Ursula Langmayr, soprano Tora Augestad, soprano Uli Fussenegger, contrebasse Klangforum Wien Direction Beat Furrer Réalisation informatique musicale Ircam Éric Daubresse, Benoit Meudic
BEAT FURRER Lotófagos I, pour soprano et contrebasse [ CRÉATION FRANÇAISE
BEAT FURRER Lotófagos II, pour deux voix, septuor et électronique, commande de Radio Classique/Fonds Mauricio Pollini, du Klangforum Wien et de l’Ircam-Centre Pompidou [ CRÉATION MONDIALE
[ ENTRACTE
Ensemble Court-circuit Direction Pierre-André Valade Ircam - Centre Pompidou LE TOURBiLLON DU TEMPS GÉRARD GRISEY Vortex Temporum, pour piano et cinq instruments
DURÉE DU CONCERT 1H30
PRODUCTION IRCAM-CENTRE POMPIDOU AVEC LE SOUTIEN DU FORUM CULTUREL AUTRICHIEN ET DE LA SACEM
CONCERT ENREGISTRÉIrcam ET RETRANSMIS - ENCentre DIRECT PAR RADIO CLASSIQUEPompidou VENDREDi 20 JUiN, 21H iRCAM, ESPACE DE PROJECTiON
Ircam - Centre Pompidou 2 | LE TOURBiLLON DU TEMPS BEAT FURRER LOTÓFAGOS I ET II
LOTÓFAGOS I LOTÓFAGOS II ANNÉE DE COMPOSiTiON ANNÉE DE COMPOSiTiON 2006 2008 EFFECTiF EFFECTiF Soprano et contrebasse 2 voix de femme solos, flûte contrebasse, DURÉE 2 violons, alto, violoncelle, contrebasse, 10 minutes accordéon et dispositif électronique ÉDiTEUR DURÉE Bärenreiter 15 minutes ÉDiTEUR Fondée sur un texte en espagnol de José Inédit Ángel Valente, cette pièce a été créée le 23 Cette pièce, commandée par Radio Classique/ janvier 2007 au festival UltraSchall à Berlin Fonds Mauricio Pollini, le Klangforum Wien par Rita Balta (soprano) et Uli Fussenegger et l’Ircam, a été réalisée à l’institut en collabo- (contrebasse). Il s’agit de la création fran- ration avec Éric Daubresse et Benoit Meudic çaise de l’œuvre. pour la réalisation informatique musicale. Il s’agit de la création mondiale de l’œuvre. Ircam - Centre Pompidou
Était-ce là le souvenir ?
« Nous étions dans un désert, confrontés musique, à l’issue duquel survient, à notre propre image que nous n’avions dans un vent chaud, un pressentiment : pas reconnue. Nous avions perdu la « Était-ce là le souvenir ? » Oubliées mémoire... » aussi la tristesse, la joie et l'existence de la mort, même si, grâce à elles, la per- Dans Lotófagos I, Beat Furrer fait planer, en ception humaine du temps a pu s’établir. soupirs répétitifs,Ircam un sentiment - Centred'infini. Le désert Pompidou est le lieu et le symbole du « Lotófagos » signifie « Lotophages » et non-souvenir. Renouant avec cette fait allusion aux compagnons d’Ulysse représentation de l’oubli, l’intempo- qui mangeaient des lotus pour perdre la ralité – archétype des compositions de mémoire. Il s’agit du souvenir perdu de Beat Furrer – devient le thème de la José Ángel Valente dans son texte mis en structure musicale.
