d’OXFAM-MAGASINS DUMONDE et positionnement État deslieux,Tendances au LE COMMERCE éQUITABLE d’hjour ui [email protected] Expert commerceéquitable étude Mars2013 Patrick Veillard

© Sarah VDC - Connection 2 le commeRce eQuitaBle aujouRd’hui Étude maRs 2013 étude Mars 2013 Patrick Veillard Expert commerce équitable [email protected]

LE COMMERCE éQUITABLE aujourd’hui État des lieux, Tendances et positionnement d’OXFAM-MAGASINS DU MONDE

Oxfam-Magasin du monde Rue Provinciale, 285 Tél. : 010/43 79 50 [email protected] 1301 Wavre Fax : 010/43 79 69 www.omdm.be

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 3 © Rankin/Oxfam

4 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 introduction

Crises alimentaire, écologique et financière, essor des puissances émergentes, printemps arabe… Nous vivons une époque charnière, où les changements techno- logiques devancent et se combinent avec les bouleversements socio-économiques. Les certitudes de la fin du 20ème siècle, qui associaient libéralisations économique et politique à « la fin de l’histoire », sont remises en question1. Dans ce monde en perpétuel changement, il faut saisir les opportunités et proposer des alternatives économiques, sociales et politiques concrètes. Le commerce équitable est l’une des alternatives que propose, entre autres, Oxfam afin de réduire les injustices économiques2.

Le concept a bien évolué depuis ses débuts. De commerce solidaire dans l’après- guerre – aux accents humanistes et caritatifs, voire religieux – l’on passe dans les années 60 au commerce alternatif, à la tournure tiers-mondiste et politique beaucoup plus marquée. Le commerce équitable s’élargit et se diversifie ensuite considéra- blement avec l’avènement dans les années 80-90 des systèmes de certification. Ces derniers ont notamment permis d’intégrer, à côté des pionniers issus de l’éco- nomie solidaire, des acteurs plus ‘mainstream’ tels que multinationales et grande distribution3.

Après un rapide survol de l’environnement économique global, cette étude détail- lera les grandes tendances et enjeux du secteur de l’équitable aujourd’hui. Nous clarifierons ensuite le positionnement d’Oxfam Magasins du monde sur le commerce équitable, en lien avec les positionnements d’Oxfam en Belgique et d’Oxfam inter- nationala. L’objectif principal est de mettre en avant les spécificités et la pertinence de notre commerce équitable dans l’environnement actuel. Le tout participe à un travail stratégique en cours sur le positionnement global d’Oxfam-Magasins du monde, incluant les thématiques de la démocratie économique, de la souveraineté alimentaire, du travail décent et du vêtement de seconde mainb,4. Nous terminerons en évoquant quelques pistes de stratégies commerciales et financières qui permet- traient de renforcer ce positionnement.

NOTES sourcES a Il est important de bien distinguer dans cette étude les 1 CETRI. Octobre 2012. Nouveaux enjeux Nord-Sud termes ‘Oxfam-Magasins du monde’, ‘Oxfam en Belgique’ dans la mondialisation. et ‘Oxfam International’, qui engagent différents niveaux 2 Oxfam-Magasins du monde. Février 2013. de l’organisation. Les propos utilisant le terme ‘Oxfam’ Comprendre le commerce équitable. seul font référence à l’ensemble des affiliés Oxfam. 3 Ramonjy D. 2012. Management. Dictionnaire b Ces thématiques seront néanmoins abordées du commerce équitable, éditions Quae. de par leur caractère systémique et inter- 4 Oxfam-Magasins du monde. 08/11/2012. Plan stratégique connecté avec le commerce équitable. 2013-2014.

5 6 le commeRce eQuitaBle aujouRd’hui Étude maRs 2013 Table des matières

Chapitre 1 : une mondialisation inéquitable 6 Une mondialisation qui s’intensifie… ...... 6 …se financiarise…...... 6 …aux fortes disparités de croissance…...... 6 …vectrice d’une nouvelle division internationale du travail…...... 7 …de plus en plus d’inégalités internes…...... 7 …et qui se heurte aux limites planétaires...... 7 Un retour de balancier ?...... 8

Chapitre 2 : tendances globales du commerce équitable 9 Forte croissance du secteur équitable...... 9 Diversification des produits, services et organisations...... 10 Industrialisation du commerce équitable...... 10 Multiplication des labels...... 13 Absence de cadre légal...... 16 Développement des études d’impact...... 18 Relocalisation du commerce équitable...... 18 Commerce équitable Sud/Sud...... 18 Commerce équitable Nord/Nord...... 19 Verdissement du commerce équitable...... 20

Chapitre 3 : positionnement d’Oxfam-Magasins du monde sur le commerce équitable 23 Définition du positionnement...... 23 Pour un commerce équitable de qualité...... 23 Les systèmes de garantie comme des outils...... 24 Soutien renforcé au développement économique et social des partenaires (principes 1 / 9)...... 26 Conditions de travail décentes dans la chaine d’approvisionnement (principe 2)...... 28 Focus sur les producteurs et travailleurs les plus défavorisés (principe 3)...... 29 Modèle de démocratie économique (principe 4)...... 31 Sensibilisation des citoyens au commerce équitable (principe 5) et promotion du commerce équitable comme alternative économique globale et crédible (principe 6)...... 34 Logique participative avec les organisations partenaires (principe 7)...... 37 Cohérence environnementale (principe 8)...... 39 Qualité et authenticité des produits (principe 10)...... 42

Conclusions 45 En matière de ressources financières ...... 46 En termes de stratégies commerciales ...... 47

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 7 Chapitre 1 : une mondialisation inéquitable

Une mondialisation mentation des secteurs financiers dits émergents13. Mais nombre de qui s’intensifie… opérés dans les pays riches à partir pays ne bénéficient pas ou très peu des années 80, sous l’influence du des fruits de la croissance mondiale. Le commerce mondial représente dogme de l’efficacité des marchés. Oxfam a calculé que 97% des reve- aujourd’hui 16000 milliards US$ de La suppression progressive des nus générés par le commerce inter- marchandise échangées par an5. Le contrôles sur les activités finan- national revenaient aux nations phénomène de mondialisation éco- cières transfrontalières (notamment riches ou à revenu moyen14. Les Pays nomique suit une logique néolibé- les paradis fiscaux) et la hausse les Moins Avancés (PMA), pays ‘re- rale, synonyme entre autres de sup- consécutive des flux de capitaux a tardataires’, sont majoritairement pression des barrières douanières, marqué une rupture radicale avec le des exportateurs de matières pre- d’accroissement des investisse- cadre international de l’après-guerre mières, notamment agricoles. Les ments directs étrangers, de réduc- tion des coûts de transport, de flui- dité accrue des informations, de Libéralisation des marchés agricoles déréglementation des marchés, Les marchés agricoles sont un bon exemple des vagues de libéralisation opérées etc.6. Les défenseurs de ce para- au début des années 2000. Dans le contexte de bulle immobilière, cette libéra- digme néolibéral peuvent se vanter lisation a attiré de nombreux investisseurs fonctionnant selon une logique de succès certains. En premier lieu purement spéculative : hedge fundse, fonds de pension, fonds souverains et l’impressionnant décollage, durant certaines banques ont ainsi envahi les contrats à terme, accroissant la volati- la dernière décennie, des économies lité des prix et les déconnectant des marchés physiques. Ce fort accroissement émergentes, notamment de la Chine, de la spéculation a joué selon de nombreux experts un rôle important dans les aujourd’hui 2ème économie mondiale. crises alimentaires de 2007/200811. Des réformes ont depuis été entreprises, Les énormes besoins en ressources notamment par le G20, qui a lancé en 2011 le Système d’information sur les naturelles qu’entraine cette crois- marchés agricoles (coordination des principaux pays producteurs et consom- sance des émergents contamine mateurs de blé et de maïs) et entrepris de réguler les marchés financiers de d’autres régions du globe, comme matières premières (transparence accrue, limites de positions)12. l’illustre le développement de la Chinafriquec,7 et plus généralement des relations commerciales bilaté- rales Sud/Sud. hérité de Bretton Woodsd,9. Cette conditions des termes de l’échange suppression des freins a encouragé leur sont encore largement défavo- …se financiarise… les comportements à court terme, rables, même si la raréfaction des parfois destructeurs, des banques ressources naturelles a tendance à Les dernières décennies ont vu la et des entreprises10. augmenter les cours mondiaux. Les montée en puissance des marchés pays riches, majoritairement occi- financiers. Les flux financiers repré- …aux fortes dentaux, sont eux enlisés dans une sentent aujourd’hui des montants disparités de crise économique et budgétaire supérieurs aux échanges de mar- croissance… synonyme au mieux de croissance chandises8. Cette considérable fi- atone, au pire de récession. nanciarisation de l’économie est liée Une partie croissante de la richesse aux vastes programmes de dérégle- mondiale est produite dans les pays

8 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 …vectrice d’une pays. La mondialisation provoque née, matérialisée notamment par la nouvelle division ainsi une répartition fondamentale- hausse généralisée et une volatilité internationale ment inégale de la croissance, selon accrue des cours des matières pre- du travail… un modèle de surconsommation mas- mières. Le changement climatique sive par quelques-uns et de pau- accentue encore davantage l’insé- De nombreux pays émergents ex- vreté pour beaucoup17. C’est très clair curité et l’instabilité économiques, portent une part devenue majoritaire dans les pays riches, où les déloca- en particulier dans les régions tropi- de produits manufacturés. Même la lisations et les gains de productivité cales et côtières, le plus souvent Chine, véritable usine du monde, voit entrainent souvent la destruction des situées dans les pays pauvres. Ces son quasi-monopole sur la produc- emplois peu qualifiés. C’est aussi vrai derniers ont des capacités de réponse tion ‘low cost’ s’effriter peu à peu au dans la plupart des pays émergents. et d’adaptation limitées, que ce soit profit d’autres pays asiatiques moins Une étude récente du ‘Center for Glo- au niveau financier ou en termes chers tels le Bangladesh15. Les pays bal Development’ montre ainsi que la d’infrastructures, alors même qu’ils riches se spécialisent dans les tech- majorité de la pauvreté extrême dans sont historiquement de très faibles nologies et produits de pointe. Mais le monde n’est pas localisée dans les émetteurs de gaz à effet de serre. même dans ce domaine, ils sont de PMA mais dans les pays à revenu plus en plus concurrencés (ex. indus- intermédiaireg,18. Face à ces défis, les concepts de trie aéronautique et spatiale de la développement durable et d’écono- Chine ou de l’Inde). Les PMA se mie verte sont mis en avant dans la contentent le plus souvent d’expor- …et qui se heurte aux plupart des discours officiels19. ter des produits primaires (matières limites planétaires Trame de fond de ces discours, le premières agricoles, minières, etc.). La fin programmée des énergies fos- tout technologique, souvent pré- Cette division du travail est facilitée siles, les limites en terres arables, en senté comme la panacée pour amé- par les firmes transnationales, qui réserves d’eau douce, etc., entrainent liorer l’efficacité des systèmes de mettent en concurrence les Etats à une compétition de plus en plus effré- production et dématérialiser la crois- l’échelle globale, ces derniers cher- chant à attirer les investissements créateurs de richesse et d’emplois. Comment nourrir le monde en 2050 ? Ces investissements se révèlent La question revient dans tous les sommets internationaux sur l’agriculture, cependant très volatils et bénéfi- en particulier depuis les crises alimentaires de 2007 et 2008. Le secteur cient relativement peu aux popula- agricole est de fait emblématique des limites du modèle de développement tions locales (mauvaises conditions actuel, confronté à la raréfaction des ressources naturelles et aux dom- de travail, rapatriement des béné- mages de plus de 50 ans de révolution verte. L’offre en céréales par exemple, fices, évasion fiscale, etc.)16. structurellement en pénurie (coût croissant du fret et des intrants liés au pétrole, développement des agro-carburants, spéculation, faiblesse des …de plus en plus stocks, etc.), peine à faire face à la demande croissante et inélastique, d’inégalités internes… en provenance notamment des pays émergents22. Pour pallier à cette pénurie croissante et annoncée, les Etats et acteurs privés cherchent à Même si les problèmes d’inégalité sécuriser leurs approvisionnements, comme l’illustre le phénomène d’ac- sont complexes et ne peuvent se caparement des terres23 ou des ressources en eau24. Autre exemple de résumer à une phrase du type « l’iné- cette ‘sécurisation’, le développement de partenariats entre multinationales galité est en hausse globale », la et petits producteurs dans le but d’augmenter la qualité et le rendement plupart des études montrent que les des productions25. Face aux limites du modèle agro-industriel, des acteurs inégalités mondiales sont en forte de la société civile ou des organisations internationales, tels Olivier de croissance dans de nombreuses Schutter, rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentation, défendent régions. Entre pays comme on l’a vu, une agriculture paysanne, sur base de techniques agro-écologiques26. mais aussi au sein de la plupart des

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 9 sance. Certains auteurs remettent diale de la financei, encadrement rifaires selon des critères sociaux en question ce postulat du décou- des bonus des traders, meilleur et environnementauxo,32. plage, questionnant la compatibilité contrôle des ‘hedge funds’28, ré- Malgré ces quelques progrès, le entre capitalisme et développement forme des marchés financiers aux chantier pour réduire les injustices durable et souhaitant redéfinir le Etats-Unis (‘Dodd–Frank Act’j) et en économiques mondiales est encore concept de croissance20. L’absence Europe (loi Mifidk)29, taxe sur les tran- vaste : lutte contre la corruption et de toute forme de progrès dans la sactions financièresl,30. les paradis fiscaux, développement plupart des négociations intergou- des normes sociales et environne- vernementalesh souligne par ailleurs Plus spécifiquement dans le do- mentales, adoption d’un nouvel ordre les problèmes de gouvernance mon- maine commercial, la crise écono- monétaire international, réforme de diale inhérents au processus21. mique a accentué les blocages des la gouvernance économique mon- 33 négociations à l’OMC (cycle de Doha), diale … Un retour de accusées par la société civile mon- diale de promouvoir une mondiali- balancier ? sourcES sation néolibérale discriminatoirem.

Paradoxalement, la crise écono- A noter cependant que la sortie du 5 World Trade Organization. 2009. World Trade Report 2009: Trade Policy Commit- mique, si elle a jeté des millions de cadre multilatéral peut être un désa- ments and Contingency Measures. 6 Bajoit G. Novembre 2010. Le colonialisme et le néo- gens dans la misère et la faim, a vantage pour les pays pauvres : mis colonialisme. Antipodes - Outils pédagogiques n° 11. 7 Rue 89. 17/06/2008. La « Chinafrique » remis en cause l’idéologie néolibé- sous pression par des acteurs beau- change la donne sur le continent africain. 8 Cnuced. Juillet 2012. Rapport sur l’inves- rale dominante, le fameux TINA coup plus puissants, tels l’Union tissement dans le monde 2012. 9 Shaxson N. 2011. Les paradis fiscaux. 27 (« there is no alternative ») . Européenne (UE), ils peuvent être Enquête sur les ravages de la finance néolibérale. Editeur André Versaille. Exemples de progrès ou chantiers amenés à conclure des accords 10 UNCTAD. 2011. Development-led globalization: To- wards sustainable and inclusive development paths. en cours en matière de régulation commerciaux bilatéraux désavan- 11 Henn M. Août 2012. « On observe une corrélation entre la spéculation et les n,31 économique ou financière : élargis- tageux . Dans ce cadre, les thèses hausses de prix ». Défis Sud n°108. 12 Le Monde. 13/09/2012. La spéculation coupable sement du G7 au G20, renforcement protectionnistes reviennent sur le de la flambée des prix des aliments ? 13 Oxfam International. September 2012. des institutions internationales, devant de la scène, en préconisant Oxfam’s Strategic Plan 2013-2019. 14 The Dutch Association of . création d’une organisation mon- l’instauration de barrières non-ta- 2011. Fair trade facts and figures. A Suc- cess story for Producers and Consumers. 15 Villechenon A. 26/09/2012. « Made in Ame- rica », le retour ? Blog Le Monde. notES 16 Grandclaude M. 2012. Premiers pas en économie. 17 Oxfam International. September 2012. Oxfam’s Strategic Plan 2013-2019. c Par analogie avec la ‘Françafrique’, la Chinafrique normes dans le domaine de la stabilité financière. 18 Center for Global Development. Septem- désigne les relations multilatérales privilégiées j Cette réforme, engagée par l’administration Obama, ber 2012. Where Will the World’s Poor Live? entre la Chine et les États africains. Cette relation est considérée comme l’une des plus importantes An Update on Global Poverty and the New est essentiellement basée sur la fourniture de révisions du cadre réglementaire depuis le New Deal, Bottom Billion - Working Paper 305. matières premières par l’Afrique à la Chine, celle-ci inversant – au moins partiellement – le mouvement 19 Willi C. Mai 2012. Vers une économie « verte » et investissant en échange dans le développement de dérégulation financière engagé depuis R. Reagan. sociale ? Analyse Oxfam-Magasins du monde. du continent, en particulier les infrastructures. k Markets In Financial Instruments Directive. 20 Jackson T. 2010. Prospérité sans d Signés en 1944, les accords de Bretton Woods l Des avancées sur la TFF, aussi appelée taxe croissance. Ed. De Boek. sont des accords économiques ayant dessiné les Tobin ou Robin des bois, ont notamment eu lieu 21 Willi C. Mai 2012. Vers une économie « verte » et grandes lignes du système financier international de depuis le Conseil européen de mars 2011. Elle sociale ? Analyse Oxfam-Magasins du monde. l’après-guerre. Leur objectif principal fut de favoriser fait aussi l’objet d’une loi en France depuis le 29 22 Défis Sud. Mai 2011. Des graines au la reconstruction et le développement économique février dernier (même si elle reste très limitée). cœur des crises alimentaires. des pays touchés par la guerre. Créés à leur suite de m Même si le processus était déjà considérablement 23 Oxfam International. 04/10/2012. « Notre terre, ces accords, le FMI et la Banque mondiale étaient à ralenti par de multiples oppositions internes. notre vie ». Halte à la ruée mondiale sur les terres. l’origine destinées à réguler la finance mondiale (à Exemples : oppositions entre pays riches et 24 Le Monde. 12/06/2012. L’accaparement l’opposé du consensus de Washington actuel, qui émergents sur les subventions agricoles, entre USA caché des ressources en eau de l’Afrique. concrétise le tournant libéral des années 70-80). et UE sur les mesures d’exception culturelle, entre 25 Défis Sud. Décembre 2011. « Un pro- e Généralement localisés dans les paradis fiscaux, USA et émergents sur les médicaments génériques, cessus de bénéfice mutuel ». ce sont des fonds d’investissement dont les etc. Ces processus intergouvernementaux ont été 26 De Schutter O. 20/12/2010. Rapport du Rap- stratégies ne sont soumises à aucune restriction dénommés « zombies multilatéraux » (titubant porteur spécial sur le droit à l’alimentation. juridique et sont réservés aux plus fortunés. sans cesse, sans jamais expirer tout à fait). Assemblée générale des Nations Unies. f A titre d’exemple, 55% des exportations de la n Exemple : l’accord de partenariat économique 27 Rydberg E. 2010. Petit manuel de Chine sont réalisées par des firmes transna- Cariforum signé par l’UE avec 15 pays des Caraïbes, contre-propagande économique. tionales étrangères installées en Chine ou des qui remplace les systèmes de préférences 28 Le Monde. 02/04/09. Régulation de la joint-ventures. Voir également l’ouvrage de généralisées (concessions commerciales pro- finance : ce que va proposer le G20. H. El Karoui ‘Réinventer l’occident’ (2011). développement) par des accords dits réciproques 29 Wikipedia. Frank Wall Street Reform g Classement établi par la Banque mondiale. (pour tout avantage obtenu, le PMA devra octroyer and Consumer Protection Act. h Rio, négociations sur le climat, etc., à l’exception un avantage similaire à l’UE). Ce type d’accord 30 Là-bas. Juillet 2012. Taxe sur les transac- notable du sommet de Nagoya sur la biodiversité. prouve que l’UE n’hésite pas à se servir de sa tions financières, une utopie réalisée ? i Le Conseil de stabilité financière, qui remplace position de force pour s’imposer face aux PMA. 31 Intal. 03/08/2012. UE : des intérêts le Forum de stabilité financière, regroupe 26 o C’est un ‘filtrage’ des importations en fonction de qui priment le développement. autorités financières nationales (banques centrales, normes sociales (ex. respect du droit inter- 32 Grandclaude M. 2012. Premiers pas en économie. ministères des finances,...), plusieurs organisations national du travail) ou environnementales (ex. 33 Le Monde. 28/08/2012. La mondialisation internationales et groupements élaborant des interdiction des pesticides les plus dangereux). solidaire au service de la croissance.

10 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 Chapitre 2 : tendances globales du commerce équitable

Le commerce mondial conventionnel génère de profondes inégalités. Face à ces injustices, le commerce équitable se veut une réponse. Une réponse concrète et immédiate, en aidant les petits producteurs et travailleurs à se développer et à s’autonomiser, mais aussi de manière plus structurelle, en contribuant à changer les règles du commerce mondial. L’objectif de cette partie de l’étude n’est pas de faire un historique du commerce équitable, développé et détaillé par ailleurs dans de nombreux ouvrages et articlesa, mais d’identifier les tendances récentes du secteur.

