suivant la vallée de l’Amoronarivo (Coupe 4). Fig. 7: Longitudinal cross-section along the Amoronarivo Valley (Section 4).

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de caractériser une vaste plaine alluviale parcourue par nord-ouest, à proximité des cônes volcaniques émis- la rivière Sahatsio. Celle-ci présentait des sous-bassins saires. hydrologiques décalés du fait des irrégularités topogra- phiques du socle rocheux. Ainsi, à l’amont d’Antsirabe, 4.1.2 - Le compartiment oriental de la Manandona la Sahatsio s’est déplacée latéralement sur près de trois kilomètres entre Ambano et l’aérodrome. A l’aval, dans Ce semi-graben de la Manandona ou d’Antanety le sous-bassin de Vinaninkarena, elle a divagué sur deux (Lenoble et al., 1949) est bien circonscrit à l’ouest par kilomètres. Ces deux sous-bassins ont été reliés par un la faille du Mandray et son rebord rocheux et, à l’est, chenal de moins d’un kilomètre de large révélé par des par la puissante faille de Betampona et son escarpement alluvions fluviatiles plus grossières. En rive droite, au hectométrique. Il est fermé au sud par le seuil rocheux sud d’Antsirabe, le petit bassin versant de la rivière Lava- tectonisé de Faroroka-Mahitady à la cote 1 540 m (fig. 9, rano se trouve perché dans sa partie aval d’une vingtaine coupe 6). La rivière Manandona, logée le long de la de mètres au-dessus de sa confluence avec la Sahatsio. faille, alimentée en rive droite par la Fitamafy, rejoint la – parallèlement, c’est au pied de l’escarpement du Sahatsio, vers la cote 1 410 m, après le franchissement en Mandray qu’apparaissent les sédiments véritablement cascades du seuil rocheux. lacustres sur près de six kilomètres de long et moins d’un L’encaissement des rivières est moindre dans ce kilomètre de large (fig. 3). Ce paléo-lac du Mandray, compartiment et les coupes naturelles sont de hauteur d’altitude voisine de 1 485 m, n’a pas été complètement métrique à l’aval et plurimétrique à l’amont. Ainsi, la comblé. Barré à l’aval par le seuil d’Antanifotsy, à l’est seule formation superficielle identifiée à l’aval (et tout par l’escarpement du Mandray, il était vraisemblablement au long des rivières) reste la couverture généralisée de isolé de la plaine de la Sahatsio à l’ouest par un éperon cendres volcaniques identique à celle décrite dans le sous- rocheux de direction méridienne positionné à hauteur de bassin de la Sahatsio. A l’amont, se dégagent sous vingt l’aérodrome. mètres de cendres, 1,5 m de limons gris fluviatiles conte- – enfin, une couverture généralisée de cendres et de nant un niveau de tourbe, près du village d’Amberobe, pyroclastites d’une épaisseur originelle de l’ordre de vers 1 585 m d’altitude (fig. 9, coupe 6). Deux datations vingt mètres, comme en attestent les coupes d’Antsirabe sur des échantillons prélevés sur l’horizon tourbeux ont (km 4) et les forages. Ce dépôt volcanique comprend fourni des âges supérieurs à 30 000 BP (Ly-14964) pour une superposition de couches décimétriques de limons, la base et de 24 810 ± 130 BP pour le sommet (Ly-5966 de lapillis, voire de cailloux et de blocs dans la partie GrA). Le substratum rocheux n’a pas été approché.

Ivohibe 2035 m N S

1700 Sahatsio riv.

Antsiaronjy 1600 Antsirabe nord Seuil de km 4 Nanondranana Seuil d’Antsirabe T F Forage T F T Lahar 1500 Vinaninkarena m F Cendres volcaniques T T T Tourbe Fluviatile et palustre Sahatsio riv. Altérites

Basalte, trachyte

Cristallin 0 5 km

Coupe 5

Fig. 8 : Coupe longitudinale du compartiment de la rivière Sahatsio (Coupe 5). Coupe 5 Fig. 8: Longitudinal cross-section through the River Sahatsio block (Section 5).

1210-126 Mep 4-2012.indd 347 26/11/12 10:07 348

S N

Manandona riv. Toavala

1700

Seuil de Amberobe 1600 Faroroka-Mahitady T ? 1500 m ? Manandona riv. ?

