Sur la piste des moulins de Balbigny à

Sur sa carte de la établie entre 1711 et 1714, Guéroult du Pas marque l’emplacement de quelques 12 moulins qui ont aujourd’hui disparu, pour la plupart. Ne se contentant pas de localiser ces nombreux moulins, la carte de Guéroult est d’une grande précision et permet d’observer les particularités de leur construction. On remarque pour chacun un détail intéressant : la présence d’une petite construction en pierre non maçonnée ou une petite digue retenant l’eau et la dirigeant sous la roue du moulin.

Partons à la découverte de ces édifices à travers une petite enquête historique sur leurs origines, leurs transformations et leur disparition.

Nb : Carte utilisée, par commodité pour resituer les moulins distinctement : « Défilés de la Loire roannaise », in : « D’un bords à l’autre, au fonds des gorges de la Loire entre Balbigny et Roanne » (1973), sur laquelle les repères des moulins ont été rajoutés.

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Guéroult du Pas indique que 2 moulins ont été détruits : le moulin de Saint-Priest sur la rive droite et celui de Grizelon sur la rive gauche près de . On peut imaginer qu’ils ont été engloutis par une crue ou dynamités lors du désenrochement en 1702. Le mystère reste entier…

Sur les 41 km qui séparent Balbigny de Roanne par le fleuve, on repère le « Moulin-Neuf de Madière , au- dessus de Balbigny sur la rive gauche, appelé jadis moulin Saint-Jourdin puis Saint-Tirard en 1824.

Le moulin de Flandres est situé, lui, sur la rive droite, en face du Moulin-Neuf.

Le moulin Lantrique , sur cette même rive, près de Pinay, sera détruit par la crue de 1792. Reconstruit il deviendra la propriété de Mathelin, puis de Claude et de Perrin. Au 19 ème siècle, il prendra le nom de son nouveau propriétaire, un certain Chevalard. Il appartiendra à la famille Montet jusqu’en 1930. Détruit lors de la construction du barrage de Villerest, on pouvait cependant encore apercevoir par temps de sécheresse - en 1987 - la roue de ce moulin.

Le moulin de la Vourdiat est-il appelé Lavordière par Guéroult ? On peut le supposer Il se situait près de Saint-Jodard, sur la rive gauche. Ce serait l’un des plus ancien s puisque son nom apparaît sur une pièce d’archive datée de 1414. Depuis la Révolution, plusieurs familles l’ont occupé : les Thévénon, les Daguet, les Barbier, les Dussot, les Chazelle, les Combe. Le dernier propriétaire est M. Besson : le moulin sera en activité jusqu’en 1960.

On sait que le moulin de La Roche , sur la rive droite, dépendait du château du même nom. C’est attesté en 1639 par la veuve du Seigneur de La Roche, tué à la guerre d’Italie, puis par son fils François-Bertrand de Vernoilles, écuyer. Reconstruit au 19 ème siècle, il deviendra l’un des plus importants. Son meunier en 1832 s’appelle André Laurent. 5 ans plus tard, la famille Peroton s’y installe et l’occupera jusqu’en 1879, date à laquelle on lui adjoint une huilerie. L’ Annuaire de la Loire nous confirme qu’une famille Prat (ou Pras ?) le fera tourner de 1902 à 1935. Il disparaît à son tour, noyé dans les eaux du barrage de Villerest.

Le moulin de Presle , toujours sur la rive droite près du « port de Presle », fait face à la chapelle de Chantois bâtie sur l’autre rive, sur la commune de . Très ancien également, il avait pour nom « moulin Fefsy ». Reconstruit en 1813, il a pour meunier un certain Pierre Vadoux en 1832. Le moulin de Presle sera le dernier moulin en activité dans la région ; Claude (ou Claudius) Delorme l’arrêtera en 1975 et il sera détruit en 1982.

Sur la rive gauche, Guéroult mentionne le moulin du Monarque . On trouve sa trace déjà en 1665, quand les frères Paparel, de Pommiers, s’intéressant à la navigation sur la Loire, envoient au roi une pétition pour demander l’autorisation de faire sauter ces maudits rochers qui l’encombrent. Ce document intéressant cite un moulin : « vis-à-vis de Cordelle, près du moulin et écluse du nommé Lemonarque »… et constitue la seule mention de ce moulin trouvée à ce jour.

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Le moulin Chantois est situé sur cette même rive, près d’un petit bac qui, en amont, permettait de traverser la Loire pour rejoindre Joeuvre. Il sera plus tard appelé le moulin Dumontet, du nom de son dernier propriétaire qui l’exploitera jusqu’à son décès en 1955.