Forte croissance (7.5% de parts de marché en Bel- consommaient pour €681000 de du secteur équitable gique, 50% en Suisse). Selon FLO, produits équitables, principale- le total de ces ventes équitables ment les communes, notamment Premier constat : le commerce équi- bénéficieraient à plus de 1.2 mil- dans le cadre des FairTradeGe- table connait depuis maintenant lions de producteurs et travail- meente et Communes Du Com- plus d’une décennie un développe- leursc,3. merce Equitable (CDCE)e. ment important dans le monde, • En Europe, le taux de croissance comme l’attestent la croissance des annuelle des ventes de commerce A première vue, l’équitable semble volumes de vente, la diversification équitable entre 2005 et 2010 était donc plutôt bien traverser la crise des gammes de produits et la mul- en moyenne de 20% d,4. économique. Mais ces chiffres tiplication et la consolidation des • En Belgique, les ventes de com- cachent en réalité de fortes dispa- acteurs. Quelques chiffres en merce équitable ont progressé de rités. Après une résistance initiale, donnent un aperçu : 83% entre 2001 et 20105. Ce déve- la situation s’est ainsi dégradée • Les ventes dans le monde de pro- loppement a concerné à la fois les pour de nombreux acteurs, notam- duits labellisés par FLO (Fairtrade magasins du monde et la grande ment certaines organisations pion- Labelling Organisation, environ distribution, mais cette dernière a nières ou de commerce de détail. 80% de l’équitable alimentaire cru plus vite et a dépassé les Exemple : Intermon Oxfam en Es- dans 25 pays) s’élevaient à €4,9 ventes des magasins du monde en pagne, qui a vu son chiffre d’affaires milliards en 2011, en croissance 20076. Parallèlement, 90% des baisser de €8 à €6 millions de 2008 de 12% par rapport à 2010b. Le consommateurs belges à 2010, ou encore Oxfam Wereldwin- Royaume-Uni et les Etats-Unis connaissent en 2011 le commerce kels, dont les ventes depuis 2010 restent, de loin, en tête, avec res- équitable (majoritairement via les ont décliné dans toutes les catégo- pectivement € 1.5 et 1 milliards de produits référents Oxfam et Max ries, l’obligeant à une difficile res- ventes1. Les produits alimentaires Havelaar), avec un niveau de tructuration8. Oxfam-Magasins du représentent près des 3/4 des confiance supérieur à 7/107. Monde semble mieux s’en sortir, son ventes, mais les autres secteurs • L’achat de produits équitables en chiffre d’affaire étant passé de (mode et textile, déco, cosmé- milieu professionnel a nettement €6.11 à €6.17 millions en 2010f, tique) se développent de manière progressé, notamment dans les essentiellement du fait des produits importante. La proportion s’est entreprises (B2B), sous l’effet des artisanaux et des cosmétiques9. inversée en 20 ans puisqu’en 1992, politiques RSE (responsabilité C’est encore plus compliqué du côté les produits alimentaires ne repré- sociétale des entreprises) et des des petits opérateurs : certains, tels sentaient qu’environ 20% du total2. bénéfices en termes d’image / ges- ‘Latino Fierros’, ‘La Pachamama’ ou Le produit équitable le plus vendu tion du personnel. En 2006, les encore ‘Sjamma’, ont vu leur chiffre dans le monde reste la banane autorités publiques belges d’affaires se contracter fortement,

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 11 tandis que d’autres disparaissaient Diversification des voie à de nombreux autres entrepre- purement et simplement (ex. ‘Tout produits, services neurs indépendants. Exemples : l’Or du Monde’ à Bruxelles)10. et organisations ‘Ethic Store’ (ventes par Internet et Ainsi, malgré une professionnalisa- B2B), ‘Satya’ (vêtements), ‘Vino Mun- Ce type d’élargissement des tion et une orientation de plus en do’ (vin), ‘Emile’ (ventes à domicile gammes de produits est une autre plus commerciale11, nombre des d’après le modèle Tupperware), grande tendance, sous l’effet de la acteurs du commerce équitable ont ‘Ozfair’ (boutique à Bruxelles), Alter- croissance générale du secteur. Max des difficultés à survivre, sous l’ef- mundi (réseau de magasins équi- Havelaar Belgique labellise ainsi fet combiné de la crise économique, tables en France), etc. L’émergence aujourd’hui plus de 2000 produits, du prix élevé des matières premières de cette « 3ème vague »i a été favori- comprenant fruits secs, biscuits, (qui ne peuvent être intégralement sée par plusieurs facteurs, notam- confitures ou même du linge de répercutés sur les prix, sous peine ment la croissance générale du sec- table, des ballons de sport et mé- de rapidement se retrouver ‘hors- teur, l’existence de niches taux précieuxg,15. Autre exemple : marché’) et de la compétition crois- commerciales (vin, chocolats haut Delhaize, qui en octobre 2011 est sante de la grande distribution12. de gamme) ou de nouveaux canaux passé de 42 à 65 références alimen- Celle-ci, attirée par les taux de de distribution (ventes par Internet, taires et a introduit une nouvelle croissance élevés du secteur, offre B2B)19. gamme de textiles composée de 73 une quantité croissante de produits produits bio et équitable (marque équitables en marque propre, le plus ‘Delhaize Care’)16. L’un des secteurs Industrialisation du souvent garantis par différents sys- les plus dynamiques, à la fois en commerce équitable tèmes de certification. Exemples : termes de croissance17 et de créa- ‘Colibri’ de Colruyt, ‘Solidair’ de Car- Le secteur du commerce équitable tion de produits, est celui des cos- refour, ‘Fairglobe’ de Lidl ou encore a atteint une phase de maturité, métiques naturels et biologiques, à la marque Delhaize, qui certifie synonyme de croissance, de diver- l’exemple des gammes Natyr (créa- aujourd’hui comme équitable l’en- sification et de professionnalisa- tion en 2004 par Gala Cosmetici pour semble de ses cafés13. Conséquence tion. Malheureusement, à l’instar du CTM), ou Thémis. Dans le directe, les organismes de labelli- secteur biologique20, cette matura- secteur des services, des organi- sation connaissent également une tion ne se fait pas sans dérives sations telles que ‘Tourisme autre- forte croissance, à l’image de Max sociales ou environnementales. ment’, ‘Altervoyages’ ou ‘Minka’ Havelaar Belgique (+7% en 2010, développent des initiatives de tou- +10% en 2011, après un taux de Le principal débat concerne l’indus- risme équitable et solidaire18. croissance record de 47% en 2007). trialisation de l’équitable. Défendu par un ensemble d’acteurs de l’équi- Même s’ils ont été quelque peu ‘écré- Malgré la forte concurrence, cer- table que l’on peut appeler les més’ par la crise, de nombreuses tains des nouveaux acteurs tirent « pragmatiques » j, ce phénomène activités entrepreneuriales indépen- leur épingle du jeu. Ethiquable est apparu dans les années 80 avec dantes sont par ailleurs apparues ces Benelux par exemple, qui d’après la certification. Celle-ci, en assurant dernières années. Exemple : ‘Citizen son directeur Vincent De Grelle, la traçabilité des conditions de pro- Dream’, qui bien qu’aujourd’hui dis- « affiche une belle croissance, de duction et de fabrication des pro- paru du fait de problèmes de gestion, plus de 40% par an », permise no- duits, a ouvert l’équitable à des a initié une nouvelle forme de com- tamment par « une stratégie de acteurs extérieurs, c’est-à-dire des merce équitable. Créé en 1998, ce diversification des canaux de vente magasins et entreprises non spé- réseau de magasins s’est concentré – grande distribution et magasins cialisés. On retrouve parmi ces der- sur les aspects qualité et marketing spécialisés – et des gammes de niers, que l’on peut appeler les des produits plutôt que la mise en produits »14. « stratèges », des Grandes et avant des producteurs, une forme de Moyennes Surfaces (GMS) ou des professionnalisation qui a ouvert la multinationales21. Ces stratèges

12 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 sont le plus souvent de grandes Figure 1. Dimensions des organisations de commerce équitable structures qui ne pratiquent le com- merce équitable qu’à la marge et qui sont essentiellement motivés par l’obtention d’un avantage concur- rentiel fondé sur la différenciation.

Ainsi, le développement de la certi- fication (on parle de filière labellisée) a permis d’élargir considérablement le nombre de consommateurs, en faisant « passer la consommation de produits équitables d’un acte militant à une consommation de sur le marché mondial globalisé26. un système de certification, qui masse »22. On peut très grossière- A l’opposé des pragmatiques et des appose ensuite un label sur les pro- ment associer à l’industrialisation stratèges, on trouve les « radicaux ». duits), et les radicaux à la filière un ensemble de pratiques emprun- Selon eux, le soutien des produc- intégrée (contrôle de l’ensemble de tées au privé et qui contribuent à teurs via la vente des produits du la chaine d’approvisionnement par l’augmentation des parts de marché commerce équitable est important, un seul acteur). La réalité est cepen- du commerce équitable : les mais le commerce équitable est dant plus complexe. Certains ac- marques distributeurs équitables, surtout un « outil pour modifier le teurs opèrent simultanément dans le commerce équitable de planta- modèle économique dominant »27. différentes filières. Ils importent et tion, les techniques marketingk, etc. En d’autres mots, c’est la concréti- distribuent à la fois des produits sation d’un vaste projet politique certifiés et des produits de filières La logique des pragmatiques et des visant à transformer les règles et les spécialiséesm, essayant de concilier stratèges est simple : plus grandes pratiques du commerce internatio- les dimensions économiques, so- sont les parts de marché, plus les nal. Les radicaux, le plus souvent ciales et politiques du commerce débouchés (et donc l’impact) pour des acteurs historiques du com- équitable29,30. les producteurs du Sud sont impor- merce équitable, axent davantage tants. Ces derniers sont d’ailleurs leur action sur les dimensions so- Néanmoins, l’entrée des stratèges souvent les premiers à réclamer un ciales (support aux producteurs) et dans le secteur a entrainé une série meilleur accès aux marchés23. L’ac- politiques. Les aspects politiques de dérives, dont voici un bref aperçu : croissement des volumes de vente recouvrent le plaidoyer (promotion • Récupération de l’image et des améliore par ailleurs la notoriété des du commerce équitable auprès des taux de croissance de l’équitable labels, ce qui renforce encore les autorités publiques mais aussi des par des acteurs qui ne pratiquent ventes24. Au final, les pragmatiques acteurs privés), la régulation des le commerce équitable qu’à la et stratèges mettent davantage politiques commerciales internatio- ‘marge’ (ex. marques distribu- l’accent sur la dimension écono- nales (plaidoyer allant au-delà de la teurs). Le commerce équitable mique que sur les facteurs socio- défense du commerce équitable en n’est pour ces acteurs qu’une politiques (figure 1)25. tant que tel) et la sensibilisation des ‘niche’ commerciale supplémen- consommateurs / citoyens (princi- taire, qui permet de différencier un A noter que le phénomène d’indus- palement dans l’hémisphère Nord)28. produit d’un autre aux yeux d’un trialisation est principalement asso- consommateur final de plus en cié aux produits alimentaires car ce Une première approximation plus préoccupé par les facteurs sont des ‘commoditiesl‘ qui peuvent consiste à associer les pragma- éthiquesn,o. être fournies par différents fournis- tiques et les stratèges à la filière • Prélèvement de marges brutes seurs facilement interchangeables labellisée (contrôle de la filière via similaires, voire supérieures, au

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 13 commerce traditionnel, avec in l’arrière de l’emballage) et/ou de sifs, peut être considéré comme , un faible impact en termes de le communiquer au niveau institu- une forme de concurrence dé- trésorerie31. tionnel (site internet, rapports RSE, loyale. • Elargissement au commerce équi- etc.)34. FLO clame que cette initia- • Forme de ‘recommodification’v des table des pratiques classiques de tive bénéficierait largement aux matières premières agricoles. Les la grande distribution : absence producteurs, via les augmenta- volumes de production importants d’engagement sur la durée ou tions des volumes de vente et qu’implique l’industrialisation de d’avance sur les commandes, l’allocation des ressources obte- l’équitable exigent qu’un nombre menace de déréférencement, nues à des programmes de soutien élevé de fournisseurs interchan- longs délais de paiement, pression technique. Néanmoins, cette en- geables puissent assurer un ap- sur les prix entrainant l’élimination torse à la règle ‘All that can be’s provisionnement régulier en pro- des acteurs les plus faibles, etc.32. constituerait une nouvelle forme duits équitables relativement Le documentaire ‘Equitable : à tout de nivellement par le bas du mo- anonymes. En ce sens, la filière prix ?’p donne ainsi l’exemple de dèle FLO, sous la pression des labellisée, tout en différenciant les Lobodis, un acteur historique du multinationales et des labels produits auprès du consommateur commerce équitable en France, concurrentst. dans une logique de valorisa- qui avait développé avec succès • Travail avec les grandes planta- tion / protection de la marque, une filière de chocolat équitable tions ou via l’agriculture de contra- contribue à la ‘recommodification’ pour Carrefour. Ce dernier s’est tu, afin de maximiser les volumes de la filière équitablew,37. empressé d’imiter les produits de vente. Exemple avec Fair Trade • Dérives environnementales, no- Lobodis sous sa propre marque, USA, qui a quitté la franchise FLO tamment dans la diversification puis les a éjectés des rayons, en en janvier 2012, afin de pouvoir des produits. Exemple : l’importa- jouant sur les volumes de com- davantage travailler avec les tion par avion de produits avec mande et les prix auprès du trans- grandes plantations35. Son objec- équivalent local, à l’exemple des formateur de cacaoq. tif est de doubler ses ventes aux haricots verts importés du Kenya38. • Cautionnement des règles du com- États-Unis d’ici 2015, en dévelop- • Valorisation de l’économie d’ex- merce mondial. Ce type de com- pant son propre système de cer- portation par rapport à l’économie merce équitable s’inscrit complè- tification ‘Fair Trade For All ‘36. De domestique, avec les risques de tement dans le cadre de l’économie manière générale, la certification délaissement des cultures vi- libérale mondialisée, en soumet- des petits producteurs et des vrières et de dépendance vis-à-vis tant les producteurs du Sud aux plantations étant deux métiers des marchés mondiaux39. contraintes d’efficacité et de com- relativement différents, l’exten- pétitivité du système capitaliste33. sion de la certification équitable Le tableau 1 résume les arguments • Risques de pression sur les cri- aux plantations peut considéra- pro et anti industrialisation. Le prin- tères / modes de fonctionnement blement augmenter les risques cipal enjeu est de trouver un équi- des labels afin de les adapter aux d’abus et de violations des cri- libre entre le développement quan- exigences des multinationales. tères. Un exemple récent est le titatif (augmentation des parts de Exemple : FLO réfléchit à un nou- constat de nombreuses violations marché) et les aspects qualitatifs veau modèle commercial basé sur des règles de l’Organisation Inter- (exigence des critères) du com- une certification ‘ingrédients’ plu- nationale du Travail (OIT) dans des merce équitable. Les tensions pro- tôt que ‘produit’. Nommé ‘New plantations de canne à sucre cer- viennent notamment du fait que Business Option’, ce modèle per- tifiées FLO aux iles Fidji. Plus fon- l’extension quantitative se fait en mettrait aux entreprises s’enga- damentalement, le regroupement, grande partie au travers de stan- geant à s’approvisionner à hauteur au sein d’un même système de dards de plus en plus nombreux et de X%11 en cacao ou sucre équi- certification, des petits produc- de plus en plus ‘light’40. tables d’apposer le logo Fairtrade teurs avec les plantations, aux sur l’ensemble de ses produits (sur modes de production plus inten-

14 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 Tableau 1. Arguments pro et anti industrialisation du commerce équitable

Avantages Inconvénients

• Accroissement des volumes et donc • Récupération par des acteurs de niche de l’image et des taux de des débouchés pour les petits croissance de l’équitable producteurs • Cautionnement des règles du commerce mondial • Accroissement de la visibilité du • Risque de pression sur les critères commerce équitable • Risques sociaux et environnementaux liés aux plantations • Professionnalisation du secteur • Forme de ‘recommodification’ des matières premières agricoles (marketing, qualité des produits, • Dérives environnementales recrutement, etc.) • Valorisation de l’économie d’exportation au détriment de l’économie domestique • Prélèvement de marges égales ou supérieures au commerce conventionnel • Elargissement au commerce équitable des pratiques commerciales conventionnelles • Renforcement de la dépendance des producteurs vis-à-vis des marchés mondiaux

aa Multiplication FINE , en vue d’harmoniser leurs leur label biologique existant (ex. des labels pratiques et leurs normes. Résultat, Ecocert en France ou Naturland en au début des années 2000, deux Allemagne). Cela correspond à un La multiplication des labels équi- systèmes dominaient le secteur : le phénomène plus général d’homo- tables ou pseudo-équitables est système FLO, une labellisation ‘pro- généisation des labels durables, une autre grande tendance du ‘mar- duits’ (essentiellement alimen- dans une démarche de labellisation ché’ de l’équitable, en conséquence taires), et le système WFTO, une intégrale, c’est à dire sur toutes les directe de l’industrialisation. Histo- garantie ‘organisations’ (principa- composantes du développement riquement, le processus inverse a lement le secteur de l’artisanat)bb. durable41. On voit par exemple de été observé : le premier label, Max plus en plus de labels équitables se Havelaar, créé en Hollande en 1988, Depuis, les succès commerciaux du verdir et des labels environnemen- a fusionné en 1997 avec les autres commerce équitable (et de manière taux devenir plus “sociaux” (voir systèmes de certification coexistant plus générale durable) ont éveillé encadré ‘vers un super label’). Prin- au niveau internationalx, l’allemand l’intérêt de nombreux autres acteurs cipal désavantage de ce type de TransFair et le Britannique Fairtrade, privés, qui ont créé des labels selon label ‘Bio équitable’, leurs coûts de pour créer FLO (Fairtrade Labelling leurs propres standards. Exemples : certification et d’adaptation aux Organisations)18. De même en 1998, Fairwild et Fair for Life en 2006 (IMO), critères biologiques, souvent trop les principaux organismes interna- Ecocert Equitable en 2007 (Ecocert) élevés pour les producteurs les plus tionaux du commerce équitable ou Naturland Fair en 2009 (Natur- pauvres42. – FLO, WFTO (World Fair Trade Orga- land). nisation)y (ex-IFAT), NEWS (au- L’un des points communs de ces Dans cet environnement de plus en jourd’hui intégré au sein de WFTO exemples est qu’ils correspondent plus concurrentiel, des labels de Europe) et l’EFTA – se sont regrou- tous à l’ajout par un organisme cer- commerce durable se sont dévelop- pés au sein d’un consensus appelé tificateur de critères équitables à pés en bénéficiant de leur flou iden-

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 15 tif 100% d’approvisionnement en Qu’est-ce qu’un label ? 43 thé certifié RFA pour ses marques Un label est une marque spéciale, créée par un syndicat professionnel ‘Lipton’ et ‘PG Tips’ en 2015. Pro- ou un organisme parapublic, et dont le logo est apposé sur un produit blème, une étude datant de 2011 destiné à la vente, pour en certifier l’origine, la qualité et les conditions a constaté des violations nom- de fabrication, en conformité avec des normes préétablies dans un breuses et sévères des droits du cahier des charges. travail dans ces plantations certi- fiées RFA45. Les labels peuvent être publics. Dans ce cas, les critères sont définis • Nombre de ces entreprises dis- par un organisme public, en concertation avec les parties prenantes. posent de plantureux services de La certification peut s’appuyer sur des référentiels privés, mais homo- lobbying qui défendent les règles logués par les pouvoirs publics. Exemples de labels publics : label bio- commerciales que les acteurs tra- logique Européen, label AB (Agriculture Biologique) français, etc. L’em- ditionnels du commerce équitable ploi du terme ‘label’ pour une marque privée collective est autorisé mais s’échinent à combattre sur le ter- 3 exigences doivent alors être respectées : rain politique46. • Les caractéristiques sont déterminées collectivement par une struc- ture professionnelle. Autre problème lié à cette multipli- • Le contrôle est exercé par un organisme certificateur. cation des systèmes de certification • Dans le cas des produits agricoles et alimentaires, l’emploi du mot privés : leur mise en concurrence ne doit pas prêter à confusion avec un label agricole, c’est à dire qu’il accrue, notamment par les entre- ne doit pas se présenter comme un label de qualité. prises et la grande distribution, peut entrainer l’ensemble des labels vers le bas. D’autre part, la viabilité du titaire, notamment leur proximité Un nombre croissant d’entreprises business d’un organisme certifica- avec les labels du commerce équi- multinationales utilisent ces labels, teur étant liée au nombre de clients table. Exemples les plus couram- principalement comme outils certifiés, le risque est important qu’il ment cités : Rainforest Alliance d’amélioration de leur approvision- cède aux différentes pressions (RFA), UTZ Certified ou encore le code nement en matières premières (qua- extérieures pour diminuer le niveau de conduite 4C dans le domaine du lité et quantité). En cela, elles béné- d’exigence des critères. Ainsi, l’ONG café. Ces systèmes de garantie ont ficient d’un ‘effet de halo équitable’ Rainforest Alliance a accepté de des critères relativement forts aux et améliorent à bon prix leur image revoir les critères environnementaux niveaux social (au minimum les de marque, du fait des exigences de son label à la baisse, suite à la normes de l’OIT) ou environnemental économiques moins élevées des pression exercée par son principal (notamment RFA) mais se conten- labels durables et de la confusion client, la multinationale Chiquita. De tent souvent au niveau économique créée chez les consommateurs. même, une enquête sur les pra- de programmes de soutien aux pro- Pire, elles sont souvent coupables tiques de plusieurs chaînes britan- ducteurs (ex. techniques de produc- de pratiques complétement en inco- niques de la grande distribution fait tion ou de gestion leur permettant hérence avec les principes du com- état de pressions exercées par ces d’améliorer les rendements et la merce équitable. chaînes sur les critères de com- qualité des produits, accès pour les merce équitable de FLO, afin de les producteurs à l’information sur les Exemples : adapter au modèle plus rentable des marchés, etc.). Ces démarches ne • Douwe Egberts qui garantit UTZ grandes plantations47. Cette pres- peuvent être assimilées au com- certains de ses cafés mais qui sion des entreprises / distributeurs merce équitable puisqu’elles n’in- attaque parallèlement des pou- vers les organismes certificateurs cluent pas de prix minimum garanti, voirs publics faisant le choix du est en outre transmise aux petits ni de prime de développement ou de commerce équitable. producteurs. Comme on l’a vu, les préfinancement des commandes44. • Unilever, qui se fixe comme objec-