0 5 km

T Tourbe

Lahar Fluviatile et palustre Basalte, trachyte

Cendres volcaniques Altérites Cristallin

Coupe 6

Fig. 9 : Coupe longitudinale du compartiment de la rivière Manandona (Coupe 6). Fig. 9: Longitudinal cross-section through the River Manandona block (Section 6).

Plus à l’amont, au pied du massif volcanique de faille proposée de Mahabatry. Il se raccorde à l’ouest l’Ankaratra, les limons fluviatiles sont d’épaisseur très aux édifices volcaniques duV akinankaratra et ses lacs de réduite. Ils reposent sur plus de cinq mètres d’altérites maar (Tritrivakely), au nord aux contreforts méridionaux rouges du substratum basaltique et sont coiffés par une de l’Ankaratra, et est installé au sud au contact entre le vingtaine de mètres de cendres à rares éléments gros- socle cristallin et des coulées basaltiques. Il est drainé siers. En remontant le versant, des matériaux à éléments par la Sahalombo qui rejoint la Manandona, au sud de grossiers très hétérométriques (quelques millimètres à Vinaninkarena, après la traversée du seuil de Nanondra- quelques décimètres), formés de blocs de roches volca- nana (fig. 3). niques à dominante basaltique, caractérisent des coulées C’est seulement vers l’amont, au droit d’Antsirabe de lahars. Celles-ci se rencontrent sous et sur les cendres. et du cône de l’Ivohitra que subsistent des formations Une croûte ferrugineuse compacte souligne la base de superficielles diversifiées. Ainsi, au sud, se dégage, sur la coulée. Le contact est brutal avec les cendres (pont plusieurs mètres, une succession de strates de scories, de Toavala). Il faut souligner que le dépôt de cendres lapilli et cendres volcaniques reposant sur des altérites présente une déformation plurimétrique au contact de rouge brique de basalte (fig. 10, coupe 7). En remontant l’escarpement de la faille de Betampona, témoignage la vallée, près de Tsarafara, à l’amont du lac d’Andra- d’une néotectonique récente active, avec soulèvement du nobe, vers 1 550 m d’altitude, apparaît un premier niveau compartiment oriental. de tourbe à 2,5 m de profondeur, sans qu’il soit possible Dans ce compartiment de la Manandona, des altérites d’atteindre des sédiments sous-jacents fluviatiles asso- sont atteintes par la rivière vers l’amont, au-dessus de ciés. Plus à l’amont encore, au pont sur la Sahalombo 1 600 m d’altitude. Le niveau fluviatile et une tourbe permettant de rejoindre Ambano, la couverture de n’ont été recoupés qu’autour d’Amberobe, sans qu’il cendres et de lapillis est remarquable par son enrichis- soit possible de retrouver là toute la série fluvio-palustre, sement en blocs et cailloux de trachytes, témoignant de voire lacustre, du bassin de la Sahatsio. Vers l’aval, la la proximité des centres d’émission. Au-dessous, près de rivière n’a pas encore traversé le manteau de cendres, deux mètres de sables et graviers fluviatiles contiennent témoignant ainsi d’une subsidence de la vallée, au contact une tourbe dense dégagée par la rivière, sans qu’il soit du seuil fracturé de Faroroka-Mahitady. Les indices de possible, là encore, de reconnaître les sédiments sous tectonique récente sont affirmés dans ce compartiment jacents. Dans ce secteur, d’importantes coulées boueuses oriental. de matériel pyroclastique recouvrent, en les ravinant, les sédiments cendreux. Les matériaux sont très grossiers, 4.1.3 - Le compartiment occidental de la Sahalombo pluri-décimétriques. Dans ce compartiment occidental peu creusé par la Ce compartiment étroit et longiligne correspond à rivière Sahalombo, il n’a pas été possible d’accéder à la un modeste semi-graben à l’ouest d’Antsirabe et de la totalité du remplissage détritique. Celui-ci présente un

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S N

1700

Sahalombo riv. Sahalombo-pont 1600

Coulées Tsarafara T basaltiques de Moratsiazo T l’Ivohitra 1500 m ? ? Sahalombo riv. ? 0 5 km

T Lahar Tourbe Altérites Cristallin Cendres volcaniques Fluviatile et palustre Basalte, trachyte