Guéroult signale un moulin Grizellon détruit sur la rive gauche, non loin de la chapelle de Saint-Sulpice près de Villerest. Pourrait-il s’agir de Grézolon ? On peut le supposer, à la lecture d’un texte de 1671, année où le chevalier Jean Darcy, Seigneur d’Ailly, rend hommage pour moitié au prieuré de Marcigny pour un moulin « appelé Grézolon, autrefois de « Mergerie » situé sur la rivière Loire, paroisse de Saint-Sulpice-les- Villerest, avec écluse et avaloir pour prendre les poissons… » (cité par Alphonse Coste). Hélas ! Fausse piste ? Le moulin semble toujours exister en 1776, année où un cadavre est repêché « sur la rive gauche de la Loire en la paroisse de Saint-Sulpice-lez-Villerest, près du moulin appelé Grézolon, appartenant au sieur Barbier » (procès-verbal déposé aux Archives Départementales de la Loire). Ce moulin aurait-il été détruit à l’époque où Guéroult faisait ses relevés et reconstruit par la suite ?

César-François Cassini de Thury, dit Cassini III (1714-1784) dirige les opérations de levées de la carte du « Lionnois » [Lyonnais] entre 1757 et 1762. L’examen de cette carte célèbre atteste que 2 des moulins cités par Guéroult avaient déjà disparus à cette époque : le moulin d’Ougaret sur la rive gauche, près de Balbigny et celui de Garanion sur la rive droite, près de Pinay.

On ne peut quitter la Loire et ses moulins sans évoquer les « moulins flottants », appelés aussi « moulins-nefs » ou « moulins- bateaux ». Ces moulins pouvaient se déplacer pour choisir le meilleur courant. Une fois bien ancrés, ils restaient immobiles : leur roue à aubes ne servait donc pas à les faire avancer mais à faire tourner la meule. Mais ces moulins gênaient la circulation sur le fleuve, ce qui occasionnait de nombreux conflits avec les mariniers ! Des moulins -bateaux sous les ponts de Paris au Moyen -Age

En 1759, l’arpenteur Guillot indique sur un plan la présence à Commière d’un moulin « établi sur un bateau au-dessus d’un barrage fait de branches et de rames ». À Roanne même, un certain Bodard obtient en 1742 et 1743 les autorisations d’ancrer 3 moulins-bateaux sur le « béal des bouchers », qui commençait rue des Fossés et se jetait dans la Loire au nord de la rue des Charpentiers. Le béal des bouchers doit son nom à Louis Gouffier, 4 ème duc de Roannais, marquis de Boisy. Ce dernier avait en 1613 octroyé, contre rétribution, un droit de capter l’eau de ce ruisseau et d’obliger « tous les bouchiers [sic] de Roanne d’y débiter leur chair … attendu que ladite eau pourra recevoir et emmener les immondices existants épars audit Roanne » (cité par Jean Canard). Enfin, François III d'Aubusson, duc de La Feuillade, 6ème duc de Roannais, possédait en 1755 des moulins- bateaux à l’embouchure du : ils remplaçaient les moulins construits sur le bief des fossés du château de Roanne supprimés au 17 ème siècle.

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Pour en savoir plus :

Les moulins du Roannais / R. Garnier et R. Boiron, 1987-1988(3 vol.). 2942 F

D’un bord à l’autre au fond des Gorges de la Loire entre Balbigny et Roanne : inventaire touristique / Jean Canard, 1973. 3346 F

Jadis le chemin de halage : sites oubliés et disparus des Gorges de la Loire entre Forez et Roannais / Lucien Chancolon, 1998. 654 BF

500 moulins entre Besbre et Loire / Jean Canard, 1979. 2711 F

Avant qu’elles soient inondées. Les Gorges de la Loire de Balbigny à Roanne : inventaire historique, géographique, archéologique et touristique / Jean Canard, 3 ème édition 1980. 5466 F

Essai sur l’histoire de la ville de Roanne et de ses environs / Alphonse Coste, 1871, réédition 1981. 2702 F

Enfin, n‘oubliez pas ….

L’Association de sauvegarde des moulins de la Loire « La Loire apporte de l’eau aux moulins »

« C’est à l’initiative d’Isabelle Jonnard, Présidente des moulins de la Loire, qu’est née en 2010 cette association de sauvegarde des moulins ligériens. Professeur d’histoire–géographie, passionnée d’histoire et de patrimoine local, et surtout du moulin familial datant du 15 ème siècle, elle décide "d’apporter de l’eau aux moulins", en regroupant à ce jour une cinquantaine de moulins du département.

L’ASM LOIRE (Association des moulins de la Loire) est affiliée à la Fédération Française des Amis des Moulins (4000 adhérents), et s’est donné comme objectifs la défense, la sauvegarde et la protection du patrimoine molinologique.

Dans le Roannais, "la route des moulins" est en préparation, ainsi qu'un inventaire des moulins et du patrimoine molinologique du département. Des actions sont menées en lien avec la Fédération, ainsi que des sorties, des visites de moulins et des voyages…

Si vous êtes passionnés de patrimoine industriel, amoureux des moulins et de ce savoir–faire ancestral, adressez-vous à l’ASM LOIRE : siège social « le moulin des Mariolles » à Changy, 42310 tél : 04 77 64 38 15.

Vous pouvez également contacter le Moulin de Lespinasse (04 77 65 62 52) ou le moulin Juste à (04 77 65 65 22)."

(Extrait du bulletin de l'association) »

… et son site internet http://www.changy.fr/pages/associations-locales/association-de-sauvegarde-des-moulins-de-la-loire.html

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