16 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 énormes volumes qu’implique une régulation pourraient ne plus suffire. produits tels que les épices) aug- relation commerciale avec la grande Cela discrimine in fine les produc- mente quelque peu la confusion. On distribution offrent de nombreuses teurs les plus marginalisés du fait pourrait donc atteindre ici les limites opportunités de développement de l’augmentation des coûts de de la logique de certification, le mais aussi une forte relation de certification. consommateur étant de nouveau dépendance. La menace de obligé d’aller voir ce qui se cache « decertification » déséquilibre Enfin et surtout, la multiplication derrière chacune des étiquettes51. ainsi le rapport de force, à la défa- des labels entraine une grande L’apparition d’applications pour veur des organisations de produc- confusion chez les consommateurs. smart phones fournissant une série teurs, s’ils ont fait l’erreur de ne pas Comme l’indique la CNUCED dans un d’informations détaillées après lec- assez se diversifier48. rapport de 2006, « la majorité des ture du code barre pourrait être une consommateurs ne peuvent com- solution si elle n’était pas discrimi- Autre effet pervers potentiel : la prendre les subtilités des différents nante. généralisation de la labellisation. programmes de certification »50. Les marques traditionnelles du com- On le voit, la multiplication des sys- merce équitable (principalement de Face à cette grande hétérogénéité tèmes de garantie aux niveaux la filière intégrée), qui pouvaient des labels, certains d’entre eux d’engagement très différents a de auparavant se contenter de leur renoncent à tout achat équitable, nombreux désavantages. Néan- notoriété importante et de la ou dans le doute, choisissent les moins, ce développement du bu- confiance que leur accordaient les produits les moins chers, souvent siness de la certification privée consommateurs49, pourraient se voir synonymes de moins-disant social apporte quelques bénéfices. On obliger d’utiliser de manière crois- ou environnemental. De plus, la peut ainsi voir les formes de certi- sante les labels. Ainsi, dans un variabilité des critères de labels fication ‘light’ comme une première contexte de scepticisme accru des équitables tels que FLO (ex. le prix étape vers les labels plus exigeants. consommateurs, les formes d’auto- minimum n’est pas garanti sur des L’existence de nombreux systèmes

Vers un super label ? Dans un marché des labels très concurrentiel et de plus en plus critiqué, une tendance se dessine : la conver- gence des différents types de labels vers une forme de label intégral, prenant en compte l’ensemble des com- posantes du développement durable, et ce sur l’entièreté du cycle de vie des produits. Exemples : le label FLO qui se ‘verdit’ (ex. réduction des pesticides) et qui tente de progresser le long de la chaine de valeur, ou Rainfo- rest Alliance, un label environnemental qui se “socialise”52. Cette tendance est en soi positive puisqu’elle permet de tendre vers une homogénéisation des labels et d’améliorer la cohérence globale des produits de consomma- tion. La demande en Asie pour des produits respectueux de l’environnement a par exemple beaucoup aug- menté ces dernières années et les artisans de commerce équitable utilisent en réponse de plus en plus de matériaux recyclés dans leurs produits53. Deux bémols cependant. Premièrement le prix. Une certification à la fois biologique et équitable des modes de production peut augmenter de manière significative le cout total (d’autant plus que les critères biologiques requièrent beaucoup de contrôles de terrain)54. Deuxièmement la faisabilité technique de la certification. A vouloir contrôler tous les domaines, à toutes les étapes et sur un grand nombre de produits différents, le risque est grand de perdre expertise et fiabilité, tel FLO certifiant la fabrication de ballons de sport ou de minerais précieux, alors qu’il est à la base un certificateur agricole. On le voit dans le domaine environnemental, où des tentatives pour développer un étiquetage environnemental intégralcc (couvrant les problématiques de pollution, de consommation d’eau, d’énergie, etc.) se heurtent à d’importantes limites méthodologiques (notamment les différences entre les systèmes d’analyse existants) et de récoltes de données55,56.

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 17 de certification est en outre une audits externes, visites des autres solution idéale ? Aussi bien en Bel- opportunité pour les organisations membres et outil d’introduction de gique qu’au niveau Européen, le de commerce équitable de choisir commentaires ou plaintes)58. concept de commerce équitable les labels correspondant le mieux à Enfin, certains des nouveaux labels n’est aujourd’hui pas protégé par la leurs objectifs. Exemple : Ethiquable créés constituent une forme de loi, malgré sa large reconnaissance utilise maintenant 3 labels diffé- résistance aux phénomènes d’in- sociale61. Pourtant, un tel cadre rents, Max Havelaar, Ecocert Equi- dustrialisation et de mise en concur- légal permettrait de sécuriser le table et Tu Simbolo57. rence de l’équitable. Le label ‘Tu secteur : On pourrait même voir dans ce phé- Simbolo’ du CLACdd a ainsi été créé • Les entreprises / asbl seraient nomène une opportunité de mise en en novembre 2010 par et pour des mieux à même de lancer une nou- concurrence, afin de tirer les cri- petits producteurs d’Amérique la- velle activité, grâce à un cadre tères vers le haut ou professionna- tine, en réaction à l’ouverture du sécurisant les apports financiers, liser les pratiques de certains ac- label Fairtrade aux grandes planta- qu’ils soient privés (prêts) ou pu- teurs. C’est l’une des raisons pour tions (bananes, fruits et légumes blics (subventions). lesquelles la WFTO lance prochai- frais, jus de fruits, thé, vin et fleurs)59. • Les consommateurs pourraient nement une nouvelle version de sa distinguer clairement les produits garantie ‘organisations’, le ‘Fair du commerce équitable. Trade (Guarantee) System’. Ce sys- Absence • Les pouvoirs publics (plus ou moins tème sera plus fiable et crédible que de cadre légal 1 million de fonctionnaires en Bel- le précédent, grâce à une série gique) pourraient lancer sans Face à ces risques de ‘fair washing’, d’indicateurs spécifiques et des risques judiciaires leurs appels l’instauration d’un cadre légal, type outils de vérification de l’engage- d’offres sur les marchés publics62. Bio Européen, ne serait-elle pas la ment (rapports d’auto-évaluation, Ce qui aurait également comme conséquence d’augmenter et de garantir une part importante des Commerce équitable, commerce éthique, durable volumes de vente des organisa- Le commerce équitable est défini comme« un partenariat commercial, tions de commerce équitable. fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, dont l’objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial »ee. Un pays ayant fait quelques progrès Historiquement, ce commerce se concentre essentiellement sur les dans ce domaine est la France. aspects économiques envers les petits producteurs du Sud (prime de Après 4 ans de débat au sein d’une développement, prix minimum, relation commerciale sur la durée, etc.), commission ayant réuni organisa- tout en incluant des critères sociaux et environnementaux. tions de commerce équitable, dis- Le commerce éthique encourage les entreprises à faire respecter les tributeurs, syndicats et consomma- droits du travail tels que définis par l’OIT (conditions de travail décentes, teurs, un texte de référencegg, base pas de travail forcé ou des enfants, etc.), dans le cadre du marché à la fois d’une définition légale du conventionnel60. Il cible donc les aspects sociaux, pour les travailleurs commerce équitable et d’une dé- de centres de production déjà développés. marche de normalisation, a été Le commerce durable est un concept plus général, qui prend en compte publié par l’AFNORhh en janvier 2006. toutes les composantes de la durabilité (économique, sociale et envi- Mais les débats internes sur la nor- ronnementale) : création de valeur économique, réduction de la pau- malisation ‘produits’ vs. ‘organisa- vreté et des inégalités, régénération des ressources environnementales tions’ii, et de manière plus générale et cadre discret de gouvernance caractérisé par l’ouverture, la trans- la difficulté à normaliser des parence et l’imputabilitéff. Il englobe donc les notions de commerces échanges commerciaux plutôt que équitable et éthique mais il est aussi beaucoup plus vague dans la des caractéristiques physiques de définition de ses critères. produit, ont quelque peu vidé le texte de sa substancejj. Parallèle-

18 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 ment, un article de loikk a été voté Les autorités publiques et le commerce équitable en 2005 à destination des petites En attendant la réalisation d’un cadre légal belge ou européen, les et moyennes entreprises (PME). Ce autorités publiques belges soutiennent le commerce équitable sous texte fournit les conditions de re- diverses formes, notamment au travers du plan fédéral de développement connaissance des organismes cer- durable ainsi que sur les marchés publics. Au niveau local, les campagnes tificateurs du commerce équitable ‘Ca passe par ma commune’mm et ‘Communes du commerce équitable’nn, par un organisme officiel (la Com- menées par Oxfam-Magasins du monde et ses partenaires, ont permis mission nationale du commerce de faire nettement progresser les achats de produits équitables par les équitable) et selon les exigences communes. De manière plus globale, une avancée importante sur ce d’un référentiel. Ce texte, même s’il sujet des marchés publics a eu lieu le 10 mai 2012, date à laquelle la est moins précis que le texte AFNOR, Cour Européenne de Justice a statué sur un conflit opposant la Com- pourrait servir de fondement à une mission Européenne et la province de Hollande du Nord. L’avis de la Cour législation européenne. indique qu’une autorité publique peut maintenant inclure les critères du commerce équitable plus clairement et plus tôt dans sa procédure L’autre pays le plus avancé en Eu- d’appel d’offreoo. Cette avancée judiciaire va de facto modifier le cadre rope sur ce sujet est l’Italie, où 65 législatif européen en faveur du commerce équitable, dans le cadre de députés ont soumis en mai 2012 au l’actuelle révision de la Directive Européenne sur les marchés publics63. Parlement Italien une proposition de loi qui, de manière similaire à la loi française, propose une définition du On le voit, les initiatives législatives table. Cette charte pourrait ainsi commerce équitable, un système sont limitées en Europe, aussi bien constituer la base d’un futur cadre d’accréditation des organismes cer- en nombre qu’en ambition. La posi- législatif. tificateurs et un registre national tion de la Commission Européenne des organisations de commerce sur le sujet peut être jugée au mieux Néanmoins, toutes les organisations équitable. attentiste – elle laisse les Etats de commerce équitable ne sont pas membres prendre des initiatives – nécessairement favorables à un tel En Belgique, un processus similaire ou au pire hostile – elle considère cadre légal, du moins pas dans a également été initié en 2005, sous qu’un cadre législatif rigide entrave n’importes quelles conditions. la pression des organisations de le dynamisme du marché64. Le L’exemple du cadre législatif euro- commerce équitable et avec le sup- Conseil de la Concurrence Français péen de l’agriculture biologique, port du ‘Trade Development Center’ résume ainsi l’enjeu : « concilier beaucoup critiqué pour son laxisme (TDC) de la Coopération Technique l’octroi de garanties tout en main- et les dérives qu’il a entrainé Belge (CTB), conduisant à 3 propo- tenant une concurrence suffisante (cultures intensives, mécanisation sitions de lois, en provenance de 5 au sein du secteur »65. à outrance, importations massives, partis politiques différents (PS/ exploitation d’une main d’œuvre à s.p.a., cdH/CD&V et Ecolo). Mais Face à ce relatif attentisme, les bas salaires, etc.)66, incite à la pru- l’opposition des partis de droite et acteurs du commerce équitable se dence. En effet, qui dit uniformisa- des entreprisesll (représentées par sont mobilisés en publiant en 2009 tion des critères, dit aussi et souvent la Fédération des Entreprises de la « Charte des Principes du Com- nivellement par le bas. La position Belgique – FEB), conjuguée à la si merce équitable ». Fruit d’une de nombre d’organisations de com- tuation de blocage politique des longue collaboration entre les deux merce équitable est donc que si dernières années, a entrainé l’enli- principaux acteurs du secteur (FLO l’outil qu’est le cadre légal avait un sement du processus d’examen de pour la filière labellisée et WFTO pour effet contreproductif pour les objec- loi au Parlement. La définition d’un la filière intégrée), cette charte tifs globaux du commerce équitable, cadre légal belge est peu donc pro- définit une série de principes faisant mieux vaut se contenter du cadre bable à moyen terme, tant pour des la spécificité du commerce équi- actuel, avec ses imperfections67. raisons politiques que techniques.

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 19 Développement en particulier dans le secteur de Relocalisation du des études d’impact l’artisanat (seulement 4% du total). commerce équitable Concernant les résultats propre- Un autre défi du commerce équitable ment dits, l’analyse montre de nom- Longtemps cantonné à des – directement lié aux problèmes de breux effets positifs mais essentiel- échanges commerciaux solidaires concurrence, de multiplication des lement aux niveaux économiques. Sud-Nord, le commerce équitable labels et d’absence de cadre légal – De nombreuses zones d’ombre per- s’élargit peu à peu au champ local, est celui de l’évaluation de son sistent ainsi quant à l’impact réel aussi bien au Nord qu’au Sud. On impact. du commerce équitable sur les peut voir comme point de départ de groupes bénéficiaires plus particu- cette tendance le rééquilibrage des Les critiques et les rumeurs se mul- lièrement défavorisés, sur l’environ- relations Nord/Sud et notamment tipliantpp, la capacité de survie du nement, sur la légitimité des orga- la forte croissance dans les pays secteur dépendra de la confiance nisations de producteurs et sur le émergeants, conjuguée aux crises que continuerons à lui accorder les développement de leurs réseaux économiques successives dans les consommateurs, confiance elle- institutionnels. pays industrialisésqq. A l’image de la même liée de manière croissante Grèce, la frontière entre un Nord aux analyses d’impact sur les popu- Une des principales recommanda- développé et un Sud sous-déve- lations visées68. La dernière en- tions de ce rapport est de consacrer loppé devient ainsi plus floue. Dans quête d’opinion de la CTB en 2011 une attention plus particulière aux cette optique, le concept de justice montre ainsi que 69% des acheteurs problèmes d’inégalités générées par économique globale, défendu entre belges espèrent, mais n’en sont pas le commerce équitable au niveau autres par Oxfam, prend d’autant certains, que leurs achats de pro- micro-local entre producteurs plus de sens. Ce commerce équi- duits équitables contribuent réel- (hommes / femmes, producteurs / table de proximité cadre également lement au respect des droits des travailleurs, ouvriers perma- avec l’émergence des préoccupa- producteurs et travailleurs, contre nents / temporaires), de la commu- tions environnementales chez le 74% en 2010. Or, même si les ar- nauté élargie (inégalités consommateur et de manière plus naques n’existent pratiquement pas horizontales) ou encore au niveau générale, avec la lutte contre les en Belgique, avoir plus de garanties de la filière (inégalités verticales)71. excès d’une globalisation faisant pousserait 84% des gens à en ache- voyager des pommes d’Afrique du ter plus souvent69. Conclusion de Des efforts importants doivent donc Sud en Europe ou du jus de pomme l’enquête : « Les belges semblent être consacrés aux études d’impact, équitable du Chili à la Belgique72. avoir besoin de réassurances et de tant en termes quantitatifs que qua- garanties sur l’efficacité réelle de litatifs. Il est également primordial Commerce équitable la démarche du commerce équitable d’intensifier les actions d’informa- Sud/Sud et sur l’impact de leurs actions indi- tion, de sensibilisation et de com- viduelles »70. munication vers les consomma- De nombreuses initiatives de com- Une étude de 2010 a établi une car- teurs, mission dévolue entre autres merce équitable Sud/Sud se sont tographie des études d’impact du aux services publics et aux orga- développées ces dernières années. commerce équitable. Sur un total de nismes certificateurs. Une initiative Un rapport de la CTB citait ainsi en 77 études effectuées entre 1998 et originale de ce point de vue est 2009 les exemples de thé et de tex- 2009, 74% portaient sur la région l’entreprise touristique développée tile équitables en Inde, de la marque latino-américaine et caribéenne et par l’organisation française Minka, ‘comerci justo’ en Equateur ou en- 92% sur les filières alimentaires. qui offre aux voyageurs l’opportu- core de plates-formes de commerce Cette surconcentration à la fois nité de venir constater de visu les équitable au Kenya et en Afrique73. géographique et sectorielle révèle effets du commerce équitable au l’énorme travail encore à réaliser, Pérou.

20 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 Ces différentes formes de commerce en outre la fixation d’un prix juste C’est ainsi qu’en 2010, nait en Bel- équitable relocalisé se développent en éliminant les intermédiaires gique la coopérative Faircoop, qui, en réaction, on l’a vu, à l’émergence n’ayant aucune valeur ajoutée. pour chaque litre de lait ‘Fairebel’ d’une classe moyenne dans certains • Enfin, le commerce équitable Sud/ vendu, rémunère de 10 cents sup- pays en voie de développement, Sud bénéficie à l’ensemble de plémentaires ses producteurs. Mal- ainsi qu’à une baisse relative des l’économie locale, en la rendant gré les difficultés, les compromis- débouchés au Nord suite à la crise, moins dépendante aux importa- sions et les critiques (notamment par en particulier dans le secteur de tions (ex. produits à bas prix impor- rapport à l’utilisation du terme ‘fair’), l’artisanat. Mais c’est aussi un tés d’Occident ou de Chine, qui ce lait collecté et transformé loca- moyen pour nombre de petits pro- tuent dans l’œuf les initiatives lement est aujourd’hui vendu dans ducteurs ou artisans de palier à cer- locales). Il améliore également la de nombreux supermarchés belges. tains défauts du commerce équi- résilience des producteurs face De même, le grossiste biologique table classique, en particulier dans aux fluctuations des cours agri- Biosano et la coopérative Biomelk sa forme ‘industrialisée’ : coles, en les incitant à développer ont lancé conjointement en octobre • Il permet de réduire la dépendance les cultures vivrières. Il constitue 2011 le lait biologique et équitable aux marchés équitables du Nord. en cela une déclinaison du concept Biodia. Le cahier des charges et le Exemple : les gros volumes exigés de souveraineté alimentaire74. système de calcul de prix, basé sur par la grande distribution, qui, les coûts de production, a été déve- combinés au caractère plus ver- De nombreux défis restent néan- loppé en collaboration avec l’ONG satile des commandes, sont syno- moins à relever pour développer de Vredeseilanden. Oxfam-Magasins du nymes de forte dépendance aux telles filières Sud/Sud, notamment Monde propose elle depuis plus d’un exportations. Dans le domaine le manque d’infrastructures, l’adap- an des légumes / fruits frais sous agricole, les producteurs su- tation des prix ou produits aux forme de paniers dans certains de bissent en outre une concurrence consommateurs ou encore l’ab- ses magasins et se lance dans la importante de la part des planta- sence de préfinancement75. vente de produits transformés pay- tions. Ce nouveau type de com- sans (démarche ‘Paysans du Nord’, merce équitable, en visant les Commerce équitable voir chapitre 3). touristes et les populations les Nord/Nord plus aisées sur les marchés locaux, En France, Ethiquable avec sa permet aux producteurs de diver- Le principe et les arguments en gamme ‘Paysans d’ici’ (farines, sifier leurs débouchés commer- faveur du commerce équitable Nord/ huiles, vins, etc.) et Alter Eco (légu- ciaux et d’être plus résilients face Nord sont, de manière logique, très mineuses, céréales et oléagineuses aux crises. similaires au commerce équitable – coopérative Corab) ont également • L’impact écologique est réduit. Sud/Sud : les deux sont des formes développé des produits biologiques Même si le transport dans le com- de relocalisation de l’économie en et équitables, de même que CTM merce équitable classique n’est faveur de modèles de production Altromercato en Italie (produits pas la cause principale de pollution durables. C’est suite à la crise du équitables et solidaires “solidale / émissions (voir chapitre 3, ‘cohé- lait, en 2009, qui a vu les prix du lait italiano”) et Gepa en Allemagne (pro- rence environnementale’), il est ici chuter largement en dessous des duits composés uniquement, type quasi nul, ce qui améliore d’autant coûts de production, que le concept lait du Nord et cacao du Sud). Du côté la cohérence de la démarche. de commerce équitable Nord/Nord des certificateurs, l’allemand Natur- • Le caractère local de la vente a réellement décollé en Europe. Les land, originellement un certificateur donne l’opportunité aux produc- images chocs de lait déversé dans biologique, développe depuis 2010 teurs de davantage s’impliquer les champs ont poussé une série des critères de commerce équitable dans leurs communautés et de d’acteurs à se mobiliser pour sauver Nord/Nord sous le logo ‘Naturland sensibiliser leurs concitoyens. des milliers d’agriculteurs au bord Fair’ (ex. lait biologique et équitable Cette forme de circuit court facilite de la faillite. des Alpes bavaroises)76.