Coupe 7

Fig. 10 : Coupe longitudinale du compartiment de la rivière Sahalombo (Coupe 7). Fig. 10: Longitudinal cross-section through the River Sahalombo block (Section 7).

niveau de tourbe sur près de dix kilomètres de long au Vers l’amont se dégagent des alluvions sablo-grave- nord du volcan Ivohitra, associé à des alluvions sablo- leuses fluviatiles à niveaux tourbeux. Le paléo-lac du graveleuses fluviatiles reconnues seulement sur deux Mandray atteignait la cote 1 485 m, s’étendait sur près mètres. Une couverture de cendres et autres éléments de six kilomètres de long et moins d’un kilomètre de pyroclastiques grossiers est systématiquement présente. large. Il était barré par le seuil tectonique transverse Elle est surmontée vers les amonts par des coulées de d’Antanifotsy. lahars à éléments grossiers. 4.2.2 - Les alluvions fluvio-palustres 4.2 - UN MODÈLE D’ÉVOLUTION PALÉO- GÉOGRAPHIQUE DU BASSIN D’ANTSIRABE AU Elles ont été retrouvées dans les trois semi-grabens, PLÉISTOCÈNE SUPÉRIEUR largement disséquées dans celui de la Sahatsio et partiel- lement dégagées dans les deux autres. Elles présentent A partir d’une trentaine de coupes localisées, rele- une alternance d’alluvions argileuses, sableuses, grave- vées et exploitées, d’une cartographie assez exhaustive leuses, voire caillouteuses dans le chenal d’Antsirabe sur des corps sédimentaires bien caractérisés et avec l’appui une épaisseur décamétrique (Antsirabe-nord, km 4). Des 14 d’une vingtaine de datations C, il est aujourd’hui dépôts marécageux s’intercalent, constituant autant de possible de proposer une reconstitution de l’évolution lits tourbeux. Sept sont superposés dans le bassin versant paléogéographique du bassin tectonique d’Antsirabe. de la Sahatsio, au niveau d’Antsirabe au centre et de Deux corps sédimentaires sont omniprésents sur l’en- Vinaninkarena au sud. semble du territoire d’Antsirabe (fig. 11 et 12) : à la base, Les datations réalisées, très homogènes, témoignent des alluvions fluvio-palustres reposant sur le socle cris- d’une édification du complexe fluvio-palustre, sur l’en- tallin ou, vers le nord, sur des coulées laviques et leurs semble du bassin d’Antsirabe, entre 35 000 BP et 14 410 altérites et, au-dessus, une puissante couverture de pyro- ± 90 BP, âge des dernières tourbes datables, avant la mise clastites, plus grossières vers le nord-ouest, à proximité en place de la couverture de pyroclastites. des complexes volcaniques de l’Ankaratra et du Vakinan- Il faut donc voir les semi-grabens comme autant de karatra. Plus localement, des sédiments lacustres argilo- vastes plaines alluviales dans lesquelles divaguaient les sableux laminés ont été identifiés. rivières, sous un climat plus frais et (ou) plus humide que l’actuel. 4.2.1 - Les sédiments lacustres 4.2.3 - La couverture de pyroclastites Les seuls sédiments lacustres caractéristiques se tiennent au pied de la faille du Mandray, dans la partie Elle s’est mise en place sur l’ensemble du fossé orientale du semi-graben de la Sahatsio, ici drainé par d’Antsirabe, à la fois sur les sédiments fluvio-palustres la rivière Amoronarivo. Ils présentent des argiles et qui présentaient une surface relativement plane, faible- des silts finement laminés, de sédimentation distale. ment inclinée vers le sud et sur les altérites des coulées

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Compartiment Compartiment Compartiment Sahalombo Sahatsio Manandona

W Faille E de Betampona

Faille du Mandray 1700

1600 Manandona Ivohitra Amoronarivo Riv. Sahalombo Antsirabe Sahatsio rivière riv. riv. Aérodrome 1500 m ?

0 5 km Cendres volcaniques Basalte, trachyte Fluviatile et palustre Cristallin

Lacustre Coupe 8

Fig. 11 : Coupe transversale sud du bassin d’Antsirabe (Coupe 8). Fig. 11: Southern cross-section through the Antsirabe basin (Section 8).

Compartiment Compartiment Compartiment Sahalombo Sahatsio Manandona

SW NE

Mahabatry Faille Faille du Mandray 1700 de Betampona Sahalombo Sahatsio Andranomanelatra Manandona 1600 Riv. Riv. Forage Riv.