Ircam - Centre Pompidou LE TOURBiLLON DU TEMPS 3 |
Estábamos en un desierto confrontados con Nous étions dans un désert, confrontés à notre nuestra propia imagen que no reconociéramos. propre image que nous n’avions pas reconnue. Perdimos la memoria. En la noche se tiende Nous avions perdu la mémoire. Sur la nuit una ala sin pasado. Desconocemos la melan- s’étend une aile sans passé. Nous ignorons la colí y la fidelidad y la muerte. Nada parece mélancolie et la fidélité et la mort. Rien ne llegar hasta nosotros, máscaras necias con paraît arriver jusqu’à nous, masques stupides las cuencas vacías. Nada seríamos capaces aux orbites vides. Nous ne serions capables de de engendrar. Un leve viento cálido viene rien engendrer. Un léger vent chaud souffle todavía desde el lejano sur. ¿Era eso el encore du sud lointain. Était-ce là le souvenir ? recuerdo? Fragments d’un livre futur, édition bilingue, traduction José Ángel Valente de Jacques Ancet, Éditions Ibériques José Corti, 2002
Régulièrement, le point de départ de l’on peut décrire de diverses manières : l’imagination sonore de Beat Furrer est inconnu, oubli, désert, mort. Les textes un instant – un instant où se passent des pièces se fondent tout d’abord sur un pourtant des choses invraisemblables. dialogue concis et exclamatif du drama- On retrouve notamment cela dans le turge Händl Klaus, extrait d’un appel de la théâtre musical, qui constitue le noyau plus haute importance : de ses œuvres récentes : FAMA (théâtre auditif, créé à Donaueschingen en 2005), Invocation (opéra, créé à Zurich en 2003), es könnte brennen Ircam - CentreBegehren (théâtre Pompidou musical, créé à Graz komm en 2003), Narcissus (opéra, créé à Graz du hörst mich / en 1994) et Die Blinden (théâtre musical, sieh mich an créé à Vienne en 1989). Le travail de Beat gib mir ein Zeichen / Furrer dans le domaine instrumental se öffne positionne autour du théâtre musical. ein wenig Dans ses compositions, la puissance den Mund apprivoise et forme, par sa précision et sa conséquence, les chiffres musicaux cela pourrait flamber viens de ces configurations élémentaires, tu m’entends / situées au centre du drame. regarde-moi Lotófagos I commeIrcam Lotófagos - II – Centreque Beat fais-moiPompidou un signe / Furrer a composé pour le festival Agora – ouvre sont des parties de sa nouvelle pièce de un peu théâtre musical Wüstenbuch, qui sera créée la bouche au Théâtre de Bâle. Il s’agit également d’une transition à un « autre » état, que
Ircam - Centre Pompidou 4 | LE TOURBiLLON DU TEMPS
On trouve ensuite un poème d’Antonio Machados, Soledades (« Solitudes »), qui ¿Mi amor?...¿Recuerdas, dime, habille le souvenir d’une représentation Meine Liebe?... Erinnerst de l’évanescence, avec des joncs alanguis, aquellos juncos tiernos, des coquelicot fanés et des fontaines du dich, sag, an die zarten, gelées. Les deux voix de sopranos agis- lánguidos y amarillo darbenden, gelben Binsen sent en deux parties étroitement liées, que hay en el cauce seco?... et reprennent la conduite serrée des vertrockneten Flussbett?... voix de l’œuvre précédente. À travers un ensemble de deux violons, un alto, un vio- ¿Recuerdas la amapola loncelle, une contrebasse, un accordéon, Denkst du noch an den Mohn, que calcinó el verano, une flûte contrebasse, se comprimant den der Sommer versengte, de plus en plus, la spirale des voix croît la amapola marchita, au centre des deux parties, en grandes den welken Mohn, den schwarzen exclamations. negro crespón del campo?... Krepp, Trauerflor des Feldes?... L’un des phénomènes sonores sur ¿Te acuerdas del sol yerto lequel se concentre particulièrement Entsinnst du dich der starren Beat Furrer dans Lotófagos II, résulte y humilde, en la mañana, d’une collaboration avec l’Ircam : und kargen Sonne, morgens, l’institut travaille sur la technique Wave que brilla y tiembla roto Field Synthesis (WFS), un procédé de die glitzt und zittert, splitternd sonorisation presque holographique qui sobre una fuente helada?... Ircam - Centrepermet une représentation Pompidou complète, über vereister Quelle?... variable et tridimensionnelle des sons Antonio Machado, Soledades, XXXIII dans l’espace. Réalisée dans cette première étape par le Mon amour ?... Dis-moi, te rappelles-tu Spatialisateur traditionnel de l’Ircam, ces tendres joncs, languides et jaunes, cette création sera l’une des premières dans le lit desséché du ruisseau ?... œuvres de chambre qui utilisera la WFS, permettant une nouvelle caractérisation Te rappelles-tu le coquelicot de la projection dans l’espace. que l’été calcina, le coquelicot fané, Marie Luise Maintz crêpe noir sur la campagne ? Traduit de l’allemandIrcam par Aude - Grandveau CentreTe rappelles-tu Pompidou le soleil glacé, humble, du matin, qui brille et tremble, brisé, sur une fontaine gelée ? Poésies, édition bilingue, traduction de Sylvie Léger et Bernard Sesé, Éditions Gallimard, 1973
