Les tôles fines d’acier revêtu à l’honneur

Editorial produit final. Ceci n’est pas vrai pour A l’heure actuelle, Galvalange les ‘plats’ dont la matière première, en appartient à à part entière et Depuis plus d’un siècle, l’acier rime l’occurrence les bobines laminées, Giebel à un tiers. Dugal, une société au avec poutrelles, provient des pays environnants, ce qui indépendante, exploite la ligne de angles, fil et palplanches, bref comme explique en partie leur notoriété un revêtement de Dudelange, cédée en ‘produits longs’ sous tous leurs aspects, peu moindre. 2003 comme ‘remedy’ sur exigence production, promotion, application. Les trois sites de fabrication de de Bruxelles lors de la fusion Arcelor. Et pourtant le Luxembourg est éga- produits plats luxembourgeois se lement un producteur non négligeable déclinent comme suit : A l’occasion du congrès inter- de produits plats revêtus, dont le national InterZAC 2004, qui a pour volume annuel n’est pas loin du million - Galvalange : 2 produits revêtus à thème le développement de l’Aluzinc de tonnes. Il est vrai que la filière de chaud, Aluzinc et Alugal, et qui vient d’avoir lieu à Luxembourg production des produits plats revêtus du 6 au 10 septembre 2004, co-organisé est plus courte que celle des ‘longs’ - Giebel : l’électrozingué par Arcelor, ce numéro de la Revue de dont toutes les étapes se déroulent au l’Ingénieur est consacré à divers grand duché, de la ferraille jusqu’au - Dugal :le galvanisé à chaud. thèmes des aciers revêtus.

Avec un volume cumulé de plus de 50 millions de tonnes produites dans Une courte histoire de le monde entier par une trentaine de licenciés, l’Aluzinc démontre depuis plus d’un quart de siècle une résistance Galvalange et de son à la corrosion atmosphérique hors du commun. Sa tenue à la corrosion est reconnue équivalente à celle d’un acier produit Aluzinc galvanisé prépeint, nettement plus cher. Cette protection anticorrosion, inhabituelle pour un revêtement sur un support d’aciers de masse, résulte de l’action conjuguée de l’aluminium par Jean Lamesch et du zinc: L’aluminium protège le support en acier en formant un écran chimique vis-à-vis de l’atmosphère. Cette bar- La genèse de l’Aluzinc en 1969, est fabriqué depuis 1981 à rière d’alu est très stable dans la mesure Galvalange, filiale d’Arcelor. Dans la où la couche d’oxyde d’aluminium L’Aluzinc, que l’on peut décliner suite, les noms de Galvalume et qui se forme à la surface est insoluble Alu.. Zinc, se définit comme une tôle d’Aluzinc seront employés de façon dans la plupart des milieux. Une fine d’acier revêtue d’un alliage com- interchangeable. résistance de très longue durée est posé d’aluminium (55%), de zinc L’Aluzinc vise essentiellement le ainsi assurée. (43.5%) et d’une touche de silicium secteur du bâtiment métallique ou il Quant au zinc, il agit comme dans (1.6%). Dans ce produit, la solidité de s’emploie comme matériau de toiture le cas des aciers galvanisés, mettant l’acier se conjugue avec la protection et de bardage. C’est dans ce secteur en œuvre sa protection cathodique du zinc et l’inaltérabilité de l’alumi- d’activités que ses propriétés essen- partout où le fer est mis à nu, tel sur les nium. Si l’on ajoute la beauté naturelle tielles, sa durabilité et son aspect, se tranches et les rayures accidentelles. du métal et un fleurage unique, on mettent le mieux en valeur. En fait il se corrode à sa place, un obtient un produit sidérurgique bien phénomène également connu sous le particulier, conçu dans le respect de Parmi les autres applications, il nom de protection sacrificielle, dé- l’environnement. convient de citer l’industrie générale, couverte en 1829 par le physicien anglais L’Aluzinc, encore appelé Galva- dont notamment l’électroménager et Michael Faraday. L’effet combiné de lume aux USA, pays où il a été inventé les boîtiers électriques. ces deux mécanismes rend l’Aluzinc