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 21 On le voit, les initiatives de com- qu’ils soutiennent : une agriculture globale dans une tendance générale merce équitable Nord/Nord alimen- paysanne (le plus souvent biolo- au ‘verdissement’ de l’équitable. Cer- taire se multiplient en Europe, en gique), aux fortes contributions tains auteurs parlent même d’une 4ème réaction à des situations dans le socio environnementales. Ces ère du commerce équitable, qui se monde agricole vécues comme in- contributions justifient en partie les verrait peu à peu intégré dans le justes. Néanmoins, malgré la bonne avantages économiques du com- concept plus large de commerce foi de la majorité de ces acteurs, la merce équitable Nord/Nord, en durable78. En insérant de plus en plus question venant immédiatement à opposition avec les externalités de de critères environnementaux, les l’esprit est celle de la légitimité : l’agriculture conventionnelle (ex. labels et organisations équitables peut-on réellement appliquer au pollution, homogénéisation des pro- ‘compléteraient’ ainsi les deux autres Nord des critères conçus initiale- duits, dégradation des paysages, dimensions historiquement les plus ment pour les producteurs du Sud ? pertes d’emplois, etc.). De manière fortes du commerce équitable, à Groupe facilement isolable et me- similaire au commerce équitable savoir l’économique et le social. On nacé, ces derniers sont perçus au Sud/Sud, les autres arguments l’a vu, cela correspond à l’émergence, premier abord de manière beaucoup développés incluent la cohérence depuis une dizaine d’années, de pré- plus positive que les agriculteurs du environnementale, les liens sociaux, occupations environnementales de Nord, groupe beaucoup plus hété- la sensibilisation au commerce plus en plus prégnantes chez le rogène et à la réputation ambiva- équitable, l’indépendance écono- consommateur. Les symptômes de lente. Aux fonctions vitales de pro- mique, etc. Enfin, le soutien à ce ce phénomène sont nombreux : men- duction alimentaire, d’aménagement type d’agriculture permet d’atténuer tion de la « contribution au dévelop- du territoire / de la nature s’op- les effets du modèle agricole inten- pement durable » dans la définition posent ainsi la richesse ostentatoire sif sur les marchés du Sud (ex. FINE de 200179, inclusion du principe de certaines exploitations, les gé- formes de dumping par des produits de respect de l’environnement dans néreuses subventions agricoles de agricoles produits de manière inten- les chartes de la PFCE (Plate-forme la politique agricole commune, sive, mécanisée et subventionnée). française du commerce équitable) ou l’indifférence en matière d’environ- de la WFTO, nombreuses études nement ou de sécurité alimentaire Malgré ces arguments, la distinction d’impact environnemental de la part ou encore le caractère corporatiste du commerce équitable Nord/Nord d’organisations équitables (PFCE, extrémiste et parfois violent de la avec les autres agricultures alter- Artisans du Monde, Alter Eco, etc.)80, profession. De ce point de vue, la natives, du type biologique ou local, irruption de labels historiquement proximité géographique avec les n’est pas nécessairement évidente biologiques ou environnementaux consommateurs n’est pas néces- pour le consommateur. C’est pour- dans le secteur (Ecocert, Naturland, sairement un avantage par rapport quoi un travail supplémentaire de etc.), développement par FLO des à des producteurs du Sud plus faci- dialogue, de mise en action des critères environnementaux (même si lement fantasmés. A noter enfin que citoyens et consommateurs doit la plupart sont encore au stade ‘pro- la fourniture de services sociaux être fourni, afin d’expliquer les grès’) voire même ‘fusion’ avec les collectifs, l’une des principales contreparties sociale et politique de critères de l’agriculture biologique, plus-values du commerce équitable cette forme de commerce (voir cha- étude du Trade Developement Center Nord/Nord classique, n’est pas légi- pitre 3, ‘Promotion du commerce de la CTB81, etc. time au Nord, qui dispose déjà de la équitable comme alternative éco- plupart des infrastructures sociales nomique globale et crédible’)77. Le paradigme du développement de base (écoles, hôpitaux, etc.). durable offre donc de nombreuses Face à ces risques, la plupart des Verdissement du et nouvelles opportunités en termes organisations pionnières dans le commerce équitable de stratégies et de pratiques pour domaine prennent bien soin dans les organisations de commerce leur communication d’isoler et de Les phénomènes de relocalisations équitable. Il peut par exemple consti- mettre en avant le type d’agriculture évoqués s’inscrivent de manière plus tuer une porte d’entrée vers les

22 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 entreprises ou les autorités pu- Une hiérarchisation doit ainsi parfois taposition de labels biologiques et bliques, souvent davantage concer- être faite. Il est clair que dans les équitables permet déjà de couvrir en nés par les aspects environnemen- cas les plus litigieux, le commerce partie les deux besoins, même s’il taux au niveau de leurs achats équitable ne doit pas se pervertir et est vrai que leur intégration pourrait responsables. oublier ses origines, centrées sur diminuer les coûts de certification l’humain avant tout. (particulièrement élevés dans le cas Néanmoins, l’intégration des deux des critères environnementaux, qui concepts est à nuancer. Même si les Se pose également la question de la exigent plus de contrôles de terrain logiques développementalistes et limite des responsabilités de cha- que les critères économiques ou environnementales se rejoignent cune des parties prenantes : est-ce sociaux, davantage ‘documentés’). souvent, par exemple dans le cadre réellement aux organisations de Mentionnons enfin que ce phéno- de la lutte contre le changement commerce équitable de couvrir les mène de verdissement pourrait faci- climatiquerr, elles ne sont pas né- questions plus spécifiquement en- liter la récupération de l’équitable cessairement toujours compatibles. vironnementales ? Exemple : la jux- par les entreprises classiques82. notES a Quelques références : Huytbrechts, perdu en crédibilité. Une grande majorité des positions communes permettant la conso- 2010 ; Poret, 2007 ; Jacquiau, 2006. professionnels du marketing ont d’ailleurs lidation et le développement du commerce b Ce chiffre est basé sur les ventes enre- intégré dans le Top 5 des tendances actuelles équitable au niveau international. FINE possède gistrées par l’ensemble des organisations des valeurs de type ‘éthique’ et ‘authentique’ un bureau du plaidoyer installé à Bruxelles. membres de FLO (ventes en magasins dont l’importance ne cesse de croître ». bb Cette garantie organisation est appelée ‘Fair et consommations hors domicile). o La quantité de café équitable vendue par Trade Organisation’ (FTO). La garantie est c Chiffres à prendre avec beaucoup de pré- Nestlé par exemple ne représente que 0.0025% basée sur l‘autoévaluation et l’évaluation cautions étant données les difficultés du total de ses ventes, pour un béné- croisée des organisations membres de WFTO. pour collecter ce type d’informations. fice en termes d’image bien supérieur. Représentants plus de 2/3 de ces membres, les d Le total des ventes de détail des membres d’EFTA p Documentaire de 2009 de Hubert Dubois, organisations au Sud ont participé à l’élabo- (European Fair Trade Association, organisation diffusé sur la RTBF le 30 avril 2012. ration du référentiel et à la méthodologie. qui rassemble les principaux importateurs de q Autre exemple : Maya Fair trade, expulsé en cc De telles expériences d’étiquetage ont par exemple commerce équitable en Europe tels que Gepa en quelques jours des supermarchés Delhaize. lieu en France, suite au Grenelle de l’environne- Allemagne, Oxfam en Belgique, Fair Trade Original r La limite basse proposée actuel- ment en 2007, ou encore en Grande-Bretagne, en Hollande, etc.) a atteint en 2009 € 286 millions, lement est égale à 25%. à l’initiative de l’entreprise Truecostshop. suite à une croissance de 40% du chiffre d’affaires s Pour rappel, cette règle stipule que tout ingrédient dd Coordination latino-américaine des pro- en 8 ans (soit une moyenne de 8,8% par an). d’un produit mixte pouvant être équitable doit l’être. ducteurs du commerce équitable. e www.cdce.be. t Le modèle actuel est dit « All that can be », ee Définition commune adoptée par les principaux f Chiffre d’affaires pour à la fois le commerce c’est à dire que tous les ingrédients qui peuvent organismes du commerce équitable (FINE) en 2001. équitable et les vêtements de seconde main. être Fairtrade dans un produit composé doivent ff Définition donnée par l’Institut International pour g Un nouveau label Fairtrade et Fairmined Gold a l’être pour pouvoir apposer le logo sur l’embal- l’environnement et le développement en 2000. ainsi été créé en 2010, résultat d’un projet pilote lage. Un chocolat Fairtrade doit ainsi contenir gg Accord AC X50-340. lancé en 2009 par l’Alliance of Responsable 100% de cacao et de sucre équitables. hh L’agence française de normalisation couvre 4 Mining (ARM), , le Trade u L’agriculture de contrat, dans le cadre du commerce secteurs d’activités : la normalisation, la certi- for Developement Center belge et l’organi- équitable, consiste à certifier des entreprises d’ex- fication, l’édition spécialisée et la formation. sation Bolivienne Cumbre del Sajama. portation qui se fournissent non pas auprès d’une ii Une normalisation des organisations, non retenue, h A titre d’exemple, la part des produits cos- organisation de producteurs mais auprès de pro- aurait permis d’éviter que des entreprises de métiques biologiques et naturels a pro- ducteurs individuels, non organisés, liés par contrat la grande distribution ou des industriels se gressé de 35% entre 2007 et 2011. à cet exportateur. C’est la troisième modalité disent acteurs du commerce équitable alors i Dénomination utilisée par Samuel Poos dans reconnue par le système FLO-Max Havelaar (en plus que seule une petite partie de leur acti- le rapport du Trade Development Center des critères producteurs et travailleurs). A l’heure vité peut être intégrée dans le concept. « Le commerce équitable en 2009 ». actuelle elle est acceptée seulement en Inde, et jj L’accord, qui vise à « structurer les pratiques j Dénomination utilisée, entre autres, par B. Huyt- exclusivement pour le coton et pour le riz basmati. existantes en apportant des garanties aux brechts dans sa thèse « Explaining Organisational v Voir note ci-dessus pour la défini- consommateurs », n’a pas de valeur nor- Diversity in Fair Trade Social Enterprises ». tion du terme anglais ‘commodity’. mative et engage seulement moralement k Un bon exemple du développement des aspects w Les filières intégrées ont au contraire permis de les personnes qui en sont signataires. marketing est Café Direct, une marque développée ‘decommodifier’ les matières premières agricoles : kk Article 60 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005. en commun par quatre ONG (dont Oxfam), et qui la construction de chaines d’approvisionnement ll Contrairement aux propositions de loi existantes, a reçu en 2004 le prix “marketeer of the year”, intégrées et complètement traçables a en effet la FEB promeut la reconnaissance du concept plus concours où se retrouvaient des géants du privé permis de connecter directement les consom- large et moins contraignant de commerce durable. comme Unilever, Nestlé ou Procter & Gamble. mateurs à des producteurs bien identifiés. mm Site de la campagne : https://www.citoyenparent. l Terme difficilement traduisible en français. C’est x Les 3 labels Max Havelaar, Transfair et Fairtrade be/Public/macommune/index.php. une matière première agricole standardisée étaient à l’époque présents dans 17 pays. nn Site de la campagne : http://www.cdce.be/. selon une série de critères limités (historique- y Pour rappel, FLO est divisée en trois organismes : oo Les critères environnementaux peuvent ainsi être ment des critères qualité tels que la propreté - FLO International définit les standards et les incorporés dès la phase de sélection initiale. Les et l’absence de dommages sur le grain), ce qui cahiers des charges par produit et accom- critères sociaux peuvent eux être insérés dans permet de la rendre interchangeable ou négociable pagne les producteurs sur le terrain. la deuxième phase, dite d’attribution, c’est à dire sur les marchés agricoles avant livraison. - FLO-Cert assure la gestion du système de lors de la comparaison des appels sélectionnés. m Par exemple, au Royaume-Uni ou certification (contrôle du bon respect des pp Voir par exemple l’ouvrage ‘Les coulisses du com- Oxfam Fair Trade vendent leurs produits – cer- critères auprès des organisations de produc- merce équitable’ de Christian Jacquiau ou encore le tains labellisés, d’autres pas – à la fois via des teurs, des importateurs et des industriels, documentaire ‘Equitable à tout prix’ de Hubert Dubois. canaux spécialisés (ex. magasins du monde, agrément des acteurs économiques). qq Les récentes interventions chinoises sur la catalogues, etc.) et dans les supermarchés. - Les initiatives nationales comme Max dette Européenne sont sans doute l’une des n Une récente étude de la CTB indiquait ainsi : Havelaar Belgium, qui ont pour principal objectif meilleures illustrations de cette tendance. « Les consommateurs accordent de plus en plus d’assurer les débouchés commerciaux. rr Exemple : les politiques globales de réduction d’importance à l’éthique dans le commerce. Une z Organisation mondiale du commerce équitable. des émissions peuvent en théorie diminuer les situation renforcée en période de crise financière aa FINE (acronyme de FLO, IFAT, NEWS et EFTA) facilite impacts négatifs des changements climatiques économique, où les acteurs traditionnels ont l’échange d’informations et la recherche de sur les récoltes des petits producteurs.

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 23 sourcES

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Mars Comportements, attitudes et opinions des des labels. En marche, n°1478. 2009. Le commerce équitable en 2009. personnes vivant en Belgique par rapport au com- 42 Poret S. Novembre 2007. Les défis du 74 Graas F. Décembre 2010. Commerce équitable merce équitable. Baromètre quantitatif version 2. commerce équitable dans l’hémis- Sud-Sud : enjeux et obstacles. Le cas d’Aj Quen, 8 OIFTWG meeting. 6-8 June 2012. phère Nord. Economie rurale n°302. organisation partenaire d’Oxfam au Guate- Updates from affiliates. 43 PFCE. 2011. Quelques chiffres du commerce mala. Analyse Oxfam-Magasins du Monde. 9 CTB Trade for Development Center. Octobre équitable. http://www.commercequitable.org/. 75 Graas F. Janvier 2012. Les défis du 2012. Acheter, c’est aussi voter. Publi-reportage 44 PFCE. 2011. Guide des labels du commerce équitable Sud/Sud. Ana- publié dans «Le Vif/l’Express» et «Knack». commerce équitable. lyse Oxfam-Magasins du Monde. 10 L’Echo. 12 mai 2012. La crise économique exacerbe 45 Van der Wal S. October 2011. Certified Unilever 76 Poos S. 2011. Un commerce équitable, les tensions qui déchirent le commerce équitable. Tea : small cup, big difference? SOMO (Centre aussi au Nord. http://befair.be/. 11 Huytbrechts B. January 2010. Explaining for Research on Multinational Corporations). 77 Maréchal G. Avril 2012. Commerce équitable : Organisational Diversity in Fair Trade Social 46 Graas F. Avril 2010. Le commerce équi- quel transfert d’expérience vers des circuits Enterprises. PhD thesis in management sciences. table : toujours plus pour toujours mieux ? Nord-Nord? http://www.socioeco.org/. 12 The Dutch Association of Worldshops. Analyse Oxfam-Magasins du Monde. 78 Ramonjy D. 2012. Développement durable. Dic- 2011. Fair trade facts and figures. A Suc- 47 Smith S. 24/08/32008. For love or money? tionnaire du commerce équitable, éditions Quae. cess story for Producers and Consumers. Fairtrade business models in the UK super- 79 FLO – WFTO. January 2009. A char- 13 Lamotte P. 05/07/2012. Dans la jungle market sector. Fair Trade International ter of Fair Trade principles. des labels. En marche, n°1478. Symposium, 14-16 May 2008, Montpellier. 80 Audebert P., Bigirimana F., Malandain E. 2009. 14 CTB Trade for Development Center. 2012. Le 48 Graas F. Janvier 2010. Régulation publique et régu- Commerce équitable et environnement. État commerce équitable face à la crise économique. lation privée. Analyse Oxfam-Magasins du Monde. des lieux 2009 des pratiques des acteurs de 15 Graas F. Avril 2010. Le commerce équi- 49 Veillard P. Septembre 2012. Les zones de la Plate-Forme pour le Commerce Équitable. table : toujours plus pour toujours mieux ? conflit, nouvelle frontière du commerce équi- 81 Bailly O. 2009. Commerce équitable, com- Analyse Oxfam-Magasins du Monde. table. Analyse Oxfam-Magasins du Monde. merce durable ? Fair Trade et l’environnement. 16 L’Echo. 12 mai 2012. La crise économique exacerbe 50 CTB Trade for Development Center. Mars Etude CTB Trade for Development Center. les tensions qui déchirent le commerce équitable. 2009. Le commerce équitable en 2009. 82 Ramonjy D. 2012. Développement durable. Dic- 17 CTB Trade for Development Center.Mars 51 Chibani-Jacquot P. 27/03/2012. La liste des labels tionnaire du commerce équitable, éditions Quae. 2011. Fair and sustainable cosmetics. équitables s’allonge. http://www.novethic.fr. 18 CTB Trade for Development Center. Octobre 52 Lamotte P. 05/07/2012. Dans la jungle 2012. Acheter, c’est aussi voter. Publi-reportage des labels. En marche, n°1478. publié dans «Le Vif/l’Express» et «Knack». 53 The Dutch Association of Worldshops. 19 Huytbrechts B. January 2010. Explaining 2011. Le commerce équitable en 2009. Organisational Diversity in Fair Trade Social 54 Poret S. Novembre 2007. Les défis du Enterprises. PhD thesis in management sciences. commerce équitable dans l’hémis- 20 Baqué P. Mai 2012. Le bio, entre business phère Nord. Economie rurale n°302. et projet de société. Editions Agone. 55 Dawson F. 11/04/2011.Omni­label aims 21 Poret S. Novembre 2007. Les défis du to compare brands’ green credenti- commerce équitable dans l’hémis- als. www.foodmanufacture.co.uk/. phère Nord. Economie rurale n°302. 56 Halliday J. 08/02/2011. Not enough science for 22 Blanc, 2003. Commerce équitable et café, rébellion green omnilabel­ for food. www.foodnavigator.com/. ou nécessaire évolution ? Editions L’Harmattan. 57 Ekitinfo. 20/11/2012. Interview de Stéphane 23 Janssens. Septembre 2006. Le commerce équi- Comar, co-fondateur d’Ethiquable. « La mise en table dans la guerre des marchés. Globo n°15. concurrence des labels ». http://www.ekitinfo.org. 24 Poret S. Novembre 2007. Les défis du 58 Leal N., Veillard P. Mars 2013. La cer- commerce équitable dans l’hémis- tification ‘organisation’ WFTO. 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Explaining Comportements, attitudes et opinions des Organisational Diversity in Fair Trade Social personnes vivant en Belgique par rapport au com- Enterprises. PhD thesis in management sciences. merce équitable. Baromètre quantitatif version 2. 29 Carimentrand A. 2012. Filières. Dictionnaire 63 Court of Justice of the European Union. 10 May du commerce équitable, éditions Quae. 2012. EU law does not preclude, in principle, a pu- 30 Huytbrechts B. January 2010. Explaining blic contract for which a contracting authority re- Organisational Diversity in Fair Trade Social quires or desires that certain products to be sup- Enterprises. PhD thesis in management sciences. plied should be derived from organic agriculture 31 Jacquiau C. 2006. Les Coulisses du commerce or fair trade. Press Release n°60/12. Judgment équitable: Mensonges et vérités sur un petit in Case C-368/10, Commission vs. Netherlands. business qui monte. Éditions Mille et une nuits. 64 Dos Santos Malhado C. 26/01/2012. Le 32 Poret S. Novembre 2007. Les défis du commerce équitable, entre initiative privée commerce équitable dans l’hémis- et reconnaissance publique. Rapport de la phère Nord. Economie rurale n°302. Chambre de commerce et d’industrie de Paris. 33 CTB Trade for Development Center. Mars 65 CTB Trade for Development Center. Mars 2009. Le commerce équitable en 2009. 2009. Le commerce équitable en 2009. 34 Timson C. June 2012. New Business Op- 66 Baqué P. Mai 2012. Le bio, entre business tions. FLO internal document BD_4d. et projet de société. Editions Agone. 35 Graas F. Novembre 2011. Les égare- 67 Graas F. Janvier 2010. Régulation publique et régu- ments du commerce équitable. Ana- lation privée. Analyse Oxfam-Magasins du Monde. lyse Oxfam-Magasins du Monde. 68 Daviron B. Mars 2010. Le commerce équi-

24 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 Chapitre 3 : positionnement d’Oxfam-Magasins du monde sur le commerce équitable

Définition renciatrices (esthétiques, fonction- Pour un commerce du positionnement nelles, techniques, philoso- équitable de qualité phiques,…). Dans le cas d’une A l’origine, le positionnement est un Comme on a pu le voir, le secteur organisation d’économie sociale et concept marketing, lié à l’offre d’un équitable a connu de nombreux bou- solidaire telle qu’Oxfam-Magasins produit, d’une marque ou d’une leversements depuis ses origines. du monde, ce type de positionne- enseigne. Dans ce cadre, il peut être De commerce solidaire puis alter- ment ‘marketing’ doit être considé- défini comme un choix stratégique natif, le concept est devenu beau- rablement élargi. Au-delà de la qui cherche à donner à cette offre coup plus large et hétérogène, sous simple vente de produits (quand une position crédible, différente et l’influence des nouveaux entrants bien même sont ils équitables), ses attractive au sein d’un marché et (entreprises conventionnelles, 3ème missions incluent en effet des di- dans l’esprit des clients. Cette défi- vague d’entrepreneurs, etc.) et de mensions sociales et environne- nition – relativement restreinte – la forte croissance du secteur3. S’y mentales qui exigent que l’organi- souligne 3 aspects du positionne- retrouvent ainsi inclus toute une sation se positionne à un niveau ment : série de produits (alimentaires, arti- politique plus global. On touche ici • Le positionnement est une poli- sanaux, cosmétiques, textiles, etc.) notamment aux aspects d’image et tique et non un résultat ou un état et de formes organisationnelles de crédibilité, ce qui, dans le cas de fait. Si chaque offre génère une (associations, coopératives de di- d’une ONG ou d’une organisation perception dans l’esprit du client, vers types, sociétés privées, indivi- hybride telle qu’Oxfam-Magasins du le positionnement est la politique dus, etc.). Dans ce nouvel environ- monde, constitue un capital vital qui cherche à influencer cette per- nement, il est devenu crucial pour pour sa survie. ­­ ception. Oxfam de se positionner plus clai- • Le positionnement est un choix rement. D’acteur majoritaire et Les paragraphes qui suivent four- global en termes de stratégie com- ‘monopolistique’ du commerce nissent le positionnement d’Oxfam- merciale : il se traduit en premier équitable en Belgique, l’organisation Magasins du monde sur le commerce lieu dans la communication ou la s’est en effet vue de plus en plus équitable uniquement. Ce position- publicité, mais il doit également concurrencée par les nouveaux nement constitue une contribution s’exprimer sur toute une série de acteurs. Dans une optique de sou- à un travail en cours de positionne- dimensions (politique de produit, tien accru à ses partenaires, un ment global de l’organisation, in- de prix, de distribution, d’approvi- enjeu crucial pour Oxfam-Magasins cluant les thématiques de la démo- sionnement...). du monde aujourd’hui est donc de cratie économique, de la • La finalité du positionnement est convaincre les consommateurs de souveraineté alimentaire, du travail une finalité de perception. L’offre la qualité supérieure de ses pro- décent et du vêtement de seconde doit être perçue comme crédible, duits, notamment équitables, com- main2. Tout en préservant sa spéci- différente et attractive dans l’es- parés à ceux des entreprises plus ficité, il s’inscrit également au sein prit des clients par rapport aux classiques4. Dans les faits, la plus- des positionnements plus globaux concurrents1. value d’Oxfam est relativement peu d’Oxfam en Belgique et d’Oxfam in- Le positionnement crée donc un sujette à caution. Mais en pratique, ternational (voir encadré ‘position- univers de référence, ou s’y insère, la plupart des consommateurs ne nement stratégique d’Oxfam Inter- par des valeurs innovantes et diffé- font pas de distinction entre les national’).

