Le Cinéma D'henri Verneuil
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Emmanuel Laborie Emmanuel Laborie Emmanuel Le Cinéma d’Henri Verneuil ----------------------------INFORMATION---------------------------- Couverture : Classique [Grand format (170x240)] NB Pages : 298 pages - Tranche : (nb pages x 0,055 mm)+2 = 18.39 Le Cinéma d’Henri Verneuil ---------------------------------------------------------------------------- Le Cinéma d’Henri Verneuil Emmanuel Laborie 2 22.86 764716 2 2 Remerciements Je remercie toutes celles et ceux qui m’ont accordé de leur temps pour me parler de leur collaboration avec Henri Verneuil, autant que celles et ceux qui, par leur aide technique ou leurs simples encouragements, ont permis à ce livre de se réaliser. Muriel Albouze, Daniel Argonovitch, Rémi Brunelin, Jean Gaven, Christophe Gilles, Pierre Gillette, Philippe d’Hugues, Maurice Jarre, Patrick Malakian, Virginie et Jean-Claude Martinet, Pierre Mondy, Claude Pinoteau, Edmond Richard, Jacques Saulnier, Bernard Stora, Nathalie Tampere, Nathalie Vergara, Patrick Wiseman. Ainsi que le personnel de la cinémathèque de Toulouse et le personnel de la BIFI qui m’ont permis l’accès à des documents précieux. Ce livre est dédié aux personnes que j’ai rencontrées au moment de sa rédaction en 2006/2007, et qui depuis ont disparu : Jean Gaven, Maurice Jarre, Pierre Mondy, Claude Pinoteau et Jacques Saulnier. 2 3 4 2 Henri Verneuil reste un des cinéastes les plus populaires du cinéma français. Sa réputation auprès des cinéphiles est en train de s’inverser, la qualité de ses films, certains devenus cultes, n’ayant pas été démentie au fil du temps. Sur les 34 qu’il a réalisés en 40 ans de carrière, plus d’un s’est joué à guichet fermé. Il est un réalisateur connu des gens qui allaient voir un Verneuil en salle, autant que des plus jeunes qui ont découvert La Vache et le prisonnier, Le Clan des Siciliens ou Peur sur la ville sur le petit écran. Cinéaste à la tête d’une filmographie d’une grande diversité, la plupart des films de Verneuil ont été des succès commerciaux considérables. A relire ce qui a été écrit sur lui, on se rend compte que l’ensemble de la presse l’a considéré avec objectivité. Pourtant, cette réputation de metteur en scène maudit par la critique l’a longtemps poursuivi, en raison de l’autorité des revues de cinéma qui le honnirent depuis ses débuts. Sachant que le cinéma s’apprécie dans la perspective de son histoire, ce livre propose de s’attarder un peu sur l’œuvre d’un réalisateur qui, à ce jour, n’a fait l’objet d’aucune analyse écrite. 2 5 6 2 Chapitre 1 L’enfant gâté du cinéma français L’entrée dans le cénacle Henri Verneuil est devenu réalisateur en 1951, l’année où André Bazin fonde Les Cahiers du cinéma, revue qui mena une croisade contre ce qu’elle nommait « La qualité française », terme dévalorisant employé envers la presque totalité de la production cinématographique hexagonale d’après guerre. Entre 1951, année de La table aux crevés, et 1955, Henri Verneuil ne tourne pratiquement qu’avec Fernandel. Six films en tout dans cet intervalle de cinq ans. Ce sont les années où le comédien marseillais devient un véritable monument national, en même temps que la bête noire de la cinéphilie. Aux yeux de celle-ci, les metteurs en scène qui le dirigent sont des hommes à abattre, quelles que soient les qualités de leurs films, et on considère Verneuil comme un de ceux-là. Entre 1945 et 1955, le cinéma français s’enrichit d’une trentaine de nouveaux noms, et de tous les cinéastes entrés dans le métier après la guerre, Verneuil est un cas à part. En effet, il est le seul dont les films atteignent d’aussi grands succès dès le début, autant qu’il sera le seul à rester en pleine activité jusqu’à un âge, à partir duquel les autres iront travailler pour le petit écran. Commercialement parlant, tout est dit, ce sont ses films qui vont dominer le marché, et ce, durant quatre décennies. Dans les années soixante, la nouvelle vague prend le pouvoir médiatiquement, mais la bonne santé économique du cinéma français est assurée par les films de Verneuil, et ceux de quelques autres (Gérard Oury qui triomphe lui aussi dès ses premiers films, Gilles Grangier en fin de carrière, Denys de la Patelière, même génération que Verneuil, dont les films, sauf deux d’entre eux, n’auront pas la même postérité, et ceux que nous appellerons L’autre vague, Molinaro, Deray, Lautner…) cinéastes bien mal aimés par la critique issue ou rattachée aux Cahiers du cinéma. Avec la naissance de cette revue, la frontière entre le cinéma d’auteur et le cinéma populaire fut plus que jamais 2 7 démarquée. La conséquence fut que le cinéma populaire ne cessa de s’avilir, autant que les