Revue Technique Luxembourgeoise 3/2004 107 plus performant que les aciers protégés difficultés financières, était obligée en terme de pollution atmosphérique. par le seul zinc ou le seul aluminium, de vendre BIEC, qui fut reprise par la La tôle galvanisée, longtemps la et permet de garantir la tôle ‘Aluzinc sidérurgie australienne. championne en matière de résistance 185’ pour une durée de 20 ans contre Pour stimuler l’entraide et favoriser aux aggressivités atmosphériques, la perforation corrosive. le flux d’information entre les divers s’est avérée insuffisante, défaillance L’Aluzinc a été inventé à la fin des licenciés, l’association ZAC organise qui a fini par déclencher la recherche années 1960 aux USA chez Bethlehem tous les 2 ans un congrès international de nouveaux revêtements, plus per- par l’ingénieur-inventeur Angelo appelé InterZAC. C’est ce congrès, formants. R. Borzillo, et commercialisé à partir de co-sponsorisé par Arcelor, qui a eu 1972. Au fil des années plusieurs di- lieu à Luxembourg en septembre 2004 Les débuts de Galvalange zaines de licences ont été vendues. Celle (voir l’article page 115.) de Galvalange a été acquise en 1978. Le tableau 1 renseigne brièvement Galvalange est un enfant de la Au début des années 1980, Bethle- sur la genèse du Galvalume. A noter grande crise sidérurgique d’il y a 30 hem a créé une société BIEC Inter- que ce n’est pas par hasard que les ans, qui a frappé cette industrie avec national à la fois pour gérer les licences recherches pour un revêtement de une violence comme le monde de et pour animer une association meilleure résistance anticorrosive ont l’acier n’en avait plus connue depuis regroupant les producteurs mondiaux été entamées à la fin des années 1950. la seconde guerre mondiale. A une du Galvalume. Il s’agit de la ZAC, En effet, c’est à cette époque qu’aux flambée de la consommation d’acier acronyme de ‘Zinc Aluminum Coa- USA, le développement industriel a au début des années 1970, avait ters’. Au milieu des années 1980, atteint son maximum de l’après guerre, succédé le choc pétrolier de 73, suivi Bethlehem qui se débattait dans mille avec comme conséquence des sommets à la fin de 74 de l’effondrement complet

CHRONOLOGIE DES DEBUTS DU GALVALUME 1959 - 1974

Bethlehem Steel : début des recherches sur des revêtements pour tôles fines, à 1959 résistance anticorrosive supérieure à celle de la tôle galvanisée

Recherches de nouveaux alliages, notamment à base d’aluminium et de zinc, par 1962 Ange Borzillo et Jim Horton, ingénieurs de recherche chez de Bethlehem Steel

Premiers essais sur la ligne pilote du Homer Research Lab de Bethlehem Steel ; la 1964 gamme de 35-55% aluminium apparaît comme très performante. Le silicium à 1.5% est identifié comme un élément clef.

1964 Début des tests d’exposition atmosphérique des échantillons de la ligne pilote.

Premiers essais industriels et nouveaux tests d’expositions atmosphériques à long 1965 terme. La composition 55%Al se profile.

Deuxième série d’essais industriels et choix définitif de la composition :55% 1969 aluminium - zinc

1972 Lancement commercial du nouveau produit aux USA sous le nom de Galvalume.

1974 La sidérurgie australienne BHP devient le premier licencié Galvalume.

La sidérurgie SSAB devient deuxième licencié et produit le revêtement sous le nom 1979 d’Aluzink. Arbed et Cockerill acquièrent conjointement la licence ; leur nom de marque sera 1979 Aluzinc, emprunté au nom suédois.