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 25 Tableau 2. Les 10 principes du commerce équitable selon Oxfam- différents acteurs. Ils sont ainsi peu Magasins du monde conscients de la spécificité du com- merce équitable pratiqué par Oxfam- Les 10 principes du commerce équitable Magasins du monde, notamment ses nombreux partenariats privilégiés 1. Renforcement économique des partenaires du Sud. avec des organisations de produc- 2. Conditions de travail décentes dans la chaine d’approvisionnement. teurs du Sud, ainsi que son combat 3. Focus sur les producteurs et travailleurs les plus défavorisés. pour davantage de cohérence dans 4. Modèle de démocratie économique. les pratiques commerciales mon- 5. Sensibilisation des citoyens au commerce équitable. diales. Il existe par ailleurs de grands 6. Promotion du commerce équitable comme alternative économique risques pour Oxfam-Magasins du globale et crédible. monde d’être ‘éclaboussé’ par cer- 7. Logique participative avec les organisations partenaires. tains scandales, aussi bien en 8. Respect de l’environnement. termes d’image que de vente, en 9. Soutien au développement social des communautés. particulier du fait de l’exposition 10. Qualité et authenticité des produits. médiatique de plus en plus forte du secteura. Dans ce cadre, il est donc primordial pour l’organisation de se cial de clarifier la manière dont Ox- équitable de base, permettant d’as- positionner et de communiquer de fam-Magasins du monde les utilise surer la démarche de manière sûre. manière forte, claire, transparente et/ou avec l’aide de quelle stratégie Néanmoins, sa crédibilité a parfois et surtout efficace5. Nous allons elle gère les risques associés à tel été remise en cause, par exemple tenter d’expliquer dans le détail les ou tel label. dans le contexte du commerce équi- différents éléments de ce position- table de plantation. De plus, ses nement. Les principaux d’entre eux La position d’Oxfam-Magasins du critères sont assez variables en se retrouvent intégrés sous la forme monde dans ce domaine est à la fois fonction des produits. Pour ces dif- de 10 principes du commerce équi- claire et pragmatique : les labels ne férentes raisons, il peut être inté- table selon Oxfam-Magasins du sont pas bons ou mauvais en soi, ils ressant d’utiliser un autre label, à monde (tableau 2). ne sont que des outils au service l’exemple de l’importateur équitable d’objectifs donnés. L’idée n’est donc français ‘Ethiquable’, qui a rem- Les systèmes de pas d’utiliser tel ou tel label de ma- placé en 2012 sur deux produits garantie comme nière systématique ou exclusive (café d’Equateur et sucre du Pérou) des outils mais uniquement si ses critères le label Fairtrade par le label ‘Tu Sim- remplissent un objectif bien précis, bolo’. Ce dernier est plus proche de Le premier point de positionnement tout en étant conformes aux valeurs l’esprit originel du commerce équi- concerne les systèmes de certifi- Fair Trade d’Oxfam International: (1) table car il est issu de petits pro- cation, principalement dans le do- justice (2) capacitation (3) crédibi- ducteurs d’Amérique latine, asso- maine des produits alimentaires. Il lité et (4) durabilitéb. Cette stratégie ciés au sein du réseau CLAC c,7. Un ne se retrouve pas dans les 10 prin- est permise par le choix aujourd’hui désavantage majeur de cette stra- cipes, étant davantage une règle de important de labels reconnus du tégie est qu’elle nécessite un effort fonctionnement interne à l’organi- commerce équitable : Fairtrade Max de communication supplémentaire sation qu’un élément de communi- Havelaar, Fairwild, Fair for Life, Eco- auprès des consommateurs, qui ne cation externe. Il est néanmoins cert Equitable, Naturland Fair, Tu connaissent pas nécessairement fondamental, notamment dans le Simbolo6. ces nouveaux labels. contexte d’industrialisation du com- merce équitable. En effet, face aux Prenons l’exemple du label ‘Fair- Ce positionnement laisse par ail- dérives que certains labels sont trade’ de FLO. Dans la majorité des leurs la possibilité de se passer de susceptibles de faciliter, il est cru- cas, il correspond à un commerce systèmes de certification. Oxfam

26 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 Fair Trade le fait déjà pour certains Positionnement global de FLO, principal organisme produits mais une solution plus labellisateurf radicale serait de le généraliser. FLO a longtemps eu des difficultés et/ou des hésitations à se position- D’autres acteurs européens tendent ner de manière cohérente et claire entre, schématiquement, d’un côté vers cette solution, tels Alter Eco en des clients 100% équitables (comme Oxfam ou Ethiquable), dont l’objec- France ou Gepa en Allemagne. Les tif affiché est de participer à une démarche de soutien à des projets avantages de cette stratégie sont collectifs dans le Sud, et de l’autre des grandes entreprises / distribu- multiples : distanciation par rapport teurs, orientés business, ne proposant que quelques produits équitables aux acteurs moins cohérents dans et dont l’objectif principal est de répondre à la demande des consom- leur démarche (ex. multinationales mateurs8. et grande distribution), possibilité de se concentrer sur les produc- La stratégie actuelle de FLO est de développer en priorité les partenariats teurs les plus marginalisés, parfois avec l’industrie et la grande distribution, afin d’accroitre les volumes de moins aptes à répondre aux exi- ventes des produits équitables. Lily Deforce, directrice de Max Havelaar gences de certains labels (voir le Belgium, explique que l’objectif final est « d’améliorer l’impact auprès principe ‘focus sur les producteurs des petits producteurs ». Elle rajoute : « nous voulons sortir des marchés les plus défavorisés’), et enfin, éco- de niche, surtout sur les catégories clefs tels que le café, les bananes, nomie des coûts de licence liés à la le thé (pour certains pays), le cacao, le sucre, le coton et les fleurs. Cela certification. Dans ce dernier cas, passe notamment par une stratégie ‘distributeur’ consistant à installer les fonds économisés peuvent être des produits phares comme les bananes, dont la chaine est simple, dans réinvestis dans le suivi et un soutien les grandes surfaces, pour ensuite passer à d’autres catégories ». Avec renforcé aux producteurs, par cette stratégie, l’organisation se concentre sur l’offre de ses plus gros exemple au sein du réseau EFTA clients (ex. Delhaize, Carrefour et Colruyt en Belgique), au travers de (European Fair Trade Association)d. partenariats à long terme, sur base d’une offre tirant mécaniquement Cette stratégie ne peut bien sûr la demande. Dans ce cadre, un important travail de communication vers fonctionner que pour les marques les consommateurs existants est effectué, notamment concernant les bénéficiant d’une forte notoriété et références en rayon. Ce positionnement permet également à l’organi- une grande confiance de la part des sation d’offrir des services au privé en tant qu’expert dans la durabilité consommateurs, ce qui est claire- des chaines de valeur. L’élargissement à de nouveaux détenteurs de ment le cas d’Oxfame. licence reste un objectif secondaire.

Il est important de noter que ce Un autre volet majeur de la stratégie de FLO concerne le soutien aux positionnement vis-à-vis des labels producteurs, afin d’augmenter les aspects qualitatifs et quantitatifs comprend une stratégie de gestion des approvisionnements. Comme l’indique L. Deforce, « transformer les des risques au niveau d’Oxfam Inter- producteurs en exportateurs, pour les aider, entre autres, à capter la national. Un groupe au sein de l’Ox- valeur ajoutée ». Le tout participe d’une logique de facilitation de l’envi- fam International Fair Trade Working ronnement des acteurs économiques du commerce équitable. La rhé- Group (OIFTWG) développe ainsi un torique de l’accès au marché pour les producteurs est ainsi dominante outil permettant d’identifier de ma- dans le discours et la stratégie de FLO. C’est ce qui la pousse à envisa- nière systématique le risque associé ger le développement d’une certification ‘ingrédients’ (‘New Business à l’ensemble des produits, produc- Option’), dont l’objectif serait notamment d’assouplir la règle ‘All that teurs, régions et labels en lien avec can be’, souvent trop contraignante pour les industriels ou les produc- le commerce équitable des diffé- teurs9. (suite p.24) rents affiliés d’Oxfam. Même si les labels constituent des outils de traçabilité en soi, cette stratégie de gestion des risques vise entre

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 27 A la question des risques d’abaissement des critères, L. Deforce souligne repris dans les principes : le caractère participatif de sa gouvernance : « les producteurs ont main- • 1 : aspects économiques (accès tenant 50% des mandats au sein de FLO, ce qui permet de les consulter aux marchés, prix juste, préfinan- pour l’élaboration ou le changement de critères. Nous leur rendons par cement, prime pour les projets ailleurs des comptes au travers de 13 indicateurs de performance, collectifs, respect des droits intel- communs à tous les affiliés FLO. Les résultats de ces indicateurs sont lectuels, etc.). résumés dans un rapport envoyé chaque année aux producteurs ». • 2 : conditions de travail décentes Concernant l’apparition de systèmes de certification concurrents (ex. (règles de l’OIT, etc.). Ecocert Equitable), l’organisation met en avant son «orientation déve- • 4 : organisation collective et démo- loppement et son expérience de terrain, au service des producteurs », cratique des organisations de pro- contrairement à Ecocert, « un pur certificateur, originaire du secteur ducteurs. biologique ». A noter cependant que les deux labels pourraient bientôt • 8 : critères environnementaux (par se ressembler davantage, FLO étudiant la ‘fusion’ éventuelle des critères exemple dans le domaine agricole, de l’agriculture biologique avec les critères équitables (ces derniers limitation des pesticides ou inter- s’étant déjà beaucoup ‘verdis’ ces dernières années), afin, entre autres, diction des OGM, etc.). de diminuer les coûts de certificationh. • 9 : bénéfices sociaux complémen- taires, via notamment la prime de Enfin, FLO est engagée dans une stratégie de collaboration accrue entre développement (programmes de ses différents affiliés internationaux (campagne de communication formation, d’enseignement, d’al- commune prévue pour 2014, partage de compétences, indicateurs de phabétisation, des soins de santé, performance alignés, etc.), selon une logique d’économies d’échelle. etc.). L’apparition de nombreux systèmes de certification concurrents, équi- tables ou proches de l’équitable, n’est certainement pas étrangère à Le commerce équitable pratiqué par cette stratégie de rationalisation des coûts et de conquête à marche Oxfam-Magasins du monde remplit forcée des marchés équitables. de manière systématique ce type de critères, souvent (mais pas systé- matiquement) à l’aide de systèmes autres à améliorer la traçabilité des caractère démocratique, au béné- de certification. Au-delà, Oxfam- produits, de plus en plus cruciale fice des producteurs9. Magasins du monde a comme objec- aux yeux des consommateurs, en tif de dépasser un certain nombre particulier dans le domaine alimen- Soutien renforcé de ces critères, afin de réaliser un taire (cf. scandales dioxine, vache au développement commerce équitable de qualité et à folle et, plus récemment, de la économique et social forte valeur ajoutée. Cela passe viande de cheval). des partenaires notamment par l’établissement de (principes 1 / 9) relations plus poussées et un sou- Enfin, concernant les produits d’ar- tien économique ou social renforcé tisanat, la WFTO adapte actuelle- Au travers de leurs cahiers des avec un certain nombre de parte- ment sa garantie ‘organisations’ charges, les systèmes de certifica- naires. , afin d’améliorer sa crédibilité et sa tion du type FLO assurent une série fiabilité, et, à la demande des de critères de base du commerce Les programmes de développement membres Sud, permettre l’apposi- équitable, principalement en termes organisationnel ou de développe- tion du logo WFTO sur tous les pro- de ‘développement Sud’ (en oppo- ment de produits sont des exemples duits. Oxfam-Magasins du monde sition aux aspects politiques ou de réalisations concrètes au service accueille favorablement ces chan- éducatifs, voir plus loin). Dans le de cette ambition. Oxfam-Magasins gements, tout en veillant à ce que positionnement d’Oxfam-Magasins du monde prévoit ainsi de se rendre ce nouveau système conserve son du monde, ces critères de base sont en mars 2013 en Inde pour fournir à

28 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 une série de partenaires (Sasha, producteurs. Financé par la coopé- plus justes, peut se révéler particu- Ema et Rajlakshmi) une aide tech- ration technique belge, ce fonds lièrement pertinente pour le déve- nique et organisationnelle (déve- vise à améliorer la résilience socio- loppement économique des popu- loppement de produits ou d’outils économique globale des parte- lations15,16. marketing, informations sur les naires12. attentes des consommateurs Nord, Au final, le principe va bien au-delà sur les normes, etc.)10. Ce type de soutien renforcé au déve- d’un seul prix juste. Il consiste à loppement tend à dépasser le créer un cadre global stable, favo- De manière plus générale, les rela- concept originel du commerce équi- rable au développement écono- tions d’Oxfam-Magasins du monde table, le ‘Trade not Aid’ de la CNUCEDk. mique et à la diversification vers des avec ses partenaires directs sont De nombreuses études13, 14 dé- produits à plus haute valeur ajou- durables (moyen / long terme), au montrent qu’une approche de ‘Trade tée17. Dans le domaine agricole, cela travers d’engagements contractua- and Aid’ ou ‘Aid for Trade’, jouant sur passe par exemple par une aide lisés. Dans le cas de problèmes les synergies entre aide au déve- technique aux facteurs de produc- réellement récurrents (qualité, li- loppement et règles commerciales tion ou à la diversification des vraison, etc.), il est mis fin à la rela- tion de partenariat de manière la plus progressive possible, de façon à laisser un certain temps d’adap- tation au partenaire. Ces pratiques se distinguent de certains acteurs du commerce équitable, qui changent de fournisseur au premier problème d’approvisionnementj. De même, Oxfam-Magasins du monde répond systématiquement aux demandes de ses partenaires pour un préfinancement, souvent essentiel car permettant de gagner en indépendance face aux banques. Oxfam-Magasins du monde fournit également des fonds au programme Sud d’Oxfam-Solidarité, dans un

objectif d’aide globale aux produc- ©Sarah VDC / Fairtrade Connection teurs, travailleurs et communautés du Sud. Une partie des fonds (fonds ‘Made in dignity’, provenant de la Renforcement économique de Pueblos del Sur vente de vêtements de seconde Sous le régime de Pinochet, les artisans Mapuche étaient victimes de main) est consacrée directement à discriminations. Ils devaient travailler dans la clandestinité et souffraient l’appui des partenaires de com- d’une paupérisation galopante. Pueblos del Sur (Chili) a été créé pour merce équitable (ex. formations pour soutenir ces artisans et pour renforcer leur autonomie. « En 1991, notre améliorer la qualité des produits, premier client fut Oxfam-Magasins du monde. C’est l’organisation qui gestion de l’organisation, connais- nous a soutenus depuis le début. Oxfam nous a aidés et appuyés afin sance des marchés internationaux, que nous puissions voyager en Europe et rencontrer d’autres distributeurs etc.)11. De même, Oxfam Wereldwin- de commerce équitable. C’est comme ça que nous avons pu démarrer ». kels dispose d’un programme Sud Patricio Farias Delva, Directeur et co-fondateur de Pueblos del Sur. d’aide directe à ses partenaires

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 29 cultures, dans des logiques, entre Conditions de travail décentes dans la chaine autres, de souveraineté alimentaire d’approvisionnement et de commerce équitable Sud/Sud. Au Népal, ACP fournit un travail décent à des populations qui, sans cela, Plus généralement, ce soutien peut auraient déjà rejoint la ville, ou plutôt les bidonvilles, où règnent la misère également se concrétiser par la et la violence. « Avant de travailler ici je travaillais pour des patrons qui construction d’infrastructures ou voulaient faire des affaires », raconte Gopiram Vishwokarma, artisan même le développement complet chez ACP. « C’était difficile ! Et puis ACP m’a proposé de travailler pour de chaines de valeur l, 18. Ce position- eux. J’ai accepté et je suis bien content parce que les conditions de nement vers un statut intermédiaire travail sont différentes, on a plus d’avantages ». entre importateur et organisation de développement est un important facteur de différenciation pour Ox- fam.

Conditions de travail décentes dans la chaine d’approvisionnement (principe 2)

La question des conditions de travail décentes dans les chaines d’appro- visionnement, sujet extrêmement vaste, est un objectif majeur en termes de réduction des inégalités mondiales. Les exemples de scan- dales dans la presse sont de ce point de vue innombrables, que ce soient les incendies dans des ‘’ au Bangladesh, ou les l’OIT et souvent même au-delà 21, ils via notamment une traçabilité accrue suicides de salariés de Foxconn19 garantissent le respect d’une série des filières. De même, Oxfam-Maga- (fournisseur chinois d’Apple). Autre de droits minimaux (liberté syndi- sins du monde collabore avec l’EFTA, exemple, en lien direct avec le sec- cale, sécurité sociale, conventions Oxfam International et ses parte- teur du commerce équitable : les collectives, etc.). Cependant, ces naires sur différentes stratégies plantations de fleur. Les conditions critères et (surtout) leur implémen- visant à introduire progressivement de travail y sont généralement dé- tation sont parfois critiquables. des salaires vitaux dans les filières plorables : pulvérisation sans pro- Exemple : le salaire de base est le équitables23. Oxfam-Magasins du tection contre les pesticides, très salaire minimal en vigueur dans le monde et ses fournisseurs restent toxiques (souvent interdits en Eu- pays de production, très souvent par ailleurs extrêmement prudents rope), salaires extrêmement bas, bien inférieur au minimum vital22. et vigilants quant aux produits en absence de contrat, de protection provenance de plantations ou d’en- sociale, de possibilité de se syndi- Même si cette question reste très treprises. Les organisations sont quer, etc.20. complexe, Oxfam-Magasins du ainsi sélectionnées selon leur volon- Les critères sociaux des systèmes monde travaille, en concertation té d’améliorer les conditions sociales de certification équitables du type avec les systèmes de certification des travailleurs (développement des FLOm constituent un progrès no- équitables, à une meilleure implé- syndicats, primes du commerce table. Sur base des conventions de mentation de ces critères sociaux, équitable consacrées aux travail-