spectateurs qui le plébiscitaient. Puis, avec les années, on en vint à abolir cette frontière, arguant que le cinéma était fait pour remplir les salles. Le corollaire fut qu’on eut tendance à juger sur la valeur des entrées en salle des films qui n’étaient pas faits pour les remplir. Pas la moindre ambiguïté au sujet de Verneuil qui entre dans la catégorie des cinéastes grand public, un public qu’il a toujours caressé dans le sens du poil, s’appliquant à lui donner ce qu’il avait payé au guichet. C’est dans la deuxième partie de sa carrière que Verneuil fut le plus attaqué, à une époque où, dans ses films, l’action prend le pas sur le contenu, principalement dans les films d’action qu’il tourne avec Jean-Paul Belmondo. La carrière de Verneuil se divise en deux parties. Dans la première, qui va de 1951 à 1960, ses films s’inscrivent dans la pure tradition du cinéma français populaire, dans le sens « qui représente le peuple en tant que milieu social » selon Duvivier, Carné, René Clair, avec des films comme Des Gens sans importance, Les Amants du Tage, Maxime, mais surtout de Pagnol, avec ses comédies taillées sur mesure pour Fernandel. Pagnol dont il adaptera d’ailleurs un scénario, Carnaval. Période qui contient beaucoup de films légers, comme Le Mouton à cinq pattes, L’Ennemi public n° 1, Le Grand chef, dont on ne peut pas dire que le temps leur ait rendu justice. Il y a toutefois un pas considérable entre ces films et Des gens sans importance, Les Amants du Tage, Maxime, et Le Fruit défendu. Si Verneuil n’avait réalisé que ces derniers, les jugements portés sur lui auraient sans doute été différents. A tord sans doute, mais les trop nombreux films qu’il a tournés pour Fernandel lui ont forgé une réputation qu’il ne méritait pas. Cette réputation laisse planer un doute sur la réelle qualité d’autres films qu’il tourne à la même période. Des films profonds, sombres, poétiques, liés à un univers très personnel. La critique, bien que positive, écrite par Truffaut pour Des Gens sans importance, sous entend déjà un « oui mais… ce n’est qu’un Verneuil. » Pourtant, à partir de films comme celui-ci, un grand réalisateur français est en train de naître, avec un univers, une vision du monde exprimée par un talent visuel incontestable. C’est l’époque où il raconte les histoires de petites gens et les films suivent le rythme de leur petite vie, faite de petites histoires autant que de grands drames. Ces personnages sont chauffeurs de taxis, routiers, laveurs de voitures, valets de maitre, manucures, peintres en bâtiment, vendeurs de grand magasin… ce sont des personnages du peuple, et c’est par ces personnages que le cinéma français est fréquenté depuis les années trente, jusqu’à l’avènement de la nouvelle vague qui les évacuera des écrans. Dès ses débuts, Verneuil a toujours su aller dans le même sens que le cinéma, en s’adaptant à toutes les tendances. Surfant en permanence sur la vague, il finit par en devenir l’écume. Lorsque Fernandel est, après la guerre, la vedette la plus populaire du cinéma français, Verneuil comprend que c’est avec lui qu’il faut travailler pour 8 2 avoir du succès. Quand les histoires de hold-up deviennent à la mode, depuis Du riffifi chez les hommes de Jules Dassin, il tourne Mélodie en sous-sol, son premier polar. Au moment du triomphe des superproductions guerrières américaines, il tourne Week- end à Zuydcoote, dont l’action se déroule exclusivement sur une plage, même décor que dans Le Jour le plus long. En réponse à la nouvelle vague, Verneuil, metteur en scène de studio, réalise L’Affaire d’une nuit, s’appropriant à sa manière l’esprit d’À bout de souffle. En pleine mode du spaghetti-western, il tourne La bataille de San Sébastian avec le musicien emblématique du genre, Ennio Morricone. C’est aussi la période à partir de laquelle ses films seront de plus en plus influencés par le cinéma de genre italien, alors à son apogée. Après le triomphe de Bullitt, il réalise Le Casse, film par lequel sera popularisé la poursuite en voiture dans le film policier européen. Les années soixante dix venues, alors que les cinéastes de sa génération se tournent vers la télé, Verneuil continue à suivre les courants. Le phénomène de L’Inspecteur Harry le conduit à tourner Peur sur la ville, quant au cinéma politique exprimé en France par les films d’Yves Boisset, il lui inspire Le corps de mon ennemi, I… comme Icare et Mille milliards de dollars. Enfin, lorsqu’il tourne Mayrig et 588 rue paradis, Claude Berri vient de triompher avec le principe du film en deux parties, déclinable en série télévisée. Quiconque fait un rapide inventaire des films français les plus populaires depuis la guerre, en comptera plus d’un réalisé par Henri Verneuil.