? ? ? 1500 m

0 5 km

Cendres volcaniques Basalte, trachyte Pliocène à lignite Fluviatile et palustre Cristallin

Coupe 9

Fig. 12 : Coupe transversale nord du bassin d’Antsirabe (Coupe 9). Fig. 12: Northern cross-section through the Antsirabe basin (Section 9).

laviques et du socle cristallin. Elle a épousé la topogra- polis). Il s’agit bien de téphras. La fraction fine, inférieure phie des lieux. à 0,6 mm, contient principalement quartz, feldspath déjà Les sédiments se sont déposés en couches d’épais- très altéré, magnétite, beaucoup de sphène, zircon, augite, seur centimétrique à métrique, le plus souvent décimé- tourmaline, amphibole, hornblende et ponce rhyolitique. trique, de lithologie et de couleurs différentes allant du Le transport à distance des cendres et leur sédimenta- blanchâtre à l’ocre, correspondant à autant d’émissions tion sont évidemment commandés par une double dyna- émises par des volcans du Vakinankaratra au nord-ouest, mique, éolienne et hydrique. Les bouches d’émissions les matériaux présentant une granulométrie décroissante explosives étant situées à l’ouest / nord-ouest, le remplis- d’ouest en est. sage du bassin d’Antsirabe s’est donc réalisé dans un La nature volcanique du matériel est confirmée par des régime de vents d’ouest / nord-ouest correspondant aux examens microscopiques (M. Dubar, CNRS Sophia Anti- vents actuels de la mousson. Mais les précipitations qui

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accompagnent ces éruptions et les forts ruissellements l’agressivité pluviale, notamment lors du passage des consécutifs ont favorisé l’épandage des pyroclastites en perturbations cycloniques. couches planes et le nettoyage des versants montagneux. Aujourd’hui, l’incision dans la seule vallée de la De ce fait, les cendres se sont accumulées dans les plaines Sahatsio et à la confluence Manandona-Sahatsio, descend alluviales. plus profondément que l’incision anté-35 000 BP. Le profil Le matériel est beaucoup plus grossier sur la marge longitudinal de la vallée ancienne est recoupé obliquement nord-ouest du bassin avec des coulées de lahars à blocs par le profil actuel, ce qui témoigne d’une érosion régres- décimétriques, légèrement arrondis. Ailleurs, le matériel sive qui affecte le seuil de Nanondranana (pont à l’aval de est plus fin, cendreux. L’épaisseur de cette couverture de la confluence Manandona-Sahatsio), érosion régressive à pyroclastites est de l’ordre de 20 m autour d’Antsirabe et mettre elle-même en relation avec un contexte de mobilité dans l’ensemble du bassin. Elle s’est mise en place posté- tectonique et notamment une subsidence très probable du rieurement au dépôt des tourbes datées les plus récentes, fossé de la Manandono en aval de notre secteur d’étude. c’est-à-dire postérieurement à 14 410 ± 90 BP. 5.2 - LES VARIATIONS PALÉO-CLIMATIQUES DANS LE BASSIN D’ANTSIRABE