30 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 leurs, etc.)24. A noter enfin qu’Oxfam- vent inférieure à l’offre, ce qui en- ducteurs, telles que les plantations Magasins du monde, au travers de traine une sélection des producteurs – aux modes de production souvent ses réseaux, effectue un travail les plus aptes à répondre aux exi- plus compétitifs – remet en cause d’influence vers le label Fairtrade de gences de qualité et d’approvision- le principe originel de soutien aux FLO afin d’améliorer les critères ap- nement. Un glissement sémantique producteurs les plus défavorisées31,n. plicables à la main d’œuvre salariée. est symptomatique de cette évolu- A noter cependant que ce type de Pour davantage d’informations, voir tion : nombre d’acteurs du secteur commerce équitable permet d’aider également l’étude ‘Agir ici pour le ne parlent plus de producteurs « les une main d’œuvre salariée souvent travail décent’25. plus marginalisés » mais simplement autant, voire davantage, margina- « marginalisés »30. lisée. La comparaison des deux De même, on pourrait arguer que définitions FINE de 1999 et 2001 du Focus sur les l’ouverture du commerce équitable commerce équitable illustre cette producteurs et à d’autres formes organisation- évolution. On voit apparaître dans la travailleurs les nelles que les organisations de pro- seconde le terme de « travailleurs », plus défavorisés (principe 3) La notion d’aide aux ‘petits produc- Positionnement stratégique d’Oxfam International teurs’ est au cœur des principes Réduction des inégalités originels du commerce équitable. Dans le contexte mondial de crises, changeant et incertain, Oxfam Inter- Les évolutions du secteur, notam- national mène un processus de réflexion stratégique dont le fondement ment son industrialisation, ont ten- est la réduction de toute forme d’inégalité : les inégalités économiques dance à vider quelque peu le concept mais également de genre, de classe, de race, de culture, d’emploi ou de sa substance (déjà peu précis) et encore d’accès à la santé, l’éducation et d’autres services. Dans cette à en faire un outil marketing, décon- optique, Oxfam International estime que la décennie à venir pourrait être necté des réalités de terrain. Les un point de bascule important, un moment clef au cours duquel les petits producteurs agricoles sont forces de progrès pourront contester avec succès le pouvoir des élites définis par FLO comme« ceux qui ne mondiales. Objectif : atteindre la prospérité pour tous, et ce dans un sont pas structurellement dépen- monde aux ressources limitées. Visionnaire mais également pragmatique, dants d’une main d’œuvre salariée Oxfam International réalise qu’elle ne peut réaliser cet objectif seul. C’est et gèrent leur exploitation principa- donc en collaboration avec ses partenaires, ses alliés, ses bénévoles lement avec leur propre main et ses supporters, qu’elle entend promouvoir cet idéal de justice socio- d’œuvre et celle de leur famille ». environnementale26. Cette définition, proche de la notion d’agriculture familiale, laisse volon- Six objectifs stratégiques 2013 – 2019 tairement une certaine marge d’ap- Pour contribuer à cette vision, Oxfam s’est donné une série de 6 objec- préciation en termes de taille et de tifs prioritaires, à remplir au travers de ses différents ‘métiers’ que sont ressources des exploitations, ces l’intervention humanitaire, les programmes de développement, les cam- dernières pouvant varier en fonction pagnes et le plaidoyer : des produits et des régions. Le pro- • Personnes revendiquant leur droit à une vie meilleure blème est que l’on observe chez • Faire progresser la justice entre les sexes certaines organisations certifiées • Sauver des vies, aujourd’hui et dans l’avenir équitables la présence de moyens • Alimentation durable ou gros producteurs29. Cette ten- • Partage équitable des ressources naturelles dance est liée à plusieurs facteurs • Financement du développement: services essentiels universels structurels, notamment une de- (suite page 28) mande de produits équitables sou-

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 31 tion, acquisition collective d’équi- Stratégie dans le domaine du commerce équitable pements, rapprochement des com- Relever ces défis nécessitera un niveau sans précédent de coopération munautés, fonctionnement au niveau mondial, particulièrement dans le domaine commercial. La démocratique, etc.)34. vision d’Oxfam International dans ce secteur est que développement durable et ‘laisser faire’ sont incompatibles. Il faut au contraire se don- Dans le secteur de l’artisanat, de ner un cadre, s’imposer des règles de gestion de l’offre et de la demande nombreux partenaires directs ou afin de maintenir l’exploitation des ressources en dessous de la bioca- indirects d’Oxfam-Magasins du pacité terrestre et dans le respect des droits humains27. Le commerce monde soutiennent des populations équitable est partie intégrante de cette stratégie pour davantage de économiquement défavorisées ou justice aux niveaux économique, social et environnemental, et ce pour discriminées. C’est particulièrement 3 raisons : vrai en ce qui concerne le soutien • Le commerce équitable est un outil au service du développement aux femmes, majoritaires dans l’ar- durable. Il corrige les échecs du commerce conventionnel en fournis- tisanat équitable. Ce dernier consti- sant des opportunités de développement durable aux populations des tue pour ces populations un outil pays pauvres. d’émancipation particulièrement • Le commerce équitable est une pratique commerciale à valeur d’exemple. important et efficace. Exemples : Oxfam reconnait l’importance du secteur privé, qui peut être un puissant Bombolulu (travail avec des popu- outil de développement. Les pratiques de commerce équitable peuvent lations handicapées au Kenya, voir amener les autres acteurs des chaines d’approvisionnement interna- encadré), Tara (avec les intou- tionales (employeurs, acheteurs, fournisseurs, etc.) à changer de chables et des femmes en Inde), manière positive leurs pratiques commerciales, au bénéfice des popu- AjQuen (avec des femmes d’origine lations marginalisées. Maya au Guatemala). • Le commerce équitable est un mouvement mondial de citoyens actifs. Le mouvement du commerce équitable est un phénomène social in- Le soutien d’Oxfam aux populations croyablement vaste, l’un des rares à réunir à la fois les citoyens du les plus défavorisées passe égale- Nord et du Sud (militants, consommateurs, producteurs)28. ment par le choix de fournisseurs indirects partageant la même phi- losophie. L’entrée d’Ethiquable dans en plus de « producteurs », ouvrant des produits alimentaires), cet appui les magasins du monde Oxfam par- ainsi le champ aux plantations et de ‘première ligne’ peut aider l’orga- ticipe de cette logique de soutien ateliers dépendants d’une main nisation de producteurs à entrer aux paysans du Sud les plus défa- d’œuvre salariée32. dans un système de certification33. vorisés. Exemple : Ethiquable tra- Un exemple de ce rôle de ‘défri- vaille avec la coopérative sud-afri- Face à ces évolutions, Oxfam-Ma- cheur’ d’Oxfam est le partenariat caine Wupperthal, qui permet à des gasins du monde réaffirme sa vo- entre Oxfam Fair Trade et la Sopac- paysans noirs et métis ségrégués lonté de soutenir les populations dio pour la production et la commer- d’accéder à la terre et d’être plus « les plus défavorisées ». En cela, cialisation de café Kivu au Congo. indépendants35. l’organisation se rapproche du rôle Dans cette région affectée par les A noter enfin qu’une manière pour d’une ONG de développement, plutôt conflits depuis plus de 20 ansp, Oxfam de rationaliser cet engage- que d’un importateur indifférencié. Oxfam, en collaboration avec ment envers les populations les plus Un principe fondamental ici est de d’autres organisationsq, a aidé près défavorisées serait d’utiliser des fournir un accompagnement ren- de 4000 petits producteurs de café indicateurs, à l’image de la société forcé aux producteurs, afin de les à normaliser leur situation (accès française Alter Eco, qui a choisi de aider à s’organiser de manière plus aux marchés, renouvellement des ne travailler qu’avec des petits pro- autonome. Dans le cas des filières plantations détruites, formations ducteurs cultivant une surface d’un labellisées (et donc principalement techniques, aide à la transforma- hectare ou moins (en moyenne, et

32 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 par producteur), dans les pays dont l’Indicateur de développement hu- main (IDH) est inferieur a 0,812r,36. L’utilisation de labels tel que le label ‘Tu simbolo’ (groupement de petits producteurs sud-américains) pour- rait être une autre manière de for- maliser cet engagement.

Modèle de démocratie économique (principe 4)

Nouvelle ligne stratégique d’Oxfam- Magasins du monde, la démocratie ©Sarah VDC / Fairtrade Connection économique se retrouve logique- ment dans le positionnement sur le Le défi de Bombululu (Kenya) : offrir un vrai travail commerce équitable. Le principe de aux personnes handicapées la démocratie économique, à la fois « Nous réhabilitons les personnes handicapées en leur donnant des simple et inclusif, est d’étendre le compétences. Ils ont des dons et des talents, même s’ils sont handi- contrôle démocratique à la sphère capés. Nous leur donnons du travail afin qu’ils aient un revenu signifi- économique, déterminante sur la catif à la fin du mois pour soutenir leur famille. Notre projet est important vie des individus et des collectivités, car les personnes handicapées en Afrique n’ont pas l’opportunité d’al- plutôt que de le limiter au seul ler à l’école et donc de trouver un emploi. Pour les femmes, c’est encore champ politique. Autrement dit, de plus difficile, elles sont cachées par leur famille. Bombolulu aide ces remettre l’économie au service du femmes, qui auparavant n’existaient pour personne, à retrouver une citoyen, afin de lui redonner la place place dans la société ». qu’il mérite face à l’entrepreneur, à Esther Mwanyama l’actionnaire ou au consommateur37. Directrice de Bombolulu

Appliqué au commerce équitable, ce principe donne le positionne- formes de gouvernance démocra- tions de producteurs, coopéra- ment suivant : une organisation de tique. Les critères d’Oxfam Fair tives, sociétés privées à but social, commerce équitable telle qu’Ox- Trade demandent ainsi au mini- fondations, etc.), de par le carac- fam-Magasins du monde – du fait mum une assemblée générale, tère beaucoup plus informel du de sa gouvernance, de celle de ses avec droit de vote pour les secteur. Malgré cette diversité, partenaires, ainsi que du modèle membres, ainsi qu’un conseil d’ad- tous les partenaires d’Oxfam-Ma- économique et des initiatives ci- ministration démocratiquement gasins du monde intègrent les toyennes qu’elle promeut – consti- élu et reportant à l’assemblée concepts de démocratie écono- tue une expérience de démocrati- générale (la plupart sont organisés mique de manière plus ou moins sation de l’économie à valeur en coopératives). Les exigences formelle : travail collectif, solida- d’exemple, qui peut inspirer d’Oxfam-Magasins du monde vis- rité entre membres, dimension d’autres organisations (par exemple à-vis de ses partenaires directs genre importante, etc. Exemples : du secteur de l’économie sociale). d’artisanat sont similaires mais les Alura Amara en Indonésie (voir En termes de gouvernance tout formes organisationnelles sont encadré) ou Pueblos Del Sur au d’abord : beaucoup plus diverses (fédéra- Chili. • Oxfam exige de ses partenaires des

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 33 • Oxfam-Magasins du monde est hension de la transaction commer- En termes de positionnement, la membre de la WFTO, fédération ciale et de l’environnement écono- démocratie économique permet à mondiale des organisations de mique global (ex. gestion du Oxfam-Magasins du monde de net- commerce équitable, un forum magasin, compréhension des outils tement se différencier des autres démocratique regroupant impor- financiers, du bilan, etc.). En acteurs du commerce équitable en tateurs, distributeurs et produc- chiffres, ces activités du mouve- Belgique. En opposition à l’axiome teurs (ces derniers représentant ment en magasin représentent en du tout-volume et de l’accès aux plus de 2/3 des membres). moyenne 39 heures hebdomadaires marchés à tout prix, l’organisation • Oxfam-Magasins du monde est une de permanence de vente par équipe, réaffirme ainsi son appartenance au association à but non lucratif, où sans compter les 80 heures an- secteur de l’économie sociale et la hiérarchisation ou les diffé- nuelles de réunions. solidaire, le tout en s’adaptant à rences de salaires entre travail- l’environnement économique actuel leurs sont faibles et qui donne à Hors des magasins, les bénévoles et en rapprochant son modèle de ses bénévoles un pouvoir très sont encouragés et soutenus dans celui d’Oxfam Wereldwinkels. important (notamment dans les leurs projets de création et d’expé- instances telles que l’assemblée rimentation d’alternatives écono- En vue de nourrir le débat à venir au générale, le conseil d’administra- miques via le processus d’éducation sein du mouvement, nous termine- tion, le comité de programmation permanente (ex. campagnes ‘projet’). rons ce chapitre en évoquant ou les commissions partenaires, Le principe commun à ces différents quelques pistes qui permettraient politique, éducation, etc.). projets est la recherche d’une ré- de pousser plus loin encore la démo- • A noter enfin que tous les fournis- ponse collective à des besoins so- cratisation d’Oxfam-Magasins du seurs indirects d’Oxfam-Magasins ciaux insatisfaits plutôt que la géné- monde et de ses filières : du monde s’inscrivent dans la ration de profit39. Exemples : potager • Mobilisation de l’épargne privée, mouvance plus large de l’économie collectif dans la commune d’Aywaille, notamment des bénévoles. Comme sociale et solidaire (ex. la coopé- espace associatif d’économie so- l’indique Guy Simonis, bénévole à rative Ethiquable Benelux). ciale, solidaire et durable à Herve, Herve, « la participation des béné- participation aux campagnes ‘Com- voles au capital de l’organisation A un niveau plus global, le modèle munes du Commerce équitable’ ou pourrait les impliquer davantage économique d’une filière de com- ‘Ça passe par ma commune’, etc. dans la réussite du projet écono- merce équitable donne aux produc- mique. Nous produirons une alter- teurs du Sud un meilleur pouvoir de Ces projets étant souvent à carac- native plus crédible le jour où l’on négociation, un accès accru aux tère local, le lien avec le commerce aura une structure, par exemple marchés et à l’information ainsi que équitable est ici moins dans la di- une coopérative, dans laquelle les des gains de valeur ajoutée sur le mension Sud que dans la dimension différents partenaires seront en- produit, tous facteurs supplémen- alternative. Mais le commerce équi- gagés financièrement ». taires de démocratisation écono- table reste une base fondamentale • En parallèle, les initiatives ci- mique. sur laquelle le mouvement s’appuie toyennes du type 4ème pilierv pour s’organiser et participer au pourraient être encouragées (en- Surtout, la démocratie économique volet politique. Comprendre le voi de fonds directement par les est au cœur du mouvement de ci- monde pour mieux le changer en bénévoles pour l’aide au dévelop- toyens d’Oxfam-Magasins du somme. Comme le précisait en 2011 pement des partenaires). monde38. Les magasins constituent le président du Parlement européen • De même, on pourrait imaginer une ainsi un espace où les bénévoles Martin Schultz, le succès du com- plus grande implication des par- peuvent, entre autres, sensibiliser merce équitable en Europe « revient tenaires du Sud dans les proces- les consommateurs à une plus largement au dévouement des bé- sus de décision d’Oxfam-Magasins grande équité dans le commerce ou névoles engagés dans cette action, du monde, voire une participation bien acquérir une meilleure compré- plus de 100 000 aujourd›hui »40. financière dans le capital. Ce type

34 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 de participation leur permettrait chaine de valeur par ses parte- ‘Kuapa Kokoo’ au Ghana ont des de davantage peser dans les déci- naires, ce qui l’amène par exemple parts dans la société ‘The Day Cho- sions qui les concernent. Oxfam à soutenir le commerce équitable colate Company’, qui commercia- Wereldwinkels a fait un premier Sud/Sud ou à développer des lise le chocolat ‘Divine Fairtrade’ pas dans cette direction en in- ‘business-models’ alternatifs41. De en Grande-Bretagne42. De telles cluant une série de partenaires au manière générale, des structures coopératives constituent des sein d’un comité consultatif. Cette plus intégrées existent déjà dans formes organisationnelles parti- initiative fait partie d’une stratégie le secteur. Exemple : les produc- culièrement innovantes, alterna- plus globale d’appropriation de la teurs de cacao de la coopérative tives au modèle ‘universel’ d’entre- prise capitaliste. Mais ce type de construction – intégration autour Stratégie 2016 d’Oxfam Wereldwinkelst d’une filière, avec des participa- Si les Oxfam du Nord (Oxfam Fair Trade / Wereldwinkels – OFTWW) et du tions croisées Sud / Nord – reste Sud (Oxfam-Magasins du monde) du pays ont des valeurs et des pratiques pour l’instant relativement théo- similaires, elles restent deux organisations différentes et ont donc rique et applicable uniquement aux développé des stratégies distinctes en matière de commerce équitable organisations Sud de taille impor- et de justice économique. tante (ce qui exclue de facto beau- coup d’organisations d’artisanatw). De par son rôle d’importateur de produits alimentaires, la stratégie 2016 • Les nouvelles technologies de d’OFTWW se concentre sur les chaines d’approvisionnement agricoles, communication pourraient per- et plus particulièrement les déséquilibres de pouvoir en leur sein. Partant mettre de développer des proces- du constat du trop grand pouvoir d’un nombre limité d’acteurs intermé- sus innovants de co-création des diaires, notamment certaines entreprises de commerce, d’importation, produits artisanaux avec les par- de transport, de transformation ou de distribution des produits, et ce tenaires (en termes de design, au détriment des producteurs et des consommateurs, les prochaines matériaux, fonctionnalité, etc.), en campagnes de l’organisation chercheront à interpeller les autorités s’inspirant des principes de l’éco- publiques afin qu’elles mettent en place un cadre réglementaire plus nomie collaborative43. Oxfam-Ma- juste et plus sûr. Ainsi, l’objectif n’est pas de s’attaquer aux entreprises gasins du monde a récemment elles-mêmes (comme dans la campagne d’Oxfam International ‘Behind initié ce type de processus en the Brands’u) mais plutôt à la structure du système agro-industriel mon- lançant une plateforme expéri- dial, notamment en instaurant (et en appliquant) des règles commerciales mentale d’e-paneling avec 2 par- plus justes (ex. subventions agricoles ou barrières tarifaires pour les tenaires (Alura Amura en Indonésie économies les moins développées). Cette campagne se déroulera sur et Tara en Inde). Le principe de plusieurs années, avec pour chacune une déclinaison sur une matière cette plate-forme est d’obtenir, à première spécifique (ex. cacao, café, etc.). l’aide d’un questionnaire en ligne, l’avis des consommateurs sur dif- Dans le cadre de cette campagne, OFTWW réfute la possibilité pour les férents produits (nombre limité acteurs les plus puissants des chaines de valeur de faire du commerce dans un premier temps à 45) puis équitable : « Même si des acteurs comme Nestlé respectent les exigences de transmettre les résultats de formelles du ‘commerce équitable’, c’est à dire principalement la garan- l’enquête aux partenaires produc- tie d’un prix minimum et d’une prime, leurs produits ne peuvent être teurs. Ces derniers peuvent alors considérés comme équitables. Nestlé a en effet trop de pouvoir sur le rapidement fabriquer de nouveaux processus de formation des prix du marché conventionnel. Ces acteurs prototypes, qui sont alors resou- ne peuvent donc, par définition, faire du commerce équitable. La clef mis à l’avis des consommateurs. réside dans l’établissement de relations de pouvoir équilibrées dans les Ce système d’échanges et de dia- chaînes de valeur ». logue, autour du produit, entre consommateurs et producteurs

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 35 permettra de rapidement adapter le design et les prix, avec comme avantage final pour les produc- teurs une plus grande captation de la valeur ajoutée. Un projet en cours d’installation de scanners 3D, alternative à la phase de construction des prototypes, pourrait même accélérer le pro- cessus.

Sensibilisation des citoyens au commerce équitable (principe 5) et promotion du commerce équitable comme alternative économique globale et crédible (principe 6)

Parmi les différentes dimensions du commerce équitable (économique, sociale, politique – voir figure 1), il est devenu courant de ne retenir que les composantes socio-écono- miques. La rhétorique de l’accès aux marchés, afin de soutenir un maxi- mum de producteurs, est ainsi deve- nue majoritaire dans le mouvement du commerce équitable, surtout au sein de la filière labellisée. Cette hégémonie du ‘tout volume’ se fait souvent au détriment des activités plus politiques. Un signe de cette tendance est le glissement séman- Alura Amara : une coopérative communautaire, tique dans les définitions FINE de modèle de démocratie économique. 1999 et de 2001, où l’on substitue Très soucieuse de son mode d’organisation, Alura Amara (Indonésie) « approche alternative » par « par- fonctionne de manière démocratique et communautaire. Un président tenariat commercial » 44. Même si la de la communauté est élu pour 5 ans et les producteurs sont associés, deuxième partie de la définition 2001 à tour de rôle, à la gestion et à la comptabilité. Au cours de forums mentionne bien la « sensibilisation réguliers, les artisans sont amenés à discuter de la situation et des de l’opinion », ainsi que des « cam- enjeux politiques du pays. Ces forums sont aussi l’occasion de faire pagnes en faveur de changements de l’éducation citoyenne et d’échanger des informations sur le com- dans les règles et pratiques du com- merce équitable. merce international convention-

36 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 nel », ces références sont bien sou- ciant le produit, le partenaire et son autorités publiques, notamment en vent omises. Cette dimension projet. Une autre spécificité de matière de régulation des marchés alternative et politique était pour- l’organisation est sa capacité à (voir figure 2). Mais ce type d’action tant au cœur du concept originel du conduire des campagnes qui se fait de plus en plus en alliance commerce équitable. mettent en action les béné- avec d’autres organisations, par voles / citoyens. Comme le précise exemple avec le Bureau européen Dans ce contexte, Oxfam-Magasins le programme d’Education Perma- de plaidoyer sur le commerce équi- du monde réaffirme son ambition nente 2012-2016 d’Oxfam-Magasins table (FTAO)y ou le réseau des Com- politique de porter à tous les niveaux du monde, cette mise en action se munes du Commerce Equitable les principes du commerce équi- fait soit par « une sensibilisation (CDCE)z. table, en particulier au niveau au changement de comportements macro-économique. Elle concrétise (de consommation, de citoyenneté, De manière pragmatique, on peut cette volonté de repolitisation du de participation…) », soit « dans une voir dans ce travail plus politique commerce équitable en menant des démarche d’interpellation des déci- d’Oxfam-Magasins du monde une activités de sensibilisation / édu- deurs politiques ». forme de complémentarité avec les cation des citoyens (ex. sensibili- activités beaucoup plus commer- sation en magasin ou dans les A noter qu’un changement s’est ciales des acteurs fonctionnant écolesx, campagne thématiques opéré ces dernières années, l’ac- uniquement dans la filière labellisée. telles que la campagne café Kivu), cent étant davantage mis sur les C’est d’ailleurs de cette manière que de plaidoyer auprès des pouvoirs approches ‘projet’ (en particulier en FLO et WFTO semblent s’être ‘répar- publics (ex. politiques d’achat pu- lien avec les axes thématiques ‘tra- tis le travail’ dans la charte 2009 du blics équitables) et d’interpellation vail décent’ et ‘souveraineté alimen- commerce équitable. La WFTO y est des entreprises (ex. campagne Ikea). taire’). Ces campagnes ‘projet’ en effet la seule à mentionner spé- Dans cette optique, Oxfam-Maga- consistent à accompagner sur le cifiquement les activités de « sen- sins du monde a entrepris de ren- long terme des groupes de citoyens sibilisation » et de « campagne »45. forcer l’une de ses spécificités créant et mettant en œuvre des (notamment par rapport à un achat alternatives socio-économiques Concernant plus spécifiquement le en grande surface), à savoir la sen- (ex. projets de paniers de produits volet ‘alternative’ du principe 6, deux sibilisation lors de la transaction biologiques, gestion d’un magasin, adjectifs sont fondamentaux. Le commerciale. Elle aide pour cela les etc.). Des actions de plaidoyer poli- premier, « global », renvoie au carac- bénévoles à davantage communi- tique plus ‘classiques’ sont égale- tère systémique de la lutte contre quer lors de la transaction, en asso- ment menées (ex. pétitions) vers les les inégalités. Cela signifie, entre

Figure 2. Activités de plaidoyer politique des organisations de commerce équitable

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 37 autres, que l’aide aux petits produc- peut ainsi donner lieu à de nom- en Afrique au développement de teurs / travailleurs du Sud passe breuses innovations manageriales, chaînes durables d’apprivoisement aussi par une transformation glo- par exemple en termes de démocra- du cacao, en concertation avec dif- bale des modèles économiques, en tie organisationnelle ou de ges- férentes parties prenantes, dont particulier dans le domaine agricole. tion / gouvernance des filières47. des multinationalesaa,49. Cela justifie et prouve la cohérence C’est la raison pour laquelle Oxfam de la démarche ‘Paysans du Nord’, a une approche pragmatique et ne Cette approche peut être résumée démarche entamée par Oxfam-Ma- s’interdit pas de collaborer avec des par l’expression « visionnaire prag- gasins du monde en 2013 et consis- entreprises conventionnelles (après matique » d’Oxfam International50. tant à vendre des produits issus de analyse de leur volonté d’engage- Visionnaire, car le principal objectif l’agriculture paysanne belge et ment), notamment dans le cadre de est de réduire les injustices écono- européenne. Un lien est donc fait ici politiques RSE. L’amélioration des miques, via notamment l’établisse- entre commerce équitable et sou- performances socio-environnemen- ment de règles commerciales plus veraineté alimentaire, autre axe tales et des modes de gouvernance justes au niveau international. Prag- thématique majeur d’Oxfam-Maga- de ce type de filières peut in fine matique car différents moyens sont sins du monde. Pour ne pas créer de avoir un impact considérable sur les utilisés pour remplir cet objectif, confusion, l’expression ‘commerce populations concernées48. Oxfam notamment les mécanismes de mar- équitable Nord’ n’est pas utilisée Wereldwinkels travaille par exemple ché. Ce positionnement, à la fois (même si la démarche inclut effec- tivement une série de critères éco- nomiques équitables, tels que prix juste, prime, etc.).