Cession par Bethlehem Steel de BIEC à la sidérurgie australienne qui devient 1986 propriétaire des brevets Galvalume (et qui l’est encore en 2004).

Tableau 1

108 Revue Technique Luxembourgeoise 3/2004 du marché sidérurgique. A partir de exceptionnelle de Cockerill et de sa son souhait, qui figurait d’ailleurs déjà 1975, il était devenu évident que les société de vente, Phenix Works, dans dans les accords d’Hanzinelle, de années fastes des ‘Trente Glorieuses’ le domaine des produits revêtus et donner à la ligne la possibilité de étaient révolues. En peu de temps, considéraient cette société comme un produire également la tôle aluminiée, tous les sidérurgistes européens se prospect européen de choix pour le matière de base importante pour le retrouvaient dans une situation Galvalume. En 1976, au cours d’un marché des pots d’échappement financière désastreuse. Entrée dans sa voyage de promotion en Europe, les automobiles. Arbed n’y avait rien à phase aiguë au début de 1978, cette Américains avait dûment informé objecter et la ligne fut conçue pour crise générale de l’acier a fini par Phenix des avantages du Galvalume. accommoder deux cuves d’alliage toucher également la sidérurgie de Dès cette visite, la direction de Phenix liquide, dont une seule sera utilisée l’UEBL. Parmi quelques autres palliatifs, Works considérait ce nouveau produit durant les cinq premières années. la Société Générale de Belgique a comme une future opportunité, comme La structure juridique de Galva- alors suggéré à ses filiales de chercher un complément idéal au programme lange était un modèle du genre: les des terrains de collaboration. C’est de fabrication. L’idée de produire le deux partenaires avaient convenu de ainsi que les sidérurgistes des deux Galvalume était née pour ainsi dire créer une filiale commune fonction- pays ont entamé des entretiens des deux côtés de la table de nant comme centre de profit, avec une stratégiques pour trouver des possi- négociation belgo-luxembourgeoise et répartition 50: 50 des parts sociales, bilités de synergie et identifier des elle fut adoptée rapidement. dotée d’un management largement projets susceptibles de se prêter à des Au cours des négociations qui ont autonome pour les affaires journa- alliances durables . suivi, le principal interlocuteur de lières, avec un droit de regard sur la En juin 1978, ces idées ont abouti à l’Arbed était Phenix Works, le fleuron stratégie commerciale et dirigée par un protocole d’accord, finalisé à de Cockerill, l’unité la moins touchée un Conseil dont la présidence alternait Hanzinelle, en Belgique. Ces ‘Accords par la crise, et à cette époque, cham- tous les 2 ans entre Cockerill Sambre d’Hanzinelle’, ont stipulé que chacun pionne européenne de tôles revêtues. et l’Arbed. L’acier était fourni par les des signataires limiterait ses investis- Elle pouvait se flatter d’opérer à ce maisons-mère à raison de 50:50, et la sements futurs aux domaines qui lui moment la plus grande concentration mise à disposition pour les deux étaient propres, sauf pour des produits mondiale de lignes de revêtement. sociétés de vente respectait la même nouveaux, qui ne fussent fabriqués ni Une étude de marché commune, proportion. par l’un ni par l’autre des deux signa- effectuée en mai 79 par les départe- Malgré les inévitables frictions entre taires. Pour ces types de revêtements, ments Marketing des deux partenaires, les deux partenaires, le sentiment d’être l’idée d’une joint venture était expli- permettait d’envisager à terme une engagé dans une même aventure a citement retenue dans les accords. production de quelque 200.000 tonnes prévalu, et le navire