5 - DISCUSSION ET PERSPECTIVES Les niveaux de tourbe des hautes terres centrales de Madagascar ont indubitablement une signification paléo- 5.1 - LA RÉINSTALLATION DES RIVIÈRES climatique, comme l’ont montré les analyses palynolo- giques antérieures (Rakotondrazafy, 1992 ; Straka, 1996 ; L’encaissement du réseau hydrographique, postérieure- Burney, 1996 ; Gasse & Van Campo, 1998, 2001). Les ment à la mise en place de la couverture de pyroclastites observations, conduites notamment dans le lac de maar après 14 000 ans BP, suppose un contexte de forte inci- de Tritrivakely, montrent, sur les treize premiers mètres sion obligatoirement réglée par les seuils à l’exutoire des de sédiments, depuis 40 800 ans, des périodes froides sous-bassins versants. (40 000-39 000 ; 37 000-32 400, 22 700-16 900) avec Dans son écoulement vers le sud, la Sahatsio rencontre développement concomitant de tourbe (40 800 BP, 36 à peu de résistance car elle emprunte la fracturation et la 32 000 BP, 9 800 BP). schistosité, de direction méridienne, affectant le seuil Il conviendra d’étudier plus en détail, à partir de cristallin de Nanondranana. Ainsi, l’incision profonde nouvelles données palynologiques, les niveaux de tourbes fournit des coupes décamétriques. Le substratum rocheux désormais plus nombreux retrouvés au sein des alluvions est largement dégagé au nord d’Antsirabe. fluviatiles. Mais, d’ores et déjà, ces niveaux témoignent La rivière Manandona, dans le compartiment oriental, dans le bassin d’Antsirabe d’oscillations climatiques plus atteint le substratum rocheux dans son extrémité amont. nombreuses, entre 35 000 ans et 14 000 ans, avec la mise Ailleurs, l’encaissement est faible, ne permettant même en place d’une végétation de climat plus frais et (ou) plus pas le dégagement de la couverture de cendres. La résis- humide que l’actuel. tance du seuil rocheux de Faroroka-Mahitady en est la Les archives fluvio-palustres de la vallée de la Sahatsio, cause. La fracturation est transverse (NE-SO), obligeant plus nombreuses et plus faciles à observer que les la rivière à traverser le seuil sur plus de trois kilomètres. archives volcaniques (lac de Tritrivakely), permettent Des forages seraient nécessaires pour reconnaître la ainsi dans un premier temps de reconstituer une évolu- nature et l’épaisseur du comblement alluvial, voire tion paléodynamique locale ou régionale plus précise que lacustre, du semi-graben de la Manandona. dans les travaux antérieurs. Au-delà, les tourbes superpo- Quant à la rivière Sahalombo, dans le compartiment sées d’Antsirabe nord (km 4) se révèlent être d’un intérêt occidental, son écoulement vers le sud, à l’aval d’Antsi- majeur pour parfaire ensuite la reconstitution des paléo- rabe, est contrarié par les coulées de basaltes. En consé- climats du Pléistocène supérieur durant les stades isoto- quence, le creusement du cours supérieur reste faible, ne piques 2 et 3. Il est en effet tout à fait remarquable de dégageant avec peine qu’un horizon tourbeux au centre constater que dans l’hémisphère nord, durant un intervalle du sous-bassin. C’est sans doute dans cette vallée de la de temps tout à fait similaire (35 000-15 000 BP), les fluc- Sahalombo que les formations superficielles alluvion- tuations glaciaires du Rhône se sont accompagnées des naires sont les plus réduites du fait d’un faible bascule- mêmes oscillations interstadiaires avec développement de ment tectonique. tourbes datées (Triganon et al., 2005). Une comparaison Si l’on se réfère aux coupes au nord immédiat d’Antsi- entre hémisphères sud et nord, sur des méridiens proches, rabe ou à Vinaninkarena au sud, l’incision a été de l’ordre pourra être tentée. de 25 m en moins de 14 000 ans – le temps de dépôt de la couverture de pyroclastites étant inconnu – ce qui corres- 5.3 - LA DATATION DES DERNIÈRES ÉMISSIONS pond à une vitesse moyenne d’au moins 1,8 mm par an, VOLCANIQUES bien supérieure à la valeur moyenne annuelle de 1,38 mm fournie par Rossi (1979) pour l’ensemble de Madagascar Dans sa thèse, Mottet (1980) a proposé, sur la base de et considérée alors comme trois fois plus élevée que la critères morphologiques, une chronologie relative des moyenne mondiale. Cette grande vitesse s’explique à la émissions volcaniques, dont l’épisode final est fixé à fois par la nature des matériaux meubles traversés et par 2000 BP.