L’autre adjectif, « crédible », sou- ligne la valeur d’exemplarité du com- merce équitable qu’Oxfam-Magasins du monde souhaite pratiquer. Un commerce équitable qui remplit sa mission sociale tout en étant viable économiquement peut influencer de manière positive les décideurs politiques ou les autres acteurs des chaines d’approvisionnement inter- nationales (employeurs, acheteurs, fournisseurs, etc.)46. C’est ce que certains auteurs appellent le phé- nomène de ‘double mouvement’ ou ‘diffusion’ du commerce équitable : le contact entre pionniers et nou- Sensibilisation des citoyens au commerce équitable veaux acteurs du commerce équi- Tara (Inde) travaille en Inde avec les populations des bidonvilles. Le table (entreprises) a tendance à commerce équitable est pour eux un levier intéressant pour faire valoir ‘professionnaliser’ les premiers, le droit à l’éducation : en permettant à des personnes de mieux gagner mais il permet également aux se- leur vie, ils peuvent plus facilement envoyer leurs enfants à l’école. conds d’incorporer les principes du « L’éducation est un outil essentiel pour lutter contre la pauvreté. Nous commerce équitable dans leurs sommes convaincus que chaque enfant doit aller à l’école pour avoir un modes de gestion. Le contact accru meilleur avenir ». Vikas Kumar, responsable du projet Education. entre différents types d’acteurs

38 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 Figure 3. Evolution de l’arborescence des filières d’approvisionnement de Solidar’Monde55

dans et contre le marché, revient à Logique ducteurs et les consommateurs. vouloir changer de l’intérieur le com- participative avec Ainsi, nombre de systèmes de cer- merce conventionnel, en utilisant les organisations tification ne requièrent pas de mé- la valeur d’exemplarité du commerce partenaires canismes de décision coopérative équitable51. Dans ce cadre, Oxfam- (principe 7) et transparente entre les produc- Magasins du monde assume et re- teurs et les acheteurs54. On l’a vu, le commerce équitable se vendique un rôle de médiateur entre réduit aujourd’hui de plus en plus le marché et la société civile, en Cet ‘effet d’écran’ existe également, souvent à une simple relation client- s’efforçant d’être crédible sur les mais dans une moindre mesure, fournisseur : pas de relation directe, deux plans52. dans les filières intégrées (majori- impersonnalité des produits et des tairement artisanales), de par l’in- relations, interchangeabilité des A noter enfin qu’Oxfam-Magasins du termédiation de structures faitières producteurs. Il est certain qu’un monde renforce la résistance poli- de grande taille ou l’importation via partenariat de commerce équitable tique de ses partenaires au Sud, via des structures centralisées. Dans instaure inéluctablement une forme notamment le soutien aux dé- les deux cas, les commandes (qui de dépendance commerciale du Sud marches locales de plaidoyer (ex. dépendent de la gamme de produits, vers le Nord53. Néanmoins, certaines programme de changement social, du rapport qualité/prix, etc.) peuvent formes de commerce équitable voir plus haut). varier d’une année sur l’autre, sans déséquilibrent plus que d’autres ces véritable engagement de longue relations. C’est particulièrement vrai durée. Voir à titre d’illustration la dans le cas du commerce équitable figure 3, qui montre l’évolution de labellisé, de par la distanciation l’arborescence des filières d’appro- croissante qu’il créé entre les pro-

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 39 visionnement de Solidar’Monde en relationships’ sont multiples : lo- dis avec les partenaires (notamment France. gique de dialogue / rencontres, lors d’une série de séminaires an- définition d’engagements réci- nuels) et avec les bénévoles (via une Du fait de la compétition écono- proques, d’objectifs communs, commission partenaires)57. Un mique croissante, Oxfam-Magasins échange d’informations, transpa- exemple plus récent est le projet de du monde ne peut raisonnablement rence, culture de l’évaluation conti- changement social engagé depuis pas ignorer ces modes d’importa- nue plutôt que l’audit, etc., le tout juin 2012 par Oxfam-Magasins du tion. Une partie des produits alimen- dans un souci de rééquilibrage des monde. L’objectif de ce projet est taires ou artisanaux commercialisés rapports de pouvoir dans les diffé- de développer avec 4 partenairesdd via ses différents réseaux de distri- rents maillons de la chaine d’appro- une relation approfondie, visant à bution provient donc de ce type de visionnement. Le tableau 3 résume renforcer leurs capacités sur les relation commerciale. Dans le cas les limites d’un partenariat de com- plans social, éducatif et politique, des produits alimentaires, les cri- merce équitable classique, notam- le tout dans une démarche partici- tères correspondent le plus souvent ment dans sa version certifiée, et pative. Un premier séminaire orga- aux critères FLO, ce que l’on pourrait les pistes que souhaite explorer nisé en juin 2012 a déjà permis appeler un commerce équitable de Oxfam-Magasins du monde pour d’identifier 2 thématiques de travail premier niveau. favoriser un partenariat plus parti- (le développement de la sensibili- cipatif et horizontal. sation dans le commerce équitable Néanmoins, pour contrer ce phéno- Sud/Sud et la construction d’outils mène généralisé ‘d’asymétrisation’ Le travail sur les critères ‘Made in de mobilisation des citoyens), thé- des relations, Oxfam-Magasins du dignity’ au début des années 2000 matiques qui seront approfondies monde a comme objectif d’améliorer est un exemple de cette logique en 2013 lors de 2 missions de terrain ses relations de partenariat avec un participative : l’élaboration des cri- ainsi qu’un second séminaire58. nombre sélectionné d’organisa- tères et des méthodes d’évaluation tions. Les principes de ces ‘special a été le fruit d’échanges approfon-

Tableau 3. Limites du partenariat classique de commerce équitable et pistes d’amélioration à explorer

Limites du partenariat Pistes à explorer

Représentations édulcorées • Favoriser la multiplication des contacts entre le Nord et le Sud. • Reconnaitre le rôle des médiateurs culturels au sein des organisations de la filière comme des interlocuteurs clefs.

Savoir hégémonique • Favoriser l’organisation apprenante et les savoirs locaux. Se baser sur ces éléments pour négocier les contours du partenariat.

Contrôle unilatéral et absence • Développer les paramètres de la relation en consultant chacune de réciprocité des organisations (participation). • Mettre au point un système de gestion (et des obligations) le plus symétrique possible entre le Nord et le Sud. • Promouvoir une culture de l’évaluation continue plutôt que de l’audit.

Inégalités coûts – bénéfices • Réduire les couts des démarches de suivi. • Intégrer la gestion partenariale à l’évaluation interne pour une économie d’échelle.

40 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 De manière plus générale, Oxfam- Logique participative avec les organisations partenaires Magasins du monde cherche à tra- Aj Quen (Guatemala) et Jute Works (Bengladesh) : ces deux partenaires vers ce principe à favoriser / multi- travailleront ensemble avec Oxfam au sein d’un projet sur le changement plier les rencontres entre social par le commerce équitable. L’objectif est le renforcement mutuel producteurs du Sud et consomma- en termes de sensibilisation et d’éducation. Ce type de projet démontre teurs du Nord, via par exemple les la volonté d’Oxfam de développer des partenariats dans une logique de journées partenaires ou des débats dialogue et d’échange, bien au-delà de la relation commerciale client- citoyens lors des visites de parte- fournisseur. naires. Comme le souligne le dernier document stratégique d’Oxfam In- ternational, « le mouvement du commerce équitable est un phéno- mène social incroyablement vaste, l’un des rares à réunir à la fois les citoyens du Nord et du Sud (mili- tants, consommateurs, produc- teurs) »59. Ces différentes formes de dialogue Nord / Sud entre parte- naires, bénévoles et sympathisants présentent ainsi toute une série de bénéfices : • Meilleure compréhension du com- merce équitable, de sa raison d’être et de ses impacts. • Débats sur les modes d’actions pour un changement global, au Nord comme au Sud. • Renforcement des capacités et de la motivation des bénévoles / sym- entre organisations de commerce de gestion participative et de pathisants à multiplier le message équitable, en termes économiques consultation multi-parties pre- du commerce équitable auprès des (ex. design en commun de produits nantes. Si elles étaient générali- clients ou des proches, d’artisanat), logistiques mais aussi sées, ces expériences pourraient • Reconnaissance des bénévoles et de sensibilisation, de plaidoyer, devenir l’un des principaux fonde- des sympathisants au travers d’un voire de RSE (voir ‘Promotion du com- ments distinctifs d’Oxfam dans le moment de convivialité. merce équitable comme alternative secteur de l’équitable62. globale et crédible)60. Enfin, la logique participative s’ap- Cohérence plique également sous la forme Pour conclure, ces logiques d’al- environnementale d’alliances, aussi bien en interne liances et de co-construction du (principe 8) (autres Oxfam dans le monde) qu’en partenariat s’inscrivent pleinement externe (autres organisations de dans les stratégies de ‘démocratie C’est l’une des critiques les plus commerce équitable). Oxfam-Maga- économique’ d’Oxfam-Magasins du courantes faite au commerce équi- sins du monde défend ainsi un prin- monde61 (voir positionnement ‘dé- table : son impact supposé sur cipe de collaboration dans la diffé- mocratie économique’) et de ‘capa- l’environnement, du fait des longues rence. La diversité du monde de citation des partenaires’ d’Oxfam distances de transport du Nord vers l’équitable est une richesse et une Wereldwinkels. Elles cadrent éga- le Sud. On l’a vu, l’origine en est opportunité de créer des synergies lement avec la montée des principes l’émergence des préoccupations

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 41 environnementales chez le consom- - Au niveau agricole, la plupart des de 50% des producteurs certifiés mateur, liées aux crises climatiques produits équitables sont issus FLO seraient également certifiés et environnementales actuelles. En d’une agriculture paysanne à biologiques et l’organisation réponse à ces questions, légitimes, petite échelle et diversifiée. Il envisagerait même de ‘fusionner’ toute une série d’outils, pratiques s’agit le plus souvent de cultures ses critères avec ceux de l’agri- et produits de consommation du- traditionnelles favorables à la culture biologique (voir encadré rable ont émergé ces dernières biodiversité (ex. le riz violet de FLO)66. années : labels ‘kilomètres alimen- Thaïlande, la quinoa rouge de - Les produits d’artisanat ont un taires’, étiquetage environnemen- Bolivie), et faiblement mécani- impact sur l’environnement tal, produits locaux, biologiques, sée. De plus, les critères de base moins lourd que les produits in- boycott des produits ‘tropicaux’, de des labels équitables exigent ou dustriels, en particulier ceux qui la viande63, etc. encouragent des méthodes de valorisent les ressources natu- production durables : absence relles locales et/ou le recyclage Le positionnement d’Oxfam-Maga- d’OGM, réduction des pesticides, de produitsgg. sins du monde sur ce sujet est que, lutte intégrée, réduction des dans une majorité de cas, l’impor- consommations en eau, etc. Plus tation de produits équitables peut se justifier : • Le bilan carbone d’un produit ne se réduit pas au transport. Dans le domaine agricole par exemple, des postes tels que l’utilisation d’en- grais chimiques ou le chauffage sous serre sont très énergivores et donc émetteurs de gaz à effet de serre. Le transport a donc sou- vent une part relativement faible dans l’impact environnemental total, surtout dans le cas de modes de transports peu polluants comme le bateauee. Une étude de l’ONG Climatop a ainsi démontré qu’un sucre de canne biologique d’Amérique du Sud génère près de deux fois moins d’émissions de CO2 qu’un sucre de betterave de Suisse64. Targanine et le respect de l’environnement • Il n’existe souvent pas d’alterna- La fabrication de l’huile d’Argan, à partir des fruits de l’arganier, permet tive locale aux produits du com- aux femmes souvent peu qualifiées du Groupement d’intérêt économique merce équitable : produits tropi- Targanine (Maroc) de trouver un débouché sur le plan local. L’intérêt de caux (tels que la banane ou le thé, l’arganier est aussi écologique. Les surfaces occupées par les argane- etc.), produits culturellement spé- raies connaissent un recul important en raison de la désertification qui cifiques, production locale insuf- progresse. Replanter des arbres en quantité suffisante est donc un fisanteff. enjeu à la fois environnemental et économique. Le développement de • Le commerce équitable utilise des forêts reconstituées permettra en effet d’endiguer l’érosion des terres modes de production respectueux et de favoriser les débouchés liés à l’exploitation raisonnée de la forêt. de l’environnement65:

42 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 Positionnement d’Ethiquable Benelux, nouvel acteur de l’entreprenariat socialhh Nouvel arrivant dans le paysage de l’équitable belge, Ethiquable Benelux est une coopérative de travailleurs à finalité sociale créée dans le sillage de la Scop française Ethiquable. Ethiquable Benelux fournit le réseau de magasins d’Oxfam-Magasins du monde en produits alimentaires depuis juin 2011. Une trentaine de produits Ethiquable Sud y est disponible, notamment des chips, du chocolat, des jus et compotes de fruits, du thé, etc. Le positionnement d’Ethiquable Benelux est intéressant dans la mesure où il s’inscrit parfaitement dans le concept d’entreprenariat social. Ethiquable utilise en effet pleinement les mécanismes de marché pour générer des revenus et poursuivre ses missions sociales67.

Pour S. Vincent, dirigeant de l’organisation, « le commerce équitable reste du commerce. On peut y intégrer d’autres dimensions mais cela reste une activité économique avant tout. Si Ethiquable n’était pas viable économiquement, elle ne pourrait pas conduire ses actions de soutien aux producteurs du Sud ». L’entre- preneur juge ainsi sévèrement les petites structures du secteur en difficulté, qui, selon lui,« manquent à la fois de capitalisation et de compétences, notamment en gestion financière et commerciale ». Pour lui, le secteur doit impérativement se professionnaliser s’il veut survivre. Malgré tout, il estime que « la demande des consommateurs pour une consommation plus responsable est très forte, et qu’il y a donc beaucoup de place pour les entreprises innovantes ».

Plus spécifiquement, l’organisation se positionne comme un fournisseur de produits équitables paysans. « Notre cœur de métier est le soutien à l’agriculture paysanne, respectueuse de la terre, des travailleurs et des terroirs. Ce message n’étant pas nécessairement audible par tous les consommateurs, nous communi- quons en premier lieu sur les aspects qualité, terroir, plaisir et santé des produits. Nous fournissons aux consommateurs plus exigeants, intéressés par les aspects de développement durable au sens large, des informations sur les plus-values socio-environnementales de notre projet ».

Concernant la relation avec Ethiquable France, S. Vincent précise « qu’Ethiquable Benelux n’est pas une filiale mais une coopérative distincte. Ce sont des organisations ‘sœurs’ ayant des participations croisées dans leurs capitaux respectifs, l’idée à terme étant d’avoir une série de coopératives (France, Benelux mais aussi Allemagne, etc.) regroupées au sein d’une coupole européenne. Chaque organisation a un tronc commun d’activités, pour des raisons d’économies d’échelle, mais s’adapte par ailleurs aux spécificités des marchés nationaux ». Les modèles économiques en France et en Belgique sont d’ailleurs assez différents. Une majorité des produits français sont destinés à la grande distribution tandis qu’en Belgique, la distribution est beaucoup plus diver- sifiée, notamment auprès des magasins du monde. L’entrepreneur explique que l’une des raisons est « la taille beaucoup plus réduite du secteur de la distribution belge » (ce qui pose des risques de dépendance commerciale).

Sur la question de la certification, le positionnement d’Ethiquable est très pragmatique. « Nous utilisons Ecocert sur certains produits tout simplement parce que la certification Max Havelaar n’existe pas. De manière plus générale, c’est le choix des producteurs qui s’impose. Nous soutiendrons la préférence de producteurs pour Ecocert par exemple, si le label leur permet d’être plus autonomes financièrement. Et même si cela demande un effort de communication supplémentaire auprès des consommateurs, qui peuvent parfois se perdre dans la jungle des labels ». Malgré tout, S. Vincent considère qu’il « reste indispensable d’avoir une certification externe », jugeant « l’auto proclamation comme non suffisante ». (suite page 40)

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 43 Concernant les produits Nord, l’organisation n’offre pas de produits frais tels que paniers de fruits et légumes bio (« ce n’est pas son métier ») mais se concentre sur l’épicerie sèche, avec l’idée de travailler avec des partenaires européens : « de la même manière que l’on voit le Sud comme un tout, pour nous le Nord va plus loin que la Wallonie. La problématique étant plus globale, nous souhaitons travailler au niveau européen, par exemple sur des produits grecs ou italiens. Le territoire wallon ou belge est de toute façon trop limitatif pour développer une large gamme de produits de qualité et spécifiques d’un terroir ou d’un savoir-faire ».

Enfin, sur le sujet de la relation avec Oxfam-Magasins du monde, S. Vincent considère le partenariat comme « gagnant – gagnant », Ethiquable ayant obtenu « un nouveau canal de vente et une notoriété / légitimité accrue », Oxfam-Magasins du monde bénéficiant elle de« nouveaux produits de qualité qui diversifient l’offre en magasin ». « Oxfam-Magasins du monde a bien compris l’intérêt de la complémentarité des produits. L’offre de 2 types de chocolats ne va pas faire consommer 2 fois plus mais cela crée une dynamique, de l’évènement dans le point de vente, ce qui in fine fera revenir le consommateur » conclue S. Vincent.