Galvalange, avec C’est ce codicille des accords d’Han- de Galvalume. L’accord fut dès lors à bord deux capitaines, a su garder le zinelle qui a rendu possible la création signé. bon cap, à travers des mers parfois de Galvalange. Le 10 octobre 79, les négociations houleuses – jusqu’à la grande fusion Le passage des Accords d’Hanzi- aboutirent avec Bethlehem Steel. Le d’Arcelor qui a entraîné des change- nelle à l’Aluzinc s’est effectué de la contrat de licence se résumait comme ments importants dans cette cons- manière suivante: suit: tellation. M. Paul Metz, à cette époque direc- Arbed-Cockerill obtenaient l’exclu- Dès l’origine, la société Galvalange teur général de l’Arbed, avait appris sivité de production au grand-duché et son produit se distinguaient par l’existence du Galvalume aux USA, à et, plus important, le statut de licencié plusieurs spécificités, qui n’existaient l’occasion d’un congrès sidérurgique. unique dans la Communauté Euro- dans aucune autre entreprise de ce Il a compris de suite que le critère de péenne jusqu’en 1984. La licence de type, mais qui ont été clairement ‘revêtements nouveaux’ permettait de vente était valable - mais non exclusive perçues par les ‘pères fondateurs’. Une voir dans ce produit une possibilité de - pour la CEE et pour tout autre pays à première spécificité était inhérente aux joint venture avec la sidérurgie belge l’exception de ceux où Bethlehem statuts sociétaires mêmes. Sur tous les et il orienta les négociations vers le Steel détenait des licences ou espérait plans, le management de Galvalange Galvalume à partir de décembre 1978. en vendre, et ceux pour lesquels le devait constamment se laisser guider Les accords d’Hanzinelle avaient gouvernement américain avait décidé par la plus stricte neutralité vis-à-vis prévu des fermetures bilatérales de un embargo. En contrepartie, Arbed- des deux maisons-mère, concurrentes diverses usines, au nombre desquelles Cockerill s’engageaient quant aux en dehors de Galvalange, et veiller au figurait le laminoir ‘Steckel’ à Dude- redevances convenues pour la cession principe d’égalité régissant les droits lange. La création d’une unité com- de la licence - échelonnées jusqu’en 91, et devoirs de chacun des deux par- mune de revêtement au Luxembourg c’est à dire 10 ans à partir du début de la tenaires. La souveraineté de la com- put dès lors se présenter comme une production - et à l’obligation de produire mercialisation était de la compétence compensation de cet arrêt. Dans la le Galvalume à partir de juin 1982. de Galvalange qui en tant que centre suite, Metz fit avancer le projet Gal- Le projet de la future ligne de de profit était appelée à former avec valume dans ce sens, avec toute son revêtement prenant forme, il fallait lui les directions commerciales des autorité, contre le poids de la tradition donner un nom et on s’accordait sur associés, à cette époque TradeArbed des produits longs, et également contre celui de ‘GALVALANGE’, acronyme et Eurinter, un genre de ‘triumvirat’ des réticences internes. On peut en de GALVA-lume et de Dude-LANGE. pour coordonner les actions commer- vérité lui attribuer la paternité de Le 21 janvier 1981, Galvalange fut ciales. Ainsi par exemple, tout accrois- l’usine de Galvalange. fondée comme société à responsabilité sement de la production – et il y en eut Pour ce qui était du côté belge, les limitée, de droit luxembourgeois. quasiment tous les trimestres pendant responsables de Bethlehem Steel Pour la conception de la ligne de deux décennies - devait se traduire par étaient conscients de la position Galvalange, Cockerill avait exprimé une augmentation identique et bila-