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Plus récemment, Rufer (2009) a fourni des âges – les effets de la néotectonique, récente à actuelle, de téphras, par la méthode IRSL, sur quatre volcans à – et l’incision des rivières dans le fossé d’effondrement l’ouest d’Antsirabe. Les treize âges obtenus s’inscrivent d’Antsirabe. dans une fourchette entre 175,8 ± 19 ka (Andraikiba) et 20,7 ± 1,2 ka (Tritrivakely) pour le plus récent. Ces résultats remettent apparemment en cause la fiabilité stra- REMERCIEMENTS tigraphique de la série prélevée dans le lac de cratère, considérée comme stable depuis au moins 40 000 ans, Les auteurs remercient les différents laboratoires qui voire 150 000 ans (Gasse & Van Campo, 1998, 2001). ont apporté leur concours aux analyses (CDRC Lyon 1, Mais ils ne sont pas non plus compatibles avec des émis- CEPAM Sophia Antipolis, EDYTEM Université de sions postérieures à 14 400 BP, âge du dernier niveau Savoie, Laboratoire de Géosciences de l’Université de tourbeux daté. Brest), la Vice-Présidence de la Recherche de l’Univer- En revanche, les résultats publiés par Burney (1987) sité Lyon 3 Jean Moulin qui a financé un programme sur les cinq premiers mètres des sédiments du lac Tritriva- de recherches à Madagascar, ainsi que le Centre de kely apportent des éléments d’interprétation des dernières Recherches de Géographie Appliquée de l’Univer- émissions volcaniques. C’est au-dessous de trois mètres de sité Lyon 3 (CRGA-UMR 5600 EVS). De même sont profondeur que l’auteur décrit des lits de cendres intercalés remerciés les relecteurs anonymes pour leurs judicieuses d’argile humique, de tourbe et de fins matériaux détri- critiques. tiques. La période considérée est plus ancienne que 8 490 ± 100 BP, qui pourrait être la fin des émissions de cendres. Avant 12 142 cal. BP, vers cinq mètres de profondeur, les RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES couches de sables et de cendres sont plus épaisses, témoi- gnant d’une activité volcanique plus intense. Ainsi, on BATTISTINI R., 1964 - Problèmes morphologiques du Vakinanka- pourrait considérer que l’épisode volcanique explosif a ratra. Madagascar. Revue de Géographie, 5, 43-69. duré près de 6 000 ans, entre 14 400 et 8 400 BP. BERTRAND L. & JOLEAU L., 1924 - Sur quelques faits relatifs aux formations néogènes et quaternaires des environs d’Antsirabe. Les résultats obtenus sur les téphras (Rufer, 2009), sur Comptes Rendus Hebdomadaires des Séances de l’Académie des la série sédimentaire continue du lac de maar de Tritriva- Sciences, 178 (7 avril), 1293-1296. kely (Gasse & Van Campo, 1998, 2001) et nos propres BESAIRIE H., 1971 - Mise au point sur le volcanisme de l’Ankaratra (Madagascar). Documentation du Bureau Géologique. République travaux lithostratigraphiques sont discordants. Pour la Malgache, A 2169, 1-19. période 35 000 - 14 400 BP, la série dilatée fluvio-palustre BURNEY D.A., 1987 - Pre-settlement vegetation changes at Lake de la Sahatsio pourra servir de référence. Tritrivakely, Madagascar. Paleoecology of Africa, 18, 357-381. BURNEY D.A., 1996 - Climate change and fire ecology as factors in the Quaternary biogeography of Madagascar. In W.R. Lourenço (ed.), Biogéographie de Madagascar : Actes du Colloque Interna- 6 - CONCLUSION tional Biogéographie de Madagascar, Paris, 26 au 28 septembre 1995. Editions de l’ORSTOM, Paris, 49-58. COLLINS A.S., FITZSIMONS I.C.W., HULSCHER B. & RAZA- La lithostratigraphie et les paléogéographies des trois KAMANANA T., 2003 - Structure of the eastern margin of the East grands corps sédimentaires du comblement du fossé d’ef- African Orogen in Central Madagascar. Precambrian Research, 123 (2/4), 111-133. fondrement composite d’Antsirabe sont bien établies. Les COLLINS A.S., 2006 - Madagascar and the amalgamation of central formations lacustres sont localisées au pied de l’escarpe- Gondwana. Gondwana Research, 9, 3-16. ment de faille du Mandray. Une épaisse couverture de GASSE F., CORTIJO E., DISNAR J.R., FERRY L., GIBERT E., KISSEL C., LAFFOUN–DEFARGE F., LALLIER-VERGÈS pyroclastites recouvre l’ensemble du bassin. Son origine E., MISKOVSKY J.C., RATSIMBAZAFY B., RANAIVO depuis le nord / nord-ouest (massif de Vakinankaratra F., ROBISON L., SAOS P., SIFFEDINE A., TAIEB M., VAN oriental) est évidente. Cette couverture fossilise des allu- CAMPO E. & WILLIAMSON D., 1994 - A 36 ka environmental record in the southern tropics: Lake Tritrivakely (Madagascar). vions de vastes plaines alluviales qui accompagnaient le Comptes Rendus de l’Académie des Sciences. Série 2, Sciences de la réseau hydrographique ancré sur le substratum rocheux. Terre et des Planètes, 318 (11), 1513-1519. De nombreux épisodes à tourbe (jusqu’à 7) témoignent GASSE F. & VAN CAMPO E., 1998 - A 40,000-yr Pollen and Diatom Record from Lake Tritrivakely, Madagascar, in the Southern Tropics. d’environnements frais et (ou) plus humides que l’actuel, Quaternary Research, 49 (3), 299-311. se succédant entre 35 000 et 14 000 ans. GASSE F. & VAN CAMPO E., 2001 - Late quaternary environmental changes from a pollen and diatom record in the southern tropics La durée des émissions de cendres pourrait être de (Lake Tritrivakely, Madagascar). Palaeogeography, Palaeoclimato- l’ordre de 6 000 ans. Sur cette base, l’incision des vallées logy, Palaeoecology, 167 (3/4), 287-308. actuelles pourrait être considérable, de l’ordre de 3,5 mm/ LENOBLE A., 1938 - Sur la chronologie des éruptions volcaniques du massif de l’Ankaratra. Comptes Rendus Hebdomadaires des Séances an !! de l’Académie des Sciences, 206, 613-615. Les sédiments fluvio-palustres du bassin d’Antsirabe LENOBLE A., MANGUIN E. & BOUREAU E., 1949 - Les dépôts constituent des archives précieuses pour appréhender lacustres pliocènes-pléistocènes de l’Ankaratra (Madagascar). Annales Géologiques du Service des Mines, 18, 1-137. avec précision : MINISTÈRE DE LA GÉOLOGIE ET DES MINES, 2005 – Carte – le climat du Pléistocène supérieur de cette partie de numérisée Antsirabe-Antanifotsy. Service géologique, Antananarivo. l’hémisphère sud, MOTTET G., 1980 - L’Ankaratra et ses bordures (Madagascar). Recherches de géomorphologie volcanique. Tome 1 : Le massif de – l’âge des dernières émissions explosives du massif l’Ankaratra. Tome 2 : Les bordures et le volcanisme quaternaire. du Vakinankaratra, C.R.D.P., Lyon, 431 & 299 p.