Ircam - Centre Pompidou LE TOURBiLLON DU TEMPS 5 |
À PROPOS DE LA SPATIALISATION riches et bruités de ces quatre sources qui troublent leur identification respective. par Éric Daubresse & Benoit Meudic L'accordéon et le quatuor fournissent un matériau plus homogène, une couche magnétisée qui se polarise tantôt dans Beat Furrer, qui a déjà utilisé le dépla- un sens, tantôt dans l'autre pour dis- cement de musiciens aussi bien dans tordre la perception et en accentuer les ses propres œuvres (FAMA) que dans ambiguités. Les défis à relever sont celles qu'il a dirigées comme chef, a nombreux : comment permettre d'am- souhaité prolonger ses expérimentations plifier ces processus d'identification à l'aide des outils électroniques de spa- ou d'opposition, comment réduire le tialisation de l'Ircam. masquage des sources virtuelles par les Pour cette nouvelle création, il réalise sources instrumentales elles-mêmes, avec le Spatialisateur une ébauche des quelle lisibilité pour reproduire des fonctionalités que pourra offrir très trajets complexes, quels sont les seuils prochainement la Wave Field Synthesis, de perception à grande distance par en particulier ce qui touche à la per- des auditeurs en position statique ? ception de l'espace : par exemple, il Déjà perturbé par les phénomènes de trouble celle-ci par des effets de localisation dans l'espace, l'auditeur voit miroirs, grossissements, éclatements de plus sa perception du temps altérée et délocalisations d'une ou de plusieurs par des effets troublant la mémoire, mis sources simultanément. en œuvre dans la construction formelle L'écriture très articulée de la partie de la partition. Ircam - Centreinstrumentale et lesPompidou jeux de dynamiques subtils de la partition offrent un matériau Dans la mythologie grecque, les très intéressant pour cette probléma- Lotophages (ceux qui mangent du tique. La contrebasse joue souvent dans lotus), était un peuple mythique qui se des registres aigus, principalement en nourrissait exclusivement de la fleur surharmoniques. La flûte octobasse est de lotus. Selon la tradition, cet aliment également utilisée dans ses registres provoquait la perte de mémoire. Quand extrêmes. Ces instruments vont entrete- Ulysse et ses compagnons revinrent de nir des rapports très étroits avec les deux la guerre de Troie, ils furent pris dans voix de soprano. Il y a principalement une tempête ; après avoir dérivé pen- des jeux de contraste, soulignés par des dant neuf jours, ils abordèrent le pays figures mélodico-rythmiquesIrcam - Centre enche- des mangeursPompidou de lotus. Après les avoir vêtrées et des nuances dynamiques bien accueillis, les habitants leur extrêmes ; également des situations offrirent ces fleurs et ceux qui en goû- d'ambivalence, créées par des phéno- tèrent perdirent tout désir de retrouver mènes d'attraction réciproques, grâce leur foyer. Ulysse dut les entraîner de aux registres et aux timbres très proches, force vers les navires et les enchaîner.
Ircam - Centre Pompidou 6 | LE TOURBiLLON DU TEMPS GÉRARD GRISEY VORTEX TEMPORUM ANNÉE DE COMPOSiTiON Éléments d'analyse 1994 - 1996 EFFECTiF Flûte, clarinette, piano, violon, Vortex Temporum définit la naissance alto, violoncelle d'une formule d'arpèges tournoyants DURÉE et répétés et sa métamorphose dans 40 minutes différents champs temporels. J'ai ÉDiTEUR tenté ici d'approfondir certaines de mes Ricordi recherches récentes sur l'application d'un même matériau à des temps différents. Vortex Temporum (Le Tourbillon du temps) est une commande du ministère Trois Gestalt sonores : français de la Culture, de la WDR de Cologne, du Baden-Würtemberg et du un événement originel (l'onde festival Musica à Strasbourg. Elle a été sinusoïdale) et deux événements adja- créée le 26 avril 1996 au festival de Witten cents (l'attaque avec ou sans résonance et (Allemagne) par l’Ensemble Recherche le son entretenu avec ou sans crescendo) dirigé par Kwamé Ryan. Le premier Ircam - Centremouvement est dédié Pompidou à Gérard Zinsstag, le trois spectres différents : harmo- deuxième à Salvatore Sciarrino et le nique, inharmonique « étiré » et troisième à Helmut Lachenmann. inharmonique « comprimé »