Revue Technique Luxembourgeoise 3/2004 109 térale des ventes des deux comptoirs, de l’Aluzinc était tributaire au London production d’Aluzinc une année avant augmentation dont le management de Metal Exchange de la cote fluctuante Galvalange et les Suédois étaient Galvalange devait surveiller le de deux métaux, de l’aluminium et du intéressés de leur côté à une colla- déroulement. La règle des 50:50 fut zinc, dont les prix n’évoluaient pas bortion avec Arbed et Cockerill. toujours respectée, en dépit des toujours dans le même sens. Comme L’entente entre les techniciens des approches commerciales souvent le prix de revient de l’Aluzinc se deux lignes a toujours été fructueuse différentes d’Eurinter et de Trade- comparait à celui du galvanisé, il pour les deux partis.SSAB tolérait Arbed. L’atout de Eurinter était sa s’avérait intéressant de savoir à tout même que Galvalange utilisait comme connaissance hors pair du marché des moment où son coût d’alliage se situait nom de marque ‘Aluzinc’, une variante aciers revêtus, celui de TradeArbed sa par rapport à celui de son concurrent1. de la trade mark suédoise ‘Aluzink’ présence sur tous les continents, avec Point positif pour Galvalange: pendant (avec un k final). Cette coopération de un dense réseau d’agences, héritées un quart de siècle, le rapport des prix qualité ne prit fin qu’à la fin de 2003, pour la plupart de la vénérable aluminium/zinc est toujours resté en quand SSAB était obligé, sous la Columeta, le premier Comptoir luxem- faveur de l’alliage. pression du marché automobile, bourgeois des métaux. Ce duo de Le 26 juin 1982, la ligne a démarré d’abandonner sa production d’Aluzink vendeurs - dont on aurait pu craindre la production d’Aluzinc, après un en faveur de galvanisé pour les au début qu’il ne fût pas fait pour chantier de 18 mois, à quelques jours carrosseries de voitures. s’entendre - fonctionnait en fait très de la date limite imposée par l’accord Les deux premières années de bien, la différence de culture des deux de licence (Tableau 2). Galvalange sont ainsi restées dans les entreprises constituant un stimulant mémoires comme très dures. Durant plutôt qu’une entrave. Les premiers 10 ans de les premiers mois, de juin à décembre Une deuxième particularité de Galvalange 1982, la ligne n’a guère produit plus Galvalange concernait la situation de de 20.000 tonnes. L’année suivante ses produits dans le cadre du Plan La production d’Aluzinc a donc fut déjà plus encourageante. L’équipe Davignon. Ce plan de restructuration démarré en juin 1982. D’emblée il en place a accompli un travail de la sidérurgie européenne était en apparut que la vente d’un produit remarquable et dès lors, la production vigueur entre 1980 et 1987 en appli- encore inconnu en Europe, au nom a augmenté régulièrement. Au cours cation du §58 du traité CECA concernant encore inconnu, par une usine encore de la troisième année, Galvalange a la situation de ‘crise manifeste’. Un inconnue ne manquait pas de poser atteint les 140 000 t, limite supérieure des buts en était d’obtenir un redres- des problèmes. A cela s’ajoutaient de imposée par le plan Davignon. Comme sement des prix par une raréfaction de nombreuses difficultés technolo- d’un autre côté, la capacité installée l’acier au niveau européen, raréfaction giques. Le démarrage de la ligne de s’élevait à 250.000 t, il était évident modulée par une subdivision des Galvalange fut des plus laborieux. Des que le problème de la rentabilité allait différents produits sidérurgiques en problèmes de toutes sortes ont bousculé se poser à court terme. Par conséquent, ‘classes’, régies par des règles et des les plans de vente et allongé les délais dès le moment où l’on a atteint le restrictions de tonnage différentes. Au de livraison. Plusieurs facteurs étaient plafond bruxellois, on a commencé à niveau des produits plats, le laminé à responsables de cet état des choses. envisager des moyens pour se dérober chaud était en classe 1A, le laminé à De tous les revêtements métalliques, à cette contrainte et on s’est tout froid en 1B, le galvanisé en 1C, et ce sont ceux incorporant de l’alu- naturellement intéressé au deuxième divers autres, dont l’aluminié, en 1D. minium qui sont les plus difficiles à revêtement prévu lors de la fondation Quelques rares produits échappaient à appliquer. Or, au début, l’expertise de la société, à savoir la tôle aluminiée. cette classification. métallurgique faisait encore grave- La composition de l’alliage pour ce Où mettre l’Aluzinc ? Si l’on s’était ment défaut à Galvalange. En outre, la produit est d’environ 90% d’alumi- borné – comme d’aucuns l’avaient ligne comportait plusieurs innovations nium, 8-11% de silicium, et de quelque proposé - à le considérer comme simple technologiques, telle par exemple la 3% de fer dissout, additif important substitut du galvanisé, il aurait dû cuve à induction électromagnétique qui, comme dans le cas de l’Aluzinc, faire partie de la classe 1C. Si par de d’alliage liquide, qui cumulaient collabore avec le silicium pour dimi- contre on partait du principe que les difficultés. L’accord de coopération nuer l’agressivité de l’aluminium en- l’Aluzinc était un produit nouveau, et avec la société sidérurgique suédoise vers les outillages d’acier tels le rouleau que sa teneur en zinc, inférieure à SSAB a certainement été d’une utilité de fond et les autres supports, immergés 50%, l’éloignait en fait du galvanisé, certaine. SSAB avait démarré sa en permanence dans le bain. la classe 1D aurait été la plus appro- priée. L’enjeu était considérable, puis- que dans la classe 1C, il se serait vu octroyer des restrictions de tonnage qui 1 Il est facile d’établir un critère pour déterminer si le coûts matière de auraient fortement entravé son décollage Aluzinc est plus économique que celui du galvanisé. Ceteribus paribus, tel commercial, alors que la classe 1D était est le cas si l’inégalité suivante est remplie: plus ‘libérale’ à son égard. Au grand soulagement des partenaires, la spé- PAl / P Zn < ( dAl / dZn - 0.45) / 0.55 cificité de l’Aluzinc l’a fait admettre D dans la classe 1 et son plafond de où PAl et P Zn représentent le prix à la tonne des 2 métaux; dAl et dZn leur production fut fixé au niveau adéquat densité, et les valeurs 0.55 et 0.45, leur pourcentage respectif dans de 140.000 tonnes par an, suffisant l’Aluzinc. Le terme de droite est égal à environ 2.7. Si donc le prix de l’alu pour un démarrage correct. est inférieur à 2.7 fois celui du zinc, il est plus économique de produire