Qualité et d’organisations de commerce équi- des techniques traditionnelles et authenticité des table, et notamment Oxfam-Maga- avec des matières premières pour produits (principe 10) sins du monde, tentent de répondre la plupart d’origine naturelle. à cette demande en diversifiant, en Exemple : les foulards en coton du Le temps des produits équitables professionnalisant et en améliorant partenaire indien Pushpanjali (sta- fortement politisés, tels que le café la qualité de leur offre. ‘socialiste’ tanzanien ou le vin algé- rien des années 70, souvent de Ce type de positionnement est éga- piètre qualité, est révolu. Les lement une manière de se différen- consommateurs exigent aujourd’hui cier du commerce équitable plus des produits à la fois équitables et ‘marchandisé’ des supermarchés de grande qualité. Des recherches (même si cela reste difficile dans le montrent ainsi qu’à côté des moti- domaine alimentaire, beaucoup de vations altruistes du type équité des produits pouvant se retrouver à la relations humaines et protection de fois dans les magasins du monde l’environnement, les consomma- Oxfam et les supermarchés). Dans teurs de produits équitables re- l’artisanat, la qualité des produits cherchent aussi et surtout qualité, équitables Oxfam est souvent supé- santé, hédonisme, plaisir et authen- rieure à celle des produits conven- ticité68,69. Dans le domaine alimen- tionnels, les produits étant majori- taire, les composantes ‘goût’ et tairement réalisés à la main, avec ‘authenticité’ associées à la men- tion ‘petits producteurs’ seraient des facteurs d’arbitrage en moyenne Qualité et authenticité des produits de Craft Link plus déterminants que l’équité de Craft Link (Vietnam) encourage les artisans à revaloriser les savoir-faire la transaction70. A la suite d’acteurs ancestraux tout en favorisant des procédés respectueux de l’environ- tels que Citizen Dream en Belgique nement. Menacés par la concurrence des produits standardisés qui (qui avait fait du design de ses ma- envahissent le marché, ces savoir-faire sont considérés comme un gasins et de la qualité de ses pro- patrimoine à transmettre aux générations futures. Craftlink travaille duits son principal élément de dif- d’ailleurs en partenariat avec un programme de l’Unesco afin de conju- férenciation, avant même le guer qualité et respect des cultures locales. caractère équitable), beaucoup

44 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 bilité des couleurs, pas de rétrécis- marche, caractère unique / fruit équitable. Certains auteurs notent sement après lavage, prix équivalent d’un savoir-faire / sain / natu- également que les exigences de aux produits conventionnels, meil- rel / humain du produit). Il est donc professionnalisation et d’adaptation leure rémunération des artisans, essentiel que les bénévoles des des produits à la demande des etc.)71. Face aux problèmes encore magasins soient bien formés, afin consommateurs Nord peuvent dé- parfois rencontrés, Oxfam-Magasins qu’ils ‘construisent’ une narration naturer l’authenticité même de la du monde a entamé depuis quelques qui mette en avant les producteurs démarche (changement du design, années un processus de profes- et contextualise le produit. Atten- des techniques, etc.). Face à ce sionnalisation visant à améliorer la tion cependant dans cette dé- problème, et comme déjà évoqué, qualité des produits, leur approvi- marche à ne pas simplifier, carica- une piste en cours d’exploration est sionnement ainsi que la segmenta- turer ou idéaliser le discours, dans l’amélioration du processus de ‘co- tion des magasins. une forme de néocolonialisme ré- création’ des produits, au travers ducteur et en décalage avec la réa- d’un dialogue accru entre les Un élément critique pour Oxfam-Ma- lité. Dans ce sens, montrer les tech- consommateurs et les producteurs. gasins du monde dans ce position- nologies parfois avancées utilisées nement est de bien communiquer par les producteurs pourrait par les avantages de ses produits (sin- exemple contribuer à démontrer la cérité et authenticité de la dé- force de ‘capacitation’ du commerce

notes a Le livre de Christian Jacquiau « Les Coulisses impliquer la fourniture d’intrants, de services la vente de produits équitables, des actions du commerce équitable », paru en 2006, a financiers, de transport, de conditionnement, de sensibilisation ainsi que des débats. par exemple été le premier à dénoncer les des études de marché, des publicités, etc. y La FTAO pousse entre autres la Commission dérives du secteur au niveau francophone. m Dans le cas de FLO, les critères spécifiques européenne à avoir une stratégie globale plus b Pour rappel, ces valeurs ont été définies par à la main d’œuvre salariée sont regrou- cohérente en matière de commerce équitable. Oxfam International (OI) pour caractériser le com- pés dans un cahier des charges séparé. z Exemple de la campagne ‘Beyond 2015’ merce équitable commun à ses différents affiliés. n A noter que cette ouverture est liée à (http://www.beyond2015.org/fr). c Coordination latino-américaine des pro- l’extension de la gamme de produits com- aa Notamment dans le cadre de la Table ducteurs du commerce équitable. mercialisés dans le système de commerce ronde de l’économie durable cacaoyère : d Pour rappel, l’EFTA est le réseau des impor- équitable (ex. thé ou bananes, cultivables http://www.roundtablecocoa.org. tateurs européens de commerce équitable. quasi uniquement dans les plantations). bb A l’image d’Artisans du Monde L’organisation possède un système de suivi et o Solidarité Paysanne pour la Promo- en France par exemple. d’évaluation commun à ses différents membres. tion des Actions Café et Développement cc ‘La relation spéciale’ est une expression utilisée e Oxfam-Magasins du monde bénéficie par Intégral. http://sopacdifr.com/. pour décrire les relations politiques, diploma- exemple de 94% de notoriété assistée p Comme l’illustrent tragiquement les tiques, culturelles, économiques, militaires et (c’est-à-dire de reconnaissance du logo) évènements des mois passés. historiques étroites entre le Royaume-Uni et dans la dernière enquête de la CTB. q CTB, COOPAC, une coopérative rwandaise les États-Unis. L’expression vient de Wins- f Sur base d’un entretien avec L. Deforce, directrice certifiée Fairtrade en 2003, , une ton Churchill dans un discours de 1946. de Max Havelaar Belgium – 08/10/2012. ONG britannique et COMEQUI, une ASBL belge. dd Ces 4 partenaires sont : AjQuen (Guate- g Cette règle stipule que tous les ingré- r Ce type d’indicateur est néanmoins à prendre mala), Bombolulu (Kenya), Corr-The Jute dients d’un produit alimentaire pouvant être avec beaucoup de précautions dans la mesure où Works (Bangladesh), Tara (Inde). équitables doivent l’être, ce qui peut poser une grande proportion des populations les plus ee Selon Max Havelaar, 90% des produits des problèmes en termes de formulation ou marginalisées du monde se trouvent dans les pays certifiés sous leur label seraient transpor- d’approvisionnement (ex. sucre de canne au émergeants, dont les indices de développement tés par bateau, un mode de transport à goût différent du sucre de betterave, problèmes sont en moyenne relativement élevés mais avec, faible émission de gaz à effet de serre. à se procurer des épices équitables, etc.). dans les faits, de très fortes inégalités (ex. Chine). ff Exemple, d’après la CTB, la Belgique produirait h D’après Max Havelaar Belgium, les coûts de Il pourrait être intéressant de ce point de vue, d’y moins de 20% de sa consommation de miel. certification sur les critères environnementaux, ajouter des indicateurs d’inégalités du type Gini. gg L’argent et la saponite contenus dans certains notamment biologiques, sont plus élevés que sur s 75% des organisations partenaires certifiées produits, issus de carrières artisanales, des critères sociaux / organisationnels car ils seraient ainsi des coopératives selon FLO. peuvent poser davantage de problèmes. requièrent davantage de contrôles de terrain. t Sur base d’entretiens avec A. Schollaert, M. hh Sur base d’un entretien avec S. Vincent, fondateur i Le nouveau système est baptisé FTS, Poissonier et M. Schotte – 15/03/2013. et directeur d’Ethiquable Benelux – 07/11/2012. pour ‘Fair Trade (Guarantee) System’. u http://www.oxfam.org/en/grow/ ii Société coopérative et participative. j Exemple cité dans le documentaire ‘Equitable campaigns/behind-brands. à tout prix’, l’importateur équitable suisse v Le 4ème pilier comprend tous les acteurs et Pronatec, qui a cessé sa collaboration avec initiatives de coopération au développement qui la coopérative sud-américaine Fedecade n’appartiennent pas à la coopération gouverne- suite à un retard d’approvisionnement lié à mentale bilatérale (1er pilier), multilatérale (2ème de mauvaises conditions climatiques. pilier) ou non gouvernementale (3ème pilier). k Conférence des Nations unies sur le w Les organisations du secteur de l’artisanat sont commerce et le développement. en moyenne de plus petite taille. De plus, les l Dans une filière économique, une chaîne de étapes de fabrication sont déjà concentrées dans valeur est une succession d’étapes sources de le Sud, ce qui diminue l’intérêt de participations valeur ajoutée, coordonnées à tous les niveaux croisées entre les différents acteurs de la chaine. de la production, de la transformation et de x La sensibilisation dans les écoles se fait principa- la distribution, et destinées à répondre à la lement au travers des Jeunes Magasins-Oxfam demande du consommateur. Dans le domaine (JM-Oxfam), équipes de jeunes de 14 à 18 ans agricole par exemple, une chaine de valeur peut et de professeurs. Les actions menées incluent

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L’équitable, le commerce équitable dans l’hémis- bio et le goût. Quels sont les effets de la double phère Nord. Economie rurale n°302. labellisation bio-équitable sur le consentement à 37 Graas F. Janvier 2012. Des coopératives pour payer de consommateurs ? Cahier Agricole, vol. 19. démocratiser l’économie ? Pistes de réflexion 71 Oxfam-Magasins du Monde. 2013. Com- pour une organisation de commerce équi- prendre le commerce équitable. table. Etude Oxfam-Magasins du monde.

46 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 Conclusions

Dans un secteur équitable de plus en plus large et incertain, Oxfam-Magasins du monde défend un commerce équitable de qualité, à forte valeur ajoutée sociale, politique et environnementale. L’organisation s’inscrit en cela dans une mouvance de démocratisation des filières économiques. Le cœur de son projet est son mouvement de citoyens, au service d’échanges véritablement équitables, au Nord comme au Sud1. Oxfam-Magasins du monde réaffirme ainsi son appartenance au secteur de l’économie sociale et solidaire, source historique de l’équitable, en se distinguant des acteurs plus ‘industriels’. Elle assume son identité d’entreprise à finalité sociale, au rôle de médiateur entre marché et société civile et à l’intersection entre une ONG et un importateur équitable classique.

Ce positionnement signifie qu’Ox- maine alimentaire), de distribution tion du modèle économique doit être fam-Magasins du monde doit trou- (dans un réseau de magasins spé- poussé plus loin si l’organisation ver un équilibre délicat entre les cialisés et divers canaux extérieurs veut pouvoir assurer la pérennité de dimensions économiques, sociales tels que les collectivités) ainsi qu’un sa mission sociale. et politiques du commerce équi- travail politique et d’éducation. Si table, tout en tenant compte des cette combinaison est particulière- De ce point de vue, le passage à une impacts environnementaux de ses ment riche (elle permet par exemple forme organisationnelle de type activités2. De plus en plus d’acteurs de lier la transaction commerciale coopérative semblerait particuliè- du secteur se spécialisent sur une avec la sensibilisation), elle est rement pertinent. Comme l’indique ou deux dimensions, le plus souvent aussi extrêmement complexe. Com- Benjamin Huytbrechts, chercheur à sur les aspects commerciaux, en biner ces différentes activités né- l’ULg et spécialiste des organisa- déléguant par exemple entièrement cessite ainsi de créer des structures tions de commerce équitable, le processus de garantie équitable organisationnelles spécifiques4. « beaucoup d’acteurs équitables aux systèmes de certification. Les européens ont évolué vers ce mo- importateurs ‘purs’, en contact di- Dans le cas d’Oxfam-Magasins du dèle, qui permet de combiner effi- rect avec les producteurs, se monde, le contexte économiquea, la cacement activités économiques et concentrent eux davantage sur les professionnalisation / concurrence sociales. Il permettrait de plus de dimensions socio-économiques, via accrue du secteur équitable et les davantage ouvrir la structure, par le soutien aux producteurs et le évolutions des formes d’engage- exemple à d’autres ONG ou même à développement de produits3.Oxfam- ment citoyen obligent l’organisation des partenaires privés plus clas- Magasins du monde a une position à développer un fonctionnement siques ». Dans ce dernier cas, les relativement centrale, mêlant acti- plus efficace. Apprendre à faire alliances avec les entreprises vités commerciales, sociales et mieux avec moins en somme. Oxfam- d’économie sociale (coopératives politiques au sein d’une même orga- Magasins du monde a déjà initié ces d’insertion, d’énergie, de crédit, nisation (le tout en coordination dernières années une série de pro- etc.) mériteraient d’être davantage avec les membres d’Oxfam Interna- jets visant à améliorer la rentabilité explorées d’après le chercheurc. tional). Avec son mouvement de de ses activités commerciales : citoyens, elle mène ainsi de front meilleure gestion des stocks, opti- Un autre enjeu crucial est le rappro- des activités d’importation directe misation du réseau de magasins, chement d’Oxfam-Magasins du et de soutien aux producteurs (es- développement des gammes de monde avec ses deux organisations sentiellement artisanat), d’achat à produits, plus grande responsabili- sœurs en Belgique, en priorité Ox- des fournisseurs indirects spécia- sation et organisation des béné- fam-Wereldwinkels et dans une lisés (essentiellement dans le do- volesb,5,6 etc. Ce travail d’améliora- moindre mesure Oxfam Solidarité,

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 47 dans le cadre du processus d’opti- économique, souveraineté alimen- l’épargne privée pour la réinjecter misation économique d’Oxfam Inter- taire, travail décent et vêtements dans divers projets socio-environ- national. Ainsi, une structure com- de seconde main). La démarche nementaux, l’avantage ici est que mune rationalisant en partie les ‘Paysans du Nord’ est un exemple l’investissement se fait directe- activités logistiques et commer- de tel alignement, dans ce cas entre ment dans le projet8. Même si Ox- ciales d’Oxfam-Magasins du monde commerce équitable et souverai- fam-Magasins du monde peut se et d’Oxfam-Wereldwinkels semble neté alimentaire, qui améliore la reposer sur son large réseau de plus que jamais indispensable, cohérence globale des activités bénévoles, une telle ouverture de d’autant plus que les deux organi- d’Oxfam-Magasins du monde. capital nécessiterait de concevoir sations partagent les mêmes va- une campagne de communication leurs et missions. Dans un marché Enfin, dans le contexte actuel de ainsi que de réfléchir à divers belge de l’équitable somme toute crises économique et budgétaire, il formes de rémunération. relativement étroit, seul un tel rap- serait également intéressant d’in- • Oxfam-Magasins du monde pour- prochement permettra aux deux nover en matière de ressources. rait également développer une organisations de remplir pleinement Nous conclurons donc cette étude stratégie plus cohérente et systé- et efficacement leurs différentes en évoquant quelques pistes de matique de recherche de subsides. missions sociales. A un horizon plus stratégies financières et commer- Dans un contexte budgétaire de lointain, un rapprochement avec ciales qui permettraient à Oxfam- plus en plus difficile, on pourrait Oxfam Solidarité aurait également Magasins du monde de se donner être tenté d’abandonner ce mode beaucoup de sens, aussi bien au pleinement les moyens de ses de financement. Mais on peut au Sud (ex. optimisation du support aux ambitions. contraire considérer que l’assè- producteurs et communautés), chement des deniers publics né- qu’au Nord (ex. fusion des services En matière cessite de rationaliser ce type de politiques), dans le contexte de de ressources recherche de fonds, notamment rationalisation des activités des financières en alliance avec les autres affiliés différents affiliés d’Oxfam Interna- Oxfam ou les autres acteurs de tional (processus ‘Single Manage- • En lien avec l’adoption d’une struc- l’équitable Européen (ex. FTAO, ment System’) et d’alliances avec ture coopérative évoquée, une WFTO Europe). Encore une fois, les autres acteurs de la société première piste serait d’ouvrir par- cette stratégie cadrerait avec le civile en Belgique ou dans l’Union tiellement le capital à l’épargne positionnement orienté ‘ONG’ d’Ox- Européenne. Ce rapprochement privée, par exemple des bénévoles fam-Magasins du monde. Un désa- avec Oxfam Solidarité aurait en outre ou même des partenaires. Autre- vantage d’une telle stratégie est l’avantage de renforcer le position- ment dit, mettre l’épargne ailleurs qu’elle déforce quelque peu l’as- nement ‘hybride ONG / entreprise’ que dans les banques, au service pect ‘crédibilité’ du commerce d’Oxfam-Magasins du monde. d’une finalité sociale et sous équitable, qui peut sous cette contrôle démocratique. Ce type de forme être accusé de forte dépen- En résumé, si Oxfam-Magasins du financement participatif s’inscri- dance envers des ressources non monde veut pleinement concrétiser rait parfaitement dans l’air du commerciales. Si elle est égale- ce positionnement, à la fois ambi- temps, qui voit le retour en grâce ment dans l’air du tempse, une tieux et complexe, il est crucial des formes coopératives et autres stratégie de sollicitation systéma- qu’elle optimise ses activités, tout structures d’économie collabora- tique des donateurs privés (ex. en se rapprochant de ses alliés au tive (ex. partage d’idées – ‘crowd- entreprises, fondations) semble sein du secteur de l’économie so- sourcing’, de financement – beaucoup plus risquée tant elle ciale et solidaire. Elle doit également ‘crowdfunding’)7. Comparé à des serait incohérente avec le reste du aligner ses activités de commerce structures telles que le Crédal, positionnement. équitable avec les autres théma- Triodos ou la banque coopérative tiques de l’organisation (démocratie en création New Bd, qui canalisent

48 LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude MARS 2013 En termes tuer un vivier important de res- naturels ayant des bénéfices pour de stratégies sources financières, notamment la santé, des propriétés énergi- commerciales dans le contexte de généralisation santes, etc. Ce positionnement des politiques RSE des entreprises. serait cohérent avec le principal • Augmenter les ventes en conti- Dans le cas des administrations, canal de vente d’Oxfam (magasins nuant d’optimiser le réseau de et malgré des budgets en baisse, spécialisés) ainsi qu’avec le profil magasins dans les villes à haut les récentes avancées juridiques de nombreux consommateurs de potentiel, et en segmentant l’offre au niveau européen devraient faci- produits équitables, à la recherche en fonction des potentiels de liter leurs achats de produits équi- d’avantages santé / goût9. De plus, vente de chacun des magasins. tables (voir chapitre 2, ‘absence ce type de produit pourrait per- L’objectif ici pour Oxfam-Magasins de cadre légal’). mettre de davantage déplacer la du monde est de réellement ren- • En ce qui concerne le développe- valeur ajoutée vers le Sud (ex. pro- forcer son canal de vente propre, ment de produits, il serait pertinent duction et transformation valori- en améliorant son efficience aux de monter le positionnement en sant le savoir-faire et les connais- niveaux commercial et opération- gamme de certains d’entre eux, sances ancestrales des nel (‘le bon produit, au bon en- pour la plupart situés dans la producteurs). droit’). De manière plus générale, moyenne, voire le bas de gamme. • Concernant les aspects environ- la phase de maturité qu’a au- Il existe pourtant un nombre très nementaux, le calcul de l’empreinte jourd’hui atteint le commerce équi- important de consommateurs carbone du réseau et/ou d’un table impose d’augmenter la base prêts à payer un prix plus élevé nombre sélectionné de produits (à des clients, au-delà des clients pour des produits de qualité supé- l’aide par exemple d’analyses de pionniers et ‘convaincus’. rieure (pas seulement éthique), en cycle de vie), dans une optique de • Dans la même veine, la cohérence particulier en termes d’aspects communication et de diminution générale de la communication doit santé et/ou environnement. de l’impact environnemental total, être améliorée, en intégrant en- Exemple : Oxfam-Magasins du pourraient améliorer à la fois les core plus la sensibilisation pen- monde pourrait développer de ventes et la crédibilité de l’organi- dant les transactions commer- manière plus importante, en col- sationf. Cette dernière piste sera ciales et en démontrant les laboration avec ses partenaires et/ explorée plus en avant dans l’une impacts concrets tant recherchés ou fournisseurs, la vente de pro- des prochaines études d’Oxfam- par les ‘consomacteurs’. duits alimentaires ou cosmétiques Magasins du monde pour 2013. • Les stratégies de diversification des canaux de ventes doivent éga- lement être renforcées. C’est par- NOTES sources ticulièrement vrai pour les produits a Détricotage des acquis sociaux, baisse des sub- 1 Jacquiau C. Septembre 2007. Max Have- d’artisanat, qui restent majoritai- sides publics, diminution du pouvoir d’achat des laar ou les ambiguïtés du commerce citoyens, réduction du temps libre liée à la flexibi- équitable. Le Monde Diplomatique. rement vendus (85%) dans le ré- lité et à l’augmentation du temps de travail, etc. 2 Huytbrechts B. January 2010. Explaining b Un plan Dynamique Des Bénévoles (DDB) a été défi- Organisational Diversity in Fair Trade Social seau propre d’Oxfam-magasins du ni et voté à l’assemblée générale d’octobre 2011, Enterprises. PhD thesis in management sciences. couvrant les différents aspects de la gestion des 3 Huytbrechts B. 2010. Exploring the diversity monde. équipes : leur fonctionnement, l’accueil des nou- of fair trade social enterprises. Working Paper veaux bénévoles, la formation et l’évaluation. Le European Research Network no. 10/02. • Les ventes extérieures (ex. B2B, plan est en pleine phase de mise en application. 4 Huytbrechts B. 2012. Organisation de c Sur base d’un entretien – 24/10/2012. commerce équitable. Dictionnaire du com- marchés publics) constituent éga- d Banque coopérative à destination des merce équitable, éditions Quae. particuliers, des acteurs de l’économie 5 Oxfam-Magasins du Monde. 08/11/2012. lement des pistes intéressantes, sociale et du monde associatif belge. Plan stratégique 2013-2014. e Exemples : fondation Bill et Melin- 6 Oxfam-Magasins du Monde. Octobre 2011. notamment parce que ce type de da Gates, Warren Buffett. Plan de dynamique des bénévoles. f L’amélioration de l’impact environnemental 7 Riot S., Novel A.S. 2012. Vive la co-révolution ! Pour marché est beaucoup moins des produits, la relocalisation, etc. sont des une société collaborative. Editions Alternatives. tendances lourdes en matière de consommation. 8 Veillard P. Octobre 2012. La finance responsable concurrentiel que celui de la dis- Ce sont souvent par exemple les critères les plus et solidaire. Analyse Oxfam-Magasins du Monde. importants sur les marchés publics ou dans le 9 Daniel M., Bricas N., Sirieix L. Mars 2010. tribution. A conditionner de sélec- B2B. Oxfam-Magasins du monde doit davantage L’intérêt pour les petits producteurs s’adapter à cette demande, en améliorant par fonde-t-il la consommation de produits tionner des entreprises crédibles, exemple les modes de production, le transport, équitables ? Cahier Agricole, vol. 19. etc. de ses produits. Même si les enjeux sont ce canal de vente pourrait consti- beaucoup plus larges, la vente de produits paysans Nord participe de cette logique.

LE COMMERCE EQUITABLE aujourd’hui étude mars 2013 49 © Rajendra Shaw/Oxfam

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