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PERRIER DE LA BATHIE H., 1926 - Au sujet de la note de ROSSI G., 1979 - Importance, causes et conséquences de la crise MM. Bertrand et Joleau sur l’existence d’un grand bassin lacustre morphoclimatique actuelle à Madagascar. Madagascar. Revue de d’âge néogène à Antsirabe et des dépôts de cette région. Bulletin de Géographie, 34, 111-121. l’Académie Malgache, 9, 53-62. RUFER D., 2009 - Characterization and age determination of PETIT M., 1998 - Présentation physique de la Grande Ile Mada- quaternary volcanism in the southern Ankaratra region (Central gascar. Foiben-Taosarintanin’i Madagasikara, Antananarivo, 192 p. Madagascar) through novel approaches in luminescence dating. RAKOTONDRAZAFY T., 1992 - Dynamique des environnements Dissertation thesis, Universität Bern, Bern, 131 p. quaternaires de Madagascar par l’étude sédimentologique, l’ana- STRAKA H., 1996 - Histoire de la végétation de Madagascar lyse palynologique et la diatomologie de quelques bassins lacustres. oriental dans les 100 derniers millénaires. In W.R. Lourenço (ed.), Thèse de Doctorat, Université d’Antananarivo, Antananarivo, Bio géographie de Madagascar : Actes du Colloque International 172-47 p. Biogéographie de Madagascar, Paris, 26 au 28 septembre 1995. RAZAFIMAHEFA R., 2010 - Les formations superficielles du bassin Editions de l’ORSTOM, Paris, 37-47. d’Antsirabe (Hautes Terres centrales de Madagascar). Nature et TRIGANON A., NICOUD G., GUITER F. & BLAVOUX B., 2005 dynamique hydrogéomorphologique. Thèse de Doctorat, Université - Contrôle de la construction de l’ensemble détritique de la région d’Antananarivo, Antananarivo, 195 p. d’Evian par trois phases glaciaires durant le Würm. Quaternaire, 16 (1), 57-63.

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