Troisième particularité, à la dif- l’Aluzinc. En 2004 p.ex., PAl/ PZn = 1600$/1000$ = 1.6, donc bien en faveur férence du galvanisé, le coût d’alliage de l’Aluzinc

110 Revue Technique Luxembourgeoise 3/2004 Ce type de tôle s’utilisait comme ce pas et le Conseil de Galvalange On put songer à relâcher progres- matière première pour les pots s’exprima en faveur de la production sivement les restrictions du plan Da- d’échappement, un marché important d’aluminié, qui fut appelé ALUGAL vignon, y compris celles des produits qui représentait au moins 95% du (pour ALUminié de GALvalange). de la classe 1D dont faisaient partie volume de ce produit. Au milieu des Ce qui faisait défaut tant chez Arbed l’Aluzinc et l’aluminié. années 1980, on ne songeait encore que chez Cockerill était le knowhow L’époque était certainement propice guère à l’inox pour les pots d’échappe- détaillé de ce revêtement réputé depuis aux alliages du type aluminium-zinc. ment des voitures de masse, bien que toujours comme des plus difficiles à Maints centres R&D exploraient cette l’on se doutait que le jour où le fabriquer. Pour l’acquérir, il n’était idée et cherchaient de nouvelles appli- catalyseur allait arriver – et dans sa pas question de s’adresser aux con- cations. C’est dans cette veine que suite l’inox - les jours de l’aluminié currents européens, peu enchantés de vers 1985, Arbed Recherches a contri- seraient comptés. voir arriver Galvalange dans leur bué à l’élaboration d’un autre revête- Le premier producteur européen à chasse gardée. Par chance, Galvalange ment de type aluminium-zinc, cette entamer la fabrication de tôles a appris au bon moment que US Steel, fois-ci pour augmenter la durée de vie aluminiées à chaud a été Thyssen en le seul grand producteur américain des fils à vigne de TréfilArbed Bissen. Allemagne qui s’équipa d’une telle d’aluminié à côté d’Armco, avait arrêté C’était l’origine du fil CRAPAL, un ligne spécialisée en 1972. D’autres sa production et était prête à vendre produit qui a su trouver son créneau et sociétés ont suivi, et en 1986, quand son savoir-faire. Galvalange releva qui se vend bien depuis une vingtaine Galvalange a fait ses débuts dans ce alors cette suggestion et une délégation d’années. produit, il existait quatre autres Arbed-Cockerill se déplaça vers la producteurs d’aluminié en Europe. On mi-86 chez US Steel à Pittsburgh, La ligne no 2 de Galvalange et a vu que dès le début, les concepteurs pour y acquérir les connaissances de l’ALUZINC SPT de Galvalange avait prévu deux cuves base. Le démarrage de l’aluminié s’est interchangeables de revêtement déroulé sans problèmes. Vers la fin des années 80, le succès métallique, avec comme possibilité Vers cette époque, donc partir de de l’Aluzinc et de l’Alugal ont fait de produire un jour de l’aluminié. En 1986, le marché de la sidérurgie a approcher la ligne de la saturation. 86, les temps paraissaient mûrs pour commencé à se détendre sensiblement. Les dirigeants d’Arbed se sont alors

CHRONOLOGIE DE GALVALANGE

1974 Europe: début de la crise sidérurgique 1978 Arbed-Cockerill : signature des accords d’Hanzinelle 1979 Joint-Venture Arbed-Cockerill : début du projet Galvalange 1980 Finalisation du projet Galvalange 1980 Mise en place du Plan Davignon par la Commission de Bruxelles 1981 Galvalange S.à r.l. : constitution de la société (21.1.81) 1981 Pose de la première pierre (9.6.81) 1982 Démarrage de la ligne (29.6.1982) 1984 La production atteint le plafond du Plan Davignon 1986 Début de la production de l’Alugal (22.10.86) 1987 Fin du Plan Davignon 1989 Mort de Tadeusz Sendzimir, l’inventeur de la galvanisation en continu 1989 Galvalange : 1 million de tonnes cumulées d’Aluzinc 1990 Début de la construction de la ligne no 2 (1.1.90) 1991 Démarrage de la ligne no 2 (30.9.91) 1992 Développement de l’Aluzinc à film organique mince (‘SPT’) 1994 Production cumulée d’Aluzinc : 2 millions de tonnes 1997 Production cumulée d’Alugal : 1 million de tonnes 1998 Reprise de Cockerill par 2000 Presque 6 millions de tonnes Aluzinc + Alugal cumulées 2002 Galvalange fait partie d’Arcelor 2004 Le nom de marque ALUZINC est cédé par SSAB à Galvalange

Tableau 2

Revue Technique Luxembourgeoise 3/2004 111 faits forts de construire une seconde A cette même époque, d’autres a repris Cockerill et est devenue ligne. Une telle éventualité avait été sidérurgistes européens commençaient propriétaire à 50% de Galvalange. Il y envisagée dès le début, et les halls et à s’intéresser à ces nouveaux produits eut un calme relatif pendant quelque les caves abritant les cuves avaient été organiques dits ‘filmogènes’ et à temps, puis en février 2001, l’annonce conçues de façon à rendre une mobiliser une aide CECA de recherche qu’une grande fusion était en train de extension relativement aisée. Cocke- et de développement. La société alle- se faire captivait tout les esprits. A rill, réticente au début, a fini par se mande de prétraitement de métaux, Galvalange, on sentait bien que la fin laisser convaincre. CHEMETALL, contribua de façon d’une longue période de 20 ans était La seconde ligne ne devait pas significative au projet par la mise au proche. En 2002, Arcelor fut constitué, être une copie conforme de la point d’un film organique mince à partir des trois maisons fondatrices première. D’abord la technologie compatible avec l’Aluzinc. Depuis 92, Arbed, Aceralia et Usinor. avait évolué, et il fallait éviter de l’application en continu de ce film se Intégrée sans bruit ni difficultés au répéter les points faibles de l’an- fait sur une machine spéciale, un nouveau Groupe, Galvalange fait désor- cienne ligne. Par ailleurs, les enducteur appelé Chemcoater, capable mais partie de l’Unité Opérationnelle départements des ventes, surtout d’étaler le produit organique en une Centre d’Arcelor. Les liens avec les celui de Cockerill qui passait couche fine et homogène, épaisse actionnaires d’antan sont devenus sans beaucoup d’Aluzinc dans les marchés seulement de 2 à 3 micromètres. Ce objet. L’ancestrale rivalité entre Arbed de la grande exportation, avaient film relève du type Special Protective et Cockerill qui a déteint pendant 20 constaté au fil des ans une évolution Treatment, et le revêtement ainsi traité ans sur le destin de Galvalange, dans vers des épaisseurs d’acier fines que fut appelé Aluzinc SPT. une alternance de zones claires et de la ligne no 1 ne pouvait pas produire. Avec ce film mince, le produit plages sombres, a disparu. Au sein du La construction d’une seconde ligne Aluzinc a gagné à tous les niveaux: il grand groupe, l’Aluzinc se voit promu fut décidée en 1989, et, après un est plus agréable à contempler et à par une organisation plus vaste, qui chantier d’une année et demie à peu toucher, les taches de graisse s’enle- couvre des territoires et des marchés près, elle démarra la production en vent facilement, et sa résistance à la sans commune mesure avec ce qui 1991. Les deux lignes jumelles, corrosion s’en trouve encore augmen- existait auparavant. Il revient au nouvel construites en parallèle, avaient des tée. Progressivement, les autres ensemble industriel d’assurer le caves communes qui abritaient 3 cuves. producteurs de Galvalume ont égale- développement du produit en Europe La cuve centrale était utilisable par ment adopté cette technologie. Dans où il se trouve encore à la traîne par chacune des deux lignes. le courant des années 90, elle fut rapport aux régions asiatiques. Galva- Une amélioration importante de transposée au cas des revêtements lange saura également mieux résoudre l’Aluzinc a marqué le début des années galvanisés habituels. Au début du 21e ses problèmes d’approvisionnement 90. Les huiles et les produits de siècle, les films organiques minces et en bobines du fait de l’augmentation lubrification, utilisés par certains les revêtements métalliques se sont du nombre des laminoirs. Par sa clients transformateurs, laissaient sur soudés en un couple inséparable et proximité géographique, celui de la surface du revêtement des taches constituent une technologie à part. Florange, ancien site Usinor, est indélébiles. De même, des gants de devenu un fournisseur “naturel”. Le travail sales fasaient apparaître des Epilogue produit profitera de la politique empreintes inesthétiques et quasiment générale du groupe, comme en général, impossibles à enlever. Le ‘respon- Galvalange et son produit ont évolué les vides et les pleins se dessineront sable’ de la formation des taches était de façon positive tout au long des dorénavant sous l’égide d’Arcelor. l’aluminium du revêtement. Des années 1990, qualité, productivité et L’Aluzinc continue à bien se porter recherches plus détaillées ont fait notoriété du produit allant en augmen- dans le nouveau Groupe - et la Formule ressortir que le seul remède au pro- tant. Magique des 55%AlZn à faire ses blème des taches consistait à enduire Vers la fin du millénaire, les choses preuves - au point qu’on est tenté de le revêtement métallique d’un fin film ont commencé à bouger du point de parier que les meilleurs jours sont organique transparent. vue de l’actionnariat. En 1997, Usinor encore devant lui.

112 Revue Technique Luxembourgeoise 3/2004